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28/07/2024

ALEX DE JONG
Comment la gauche a organisé la diaspora philippine
Note de lecture du livre “Insurgent Comunities”

Alex de Jong , Jacobin, 2/7/2024
Versión española
Cómo la izquierda organizó la diáspora filipina
Traduit par
Fausto Giudice, Tlaxcala 

Alex de Jong est codirecteur de l’Institut international pour la recherche et l’éducation (IIRE) à Amsterdam, aux Pays-Bas, et rédacteur en chef du site ouèbe néerlandais Grenzeloos [Sans Frontières], édité par le groupe Politique alternative socialiste (SAP), section néerlandaise de la Quatrième Internationale (trotskyste)

 Plus de 10 % de la population des Philippines travaille à l’étranger et envoie des fonds qui sont essentiels à l’économie du pays. Un nouveau livre explique comment la gauche a conquis ce groupe, pour ensuite le perdre.

Note de lecture de Insurgent Communities : How Protests Create a Filipino Diaspora, par Sharon M. Quinsaat (University of Chicago Press, 2024) 

Lorsque des personnes partent à l’étranger et s’installent dans d’autres pays, elles ne forment pas automatiquement une diaspora. C’est plutôt l’activité politique et la mobilisation qui façonnent une diaspora, affirme Sharon M. Quinsaat, professeure agrégée de sociologie au Grinnell College (Iowa, USA), dans son ouvrage intitulé Insurgent Communities : How Protests Create a Filipino Diaspora.

 Pour plusieurs raisons, les migrants philippins constituent un cas intéressant. Non seulement la population migrante philippine, qui compte plus de dix millions de personnes réparties dans plus de deux cents pays et territoires à l’étranger, est l’une des plus importantes de tous les pays. La migration de la main-d’œuvre est un aspect essentiel de la politique économique de l’État. Et bien que les persécutions politiques aient poussé une partie de la diaspora philippine à quitter le pays, surtout pendant la dictature de Ferdinand Marcos entre 1972 et 1986, ce n’est pas le résultat de persécutions ethniques ou religieuses, les causes “classiques” des populations de la diaspora.

 Manifestation de Philippines sur la place du Dam à Amsterdam, Pays-Bas, contre les violations des droits humain aux Philippines, le 21 septembre 1987. (Sepia Times / Universal Images Group via Getty Images)

 Tant Bongbong Marcos, l’actuel président philippin et fils de l’ancien dictateur, que son prédécesseur, Rodrigo Duterte, ont joué un rôle important dans le blanchiment de l’héritage de Ferdinand Marcos, qui a été enterré en 2016 avec les honneurs militaires au cimetière national.

La diaspora philippine était autrefois une source importante de résistance contre la dictature, que les gouvernements conservateurs successifs ont cherché à réhabiliter. Aujourd’hui, une grande partie de la diaspora soutient des dirigeants de droite comme Duterte et Bongbong Marcos. Cette évolution ne s’est pas produite de manière isolée. Elle est, comme le montre Quinsaat, le résultat des transformations de la politique mondiale et du capitalisme.

 Modèles coloniaux et néocoloniaux

 Le colonialisme « a prédisposé les Philippines à devenir une nation d’émigration », écrit Quinsaat. La migration a commencé pendant la colonisation espagnole de l’archipel, mais à la fin du XIXe siècle, l’Espagne n’était plus le pays de destination que pour un groupe restreint mais influent de Philippins qui essayaient d’éviter les persécutions des autorités coloniales ou qui cherchaient à poursuivre leurs études.

Les demandes de réformes libérales de ces “Ilustrados” [éclairés], philippins éduqués et fortunés, initialement plutôt modestes, se sont inévitablement heurtées à l’attitude intransigeante des autorités coloniales - un nationalisme naissant fusionnant avec le mécontentement populaire suite à l’éclatement de la révolution philippine en 1896. Deux ans plus tard, les USA déclarent la guerre à l’Espagne et la nouvelle puissance montante prend le contrôle des Philippines, marquant une nouvelle ère coloniale et le « véritable début de l’émigration philippine ».

La politique coloniale usaméricaine a fait des Philippins des “ressortissants américains”, leur refusant les droits politiques tout en leur permettant de circuler librement à l’intérieur des frontières usaméricaines. Au début du XXe siècle, le gouvernement usaméricain a commencé à recruter des Philippins pour travailler dans les bases navales. Un grand nombre d’entre eux ont commencé à travailler dans des plantations à Hawaï et sur la côte ouest des USA. Nombre d’entre eux étaient des travailleurs saisonniers, voyageant entre les plantations et les fermes, occupant des emplois de grooms, cuisiniers, plongeurs et concierges pendant l’hiver. L’un d’entre eux, Carlos Bulosan, s’est inspiré de ses propres expériences et de celles des travailleurs philippins qui l’entouraient pour écrire le roman “America Is in the Heart” (L’Amérique est dans le cœur), un classique de la littérature prolétarienne.

