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22/09/2025

MONA ALI KHALIL
Que peut faire l’Assemblée générale de l’ONU pour mettre fin à l’occupation israélienne ?

  Mona Ali Khalil, PassBlue, 14/9/2025
Traduit par Tlaxcala

Mona Ali Khalil est une juriste de droit international public reconnue au niveau international, avec 30 ans d’expérience à l’ONU et ailleurs, notamment comme ancienne haute responsable juridique à l’ONU et à l’AIEA. Spécialiste du maintien et de l’imposition de la paix, du désarmement et de la lutte contre le terrorisme, elle est titulaire d’un B.A. et d’un M.A. en relations internationales de l’Université Harvard, ainsi que d’un master en relations internationales et d’un doctorat en droit de l’Université de Georgetown. Elle est fondatrice et directrice de MAK LAW INTERNATIONAL et collaboratrice du Harvard Law School Program on International Law and Armed Conflict. Elle est coauteure de plusieurs publications, dont Empowering the UN Security Council: Reforms to Address Modern Threats, the UN Security Council Conflict Management Handbook et Protection of Civilians.

 

Des visiteurs observent la mosaïque « La règle d’or », inspirée d’une peinture de l’artiste usaméricain Norman Rockwell, lors d’une visite guidée du siège de l’ONU. On y lit : « Fais aux autres ce que tu voudrais qu’ils te fassent ». Comme il apparaît improbable qu’Israël se conforme à l’avis consultatif de la Cour internationale de Justice (CIJ) sur le Territoire palestinien occupé avant la date butoir du 18 septembre, l’Assemblée générale peut néanmoins prendre des mesures spécifiques pour faire respecter cet avis consultatif. (PHOTO ONU)

Avec la multiplication des colonies illégales et l’explosion de la violence des colons en Cisjordanie, et avec la famine et les bombardements incessants ayant déjà causé la mort de plus de 64 000 Palestiniens à Gaza, en majorité des femmes et des enfants, le monde observe ce que l’Assemblée générale peut faire — ou non — pour garantir que des conséquences réelles soient appliquées aux violations flagrantes par Israël des Conventions de Genève et de la Convention sur le génocide.

Quelques jours avant l’échéance du 18 septembre fixée par l’Assemblée générale des Nations unies pour qu’Israël se conforme à l’avis consultatif rendu par la CIJ — avis qui a confirmé le caractère illégal de l’occupation, de l’annexion et de la colonisation du Territoire palestinien occupé (TPO) —, Israël n’a pas obéi. Il n’a ni mis fin à son occupation illégale, ni démantelé ses colonies illégales, ni évacué ses colons illégaux.

Au contraire, le Premier ministre Benjamin Netanyahou et sa coalition d’extrême droite ont déclaré leur intention d’intensifier exponentiellement l’activité de colonisation et d’envisager l’annexion de la Cisjordanie, y compris Jérusalem-Est. Ils ont également rendu publics des plans de recolonisation de Gaza et, à cette fin, ont accéléré l’anéantissement de la bande de Gaza, menant une campagne génocidaire de bombardements incessants, de déplacements forcés et de famine généralisée visant l’ensemble de la population palestinienne.

Il y a près d’un an, le 18 septembre 2024, la 10e session extraordinaire d’urgence de l’Assemblée générale, agissant dans le cadre de la résolution « Unis pour la paix », a adopté à une écrasante majorité une résolution visant à mettre en œuvre l’avis consultatif de la CIJ du 19 juillet 2024. Dans cette résolution, l’AG a réaffirmé la conclusion de la Cour selon laquelle Israël doit se retirer du TPO, démanteler ses colonies et évacuer ses colons aussi rapidement que possible. L’AG a fixé un délai de 12 mois pour qu’Israël s’y conforme, qui expire le 18 septembre 2025.

Pourquoi Israël est-il obligé de se conformer à un simple avis consultatif ?

Bien que les avis consultatifs de la CIJ n’aient pas, en règle générale, de force obligatoire, dans la mesure où l’avis de 2024 confirme des normes impératives (jus cogens) et identifie des obligations contraignantes (erga omnes), ces normes et obligations demeurent obligatoires pour tous les États, y compris Israël.

En réalité, la CIJ n’a pas seulement identifié des obligations contraignantes pesant sur Israël en tant que puissance occupante, elle a également identifié des obligations contraignantes pour tous les États et pour l’ONU elle-même. Il appartient désormais aux États et à l’ONU — y compris au Conseil de sécurité et, à défaut, à l’Assemblée générale — de garantir la mise en œuvre des éléments contraignants de l’avis consultatif.

