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28/09/2023

GIDEON LEVY
La kippa tricotée des intégristes de Yom Kippour à Tel-Aviv a provoqué un désastre en Israël

Gideon Levy et Tomer Appelbaum (photos), Haaretz, 27/9/2023
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

En écoutant les protestations sur le “pogrom” sur la place Dizengoff de Tel Aviv le jour de Yom Kippour, la “sainteté du jour” et l'offense aux “sentiments des fidèles”, il est impossible de ne pas se rappeler les offenses quotidiennes qu'ils commettent contre nous, les personnes de gauche laïques. Mais en Israël, les laïcs n'ont pas de sentiments. Seuls les religieux ont des sentiments qui ne doivent pas être offensés.

Leurs sentiments ont été offensés ? Sur cette place, il est soudain apparu que nous avions nous aussi des sentiments. Leurs valeurs ont été profanées ? Les nôtres ont été profanées il y a longtemps. En outre, une grande partie du mal qui nous a été fait, à nous, les démocrates laïques, a été causée par les plaignants de la place Dizengoff.

Des fidèles et des opposants sur la place Dizengoff de Tel-Aviv, dimanche dernier

 Lorsque je vois des Israéliens en kippa tricotée et en chemise de shabbat d'un blanc éclatant, avec leurs franges rituelles qui pendent sur les côtés et leurs armes qui dépassent par derrière, organiser des services de prière au cœur de cette place laïque, cela me heurte profondément. Cela me rappelle qu'eux et ceux qui leur ressemblent sortent chaque vendredi soir (et d'autres nuits) pour se déchaîner contre leurs voisins bergers en portant ces mêmes vêtements festifs du shabbat, munis des mêmes armes, soutenus maintenant par des gourdins et des barres de fer.

Même si la plupart de ceux qui prient sur la place ne prennent pas une part active à ces déchaînements, il est raisonnable de supposer qu'ils les soutiennent, au moins par leur silence. Les émeutiers sont leur propre chair et leur propre sang. Ils viennent du même village, de la même yeshiva, de la même yeshiva pour femmes ou du même lycée. Cette prise de contrôle des espaces publics de Tel-Aviv par les colons et leurs complices me heurte, tout comme leurs actions me font beaucoup de mal.

Pendant des années, Israël a été façonné à leur image. Pendant des années, Israël a été entraîné dans leur sillage, jusqu'à ce qu'ils fassent finalement pencher la balance par la violence, la tromperie, l'extorsion, les menaces et la fraude. Sans eux, nous serions peut-être une démocratie. Au lieu de cela, à cause d'eux, nous sommes un État raciste d'apartheid.

Rosh Yehudi, l'organisation à l'origine de ce service de prière pur et innocent sur la place, est une preuve décisive du lien étroit entre la religion et la prise de contrôle par la force des territoires occupés. Dans la vallée de Shiloh, ils le font par la violence ; sur la place Dizengoff, de manière édulcorée. Mais les objectifs sont les mêmes.

Dans la vallée de Shiloh, il n'y a plus personne pour les arrêter. Sur la place Dizengoff, il y a soudain eu des gens pour les arrêter. Il ne faut pas pleurer sur le mal qui leur a été fait, ils ne méritent même pas des larmes de crocodile. Le mal qu'ils nous ont fait est bien plus grand.

Aucun acte de “fraternité” du type de ceux qu'ils préconisent, aucun dialogue et aucune étude commune de la Torah ne peuvent masquer le fait qu'ils sont coupables, avec le soutien de tous les premiers ministres israéliens et des forces de défense israéliennes, d'avoir transformé ce pays en un État d'apartheid. S'il n'y avait pas eu de droite religieuse, nationaliste, messianique et raciste, il n'y aurait pas eu de colons. Et s'il n'y avait pas eu de colons, il n'y aurait pas eu d'occupation depuis longtemps. C'est aussi simple et vrai que ça.