En 1946, les USA ont officiellement déclaré l’indépendance des Philippines. Mais des traités liant les politiques économiques des Philippines à celles de leur ancien colonisateur, en offrant un traitement préférentiel aux entreprises usaméricaines, ont permis de consolider les liens entre les deux pays. La marine usaméricaine a également continué à recruter des Philippins, dont beaucoup ont fini par obtenir la nationalité usaméricaine et ont fait venir leur famille. Parmi les pionniers de l’émigration de main-d’œuvre philippine moderne, on trouve les infirmières qui, formées selon les normes usaméricaines, ont pu travailler à l’étranger.

En tant que communauté importante et établie de longue date, les Philippins des USA constituent un groupe évident à aborder dans le cadre d’une étude sur la diaspora philippine. Quinsaat compare leur cas à celui d’un autre groupe, moins connu : les Philippins des Pays-Bas. À partir des années 60 et 70, un petit nombre de travailleuses sont arrivées aux Pays-Bas, d’abord comme infirmières, puis dans l’industrie textile.

La maîtrise généralisée de l’anglais, héritage du colonialisme usaméricain et du système éducatif qu’il avait mis en place, a facilité cette migration, mais c’est la position néocoloniale des Philippines dans le capitalisme mondial qui a réellement fait du pays un exportateur de main-d’œuvre. En 1974, Ferdinand Marcos a officiellement institué le programme d’emploi à l’étranger et « déplacé le lieu de la migration internationale des USA vers de nouvelles destinations à travers le monde ». L’encouragement à la migration internationale s’est poursuivi après que le dictateur a été renversé par la protestation populaire en 1986.

Les mesures néolibérales, sous la forme d’un programme d’ajustement structurel imposé par le Fonds monétaire international et la Banque mondiale, ont entraîné une augmentation du chômage, l’agriculture et les entreprises philippines n’étant pas en mesure de faire face à la concurrence internationale. Combinées aux réductions des services publics et de la protection sociale imposées par le même programme, ces mesures ont conduit à l’extension de la pauvreté.

Dans ces conditions, « la migration n’est pas seulement devenue une solution politique officielle pour atténuer l’impact des crises grâce aux envois de fonds, mais aussi une stratégie d’adaptation - un mode de vie accepté - pour les Philippins ordinaires afin de surmonter les difficultés quotidiennes », écrit Quinsaat. Plutôt que d’essayer d’introduire des mesures qui s’attaqueraient aux causes profondes poussant les gens à quitter leur foyer et leur famille, les gouvernements philippins successifs ont poursuivi des politiques économiques qui ont enfermé le pays dans une position de fournisseur de main-d’œuvre et de ressources bon marché pour les capitaux internationaux.

Quinsaat souligne que « le cas des Philippines est unique en raison du rôle de l’État philippin dans la stimulation et la gestion de la migration de ses citoyens, reconnu par la Banque mondiale pour “son système d’aide aux travailleurs migrants très développé, qui est un modèle pour les autres pays d’origine” ».

Aujourd’hui, les travailleur·ses philippin·es basé·es à l’étranger constituent une partie essentielle de la classe ouvrière du pays. Représentant environ 10 % de la population totale du pays, ils·elles envoient plus de 30 milliards de dollars US, soit plus de 9 % du PIB des Philippines. L’émigration fonctionne également comme une “soupape de sécurité”, attirant de jeunes travailleur·ses à la recherche d’une vie meilleure pour eux·elles-mêmes et leurs proches. En d’autres termes, il s’agit du type de personnes qui constituerait un électorat naturel pour les mouvements d’opposition dans le pays.

 S’organiser pour le changement

 Insurgent Communities ne traite pas les Philippin·es travaillant à l’étranger comme de simples victimes des relations capitalistes internationales. L’essentiel de l’ouvrage traite des différentes manières dont il·elles se sont organisé·es pour résister à l’exploitation et à l’oppression dans leur pays et à l’étranger. Plus que toute identité ethnique naturelle, cette activité a été, selon Quinsaat, cruciale pour la formation de la diaspora philippine.

L’une des organisations qui a joué un rôle important dans ce processus est la Katipunan ng Demokratikong Pilipino (Union des démocrates philippins, KDP), basée aux USA. FondéE en 1973, la KDP a rassemblé différentes générations, unissant des militants nés aux USA et des migrants récents, et a fait le lien entre les luttes nationales et internationales. LA KDP « a mené une lutte transnationale sur deux fronts : contre la dictature de Marcos aux Philippines et contre le capitalisme aux USA ».

