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19/10/2025

La politique israélienne de séparation pérennise le Hamas, par Amira Hass

Amira Hass, Haaretz, 17/10/2025
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Traduit par Tlaxcala

En isolant Gaza de la Cisjordanie et les Palestiniens de leur terre, Israël a contribué à enraciner le Hamas et à effacer les alternatives politiques. Même si le rêve de villas de luxe à Gaza s’est évanoui, la logique sous-jacente demeure : contrôle du territoire, expulsion indirecte, et étouffement continu du peuple palestinien sous le couvert de la sécurité.



Un colon brandit une fronde en direction de Palestiniens récoltant des olives dans le village de Beita, près de Naplouse, vendredi dernier. Le cessez-le-feu ne peut pas être vu comme une défaite pour les colons. Photo Jaafar Ashtiyeh / AFP

Les promesses d’un boom immobilier à Gaza — de la vision du ministre des Finances Bezalel Smotrich, de la promesse du ministre de la Sécurité nationale Itamar Ben Gvir de quartiers huppés pour policiers, et des plans de la cheffe de colons Daniella Weiss (avec l’aide divine) pour rétablir des colonies — se sont toutes révélées n’être que du vent.
Il est tentant de dire que l’accord de cesse-z-le-feu entrant à présent en vigueur dans la bande de Gaza a infligé un coup sévère au mouvement des colons et à ses soutiens aux USA. L’image de leurs châteaux de sable s’effondrant sous le poids de l’endurance inimaginable et de la fermeté des habitants de Gaza, et sous le refus égyptien dur mais politiquement calculé de permettre un exode massif des Palestiniens vers son territoire, est tout aussi tentante.
Les décideurs de la politique étrangère égyptienne — peu importe qui dirige ce pays — suspectent depuis longtemps Israël de de vouloir « jeter » Gaza et ses problèmes dans leur direction. Dès le début de la guerre, ils ont pris au sérieux les plans israéliens d’expulsion de la population de Gaza et de réinstallation de Juifs là-bas, exprimés ouvertement par des responsables israéliens qui semblaient oublier que des efforts similaires de leurs prédécesseurs Mapai-Travailistes pour expulser à nouveau les réfugiés de 1948 de Gaza avaient échoué.


Le ministre des Finances Bezalel Smotrich lors d’une conférence de colonies à Hébron le mois dernier. Ses promesses d’annexion se sont avérées n’être que des effets de manche. Photo Itai Ron

Mais le cessez-le-feu ne peut pas être simplement vu comme une défaite gratifiante pour le camp des colons. La logique politique derrière ces bouffées d’air chaud et ces châteaux de sable a façonné, et continue de façonner, la politique israélienne depuis la signature des accords d’Oslo. Cette logique a réussi à empêcher l’établissement d’un État réalisant le droit palestinien à l’autodétermination, ne serait-ce que sur les 22 % restants de la terre entre le fleuve et la mer.
Le sabotage israélien de la souveraineté palestinienne est le miroir de sa poussée pour s’emparer d’autant de terres que possible avec le moins de Palestiniens possible. En pratique, cela signifie l’expulsion — que ce soit vers la Zone A ou vers l’exil ; par les bombardements de l’aviation, ou par les matraques et barres de fer des « jeunes des collines » ; que ce soit par les démolitions de maisons et les expulsions forcées menées sous la menace d’armes par l’Administration civile ou l’armée israélienne, ou par l’emprisonnement et la poursuite judiciaire de ceux qui tentent de protéger leur communauté et eux-mêmes : le résultat est le même.
Quand cette politique sert de fil conducteur, les efforts internationaux pour « réformer » les manuels scolaires palestiniens sont voués à l’échec. La réalité quotidienne de l’étouffement systématique qu’Israël impose, et son autoritarisme, appuyés par sa supériorité militaire, sont les pères de l’incitation à la haine du sionisme dans ces manuels.
Un des outils les plus efficaces pour saboter l’État palestinien a été et reste la « séparation ». Formulé en termes sécuritaires que le public israélien aime adopter — même quand les motifs politiques et immobiliers sont évidents — cet outil prend de nombreuses formes : couper Gaza de la Cisjordanie (depuis 1991) ; séparer la Cisjordanie de Jérusalem-Est ; diviser les villes palestiniennes entre elles ; isoler des villages des routes environnantes et des centres régionaux ; déconnecter les Palestiniens de leurs terres, et les uns des autres.
Des documents officiels du gouvernement militaire des années 1950 et 1960 — publiés des décennies plus tard — ont confirmé ce que les Palestiniens (et les gauches non sionistes) avaient longtemps compris : la prétendue logique « sécuritaire » des restrictions sévères de déplacement était largement motivée par des intérêts fonciers et immobiliers juifs. La vision d’une population et d’un territoire palestiniens fragmentés de chaque côté de la Ligne verte a toujours reflété le plan d’une « Grande Terre d’Israël » pour les Juifs. Ces deux visions opèrent encore aujourd’hui, en parallèle aux clauses vagues du plan Trump pour un cessez-le-feu et un « nouveau Moyen-Orient ».
La droite coloniale compense sa perte partielle à Gaza — « partielle » parce que l’armée israélienne a accompli l’objectif partagé d’infliger la destruction maximale et la mort dans l’enclave — en intensifiant les attaques et l’accaparement de terres en Cisjordanie. Cela se manifeste essentiellement par la séparation quotidienne des agriculteurs de leurs terres, une tactique aux résultats immédiats et douloureux. Avec l’Administration civile, l’armée et la police, les colons accélèrent ce processus par la violence physique, l’obstruction bureaucratique et une arrogance insatiable. Comme nous sommes maintenant en saison de cueillette des olives, les bataillons du Seigneur ont tourné leur attention vers la récolte et les récoltants eux-mêmes.


Affrontements entre soldats et Palestiniens, rejoints par des activistes, dans le village de Beita en Cisjordanie vendredi. Photo Jaafar Ashtiyeh / AFP

Le samedi 11 octobre, au moment où cet article a été écrit, vers midi il y avait des rapports de harcèlement et d’attaques directes de colons et soldats — séparément ou ensemble — contre les récoltants d’olives des villages de Jawarish, Aqraba, Beita et Madama au sud de Naplouse ; de Burqa à l’est de Ramallah ; et de Deir Istiya dans la région de Salfit. Le jour précédent, des rapports similaires étaient parvenus de Yarza, à l’est de Tubas ; d’Immatin, Kafr Thulth et Far'ata dans la zone de Qalqilya ; de Jawarish, Qablan, Aqraba, Hawara, Yanun et Beita dans la zone de Naplouse ; et d’al-Mughayyir et Mazra’a al-Sharqiya à l’est de Ramallah. Ces rapports proviennent d’un seul groupe WhatsApp surveillant le nord de la Cisjordanie.
Le harcèlement va de l’intrusion-provocation, avec barrages routiers et menaces armées à des agressions physiques, au vol d’olives, à l’incendie de véhicules appartenant aux récoltants et aux journalistes. Et ce que les colons font sporadiquement, la politique officielle l’applique systématiquement : le refus du droit des Palestiniens à la liberté de mouvement entre Gaza et la Cisjordanie, et à l’intérieur de la Cisjordanie elle-même. Le refus du droit de choisir son lieu de résidence ou de travail a longtemps été dévastateur pour la société, l’économie et les structures politiques palestiniennes, et particulièrement pour l’avenir de sa jeunesse.
Pas moins que les valises de liquide qatari initiées par Benjamin Netanyahou transférées dans Gaza, la séparation de la population de la bande par rapport à celle de la Cisjordanie, et l’isolement de Gaza du reste du monde — tout cela a servi à renforcer le Hamas — d’abord comme organisation politique et militaire, puis comme pouvoir gouvernant.
Dans les années 1990, le Hamas affirmait qu’Israël n’avait aucune intention réelle de faire la paix et que les accords d’Oslo ne mèneraient pas à l’indépendance. Les restrictions israéliennes de mouvement à Gaza et son expansion continue des colonies à la fois à Gaza et en Cisjordanie rendaient cet argument convaincant pour de nombreux Palestiniens, en particulier à Gaza. Les attentats-suicides du Hamas étaient vus à la fois comme une réaction et un test : la réponse d’Israël récompenserait-elle les opposants à Oslo et les critiques de l’Autorité palestinienne ?
Et Israël les a récompensés — en ne respectant pas ses engagements. Les restrictions de mouvement et le vol bureaucratique de terres ont affaibli le Fatah et l’Autorité palestinienne, qui avait soutenu le processus diplomatique, mais au début des années 2000 s’était tourné vers la résistance armée.


