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03/01/2024

Chili : ¡Compañero Ponce Lerou, presente !
Gabrielito file la combinaison du coffre-fort au Beaufissime

NdT

Le président chilien Gabriel Boric a annoncé à la fin de l’année 2023 que l’exploitation des gisements de lithium serait confiée à une entreprise mixte associant l’État chilien et la société SQM jusqu’en 2030, après quoi SQM contrôlerait entièrement l’exploitation jusqu’en 2060. La SQM (Société chimique et minière du Chili) a été créée en 1968 comme entreprise mixte privé-public d’exploitation du salpêtre. Ente 1983 et 1988, elle a été privatisée par Pinochet, qui l’a pratiquement offerte à son beau-fils Julio César Ponce Lerou, qui est aujourd’hui l’homme le plus riche du Chili. Objet d’innombrables enquêtes judiciaires pour ses pratiques mafieuses de détournements de fonds et de corruption, Julio César, alias “el yernísimo” (le Gendre Suprême, ou le Beaufissime), serait en prison dans un pays administré par un État de droit, ce qui n’est de toute évidence pas le cas dans le Chili du pitoyable Gabrielito. Ci-dessous 4 articles d’auteurs chiliens apportant leur éclairage sur cette affaire à faire pâlir d’envie tous les auteur du réalisme magique.- Fausto Giudice, Tlaxcala

 

 Urgences

Luis Casado, Politika,  2/1/2024

L’année 2024 commence par une escroquerie digne du Guinness des records, sans que personne ne s’en émeuve. Seules quelques voix se sont élevées pour alerter le populo sur l’énorme fraude en cours. Et nous invitons tous les nuls à s’opposer à cette ignoble tentative de nous passer à la moulinette...

Il y a quelques jours, -on était encore en 2023-, après le rejet du projet de Constitution concocté par des marmitons fascistes, la presse (sic) chilienne a rapporté ceci :

« le Président a fait un discours mesuré dans lequel il a souligné que les urgences sont ailleurs et il a clôturé le processus constitutionnel ».

À ce moment-là, -plus qu’énervé par la sollicitude soumise qu’il manifeste à l’égard des aumônes-, j’ai osé affirmer que la racaille politichienne s’accommodera de n’importe quoi tant que les « urgence » seront définies par les hommes d’affaires, bref, par les gros bonnets.

Il n’était pas nécessaire de s’armer de patience pour savoir quelles étaient ces « urgences » : livrer le lithium (et ce qui restait, s’il en restait quelque chose, de pudeur, de vertu et de décence) au beaufissime, celui qui, pendant la dictature, s’est payé SQM, à la grande satisfaction de la racaille politichienne que l’escroc a financée et continue de financer, comme on le fait avec les greluches tarifées.

Pour faire taire toute expression de gêne, faciliter la pénétration et accroître la jouissance, ce Soleil du XXIème siècle qui nous sert de président nous a donné quelques chiffres, tous liés à la masse d’argent dont disposera le trésor national, question d’activer le fonctionnement de nos glandes salivaires dans un réflexe pavlovien : Il nous avait récemment souhaité « d’être heureux » (sic), ce qui à proprement parler, comme on dit en France, « ne mange pas de pain », donc ne coûte pas un sou, bref  un synonyme simpliste du «  Dieu vous bénisse ».

Du pactole dont Ponce Lerou s’empare, du gigantesque pied de biche - outil indispensable aux voleurs désireux d’enfoncer des portes réfractaires - qui lui est offert pour ouvrir des marchés, négocier et recevoir des participations millionnaires d’investisseurs étrangers désireux de « placer » leurs capitaux oisifs... rien, pas un mot. En réalité, Ponce Lerou s’élève au rang de videur de bordel, celui qui arrête les clients indésirables à la porte ou qui l’ouvre en grand aux riches michés réguliers, généreux avec le petit personnel.

On a aussi impudemment exhibé comme argument une prétendue prouesse scientifique, de prétendues avancées technologiques réalisées par SQM que ni les Chinois, ni les Russes, ni même les Yankees ne sont près de découvrir, Benjamin Franklin, Charles de Coulomb, Louis Pasteur, Thomas Edison et Alessandro Volta sont des godiches comparés à côté de Ponce Lerou, on voit que la Vierge du Carmen est avec le Beaufissime, elle le protège et lui file des rencarts, que c’est une merveille.

Les âmes pieuses, de gauche à droite et de droite à gauche (mais... n’est-ce pas la même chose, Monseigneur ?) ont loué notre Soleil du XXIème siècle, vantant son « pragmatisme », une qualité qui placera le Chili très haut dans la liste des pays qui attirent les boucaniers, les filibusters, les corsaires et autres aventuriers, - que dis-je ! toute la Confrérie des Pirates des Caraïbes, qu’Emilio Salgari et Sandokan nous éclairent -, qui débarquent dans le but louable d’exploiter - c’est le cas de le dire - notre richesse autrefois nationale et nos travailleurs (Milei les appelle « capital humain »), pour ainsi engraisser  ceux qui débordent déjà de graisse, grâce surtout au fait qu’ils « graissent » de temps en temps leurs condottieri serviles, de droite à gauche et de gauche à droite, on ne peut pas dire qu’au moment de toucher leurs pourboires, ils soient à la ramasse.

Légèrement pressé par d’autres « urgences » -bien plus simples et domestiques que celles qui agitent notre Soleil du XXIème siècle-, j’ai osé évoquer ce sujet à l’aube d’une année qui commence comme un enfer, malgré les vœux sincères généreusement distribués à la fin de 2023, vœux qui, comme ceux de notre Soleil du XXIème siècle (être heureux), « ne mangent pas de pain », bref ne coûtent rien.

Le bradage du lithium à SQM à partir de 2030 est illégal

Julián Alcayaga Olivares, El Ciudadano, 2/1/2024

Le gouvernement, par l’intermédiaire de la CODELCO (Corporación Nacional del Cobre, Compagnie nationale du cuivre), a l’intention de céder le lithium à l’entreprise privée chilienne, chinoise et usaméricaine SQM, alors que depuis 1979, en vertu du décret constitutionnel DL 2.886, le lithium est réservé à l’État.

En outre, d’autres dispositions légales permettent de contester juridiquement, voire administrativement, cet accord entre CODELCO et SQM.

Voyons quelles sont ces dispositions légales.

1.- L’article 640 du Code civil stipule :

« L’État devient propriétaire de tous les biens pris à la guerre de nation à nation, non seulement sur les ennemis, mais aussi sur les neutres, et même sur les alliés et les nationaux selon le cas, et il en dispose conformément aux Ordonnances de la Marine et de la Course ».

Le code civil chilien étant entré en vigueur le 1er  janvier 1857, tous les biens pris lors de la guerre du Pacifique passèrent aux mains de l’État, et plus encore le Dépôt salin d’Atacama, qui n’avait pas de propriétaire, sauf peut-être les revendications des Peuples Atacameños.