On espérait que la démocratie aux Philippines mettrait fin à la nécessité pour les Philippins de quitter le pays, tandis que la lutte pour le socialisme aux USA était considérée comme faisant partie de la lutte pour mettre fin à l’exploitation et au racisme auxquels les travailleur·ses philippin·es étaient confronté·es dans ce pays. L’idéologie de la KDP était fortement influencée par le maoïsme du parti communiste clandestin des Philippines (PCP), auquel ellel était étroitement lié pendant les années 70.

La KDP faisait partie intégrante de la radicalisation générale de la fin des années 60 et des années 70. De jeunes militants philippins-usaméricains « ont exprimé leur solidarité avec les communistes du Viêt Nam qui, selon eux, luttaient pour l’indépendance et l’autodétermination ». Ces radicaux considéraient la guerre du Viêt Nam comme le prolongement de l’impérialisme raciste usaméricain en Asie, qui avait déjà colonisé les Philippines. L’histoire des premières luttes anticoloniales aux Philippines a été récupérée, les jeunes radicaux se considérant comme les héritiers de cet héritage.

Comparée à celle des USA, la communauté philippine des Pays-Bas était petite et homogène. La première génération d’activistes est née en dehors de cette communauté. En 1975, des volontaires de l’aide au développement et des missionnaires néerlandais ont créé le Filippijnengroep Nederland (Groupe Philippines néerlandais) dans le but d’attirer l’attention sur les violations des droits humains dont ils avaient eu connaissance lors de leur séjour aux Philippines. Par un hasard de l’histoire, les Pays-Bas ont ensuite accueilli les principaux dirigeants du PCP qui, avec l’aide de congrégations religieuses, ont réussi à obtenir le statut de réfugiés dans le pays. Utrecht a accueilli le bureau du National Democratic Front (NDF) des Philippines, un front d’organisation de masse contrôlé par le parti et qui lui servait d’aile diplomatique.

La discussion de Quinsaat sur deux communautés très différentes montre les similitudes des défis auxquels les militant·es ont été confrontés. Tant aux États-Unis qu’aux Pays-Bas, les militant·es ont été confronté·es à des tensions liées au fait qu’ils·elles s’organisaient au sein de communautés ayant des liens différents avec des pays différents. La KDP a été confrontée à l’opposition de militant·es qui considéraient que son opposition à la dictature de Marcos était “source de division” et que son radicalisme dans les luttes menées aux États-Unis n’était pas apprécié par les militants libéraux philippins, y compris les exilés bourgeois des Philippines, qui voulaient faire pression sur l’État usaméricain pour qu’il fasse pression sur Marcos. Mais c’est le radicalisme de la KDP qui lui a permis de rassembler les migrants récents et les exilés de la lutte anti-dictatoriale aux Philippines et les jeunes générations aux USA, radicalisées par leur propre expérience du racisme et de l’exploitation.

« L’activisme façonne le moi et l’identité » : c’est ainsi que Quinsaat résume l’un des principaux thèmes de son livre. Ce n’est pas seulement l’identification des militants qui a changé ; en faisant partie de communautés et de mouvements plus larges, ils ont changé celle de groupes plus vastes. L’identification au peuple philippin a été séparée de la loyauté à l’État philippin par l’organisation de la lutte contre la dictature. Le nationalisme philippin s’est enrichi d’un nouveau contenu anti-impérialiste en se rattachant à l’histoire des révoltes anticoloniales, tandis que les identités culturelles se politisaient.

 Des marées politiques changeantes

 Insurgent Communities documente les tentatives des militant·es de la diaspora pour s’opposer à l’occultation de la dictature de Marcos, mais aujourd’hui, le soutien des travailleur·ses émigré·es à ces dirigeants de droite est très élevé. Alors que Marcos a obtenu 58 % des voix parmi les Philippins du pays, ce chiffre s’élève à 72 % pour les membres de la diaspora.

De nombreuses analyses de la popularité de Duterte et de Marcos évoquent le rôle de la désinformation qui présente la dictature comme un âge d’or pour les Philippines. Quinsaat souligne que, bien qu’il s’agisse d’un facteur important, la question se pose de savoir comment ces informations ont été reçues ; pourquoi les gens les ont-ils trouvées crédibles, comment ont-elles semblé avoir un sens pour eux ? Insurgent Communities est en partie un document sur le déclin des influences de gauche dans la diaspora philippine et leur remplacement par d’autres points d’identification qui présentent les difficultés du pays non pas en termes d’impérialisme et d’exploitation capitaliste, mais comme le résultat d’un prétendu manque de “discipline” et de la nécessité d’un leadership fort.