Graffiti « Mort à l’ennemi, liberté à la patrie » dans la colonie d’Atara, près de Ramallah, en août. Ce que les colons font sporadiquement, la politique officielle l’applique systématiquement. Photo Nasser Nasser / AP

Contournant avec adresse le fait que la fragmentation palestinienne avait toujours été l’objectif d’Israël, le Hamas a présenté le désengagement israélien de 2005 et le démantèlement des colonies comme la preuve de son propre succès : que la lutte armée avait fonctionné. Chaque nouvelle promotion de lycéens — qui n’avait jamais quitté la bande scellée, n’avait jamais connu d’autre mode de vie, et ne trouvait pas de travail — devenait plus vulnérable à la vision du monde pesante du Hamas, à sa propagande, et trouvait de bonnes raisons de rejoindre sa branche armée (pour une solde qui soutenait des familles appauvries). Le Hamas a su canaliser l’énergie et la créativité confinées de Gaza dans sa machine militaire et politique.
L’Autorité palestinienne, le Fatah et leur appareil de sécurité sont restés impuissants face à la vague croissante de spoliation de terres en Cisjordanie et à la destruction économique directe et indirecte intégrée dans cette expropriation et séparation — une situation aggravée par les ordres successifs de ministres israéliens des Finances de retenir les recettes douanières palestiniennes.
Aux yeux du public palestinien en Cisjordanie, cette impuissance est indissociable de la corruption des élites civiles et militaires de l’Autorité, perçues comme opportunistes et indifférentes tant que leurs propres poches restent pleines. Il n’est pas surprenant, alors, que la résistance armée — associée principalement au Hamas — conserve son prestige parmi les jeunes de Cisjordanie. Pour eux, la résistance armée inflige au moins souffrance et humiliation à l’agresseur israélien.
Tous les signes suggèrent qu’Israël continuera à bloquer la liberté de mouvement des Palestiniens entre la Cisjordanie, Israël et Gaza, et à restreindre l’entrée des Palestiniens venant de l’étranger ainsi que des activistes internationaux dans la bande. En conséquence, ceux qui doivent le plus l’entendre ne pourront pas savoir ce que les résidents de Gaza pensent réellement de la résistance armée. Autrement dit, combien d’entre eux méprisent en réalité le Hamas. [et toi, Amira, tu le sais peut-être ?, NdT]


Des soldats gardent la construction d’une nouvelle route de colons en Cisjordanie, à l’ouest de Ramallah. La prétendue logique sécuritaire des restrictions de déplacement était enracinée dans des intérêts fonciers/immobiliers. Photo Zain Jaafar / AFP

Face aux politiques israéliennes d’étouffement, de mise à mort, de destruction et de dépossession en Cisjordanie, la plupart des Palestiniens qui ne sont pas résidents de la bande, avec beaucoup de leurs partisans internationaux, continueront à considérer le Hamas comme l’adresse politique authentique de l’aspiration à la liberté et à la résistance à l’oppression.
L’expérience montre qu’une fois le travail de déblaiement des munitions non explosées et de reconstruction de Gaza commencé, il deviendra clair que le processus est bien plus compliqué et coûteux qu’on ne l’imaginait initialement. Au-delà de la reconstruction physique, chacun des millions de résidents de Gaza aura besoin de guérison physique et psychologique et de réhabilitation matérielle , à une échelle et pour une durée sans précédent qui défient l’imagination.
L’approche juste, légitime et logique est de permettre aux Palestiniens de Cisjordanie et d’Israël de participer pleinement à ce processus, en collaboration avec les professionnels dans la bande qui ont survécu : ingénieurs structurels, architectes, ouvriers du bâtiment, chirurgiens, ophtalmologues, agriculteurs, experts en TI, enseignants, psychologues, travailleurs sociaux et spécialistes des énergies renouvelables.
Il serait aussi logique de développer des programmes en Cisjordanie pour prendre soin des dizaines de milliers d’enfants de Gaza devenus orphelins ou blessés au point d’une incapacité permanente.
En bref, avant que le monde ne lance des appels d’offres internationaux pour la reconstruction de Gaza, ne rédige des cahiers des charges techniques, ou n’émette des déclarations creuses sur la reconnaissance d’un État et la disparition du Hamas, il doit d’abord user des outils politiques à sa disposition pour s’assurer qu’Israël mette fin à sa politique destructrice de séparation entre Gaza, la Cisjordanie, et le reste du territoire.
Si cela n’a pas lieu — même si le Hamas déposait les armes à l’intérieur de Gaza — il continuera, ou une version future de lui-même continuera, à servir d’adresse politique du peuple palestinien.

La política de separación de Israel perpetúa a Hamas, por Amira Hass

Amira Hass, Haaretz, 17/10/2025
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Traducido por Tlaxcala

Al aislar Gaza de Cisjordania y a los palestinos de su tierra, Israel ayudó a afianzar el Hamas y a borrar las alternativas políticas. Aunque el sueño de villas de lujo en Gaza se haya desvanecido, la lógica subyacente persiste: control del territorio, expulsión indirecta y el continuo asfixiamiento del pueblo palestino bajo el pretexto de la seguridad.


Un colono agita una honda hacia palestinos que recolectaban aceitunas en el pueblo de Beita, cerca de Nablus, el viernes pasado. El alto el fuego no puede verse como una derrota para los colonos. Foto Jaafar Ashtiyeh / AFP

Las promesas de un auge inmobiliario en Gaza — desde la visión del ministro de Finanzas Bezalel Smotrich, el compromiso del ministro de Seguridad Nacional Itamar Ben Gvir de vecindarios de alto nivel para policías, y los planes de la lideresa de colonos Daniella Weiss (con asistencia divina) para reinstaurar colonias — han resultado ser nada más que bocanadas de aire caliente.
Es tentador decir que el acuerdo de alto el fuego que ahora entra en vigor en la Franja de Gaza ha infligido un golpe severo al movimiento de colonos y a sus partidarios en USA. Igual de tentadora es la imagen de sus castillos de arena colapsando bajo el peso de la resistencia inimaginable y la firmeza de los habitantes de Gaza, y bajo la negativa egipcia, dura pero políticamente calculada, de permitir un éxodo masivo de palestinos hacia su territorio.
Los responsables de la política exterior de Egipto — independientemente de quién gobierne el país — han sospechado desde hace mucho tiempo la intención de Israel de “arrojar” Gaza y sus problemas hacia ellos. Desde el inicio de la guerra, tomaron en serio los planes israelíes de expulsión de la población de Gaza y de reubicación de judíos allí, expresados abiertamente por funcionarios israelíes que parecían olvidar que intentos similares de sus predecesores Mapai-Labor para expulsar de nuevo a los refugiados de 1948 de Gaza habían fracasado.


El ministro de Finanzas Bezalel Smotrich en una conferencia de  en Hebrón el mes pasado. Sus promesas de anexión resultaron no ser más que palabras vacías. Foto Itai Ron

Pero el alto el fuego no puede verse simplemente como una gratificante derrota para el campo colonizador. La lógica política detrás de esas bocanadas de aire caliente y castillos de arena ha dado forma, y continúa dando forma, a la política israelí desde la firma de los Acuerdos de Oslo. Esa lógica ha logrado impedir la creación de un Estado que hiciera realidad el derecho palestino a la autodeterminación, aunque solo en el 22 % restante de la tierra entre el río y el mar.
El sabotaje israelí de la soberanía palestina es el reflejo de su impulso por apropiarse de la mayor cantidad de tierra posible con el menor número de palestinos posible. En la práctica, esto significa expulsión: ya sea hacia la Zona A o al exilio; mediante bombardeos aéreos, o con garrotes y barras de hierro de los “jóvenes de las colinas”; ya sea por demolición de viviendas y desalojos forzados llevados a cabo bajo amenaza de armas por la Administración Civil o las FDI, o mediante encarcelamiento y procesamientos de quienes intentan proteger su comunidad y a sí mismos: el resultado es el mismo.
Cuando esta política es la guía, los esfuerzos internacionales para “reformar” los libros escolares palestinos están condenados al fracaso. La realidad diaria del asfixiamiento sistemático que impone Israel, y su autoritarismo, respaldado por su superioridad armamentística, son los padres de la incitación contra el sionismo.
Una de las herramientas más efectivas para sabotear la estatalidad palestina ha sido y sigue siendo la “separación”. Planteada en términos de seguridad que al público israelí le gusta adoptar — incluso cuando los motivos político-inmobiliarios son evidentes — esta herramienta adopta muchas formas: desconectar Gaza de Cisjordania (desde 1991); separar Cisjordania de Jerusalén Este; dividir las ciudades palestinas entre sí; aislar pueblos de las rutas circundantes y de los centros regionales; desenlazar a los palestinos de su tierra, y unos de otros.
Documentos oficiales del gobierno militar de las décadas de 1950 y 1960 — publicados décadas después — confirmaron lo que los palestinos (y los izquierdistas no sionistas) ya entendían desde hace mucho: la supuesta lógica “de seguridad” para duras restricciones de movimiento estaba impulsada en gran medida por intereses inmobiliarios judíos. La visión de una población y territorio palestinos fragmentados a ambos lados de la línea Verde siempre ha reflejado el plan de una “Gran Tierra de Israel” para los judíos. Ambas visiones operan todavía hoy, en paralelo a las cláusulas vagas del plan Trump para un alto el fuego y un “nuevo Medio Oriente”.
La derecha colonizadora compensa su pérdida parcial en Gaza — “parcial” porque las FDI lograron el objetivo compartido de infligir destrucción máxima y muerte en el enclave — intensificando los ataques y el acaparamiento de tierras en Cisjordania. Esto toma principalmente la forma de la separación diaria de los agricultores de sus tierras, una táctica con consecuencias inmediatas y dolorosas. Con la Administración Civil, el ejército y la policía, los colonos aceleran este proceso mediante la violencia física, la obstrucción burocrática y una arrogancia insaciable. Ahora que estamos en temporada de recogida de aceitunas, los batallones del Señor han vuelto su atención hacia la cosecha y los cosechadores mismos.


