Featured articles en vedette Artículos Artigos destacados Ausgewählte Artikel Articoli in evidenza

Affichage des articles dont le libellé est Thomas L. Friedman. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est Thomas L. Friedman. Afficher tous les articles

30/06/2024

L’homme qui murmure à l’oreille des présidents demande à Uncle Joe de prendre sa retraite

Thomas Friedman, l’éditorialiste star du New York Times, vient de publier l’édito suivant, qui reflète l’état de consternation du camp démocrate. Traduit avec jubilation par Fausto Giudice, Tlaxcala  et illustré par les meilleurs dessins de la presse US. Le débat de jeudi soir sur CNN a été du pain bénit pour les dessinateurs, qui s'en sont donné à cœur joie.
Ossama Hajjaj

Biden est un homme bon et un bon président. Il doit se retirer de la course.

Thomas L. Friedman, The New York Times, 28/6/2024

J’ai regardé le débat Biden-Trump seul dans une chambre d’hôtel de Lisbonne, et cela m’a fait pleurer. Je ne me souviens pas d’un moment plus déchirant de campagne présidentielle usaméricaine de mon vivant, précisément en raison de ce qu’il a révélé : Joe Biden, un homme bon et un bon président, n’a pas intérêt à se représenter. Et Donald Trump, un homme malveillant et un président mesquin, n’a rien appris ni rien oublié. Il est le même canon à eau de mensonges qu’il a toujours été, obsédé par ses doléances - bien loin de ce qu’il faudra pour que l’Amérique soit à la tête du XXIe siècle [sic].

-La wifi déconne: l'image est glauque, gelée et le son est inaudible
-C'est pas la wifi: tu es en train de regarder Joe Biden en débat

Christopher Weyant

La famille Biden et son équipe politique doivent se réunir rapidement et avoir la plus difficile des conversations avec le président, une conversation d’amour, de clarté et de détermination. Pour donner à l’Amérique la meilleure chance possible de dissuader la menace Trump en novembre, le président doit déclarer qu’il ne se représentera pas et qu’il libère tous ses délégués pour la convention nationale du parti démocrate.

Le parti républicain, si ses dirigeants avaient une once d’intégrité, exigerait la même chose, mais il ne le fera pas, parce qu’ils ne veulent pas. Il est donc d’autant plus important que les démocrates fassent passer les intérêts du pays en premier et annoncent le lancement d’un processus public permettant aux différents candidats démocrates de concourir pour l’investiture : assemblées publiques, débats, réunions avec les donateurs, etc. Oui, cela pourrait être chaotique et désordonné lorsque la convention démocrate débutera le 19 août à Chicago, mais je pense que la menace Trump est suffisamment grave pour que les délégués puissent rapidement se rallier à un candidat consensuel.


-Mon handicap est meilleur !
- Mon handicap est meilleur !
-OK, vous êtes tous les deux handicapés

Rick MacKee

 Si la vice-présidente Kamala Harris veut concourir, elle doit le faire. Mais les électeurs méritent un processus ouvert à la recherche d’un candidat démocrate à la présidence qui puisse unir non seulement le parti mais aussi le pays, en offrant ce qu’aucun homme sur cette scène d’Atlanta n’a fait jeudi soir : une description convaincante de la situation actuelle du monde et une vision convaincante de ce que l’USAmérique peut et doit faire pour continuer à le diriger - moralement, économiquement et diplomatiquement [resic].

 
Jeffrey Koterba

Car nous ne nous trouvons pas à une charnière historique ordinaire. Nous sommes au début des plus grandes ruptures technologiques et du plus grand dérèglement climatique de l’histoire de l’humanité. Nous sommes à l’aube d’une révolution de l’intelligence artificielle qui va TOUT changer POUR TOUS - comment nous travaillons, comment nous apprenons, comment nous enseignons, comment nous commerçons, comment nous inventons, comment nous collaborons, comment nous menons des guerres, comment nous commettons des crimes et comment nous les combattons. Cela m’a peut-être échappé, mais je n’ai pas entendu l’expression “intelligence artificielle” mentionnée par l’un ou l’autre des participants au débat.

S’il est un moment où le monde a besoin d’une USAmérique à son meilleur niveau, dirigée par son meilleur niveau, c’est bien maintenant, car de grands dangers et de grandes opportunités se présentent à nous. Un Biden plus jeune aurait pu être ce leader, mais le temps l’a finalement rattrapé. C’est ce qui est apparu douloureusement et inéluctablement jeudi.