Tout comme son ascension, le déclin de l’influence de la gauche usaméricano-philippine ne peut être dissocié du déclin international de la gauche et de la perte de crédibilité du socialisme en tant qu’alternative. L’évolution de la situation aux Philippines n’entre pas dans le cadre de ce livre, mais la crise dans laquelle est entrée la principale organisation de la gauche philippine, le PCP, à la fin des années 80, a affecté les efforts internationaux qui étaient parfois directement liés au parti. L’attitude incohérente du parti et de son réseau transnational à l’égard de Duterte n’a pas aidé non plus. Malgré le nombre croissant de victimes de la soi -disant guerre contre la drogue, un certain nombre d’éminents militants nommés par le NDF ont continué à servir Duterte à des postes ministériels jusqu’après l’enterrement de Marcos.

 Insurgent Comunities est un ouvrage relativement court mais dense. Les lecteurs qui cherchent à comprendre l’évolution du sens de l’identification et les défis auxquels est confronté le militantisme transnational en tireront sans doute beaucoup d’enseignements. Pour les militants qui cherchent à créer de nouvelles communautés insurgées, ce livre est un outil précieux.

NdT

 

Larry Itliong (1913-1977) dirigeant ouvrier philippin, organisateur de la longue grève des vendangeurs de raisins à Delano (Californie) dans les années 1960 et de nombreuses autres luttes d’immigrés philippins, de l’Alaska à la Californie, a vu son rôle reconnu longtemps après sa mort. En 2015, à l'occasion du 50ème anniversaire du déclenchement de la grève de Delano, le gouverneur de Californie Jerry Brown a instauré le « Larry Itliong Day », fixé au 25 octobre, jour de sa naissance. 

 Manifestation à Times Square à New York le jeudi 30 juin 2022 contre le duo présidentiel élu, Marcos fils et Duterte fille, organisée par la Coalition du Nord-Est pour l’avancement d’une démocratie authentique aux Philippines, Gabriela New York, Bayan USA, Damayan Migrant workers Association et Malaya Movement. Les manifestants exigeaient notamment justice pour les victimes de l’état d’urgence durant la dictature de Marcos père et des exécutions extrajudiciaires sous Duterte. Photo DAVE LLAVANES JR.

 


 

RASHA HILWI
D’Akka à Téhéran : être mère face à l’injustice

Rasha Hilwi, Raseef22, 9/7/2024
Traduit par
Fausto Giudice, Tlaxcala

Rasha Hilwi est une écrivaine palestinienne, mère de famille, journaliste, éditrice, programmatrice culturelle, conteuse, DJ, féministe, et activiste culturelle. Née et élevée dans la ville d’Akka (Acre) en Palestine de 1948, elle vit aujourd’hui à Amsterdam.
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Je n’ai pas écrit un seul article depuis le début de la guerre génocidaire contre mon peuple à Gaza. Pendant des mois, j’ai évité d’écrire.

Lorsque j’ai commencé à écrire à la fin de mon adolescence à Akka, c’était parce que j’étais convaincue que l’écriture ne se résume pas à poser un stylo sur du papier ou des doigts sur un clavier. Même la création d’un texte personnel peut avoir des implications plus larges dans le monde extérieur et peut influencer le changement. Pour moi, l’écriture est un acte de résistance face à l’injustice, une tentative d’élever la voix des opprimés.

Mais la machine à tuer israélienne qui extermine les Palestiniens de Gaza - enfants, femmes et hommes - sous les yeux des gouvernements du monde et de leurs justifications, a créé un espace de doute quant à l’efficacité de l’écriture.

Je suis une femme palestinienne dont l’identité, les sentiments et les choix ont été façonnés par l’injustice qui a frappé sa famille lors de la Nakba de 1948, ainsi que par ce qu’elle a vécu à l’intérieur de la Palestine pendant plus de trente ans. Alors que j’étais partie, mon peuple était toujours là. Naturellement, l’écriture a été la première action face à ceux et celles qui tentaient d’effacer les récits de notre peuple, ses journaux intimes, ses peurs, ses rêves et sa résilience, ainsi que son insistance sur la vie.

Plus important encore, l’écriture est une tentative de récupérer la maison volée, ou du moins d’y appartenir, à l’intérieur d’un État qui a tout fait depuis la Nakba pour que les Palestiniens se sentent étrangers. La ghorbah est un sentiment pénible que nous ne connaissons que trop bien.

Plus important encore, l’écriture est une tentative de récupérer la maison volée, ou du moins d’y appartenir, dans un État qui, depuis la Nakba, a tout fait pour que les Palestiniens se sentent étrangers. Ghorbah est un sentiment difficile que nous ne connaissons que trop bien.

“Ghorbah” (غربة) vient du mot arabe “Gharb” (l’Occident), le mot “Tagharraba” (تغرّب) signifie se déplacer vers un autre endroit, loin de chez soi, être éloigné ou étranger. “Ghorbah” ne désigne pas seulement un lieu géographique, mais implique également la distance émotionnelle par rapport à la maison, même pour quelqu’un qui n’a jamais déménagé physiquement.

