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17/06/2023

ANNAMARIA RIVERA
Les corps alien des personnes migrantes

Annamaria Rivera, Comune-Info, 15/6/2023
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

Comme nous l’a appris l’anthropologue Mary Douglas, le corps est un “microcosme social en relation directe avec le centre du pouvoir”. Les corps ne sont jamais neutres, ce sont toujours des corps sociaux, c’est-à-dire façonnés culturellement par les pratiques éducatives, la transmission de traits stylistiques, les dispositifs rituels : chaque culture a son propre modèle éthico-esthétique du corps et ses procédures spécifiques de modelage des corps.

 Photo de victimes du naufrage meurtrier en mer Ionienne d’un bateau de pêche parti de Tobrouk en Libyé, au large de Pýlos, dans le Péloponnèse du sud-ouest, dans la nuit du 13 au 14 juin, qui a fait 78 morts et 600 disparus. L’Organisation internationale pour les migrations (OIM) parle de "l’une des tragédies les plus dévastatrices en Méditerranée en une décennie". Source : Aegean Boat Report
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Le corps des autres est soumis à une double contrainte : en plus d’être façonné par la culture d’origine, ses coutumes, ses modèles culturels et ses pratiques sociales, il est perçu, imaginé, représenté par des agents “endogènes”, c’est-à-dire par les catégories sociales, l’imaginaire, l’idéologie et les pouvoirs de la société.

En particulier, le corps de la personne migrante est le “lieu géométrique de tous les stigmates” (La double absence, 1999, p. 212), imposé par la société en tant que “produit social le plus travaillé, le plus contrôlé, le plus poli, le plus cultivé [...]”, qui porte une identité sociale objectivée par le regard des autres et donc dominée.

Voulant hasarder une typologie des multiples et diverses manières dont les corps des migrants ou des membres de minorités méprisées sont perçus, imaginés, traités symboliquement et représentés, je propose un schéma qui - tout en se prêtant au risque de la généralisation et de l’abstraction - peut permettre de saisir quelques constantes.

Les attitudes et les dispositifs les plus habituels oscillent constamment, me semble-t-il, entre invisibilisation et hyper-visibilisation de leurs corps. Dans la vie quotidienne, dans la rue, les magasins, les bureaux, les services publics, les personnes immigrées, le plus souvent rendues invisibles en tant que force de travail, deviennent soudain trop nombreuses, encombrantes, voyantes, car perçues comme intrusives, menaçantes, anormales.

Comme l’écrit Abdelmalek Sayad, c’est alors que la personne immigrée “fait l’expérience de la suspicion qui le poursuit partout et tout au long de son immigration”, de sorte qu’elle “a le sentiment d’être surveillée en permanence, comme on surveille un corps étranger” (La double absence, 1999, p. 170). Un exemple extrême de cette tendance est l’habitude de la police italienne de forcer les femmes ou les filles rroms, soupçonnées de cacher des biens volés ou de la drogue, à se déshabiller dans la rue. Déshumanisées, elles ne sont pas considérées comme des femmes, de sorte que les règles formelles des relations entre les sexes, le sens de la pudeur, l’interdiction de la nudité totale dans les lieux publics ne s’appliquent pas à elles.  

En revanche, sur les chantiers, dans les usines, à la campagne, dans les maisons des “autochtones” les personnes immigrées sont généralement cachées par le voile du rejet et de l’insignifiance : les médias et les institutions, à quelques exceptions près, ne parlent que rarement de ces corps et de leurs conditions souvent extrêmes d’exploitation et de dépendance, à moins qu’un événement exceptionnel - généralement une révolte - n’intervienne pour déchirer le voile.

Quant aux personnes étrangères, principalement des femmes, qui effectuent des travaux de soin dans l'intimité du domicile d'autrui, il est très rarement souligné que leur travail, déqualifié et le plus souvent mal rémunéré, est l’un des piliers sur lesquels repose l’État-providence italien.