Des manifestants se heurtent à la police, dimanche soir à Tel Aviv

Lorsqu'ils viennent sur la place Dizengoff, ils apportent avec eux leur idéologie arrogante et nationaliste. Et le comble de leur audace, c'est qu'ils sont venus sur la place au nom de la liberté, du libéralisme et de la démocratie. Les colons et leurs complices, les membres de Rosh Yehudi et leurs partisans, sont la communauté qui prive par la force leurs voisins palestiniens de ces valeurs. Et maintenant, ils essaient de faire progressivement la même chose à Tel Aviv. Ils n'ont pas le droit de bénéficier du libéralisme. Ils en sont les ennemis.

Voir des membres du mouvement Garin Torani - de jeunes juifs religieux qui se déplacent en groupe dans les quartiers de la ville - au cœur de Tel-Aviv me heurte également. Quiconque a visité ces dernières années les villes palestiniennes qui sont devenues des villes mixtes judéo-arabes en 1948 sait ce que les membres de ce mouvement ont l'intention de faire : judaïser, provoquer, organiser une prise de contrôle par la force et, en fin de compte, pousser les habitants à partir.

Allez à Ramle, à Lod ou à Acre et vous verrez. Là-bas, ils heurtent de nombreux sentiments. Et maintenant, il est bon et nécessaire de les bloquer à Tel Aviv. On trouve de tout dans le mouvement Garin Torani, sauf de bonnes intentions.

Oui, la kippa tricotée est devenue un symbole qui suscite la résistance. Beaucoup de ceux qui la portent en portent la responsabilité. C'est le symbole que portent de plus en plus d'officiers de Tsahal et de hauts fonctionnaires de l'administration “civile” israélienne en Cisjordanie, ainsi que de nombreux juges, journalistes et hommes politiques - trop nombreux.

La kippa tricotée fait de son porteur un suspect jusqu'à preuve du contraire. La kippa tricotée a entraîné un désastre pour Israël. Et cela doit être dit.

11/09/2023

Quand un fasciste juif s'installe dans votre quartier

 Esther Solomon, Haaretz, 10/9/2023
Rédactrice en chef, Haaretz English
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

Pour les libéraux israéliens en difficulté mais nouvellement combatifs, la lutte contre l'autoritarisme et l’ethnonationalisme se déroule désormais non seulement à la Knesset et à la Cour suprême, mais aussi dans les bus, sur les places des ville et dans les rues résidentielles tranquilles.

Le ministre de la sécurité nationale, Itamar Ben-Gvir, et le ministre du développement de la Périphérie, du Néguev et de la Galilée [sic], Yitzhak Wasserlauf (à gauche). Photo : Ohad Zwigenberg

C’était un tableau parfait d’Israël à l’époque du coup d’État judiciaire de Netanyahou.

Dans un quartier majoritairement laïc et libéral, des manifestants pro-démocratie, brandissant des drapeaux israéliens et arc-en-ciel, des klaxons et des pancartes, se sont assis sur la route devant l’immeuble d’habitation du nord de Tel-Aviv dans lequel un ministre d’extrême droite particulièrement virulent du gouvernement Netanyahou venait d’emménager. Il se trouve que cet immeuble se trouve au coin de la rue où j’habite.

Les voisins d’Yitzhak Wasserlauf avaient orné leurs balcons d’immenses banderoles reprenant les principaux refrains du mouvement de protestation, l’une déclarant leurs habitants “fidèles à la Déclaration d’indépendance” et l’autre “peuple libre sur notre terre” (une citation de l’hymne national, “Hatikva”). Des autocollants apposés sur les réverbère le long de la rue proclamaient : “Coercition religieuse, racisme, homophobie : pas dans notre quartier”. “Les Israéliens laïques ne sont pas des esclaves”. Et, s’adressant à Netanyahou : “Nous ne servirons pas un dictateur”.

À quelques mètres de là, des policiers bousculaient avec force une autre foule de manifestants, tandis que leur commandant - connu pour avoir lancé des grenades assourdissantes sur les manifestants au début des rassemblements contre le coup d’État - leur criait de “tenir la ligne”.