2-Le 30 mai 1884, le président Domingo Santa María publia un décret, également signé par son ministre Ramón Barros Luco, qui stipulait ce qui suit :

« L’octroi de concessions pour des gisements de salpêtre, de borates et d’autres substances énumérées dans le décret susmentionné du 28 juillet 1877 est suspendu sur tout le territoire de la République, y compris les départements situés au nord du 23e  parallèle, et est abrogé ».

Le décret du 28 juillet 1877 permettait aux particuliers d’explorer et d’exploiter les gisements de salpêtre, de borates et « toutes autres substances salines qu’ils pourraient trouver dans les limites de leur propriété », ce qui fut abrogé par le décret de 1884.

3 - Par la suite, en 1888, le deuxième code minier chilien a été promulgué (le premier datant de 1874), dont l’article 2, paragraphe 5, établit ce qui suit :

« Nonobstant les dispositions des paragraphes précédents, l’État se réserve le droit d’exploiter les dépôts de guano sur les terres de toute propriété et d’exploiter les gisements de nitrates et de sels ammoniacaux similaires qui se trouvent sur les terres de l’État ou des communes, sur lesquelles aucune propriété minière privée n’a été établie par des lois antérieures ».

Ce code minier a encore renforcé la disposition établissant que, sur les terres de l’État, les nitrates et les sels similaires étaient réservés à l’État, y compris ceux qui se trouvent dans le Dépôt salin d’Atacama.

4.- Plus tard, les codes miniers de 1930 et 1932 ont établi la même disposition à l’article 4 des deux codes :

« Nonobstant les dispositions de l’article précédent, l’État se réserve les dépôts de guano et de pétrole à l’état liquide ou gazeux, situés sur des terrains de toute propriété, et ceux de nitrates et de sels similaires, d’iode et de composés de ces produits, qui sont situés sur des terrains d’État ou nationaux d’usage public ou des communes, à condition que sur les gisements susmentionnés n’ait pas été constituée, conformément aux lois antérieures, une propriété minière de particuliers, encore en vigueur » (c’est nous qui soulignons).

Par conséquent, depuis le décret suprême de 1884, jusqu’à l’entrée en vigueur de l’article 4 du code minier de 1932, modifié en 1979 par le Décret-Loi 2.886, il n’était pas possible de constituer une propriété minière sur les nitrates et les sels similaires du Dépôt salin d’Atacama, car ce gisement appartenait indéniablement à l’État, en vertu de l’article 640 du code civil.

6.- D’autre part, afin de garantir que la production agricole nationale puisse répondre aux besoins alimentaires, en 1940, sous le gouvernement du président Pedro Aguirre Cerda, la loi 6.482 a été adoptée, qui visait à garantir que le pays puisse produire les fertilisants dont il avait besoin. Dans ce but, cette loi a créé, à l’article 1er , le Conseil des fertilisants, auquel une série d’attributions ont été confiées, et pour donner plus de pouvoirs à ce Conseil, l’article 6 de cette loi stipulait :

« Les gisements de carbonate de calcium, de phosphates et de sels de potassium se trouvant sur les terrains publics ou nationaux à usage public, ou appartenant aux communes, sont réservés à l’Etat, à condition qu’aucune propriété minière privée en vigueur n’ait été constituée sur lesdits gisements conformément aux lois antérieures. En conséquence, à compter de la date de promulgation de la présente loi, aucune propriété minière ne peut être constituée sur les gisements contenant les substances indiquées dans le présent article ».

L’aspect pertinent de cette loi est que ce ne sont pas les substances minérales mais les gisements contenant des fertilisants qui étaient réservés à l’État, et que les particuliers n’étaient pas autorisés à établir des droits miniers sur un minéral ou une substance minérale, puisque c’était le gisement qui était légalement réservé à l’État.

Par conséquent, il existe une continuité absolue entre le décret du 30 mai 1884 du président Domingo Santa María et tous les codes miniers jusqu’en 1932, dans lesquels la propriété des nitrates et des sels similaires était interdite, et la loi 6.482, qui réservait à l’État « les gisements » contenant du carbonate de calcium et d’autres engrais.

Ce sont précisément ceux que l’on trouve dans le Dépôt salin d’Atacama, qui était déjà propriété de l’État en vertu de l’article 640 du code civil. La loi 6.482 a été en vigueur jusqu’en 1981, date à laquelle elle a été abrogée par le DL 3.557.

7.- Mais bien que la loi 6.482 ait réservé à l’État les gisements de carbonate de calcium, de phosphates et de sels de potassium, de nouvelles institutions ont été créées par la suite pour s’occuper des fertilisants, qui ont remplacé le Conseil des fertilisants dans ses droits et ses biens.

Ainsi, le 7 août 1942, le DFL 2-2281 du ministère des Finances prévoyait, entre autres, que les compétences et les ressources accordées au Conseil des fertilisants par la loi 6.482 seraient désormais exercées par un organisme dénommé « Institut d’économie agricole ».

Par la suite, le 12 mai 1953, le Décret ayant force de loi n° 87 du ministère des Finances a fusionné l’Institut d’économie agricole et l’Institut du commerce extérieur en une société commerciale autonome dénommée « Institut national du commerce ».

Le dernier paragraphe de l’article 1er du DFL 87 stipule:

« Toutes les autres attributions, droits et obligations de l’Instituto de Economía Agrícola échoiront à partir de cette date à l’Instituto Nacional de Comercio ».

9.- Enfin, le DFL 274 du Trésor, publié le 6/4/1960, a créé l’ »Entreprise de Commerce Agricole » (ECA), dont l’article 1er  des dispositions transitoires prévoyait :

« L’Empresa de Comercio Agrícola succède dans tout son patrimoine, ses biens, ses obligations et ses ressources à l’Instituto Nacional de Comercio, qui est supprimé à compter de la date de publication du présent décret avec force de loi » (DFL).

10 - L’Empresa de Comercio Agrícola, qui a eu une grande importance et activité sous les gouvernements du président Frei Montalva et de Salvador Allende, a succédé à l’Instituto Nacional de Comercio dans son patrimoine, ses biens et ses ressources, et est devenue en même temps propriétaire du gisement du Dépôt salin d’Atacama.

L’ECA a été en vigueur jusqu’en 1989, date à laquelle la loi 18.899 l’a remplacée par l’ « Empresa de Abastecimiento de Zonas Aisladas » (EMAZA, Société d’approvisionnement des zones isolées).

En résumé, jusqu’en 1989, en vertu de la loi 6.482, l’Empresa de Comercio Agrícola était propriétaire du Dépôt salin d’Atacama, car il contenait des fertilisants, notamment du carbonate de calcium et des phosphates, ce qui a été vérifié par une étude géologique du Dépôt salin d’Atacama, en province d’Antofagasta, réalisée par l’ « Instituto de Investigaciones Geológicas », en décembre 1969.