Pour donner un exemple, la rhétorique autour du “ padroni a casa nostra ” [maîtres chez nous] ainsi que l’exaltation des produits typiquement italiens et l’appel à les valoriser cachent une réalité indiscutable : une grande partie de ce qui constitue le “typiquement national” (des pizzerias au parmesan AOC, des tomates pelées aux agrumes) est le résultat du travail de personnes migrantes, le plus souvent très dur, au noir, mal payé. Surtout, les ouvrier·ères agricoles sont souvent contraint·es à des relations de travail et à des conditions d’existence serviles ou de semi-esclavage ; dans tous les cas, ils·elles sont soumis·es à une subordination multiple, puisqu’ils·elles dépendent de leurs exploiteurs et des caporaux à leur service, non seulement pour le travail et le salaire, mais aussi pour le logement, le transport, le statut juridique, parfois même pour l’alimentation et la sécurité personnelle. Cette condition de subordination expose également les ouvrières agricoles au chantage, au harcèlement et à la violence sexuelle.

En revanche, lorsqu’il s’agit d’étranger·ères, l’actualité - comme je l’ai déjà mentionné - prend toujours soin de qualifier les auteurs présumés de crimes ou de simples transgressions en indiquant leur nationalité, leur “ethnie”, éventuellement leur religion, souvent même leur situation au regard de leur titre de séjour ; alors que la chronique évite soigneusement ces “informations” lorsqu’un étranger ou une étrangère joue le rôle de victime et les exalte lorsqu’ils ou elles sont victimes d’autres étranger·ères.

En ce qui concerne les viols et les féminicides, le système d’information a généralement tendance à mettre l’accent sur ceux commis par des étrangers, en en  faisant souvent l’objet de campagnes alarmistes.

Une deuxième rhétorique est celle de la stéréotypisation : les corps réels disparaissent au profit de corps imaginés et imaginaires, construits sur la base de stéréotypes. Même lorsque le genre pluriel ou le nom collectif cède la place au genre singulier, il ne s’agit le plus souvent que de types, voire de masques, figés par des clichés et des stéréotypes qui concernent aussi et surtout la représentation des corps.

Origine : Europe-Action n° 22, Octobre 1964, Douce France

Le théâtre raciste met sans cesse en scène ces masques, parfois archaïques, parfois très modernes : L’immigré voleur ou violeur, le Clandestin envahisseur et/ou délinquant, le Gitan kidnappeur d’enfants, l’Albanais, le Slave, le Marocain meurtrier ou dealer, le chauffard extra-communautaire, le Trans brésilien dévoreur et victime, le laveur de vitres au feu rouge, agressif et racketteur, le musulmane voilée, donc intégriste et/ou soumise, l’Africaine soumise aux mutilations sexuelles et autres horreurs archaïques, la perfide aide-soignante est-eurepéenne séductrice ou manipulatrice de personnes âgées, le Chinois fermé et insaisissable, mystérieux et pratiquant de l’omertà, trafiquant de contrefaçons et de chats...   

Nombre de ces images stéréotypées, proposées et reproposées par la dialectique concurrentielle entre les médias, la politique et le sens commun, sont le fruit de préjugés racistes et sexistes : les femmes étrangères, plus que d’autres, semblent n’avoir aucune alternative entre la figure pathétique de la docilité et de la soumission et la figure inquiétante de la débrouillardise pour tricher, se prostituer ou commettre des délits.        

Un troisième procédé rhétorique fréquent est ce que l’on pourrait appeler l’indistinction-magmatisation : les écrans d’information et de télévision, lorsqu’ils traitent de l’autre, nous offrent souvent des images qui renvoient à un corps collectif, ou plutôt à un magma corporel indistinct, à partir duquel les frontières individuelles s’effacent : embarcations de fortune bourrées de déchets humains (selon le lexique de ceux qui se voient aujourd’hui contraints de modérer un peu leur langage depuis les fauteuils gouvernementaux), centres de détention implosant en raison de la présence de masses incontrôlables et “dangereuses”, mosquées débordant d’un corps indistinct en génuflexion, sociétés et villes menacées par des foules d’envahisseurs...