La “ligne” n’avait aucun sens : il y avait des manifestants devant, derrière et sur les côtés. La démonstration de force était une démonstration de police performative. Un effort bruyant, inutilement antagoniste mais aussi pitoyable pour apaiser le patron ultime du commandant, le ministre de la sécurité nationale Itamar Ben-Gvir. Ben-Gvir dirige Otzma Yehudit, le parti extrémiste et kahaniste auquel appartient Wasserlauf.

Wasserlauf, ministre de la Périphérie d’Israël qui ne montre même pas un intérêt périphérique pour la vie en dehors de la grande ville, était déjà connu pour son sectarisme et son ethnonationalisme avant de pousser plus loin l’idée d’un activisme aggravé, en s’installant dans une région ouvertement et historiquement hostile à ses vues.

Son bilan est explicite. Il a déclaré que les juifs réformés “se moquaient de la religion”, tout en se moquant d’eux parce qu’ils “célébraient des bar-mitsvahs pour les chiens”- une insulte éculée. Il s’oppose aux défilés de la Fierté, il veut expulser les demandeurs d’asile et incite à la xénophobie, il tente de refuser des budgets aux citoyens arabes et il refuse de s’engager à respecter l’État de droit si la Cour suprême annule la première tranche de la réforme judiciaire du gouvernement.

Il s’est installé dans le sud de Tel-Aviv il y a des années en tant que membre d’un garin torani [Noyau de la Torah] - un groupe de nationalistes religieux juifs financé par l’État, peut-être mieux compris comme une cellule d’endoctrinement théocratique, souvent implanté dans des zones à populations laïques ou dans des villes mixtes arabes et juives, en tant que stratégie démographique et d’intimidation.

Soudain, alors que la tension monte en Israël, Wasserlauf décide de déménager au nord de Tel-Aviv pour vivre avec les mêmes libéraux qu’il méprise si bruyamment.

L’un de ses voisins a installé des panneaux sur les barrières du parking de Wasserlauf avec une variante des Dix Commandements, dont l’une se lit comme une référence aux colons violents qui constituent la base d’Otzma Yehudit : « Tu ne commettras pas de meurtre : pas à Huwara [scène d’un pogrom de colons], pas à Douma [où un extrémiste juif a incendié une famille palestinienne], nulle part ».



Arrestation de l’architecte Yoav Anderman : traité comme un vulgaire palestinien ou réfugié érythréen : il a eu de la chance, il a pu continuer à respirer


"Le détenteur de la pancarte a été capturé"

Il est scandaleux que le voisin ait été arrêté pour un délit mineur de vandalisme - un délit qui donne généralement lieu à une amende, et non à des policiers qui frappent à votre porte en plein shabbat. Lors de sa libération, le voisin a fait un commentaire : « Voilà à quoi ressemble la désintégration de la démocratie ».

De l’extérieur, on peut parfois avoir l’impression que le débat sur la réforme judiciaire de Netanyahou penche vers la théorie : parité entre les branches du gouvernement, signification du contrôle judiciaire, nature de la démocratie. Mais l’acte de provocation spectaculaire de Wasserlauf permet de ramener ce débat sur terre. Il y a deux Israël, divisés par leur adhésion (au moins en principe) soit à la démocratie libérale, soit à l’ethnonationalisme juif.

Le centre ne tient pas, et même si les semaines à venir ne débouchent pas sur une crise constitutionnelle et des troubles civils, le gouffre ne sera pas comblé. Il continuera de s’envenimer, car les deux parties considèrent qu’il s’agit d’une lutte existentielle.

Pour les libéraux israéliens en difficulté mais nouvellement combatifs, il s’agit d’une lutte contre l’autoritarisme, d’une lutte pour l’âme du pays, qui se déroule désormais non seulement à la Knesset et à la Cour, mais aussi dans les bus, sur les places de la ville et dans les rues résidentielles tranquilles.

25/12/2022

GIDEON LEVY
Un porteur de schtreimel* au cabinet de sécurité israélien : scandale !

