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05/02/2022

SERGIO RODRÍGUEZ GELFENSTEIN
Qui fomente une guerre, et comment ?
Le poker menteur de Biden, Johnson & Co.

Sergio Rodríguez Gelfenstein, 2/2/2022
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala 

 Il est presque naturel pour les pays (surtout les puissances, car elles ont plus de facilités pour le faire) de vouloir résoudre leurs problèmes internes en déclenchant des conflits à l'étranger. Cela conduit à des attaques contre leur sécurité nationale, à un faux nationalisme et à des appels manichéens à l'unité nationale pour défendre une souveraineté et une intégrité menacées.

Qui peut douter que le conflit artificiel entre Russie et Ukraine réponde à cette logique ?  Surtout au vu de l'échec proverbial et accéléré des administrations de Joe Biden aux USA et de Boris Johnson en Grande-Bretagne. La popularité de Biden est l'une des plus basses de tous les présidents usaméricains à la fin de sa première année de mandat.


Ingram Pinn/Financial Times

Selon un article publié par le Los Angeles Times le 20 janvier, citant un sondage Associated Press-NORC Center for Public Affairs Research, seules 43 % des personnes interrogées approuvent les performances du président. De même, seuls 28% souhaitent que Biden se représente en 2024, dont 48% des démocrates. Sur le plan économique, la situation est pire, avec seulement 37% d'avis favorables sur la performance du président. Il convient de noter que l'inflation en 2021 a été la plus élevée depuis 40 ans.

La perception de la gestion de la pandémie n'est pas meilleure non plus, rejetée par 55% des USAméricains. De même, le gouvernement est considéré comme ayant été totalement inefficace dans la gestion de la question de la migration et n'a même pas été en mesure de réaliser son plan de dépenses pour les infrastructures et l'amélioration de l'économie. D'une manière générale, il est perçu comme n'ayant pas été en mesure d'établir un consensus avec les républicains - ce qui était un slogan majeur de sa campagne - et même pas avec certains des parlementaires les plus conservateurs de son parti démocrate. Dans ce contexte, les citoyens se demandent quel est l'intérêt de réélire Biden, qui est perçu comme une prolongation de la crise.

La situation n'est pas différente pour Boris Johnson, qui se trouve également au milieu d'une profonde crise politique suite à la fuite d'un courriel dans lequel le secrétaire principal du Premier ministre, Martin Reynolds, invitait le personnel du gouvernement à une fête en plein confinement.

Le chef du parti travailliste, Keir Starmer, a demandé la démission de Johnson, alors que les sondages montrent que 90 % des Britanniques pensent qu'il devrait se retirer.


Plop & KanKr

Dans ce contexte, quiconque a des doutes sur les véritables objectifs qui se cachent derrière le déroulement de la « crise ukrainienne » devrait écouter Johnson qui, après une visite en Ukraine, après s'être excusé d'avoir participé à la fête, a fait appel au sentiment national, appelant à « concentrer tous les efforts pour tenir tête à la Russie ». Tout cela après que le député écossais Ian Blackford lui avait demandé d'accepter de faire l'objet d'une « enquête de police pour avoir enfreint ses propres lois ». La députée travailliste Angela Rayner, numéro deux du Labour, a déclaré que Johnson « devrait partir » immédiatement.

28/01/2022

SERGIO RODRÍGUEZ GELFENSTEIN
L'Europe joue avec le feu en Ukraine
Un article « prophétique » de 2014

 Sergio Rodríguez Gelfenstein, 27/1/2022
Traduit par
Fausto Giudice, Tlaxcala

Alors que je me préparais à écrire mon article hebdomadaire que j'avais décidé de consacrer à l'analyse de la situation en Ukraine, j'ai reçu un courriel de mon cher ami, Juan Pablo Cárdenas, un journaliste chilien avec une longue carrière, dont je tiens toujours comptes des opinions, afin d'améliorer mon travail.