11 - Pour toutes les raisons énumérées ci-dessus, lorsqu’Anaconda, par l’intermédiaire de sa filiale Compañía Sudamericana Exploradora de Minas S.A., en 1969, a voulu constituer 75 000 propriétés dans le Dépôt salin d’Atacama et 4 500 dans le Dépôt salin de Tara, pour un total de 397 500 hectares de superficie,  elle n’a pas pu les constituer, car ces gisements étaient réservés à l’État, même si Anaconda a déclaré que les demandes concernaient le cuivre, le fer, le manganèse et “d’autres substances”.

Toute cette histoire législative que nous avons relatée est pratiquement inconnue, et même certaines de ces dispositions légales sont très difficiles à trouver.

12.- Par conséquent, en 1977, lorsque la CORFO (Compagnie de Développement de la Production) a établi les droits sur le Dépôt salin d’Atacama, presque sur les mêmes propriétés qu’Anaconda voulait constituer en 1967-69, ce gisement appartenait déjà à l’Empresa de Comercio Agrícola, qui était une société d’État, dotée de la personnalité juridique et de ses propres actifs, sur laquelle la CORFO n’avait aucune propriété ni aucun contrôle.

Or, la CORFO étant une institution de service public de l’État, ces propriétés minières constituées par elle dans le Dépôt salin d’ Atacama pourraient être considérées comme valides, précisément en vertu des dispositions légales résumées ci-dessus.

En revanche, la CORFO ne peut pas céder l’exploitation du lithium dans le Dépôt salin d’Atacama à des entreprises privées, en vertu de la disposition constitutionnelle suivante.

13 - En octobre 1979, la Junte militaire, « dans l’exercice de son pouvoir constituant" » a promulgué le décret-loi (DL) 2.886, qui stipule ce qui suit :

« Article 5 - En fonction de l’intérêt national, à compter de la date d’entrée en vigueur du présent décret-loi, le lithium est réservé à l’État .

Seuls les éléments suivants sont exemptés des dispositions du paragraphe précédent :

« a) Le lithium existant dans les biens constitués, sur le lithium ou sur l’une quelconque des substances du premier alinéa de l’article 3 du Code minier qui, à la date de publication du présent décret-loi au Journal officiel, avaient leur acte de mesure enregistré, étaient en vigueur, et dont la manifestation, à son tour, avait été enregistrée avant le 1er janvier 1979 » (c’est nous qui soulignons).

Cela signifie que le lithium a un statut différent de toutes les autres substances minérales concédables et non concédables, car le lithium est réservé à l’État, en vertu d’une disposition constitutionnelle, le DL 2.886 de 1979, qui est en vigueur.

Pour les raisons susmentionnées, le protocole d’accord, l’accord ou le décret suprême, quel que soit le nom qu’on lui donne, par lequel la CODELCO cède à SQM le lithium du Dépôt salin d’Atacama de 2030 à 2060, sans que la CODELCO ait les pouvoirs légaux ou constitutionnels de le faire, peut être contesté devant les tribunaux par le biais d’un recours constitutionnel en nullité.

J’espère que certains avocats prendront la décision de le faire, car l’intérêt national l’exige.

C’est toujours Ponce qui gagne

Daniel Matamala, La Tercera , 30/12/2023

S’il y a une dictature, c’est Ponce le Beaufissime qui gagne.

Si la démocratie revient, c’est Ponce le Bienfaiteur qui gagne.

Si c’est la droite qui  gouverne, c’est Ponce le Roi du Lithium qui gagne.

Si c’est la gauche qui gouverne, c’est Ponce le Roi perpétuel du Lithium qui gagne à nouveau.

Au cours de l’été 1969, Julio César Ponce Lerou a eu son coup de chance. En vacances à Maitencillo, il rencontre la jeune fille d’un militaire, Verónica Pinochet. Plus tard, devenu le gendre du seigneur et maître du Chili, il cumule quinze postes dans des entités étatiques et des entreprises telles que Conaf, Iansa, Enami, ENAP, CTC, Endesa, et les deux plus importantes pour son avenir : Corfo et SQM.

Il est baptisé le “yernísimo”.

En 1983, un scandale de corruption l’oblige à quitter ses fonctions, mais quatre ans plus tard, il revient à la SQM en tant que président du conseil d’administration, grâce aux votes des directeurs militaires nommés par la dictature de son beau-père. Il privatise l’entreprise et en prend le contrôle par une structure pyramidale dite “en cascade”.

La transition démocratique menace son pouvoir. La Chambre des députés estime que le Trésor a perdu 2,223 milliards de dollars d’actifs suite aux privatisations frauduleuses, dont SQM est le principal symbole. Le Conseil de défense de l’État (CDE) ouvre un dossier pour fraude et escroquerie fiscale pour les opérations entre Ponce et Corfo. Le Service des impôts (SII) ouvre une enquête à son encontre.

Le sénateur démocrate-chrétien Eduardo Frei a dénoncé le fait que les travailleurs de la SQM à l’usine de salpêtre de Pedro de Valdivia « vivent dans un environnement concentrationnaire, dans des cloaques immondes, comme des animaux ». La plainte est appuyée par son collègue Jorge Pizarro, et le gouvernement Aylwin annonce une commission d’enquête.

Puis, le “yernísimo” se réinvente. Il se sépare de Verónica Pinochet et devient le grand bienfaiteur de la politique chilienne. Des années plus tard, la famille de Pizarro, la campagne de Frei et les ministres de l’intérieur et de l’économie d’Aylwin figureront sur la liste des conseillers et des récipiendaires de paiements illégaux de SQM.

Un audit usaméricain a montré que SQM avait versé, au cours des cinq années faisant l’objet de l’enquête, 21 millions de dollars à des hommes politiques, dont les deux tiers de manière illégale. Magnanime, elle a payé à droite, au centre et à gauche. Lors de la campagne présidentielle de 2009, les trois candidats financés par SQM (Piñera, Frei et Marco Antonio Enríquez-Ominami) ont rassemblé 94 % des voix.

« Julio voulait soutenir des gens de toutes les convictions. Il voulait maintenir la démocratie dans le pays », expliqua son avocat et ami Darío Calderón. Cette générosité a ses avantages. Le CDE, le SII et la Chambre des députés abandonnent leurs enquêtes et l’Etat, qui s’apprête à poursuivre Ponce, devient son partenaire. Corfo lui confie l’exploitation du lithium dans les salines d’Atacama en échange d’un maigre 6,8% de royalties.

Ce contrat permet à Ponce de devenir le “roi du lithium”, avec une fortune estimée par Forbes à 3,3 milliards de dollars.