Gideon Levy, Haaretz, 25/12/2022
Traduit par
Fausto Giudice, Tlaxcala

*Shtrayml : terme yiddish désignant une toque de fourrure portée par les Juifs hassidiques originaires d’Europe centrale et orientale, généralement faite de treize queues de renard ou de marte [NdT]

Parmi les nombreuses tactiques de peur et les attaques contre le gouvernement israélien à venir - la plupart justifiées - il y en a une qui est inacceptable et dangereuse. Le centre-gauche affirme que le député Yitzchak Goldknopf [« Bouton d’or », NdT] ne peut pas être membre du cabinet de sécurité. Goldknopf, chef du parti ultra-orthodoxe Judaïsme unifié de la Torah, n’a pas servi dans les forces de défense israéliennes et ses électeurs non plus, et il ne devrait donc pas prendre part aux décisions relatives à la sécurité. C’est une interdiction qui n’a pas sa place dans un gouvernement bien géré.

Yitzchak Goldknopf, chef et député de Judaïsme unifié de la Torah, 2022.Photo : Emil Salman

Goldknopf n’est pas candidat au poste de chef d’état-major de Tsahal, ni à celui de général en charge d’un commandement régional, et il a pleinement le droit de participer à toute décision, y compris au saint des saints de la sécurité. Il représente un large groupe dont les Israéliens laïques ont décidé qu’il ne servirait pas dans l’armée. Il est dangereux de laisser le droit de décider des questions de guerre et de paix uniquement à ceux qui ont servi dans l’armée ou qui ne sont pas haredi [juif orthodoxe, NdT]. C’est une porte ouverte à des exclusions supplémentaires. Nous nous empressons d’ajouter que les Arabes ont également le droit de prendre part aux décisions relatives à la sécurité de leur pays, s’il s’agit bien de leur pays.

Yitzchak Goldknopf à la Knesset, 2022.Photo : Ohad Zwigenberg

Nous sommes destinés à entendre beaucoup plus de ce nouveau leader haredi haut en couleur, Goldknopf, une version légèrement plus pâle du précédent noble ultra-orthodoxe, Avraham Shapira, qui savait comment charmer les laïcs. Un rapport d’enquête de Gur Megiddo et Meir Tantz, publié vendredi dans TheMarker, sur les sources de la richesse de Goldknopf et la conduite de ses ONG, dont le nom même est difficile à prononcer pour les laïcs, est stupéfiant et devrait faire l’objet d’une enquête criminelle. La conduite du ministre désigné de la construction et du logement en ce qui concerne les appartements qu’il possède à Jérusalem jette une longue ombre sur son aptitude à être en charge du logement en Israël.

Mais il devrait certainement être autorisé à être membre du cabinet de sécurité. Que le Dieu des haredim nous protège si la condition pour participer au cabinet de sécurité est le service militaire. Qu’Il protège un pays où le service militaire est une condition pour tout.

Il est peu probable que si Goldknopf n’était pas ultra-orthodoxe, la demande de l’exclure aurait été formulée. Personne ne le demanderait au député Itamar Ben-Gvir, le ministre désigné de la sécurité nationale, qui n’a pas servi dans l’armée, ou au député Bezalel Smotrich, le ministre désigné des finances, qui n’a fait qu’un bref passage sous l’uniforme. La question ne serait probablement pas soulevée contre un colon qui n’a pas servi dans l’armée. Mais contre un membre de la communauté ultra-orthodoxe, elle est autorisée.

 

Itamar Ben-Gvir à la Knesset, 2022.Photo : Ohad Zwigenberg

L’image d’un décideur en matière de sécurité affublé d’un schtreimel, un vieil homme barbu parlant yiddish, est intolérable pour les laïcs. Ils pardonneront aux colons leur violence et leur avidité en formant la coalition, mais ils ne pardonneront pas aux haredim leur avidité, qui n’est pas plus grande que celle des colons et est beaucoup moins dangereuse. Haim-Moshe Shapira, le leader sioniste religieux et ministre des anciens jours, n’a pas servi dans l’armée. À la veille de la guerre des Six Jours, il a pris une position très courageuse, qui aurait peut-être permis à Israël de ne pas devenir un État d’apartheid, en s’opposant fermement à la décision d’entrer en guerre. Qui sait, peut-être, même si c’est peu probable - les ultra-orthodoxes ont tellement changé depuis 1967 - Goldknopf nous sauvera-t-il de la prochaine guerre.

