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26/10/2025

L’Audience nationale espagnole ouvre une enquête pour “complicité de génocide” sur les dirigeants de l’entreprise basque Sidenor, qui a vendu de l’acier à une entreprise militaire israélienne

 NAIZ, 24/10/2025
Traduit par Tlaxcala

L’Audience nationale espagnole a mis en cause l’un des principaux chefs d’entreprise basques dans le cadre d’une enquête sur la vente d’armes à Israël : José Antonio Jainaga, président de Sidenor. Il est accusé d’avoir vendu de l’acier destiné à la fabrication d’armement à Israël, sans autorisation du gouvernement espagnol ni enregistrement officiel.


Jainaga entre le lehendakari (président du gouvernement basque) Imanol Pradales (à g.) et le conseiller à l’Industrie, à la Transition énergétique et à la Durabilité, Mikel Jauregi Letemendia, lors d’un récent événement (Irekia).

L’enquête judiciaire

Le juge Francisco de Jorge, de l’Audience nationale, enquête sur le président de Sidenor, José Antonio Jainaga Gómez, et deux autres dirigeants pour “contrebande” et “complicité dans un crime contre l’humanité” ou “génocide”, en lien avec la vente d’acier à la société d'abord appelée Israel Military Industries puis IMI Systems, avant de devenir Elbit Systems Land suite à son rachat par Elbit Systems.

Selon le tribunal, le juge considère que les personnes mises en cause savaient parfaitement que le matériel serait utilisé pour la production d’armement.

Ce vendredi, le juge a levé le secret de l’instruction et a indiqué que la vente d’acier aurait été réalisée sans autorisation du gouvernement espagnol et sans inscription au registre correspondant, selon un rapport de la Commissariat général de l’Information daté du 10 septembre.

Les trois personnes poursuivies – à la suite d’une plainte de l’Association Comunitat Palestina de Catalunya et de la Campagne Fin al comercio de armas con Israel– ont été convoquées pour être interrogées le 12 novembre.

Jainaga est une figure majeure du patronat basque, étroitement liée au gouvernement de Lakua* (Vitoria-Gasteiz). Son influence s’est illustrée dans l’opération visant à consolider la propriété du constructeur ferroviaire Talgo, où il a dirigé le “consortium basque”.

Les arguments du juge

Pour le magistrat Francisco de Jorge, les faits commis à Gaza sont de notoriété publique, tant par la couverture médiatique quotidienne que par les qualifications provisoires de crimes émises par la Cour pénale internationale (CPI), ainsi que par les dénonciations de la Rapporteure spéciale de l’ONU, Francesca Albanese, et par l’UNRWA, entre autres.

Selon lui, ces faits pourraient constituer à la fois un délit de contrebande, au sens de la Loi organique de répression du commerce illicite, et un délit de complicité dans un crime contre l’humanité (articles 29 et 607 bis du Code pénal), ou, à titre subsidiaire, un délit de complicité dans un génocide (article 607).

Le juge estime que ces faits sont également imputables à la société Clerbil S.L., administratrice unique de Sidenor Holdings Europa.

En revanche, il considère qu’il n’est pas approprié, à ce stade, de poursuivre Sidenor Aceros Especiales S.L.U. en tant que personne morale, “en raison du rôle actif de ses salariés, de leur contribution à la dénonciation publique et de leurs efforts pour empêcher la poursuite de l’activité présumée illégale”.

Le tribunal précise que cette décision se fonde sur la Directive européenne (UE) 2019/1937 et sur la loi espagnole 2/2023 du 20 février, qui protège les lanceurs d’alerte et la lutte contre la corruption.

Le juge souligne que cette protection peut s’appliquer à des personnes morales considérées comme informatrices, puisqu’il s’agit ici de protéger les intérêts des travailleurs par le biais de la société concernée, laquelle ne sera pas affectée par les mesures conservatoires ni par d’éventuelles sanctions pénales contre d’autres entités ».

Manifestation contre la présence du ZIM Luanda dans le port de Barcelone

Méga-graffiti à l’entrée sud du port de Barcelone, où sont stockés les containers transportés par la compagnie israélienne ZIM Integrated Shipping Services (créée en 1945 par l’Agence Juive et l'Histadrout)

La plainte pour contrebande et génocide

La plainte à l’origine de l’enquête a été déposée le 1er juillet par la Comunitat Palestina de Catalunya, accusant Sidenor de “possible délit de contrebande” et réclamant des “mesures urgentes”, notamment l’inspection et la saisie d’un conteneur du navire ZIM Luanda au port de Barcelone, où se trouverait le matériel.