Ponce facture, il légifère aussi. La direction de SQM a rédigé un article l’exemptant de toute augmentation d’impôts pendant six ans. Le PDG Patricio Contesse envoie le texte au sénateur UDI Pablo Longueira, qui le transmet au gouvernement Piñera, le Congrès l’approuve et la note de SQM devient Loi de la République. Les enquêtes judiciaires ont prouvé que, dans le même temps, l’entreprise a versé 730 millions de pesos à l’entourage proche de Longueira.

En 2020, la Cour suprême a ratifié que Ponce était l’“idéologue” d’un “système frauduleux” visant à nuire aux actionnaires minoritaires de SQM par le biais des “cascadas”. Grâce à lui, il a obtenu un “bénéfice frauduleux” de 128 millions de dollars.

« Aux USA, Julio Ponce serait en prison3, a déclaré le ministre des Finances, Ignacio Briones. Mais pas au Chili. Sa “sanction” est une amende de 3 millions de dollars, soit 2,3 % du montant fraudé.

Dans le cas de l’argent politique illégal, ce n’est même pas cela. Patricio Contesse a pris tout le blâme, Ponce n’a jamais été touché par l’enquête et ne figure pas parmi les accusés.

Lorsqu’Eduardo Bitran, le timonier de la CORFO, a poursuivi SQM pour rupture de contrat avec le Trésor, il a dénoncé le fait que « des politiciens connus au plus haut niveau ont exigé que je conclue un accord avec Ponce ». Le litige s’est terminé en 2018, avec un nouveau pacte entre SQM et l’État. Cette fois, tout le monde y a gagné : SQM a prolongé son contrat et le Trésor a conservé une grande partie des redevances. L’année dernière, le lithium a rapporté plus de 5 milliards de dollars aux caisses de l’État. Ponce a également dû se retirer du conseil d’administration de l’entreprise, tout en conservant sa part d’actions.

Après des décennies de pillage, les bénéfices de SQM sont désormais partagés avec les propriétaires du lithium : tous les Chiliens.

Cette semaine, le gouvernement a célébré en grande pompe un nouvel accord avec SQM pour l’exploitation du lithium du Dépôt salin d’Atacama. Un partenariat sera formé jusqu’en 2060, dans lequel la CODELCO sera un actionnaire majoritaire, même si, au cours des cinq premières années, elle il n’aura ni le contrôle ni la majorité des bénéfices.

Les analyses sont partagées : certains se félicitent que l’État s’assure des revenus importants grâce au savoir-faire commercial de SQM. D’autres estiment qu’en tant que propriétaire du lithium, il aurait dû exiger une part plus importante ou lancer un appel d’offres transparent, au lieu de négocier avec une seule entreprise.

Le Chili a-t-il quelque chose à gagner dans cette affaire ? C’est discutable. Ce qui ne fait aucun doute, c’est que, comme toujours, c’est Ponce qui gagne. Les actions de SQM ont augmenté après l’annonce, et la société a clôturé l’année 2023 en tant qu’entreprise la plus précieuse du Chili, avec une capitalisation boursière de 16,717 milliards de dollars.

En 2014, le député Boric avait déclaré : « Julio Ponce est un criminel en col blanc et cravate ». En 2023, le président Boric célèbre le partenariat de Ponce avec l’État jusqu’en 2060. Ponce devient le roi perpétuel du lithium, jusqu’à ses 115 ans, blanchi par le seul secteur politique qui manquait à l’appel : le Frente Amplio qui l’avait dénoncé comme une icône de la corruption entre la politique et les affaires.

Au Chili, tout est incertain, tout change et tout tourne à l’identique : Ponce gagne toujours, toujours, toujours.

À l’ère de la gauche pragmatique

Juan Pablo Cárdenas S., Política y Utopía, 2/1/2024

Le président Gabriel Boric s’est lui-même chargé d’informer son pays de l’accord conclu entre la CODELCO, la plus importante compagnie minière publique du Chili, et Soquimich (SQM), l’entreprise privée qui opère depuis quelques années dans les riches salines d’Atacama. La nouvelle est que les deux entités ont convenu d’exploiter conjointement les immenses réserves de lithium dans le désert du nord.

Dans le cadre de ce nouveau partenariat, les deux entités détiendraient chacune 50 % des parts jusqu’en 2060, la société minière publique gérant l’entreprise pendant la première période, jusqu’en 2030, après quoi SQM en prendrait la direction.

Il s’agit de l’accord le plus important de l’histoire des entreprises chiliennes qui, si les prévisions se réalisent et si les bonnes relations entre les deux partenaires se développent, fournira au trésor national d’énormes ressources pour le développement de l’économie nationale.

Personne ne doute des avantages que cet accord pourrait apporter au pays, ni du fait que la nouvelle entreprise serait pratiquement la première au monde dans cette activité et assurerait au Chili une plus grande confiance de la part des investisseurs potentiels, privés et étrangers, à la recherche d’un terrain fertile pour leurs affaires.

Boric a été félicité pour son pragmatisme dans la consolidation de cet accord. En effet, personne n’aurait imaginé que l’entreprise remise en question de Julio Ponce Lerou, le gendre du dictateur, finirait par s’associer à l’État après des décennies de politique et, en particulier de la part du centre-gauche, où ce qui était privilégié était la récupération d’une entreprise mal acquise pendant la dictature, comme beaucoup d’autres sources fiscales productives que Pinochet a vendues à vil prix à ses amis et à ses proches.

Sous les gouvernements de la Concertation et de la Nouvelle Majorité, la vérité est que rien n’a été fait pour récupérer les entreprises pillées. Patricio Aylwin lui-même a promis « la justice dans la mesure du possible », de sorte qu’en matière d’affaires aussi, tout est resté comme la dictature l’avait laissé.

Pour ajouter à l’embarras que cette nouvelle cause à beaucoup de personnes, il y a quelques années encore, Soquimich était l’une des entités commerciales qui collaboraient au financement illégal de la politique, en fournissant de grandes quantités de fonds pour favoriser les candidats et les législateurs en place. Cette situation a donné lieu à des dénonciations journalistiques sévères et documentées et à des enquêtes judiciaires qui ont abouti à la condamnation des contrevenants à des peines très discrètes et scandaleuses, ainsi qu’à l’impunité totale de Ponce Lerou et d’autres hommes d’affaires qui ont exercé une corruption millionnaire. Un crime « en col blanc et cravate », comme on l’appelait.

On peut donc parfaitement soupçonner que ces ressources destinées à corrompre des politiciens et des juges recueillent aujourd’hui un dividende aussi succulent que celui qui permettra à Soquimich de devenir le principal partenaire de l’État chilien et d’éviter ainsi que le Trésor ne récupère un jour ce qui a été accordé illicitement à la soi-disant initiative privée.

Les ressources de cette entreprise sont tellement gigantesques que ses pots-de-vin ont peut-être aussi favorisé les dirigeants de la CODELCO qui sont si enthousiastes à l’égard de cet accord. De même que les médias et les journalistes qui se réjouissent de la nouvelle annoncée par le chef de l’État lui-même. Une chose inhabituelle si l’on se souvient de ce que Boric a déclaré dans le passé contre Ponce Lerou, ainsi que de la position adoptée par les groupes de gauche avant d’entrer au gouvernement.

