English version after the French original
Ce dimanche 30 novembre 2025, le Rotterdam
Philharmonic Orchestra donnera un concert à la Philarmonie
de Paris (Cité de la Musique) sous la direction de son directeur musical
Lahav Shani, qui est aussi directeur musical de l’Orchestre philarmonique d’Israël
et sera celui de l’Orchestre philarmonique de Munich à partir de septembre 2026.
Un précédent concert donné le 6 novembre au même endroit par l’Orchestre
symphonique d’Israël sous la même direction avait été le théâtre d’incidents, à
la suite desquels 4 manifestants propalestiniens ont été mis en examen et ont
déposé à leur tour diverses plaintes pour agressions et violation du secret de
l’enquête. Plusieurs organisation viennent d’adresser la lettre ci-dessous au
directeur de la Philarmonie.-Tlaxcala
Jeudi
27 novembre 2025
Monsieur le Directeur,
Depuis le début du génocide à
Gaza, on atteste de près de 70 000 personnes assassiné.e.s, hommes, femmes et
enfants compris. Toujours à Gaza, ce sont 345 personnes qui ont été assassinées
et 889 blessées par l’armée israélienne, depuis l’entrée en vigueur du
« cessez-le-feu », le 11 octobre dernier, cessez-le-feu violé plus de
500 fois. En deux ans, c’est 6 fois la bombe d’Hiroshima qui s’est écrasée sur
un territoire d’à peine 150 kilomètres carrés. L’aide humanitaire et médicale
reste bloquée alors qu’avec l’hiver les épidémies s’apprêtent à emboîter le pas
à la famine. Tous les jours les cadavres s’amoncèlent lorsqu’ils ont la
« chance » d’être retrouvés. Lundi 24 novembre, c’est en armes que
les milices israéliennes ont chassé les enfants du Théâtre national palestinien
(El-Hakawati Theatre) de Jérusalem occupée. Ces armes feront certainement moins
parler d’elles que de pauvres fumigènes brandis face aux ambassadeurs culturels
de l'État d’Israël.
Le génocide, tel qu’il a été
caractérisé par les instances de droit international compétentes, se poursuit
sous nos yeux. Et vous, que faites-vous ?
Protestations contre une série de concerts de l'Israel Symphony Orchestra au Carnegie Hall de New York, 15 octobre 2025
Non content d’inviter l’Israel
Philharmonic Orchestra (IPO) et son chef titulaire, ambassadeurs officiels de
l’état colonial en plein génocide, non content d’accueillir ces musicien.ne.s
qui se font le relais de la déshumanisation des Palestinien.ne.s par des propos
de désinformation condamnables sur leurs réseaux sociaux à l’instar d’Eleonora
Lutsky qui nous parle de « Hamaswood » et Kirill Mihanovsky qui
désigne les Palestinien.ne.s de « monstrueux voisins », non content
d’attaquer en justice des militant.e.s pacifiques qui appellent au boycott
légitime des institutions culturelles israéliennes qui participent à la
normalisation du génocide, vous, vous décidez de vous enfoncer avec votre
institution dans le mensonge en espérant ne jamais avoir à assumer vos
responsabilités face à l’histoire et face à la justice.
Vous avez menti à vos salarié.e.s
lors d’une assemblée générale extraordinaire en qualifiant de violent.e.s des
militant.e.s pacifistes, en passant sous silence la violence des insultes
racistes et homophobes d’une partie du public, en affirmant que vous ne saviez
pas que l’orchestre allait jouer l’hymne israélien alors qu’il l’interprète
régulièrement lors de ces tournées. Car oui, cet hymne n’a pas été joué en
réaction à l’action de nos camarades, c’était déjà un acte prémédité.
Vous avez été cordialement
invité, au regard des appels palestiniens et dans le cadre du droit
international, à annuler les venues de Lahav Shani, de l’IPO et du Jerusalem
Quartet pour le rôle institutionnel qu’ils occupent dans la politique
d’effacement par la culture du crime de génocide commis par Israël. À ces
appels, là encore, vous avez répondu par le mensonge et par
l’instrumentalisation outrancière des artistes palestinien.ne.s programmé.e.s
dans votre institution pour justifier votre collaboration avec les institutions
culturelles de l’état génocidaire. Ce mardi 25 novembre, vous avez décidé
d’assumer cet agenda politique et d’entraîner toute votre institution dans le
discours de propagande en répondant positivement à la demande de Lahav Shani de
s’expliquer auprès de vos salarié.e.s. Un discours d'explication qui n’est autre
qu'un redoublement de condamnation qualifiant la protestation pacifiste d’
« attaque armée » à l’encontre de l’identité israélienne. Or, chacun
des appels à boycott que vous avez reçus était très clair sur la nature de
l’action : « nous n’appelons pas à boycotter des artistes du fait de leur
nationalité israélienne mais du fait de leur participation institutionnelle à
la politique d’effacement des vies palestiniennes orchestrée par l’État
israélien. »
Vous imposez à vos salarié.e.s le
discours de propagande par l’explication - hasbara - alors que vous refusez le
dialogue avec celles et ceux qui vous alertent depuis le début sur cette
complicité avec le pire. C’est votre manière de passer sous silence les voix
palestiniennes.
