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20/03/2024

RICK STERLING
De Dallas à Gaza : L’assassinat de John Kennedy fut une bonne chose pour les dirigeants sionistes de l’État d’Israël

Rick Sterling, Mintpressnews, 13/12/2023
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

Le président John F. Kennedy a été assassiné il y a soixante ans [22 novembre 1963]. S’il avait vécu et obtenu un second mandat, le conflit israélo-palestinien aurait évolué différemment. La voie vers l’apartheid israélien et le génocide à Gaza aurait peut-être pu être évitée.

Le président John F. Kennedy rencontre le Premier ministre israélien David Ben-Gourion à l’hôtel Waldorf de New York, le 30 mai 1961. Photo AP photoshopée par MintPress News

Au cours de son court mandat, Kennedy a considérablement modifié la politique étrangère des USA. Comme le montre le livre “JFK and the Unspeakable : Why He Died and Why It Still Matters” de James Douiglass, JFK a résisté à la CIA et au complexe militaro-industriel dans les politiques qu’il a définies à l’égard du tiers-monde et de l’Union soviétique. La guerre du Viêt Nam, l’assassinat du président indonésien Sukarno et l’hostilité persistante à l’égard de Cuba et de l’Union soviétique n’auraient pas eu lieu si Kennedy avait vécu et obtenu un second mandat.

Ce qui est moins connu, c’est que la politique de Kennedy s’est également opposée aux ambitions militaires et politiques de l’Israël sioniste. À l’époque, Israël n’existait que depuis treize ans. Il était encore en pleine évolution et la voie n’était pas encore tracée. La communauté internationale était résolue à trouver une solution de compromis concernant les réfugiés palestiniens de la Nakba de 1948. Lorsqu’Israël a attaqué l’Égypte et s’est emparé de la péninsule du Sinaï en 1956, l’administration Eisenhower a exigé qu’Israël se retire du territoire capturé. Israël s’est exécuté.

À cette époque, au début des années 1960, d’éminentes voix juives ont critiqué le racisme et la discrimination du gouvernement israélien. Des Israéliens comme Martin Buber ont attaqué Ben-Gourion et noté que « lors de la création de l’État, une égalité totale avec les citoyens juifs a été promise à la population arabe ». De nombreux Israéliens influents ont compris que leur sécurité et leur bien-être à long terme dépendaient de la recherche d’un règlement équitable avec la population palestinienne indigène.

Aux USA, la communauté juive était divisée et beaucoup étaient antisionistes. L’American Council for Judaism était influent et anti-nationaliste. Le caractère raciste et agressif d’Israël n’était pas encore gravé dans le marbre. Le soutien des Juifs usaméricains à Israël ne l’était pas non plus. Lorsque Menachem Begin est venu aux USA en 1948, d’éminentes personnalités juives, dont Albert Einstein, l’ont dénoncé. Selon eux, Begin, qui deviendra plus tard Premier ministre d’Israël, était un “terroriste” qui prêchait “un mélange d’ultra-nationalisme, de mysticisme religieux et de supériorité raciale”. De nombreux Juifs usaméricains avaient des sentiments mitigés et ne s’identifiaient pas à Israël. D’autres soutenaient Israël, mais à condition qu’il y eût une paix avec les autochtones palestiniens.

Il existe quatre domaines clés dans lesquels la politique de Kennedy différait sensiblement de celle qui a suivi sa mort.

John F. Kennedy rencontre des membres de l’American Jewish Committee dans le bureau ovale, avril 1962. Photo : Bibliothèque présidentielle JFK

 Kennedy n’était pas partial à l’égard d’Israël

L’administration Kennedy cherchait à établir de bonnes relations avec Israël et les pays arabes. Kennedy souhaitait étendre l’influence des USA à l’ensemble du Moyen-Orient, y compris aux pays amis de l’Union soviétique et en désaccord avec les partenaires de l’OTAN.

JFK a personnellement soutenu le nationalisme arabe et africain. En tant que sénateur, en 1957, il a critiqué l’administration Eisenhower pour avoir soutenu et envoyé des armes à la France dans sa guerre contre le mouvement d’indépendance algérien. Dans une présentation de 9 000 mots à la commission sénatoriale des Affaires étrangères, il a critiqué « l’impérialisme occidental » et a appelé les USA à soutenir l’indépendance de l’Algérie. Le président algérien Ben Bella, que la France avait tenté d’assassiner et qui était considéré comme beaucoup trop radical par de nombreux membres de l’OTAN, a reçu un accueil impressionnant à la Maison Blanche.

Kennedy a modifié les relations glaciales qu’il entretenait auparavant avec la République arabe unie (Égypte et Syrie) dirigée par Gamal Abdel Nasser. Pour la première fois, les USA ont approuvé des prêts en leur faveur. Kennedy a écrit des lettres respectueuses aux présidents arabes avant d’accueillir le Premier ministre israélien Ben Gourion à Washington. Les dirigeants arabes ont vu la différence et ont réagi avec reconnaissance. Ceux qui prétendent qu’il n’y avait pas de différence entre Kennedy et ses prédécesseurs ignorent que Nasser, Ben Bella et d’autres dirigeants nationalistes ont vu une grande différence.

En 1960, alors que Kennedy faisait campagne pour la présidence, il a pris la parole lors de la convention des sionistes d’Amérique. Il fait des remarques élogieuses sur Israël, mais exprime également le besoin d’amitié avec tous les peuples du Moyen-Orient. Il a déclaré que les USA devaient « agir rapidement et de manière décisive contre toute nation du Moyen-Orient qui attaque son voisin » et que « le Moyen-Orient a besoin d’eau, pas de guerre ; de tracteurs, pas de chars ; de pain, pas de bombes ».