Juan Pablo m'a rappelé un article que j’avais écrit le 2 septembre 2014 intitulé « L'Europe, jouer avec le feu en Ukraine », qui a été publié par les Éditions de la Radio de l'Université du Chili qu'il dirigeait à l'époque, dans un livre intitulé « Le monde de fous dans lequel je suis né. Un système international en transformation permanente ». Dans le message, Jean-Paul a rappelé le caractère « prophétique et correct » de cette analyse. Je lui ai demandé s'il pensait que je devrais le publier à nouveau et sa réponse a été claire et nette : « Je pense que ce serait très bien ».

Avec le plus grand respect pour les lecteurs, sept ans et demi plus tard, je repropose ces lignes. De manière incroyable - et comme Juan Pablo l'a perçu - l'analyse a toute sa validité, seuls certains noms et faits qui à l'époque étaient récents devraient être modifiés. Mais on l'a laissé inchangé afin que les lecteurs puissent apprécier les événements actuels et percevoir qu'ils répondent à une politique calculée et continue des USA qui, au cours de la période écoulé, ont eu des gouvernements démocrates et républicains.

 L'Europe joue avec le feu en Ukraine

Je ne sais pas si quelqu'un l'a remarqué, mais à mon avis, le conflit en Ukraine est le plus dangereux qui se soit développé sur la planète depuis la fin de la guerre froide. Il est vrai que cette période a vu plusieurs invasions de pays africains, des coups d'État en Amérique latine, une profonde crise économique et financière, la désintégration sanglante de la Yougoslavie, un génocide dans le cadre du siège permanent d'Israël contre le peuple palestinien, la menace constante d'une attaque de l'OTAN contre l'Iran et les guerres consécutives aux interventions impériales en Afghanistan, en Irak, en Libye et en Syrie, mais dans aucun de ces cas, une confrontation directe entre deux ou plusieurs puissances nucléaires n'a été ou n'est si proche. Cela peut s'expliquer dans des contextes locaux, régionaux et mondiaux. Passons du particulier au général.

Ce n'est pas un secret qu'il y a eu un coup d'État en Ukraine. Son origine est précisément la nécessité pour l'OTAN de créer une situation de conflit telle que celle qui existe aujourd'hui. Le gouvernement du président déchu Ianoukovitch y faisait obstacle. En ce sens, l'actuel gouvernement ukrainien n'est rien d'autre qu'une création des USA et de l'UErope*.

Tout comme en Syrie et en Irak, où il y a encore deux mois l'État islamique était composé de combattants syriens de la liberté et où ils sont aujourd'hui qualifiés de terroristes, en Ukraine, il ne faut pas oublier que les révoltes qui ont conduit au coup d'État, encouragé par l'Occident, ont été menées par des organisations d'inspiration nazie dont les premières actions ont été d'attaquer des synagogues. Même le grand rabbin d'Ukraine Moshe Reuven Azman a conseillé à sa communauté, en février de cette année, de quitter Kiev et le pays, déclarant qu'il ne voulait pas tenter le sort, car « il y a des menaces constantes d'attaques contre les institutions juives ». Bien sûr, les gouvernements israélien et usaméricain ont gardé un silence honteux.

Ainsi, les conditions ont été créées pour imposer les élections qui ont amené le gouvernement actuel au pouvoir au milieu d'une campagne psychologique brutale. Dans la situation actuelle, leur discours, appuyé par celui des porte-parole de l'OTAN, est si agressif qu'il rappelle la guerre froide. Le président ukrainien Petro Porochenko a affirmé que l'Ukraine était « très proche du point de non-retour ». Selon lui, « le point de non-retour est une guerre à grande échelle ». Jetant de l'huile sur le feu, le secrétaire général de l'OTAN, Anders Fogh Rasmussen, célèbre pour ses déclarations brutales, a déclaré selon le journaliste allemand Michael Stürmer que l'OTAN était prête à renforcer sa coopération avec l'Ukraine.