Cacher vos décisions derrière le
supposé apolitisme de la musique classique relevait déjà de l’outrage face aux
souffrances endurées par les Palestinien.ne.s depuis plus de deux ans et à
l’égard du droit international. Devions-nous espérer, après un tel acharnement
à maintenir la collaboration avec les ambassadeurs du génocide notamment par le
recours démesuré à la force policière et judiciaire, que vous reveniez à la
raison ? Vous êtes aujourd’hui prêt à excuser un tel affront à la dignité
humaine et au droit international - comme l’a été l’hymne de l'État génocidaire
qui a retenti dans vos murs. Et tout cela pourquoi ? Pour ne pas prendre le
risque d’annuler un concert avec Martha Argerich parce que cela ferait mauvais
genre auprès de vos confrères ? Ou pour ne pas froisser l’extrême droite
politique et médiatique qui, depuis le 6 novembre, vous soutient
inconditionnellement comme elle a soutenu la politique génocidaire ?
Renoncez donc à vos valeurs
humanistes de pacotille et assumez l’agenda réactionnaire que vous avez décidé
d’endosser en ouvrant les portes de votre institution à celles et ceux qui
nient la valeur des vies palestiniennes et le droit international. Vos mensonges
se poursuivent car non, cette institution n’est plus la nôtre. Vous l’avez
livrée au fascisme qui ronge le monde, vous en avez fait l’étendard de la
déshumanisation, la normalisation des heures les plus sombres de notre présent.
Vous n’avez jamais souhaité nous écouter lorsque nous vous avons alerté. Vous
faites la sourde oreille au bruit des bombes lorsqu’elles explosent sur Gaza en
tuant par milliers hommes, femmes et enfants, mais vous ouvrez votre scène à
celles et ceux qui les lancent là-bas, mais aussi au Qatar, en Iran, au Yémen,
au Liban et en Syrie.
À quoi s’attendre pour les
concerts des 30 novembre et 16 janvier prochains ? À une Philharmonie aux
allures de bunker, nouveau fief des forces de l’ordre et de la répression dans
le 19e arrondissement de Paris ? À une réunion au sommet des institutions et
associations négationnistes du génocide en cours et qui, par le pire travers
antisémite qui consiste à associer toustes les Juif.ve.s du monde à l’état
d’Israël, instrumentalisent l’histoire et la culture juive à des fins
guerrières ? Si vous n’entendez pas les souffrances des Palestinien.ne.s
avez vous au moins compris celles de vos salarié.e.s et des mélomanes que vous
traînez dans votre complicité outrageante ?
Au nom de la musique que nous
défendons, au nom de l’humanité que nous incarnons et puisqu’il s’agirait
encore selon vous de notre institution, nous vous exhortons à cesser
toute collaboration avec les institutions culturelles et académiques
israéliennes qui lavent les mains des génocidaires. Après vous avoir invité
cordialement à envisager l’annulation des venues de Lahav Shani et du Jerusalem
Quartet, nous vous l’exigeons. Et malgré vos habitudes policières prises le 6
novembre dernier, nos revendications et surtout les voix palestiniennes dont
nous nous faisons le relais ne souffriront aucune de vos répressions. Enfin,
dans le doute que tout cela soit entendu il nous faudra constater que vous
n’avez pas été à la hauteur de vos fonctions d’un point de vue politique et
moral et qu’il nous semblera justifié d’exiger votre démission au nom de la
dignité des victimes d’un génocide que vous avez décidé de normaliser.
L’histoire finira par juger les auteur.ice.s du génocide et leurs complices. À
ce jour, vous êtes sur le banc des accusés.
Tahia Falestine !
Artistes pour la Palestine -
France
Palestine Action
Union Juive Française pour la Paix
Tsedek
Culture en luttes
On Sunday, November 30, 2025, the Rotterdam Philharmonic Orchestra will give a concert at the Philharmonie de Paris (Cité de la Musique) under the baton of its music director Lahav Shani, who is also music director of the Israel Philharmonic Orchestra and will be music director of the Munich Philharmonic Orchestra from September 2026. A previous concert given on November 6 at the same venue by the Israel Symphony Orchestra under the same conductor was the scene of incidents, following which four pro-Palestinian protesters were charged and in turn filed various complaints for assault and violation of the secrecy of the investigation. Several organizations have just sent the letter below to the director of the Philharmonic. -Tlaxcala
Thursday, 27 November 2025
Sir,
Since
the beginning of the genocide in Gaza, nearly 70,000 people have been
killed—men, women, and children included. Still in Gaza, 345 people have
been killed and 889 injured by the Israeli army since the so-called
“ceasefire” came into effect on October 11, a ceasefire that has been
violated more than 500 times. In two years, the equivalent of six
Hiroshima bombs has been dropped on a territory barely 150 square
kilometers in size. Humanitarian and medical aid remains blocked while,
with winter approaching, epidemics are preparing to follow in the
footsteps of famine. Every day, bodies pile up—when they have the “luck”
of being found. On Monday, November 24, armed Israeli militias forced
children out of the Palestinian National Theatre (El-Hakawati Theatre)
in occupied Jerusalem. These weapons will certainly attract less
attention than a few harmless smoke flares raised in front of the
cultural ambassadors of the State of Israel.