La vérité est que tout cela a entraîné un bain glacé de réalisme de la part de la politique chilienne remise en question. Nous pourrions dire que ni la droite ni le monde des affaires n’auraient pu imaginer une telle audace. Cela confirme, une fois de plus, que ce sont les gouvernements de gauche qui se conforment souvent aux idées les plus sincères de la droite, comme cet accord commercial, et le fait récent que les plus grands détracteurs de la Constitution de 1980 ont promu et gagné un plébiscite pour donner une continuité à la Charte fondamentale de Pinochet.

Pour soulager leur mauvaise conscience et faire preuve de modestie, les négociateurs de ce grand accord commercial ont accepté que le propriétaire majoritaire de Soquimich, Julio Ponce Lerou, ou l’un de ses parents « jusqu’au deuxième degré de consanguinité », s’abstienne de participer aux conseils d’administration de la nouvelle entité minière. Une obligation cynique qui serait imposée jusqu’en 2030.

C’est ainsi qu’un sénateur de gauche expérimenté, récemment décédé, a osé déclarer que le gouvernement “socialiste” de Ricardo Lagos avait été la meilleure administration de droite de toute la post-dictature. Tout comme d’autres n’arrivaient pas à croire qu’un président de droite comme Sebastián Piñera ait prodigué autant de primes à la classe moyenne et aux plus pauvres, tout en réussissant à lutter contre la pandémie de coronavirus grâce à de généreuses ressources fiscales. « Nul ne sait pour qui il travaille », comme dirait lautre.

23/11/2023

Argentina: Javier Milei, un canalla tiktoktokado, enviado a la Casa Rosada por la chusma tiktoktokera

 Fausto Giudice,, 21/11/2023
Traducido por Luis Casado, Tlaxcala

David Pugliese

 El 10 de diciembre próximo, Javier Milei se instalará en la Casa Rosada, situada en la Plaza de Mayo en Buenos Aires. El 58º presidente argentino llegará allí con sus perros clonados, su hermana rasputiniana y su concubina telegénica. Se supone que permanecerá allí hasta el 2027, a menos que no se fugue en helicóptero en pleno mandato, como hizo uno de sus predecesores, Fernando de la Rúa, el 20 de diciembre 2001. En este país aplastado por una política surrealista, uno puede esperarse a todo.

 Vistas sus prestaciones públicas desde hace algunos años, Milei merece su apodo: El Loco. Hizo todo, dijo todo, desembaló todo, sobre su infancia desdichada, la pérdida de su perro, su práctica del yoga tántrico, blandiendo la motosierra con la que va a decapitar el Banco Central, el Ministerio de la Mujer, el de la Cultura, el del Bienestar Social y el Museo de la Memoria de la ex-ESMA.

Prohibirá el aborto, autorizará la venta de niños, la venta de órganos y el armamento de los buenos ciudadanos de bien apasionados de legítima defensa, privatizará el petróleo y el gas de esquistos, y un gran etcétera.

 Dicho de otro modo, no tiene programa, pero profirió a lo largo de su campaña eructos a diestra y siniestra. Poco antes de la segunda vuelta, cayendo en la cuenta que había ido un poco lejos, buscó tranquilizar a los electores:  « Tranquilos, no privatizaré ni la Salud ni la Educación ».

En resumen, El Loco es un mosaico: una dosis de humpy-trumpy, una cucharada de bolsonaritis, un efluvio de zelenskiada, aliño de meloni-abascaliadas con una cascarita de marina-orbanidad, y todo a la salsa porteña*.

 Y el payaso la rompió entre los de arriba, entre los del medio, y sobre todo entre los pringaos.

Los descamisados, término despectivo -asumido por los peronistas- para designar a los pringaos, le hicieron un triunfo a Juan Domingo Perón en 1946, en 1951 y, mucho después del golpe de Estado de 1955 que lo envió al exilio, al inicio de los años 1970. Luego el movimiento peronista se dividió en facciones totalmente opuestas: de un lado el ala marchanta-revolucionaria, algo teñida de marxismo y de teología de la liberación, y el ala fascista, dirigida por Lopez Rega, el Rasputín de Perón y de su viuda Isabelita, organizador de los comandos de asesinos de la Triple A, la Alianza Anticomunista Argentina.

 Al salir de las sombras después de la caída de la dictadura en 1983, el peronismo no ha hecho sino derivar de líder en líder: Menem, Duhalde, Kirchner I (el marido, Néstor) y Kirchner II (la mujer, Cristina) y finalmente Alberto Fernández.

Ochenta años después de su nacimiento, luego de la Revolución de 1943, el peronismo está definitivamente muerto. Lo que fue en su día un maremoto obrero y popular que escogió como primer nombre el inimitable « Partido Único de la Revolución », antes de rebautizarse « Partido Justicialista » y cambiar de nombre a cada gran elección, devino en una canasta de escorpiones matándose entre ellos en la carrera por los curules y los taburetes.

 Los descamisados de hoy, el 42% de la población clasificada pobre, no son los del siglo pasado. Para 46 millones de habitantes, se cuentan 38,2 millones de teléfonos « inteligentes ». No sorprende pues que los tiktokeros hayan votado por un pirado. La alternativa el Señor 648% de inflación, el ministro de Economía Sergio Massa. Al presentarlo como candidato a la presidencia, el postpostpostneoneoperonismo se hizo el hara-kiri.

De ello dan testimonio los resultados del voto en las villas miseria, equivalente argentino de las favelas brasileñas. En casi todos los antiguos bastiones del peronismo votaron por El Loco, sin comprender que El Loco era un Alfil (fou: loco, en francés) del Rey, y que ese rey se llama Macri, el cual -agazapado en las sombras- va a manipular las cuerdas del nuevo pelele de la Casa Rosada dolarizada.

 « El hombre desciende del mono, el Argentino desciende del barco », dice una antigua broma. ¿Los Argentinos retomarán un barco -o un avión- para un nuevo éxodo? ¿O bien nos regalarán una explosión social generalizada, un Argentinazo ? Vivir para ver.

 NdT
* Los no familiarizados con la política mundial tal vez no reconozcan aquí todos los personajillos neofascistas:

bolsonaritis: por Bolsonaro, de Brasil

zelenskiada: por Zelensky, de Ucrania

meloni: por Giorgia Meloni, de Italia

abascaliadas: por Abascal, de España

marina: por Marine Le Pen, de Francia

orbanidad: por Viktor Orban, de Hungría

04/11/2023

Carta abierta de israelíes a los israelíes: merecemos la verdad sobre el 7 de octubre

 

Mondoweiss, 31-10-2023
Traducido por Luis CasadoTlaxcala

Nota del editor de Mondoweiss: La siguiente declaración fue escrita por un grupo de ciudadanos israelíes que desean permanecer en el anonimato por su propia seguridad y por temor a represalias del gobierno.