J’ai décidé de quitter la Palestine il y a neuf ans, à la recherche d’une autre maison à l’étranger. C’était un choix qui, au fond, était un privilège, car je suis une Palestinienne détentrice d’un passeport israélien, ce qui me permet de circuler librement en Europe.

Je ne m’attendais pas à ce que cette recherche de Ghorbah me permette de fonder un foyer, de former une famille et de devenir mère.


Mais maintenant que c’est fait, j’ai reçu une autre leçon : la maternité n’est pas une identité qui vous est donnée d’un seul coup, c’est une pratique avec laquelle vous devez vous familiariser chaque jour, dont vous devez apprendre et même désapprendre des choses. La maternité est une pratique qui a commencé lorsque j’ai donné naissance à mes filles, un événement qui s’est produit loin de mon premier foyer, la Palestine. Pendant les jours, les mois et les années où j’ai été confrontée à cette nouvelle identité, la Palestine a connu le « soulèvement de mai », l’assassinat de sa journaliste Shireen Abu Akleh, la guerre génocidaire contre Gaza et tant d’autres événements qui l’ont placée, ainsi que moi, la mère palestinienne éloignée, face à la question suivante : « Comment puis-je continuer à faire quoi que ce soit ? Comment puis-je continuer à faire quelque chose, même si c’est un simple acte, face à l’injustice ? »

Il y a quelques semaines, je me préparais à quitter la maison pour rejoindre une manifestation pour Gaza à Amsterdam. L’une de mes filles m’a demandé où j’allais. Lorsque je le lui ai dit, elle n’a d’abord pas compris. Puis j’ai dit : « Free, free Palestine ! ». En tant que famille, nous étions allées à une manifestation quelques jours auparavant, et j’ai pensé que ce chant clarifierait mon propos. Elle a réagi en portant la main à son oreille et en disant « Mama, owie » - elle se souvenait avoir été dérangée par les chants bruyants. Je lui ai dit : « Ce n’est pas grave, ma chérie. J’ai une vieille oreille. Elle a plus de soixante-dix ans ». Elle m’a souri, même si elle ne comprenait rien.

Je suis devenue mère de mes jumelles à la fin du mois de mars 2021. J’ai toujours voulu être mère, même lorsque je vivais encore en Palestine. Mais lorsque je pensais à la maternité, je n’imaginais pas que le père de mes enfants serait un non-Palestinien, ou même un non-arabe. Ce que nous imaginons est sans importance, car le cœur a toujours d’autres plans. Mon cœur s’est tourné vers la Perse. Plus précisément, vers un Iranien qui avait été contraint de quitter l’Iran et de fuir à Amsterdam. Lorsque j’ai fait part à ma mère de nos projets de mariage, elle m’a dit d’un ton sarcastique : « Nous t’avons envoyée en Europe pour que tu épouses un Iranien ? Qu’est-ce qui ne va pas avec les Néerlandais ? » Elle a ri, j’ai ri, et je lui ai dit : « Mais, maman, mon cœur va toujours vers celui qui a la même douleur ».

Sa douleur, même si elle n’est pas exactement la même que la mienne, est aussi celle de la perte de sa maison. Je n’ai pas perdu ma maison directement, mais mes grands-parents ont perdu la leur après que les milices sionistes ont procédé au nettoyage ethnique de leur village d’Iqrith. Ils ont vécu leur vie comme des réfugiés dans leur patrie et sont morts avant que leur rêve de retourner dans leur village natal ne se réalise. Un fait qui a façonné ma vie, mon identité, mes rêves et mes peurs. C’est ce qu’on appelle le traumatisme intergénérationnel.

Mon mari a perdu sa maison directement. Il était un enfant de trois ans lorsque son père s’est enfui pour la première fois afin d’éviter d’être tué après la prise de pouvoir des islamistes en Iran. Il s’est enfui à travers les montagnes et a atteint la Turquie. Son fils en bas âge et sa femme l’ont ensuite suivi sur la même route jusqu’à ce qu’ils se retrouvent à Istanbul pour finalement arriver aux Pays-Bas en tant que famille de réfugiés. Mon mari, qui a grandi en exil, ne peut pas se rendre dans sa ville natale, Téhéran, et sa mère, qui a souffert de démence pendant de nombreuses années, est morte en exil alors qu’elle rêvait de retourner dans son pays.

La question de la confrontation de l’injustice à l’intersection de la maternité s’est élargie depuis que je suis devenue mère de filles iraniennes-palestiniennes. Il aurait peut-être été plus facile d’y répondre si je ne m’étais pas réveillée chaque jour à la maison avec la douleur de la Palestine et de l’Iran. Cette douleur est présente et vit dans deux tableaux accrochés à notre mur. Notre propre galerie d’exilés décédés, expulsés de leur pays mais ayant une place dans notre maison, est exposée : ma grand-mère Salma et la mère de mon mari, Parvin.