M. Biden est l’un de mes amis depuis que nous avons voyagé ensemble en Afghanistan et au Pakistan après le 11 septembre 2001, alors qu’il était président de la commission des Affaires étrangères du Sénat, et c’est donc avec une grande tristesse que je dis tout ce qui précède.

Je suis plus SUPER que toi !, par KAL
 Mais s’il met fin à sa présidence maintenant, en reconnaissant qu’en raison de son âge, il n’est pas en mesure d’effectuer un second mandat, on se souviendra de son premier et unique mandat comme l’une des meilleures présidences de notre histoire. Il nous a évité des mandats consécutifs de Trump, et rien que pour cela, il mérite la médaille présidentielle de la liberté, mais il a également promulgué une législation importante, cruciale pour faire face aux révolutions climatiques et technologiques qui nous attendent.

Jusqu’à présent, j’étais prêt à accorder à M. Biden le bénéfice du doute, car les fois où je me suis engagé avec lui en tête-à-tête, je l’ai trouvé à la hauteur de sa tâche. Il est clair qu’il ne l’est plus. Sa famille et son équipe devaient le savoir. Cela faisait des jours qu’ils se terraient à Camp David pour préparer ce débat capital. Si c’est la meilleure performance qu’ils ont pu obtenir de lui, il devrait préserver sa dignité et quitter la scène à la fin de ce mandat.

S’il le fait, les USAméricains salueront Joe Biden pour avoir fait ce que Donald Trump ne ferait jamais : faire passer le pays avant lui-même.

S’il insiste pour se présenter et qu’il perd face à Trump, Joe Biden et sa famille - ainsi que son équipe et les membres du parti qui l’ont soutenu - ne pourront que voiler leur face.

Ils méritent mieux. L’USAmérique a besoin de mieux. Le monde a besoin de mieux.


L'heure de la retraite a sonné, par Bob Englehart

 

23/06/2024

THOMAS L. FRIEDMAN
Les dirigeants usaméricains devraient cesser de s’avilir devant Israël

Thomas L. Friedman The New York Times, 18/6/2024
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

Le 4 novembre 2022, juste après l’élection de l’actuelle coalition gouvernementale israélienne d’extrême droite, j’ai écrit une chronique avec ce titre : « L’Israël que nous connaissions a disparu ». Il s’agissait d’une mise en garde contre la radicalité de cette coalition. Beaucoup de gens n’étaient pas d’accord. Je pense que les événements ont prouvé qu’ils avaient tort et que la situation est encore pire aujourd’hui : l’Israël que nous connaissions a disparu et l’Israël d’aujourd’hui est en danger existentiel.


Photo Abir Sultan

Israël est confronté à une superpuissance régionale, l’Iran, qui a réussi à prendre Israël en étau, en utilisant ses alliés et ses mandataires : le Hamas, le Hezbollah, les Houthis et les milices chiites en Irak. Pour l’heure, Israël n’a pas de réponse militaire ou diplomatique. Pire encore, il est confronté à la perspective d’une guerre sur trois fronts - Gaza, le Liban et la Cisjordanie - mais avec une nouveauté dangereuse : le Hezbollah au Liban, contrairement au Hamas, est armé de missiles de précision qui pourraient détruire de vastes pans de l’infrastructure israélienne, de ses aéroports à ses ports maritimes, en passant par ses campus universitaires, ses bases militaires et ses centrales électriques.

Mais Israël est dirigé par un premier ministre, Benjamin Netanyahou, qui doit rester au pouvoir pour éviter d’être éventuellement envoyé en prison pour corruption. Pour ce faire, il a vendu son âme pour former un gouvernement avec des extrémistes juifs d’extrême droite qui insistent sur le fait qu’Israël doit se battre à Gaza jusqu’à ce qu’il ait tué tous les Hamasniks – “victoire totale” - et qui rejettent tout partenariat avec l’Autorité palestinienne (qui a accepté les accords de paix d’Oslo) pour gouverner un Gaza post-Hamas, parce qu’ils veulent qu’Israël contrôle tout le territoire entre le Jourdain et la mer Méditerranée, y compris la bande de Gaza.

Aujourd’hui, le cabinet de guerre d’urgence de Netanyahou s’est effondré en raison de l’absence de plan pour mettre fin à la guerre et se retirer de Gaza en toute sécurité, et les extrémistes de sa coalition gouvernementale réfléchissent à leurs prochaines actions pour accéder au pouvoir.