מכתב פתוח מישראליות/ים לישראליות/ים – עברית להלן

Como israelíes, pedimos una comisión oficial sobre los sucesos del 7 de octubre. Se está perpetrando un genocidio en Gaza en nombre de las víctimas israelíes y seguimos sin saber quién fue asesinado, cómo fue asesinado ni quién lo mató. Exigimos respuestas y tú también deberías hacerlo.

Foto de los sucesos del 7 de octubre de 2023, publicada por el ejército israelí

A nuestros compatriotas israelíes,

Les apelamos desde la niebla del genocidio. Lloramos y nos preocupamos por «los nuestros», así como por aquellos a quienes la mayoría de ustedes ignora o considera «animales«.

Cuando los militares israelíes empezaron a difundir rumores sobre «bebés decapitados» en los medios de comunicación israelíes en lengua inglesa, nos quedamos inmediatamente impactados. Nos dimos cuenta de que la propaganda de nuestro gobierno no sería la misma que durante los anteriores ataques asesinos contra Gaza.

Mientras Israel sigue difundiendo imágenes de supuestos «edificios de Hamás» en el campo de concentración de Gaza (¿qué no lo es, a ojos israelíes?) para excusar sus bombardeos, la retórica nacional e internacional de Israel contiene ahora algo mucho más cercano a la propaganda de exterminio nazi.

Sabemos cuál es el objetivo de esta propaganda. Más de 8.500 niños, mujeres y hombres palestinos han sido exterminados, y la cifra sigue aumentando en el momento de escribir estas líneas. Muchos están atrapados bajo los escombros de sus casas, muriendo lentamente. Otros se enfrentan a la sed, el hambre y las enfermedades infecciosas. Al mismo tiempo, altos funcionarios israelíes, e incluso nuestro Presidente, siguen afirmando que «no hay civiles inocentes» en Gaza.

No nos equivoquemos, lo que Israel está haciendo actualmente en Gaza perseguirá a los israelíes durante décadas. Es hora de asegurarse de que todos los israelíes lo entienden. Y esa comprensión debe comenzar con la plena divulgación de los acontecimientos del 7 de octubre de 2023.

He aquí algunas exigencias que todos los israelíes deberían hacer ahora mismo, incluso si niegan el genocidio en curso en Gaza. La primera es una lista completa de todas las víctimas israelíes que han sido identificadas. No existe una lista exhaustiva en un sitio web oficial del gobierno. La lista publicada por Ha’aretz es parcial. Algunos nombres están a la espera de ser «autorizados para su publicación», y nos gustaría saber qué significa esto.

La ausencia de una lista completa, tres semanas después del inicio de la operación, conduce a la siguiente exigencia de los ciudadanos israelíes: la creación de una comisión oficial de investigación. Los fallos masivos de las unidades de inteligencia y combate, así como la insistencia israelí en convertir Gaza en una prisión al aire libre durante las décadas anteriores, deberían ser abordados, obviamente, por dicha comisión. Nos gustaría saber cómo contribuyeron estos fallos a la muerte de civiles el 7 de octubre y en los días posteriores.

Además, según el portavoz de Hamás, ya han muerto 50 cautivos israelíes como consecuencia de la decisión de nuestro gobierno de bombardear Gaza. Se puede considerar o no al portavoz de Hamás una fuente fiable, pero lo que sí sabemos es que los cautivos israelíes, familiares de muchas de las personas que se encuentran hoy aquí, han sido dispersados por toda la Franja de Gaza y que Israel no parece conocer su ubicación exacta.

Los ciudadanos israelíes deberían preguntarse si apoyan el bombardeo indiscriminado que amenaza la vida de los cautivos. Un acuerdo de intercambio está sobre la mesa. Sabemos que Hamás lo propuso desde el primer día. La venganza genocida indiscriminada de Israel no tiene en cuenta el bienestar de los prisioneros israelíes.

Y mientras nuestro ejército extermina seres humanos en Gaza, las plataformas de hasbará (propaganda) de Israel están en pleno apogeo, sobre todo en el extranjero. Los restos carbonizados de seres queridos se exhiben, sin nombre, en el único contexto de llamamientos deshumanizadores a la erradicación de los reclusos del campo de concentración de Gaza. Cuando vemos estas imágenes, destinadas a un público occidental y con total desprecio por las familias de los supervivientes, nos damos cuenta una vez más de que todos merecemos información precisa sobre la identidad de estas víctimas y sobre cómo murieron.

Sin una investigación independiente, sólo podemos esperar reunir artículos esporádicos y testimonios de los supervivientes. Florecerán las teorías conspirativas. Ya estamos viendo intentos de negar el hecho mismo de que civiles israelíes fueran asesinados por combatientes de Hamás.

Además, rechazamos los intentos de Israel de caracterizar a sus soldados caídos y a otros miembros del personal de seguridad como víctimas del terrorismo equivalentes a las víctimas civiles. Si un soldado israelí es sólo un civil israelí, entonces un civil israelí es sólo un soldado. Rechazamos esta peligrosa ecuación.

Por último, la cuestión de quién mató a determinados civiles israelíes nos atormenta. Varios informes muestran que algunos fueron asesinados por el ejército israelí. Tanto si quedaron atrapados en el fuego cruzado, como si fueron atacados deliberadamente por tanques o helicópteros para eliminar a combatientes de Hamás o impedir que Hamás tomara más cautivos, merecemos una respuesta.

Exigimos respuestas porque en Gaza se está perpetrando un genocidio en nombre de las víctimas israelíes, aunque las familias de los fallecidos se opongan firmemente a esta atrocidad vengativa. Exigimos respuestas y usted también debería hacerlo.

מכתב פתוח מישראליות/ים לישראליות/ים

אנו קוראות אליכם מערפל רצח העם. אנו מתאבלים ואנו דואגים ל”שלנו” כמו גם לשלום אלה שרובכם מתעלמים מהם או מחשיבים ל”חיות אדם“.

כאשר אנשי בטחון ישראלים החלו להפיץ שמועות באמצעות תקשורת ישראלית דוברת אנגלית על “תינוקות ערופי ראש”, הופתענו. הבנו שהתעמולה של ממשלתנו לא תהיה זהה לזו שראינו בהתקפות רצחניות קודמות על עזה.

ישראל ממשיכה להציג תמונות של ‘בנייני חמאס’ כביכול במחנה הריכוז בעזה (איזה בניין אינו כזה, בעיניים ישראליות?), כדי לתרץ את ההפצצה שלהם, אך השיח הפנימי והבינלאומי של ישראל מכיל כעת משהו הרבה יותר דומה לתעמולת ההשמדה הנאצית.

