Judy Maltz, Haaretz, 19/6/2024
Traduit
par Fausto Giudice, Tlaxcala
Pendant une soixantaine d’années à partir du début du XXe siècle, le Bureau national des désertions a traqué aux USA et à l’étranger les maris juifs qui avaient abandonné leur femme et leur famille. Une nouvelle exposition permet d’en savoir plus sur cette agence quasiment de détectives méconnue.
Runaway Husbands, Desperate Families: The Story of the National Desertion Bureau
NEW YORK - Nathan Goldfarb, un horloger qui vivait à Manhattan avec sa femme et ses deux enfants, était tombé amoureux d’une pensionnaire qui louait une chambre dans la maison familiale. Après que sa femme Lena les a surpris au lit, Goldfarb et sa maîtresse se sont enfuis en Californie, où ils ont rejoint une communauté pratiquant l’amour libre.
La maîtresse finit par le quitter pour un autre homme et, après avoir été menacé d’arrestation pour s’être introduit chez elle, Nathan retourne à Lena la queue entre les jambes.
Abraham Meyerson et sa femme Fannie ont connu une fin moins heureuse. Découpeur de tissus dans une usine de Chicago, Abraham abandonne sa femme et ses quatre enfants et s’enfuit sur la côte ouest, où il se met en ménage avec une autre femme.
C’est la deuxième femme et la deuxième famille qu’il abandonne. Bien qu’il ait finalement été retrouvé et qu’il ait accepté de verser une pension alimentaire à Fannie, les archives montrent qu’il n’a pas toujours respecté cet engagement.
Ces histoires et bien d’autres de maris juifs fugueurs font partie d’une exposition spéciale, inaugurée cette semaine à l’Institut YIVO pour la recherche juive à Manhattan, consacrée à une agence peu connue appelée le Bureau national des désertions.
Créé pour retrouver les milliers d’hommes juifs qui ont abandonné leurs femmes et leurs familles lors de la grande vague d’immigration vers les USA au tournant du siècle, il a fonctionné du début des années 1900 jusqu’aux années 1960 [en 1955, il a changé de nom, devenant Family Location Services, Services de localisation pour les familles, NdT]
« Nous aimons tous considérer la vague d’immigration juive en Amérique comme une immense success story », note Eddy Portnoy, directeur des expositions à YIVO. « Mais il y a aussi eu de nombreux cas comme celui-ci, où Zeidie [Papy en yddish] a plaqué Bubbie [Mamie en yidish] ».
Le Bureau national des désertions a été mis en place par le Jewish Board of Family and Children’s Services [Office juif de service aux familles et aux enfants], créé il y a 150 ans et qui est l’une des plus grandes agences de santé mentale et de services sociaux de l’État de New York.