Au-dessus de tout cela flotte la haine des haredim, qui s’est encore renforcée et justifiée par les actions de leurs représentants politiques - plus avides et plus exploitants que jamais, abandonnant la règle selon laquelle ils ne deviennent pas ministres, mais seulement vice-ministres. Pourtant, la haine des ultra-orthodoxes n’est pas proportionnée ; si seulement les Israéliens éclairés pouvaient haïr les colons, qui ont provoqué des désastres bien plus importants que tous les résidents de Bnei Brak et d’Elad réunis. Parmi les non-haredim, le service militaire est toujours considéré comme une “valeur”, au centre-gauche plus qu’à droite. La gauche sioniste cherchera toujours des généraux comme leaders, elle saisira toujours l’armée pour justifier ses opinions. Mais une gauche où le service militaire est principalement un ticket d’entrée pour autre chose n’est pas une gauche.

En Europe, qui est aujourd’hui confrontée à des défis complexes en matière de sécurité, il y a des femmes ministres de la défense qui ont réussi et qui n’ont pas servi un seul jour dans une armée. Le jugement de Goldknopf peut être jugé insuffisant, mais pas parce qu’il n’a pas servi dans l’armée. Nous avons vu le jugement des généraux dans le passé, et nous avons vu les résultats. À côté des Yoav Gallant** qui savent tout, il devrait aussi y avoir une place pour les Goldknopf.

NdT

**Yoav Gallant : général dont la nomination comme chef d’État-major fut annulée en 2011 suite à des allégations d’appropriation illégale d’un terrain [ce qui, généralement, est un mérite dans la galaxie sioniste].

 

 

08/12/2022

NOA SHPIGEL
Comment Avi Maoz, l'allié anti-LGBTQ de Netanyahou, s’est radicalisé

 Noa Shpigel, Haaretz, 6/12/2022
Liza Rozovsky a contribué à cet article

Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

La transformation du président du parti Noam, Avi Maoz, de jeune idéaliste en politicien religieux et ultraconservateur a surpris beaucoup de ceux qui le connaissaient. Voici l'histoire d'un homme destiné à exercer un grand pouvoir.

Avi Maoz. Photos : Olivier Fitoussi/Bureau du porte-parole de Noam/AP ; Montage : Masha Zur Glozman

À la fin des années 1970, un Avi Maoz ému se tient sur la pelouse de son kibboutz et se marie. C'était un jeune homme idéaliste, membre du groupe qui a fondé le kibboutz Migdal Oz en Cisjordanie. Le mariage de Maoz et de Galit a été célébré par le défunt rabbin Menachem Froman, un militant pacifiste et poète qui s'opposait à l'occupation et prônait un État binational.

Une personne qui vivait à Migdal Oz à l'époque raconte que Maoz et le modéré Froman étaient proches, qu'ils travaillaient ensemble. Des décennies plus tard, Maoz est devenu un adepte de la doctrine de Rabb Zvi Thau, le chef de la yeshiva conservatrice et radicale Har Hamor, dont les opinions étaient à des années-lumière de celles de l'humaniste Froman.

Les personnes qui ont parlé avec Haaretz cette semaine ont eu du mal à expliquer sa radicalisation. Maoz est aujourd'hui président du parti Noam, avec lequel le Premier ministre désigné Benjamin Netanyahou a signé un accord de coalition qui confère à Maoz un grand pouvoir.

Selon cet accord, Maoz sera nommé vice-ministre au sein du cabinet du Premier ministre et dirigera une nouvelle autorité pour « l'identité nationale juive » au sein du bureau du Premier ministre. En outre, Maoz devrait être responsable du Nativ, le bureau qui évalue le droit des personnes originaires des anciens pays soviétiques à immigrer en Israël.

 

Avi Maoz avec un masque facial à la Knesset, en 2021.Photo : Emil Salman

Il pourrait ainsi déterminer que les petits-enfants de Juifs et ceux qui ont subi des conversions non orthodoxes n'ont pas le droit d'immigrer en Israël en vertu de la loi du retour.