אנו יודעות מהי מטרת התעמולה הזו. יותר מ-8,500 ילדים, נשים וגברים פלסטינים ילידים כבר הושמדו – והמספר עולה עם כתיבת שורות אלו. רבות לכודות מתחת להריסות בתיהם, גוססות באיטיות. אחרים סובלים  מצמא, רעב ומחלות זיהומיות. במקביל, בכירים בישראל, אפילו הנשיא שלנו, ממשיכים לצעוק לעולם כי “אין אזרחים חפים מפשע” בעזה.

בל נטעה, מה שישראל מעוללת כעת בעזה עכשיו ירדוף את הישראלים במשך עשרות שנים. עכשיו הזמן לוודא שכל ישראלי/ת מבינים זאת. והבנה זו צריכה להתחיל בחשיפה מלאה של אירועי 7 באוקטובר 2023.

הנה כמה דרישות שכל ישראלי/ת צריכים להציב עכשיו, גם אם הם מכחישים את הג’נוסייד המתחולל בעזה. הראשונה היא רשימה מקיפה של כל הקורבנות הישראלים שזוהו. אין רשימה מקיפה באתר ממשלתי רשמי. הרשימה שפרסם עיתון “הארץ” היא חלקית. חלק מהשמות ממתינים ל”אישור לפרסום”, ואנו תוהים מתי יאושרו לפרסום.

היעדר רשימה מקיפה, שלושה שבועות לאחר האירועים, מוביל לדרישה הבאה שאזרחי ישראל צריכים להציב – הקמת ועדת חקירה רשמית. ועדה כזו תידרש כמובן לכשלים עצומים מצד יחידות מודיעין וצבא, אך עליה לעסוק גם בהתעקשות הישראלית להפוך את עזה למכלאה הגדולה בעולם במשך עשרות שנים. ברצוננו לדעת כיצד כישלונות אלו תרמו למספר הגבוה של הרוגים אזרחיים ב-7 באוקטובר ובימים שלאחר מכן.

יתרה מכך, לפי דובר חמאס, 50 שבויים ישראלים כבר נהרגו כתוצאה מהחלטת ממשלתנו על הפצצות שטיח בעזה. בין אם דובר חמאס מקור מהימן או בלתי מהימן בעיניכם, אנו יודעות ששבויים ישראלים, אהובים על רבים כאן, פוזרו ברחבי הרצועה ונראה שישראל לא יודעת את מיקומם המדויק.

אזרחי ישראל צריכים לשאול את עצמם האם הם תומכים בהפצצות חסרות הבחנה המאיימות על חייהם של שבויים. הצעה לעסקת חליפין מונחת על השולחן. אנו יודעים שחמאס מציע זאת מהיום הראשון. נקמת רצח העם העיוורת של ישראל מתעלמת משלומם של שבויים ישראלים.

ובעוד הצבא הישראלי משמיד בני אדם בעזה, ערוצי ההסברה הישראלית נכנסו להילוך גבוה, במיוחד בחו”ל. שרידיהם המפוחמים של יקירי ישראלים רבים מוצגים לראווה, חסרי שם, כאשר ההקשר הוא רק קריאות לחיסול הכלואים במחנה הריכוז בעזה, שעברו דה-הומניזציה מוחלטת. בראותנו את התמונות הללו, המיועדות לקהל מערבי, ותוך התעלמות מוחלטת ממשפחות הניצולים, אנו מציינים שוב כי לכולנו מגיע מידע מדויק מי הם הקורבנות הללו וכיצד הם מתו.

ללא חקירה עצמאית, אנו יכולות רק לקוות לחבר כתבות מפה ומשם ועדויות של ניצולים. תיאוריות קונספירציה כבר פורחות. אנו כבר רואים ניסיונות להכחיש את עצם עובדות ההרג של אזרחים ישראלים על ידי חמאס.

יתרה מכך, אנו דוחות את הניסיונות הישראלים לתייג חיילים ואנשי כוחות צבאיים שנהרגו כקורבנות טרור שקולים להרוגים אזרחיים. אם חייל ישראלי הוא רק אזרח ישראלי, אזרח ישראלי הוא רק חייל. אנו דוחים את המשוואה המסוכנת הזו.

לבסוף, השאלה מי הרג אזרחים ישראלים במקרים מסוימים מטרידה אותנו. מכמה דיווחים עולה כי חלקם נהרגו על ידי הצבא הישראלי. בין אם הם נלכדו באש צולבת, או שכוחות ישראלים ירו לעברם באמצעות טנקים ומסוקים כדי לחסל אנשי חמאס או למנוע מהם לקחת עוד שבויים, מגיעה לנו תשובה.

אנו דורשות תשובות כי בעזה מתבצע רצח עם בשם קורבנות ישראלים, למרות שמשפחות שכולות מתנגדות נחרצות לזוועת הנקמה הזו. אנו דורשות תשובות וגם אתם צריכים לדרוש תשובות

10/09/2023

LUIS CASADO
Allende and I
Childhood memories

Luis Casado, 10/9/2023
Translated by
Fausto Giudice,  Tlaxcala

I never knew how my father managed to give us so much with his modest salary as a bakery worker.

In this so much the readings and the trips occupied a place of privilege. My old man collected for decades the sports magazines Estadio (Santiago), El Gráfico (Buenos Aires) and others, and every week he bought us kilos of comics, short stories and various books. My mother read novels and El Fausto, a weekly magazine for ladies that brought serial romantic stories. That’s where my love for books comes from, from the encouragement of a father who didn’t finish the third year of elementary school but loved reading. 

 

The trips always had the same destination: the archipelago of Chiloé, more precisely Achao, on the island of Quinchao. Getting there in those days -the fifties- was an unforgettable adventure.

From San Fernando to Puerto Montt you traveled in an old train pulled by a sloppy locomotive, operated by the tiznados [sooties], workers of the State Railroad Company, so called because their faces bore the indelible mark of coal.

The train moved with a delightful and gentle slowness. It took no less than 14 hours to cover the 700 km, not counting the numerous stops in the provincial capitals. If you opened a window you were liable to get a particle of coal in the eye. From time to time a man in a white jacket, very formal, would pass by and offer you something to drink and eat: the service was impeccable but too expensive for our meager purse.

In Puerto Montt you spent the half night in a lodge, until early the next morning when the steamer sailed to the island of Quinchao.

 

In Achao there was (and still isn’t) neither harbour nor wharf: you would have to disembark in the middle of the ocean going down a narrow stairway, located on the sides of the steamer, to the rowing boats that came to pick you up and to which you jumped risking diving into the icy waters of the South Pacific along with your suitcases, bags and various bundles.

When you reached the beach of Achao you took off your shoes, rolled up your pants, and jumped into the water. That’s how you arrived, walking, to your destination. There was Luis Soto Romero, my grandfather, mayor of the town, who practiced his trade. My father, teasingly, had nicknamed him the Cacique.