Enfrentamientos entre soldados y palestinos, acompañados por activistas, en el pueblo de Beita en Cisjordania el viernes. Foto Jaafar Ashtiyeh / AFP


El sábado 11, cuando se escribió este artículo, hacia el mediodía había informes de hostigamiento y ataques directos por parte de colonos y soldados — por separado o juntos — contra recolectores de aceitunas de los pueblos de Jawarish, Aqraba, Beita y Madama al sur de Nablus; de Burqa al este de Ramala; y de Deir Istiya en la región de Salfit. El día anterior, llegaban informes similares desde Yarza, al este de Tubas; desde Immatin, Kafr Thulth y Far’ata en el área de Qalqilya; desde Jawarish, Qablan, Aqraba, Hawara, Yanun y Beita en la zona de Nablus; y de al-Mughayyir y Mazra’a al-Sharqiya al este de Ramala. Estos informes provienen de un solo grupo de WhatsApp que monitorea el norte de Cisjordania.
El hostigamiento va desde intrusiones, provocaciones, bloqueos de carreteras y amenazas armadas hasta agresiones físicas, robo de aceitunas e incendio de vehículos pertenecientes a recolectores y periodistas. Y lo que los colonos hacen esporádicamente, la política oficial lo aplica sistemáticamente: la negación del derecho de los palestinos a la libertad de movimiento entre Gaza y Cisjordania, y dentro de Cisjordania misma. La negación del derecho a elegir el lugar de residencia o de trabajo ha sido durante mucho tiempo devastadora para la sociedad palestina, la economía y las estructuras políticas, y especialmente para el futuro de su juventud.
No menos que las maletas de efectivo qataríes que Benjamin Netanyahu inició transfiriendo a Gaza, la separación de la población de la Franja respecto a la de Cisjordania, y el aislamiento de Gaza del resto del mundo — todo ello ha servido para fortalecer al Hamas — primero como organización política y militar, y luego como poder de gobierno.
En los años noventa, Hamas sostenía que Israel no tenía intención real de hacer la paz y que los acuerdos de Oslo no conducirían a la independencia. Las restricciones israelíes de movimiento en Gaza y su continua expansión de colonias tanto en Gaza como en Cisjordania hacían ese argumento convincente para muchos palestinos, especialmente en Gaza. Los atentados suicidas del Hamas fueron vistos tanto como una reacción como una prueba: ¿la respuesta de Israel premiaría a los opositores de Oslo y a los críticos de la Autoridad Palestina?
Y Israel los premió — al no cumplir sus compromisos. Las restricciones al movimiento y el robo burocrático de tierras debilitaron al Fatah y a la Autoridad Palestina, que había apoyado el proceso diplomático pero que a principios de los años 2000 había optado por la resistencia armada.


Grafiti que dice «Muerte al enemigo, libertad a la patria» en la colonia de Atara, cerca de Ramala, en agosto. Lo que los colonos hacen esporádicamente, la política oficial lo aplica sistemáticamente. Foto Nasser Nasser / AP


Eludiendo con astucia el hecho de que la fragmentación palestina siempre había sido el objetivo de Israel, Hamas presentó el desmantelamiento y el retiro israelí de 2005 como prueba de su propio éxito: que la lucha armada había funcionado. Cada nueva promoción de estudiantes de secundaria — que nunca había salido de la Franja sellada, nunca había conocido otra forma de vida y no encontraba empleo — se volvió más vulnerable a la cosmovisión opresiva del Hamas, a su propaganda y les daba razones de unirse a su ala armada (cobrando sueldos que sostenían familias empobrecidas). Hamas aprendió a canalizar la energía embotellada y la creatividad de Gaza en su maquinaria militar y política.
La Autoridad Palestina, el Fatah y su aparato de seguridad han permanecido impotentes frente a la ola creciente de desposesión de tierras en Cisjordania y a la devastación económica directa e indirecta incrustada en esa expropiación y separación — situación agravada por órdenes sucesivas de ministros israelíes de Finanzas para retener los ingresos arancelarios palestinos.
Ante el público palestino en Cisjordania, esta impotencia es inseparable de la corrupción de las élites civiles y militares de la Autoridad, que son percibidas como egoístas e indiferentes siempre que sus propios bolsillos estén llenos. No es sorprendente, entonces, que la resistencia armada — asociada principalmente con Hamas — conserve su prestigio entre la juventud de Cisjordania. Para ellos, la resistencia armada al menos causa sufrimiento y humillación al agresor israelí.
Todas las señales indican que Israel continuará bloqueando la libertad de movimiento de los palestinos entre Cisjordania, Israel y Gaza, y restringiendo la entrada de palestinos del extranjero y activistas internacionales en la Franja. Como resultado, quienes más necesitan oírlo no podrán saber lo que los residentes de Gaza realmente piensan de la resistencia armada. En otras palabras, cuántos de ellos realmente desprecian al Hamas. [y tú, Amira, ¿quizás lo sabes?, NdT]


Soldados custodian la construcción de una nueva carretera de colonos en Cisjordania, al oeste de Ramala. La supuesta lógica de seguridad de las restricciones de movimiento estaba arraigada en intereses inmobiliarios. Foto Zain Jaafar / AFP

Frente a las políticas israelíes de asfixia, muerte, destrucción y despojo en Cisjordania, la mayoría de los palestinos que no son residentes de la Franja, junto con muchos de sus simpatizantes internacionales, continuarán viendo al Hamas como el representante político auténtico de la aspiración a la libertad y resistencia ante la opresión.
La experiencia muestra que una vez que comience el trabajo de despejar las municiones sin explotar y reconstruir Gaza, quedará claro que el proceso es mucho más complejo y costoso de lo que se esperaba. Más allá de la reconstrucción física, cada uno de los millones de residentes de Gaza necesitará sanación física y psicológica y rehabilitación material, en una escala y duración sin precedentes que desafía la imaginación.
El enfoque correcto, justo y lógico es permitir que los palestinos de Cisjordania y de Israel participen plenamente en ese proceso, en colaboración con los profesionales de la Franja que sobrevivieron: ingenieros estructurales, arquitectos, obreros de la construcción, cirujanos, oftalmólogos, agricultores, expertos en TI, docentes, psicólogos, trabajadores sociales y especialistas en energías renovables.
También sería lógico desarrollar programas en Cisjordania para cuidar a las decenas de miles de niños de Gaza que han quedado huérfanos o lesionados hasta el punto de discapacidad permanente.
En resumen, antes de que el mundo lance licitaciones internacionales para la reconstrucción de Gaza, redacte especificaciones técnicas o emita declaraciones huecas sobre el reconocimiento de un Estado y la desaparición del Hamas, primero debe usar las herramientas políticas a su alcance para asegurar que Israel ponga fin a su política destructiva de separación entre Gaza, Cisjordania y el resto del territorio.
Si eso no ocurre — incluso si el Hamas deponía las armas dentro de Gaza — continuará, o alguna versión futura de él continuará, sirviendo como dirección política del pueblo palestino.

Israels Politik der Trennung sichert den Fortbestand der Hamas, von Amira Hass

Amira Hass, Haaretz, 17.10.2025
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Übersetzt von Tlaxcala

Indem Israel Gaza von der Westbank isoliert und die Palästinenser von ihrem Land trennt, hat es zur Verfestigung der Hamas beigetragen und politische Alternativen ausradiert. Auch wenn der Traum von Luxusvillen in Gaza verschwunden ist, bleibt die zugrunde liegende Logik bestehen: Kontrolle über Territorium, indirekte Vertreibung und das fortgesetzte Erwürgen des palästinensischen Volkes unter dem Deckmantel der Sicherheit.