Maoz vit à Jérusalem-Est, dans le quartier à prédominance arabe de Silwan, connu sous le nom d'Ir David par certains Israéliens juifs. Il est né Avi Fischheimer dans une famille qu'il a un jour décrite comme « une famille Hapoel Mizrachi ordinaire » - un parti travailliste sioniste religieux. Il grandit dans le quartier de Kiryat Shmuel à Haïfa, fréquente un lycée religieux et s'engage dans la brigade Nahal. Après sa libération de l'armée, il a rejoint le groupe qui a créé Migdal Oz dans le Bloc de colonies Gush Etzion.

Hadassah, la femme de Froman, qui a rencontré Maoz à Migdal Oz, raconte qu'il « était le membre dirigeant de Migdal Oz. Il était très idéaliste, avec un cœur ouvert et beaucoup de lumière intérieure. Nous avions un lien très étroit. Il était très enthousiaste à l'égard des idées de Menachem - créer des assemblées spéciales, mettre des rassemblements à l'ordre du jour - Maoz était vraiment son partenaire. C'était une période très agréable ».

Plus tard, dit-elle, il y a eu une scission. « Lorsque nous avons approfondi le mouvement de colonisation, Menachem a considéré le conflit israélo-palestinien en des termes plus nets, plus définis ; au début, il n'était pas comme ça », dit Froman.

Des protestataires manifestent devant la Knesset contre Benjamin Netanyahou et Avi Maoz, suite au précédent tour des élections de 2021, qui a vu Maoz devenir le seul représentant du parti Noam à la Knesset.Photo : Ohad Zwigenberg

« Il a compris que ce que nous devions faire était d'aller avec eux et non contre eux. Et plus la gauche et la droite s'éloignaient l'une de l'autre, plus le fossé se creusait, et une polarisation interne au sein de la communauté des colons se développait. Lorsque le clivage s'est renforcé, nous n'étions plus à Migdal Oz. Je ne peux pas dire ce qui est arrivé à Maoz. Il est allé jusqu'à l'extrême ».

31/10/2021

GIDEON LEVY
En Israël, la droite juive agit et la gauche juive bavasse

Gideon Levy, Haaretz, 31/10/2021
Traduit par
Fausto Giudice, Tlaxcala

La frustration et la rage de la vraie gauche en Israël s'accumulent. Deux auteures de Haaretz ont exprimé cette indignation : « Vous n'avez pas seulement assassiné. Vous avez assassiné et hérité. Quelqu'un a-t-il le moindre doute que le sionisme religieux a hérité du pays ? Où que vous regardiez aujourd'hui, vous voyez le sionisme religieux.

Ils sont partout. Avec des kippas, sans kippas, à droite, à gauche, au gouvernement et dans l'opposition, dans toute la structure de commandement de l'armée, dans la police, au bureau du procureur de l'État, dans les médias. Aujourd'hui, tout le monde parle le langage du sionisme religieux », écrit Carolina Landsmann, dans un cri du cœur.

Trois jours plus tard, l'ancienne présidente du Meretz, Zehava Galon, a écrit, avec une colère encore plus féroce : "Écoute, espèce d'animal raciste, homophobe, xénophobe et misogyne, qui essaies de nous entraîner dans un régime de type taliban - nous n'avons pas peur de toi... Maintenant, dégage, avant que nous te traitions comme nous avons traité les premiers fascistes », en faisant référence à ce qui serait une réponse correcte du centre et de la gauche à la droite.

Des membres du mouvement du Front rose manifestent devant la résidence du Premier ministre, rue Balfour à Jérusalem, à l'été 2020. Photo : Ohad Zwigenberg

 Une femme colon juive s'entraînant à tuer des "terroristes arabes". Photo Rina Castelnuovo

La gauche sioniste moralisatrice n'aime pas cette rage. Elle leur casse les oreilles - et ils préfèrent la tranquillité polie. Mais il y a tellement de raisons d'être en colère.