Ils ont déjà fait tant de dégâts, et pourtant le président Biden, le lobby pro-israélien AIPAC et de nombreux membres du Congrès n’ont pas pris conscience de la radicalité de ce gouvernement.

En effet, le président de la Chambre des représentants, Mike Johnson, et ses collègues du G.O.P. [Great Old Party, Les Républicains] ont décidé de récompenser Netanyahou en lui accordant le grand honneur de s’adresser à une session conjointe des deux chambres du Congrès le 24 juillet. Poussés dans leurs retranchements, les principaux démocrates du Sénat et de la Chambre des représentants ont signé l’invitation, mais le but inavoué de cet exercice républicain est de diviser les démocrates et de provoquer des cris d’insultes de la part de leurs représentants les plus progressistes, ce qui aliénerait les électeurs et les donateurs juifs usaméricains et les pousserait à se tourner vers Donald Trump.

Netanyahou sait qu’il s’agit avant tout de politique intérieure usaméricaine, et c’est pourquoi son acceptation de l’invitation à prendre la parole est un tel acte de déloyauté à l’égard de Joe Biden - qui a fait le voyage jusqu’en Israël pour le serrer dans ses bras dans les jours qui ont suivi le 7 octobre – que ça vous coupe carrément le souffle.

Aucun ami d’Israël ne devrait participer à ce cirque. Israël a besoin d’un gouvernement centriste pragmatique capable de le sortir de cette crise aux multiples facettes et de saisir l’offre de normalisation avec l’Arabie saoudite que Biden a réussi à mettre en place. Cela ne peut se faire qu’en destituant Netanyahou par de nouvelles élections, comme l’a courageusement demandé le chef de la majorité au Sénat, Chuck Schumer, en mars dernier. Israël n’a pas besoin d’une soirée arrosée sponsorisée par les USA pour son chauffard bourré.

On se demande si les “amis” d’Israël ont la moindre idée de la nature de son gouvernement. Ce gouvernement n’est pas l’Israël de votre grand-père et ce Bibi n’est même pas l’ancien Bibi.

Contrairement à tous les cabinets israéliens précédents, ce gouvernement a inscrit l’objectif d’annexion de la Cisjordanie dans l’accord de coalition. Il n’est donc pas surprenant qu’il ait passé sa première année à essayer d’écraser la capacité de la Cour suprême israélienne à mettre un frein à ses pouvoirs. Bibi a également cédé le contrôle de la police et des principales autorités du ministère de la défense aux suprémacistes juifs de sa coalition afin de leur permettre d’accroître le contrôle des colons sur la Cisjordanie. Ils ont immédiatement procédé à l’ajout d’un nombre record d’unités d’habitation au cœur de ce territoire occupé pour tenter d’empêcher la création d’un État palestinien.

01/04/2022

L’élargissement de l’OTAN aux frontières de la Russie : une “erreur tragique”, selon George Kennan en 1998

Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

Sa voix est un peu frêle maintenant, mais son esprit, même à 94 ans, est aussi vif que jamais. Aussi, lorsque j'ai joint George Kennan [mort en 2005, NdT] par téléphone pour connaître sa réaction à la ratification de l'élargissement de l'OTAN par le Sénat US, je n'ai pas été surpris de constater que l'homme qui a été l'architecte de l'endiguement réussi de l'Union soviétique par les USA et l'un des grands hommes d'État usaméricains du XXe siècle avait une réponse toute prête.

« Je pense que c'est le début d'une nouvelle guerre froide », a déclaré M. Kennan depuis sa maison de Princeton. « Je pense que les Russes vont progressivement réagir de manière assez négative et que cela affectera leurs politiques. Je pense que c'est une erreur tragique. Il n'y avait aucune raison pour cela. Personne ne menaçait qui que ce soit. Cette expansion ferait se retourner dans leur tombe les pères fondateurs de notre pays. Nous avons signé pour protéger toute une série de pays, alors que nous n'avons ni les ressources ni l'intention de le faire de manière sérieuse. [L'expansion de l'OTAN] n'était qu'une action légère d'un Sénat qui ne s'intéresse pas vraiment aux affaires étrangères ».