Ein Siedler schwingt einen Steinschleuder in Richtung Palästinenser, die im Dorf Beita in der Nähe von Nablus Oliven ernten, letzten Freitag. Der Waffenstillstand kann nicht als Niederlage für die Siedler betrachtet werden. Foto Jaafar Ashtiyeh / AFP

Die Versprechen eines Immobilienbooms in Gaza — von der Vision des Finanzministers Bezalel Smotrich, dem Versprechen des Ministers für nationale Sicherheit Itamar Ben Gvir für vornehme Viertel für Polizisten, und den Plänen der Siedlerführerin Daniella Weiss (mit göttlicher Hilfe), Siedlungen wiederherzustellen — haben sich alle als heiße Luft erwiesen.
Es ist verlockend zu sagen, dass das jetzt in Kraft tretende Waffenstillstandsabkommen im Gazastreifen der Siedlerbewegung und ihren Unterstützern in den USA einen schweren Schlag versetzt hat. Ebenso verlockend ist das Bild ihrer Sandburgen, die unter dem Gewicht der unvorstellbaren Ausdauer und Standhaftigkeit der Bewohner Gazas und unter Ägyptens harter, aber politisch kalkulierter Weigerung zusammenbrechen, eine massenhafte Flucht von Palästinensern auf ihr Territorium zuzulassen.
Die ägyptischen außenpolitischen Entscheidungsträger — ganz gleich, wer das Land regiert — haben schon lange Israels Absicht vermutet, Gaza und seine Probleme ihnen zuzuschieben. Von Beginn des Krieges an nahmen sie die israelischen Pläne zur Vertreibung der Bevölkerung Gazas und zur Umsiedlung von Juden dorthin ernst, wie sie offen von israelischen Beamten geäußert wurden, die offenbar vergessen hatten, dass ähnliche Versuche ihrer Vorgänger Mapai-Arbeitspartei, die Flüchtlinge von 1948 erneut aus Gaza zu vertreiben, gescheitert waren.


Finanzminister Bezalel Smotrich bei einer Siedlerkonferenz in Hebron im letzten Monat. Seine Versprechen zur Annexion erwiesen sich als bloße Luftnummern. Foto Itai Ron

Doch der Waffenstillstand darf nicht einfach als genüssliche Niederlage für das Siedlerlager betrachtet werden. Die politische Logik hinter jenen heißen Luftblasen und Sandburgen hat die israelische Politik seit der Unterzeichnung der Oslo-Abkommen geprägt und prägt sie weiterhin. Diese Logik ist erfolgreich gewesen darin, die Gründung eines Staates zu verhindern, der das palästinensische Recht auf Selbstbestimmung verwirklicht — selbst wenn nur auf den verbliebenen 22 % des Landes zwischen Fluss und Meer.
Israels Sabotage der palästinensischen Souveränität ist das Spiegelbild seines Drangs, möglichst viel Land mit möglichst wenigen Palästinensern zu ergreifen. In der Praxis bedeutet das Vertreibung — sei es in Gebiet A oder ins Exil; durch Bomben der Luftwaffe oder durch Knüppel und Eisenstangen der „Hügeljugend“; durch Hauszerstörungen und erzwungene Räumungen, durchgeführt mit Waffengewalt durch die Zivile Verwaltung oder die IDF, oder durch die Inhaftierung und Verfolgung derjenigen, die versuchen, ihre Gemeinschaft und sich selbst zu schützen: das Ergebnis ist dasselbe.
Wenn dies die leitende Politik ist, sind internationale Bemühungen, palästinensische Schulbücher „zu reformieren“, dem Scheitern preisgegeben. Die tägliche Realität der systematischen Erstickung, die Israel aufzwingt, und seine Überheblichkeit, unterstützt durch seine überlegene Bewaffnung, sind die Väter der Anstiftung.
Eines der wirksamsten Werkzeuge zur Sabotage der palästinensischen Staatlichkeit war und bleibt die „Trennung“. In Sicherheitsbegriffen gerahmt, die das israelische Publikum gerne übernimmt — selbst wenn die politischen und immobilienbezogenen Motive offensichtlich sind — nimmt dieses Werkzeug viele Formen an: Gaza von der Westbank abzutrennen (seit 1991); die Westbank von Ostjerusalem zu separieren; palästinensische Städte voneinander zu teilen; Dörfer von den umliegenden Straßen und regionalen Zentren abzuschneiden; Palästinenser von ihrem Land und voneinander zu entkoppeln.
Offizielle Dokumente der Militärverwaltung der 1950er und 1960er Jahre — Jahrzehnte später veröffentlicht — bestätigten, was Palästinenser (und nicht-zionistische Linke) seit langem verstanden hatten: Die sogenannte „Sicherheits“-Begründung für harte Bewegungsbeschränkungen war weitgehend durch jüdische Immobilieninteressen motiviert. Die Vision einer fragmentierten palästinensischen Bevölkerung und Territorien auf beiden Seiten der Grünen Linie spiegelte stets den Plan eines „Großisraelischen Landes“ für Juden wider. Beide Visionen wirken noch heute parallel zu den vagen Klauseln des Trump-Plans für einen Waffenstillstand und ein „neues Nahost“.
Die koloniale Rechte kompensiert ihren teilweisen Verlust in Gaza — „teilweise“, weil die IDF das gemeinsame Ziel erreicht hat, in der Enklave maximale Zerstörung und Tod zuzufügen — durch Eskalation von Angriffen und Landnahmen in der Westbank. Das äußert sich hauptsächlich in der täglichen Trennung von Bauern von ihrem Land, eine Taktik mit sofortigen und schmerzhaften Konsequenzen. Zusammen mit der Zivilverwaltung, dem Militär und der Polizei beschleunigen Siedler diesen Prozess durch physische Gewalt, bürokratische Hindernisse und unersättliche Arroganz. Da wir uns gerade in der Olivenerntesaison befinden, haben die Bataillone des Herrn ihre Aufmerksamkeit auf die Ernte und die Erntehelfer selbst gerichtet.


Auseinandersetzungen zwischen Soldaten und Palästinensern, begleitet von Aktivisten, im Dorf Beita in der Westbank am Freitag. Foto Jaafar Ashtiyeh / AFP

Am Samstag, dem 11., als dieser Artikel geschrieben wurde, gab es bis zum Mittag Berichte über Belästigungen und direkte Angriffe von Siedlern und Soldaten — getrennt oder gemeinsam — gegen Olivenernter aus den Dörfern Jawarish, Aqraba, Beita und Madama südlich von Nablus; aus Burqa östlich von Ramallah; und aus Deir Istiya in der Region Salfit. Am Tag zuvor waren ähnliche Berichte eingegangen aus Yarza, östlich von Tubas; aus Immatin, Kafr Thulth und Far’ata in der Gegend von Qalqilya; aus Jawarish, Qablan, Aqraba, Hawara, Yanun und Beita im Nablus-Gebiet; und aus al-Mughayyir und Mazra’a al-Sharqiya östlich von Ramallah. Diese Berichte stammen aus einer einzigen WhatsApp-Gruppe, die das nördliche Westjordanland überwacht.
Die Belästigungen reichen von Eindringen, Provokationen, Straßensperren und bewaffneten Drohungen bis hin zu körperlichen Angriffen, Diebstahl von Oliven und Brandstiftung an Fahrzeugen von Erntehelfern und Journalisten. Und was Siedler sporadisch tun, das setzt die offizielle Politik systematisch um: die Verweigerung des Rechts der Palästinenser auf Bewegungsfreiheit zwischen Gaza und der Westbank sowie innerhalb der Westbank selbst. Die Verweigerung des Rechts, den Wohn- oder Arbeitsort zu wählen, war schon lange verheerend für die palästinensische Gesellschaft, Wirtschaft und politische Strukturen und insbesondere für die Zukunft ihrer Jugend.
Nicht weniger als die katarischen Geldkoffer, die Benjamin Netanyahu initiierte und in den Gazastreifen transferierte, haben die Trennung der Bevölkerung des Streifens von jener der Westbank und die Isolierung Gazas vom Rest der Welt — all dies dazu beigetragen, Hamas zu stärken — zuerst als politische und militärische Organisation und später als Regierungsgewalt.
In den 1990er Jahren behauptete Hamas, dass Israel keine wahre Absicht habe, Frieden zu schließen, und dass die Oslo-Abkommen nicht zur Unabhängigkeit führen würden. Die israelischen Bewegungsbeschränkungen in Gaza und seine fortgesetzte Ausweitung der Siedlungen sowohl in Gaza als auch in der Westbank machten dieses Argument für viele Palästinenser, insbesondere in Gaza, überzeugend. Die Selbstmordattentate des Hamas wurden sowohl als Reaktion als auch als Test gesehen: würde Israels Antwort Oslo-Gegner und Kritiker der Palästinensischen Autonomiebehörde belohnen?
Und Israel belohnte sie — durch Nichterfüllung seiner Verpflichtungen. Bewegungsbeschränkungen und bürokratischer Landraub schwächten Fatah und die Palästinensische Autonomiebehörde, die den diplomatischen Prozess unterstützt hatten, aber sich Anfang der 2000er Jahre dem bewaffneten Widerstand zuwandten.