Même morts, quand ils ne représentent plus une menace, les corps des autres ne sont pas reconnus comme individuels et singuliers ; même tués par le prohibitionnisme, ils continuent d’être appelés clandestins, et le restent même s’il s’agit d’enfants. Le fait que, même en tant que cadavres, ils soient considérés comme indignes d’un nom - sinon le nom singulier de chacun, du moins un nom collectif respectueux - n’est rien d’autre que le sceau de la déshumanisation à laquelle les migrant·es et les demandeur·ses d’asile sont habituellement soumis·es.  

Cette réfugiée libyenne aujourd'hui installée en Allemagne, a tatoué les noms de ses quatre filles noyées avant l'arrivée à Lampedusa en octobre 2013  

Un autre dispositif, qui n’est pas seulement rhétorique, est celui, apparemment opposé, de la distinction-marquage. Je fais allusion à toutes les procédures symboliques et administratives de type biopolitique qui gravent ou “extraient” le stigmate sur/du corps des autres, sous la forme d’un marquage réel - par exemple, les numéros marqués sur les bras des "immigrants clandestins" qui débarquent à Lampedusa - ou d’un traitement distinctif : par exemple, l’enfermement dans les centres de détention pour migrants.


Que l’on pense au cas de la prise d’empreintes digitales des Rroms, des demandeur·ses d’asile, des réfugié·es et des migrant·es. Grâce à la convergence substantielle - culturelle avant d’être politique - d’une grande partie de la politique dominante, toutes orientations confondues, cette mesure, d’exceptionnelle qu’elle était, s’est banalisée et généralisée ; à tel point qu’avec la loi Bossi-Fini, elle a été étendue à tous les citoyens étrangers qui demandent un permis de séjour ou son renouvellement.

Toujours au sujet des dispositifs biopolitiques : en Italie, ces dernières années, des campagnes de “recensement des campements-nomades” ont été lancées périodiquement, dans le but de procéder à un enregistrement massif des Rroms et des Sinti, accompagnées d’une “prise d’empreintes digitales”. Les personnes à enregistrer, adultes et mineures, de nationalités les plus diverses, y compris italienne, sont identifiées sur la base d’un discriminant soi-disant “ethnique” (en réalité, raciste).

C’est pourquoi les associations et organisations nationales et internationales de défense des droits humains ne font que critiquer et dénoncer cette coutume comme étant discriminatoire, contraire au droit italien et international, et attentatoire à la dignité humaine : au lieu de protéger les plus discriminés, elles les désignent implicitement ou explicitement comme dangereux ou potentiellement subversifs.

Enfin, c’est l’enfermement dans les camps d’État qui représente de la manière la plus exemplaire le processus de distinction-marquage. La longue théorie des morts violentes et obscures a été inaugurée par la mort d’Amin Saber, dans le CPT d’Agrigente. Elle s’est produite au cours de l’été 1998, peu après l’approbation de la loi 40, connue sous le nom de loi Turco-Napolitano, qui instituait pour la première fois en Italie la détention extrapénale, réservée aux “citoyens non communautaires” en situation irrégulière sur le territoire italien. Cette loi a inauguré l’état d’exception permanent, la suspension durable de la légalité.

Elle a institué, en somme, un nouveau régime d’internement, une forme sans précédent de saisie abusive et de coercition des corps alien, que l’hypocrisie de l’État n’a même pas su désigner par un néologisme acceptable : en Italie, nous sommes passés de l’oxymore euphémique de Centres de détention temporaire et d’assistance, qui illustrait bien la philosophie du “racisme démocratique”, aux explicites Centres d’identification et d’expulsion, qui représentent tout aussi bien le racisme ouvert et brutal de la droite, aux Centres de rétention pour le rapatriement, une désignation qui prétendait elle aussi être euphémique, inventée par la loi Minniti-Orlando de 2017.

En définitive, l’architecture discursive dominante, lorsqu’elle sauve les corps “alien” de l’invisibilité, le fait pour les représenter et les traiter comme omniprésents, proliférants, menaçants (Pierre Tevanian, Le corps d’exception et ses métamorphoses, 2005).

Elle reproduit constamment la figure du migrant et de la migrante comme une menace sociale, comme une altérité irréductible à la norme, donc à contrôler, à discipliner, à corriger, y compris dans le corps, et enfin s’en libérer.