 « Ce qui me dérange, c'est à quel point tout le débat au Sénat était superficiel et mal informé», a ajouté M. Kennan, qui était présent lors de la création de l'OTAN et dont l'article anonyme de 1947 dans la revue Foreign Affairs, signé ''X'', a défini la politique d'endiguement de la guerre froide de l'USAmérique pendant 40 ans. « J'ai été particulièrement gêné par les références à la Russie en tant que pays brûlant d’attaquer l'Europe occidentale. Les gens ne comprennent-ils pas ? Nos divergences dans la guerre froide étaient avec le régime communiste soviétique. Et maintenant, nous tournons le dos aux personnes mêmes qui ont organisé la plus grande révolution sans effusion de sang de l'histoire pour supprimer ce régime soviétique.

 

L'ambassadeur George F Kennan (à droite) en compagnie de Nikolai Chvernik, président du présidium du Soviet suprême après la présentation de ses lettres de créance, Moscou, 15 mai 1952. À gauche, AF Gorkine, secrétaire du présidium. Photo Sovfoto/Universal Images Group via Getty Images

« Et la démocratie russe est aussi avancée, sinon plus, que n'importe lequel de ces pays que nous venons de nous engager à défendre contre la Russie », a déclaré M. Kennan, qui a rejoint le Département d'État en 1926 et a été ambassadeur des USA à Moscou en 1952 [et déclaré persona non grata 5 mois plus tard, NdT]. « Cela montre une si faible compréhension de l'histoire russe et de l'histoire soviétique. Bien sûr, il y aura une mauvaise réaction de la part de la Russie, et ensuite [les partisans de l'élargissement de l'OTAN] diront : nous vous avons toujours dit que les Russes étaient comme ça, mais c'est tout simplement faux ».

On ne peut que se demander ce que diront les historiens de demain. Si nous avons de la chance, ils diront que l'élargissement de l'OTAN à la Pologne, à la Hongrie et à la République tchèque n'avait tout simplement pas d'importance, parce que le vide qu'il était censé combler l'avait déjà été, mais que l'équipe Clinton ne pouvait pas le voir. Ils diront que les forces de la mondialisation qui intègrent l'Europe, associées aux nouveaux accords de contrôle des armements, se sont avérées si puissantes que la Russie, malgré l'expansion de l'OTAN, a progressé sur la voie de la démocratisation et de l'occidentalisation, et a été progressivement entraînée dans une Europe vaguement unifiée. Si nous n'avons pas de chance, ils diront, comme M. Kennan l'a prédit, que l'expansion de l'OTAN a créé une situation dans laquelle l'OTAN doit maintenant soit s'étendre jusqu'à la frontière de la Russie, déclenchant une nouvelle guerre froide, soit arrêter son expansion après ces trois nouveaux pays et créer une nouvelle ligne de démarcation à travers l'Europe.

Mais il y a une chose que les historiens du futur ne manqueront pas de remarquer, c'est l'absence totale d'imagination qui a caractérisé la politique étrangère usaméricaine à la fin des années 1990. Ils noteront que l'un des événements marquants de ce siècle a eu lieu entre 1989 et 1992 - l'effondrement de l'Empire soviétique, qui avait la capacité, les intentions impériales et l'idéologie pour menacer véritablement l'ensemble du monde libre. Grâce à la détermination de l'Occident et au courage des démocrates russes, cet empire soviétique s'est effondré sans coup férir, donnant naissance à une Russie démocratique, libérant les anciennes républiques soviétiques et conduisant à des accords de contrôle des armements sans précédent avec les USA.

Et quelle a été la réponse de l'USAmérique ? Elle a été d'étendre l'alliance de la guerre froide de l'OTAN contre la Russie et de la rapprocher des frontières de la Russie.

Oui, dites à vos enfants, et aux enfants de vos enfants, que vous avez vécu à l'époque de Bill Clinton et de William Cohen, à l'époque de Madeleine Albright et de Sandy Berger, à l'époque de Trent Lott et de Joe Lieberman, et que vous étiez vous aussi présents lors de la création de l'ordre de l'après-guerre froide, lorsque ces titans de la politique étrangère ont mis leurs têtes ensemble et ont produit... une souris.

Nous sommes dans l'ère des nains. La seule bonne nouvelle, c'est que nous en sommes sortis indemnes parce qu'il y a eu une autre époque, celle des grands hommes d'État qui avaient à la fois de l'imagination et du courage.

En me disant au revoir au téléphone, M. Kennan a ajouté une dernière chose : « Ça a été ma vie, et cela me fait mal de la voir si gâchée à la fin ».