Graffiti mit der Aufschrift „Tod dem Feind, Freiheit der Heimat“ in der Siedlung Atara, nahe Ramallah, im August. Was Siedler sporadisch tun, setzt die offizielle Politik systematisch um. Foto Nasser Nasser / AP

Die Hamas, die geschickt den Umstand umging, dass palästinensische Fragmentierung immer Israels Ziel gewesen war, stellte den israelischen Rückzug 2005 und den Abriss der Siedlungen als Beweis für ihren eigenen Erfolg dar: dass der bewaffnete Kampf funktionierte. Jede neue Schulabsolventenklasse — die niemals den versiegelten Streifen verlassen hatte, kein anderes Leben kannte und keine Arbeit fand — wurde anfälliger für die unterdrückerische [sic] Weltanschauung von Hamas, ihre Propaganda und die Rechtfertigung, sich ihrem bewaffneten Flügel anzuschließen (Einkommen, das verarmte Familien unterstützte). Hamas wusste, die aufgestaute Energie und Kreativität Gazas in seine militärische und politische Maschinerie zu lenken.
Die Palästinensische Autonomiebehörde, Fatah und ihr Sicherheitsapparat sind gegenüber der wachsenden Welle der Landenteignung in der Westbank und der direkten und indirekten wirtschaftlichen Verwüstung, die in diese Enteignung und Trennung eingebettet ist, machtlos geblieben, eine Situation, verschärft durch aufeinanderfolgende Aufträge israelischer Finanzminister, palästinensische Zolleinnahmen einzubehalten.
Aus Sicht der palästinensischen Bevölkerung in der Westbank ist diese Ohnmacht untrennbar mit der Korruption der zivilen und militärischen Eliten der Autonomiebehörde verbunden, die als eigennützig und gleichgültig gelten, solange ihre eigenen Taschen gefüllt sind. Es ist daher nicht überraschend, dass der bewaffnete Widerstand — vor allem mit Hamas assoziiert — bei der Jugend der Westbank Ansehen bewahrt. Für sie verursacht bewaffneter Widerstand zumindest Leid und Demütigung dem israelischen Aggressor.
Alle Anzeichen deuten darauf hin, dass Israel weiterhin die Bewegungsfreiheit der Palästinenser zwischen der Westbank, Israel und Gaza blockieren und die Einreise von Palästinensern aus dem Ausland sowie von internationalen AktivistInnen in den Streifen einschränken wird. Infolgedessen werden diejenigen, die es am dringendsten hören müssten, nicht wissen können, was die Bewohner Gazas wirklich über bewaffneten Widerstand denken. Mit anderen Worten: wie viele von ihnen Hamas tatsächlich verachten. [und Du, Amira, weißt es ?, Anm. d. Übers.]

Soldaten bewachen den Bau einer neuen Siedlerstraße in der Westbank, westlich von Ramallah. Die sogenannte Sicherheitslogik der Bewegungsbeschränkungen war in Immobilieninteressen verwurzelt. Foto Zain Jaafar / AFP

Angesichts Israels Politik des Erstickens, Tötens, der Zerstörung und der Enteignung in der Westbank werden die meisten Palästinenser, die nicht im Streifen wohnen, zusammen mit vielen ihrer internationalen Unterstützer Hamas weiterhin als authentischen politischen Ausdruck des Strebens nach Freiheit und Widerstand gegen Unterdrückung ansehen.
Die Erfahrung zeigt, dass sobald die Räumung von Blindgängern und der Wiederaufbau Gazas beginnen, sich zeigen wird, dass der Prozess weitaus komplizierter und kostspieliger ist als zunächst erwartet. Jenseits des physischen Wiederaufbaus wird jeder der Millionen Bewohner Gazas körperliche und psychische Heilung sowie materielle Rehabilitation benötigen — in einem noch nie dagewesenen Ausmaß und über eine Dauer, die jede Vorstellungskraft übersteigt.
Der richtige, gerechte und logische Ansatz besteht darin, es Palästinensern aus der Westbank und aus Israel zu ermöglichen, vollständig an diesem Prozess teilzunehmen, in Zusammenarbeit mit den überlebenden Fachleuten im Streifen: Strukturingenieure, Architekten, Bauarbeiter, Chirurgen, Augenärzte, Bauern, IT-ExpertInnen, Lehrkräfte, PsychologInnen, Sozialarbeiterinnen und SpezialistInnen für erneuerbare Energien.
Ebenso wäre es logisch, Programme in der Westbank zu entwickeln, um sich um die Zehntausenden von Kindern aus Gaza zu kümmern, die zu Waisen geworden sind oder so schwer verletzt wurden, dass bleibende Behinderungen entstanden sind.
Kurzum: Bevor die Welt internationale Ausschreibungen für den Wiederaufbau Gazas startet, technische Spezifikationen entwirft oder hohle Erklärungen zum Staaterkennen und zum Verschwinden der Hamas abgibt, muss sie zuerst die politischen Instrumente einsetzen, die ihr zur Verfügung stehen, um sicherzustellen, dass Israel seine destruktive Politik der Trennung zwischen Gaza, der Westbank und dem restlichen Land beendet.
Wenn das nicht geschieht — selbst wenn Hamas seine Waffen innerhalb Gazas niederlegen würde, wird sie, oder eine zukünftige Version von ihr, weiterhin als politische Adresse des palästinensischen Volkes dienen.

17/10/2025

Werden Israelis eines Tages über die Gräueltaten ihres Landes in Gaza sagen: „Ich war immer dagegen“?


Menschen werden nicht grausam geboren; sie werden es. Die Grausamkeit der Palästinenser gegenüber Israelis wird weit verbreitet gezeigt, während unsere Grausamkeit – die der israelischen Gesellschaft – immer raffinierter wird, um unsere Beute zu schützen.

Amira Hass, Haaretz, 15.10.2025
Übersetzt von Tlaxcala

Palästinenser kaufen auf einem provisorischen Markt im Flüchtlingslager Nuseirat im Zentrum des Gazastreifens ein. Foto: Eyad Baba/AFP

Optimisten sagen, dass die Israelis schließlich das Ausmaß der Gräueltat begreifen werden, die sie im Gazastreifen begangen haben. Die Wahrheit wird in ihr Bewusstsein einsickern.
Eines Tages werden alte Videos von Säuglingen, die durch unsere Bomben in Stücke gerissen wurden, die Herzen der Israelis erreichen und durchbohren. Sie werden plötzlich Kinder sehen, bedeckt vom Staub des zertrümmerten Betons, unter dem sie gerettet wurden, unkontrolliert zitternd und mit leerem Blick voller Fragezeichen.

Irgendwann, sagen die Optimisten, werden die Israelis aufhören zu sagen: „Sie haben es verdient, wegen des 7. Oktober. Sie haben angegriffen.“ Die Zahlen werden aufhören, bloße Abstraktionen zu sein, und niemand wird mehr sagen: „Wer glaubt schon der Hamas?“ Die Leser werden begreifen, dass mehr als 20.000 Kinder – ein Drittel aller Toten – durch unsere Hände getötet wurden. Mehr als 44.000 Kinder wurden verletzt – ein Viertel aller Verwundeten. Sie werden erkennen, dass sie einen Vernichtungskrieg gegen ein Volk unterstützt haben und keine bewaffnete Organisation besiegt.

Sie werden erkennen, dass die individuelle Grausamkeit der Rache, die so viele Soldaten zeigten – oft begleitet von Lachen und Lächeln auf TikTok – und die kalte, chirurgische und anonyme Tötung aus Cockpits und Kontrollräumen – kein Zeichen von Heldentum ist, sondern eine schwere Krankheit. Gesellschaftlich und persönlich.

Eltern, so glauben die Optimisten, werden nachts nicht schlafen können, aus Angst, dass die Kreuze auf den Gewehren ihrer Söhne Frauen, alte Menschen oder Jugendliche markieren, die Kräuter zum Essen sammelten. Der Tag wird kommen, an dem Jugendliche ihre Väter, die damals Soldaten waren, fragen werden, ob sie ebenfalls einem Befehl gehorchten, auf einen alten Mann zu schießen, der eine unbekannte rote Linie überschritten hatte.

Die Töchter dekorierter Piloten werden fragen, ob sie eine „verhältnismäßige“ Bombe abgeworfen haben, die hundert Zivilisten für einen mittleren Hamas-Kommandanten tötete. „Warum hast du dich nicht geweigert?“, wird die Tochter schluchzen.