Dans ma vie, l’espace personnel est un espace de deuil partagé, mais c’est aussi un espace de questions difficiles, de légitimité d’une réalité complexe qui ne veut pas que le deuil d’une partie de la maison soit plus important que le deuil de l’autre. Plus important encore, la confrontation avec l’injustice, cette graine qui m’anime, ne se fait pas au détriment d’une autre injustice.

Je ne parle pas beaucoup de la Palestine à mes filles. Plus précisément, je ne leur parle pas avec des mots. J’ai trouvé d’autres méthodes indirectes pour le faire. Je m’efforce de préparer les plats palestiniens que j’ai appris de ma mère et nous écoutons ensemble des chansons palestiniennes, des plus traditionnelles à celles qui sont sorties hier. Je leur parle dans mon dialecte hétéroclite, qui est un mélange de la montagne (ma mère) et de la mer (mon père), et tous les soirs, je leur chante des berceuses palestiniennes avant qu’elles s’endorment.

En novembre dernier, après une journée passée à regarder des images et des vidéos en provenance de Gaza, et avec le sentiment de culpabilité qui me rongeait en comparant la sécurité du toit qui me protège à celle des mères gazaouies et de leurs enfants, je me suis jetée entre mes filles ; la première tenait ma main droite et la seconde ma main gauche. Je leur ai demandé : « Que voulez-vous que je chante pour vous ? » Elles ont répondu ensemble : « Ya Siti ! (Oh ma grand-mère !) ». C’est la berceuse qui leur tient le plus à cœur. Au milieu de la chanson, la sonnette de la maison a retenti. « Maman, n’aie pas peur », a dit l’une de mes filles, ce qui était sa façon de dire qu’elle avait peur.

Je leur ai dit que c’était le facteur et j’ai recommencé à chanter jusqu’à ce qu’elles s’endorment.

Tout comme je ne leur parle pas directement de la Palestine, je ne leur dis pas non plus que j’ai souvent très peur de beaucoup de choses, d’un monde qui ne considère pas l’enfant palestinien comme aussi précieux que les autres enfants. J’ai peur que des filles et des femmes iraniennes soient encore tuées parce qu’elles ne portent pas le hijab “correctement”. J’ai peur qu’Israël ne soit pas tenu pour responsable de ses crimes, les anciens, les nouveaux et ceux à venir. Je crains que la République islamique d’Iran ne soit pas tenue de rendre des comptes pour les exécutions de jeunes gens qu’elle continue de commettre... et la liste est encore longue.

Je reviens à l’écriture aujourd’hui, au milieu de ce qui se passe, pour me dire et souligner que ma maternité, en effet, est un fil qui s’étend vers la réflexion sur la justice pour la Palestine dans ma maison, à travers la nourriture, les odeurs, les chansons, ma voix, mon visage, et ma tristesse héritée qui flotte à la surface fortement ces jours-ci. Mais c’est aussi un fil qui s’étend vers la réflexion sur la justice pour l’Iran. Parce que Téhéran devrait être un jour une maison pour mes filles, tout comme Akka. La douleur est la même, même si les “garde-barrières” de nos pays sont différents ou prétendent être des ennemis.

 

11/08/2022

OMER BENJAKOB
NSO, le fabricant israélien du logiciel espion Pegasus, a 22 clients dans l'UE. Et il n'est pas seul

Omer Benjakob, Haaretz, 9/8/2022
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

Omer Benjakob est reporter et rédacteur sur les questions de technologie et cybernétique pour Haaretz en anglais. Il couvre également Wikipédia et la désinformation en hébreu. Il est né à New York et a grandi à Tel Aviv. Il est titulaire d'une licence en sciences politiques et en philosophie et prépare une maîtrise en philosophie des sciences. @omerbenj

Des membres de la commission d'enquête du Parlement européen sont venus en Israël pour enquêter sur Pegasus, et ont été surpris de découvrir des contrats avec leur pays d'origine. Sur le marché animé des logiciels espions en Europe, voici les principaux concurrents de NSO

NSO et ses concurrents sur le marché européen des logiciels espions

 Des représentants de la commission d'enquête du Parlement européen sur le logiciel espion Pegasus se sont récemment rendus en Israël et ont appris du personnel de NSO que la société a des contrats actifs dans 12 des 27 pays membres de l’UE. Les réponses de la société israélienne de cyberguerre aux questions de la commission, qui ont été obtenues par Haaretz, révèlent que la société travaille actuellement avec 22 organisations de sécurité et de police dans l'UE.

Des représentants du comité se sont rendus en Israël ces dernières semaines pour s'informer en profondeur sur l'industrie locale de la cyberguerre, et ont eu des discussions avec des employés de NSO, des représentants du ministère de la Défense et des experts locaux. Parmi les membres du comité figurait un député catalan dont le téléphone portable a été piraté par un client de NSO.