Voyageurs, sculpture de Bruno Catalano, Venise

Les corps alien ainsi représentés sont, entre autres, des figures projectives chargées de représenter les angoisses individuelles et collectives, liées aux problèmes non résolus de notre identité et de la relation avec notre passé. Parmi ceux-ci, l’identité nationale démocratique récente et incertaine, d’ailleurs pas du tout fondée solidement sur des valeurs et des principes civils, et aujourd’hui plus que jamais fragilisée et contestée par l’actuel gouvernement Meloni : résolument raciste et influencée par l’idéologie fasciste historique, mais aussi par l’ethno-nationalisme racialiste de la Ligue du Nord, telle que celle-ci la définit elle-même.

Comme l’a fait remarquer Ilvo Diamanti, commentant les résultats d’une enquête, lorsque la majorité exprime un sentiment de fierté nationale, celui-ci « semble s’articuler autour d’éléments extra-civils et pré-politiques : la beauté du paysage, le patrimoine artistique et culturel, la mode, la cuisine... L’image renvoyée par l’enquête est celle d’Italiens résignés à leur propre déficit - pathologique et historique - de sens civique, remplacé et compensé par un sens “cynique” dilaté et galopant ».

Toujours en ce qui concerne le lien entre le racisme et le “mauvais” passé, il s’agit non seulement de l’incapacité typiquement italienne à assumer l’histoire spécifique de son propre racisme, même colonial, mais aussi de la persistance d’une relation très problématique avec le propre passé d’émigrants, souvent considéré comme une honte à oublier.

En résumé, il manque à notre société l’une des conditions pour reconnaître et admettre comme normale, permanente et structurelle la réalité de l’immigration et de la pluralité culturelle : un vocabulaire émotionnel et politique qui nous permette d’élaborer le passé et de répondre aux changements du présent et aux perspectives de l’avenir.

Manifestation à Athènes le 16 juin contre les politiques criminelles de la Grèce et de l’UE, suite au naufrage de Pýlos. Photo : Evita Paraskevopoulou

13/07/2022

FRANCO "BIFO" BERARDI
Amok

Franco «Bifo» Berardi, Not Nero Editions, 5/7/2022
Traduit par
Fausto Giudice, Tlaxcala

Excusez-moi un instant, je dois aller vomir puis je reviens.

L'alliance des sénescents

Fin juin 2022. Les dirigeants des pays membres de l'OTAN, représentation armée de la race blanche, se réunissent à Madrid pour planifier la troisième guerre mondiale imminente, alors que la guerre d'Ukraine se poursuit et que nous commençons à en voir les conséquences : inflation, récession, misère, disette, faim.

Quelques jours plus tôt, s'était tenu en Chine le sommet des BRICS, les pays qui s'opposent à la domination euro-usaméricaine sur le commerce et qui prennent la tête d'un processus de mondialisation anti-occidentale et d'affirmation d'un modèle politique ouvertement anti-libéral. Il s'agit d'un front de pays hétérogènes, unis par un ressentiment commun contre l'Occident colonialiste et un intérêt commun à s'émanciper de la domination financière nord-américaine.

Nous sommes en train de prendre conscience des effets à long terme de la défaite de la classe ouvrière et de la perspective internationaliste. Il n'y a plus d'alternative sociale à l'impérialisme du capitalisme occidental, et au lieu de cette alternative qui prenait le nom de communisme, il y a maintenant une coalition politiquement hétérogène de pays à régimes autoritaires.

La Russie, qui appartient également au monde blanc, fonctionne comme un bélier pour la percée de l'ordre occidental, comme un élément de désintégration interne du front racial blanc (auquel les Russes appartiennent également).

Macron a déclaré il y a peu que l'OTAN était en état de mort cérébrale ; elle a maintenant été ressuscitée : à la place d'un cerveau, on a installé un appareil programmé pour l'extermination de ceux qui s'opposent à l'ordre blanc mondial.