DemonstrantInnen mit Fotos von palästinensischen Kindern, die Anfang dieses Jahres in Gaza von Israel getötet wurden, in der Nähe des Luftwaffenstützpunkts Tel Nof.


Die Enkel eines pensionierten Gefängniswärters werden fragen: „Hast du persönlich einen gefesselten Häftling geschlagen, bis er ohnmächtig wurde? Hast du dem Befehl des Ministers gehorcht, den Gefangenen Nahrung und Duschen zu verweigern? Hast du 30 Häftlinge in eine Zelle für sechs gesteckt? Woher kamen die Hautkrankheiten? Kanntest du einen der Dutzenden Häftlinge, die in israelischen Gefängnissen an Hunger, Schlägen oder Folter starben? Wie konntest du nur, Opa?“ Die Neffen von Obersten Richtern werden deren Urteile lesen, die all das erlaubten, und aufhören, sie am Schabbat zu besuchen.

Irgendwann, glauben die Optimisten, wird die israelische Medienvernebelung der Realität aufhören, Gehirne zu waschen und Herzen zu betäuben. Der Ausdruck „der Kontext“ wird kein Schimpfwort mehr sein, und die Öffentlichkeit wird die Punkte verbinden: Unterdrückung. Vertreibung. Demütigung. Deportation. Besatzung. Und all das Leid dazwischen. Es sind keine Parolen selbsthassender Juden, sondern Beschreibungen des Lebens eines ganzen Volkes – jahrelang, unter unseren Befehlen und unseren Waffen.

Menschen werden nicht grausam geboren; sie werden es. Die Grausamkeit der Palästinenser gegenüber Israelis wird ausführlich gezeigt, als Reaktion und Widerstand gegen unsere fremde und feindliche Herrschaft. Unsere Grausamkeit, die der israelischen Gesellschaft, wird immer ausgefeilter – mit dem Ziel, unsere Beute zu schützen: das Land, das Wasser und die Freiheiten, von denen wir die Palästinenser vertrieben haben.

Die Optimisten glauben, dass es einen Weg zurück gibt. Wie glücklich sie sind, diese Optimisten.

¿Dirán algún día los israelíes sobre las atrocidades de su país en Gaza: “Siempre estuve en contra”?

Las personas no nacen crueles; se vuelven así. La crueldad de los palestinos hacia los israelíes se difunde ampliamente, mientras que nuestra crueldad, la de la sociedad israelí, se vuelve cada vez más sofisticada para proteger nuestros botines.

Amira Hass, Haaretz, 15/10/2025
Traducido por Tlaxcala


Los palestinos compran en un mercado improvisado en el campo de refugiados de Nuseirat, ubicado en el centro de la Franja de Gaza, el miércoles. Foto: Eyad Baba/AFP

Los optimistas dicen que, al final, los israelíes comprenderán la magnitud de la atrocidad que cometieron en la Franja de Gaza. La verdad se filtrará en su conciencia.
Los viejos videos de bebés destrozados por nuestras bombas llegarán algún día al corazón de los israelíes y los traspasarán. Verán de repente a los niños cubiertos por el polvo del hormigón triturado bajo el cual fueron rescatados, temblando incontrolablemente y mirando al vacío con una expresión que es todo un gran signo de interrogación.

En algún momento, dicen los optimistas, los israelíes dejarán de decir: «Se lo merecían, por el 7 de octubre. Ellos atacaron.» Los números dejarán de ser abstracciones y “¿quién cree a Hamás?”. Los lectores comprenderán que más de 20.000 niños fueron asesinados —un tercio de todos los muertos— por nuestras manos. Más de 44.000 niños fueron heridos —una cuarta parte de todos los heridos—. Comprenderán que apoyaron y facilitaron una guerra de aniquilación contra un pueblo, y no la derrota de una organización armada cruel.

En algún momento, entenderán que la crueldad individual de la venganza mostrada por tantos soldados —a menudo acompañada de risas y sonrisas difundidas por TikTok— y la crueldad fría, quirúrgica y anónima de quienes matan desde cabinas o salas de control como si jugaran a videojuegos— no son marcas de heroísmo, sino una grave enfermedad. Social y personal.

Los padres, creen los optimistas, no podrán dormir por las noches, preocupados de que las X en los fusiles de sus hijos marquen mujeres, ancianos o jóvenes que recolectaban hierbas para comer. Llegará el día en que los adolescentes pregunten a sus padres, que fueron soldados entonces, si también obedecieron una orden de disparar a un anciano que cruzó una línea roja desconocida.

Las hijas de pilotos condecorados preguntarán si lanzaron una bomba “proporcionada” que mató a cien civiles por un comandante medio de Hamás. “¿Por qué no te negaste?”, sollozará la hija.

Manifestantes portando fotos de niños palestinos asesinados en Gaza por Israel cerca de la base aérea de Tel Nof, a principios de este año.

Los nietos de un guardia de prisión jubilado preguntarán: “¿Golpeaste tú personalmente a un detenido esposado hasta que se desmayó? ¿Obedeciste la orden de un ministro de negar comida y duchas a los prisioneros? ¿Amasaste a 30 detenidos en una celda diseñada para seis? ¿De dónde vinieron las enfermedades de la piel? ¿Conocías a alguno de las decenas de detenidos que murieron en una prisión israelí por hambre, golpes o tortura? ¿Cómo pudiste, abuelo?” Los sobrinos de jueces del Tribunal Supremo leerán sus sentencias que permitieron todo eso y dejarán de visitarlos en el shabat.

En algún momento, creen los optimistas, el encubrimiento de la realidad por parte de los medios israelíes dejará de lavar cerebros y adormecer corazones. La expresión “el contexto” no será considerada una blasfemia, y el público conectará los puntos: opresión. Expulsión. Humillación. Deportación. Ocupación. Y todo el sufrimiento entre ellas. No son partes de consignas inventadas por judíos que se odian a sí mismos, sino la descripción de la vida de un pueblo entero, durante años, bajo nuestras órdenes y nuestras armas.

Las personas no nacen crueles; se vuelven así. La crueldad de los palestinos hacia los israelíes se cubre extensamente en nuestros medios, artículos y primeros planos. Se desarrolló como respuesta y resistencia a nuestro dominio extranjero y hostil. Nuestra crueldad, la de la sociedad israelí, se vuelve cada vez más sofisticada con el objetivo de proteger nuestros botines: la tierra, el agua y las libertades de las que expulsamos a los palestinos.

Los optimistas creen que hay un camino de regreso. Qué afortunados son, los optimistas.

17/05/2024

AMIRA HASS
Al Mughayyir, Cisjordanie occupée : il ne s’agissait pas d’une foule incontrôlée de colons, c’était un assaut bien orchestré

Amira Hass et Nidal Eshtayeh (photos), Haaretz, 2/5/2024
Traduit par Layân Benhamed, édité par Fausto Giudice, Tlaxcala

 30 membres d’une même famille figuraient parmi les Palestiniens attaqués par des colons dans le village d’Al-Mughayyir, en Cisjordanie, en avril dernier. Les descriptions qu’ils ont faites de ces moments terrifiants montrent qu’il ne s’agissait pas d’une attaque spontanée.

Lina Bishara avec la porte qu’elle a tenue pour essayer de protéger ses enfants des envahisseurs

Les habitants du village d’Al-Mughayyir, en Cisjordanie, qui ont été attaqués par des colons il y a près de trois semaines, ont eu l’impression qu’il ne s’agissait pas d’une foule incontrôlée. Au contraire, les assaillants étaient bien organisés, avec une division du travail et une planification préalable.

Les colons envahisseurs se sont divisés en plusieurs unités qui ont opéré simultanément dans plusieurs quartiers, selon les résidents. Chaque unité s’est ensuite divisée en plusieurs petites cellules. Une cellule était chargée de lancer des pierres sur les fenêtres des voitures et des maisons ; une autre s’occupait des incendies criminels ; une troisième, composée principalement de jeunes garçons, ramassait les pierres et les remettait aux lanceurs ; et une quatrième cellule, relativement importante, était composée d’hommes armés qui se sont éparpillés  dans la zone.

Treize maisons ont été incendiées au cours du week-end des 12 et 13 avril, ainsi que des dizaines de voitures. Les habitants ont remarqué que les colons envahisseurs n’utilisaient pas de briquets ou d’allumettes, qui prennent du temps à allumer un feu et ne donnent pas de résultats garantis. Ils n’ont pas non plus utilisé de cocktails Molotov, qui ne s’enflamment pas toujours.