Le comité a été créé après la publication du Projet Pegasus l'année dernière, et son objectif est de créer une réglementation paneuropéenne pour l'acquisition, l'importation et l'utilisation de logiciels de cyberguerre tels que Pegasus. Mais pendant que les membres du comité étaient en Israël, et surtout depuis leur retour à Bruxelles, il a été révélé qu'en Europe, il existe également une industrie de la cyberguerre bien développée - et que nombre de ses clients sont des pays européens.

Le logiciel espion Pegasus de la société israélienne et les produits concurrents permettent d'infecter le téléphone portable de la victime de la surveillance, puis de permettre à l'opérateur d'écouter les conversations, de lire les applications contenant des messages cryptés et de fournir un accès total aux contacts et aux fichiers de l'appareil, ainsi que la possibilité d'écouter en temps réel ce qui se passe autour du téléphone portable, en actionnant la caméra et le microphone.

Lors de leur visite en Israël, les eurodéputés ont voulu connaître l'identité des clients actuels de NSO en Europe et ont été surpris de découvrir que la plupart des pays de l'UE avaient des contrats avec la société : 14 pays ont fait affaire avec NSO dans le passé et au moins 12 utilisent encore Pegasus pour l'interception légale des appels mobiles, selon la réponse de NSO aux questions de la commission.

En réponse aux questions des députés, la société a expliqué qu'à l'heure actuelle, NSO travaille avec 22 « utilisateurs finaux » - des organisations de sécurité et de renseignement et des autorités chargées de faire respecter la loi - dans 12 pays européens. Dans certains de ces pays, il y a plus d'un client. (Le contrat n'est pas conclu avec le pays, mais avec l'organisation exploitante). Dans le passé, comme NSO l'a écrit au comité, la société a travaillé avec deux autres pays - mais les liens avec eux ont été rompus. NSO n'a pas révélé quels pays sont des clients actifs et avec quels deux pays le contrat a été gelé. Des sources dans le domaine de la cybernétique indiquent que ces pays sont la Pologne et la Hongrie, qui ont été retirées l'année dernière de la liste des pays auxquels Israël autorise la vente de cybernétique offensive.

Certains membres de la commission pensaient que l'Espagne avait pu être gelée après la révélation de la surveillance des dirigeants des séparatistes catalans, mais des sources sur le terrain ont expliqué que l'Espagne, qui est considérée comme un pays respectueux de la loi, figure toujours sur la liste des pays approuvés par le ministère israélien de la Défense. Les sources ont ajouté qu'après l'éclatement de l'affaire, Israël, NSO et une autre entreprise israélienne travaillant en Espagne ont exigé des explications de Madrid - et se sont vu assurer que l'utilisation des dispositifs israéliens était légale. Les sources affirment que le contrat entre les sociétés israéliennes et le gouvernement espagnol n'a pas été interrompu. Pendant ce temps, en Espagne, il a été révélé que les opérations de piratage - aussi problématiques soient-elles en termes politiques - ont été effectuées légalement.

L'exposition de l'ampleur de l'activité de NSO en Europe met en lumière le côté moins sombre de l'industrie cybernétique offensive : Les pays occidentaux qui opèrent selon la loi et le contrôle judiciaire des écoutes de civils, par opposition aux dictatures qui utilisent ces services secrètement contre les dissidents. NSO, d'autres sociétés israéliennes et de nouveaux fournisseurs européens sont en concurrence pour un marché de clients légitimes - un travail qui n'implique généralement pas de publicité négative.

Ce domaine, appelé interception légale, a suscité ces dernières années la colère d'entreprises technologiques telles qu'Apple (fabricant de l'iPhone) et Meta (Facebook est le propriétaire de WhatsApp, via lequel le logiciel espion a été installé). Ces deux entreprises ont intenté un procès à NSO pour avoir piraté des téléphones via leurs plateformes et mènent la bataille contre ce secteur. Le domaine suscite également un grand malaise en Europe, qui a mené une législation complète sur la question de la confidentialité de l'internet, mais cela ne signifie pas qu'il n'y a aucun intérêt pour ces technologies ou leur utilisation sur le continent.

La semaine dernière encore, il a été révélé que la Grèce utilisait un logiciel similaire à Pegasus, appelé Predator, contre un journaliste d'investigation et contre le chef du parti socialiste. Le Premier ministre a affirmé que les écoutes étaient légales et fondées sur une injonction. Predator est fabriqué par la société cybernétique Cytrox, qui est enregistrée dans le nord de la Macédoine et opère depuis la Grèce. Cytrox appartient au groupe Intellexa, détenu par Tal Dilian, un ancien membre haut placé des services de renseignement israéliens. Intellexa était auparavant situé à Chypre, mais après une série d'incidents embarrassants, il a transféré son activité en Grèce. Alors que l'exportation du Pegasus de NSO est supervisée par le ministère israélien de la Défense, l'activité d'Intellexa et de Cytrox ne l'est pas.


