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17/02/2022

La France au Sahel, fausse note dans la petite musique élyséenne au sommet UE-Afrique
Tribune collective

Tribune collective sur le sommet Union européenne-Union africaine et les annonces qui devraient y être faites, notamment concernant l'intervention militaire française au Mali.

« Un moment décisif de la présidence française de l'Union européenne » : c’est ainsi que Franck Riester, ministre délégué au Commerce extérieur auprès du ministre des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian, a qualifié début janvier le sommet Union européenne (UE)-Union africaine (UA) qui se déroulera à Bruxelles ces 17 et 18 février [1]. De fait, cet évènement sera sans doute le dernier acte de la comédie du président-pas-encore-candidat à laquelle assistent les ressortissants de l’UE, dont Emmanuel Macron assume une opportune présidence depuis le 1er janvier. Un rendez-vous qui devait venir conclure en beauté une partition initiée en novembre 2017, sur le jeune président refondateur des relations franco-africaines, et dont la petite musique s’est déroulée jusqu’au sommet Afrique-France de Montpellier : c’était compter sans les fausses notes liées aux rebondissements récents au Mali puis au Burkina Faso.

Un sommet de communication macronienne

Ce sommet devait en effet être la vitrine européenne des efforts de communication français. « L'UE souhaite demeurer à tous égards, le premier partenaire de l'Afrique sur le plan économique, commercial, mais aussi en matière de sécurité, d'aide publique au développement et humanitaire », déclarait le même Franck Riester, faisant peu de mystère de l’intérêt pour Paris d’une telle stratégie « européenne ». L’obsession récurrente du verrouillage des migrations et l’avenir des « accords de partenariat économique » (APE) devraient constituer des volets importants des discussions, dans un contexte de libéralisation continue de l’économie africaine, incarné notamment par la Zone de libre-échange africaine (ZLECAf, dont la structuration se poursuit [2]). Mais l’Elysée pouvait aussi espérer utiliser ce sommet pour mettre en scène le « renouveau » qu’Emmanuel Macron tente d’incarner, en matière de politique africaine comme ailleurs. Le « jeune » président, qui aime à rappeler qu’il n’a pas connu l’époque de la colonisation, entend ainsi à nouveau s’afficher au côté du Rwandais Paul Kagame, ennemi d’hier pour Paris et désormais figure africaine de la réussite d’un modèle ultralibéral sur le plan économique – et verrouillé sur le plan politique. Le changement de nom de l’Agence française de développement (AFD), dont le principe a été acté lors du sommet de Montpellier, pourrait aussi être concrétisé à cette occasion, au nom de la priorité européenne donnée au « développement », quelques jours avant l’entrée en campagne officielle d’Emmanuel Macron.

Surtout, cet évènement devait être l’opportunité rêvée pour afficher l’européanisation de l’intervention militaire française au Sahel, par la montée en puissance de la Task Force Takuba, une mobilisation des forces spéciales de différents Etats membres en appui à l’armée malienne, permettant de justifier le retrait d’une partie du contingent de l’opération Barkhane.

La France enlisée, Takuba enterrée

Cette évolution du dispositif militaire tricolore au Sahel, en discussion depuis le début de l’année 2021, s’était subitement accélérée début juin 2021, Emmanuel Macron prenant même de court sa propre diplomatie et son état-major en brandissant la menace d’un retrait des troupes françaises du Mali. L’Élysée entendait ainsi répondre à la contestation croissante de Barkhane sur place, nourrie par les humiliations quotidiennes et la multiplication de bavures meurtrières [3], mais aussi et surtout dans la classe politique et l’opinion publique françaises, au vu de l’enlisement de cette opération. Pour désamorcer la colère de la rue malienne, dont les militaires au pouvoir à Bamako depuis mai 2021 essaient de tirer leur légitimité, le calcul à Paris depuis l’été dernier était de faire oublier le drapeau français, pour mettre en avant un nouvel étendard : présentée commune une force « européenne », la Task Force Takuba restait pourtant un artefact de l’interventionnisme français, puisque le protocole établi en mars 2020 avec les autorités maliennes d’alors prévoit que les pays contributeurs doivent obtenir le feu vert de la France pour participer à l’opération [4] et que la force Takuba reste subordonnée au commandement de Barkhane. Comment s’étonner, dès lors, que le ressentiment légitime contre la politique africaine de la France (qui s’est régulièrement ingérée dans les affaires maliennes depuis 2013, jusque dans le choix des Premiers ministres ou encore en bloquant toute négociation politique avec certains groupes armés) se reporte sur ses partenaires européens, comme le Danemark dont les forces spéciales ont récemment dû quitter le pays à la demande de Bamako ?

16/01/2022

ANTONIO MAZZEO
Les forces armées italiennes sont prêtes pour la guerre au Mali

 Antonio Mazzeo, Africa Express,  15/1/2021
Traduit par
Fausto Giudice, Tlaxcala

Nous avons vraiment décidé de nous faire du mal. Et beaucoup. On ne pouvait pas choisir un pire moment pour rendre la nouvelle mission militaire italienne au Mali à 100% opérationnelle. Le pays sahélien, durement éprouvé politiquement, économiquement et socialement par les deux coups d'État orchestrés en août 2020 et mai 2021, a été mis au ban de la CEDEAO (Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest) car l'homme fort de Bamako, le colonel Assimi Goïta, ne montre aucune intention de favoriser une véritable transition démocratique. Le report des élections, initialement prévues en février, a convaincu l'organisation africaine de fermer ses frontières avec le Mali et de brandir la menace de nouvelles sanctions, telles que la suspension des transactions financières et le gel des avoirs de l'État dans les banques des États membres.Mali : Assimi Goïta hier, aujourd’hui... Encore et encore

14 pays européens et le Canada se sont prononcés contre le gouvernement du colonel Goïta, irrités par l'autorisation et le financement de troupes mercenaires sur le territoire malien. En particulier, la célèbre société de contractants russes Wagner, proche de l'establishment poutinien, est à l'index, mais aussi les fournitures militaires que Moscou vient d'envoyer à l'État africain (dont quatre hélicoptères de transport et de combat Mi-171). Les relations avec la France sont encore plus mauvaises : le président Emmanuel Macron a accéléré le retrait d'une partie du contingent déployé au Sahel (sur les 5 000 militaires début 2021, il en restera 3 000 fin 2023) et fin 2021, les bases de Kidal, Tessalit et Tombouctou, utilisées depuis août 2014 dans le cadre de la mission « anti- terroriste » Barkhane, ont été rendues aux forces armées maliennes.


Les Français partent, en partie, pour être remplacés par leurs plus fidèles partenaires européens, l'Italie en tête, totalement inconsciente du scénario géostratégique très compliqué et dangereux au Sahel. Paris demandait depuis des années à l'UE un partage du fardeau militaire et financier en Afrique sub-saharienne. Ainsi, en janvier 2020, Macron a lancé la Task Force Takuba (Épée en langue tamasheq), une mission multinationale dirigée par la France, à laquelle se sont déjà joints l'Italie, la Belgique, le Danemark, l'Estonie, l'Allemagne, la Grèce, la Norvège, les Pays-Bas, le Portugal, le Royaume-Uni, la République tchèque, la Roumanie, l'Espagne et la Suède.