Selon l’organisation Prou Complicitat Amb Israel [Assez de complicité avec Israël], le ZIM Luanda était amarré à Barcelone pour charger 40 blocs de barres d’acier produits par Sidenor et destinés au port israélien de Haïfa.

La plainte mentionnait également “un possible crime de génocide et des crimes contre l’humanité.”

Suspension des ventes de Sidenor après des pressions basques

Ce même jour, Sidenor annonçait la suspension de ses ventes d’acier à Israël, justifiant sa décision par la suspension, en avril, des autorisations d’exportation décidée par le gouvernement espagnol.

L’entreprise précisait alors que ses ventes à des entreprises israéliennes représentaient moins de 0,5 % de son chiffre d’affaires total en 2024.

Ce vendredi, Sidenor a publié un communiqué bref, indiquant qu’elle avait confié l’affaire à ses avocats et qu’elle suivrait leurs instructions “pour répondre au juge et lui fournir toutes les informations disponibles”.

Ces événements coïncidaient, le 1er juillet, avec une conférence de presse des syndicats ELA, LAB et ESK**, aux côtés de la plateforme BDZ, qui exigeaient de Sidenor l’arrêt immédiat de toute relation commerciale avec Israël et la suspension de l’envoi prévu d’acier depuis Barcelone ce jour-là.

Le mouvement BDZ Euskal Herria (Boycott, Désinvestissement, Sanctions Pays Basque) dénonçait déjà le fait que que, comme d’autres entreprises basques telles que CAF ou Metro Bilbao, Sidenor entretenait des liens économiques avec Israël.

Après l’annonce de Sidenor, le syndicat LAB a salué une “victoire de la solidarité basque envers la Palestine” et déclaré qu’il resterait “vigilant pour s’assurer de l’application réelle de cette décision.”

BDZ : “Le cas Sidenor n’est pas une exception”

Dans un communiqué, BDZ Euskal Herria a affirmé que cette enquête “confirme ce que nous dénonçons depuis des années : l’implication d’entreprises basques dans le soutien économique, technologique et industriel du système d’occupation et d’apartheid imposé par Israël au peuple palestinien.”

L’organisation ajoute que “le cas Sidenor n’est pas isolé. Des entreprises telles que CAF, impliquée dans la construction et l’entretien du tramway de Jérusalem traversant les territoires palestiniens occupés ; AMC Mecanocaucho, qui fournit des composants destinés à des projets du complexe militaro-industriel israélien ; Metro Bilbao et Osakidetza, ayant sous-traité des services de sécurité à l’entreprise israélienne I-Sec, font partie d’un réseau de coopération économique contraire aux principes fondamentaux d’éthique et de respect des droits humains.”

“Il faut rompre tout lien avec le système colonial et d’apartheid de l’entité sioniste. La bonne nouvelle, c’est que c’est possible. Les gouvernements doivent agir concrètement, la justice doit faire son travail, et le mouvement populaire doit poursuivre son engagement”, conclut BDZ.

NdT

*Lakua : localité où siège le gouvernement basque

**ELA : Eusko Langileen Alkartasuna (Solidarité des travailleurs basques). Il s'agit du syndicat majoritaire au Pays basque et l'un des plus importants d'Espagne.

LAB : Langile Abertzaleen Batzordeak (Commissions ouvrières abertzales), syndicat nationaliste basque de gauche.

ESK : Ezker Sindikalaren Konbergentzia (Convergence de la gauche syndicale). Syndicat de base non lié à des partis politiques, qui défend en particulier les travailleurs les plus précaires.

Ya no es posible ser palestino en Cisjordania

Gideon Levy, Haaretz, 26/10/2025

Traducido por Tlaxcala

Mientras Trump promete a los países árabes que la anexión israelí “no ocurrirá”, da la espalda a la destrucción, al despojo, a la pobreza, a la violencia de los colonos y a los abusos militares en Cisjordania, permitiendo que el tormento continúe: no hay alto el fuego.

Palestinos junto a una carretera destruida tras una operación militar israelí en la ciudad cisjordana de Tubas, la semana pasada.
Foto Majdi Mohammed / AP

En Cisjordania, nadie ha oído hablar del alto el fuego en Gaza: ni el ejército, ni los colonos, ni la Administración Civil, y, por supuesto, tampoco los tres millones de palestinos que viven bajo su tiranía. No sienten en absoluto el fin de la guerra.

De Yenín a Hebrón, no hay ningún alto el fuego a la vista. Desde hace dos años reina en Cisjordania un régimen de terror, bajo la cobertura de la guerra en la Franja, que sirve como pretexto dudoso y cortina de humo, y no hay señales de que vaya a terminar.