Je dois m'excuser pour l'utilisation d'une expression qui n'a aucune base scientifique et qui est aussi un peu dégoûtante : « race blanche ». La race blanche n'existe pas, bien sûr. Mais d'un point de vue idéologique, ces deux mots expriment, à un niveau inconscient, l'identification fantasmatique et pourtant réelle des peuples qui, au cours des deux derniers siècles, ont subjugué les peuples du Sud par la force des armes, s'emparant de leurs territoires, de leurs ressources, de leur travail. Maintenant, le monopole de la force n'est plus entre leurs mains, la bombe finale prolifère et l'énergie de la race blanche s'amenuise.

Le gigantisme quelque peu hystérique du congrès de Madrid est un signe de la panique avec laquelle la race blanche regarde l'horizon. Ils sont complètement fous, ils tenteront de se suicider, mais tout comme chaque tireur de masse essaie d'emmener autant de personnes que possible en enfer, les dirigeants du monde libre pourraient emmener toute la race humaine en enfer.

La guerre nucléaire devient de plus en plus probable, au point que nous ne l'envisageons même plus, comme une éventualité à laquelle nous préférons ne pas penser.

Le retour de la bombe

Gunther Anders a écrit dans les années 1960 que le nazisme historique, à commencer par la victoire d'Adolf Hitler aux élections démocratiques de 1933, n'était qu'une répétition générale de ce qui deviendrait le vrai Troisième Reich définitif dans un avenir qui est maintenant devenu le présent.

Qu'est-ce qui définit le nazisme pour Gunther Anders ? Dans son livre L’obsolescence de l’homme, il répond : la rage impuissante contre l'humiliation que la superpuissance de la technologie inflige à l'homme, créateur et victime de la technologie. Mais le Troisième Reich à venir est doté d'une nouvelle puissance technique qui se manifeste par la bombe atomique, objet de puissance ultime car capable de faire disparaître son créateur de la surface de la terre.

Le sujet de la bombe nucléaire, qui a hanté le discours public dans les années 1960 et 1980, semble être passé de mode avec la fin de la guerre froide. Mais c'était une illusion : le danger s'est amplifié puisque les propriétaires de la bombe ne sont plus deux, les Russes et les Anglo-USAméricains, mais six, sept, huit, peut-être neuf.

25/11/2021

FRANCO “BIFO” BERARDI
La guerre biopolitique

Franco Berardi dit “Bifo” , Comune-Info, 20/11/2021
Traduit par
Fausto Giudice, Tlaxcala

Lorsque j'ai réalisé que le virus avait dévoilé un monde dystopique comme ceux que nous avions longtemps imaginés, je me suis souvenu de la prophétie que Max Geraci et moi-même (et le Magicien souffleur) avions formulée dans un roman mal intitulé Morte ai vecchi [Mort aux vieux]. Pour Max et moi, ce livre s'appelle KS, ce qui signifie KapSoul, mais aussi Killing swarm [Essaim tueur]. Dans ce roman, une étrange guerre biopolitique a été imaginée. La véritable guerre biopolitique a commencé lorsqu'en 2020 le bio-virus s'est transformé en info-virus et par conséquent en psycho-virus.

Danse macabre : le vieillard, par Hans Holbein le Jeune, 1538

 Dans le roman, nous avions imaginé une guerre entre les vieux qui s'accrochent à la vie comme on s'accroche au seul bien que l'on possède, et les jeunes qui ont été mis au monde à une époque où naître est le pire malheur qui puisse vous arriver. Des groupes d'adolescents en extase électropsychique se précipitent pour massacrer des personnes âgées sans défense à coups de poing techno-mythologiques. Mais en réalité, c'est le contraire de ce que nous raconte notre petit roman. La population âgée craint d'être exterminée par le virus et a donc déclaré l'état d'urgence, qui touche principalement la population jeune.

 Nous les avions affublés de l'appellation à odeur de soufre de génération Z (la dernière), et ils doivent renoncer à presque tout pour que leur grand-père puisse agoniser en paix un peu plus longtemps. Alors que, après Glasgow, tout le monde sait qu'aucun projet humain ne peut plus résister à l'apocalypse environnementale et que la terre se transforme en une planète inconnue et dangereuse.

Un long hiver pour les migrants, par Tjeerd Royaards, Pays-Bas