Selon les témoins, ils utilisaient plutôt un objet rond ressemblant à une petite grenade degaz. Un membre de la cellule incendiaire le jetait sur le siège d’une voiture, dont la vitre avait été brisée auparavant par une autre cellule, ou dans une maison ou sur un balcon. L’objet est alors la proie des flammes, ce qui le rend inidentifiable. Au bout de 30 secondes au maximum - le temps pour la cellule incendiaire de s’enfuir - un gigantesque incendie se déclare.

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Les témoins supposent que l’objet rond était muni d’une sorte de clip de sécurité que l’assaillant relâchait avant de le lancer, tout en prenant soin de viser des matériaux inflammables tels que des tissus. Une tour de fumée noire s’est élevée de chaque maison et voiture incendiées. Les habitants d’Al-Mughayyir ont déclaré que les flammes ne faisaient que croître lorsqu’ils essayaient d’éteindre le feu avec de l’eau. Une source de sécurité a déclaré que l’armée ne connaissait pas ce type de dispositif ‘.

Ce week-end-là, au cours duquel l’adolescent Binyamin Ahimeir a été assassiné près de l’avant-poste de Malakhei Shalom (“anges de la paix”), à l’est d’Al-Mughayyir, plus de 60 attaques de colons ont été recensées dans toute la Cisjordanie, certaines plus graves que d’autres. Au cours des deux semaines qui ont suivi, 50 autres attaques ont été recensées. Quatre Palestiniens ont été tués au cours de ces attaques, dont au moins trois par des civils israéliens et non par des soldats.

Les membres de la famille Bishara à côté de la voiture incendiée

Par conséquent, la description d’une seule agression de Palestiniens par des colons - des civils israéliens - n’est qu’un minuscule échantillon de la réalité quotidienne vécue par des dizaines de villages et des milliers de Palestiniens.

L’attaque décrite ci-dessous, qui a visé les familles de trois frères de la famille Bishara vivant dans trois maisons distinctes, n’a pas duré plus de 10 minutes, selon leurs estimations. Mais à sur le moment’, il leur a semblé qu’elle avait duré au moins deux heures. Deux semaines plus tard, 30 membres de la famille revivent encore cette attaque.

Les trois familles vivent dans le quartier le plus au nord d’Al-Mughayyir - six adultes et 13 enfants. Le plus jeune, né prématurément, était heureusement encore en couveuse à l’hôpital. À l’est des maisons se trouve une oliveraie plantée par le père des frères il y a plusieurs dizaines d’années.

Le vendredi 12 avril, deuxième jour de la fête de l’Aïd al-Fitr, leurs sœurs aînées sont venues rendre visite à leurs enfants, ainsi qu’à leur père Ribhi, âgé de 80 ans, qui vit dans la ville voisine de Ramallah - soit 12 autres personnes. Les enfants ont joué dans les jardins et les arbres, les adultes ont bavardé et bu du café. Ils n’avaient pas encore déjeuné. À un moment donné, les trois frères sont entrés dans l’une des maisons pour discuter d’une affaire familiale.

Vers 14 heures, les haut-parleurs des mosquées ont annoncé qu’un grand nombre de colons s’étaient rassemblés sur la route Allon, à l’est du village. Les habitants se sont immédiatement dirigés vers le quartier est pour protéger leurs parents et amis.

« Le comité de liaison civil palestinien nous a dit qu’un jeune colon avait disparu et qu’il fallait éviter les tensions  », se souvient un frère, Haroun, 37 ans, entrepreneur en électricité, qui travaillait en Israël jusqu’au début de la guerre. « Nous en avons conclu que l’armée contrôlait la situation. De nombreux soldats étaient présents ». Les gens ont donc commencé à rentrer chez eux.

Les FDI ont déclaré en réponse que « les forces opérant dans la zone étaient préparées à l’avance et ont travaillé sans relâche pour protéger la vie des civils et leurs biens ». En outre, l’armée a déclaré que « les forces de sécurité s’efforcent de désamorcer les tensions  en utilisant les moyens à leur disposition et, si nécessaire, les suspects sont détenus jusqu’à l’arrivée de la police, qui est chargée de régler le problème ».

Haroun, sa femme Lina et quelques enfants sont montés sur le toit de leur petite maison, tout comme le père de Haroun. Les sœurs et quelques autres enfants sont restés dans le salon. Ils ont verrouillé les deux verrous de leur porte en acier et se sont sentis relativement en sécurité. Moussa, un professeur de mathématiques de 39 ans, et sa femme, Iman, ont verrouillé leurs deux portes et sont entrés avec leurs deux jeunes enfants dans une chambre dont la fenêtre est orientée vers l’est.

Le troisième frère, Bishara, 47 ans, est également électricien et travaillait en Israël jusqu’en octobre. Il se trouvait sur le balcon de sa maison, qui dispose de meubles de jardin et est couverte par une pergola. Sa femme Nadia était à l’intérieur avec leurs trois filles, âgées de 15, 9 et 4 ans, et leurs deux fils. L’un des fils, Abdullah, 17 ans, souffre d’un handicap congénital et ne peut pas marcher seul.

Les trois maisons ne sont séparées que par quelques mètres. Devant chacune d’elles se trouve une place de parking. La voiture de Bishara est exonérée de taxes pour les personnes handicapées et sert principalement à conduire Abdullah à la physiothérapie et à l’école.

Même si les membres de la famille Bishara avaient pensé qu’il valait mieux prendre leur voiture et quitter leur maison, ils n’auraient pas pu le faire. Une jeep militaire est entrée dans leur quartier par le nord, s’est arrêtée au bout de la route la plus proche de l’intérieur du village et a bloqué la sortie. Dans une certaine mesure, sa présence les a confortés dans l’idée que l’armée contrôlait la situation, ou du moins qu’elle voulait la contrôler. Plus tard, la jeep a fait marche arrière le long de cette route jusqu’à la limite du quartier, où les maisons sont construites à flanc de colline.

C’est de cette colline que des colons ont envahi le village en janvier 2019. Ils ont tué Hamdi Naasan, qui était allé secourir l’un des hommes blessés en tentant de protéger ses concitoyens. Un monument à sa mémoire  a été érigé sur la colline. Il y a plus de deux mois, des colons ont agressé Imad Abu Alia, qui gardait ses moutons sur cette colline, plus au nord. Ils ont également volé deux de ses moutons.

Après avoir remonté la colline, la jeep militaire se trouvait maintenant sur le chemin qui monte la colline vers le nord-ouest, non loin du mémorial à Hamdi Naasan. Deux autres jeeps s’y trouvaient également, se souvient la famille.

« Soudain, j’ai vu les colons contourner les jeeps », raconte Lina. « Et, comme des enfants qui quittent l’école en trombe après la classe, ils ont couru vers l’avant ». Elle les a ensuite vus se diviser en plusieurs groupes. Une de ses amies, dont la maison se trouve à la limite du quartier, s’est rapidement enfuie avec sa douzaine de moutons.

Les envahisseurs portaient des vêtements civils et s’étaient couvert le visage, certains avec des chemises, d’autres avec des bonnets noirs. Les haut-parleurs de la mosquée annoncent que la maison d’Abu Ata, la plus proche de la route Allon, a été attaquée. Les soldats à bord des jeeps ont tiré des gaz lacrymogènes sur les Palestiniens qui avaient tenté de protéger la famille.

Jihad Abu Alia, 25 ans, a été abattu par un colon. Plusieurs autres résidents ont également été blessés par balle. Les civils israéliens se sont introduits dans la bergerie d’Imad Abu Alia, ont volé tout son troupeau et l’ont battu jusqu’à ce qu’il s’évanouisse. La source de sécurité a déclaré que trois suspects ont été arrêtés ce jour-là, quatre ont été détenus puis relâchés, et huit autres ont été arrêtés depuis.

Bishara, dont la maison est la plus au nord de celles des trois frères, a déclaré avoir soudain vu un homme masqué tenant une pierre. « J’étais certain qu’il s’agissait de l’un de nos hommes qui étaient sortis pour défendre le village », a-t-il déclaré. « Je n’ai pas compris pourquoi il lançait une pierre sur ma voiture. Puis il a également lancé une pierre sur moi, qui m’a touché à la jambe. L’un de mes proches m’a crié de loin : “Ce sont des colons”. Tout s’est passé en quelques secondes ».


Les trois maisons des frères Bishara à Al-Mughayyir, à l’ouest de l’oliveraie que leur père a plantée il y a plusieurs décennies

« Plusieurs autres hommes masqués sont apparus. J’ai couru à l’intérieur. Je n’ai pas eu le temps de fermer la porte en acier. Dans ma stupidité, j’ai fermé la porte coulissante. Le type a lancé une pierre qui a brisé la vitre. J’ai immédiatement commencé à baisser les volets ».