Si l’AG ne peut imposer d’obligations contraignantes aux États membres réticents, la résolution « Unis pour la paix » codifie son autorité à recommander une action collective des États disposés et capables d’agir, et qui, selon la CIJ, sont tenus d’agir. Le principe de la Responsabilité de protéger rend cela encore plus crucial dans les situations impliquant un génocide, des crimes de guerre, des crimes contre l’humanité et un nettoyage ethnique.

Lorsque le Conseil de sécurité est dans l’incapacité d’assumer sa responsabilité en raison d’un veto d’un ou plusieurs de ses membres permanents, l’Assemblée générale peut et doit intervenir pour défendre la Charte de l’ONU et le droit international. La 10e session extraordinaire d’urgence sur le TPO, comme la 11e sur l’Ukraine, démontre que l’AG peut agir quand le Conseil de sécurité en est empêché. Néanmoins, elle n’a pas encore exploité tout le potentiel de la résolution « Unis pour la paix ».

Un précédent riche et solide

Née de la crise coréenne en 1950, la résolution a été invoquée pour la première fois en 1956, quand Israël, avec le soutien de la France et du Royaume-Uni, a envahi l’Égypte. Lors de cette première session extraordinaire, l’AG a créé la première force de maintien de la paix de l’ONU — la Force d’urgence des Nations unies (FUNU) — pour superviser le retrait de toutes les troupes étrangères d’Égypte.

Lors de sa quatrième session extraordinaire, l’AG a adopté un embargo sur les armes concernant la situation en République démocratique du Congo. À sa cinquième session, elle a appelé les États membres à faciliter l’assistance humanitaire pour soulager la souffrance des civils et des prisonniers de guerre au Moyen-Orient, et a exhorté Israël à annuler toutes les mesures visant à modifier le statut de Jérusalem. Lors de sa huitième session extraordinaire, l’AG a appelé les États membres à fournir une assistance militaire aux États de première ligne ainsi qu’à l’Organisation du peuple du Sud-Ouest africain (SWAPO) afin de renforcer sa lutte pour la libération de la Namibie.

La 10e session extraordinaire a été convoquée pour la première fois en 1997 afin de traiter des « actions israéliennes illégales dans Jérusalem-Est occupée et le reste du TPO ». Elle a été reprise plus de 20 fois entre 1997 et aujourd’hui. Elle a adopté une série de résolutions, dont certaines visant à protéger les civils et à faire respecter les obligations juridiques et humanitaires. Elle a aussi affirmé sa détermination à envisager des moyens pratiques pour garantir le respect de ces obligations.

Que peut faire l’AG pour « garantir le plein respect » de l’avis consultatif de la CIJ ?

À compter du 18 septembre 2025, ou peu après, la 10e session extraordinaire d’urgence peut recommander une ou plusieurs des six mesures concrètes suivantes, sur la base de ses propres précédents :

  • Exhorter les États membres à fournir une assistance humanitaire à la population palestinienne de Gaza et des autres parties du TPO ;
  • Autoriser les États membres à imposer des mesures diplomatiques, financières ou autres, y compris un embargo sur les armes contre Israël ;
  • Déployer une mission de maintien de la paix de l’ONU ou une force de protection civile, à la demande ou avec le consentement de l’Autorité palestinienne ;
  • Nommer une Commission des Nations unies et/ou un Commissaire des Nations unies pour administrer Gaza, comme l’AG l’a fait en Namibie en attendant le retrait des forces sud-africaines (même si la Commission n’avait pas pu être présente physiquement en Namibie en raison du refus sud-africain) ;
  • Appeler les Hautes Parties contractantes de la 4e Convention de Genève à convoquer une conférence sur la situation dans le TPO, afin de remplir l’obligation de tous les États de mettre fin à la présence illégale d’Israël dans le TPO aussi rapidement que possible ; et/ou
  • Refuser d’accepter les lettres de créance du gouvernement Netanyahou lors de la 80e session ordinaire de l’AG, comme elle l’a fait avec le gouvernement d’apartheid d’Afrique du Sud, vidant ainsi son siège à l’AG sans préjudice pour son appartenance à l’ONU.
Pour ceux qui disent que l’AG ne peut pas le faire : son propre passé prouve le contraire.
Pour ceux qui disent que l’AG ne veut pas le faire : le droit international et la CIJ l’exigent.
Pour ceux qui disent que l’AG ne peut pas faire appliquer ses résolutions : le Conseil de sécurité ne les a pas appliquées non plus.

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