The
genocide—characterized as such by the relevant international legal
bodies—continues before our eyes. And you, what are you doing?
Not
only have you invited the Israel Philharmonic Orchestra (IPO) and its
principal conductor, official ambassadors of a colonial state in the
midst of committing genocide; not only have you welcomed musicians who
relay the dehumanization of Palestinians through reprehensible
disinformation on their social media—for instance, Eleonora Lutsky
speaking of “Hamaswood,” or Kirill Mihanovsky referring to Palestinians
as “monstrous neighbors”; not only have you taken peaceful activists to
court for calling for the legitimate boycott of Israeli cultural
institutions that participate in the normalization of genocide—you have
chosen to plunge your institution deeper into falsehood, hoping never to
have to assume your responsibilities before history and before justice.
You
lied to your employees during an extraordinary general assembly,
describing peaceful activists as violent, ignoring the racist and
homophobic insults from part of the audience, and claiming you did not
know the orchestra would play the Israeli anthem even though they
perform it regularly on tour. Yes—the anthem was not played in response
to the action of our comrades; it was a premeditated act.
You were
cordially invited—considering the Palestinian calls and in accordance
with international law—to cancel the appearances of Lahav Shani, the
IPO, and the Jerusalem Quartet due to the institutional role they play
in the cultural whitewashing of the crime of genocide committed by
Israel. To these calls you again responded with falsehoods and with the
blatant instrumentalization of Palestinian artists programmed in your
institution, using them to justify your collaboration with the cultural
institutions of a genocidal state.
This Tuesday, November 25, you
chose to fully assume this political agenda and drag your entire
institution into the propaganda narrative by agreeing to Lahav Shani’s
request to address your employees. His “explanation” was nothing more
than a renewed condemnation, describing peaceful protest as an “armed
attack” against Israeli identity. Yet every call to boycott you received
was very clear: “We are not calling for a boycott of artists because of
their Israeli nationality, but because of their institutional
participation in the erasure of Palestinian lives orchestrated by the
Israeli state.”
You impose propaganda—hasbara—on your
employees through these explanations, while refusing dialogue with those
who have been warning you from the start about this complicity with the
worst. This is your way of silencing Palestinian voices.
Hiding
behind the supposed apolitical nature of classical music was already an
outrage given the suffering endured by Palestinians over the past two
years and in the face of international law. After such relentless
efforts to maintain collaboration with the ambassadors of
genocide—calling disproportionately on police and judicial force—were we
to hope you might come to your senses?
Today you are ready to excuse
an affront to human dignity and to international law—just like the
anthem of the genocidal state that resounded within your walls. And why?
To avoid risking the cancellation of a concert with Martha Argerich
because it would look bad among your peers? Or to avoid offending the
far-right political and media forces that have supported you
unconditionally since November 6, just as they support genocidal policy?
Cast
aside your sham humanist values and assume the reactionary agenda you
have chosen to adopt by opening your institution’s doors to those who
deny the value of Palestinian lives and international law. Your lies
continue, because no—this institution is no longer ours. You have handed
it over to the fascism eating away at the world; you have made it a
banner of dehumanization and the normalization of the darkest hours of
our present. You never wished to hear us when we warned you. You turn a
deaf ear to the sound of bombs exploding over Gaza, killing thousands of
men, women, and children, but you open your stage to those who drop
them there—and in Qatar, Iran, Yemen, Lebanon, and Syria as well.
What
are we to expect for the concerts of November 30 and January 16? A
Philharmonie turned into a bunker, new stronghold of law enforcement and
repression in Paris’s 19th arrondissement? A summit of institutions and
associations denying the ongoing genocide and—through the very worst
form of antisemitism, which consists of conflating all Jews worldwide
with the State of Israel—instrumentalizing Jewish history and culture
for warlike purposes?
If you cannot hear the suffering of
Palestinians, have you at least understood that of your employees and of
the music-lovers you are dragging into your outrageous complicity?
In
the name of the music we defend, in the name of the humanity we embody,
and since this is supposedly still our institution according to you, we
call on you to cease all collaboration with Israeli cultural and
academic institutions that wash the hands of the perpetrators of
genocide.
After having cordially invited you to consider cancelling
the appearances of Lahav Shani and the Jerusalem Quartet, we now demand
it. And despite the policing habits you embraced on November 6, our
demands—and above all the Palestinian voices we relay—will not tolerate
any repression from you.
Finally, should all this go unheard, we will
be forced to acknowledge that you have failed to meet the political and
moral responsibilities of your position, and it will seem justified to
demand your resignation in the name of the dignity of the victims of a
genocide you have chosen to normalize.
History will judge the perpetrators of genocide and their accomplices. As of today, you sit on the defendants’ bench.
Tahia Falestine!
Artistes pour la Palestine - France
Palestine Action
Union Juive Française pour la Paix
Tsedek
Culture en lutte