Entre-temps, il a vu un autre homme masqué jeter quelque chose dans sa voiture. Des flammes en sont sorties. La famille est restée dans le salon. « Notre petite Doha et Sajaa se sont cachées sous une couverture », raconte Nadia. Bishara a ajouté : « J’étais  aussi apeuré. Comment ne pas l’être ? »

Alors qu’ils se tenaient dans le salon et que le feu crépitait à l’extérieur, des jeunes hommes du village leur ont crié de quitter la maison car les flammes pouvaient s’y propager. Les flammes ont atteint la pergola, les meubles de la terrasse, l’horloge à eau extérieure, la pompe à eau et ont commencé à consumer  les barreaux de la fenêtre de la cuisine.

La famille a quitté la maison par la porte arrière et a traversé les jardins des voisins pour se rendre au centre du village, qui semblait plus sûr. Leur fils Mustafa, âgé de 20 ans, a porté Abdullah sur son dos et a été le premier à partir. Il a marché jusqu’à ce qu’il atteigne la maison de voisins qui ont conduit Abdullah jusqu’au bout dans leur voiture. Le reste de la famille a couru derrière eux. « Je ne savais pas si la maison serait encore là à notre retour », a déclaré Nadia.

Des personnes présentes sur les lieux ont déclaré que les mêmes hommes masqués ou d’autres se sont rendus dans la maison de Moussa, la plus centrale des trois maisons des frères. Ghanim, sa fille de 8 ans, s’est mise à pleurer et à trembler. Son fils Amar, âgé de 5 ans, « s’est retenu et n’a pas pleuré, mais j’ai vu qu’il avait peur », a déclaré sa mère, Iman. Ils se sont rendus dans une pièce intérieure et se sont assis sur un matelas. Elle a serré les deux enfants dans ses bras, tandis que Ghanim continuait à pleurer et à trembler.

Moussa est monté sur le toit et a vu un homme masqué jeter une pierre sur sa voiture. La vitre s’est brisée. Un autre groupe d’hommes masqués est arrivé et l’un d’eux a lancé un objet qui s’est immédiatement enflammé. Un autre homme armé s’est placé entre les arbres et a tiré sur Moussa. « Je me suis immédiatement accroupi et je me suis réfugié derrière le parapet en béton de la terrasse », a-t-il déclaré.

C’est alors que des jeunes hommes du village sont venus les secourir. « Je viens d’un autre village, je ne les connaissais pas », a déclaré Iman, la femme de Moussa. « J’avais peur que ce soient des colons. Mais j’ai reconnu l’un d’entre eux et je me suis calmée. Ils ont porté les deux enfants à l’extérieur. J’avais tellement peur que mes jambes ne me portaient pas. Je pouvais à peine marcher ». Ce n’est qu’après avoir atteint la maison d’un parent qu’Amar, 5 ans, s’est laissé aller aux larmes.


Bishara Bishara dans son jardin, à côté de sa voiture incendiée

Haroun et sa famille, qui s’étaient cachés sur la terrasse, ont vu plusieurs dizaines d’hommes masqués dispersés parmi les arbres et près des maisons. Deux d’entre eux avaient des fusils, a-t-il dit, dont un qui portait un gilet orange. Certains des hommes masqués portaient des gourdins. D’autres avaient des pierres. La famille a déclaré que certains des colons envahisseurs avaient également des armes de poing enfoncées dans la ceinture de leurs pantalons.

Soudain, quelque chose a été tiré sur la maison en direction des jeeps militaires qui n’avaient pas arrêté les envahisseurs. Ils ont cru qu’il s’agissait d’une balle enrobée de caoutchouc. Plus tard, ils ont découvert qu’il s’agissait d’une balle à pointe éponge, qui a brisé la table pliante à l’extérieur de la maison.

Lina et les enfants quittent la terrasse et descendent en courant. Elle, ses belles-sœurs et leurs enfants se répartissent entre le petit salon et une chambre. Ils entendent des éclats de verre. Ceux qui étaient encore sur la terrasse ont vu que lorsque les lanceurs de pierres n’avaient plus de pierres, une escouade de jeunes gens leur en apportait d’autres.

Les envahisseurs frappent la porte d’acier de l’entrée à coups de pied et de poing jusqu’à ce qu’elle s’ouvre. Quatre hommes masqués et non armés se sont précipités à l’intérieur. Deux d’entre eux se sont dirigés vers la cuisine et la salle de bains. Lina, qui est enceinte, et sa belle-sœur Amal se tenaient derrière la porte en bois du salon et s’y appuyaient. Mais deux des envahisseurs ont réussi à forcer la porte, pierres à la main.

Lina a raconté comment elle a tenu la porte, désormais isolée, et tenté de bloquer les hommes qui lançaient des pierres sur tous ceux qui se trouvaient à proximité. Les jumelles de 5 ans, Shirin et Ribhi, se sont cachées sous la table basse. Diana, 3 ans, s’est couvert le visage avec un oreiller et s’est appuyée sur le bord du canapé. Julia, 8 ans, et Laila, 11 ans, se sont accroupies sur le sol dans l’espace entre les meubles. Tous les enfants ont crié et pleuré.

Pendant l’attaque, Diana, âgée de 3 ans, s’est couvert le visage avec un oreiller et s’est appuyée sur le bord du canapé

Selon Lina, l’un des envahisseurs a attrapé Rashid, le fils de 8 ans de sa belle-sœur Amal, et a commencé à le tirer. Amal a attrapé son fils et l’a sauvé. « Notre inquiétude pour nos enfants nous a donné du courage », a expliqué Lina.

Plus tard, la famille a découvert que le sol de la cuisine était couvert de débris  de verre, de produits alimentaires et d’aliments cuits qui avaient été sortis du réfrigérateur et jetés là. Ils ont également découvert que le micro-ondes, un miroir, des poteries et une table avaient été brisés. Une pierre a brisé la télévision. La voiture de la famille a été incendiée.

Haroun et son père ont dévalé les escaliers. L’un des envahisseurs a jeté une partie de la table en plastique qui se trouvait dans la cour sur l’homme de 80 ans. La table l’a frappé au visage, il a glissé et est tombé dans les escaliers. Haroun a saisi deux bouteilles de Coca-Cola en plastique qui se trouvaient dans une boîte sur les escaliers et les a lancées sur l’un des envahisseurs.

À ce moment-là, les sauveteurs du village étaient déjà près de sa maison et les quatre envahisseurs qui se trouvaient à l’intérieur se sont enfuis. Les colons qui se trouvaient à l’extérieur se sont également dispersés.

Les trois familles sont restées loin de leurs maisons, chez des proches, pendant deux jours, jusqu’à dimanche. Elles ne savaient pas si l’incendie s’était propagé jusqu’à à leurs maisons.

Samedi, les funérailles du villageois t tué ont eu lieu. Des soldats ont tiré sur le cortège funèbre, selon les habitants. Des jeunes gens ont couru pour les affronter.

Alors que les soldats tirent, des dizaines de colons apparaissent à nouveau, cette fois depuis la colline située à l’ouest du village. Ils ont couru vers l’est, vers le quartier nord qui était maintenant vide d’habitants. Les soldats leur ont lancé des grenades lacrymogènes, mais cela ne les a pas découragés.

Une fois sur place, les colons ont incendié d’autres maisons, ainsi qu’un entrepôt, une pergola, deux enclos pour animaux, du fourrage pour les moutons, une jeep et un camion de pompiers qui étaient arrivés du village voisin de Taybeh. Ils ont également incendié des voitures appartenant à des habitants d’autres villages venus assister aux funérailles.

Une maison incendiée dans le village d’Al-Mughayyir en Cisjordanie

« Le plus dur, c’est le sentiment d’impuissance », a déclaré Moussa. « Il est entré dans ma maison et je n’ai pu protéger ni ma famille ni moi-même. À leurs yeux, une personne ne vaut rien. Que nous vivions ou non ne changeait rien. "Comment vais-je calmer ma fille si je ne suis pas calme ? Je suis dans un état où il y a un décalage entre les trois fondements de ma personnalité : les sentiments, les pensées et les actions. Les sentiments sont ce qu’ils sont, tout comme les pensées difficiles suscitées par l’agression. Mais je n’arrive pas à les exprimer par des actes ».

C’est alors que Lina l’interrompt. « Il nous est interdit de nous défendre ; si nous le faisons, nous serons arrêtés et jugés comme des terroristes », dit-elle. « Ou ils nous tueront, comme ils ont tué Jihad Abu Alia ».

Moussa est du même avis. « Si j’exprime mes sentiments sur Facebook et que j’écris ce que je pense de l’armée et des colons, ils m’arrêteront pour incitation à la haine », a-t-il déclaré. « Cette paralysie m’affecte. Je n’arrive pas à dormir la nuit. Comment vais-je enseigner à mes élèves le lendemain ? Tout cela nous fait penser à l’émigration ».