L’ex-chef du renseignement grec Panagiotis Kontoleon, qui a démissionné dans le cadre d'un scandale lié à l'espionnage présumé d'un politicien de l'opposition, à Athènes en juillet. Photo : YIANNIS PANAGOPOULOS - AFP

Aux Pays-Bas également, un débat public a récemment eu lieu après qu'il a été révélé que les services secrets ont utilisé Pegasus pour capturer Ridouan Taghi, un baron de la drogue arrêté à Dubaï et accusé de 10 meurtres choquants. Bien que l'utilisation ait été légale et activée contre un élément criminel, aux Pays-Bas, on a voulu savoir pourquoi les services secrets étaient impliqués dans une enquête interne de la police néerlandaise, et après le rapport, il y a eu des demandes pour un auto- examen concernant la manière dont le logiciel espion a été utilisé aux Pays-Bas.

Outre les sociétés israéliennes actives sur le continent, il s'avère que l'Europe compte un certain nombre de fabricants de logiciels espions. La semaine dernière, Microsoft a révélé un nouveau logiciel espion appelé Subzero, qui est fabriqué par une société autrichienne située au Lichtenstein, appelée DSIRF. Ce logiciel espion exploite une faiblesse sophistiquée de type « zero-day » pour pirater les ordinateurs. Contrairement à NSO, qui a attendu plusieurs années avant d'admettre qu'elle travaille avec des clients en Europe, les Autrichiens se sont défendus. Deux jours après la révélation de Microsoft, ils ont réagi durement et expliqué que leur logiciel espion « a été développé uniquement pour un usage officiel dans les pays de l'UE, et que le logiciel n'a jamais été utilisé à mauvais escient ».

En Europe, les entreprises de logiciels espions sont plus expérimentées : il y a quelques semaines, les enquêteurs de sécurité de Google ont révélé un nouveau logiciel espion nommé Hermit, fabriqué par une société italienne appelée RSC Labs, un successeur de Hacking Team, un concurrent ancien et familier, dont la correspondance interne a été rendue publique par une énorme fuite à Wikileaks en 2015. Hermit a également exploité une faiblesse de sécurité peu connue pour permettre le piratage d'iPhones et d'appareils Android, et a été trouvé sur des appareils au Kazakhstan, en Syrie et en Italie.

Dans ce cas également, il y a une indication que les clients de RCS Labs, qui est situé à Milan avec des succursales en France et en Espagne, comprennent des organisations européennes officielles d'application de la loi. Sur son site web, elle fait fièrement état de plus de « 10 000 piratages réussis et légaux en Europe ».

D'autres logiciels espions pour téléphones portables et ordinateurs ont été révélés par le passé sous les noms de FinFisher et FinSpy. En 2012, le New York Times a rapporté comment le gouvernement égyptien a utilisé ce dispositif, initialement conçu pour lutter contre la criminalité, contre des militants politiques. En 2014, le logiciel espion a été trouvé sur l'appareil d'un USAméricain d'origine éthiopienne, ce qui a éveillé les soupçons selon lesquels les autorités d'Addis-Abeba sont clientes du fabricant britannico- allemand, une société appelée Lench IT Solutions.

L'eurodéputée néerlandaise Sophie in 't Veld [groupe Renew Europe, NdT], qui est membre de la commission d'enquête Pegasus, a déclaré à Haaretz : « Si une seule entreprise a pour clients 14 États membres, vous pouvez imaginer l'ampleur du secteur dans son ensemble. Il semble y avoir un énorme marché pour les logiciels espions commerciaux, et les gouvernements de l'UE sont des acheteurs très enthousiastes. Mais ils sont très discrets à ce sujet, en le gardant à l'abri des regards du public ».

Les entreprises comme NSO sont confrontées à un dilemme : révéler l'identité des gouvernements clients qui utilisent légalement ses outils permettra de faire face aux critiques publiques d'organisations telles que Citizen Lab, des médias et des élus, mais mettra en péril les accords futurs, compte tenu des clauses sur l'abus de confiance et des contrats de confidentialité conclus avec ses clients.

« Nous savons que des logiciels espions sont développés dans plusieurs pays de l'UE. L'Italie, l'Allemagne et la France ne sont pas les moindres », a déclaré in 't Veld. « Même s'ils l'utilisent à des fins légitimes, ils n'ont aucun appétit pour plus de transparence, de surveillance et de garanties. Les services secrets ont leur propre univers, où les lois normales ne s'appliquent pas. Dans une certaine mesure, cela a toujours été le cas, mais à l'ère numérique, ils sont devenus tout-puissants, et pratiquement invisibles et totalement insaisissables ».

NSO n'a pas répondu à la demande de commentaire de Haaretz.