Kennedy a dit franchement aux sionistes : « Je ne peux pas croire qu’Israël ait un réel désir de rester indéfiniment un État de garnison entouré de peur et de haine ». En maintenant l’objectivité et la neutralité sur le conflit israélo-arabe, Kennedy voulait éloigner les sionistes juifs des impulsions racistes, agressives et ultranationalistes qui nous ont conduits là où nous sommes aujourd’hui.

Kennedy voulait qu’Israël suive les règles

La deuxième différence dans la politique de Kennedy concerne le lobbying sioniste en faveur d’Israël. En vertu de la loi sur l’enregistrement des agents étrangers (FARA), les organisations qui promeuvent un gouvernement étranger ou font pression en son nom doivent s’enregistrer et rendre compte de leurs finances et de leurs activités. Sous la direction du procureur général Robert Kennedy, le ministère de la Justice a demandé à l’American Zionist Council (AZC) de s’enregistrer en tant qu’agent d’un pays étranger. L’AZC est l’organisation mère de l’American Israel Public Affairs Council (AIPAC).

07/05/2021

Des parties jusqu'ici censurées du journal intime de Ben Gourion sont rendues publiques : « Harceler les réfugiés palestiniens pour qu’ils aillent vers l’Est »

  عوفر اديريت עופר אדרת Ofer Aderet
Haaretz, 6/5/2021

Traduit par Fausto Giudice
Les journaux de David Ben Gourion, écrits entre 1948 et 1953, révèlent de nombreux secrets : la surveillance des juifs mizrahi (arabes), la tentative de faire partir les réfugiés palestiniens et les détails des viols commis par les soldats n'en sont que quelques-uns.

Dans l'une des pages de son journal, David Ben Gourion détaille les cibles surveillées par les agences de renseignement du jeune Israël, qui n'a pas encore un an. La liste, écrite de la main de Ben-Gourion, comprend des « sécessionnistes » (membres des milices Irgoun et Lehi, qui ne se sont pas pliés à l'autorité des institutions élues du Yishouv*), des « Juifs Mizrahi » (plus précisément les immigrants nord-africains vivant dans des camps de transit), des « partis politiques » (ses rivaux politiques) et le parti communiste israélien, Maki. Ben Gourion a établi cette liste après une réunion avec Isser Harel, le premier chef du Mossad et du service de sécurité Shin Bet, qui s'était plaint de ne pas avoir reçu suffisamment de fonds ou de personnel. Depuis que Ben Gourion a rédigé cette liste en 1949, elle est restée cachée dans son journal intime. Ce n'est que récemment, 72 ans après sa composition et 48 ans après la mort de son auteur, qu'elle a été rendue publique. L'Institut Akevot pour la recherche sur les conflits israélo-palestiniens, qui s'est battu pour obtenir la déclassification de documents conservés dans les archives gouvernementales, est à l'origine de ce développement. Akevot a demandé à l'Institut de recherche Ben- Gourion, propriétaire du journal, de lever la censure sur de larges pans du journal, car il n'y a aucune raison perceptible de les soustraire à l'examen du public en 2021. 
 « Les choses ne vont pas bien dans le Néguev. Une fois de plus, nos soldats (marocains) ont attrapé deux jeunes femmes arabes, les ont violées et tuées » 
Après vérification auprès des Archives d'État d'Israël, dont dépend l'Institut de recherche Ben-Gourion, ce dernier a accédé à la demande et a levé la censure sur certains documents. Dans un premier temps, les parties du journal couvrant les années 1948 à 1953 qui avaient été expurgées ou noircies ont été restaurées. La lecture de la version non censurée ne révèle aucun secret d'État, mais permet au lecteur de mieux comprendre divers événements historiques, sans oublier la façon dont l'auteur les a pensés et ressentis. Le 26 septembre 1948, Ben Gourion écrit sur les réfugiés palestiniens qui ont fui ou ont été expulsés de leurs maisons pendant la « guerre d'indépendance d'Israël ». Ben Gourion raconte une conversation qu'il a eue avec Yosef Weitz, le directeur du département des terres et du boisement du Fonds national juif. Les deux hommes, semble-t-il, étaient préoccupés par les tentatives de ces réfugiés de retourner dans leurs foyers en Israël. 

Pages manuscrites du journal intime de David Ben-Gourion. Photo Archives d'État d'Israël 
 

« Il y a des cas de réfugiés de Ramle et de Lod qui ont atteint Gaza en passant par Ramallah, croyant que de Gaza il sera plus facile de retourner à Ramle ou Lod. Que devons-nous faire ? », dit le journal, qui ne précise pas s'il cite Weitz ou s'il exprime la pensée de Ben Gourion.

La réponse se trouve dans la deuxième moitié de la phrase : « Nous devons les "harceler" sans relâche... Nous devons harceler et motiver les réfugiés du sud pour qu'ils se déplacent également vers l'est, puisqu'ils n'iront pas vers la mer et que l'Égypte ne les laissera pas entrer », écrit-il pour pousser ces Palestiniens vers la Jordanie. « Qui va s'occuper de ce harcèlement ? » se demande Ben Gourion dans son journal, répondant : « Shiloah, avec l'aide du comité de Weitz ».