Todos los decretos draconianos impuestos a los palestinos el 7 de octubre siguen vigentes; algunos incluso se han endurecido. La violencia de los colonos continúa, al igual que la implicación del ejército y la policía en los disturbios. En Gaza muere y se desplaza menos gente, pero en Cisjordania todo sigue como si no existiera ningún alto el fuego.

La administración Trump, tan activa y resuelta en Gaza, cierra los ojos ante Cisjordania y se miente a sí misma sobre la situación allí. Bloquear la anexión le basta. “No sucederá porque di mi palabra a los países árabes”, declaró el presidente Donald Trump la semana pasada, mientras a sus espaldas Israel hace todo lo posible en Cisjordania para destruir, despojar, maltratar y evitar cualquier posibilidad de vida.


Colonos israelíes lanzan piedras hacia aldeanos palestinos durante un ataque al pueblo cisjordano de Turmus Ayya, en junio.
Foto Ilia Yefimovich / dpa

A veces parece que el jefe del Mando Central del ejército israelí, Avi Bluth, fiel y obediente a su superior —el ministro de Finanzas Bezalel Smotrich, también ministro en el Ministerio de Defensa—, está llevando a cabo un experimento humano, junto con los colonos y la policía: veamos cuánto podemos atormentarlos antes de que estallen.

La esperanza de que su ansia de abuso se apaciguara junto con los combates en Gaza se desvaneció. La guerra en la Franja no era más que una excusa. Cuando los medios evitan Cisjordania y la mayoría de los israelíes —y de los usamericanos— no se preocupan realmente por lo que ocurre allí, el tormento puede continuar.

El 7 de octubre fue, en efecto, una oportunidad histórica para que los colonos y sus colaboradores hicieran lo que no se habían atrevido a hacer durante años.


La familia Zaer Al Amour, en las colinas del sur de Hebrón —una región a menudo sometida a la violencia de colonos y militares—, monta guardia por turnos desde el atardecer hasta la mañana para proteger sus tierras.
Foto Wisam Hashlamoun / Anadolu vía AFP

Ya no es posible ser palestino en Cisjordania. No ha sido destruida como Gaza, no han muerto decenas de miles de personas, pero la vida allí se ha vuelto imposible. Es difícil imaginar que el férreo control de Israel pueda durar mucho más sin una explosión de violencia —justificada, esta vez.

Entre 150 000 y 200 000 palestinos de Cisjordania que trabajaban en Israel están desempleados desde hace dos años. Dos años sin un solo séquel de ingresos. Los salarios de decenas de miles de empleados de la Autoridad Palestina también se redujeron drásticamente debido a la retención por parte de Israel de los impuestos que recauda para dicha Autoridad.

La pobreza y la miseria están por todas partes. También los bloqueos y los puestos de control; nunca ha habido tantos, y durante un período tan prolongado. Ahora son cientos.

Cada asentamiento tiene puertas de hierro cerradas, o que se abren y cierran por turnos. Es imposible saber qué está abierto y qué no —y, más importante aún, cuándo. Todo es arbitrario. Todo ocurre por la presión de los colonos, que han convertido al ejército israelí en su siervo sumiso. Así es cuando Smotrich es el ministro de Cisjordania.


Una casa incendiada durante los disturbios de 2023 en la aldea de Huwara. Smotrich ya hablaba en 2021 de un “Plan decisivo”.
Foto Amir Levi

Aproximadamente 120 nuevos puestos avanzados de colonización, casi todos violentos, se han establecido desde el maldito 7 de octubre, abarcando decenas de miles de hectáreas, todos con el apoyo del Estado. No pasa una semana sin nuevos puestos avanzados; también es inédita la magnitud de la limpieza étnica que buscan: Hagar Shezaf informó el viernes que, durante la guerra de Gaza, los habitantes de 80 aldeas palestinas de Cisjordania huyeron por miedo a los colonos que se habían apoderado de sus tierras.

El rostro de Cisjordania cambia a diario. Lo veo con mis propios ojos asombrados. Trump puede presumir de haber detenido la anexión, pero la anexión está más arraigada que nunca.

Desde el centro de mando que el ejército usamericano estableció en Kiryat Gat se puede quizá ver Gaza, pero no se ve Kiryat Arba, la colonia cercana a Hebrón.

Cisjordania clama por una intervención internacional urgente, tanto como la Franja de Gaza. Soldados —usamericanos, europeos, emiratíes o incluso turcos—: alguien debe proteger a sus indefensos habitantes. Alguien debe rescatarlos de las garras del ejército israelí y de los colonos.

Imagina a un soldado extranjero en un puesto de control deteniendo a los matones colonos en su camino hacia un pogromo. Un sueño.