My grandfather had been a practitioner in the army. In Achao, as a civilian, he was a nurse, midwife, minor surgeon, public authority, spokesman, justice of the peace... in short, a cacique.

My grandfather was a socialist, one of those of that time, not to be confused with those of today: my grandfather never had any sinecure, nor did he ever create any foundation. He rather gave than received. Would it surprise you to know that he was a friend and comrade of a certain Salvador Allende?

That’s right. Salvador Allende.

 

LUIS CASADO
Allende e io
Ricordi d’infanzia

Luis Casado, 10/9/2023
Tradotto da
Fausto Giudice, Tlaxcala

Non ho mai saputo come mio padre riuscisse a darci così tanto con il suo modesto stipendio di operaio panettiere.

La lettura e i viaggi erano al primo posto di quel tanto. Per decenni mio padre ha collezionato le riviste sportive Estadio (Santiago), El Gráfico (Buenos Aires) e altre, e ogni settimana ci comprava chili di fumetti, racconti e libri vari. Mia madre leggeva romanzi e El Fausto, un settimanale per signore che riportava racconti romantici a puntate. Ecco da dove viene il mio amore per i libri, dall’incoraggiamento di un padre che non aveva finito il terzo anno di scuola elementare, ma che amava leggere. 

 

I viaggi avevano sempre la stessa meta: l’arcipelago di Chiloé, più precisamente Achao, sull’isola di Quinchao. Arrivarci a quei tempi - gli anni Cinquanta - era un’avventura indimenticabile.

Da San Fernando a Puerto Montt si viaggiava su un vecchio treno trainato da una locomotiva trasandata, manovrata dai tiznados [i fuligginosi], i lavoratori dell’Impresa di Ferrovie dello Stato, così chiamati perché i loro volti portavano il segno indelebile del carbone.

Il treno si muoveva con una piacevole e dolce lentezza. Ci volevano non meno di 14 ore per coprire i 700 km, senza contare le numerose fermate nei capoluoghi di provincia. Se si apriva un finestrino si rischiava di ricevere una scoria di carbone negli occhi. Di tanto in tanto, un uomo in giacca bianca e molto formale passava e ti offriva qualcosa da bere e da mangiare: il servizio era impeccabile, ma troppo caro per le nostre magre borse.

A Puerto Montt si passava la mezza notte in una locanda, fino alle prime ore del mattino successivo, quando il vaporetto salpava per l’isola di Quinchao.

Ad Achao non c’era (e ancora non c’è) né porto né molo di attracco: si sbarcava in mezzo all’oceano scendendo una stretta scala, situata sui fianchi del piroscafo, fino alle barche a remi che venivano a prenderti e sulle quali si saltava, rischiando di precipitare nelle gelide acque del Pacifico meridionale insieme a valigie, borse e fascine varie.

Quando si arrivava alla spiaggia di Achao ci si toglieva le scarpe, si arrotolavano i pantaloni e ci si tuffava in acqua. Così si arrivava, camminando, a destinazione. C’era Luis Soto Romero, mio nonno, sindaco del paese, che esercitava la sua pratica. Mio padre, scherzando, lo aveva soprannominato il Cacique.

Mio nonno era stato praticante nell’esercito. Ad Achao, da civile, era infermiere, ostetrico, chirurgo in chirurgia minore, autorità pubblica, portavoce, giudice di pace... insomma, un cacique.

Mio nonno era un socialista, uno di quelli di allora, da non confondere con quelli di oggi: mio nonno non ha mai avuto alcun canonicato, né ha mai creato alcuna fondazione. Vi sorprenderebbe sapere che era amico e compagno di un certo Salvador Allende?

Proprio così. Salvador Allende.

 

LUIS CASADO
Allende et moi
Souvenirs d’enfance

Luis Casado, 10/9/2023
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

Je n’ai jamais su comment mon père parvenait à nous donner autant avec son modeste salaire d’ouvrier boulanger.

La lecture et les voyages occupaient une place de choix dans cet autant. Pendant des décennies, mon père a collectionné les revues sportives Estadio (Santiago), El Gráfico (Buenos Aires) et autres, et chaque semaine, il nous achetait des kilos de bandes dessinées, de nouvelles et de livres divers. Ma mère lisait des romans et El Fausto, un hebdomadaire pour dames qui proposait des histoires romantiques en feuilletons. C’est de là que vient mon amour pour les livres, de l’encouragement d’un père qui n’a pas terminé la troisième année d’école primaire, mais qui aimait lire. 

 

Les voyages avaient toujours la même destination : l’archipel de Chiloé, plus précisément Achao, sur l’île de Quinchao. S’y rendre à l’époque - les années cinquante - était une aventure inoubliable.

De San Fernando à Puerto Montt, on voyageait dans un vieux train tiré par une locomotive déglinguée, manœuvrée par les tiznados [gueules noires], les travailleurs de l’Entreprise de Chemins de fer de l’État, ainsi appelés parce que leurs visages portaient la marque indélébile du charbon.

Le train avançait avec une lenteur délectable et charmante. Il ne fallait pas moins de 14 heures pour parcourir les 700 km, sans compter les nombreux arrêts dans les capitales provinciales. En ouvrant une fenêtre, on risquait de recevoir une escarbille de charbon dans l’œil. De temps en temps, un monsieur en veste blanche passait et vous offrait à boire et à manger : le service était impeccable, mais trop cher pour notre maigre bourse.

À Puerto Montt, on passait la moitié de la nuit dans une auberge, jusqu’à ce que, tôt le lendemain matin, le bateau à vapeur appareille pour l’île de Quinchao.


À Achao, il n’y avait (il n’y a toujours pas) ni port ni jetée daccostage : au milieu de l’océan, on débarquait en descendant une échelle étroite, située sur les côtés du vapeur, jusqu’aux chaloupes qui venaient vous chercher et dans lesquelles on sautait, au risque de plonger dans les eaux glacées du Pacifique Sud avec ses valises, ses sacs et ses divers fagots.

Arrivés sur la plage d’Achao, vous enleviez vos chaussures, retroussiez vos pantalons et sautiez à l’eau. C’est ainsi que l’on arrivait, à pieds, à destination. Et là il y avait Luis Soto Romero, mon grand-père, maire de la ville, qui exerçait son métier. Mon père, en plaisantant, l’avait surnommé le Cacique.

Mon grand-père avait été praticien dans l’armée. À Achao, dans le civil, il était infirmier, sage-femme, chirurgien en petite chirurgie, autorité publique, porte-parole, juge de paix... bref, cacique.

Mon grand-père était un socialiste, un de ceux de l’époque, à ne pas confondre avec ceux d’aujourd’hui : mon grand-père n’a jamais eu de sinécure, ni créé de fondation, il donnait plus qu’il ne recevait. Cela vous surprendrait-il de savoir qu’il était l’ami et le compagnon d’un certain Salvador Allende ?

C’est bien ça. Salvador Allende.