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25/07/2025

RIM AL-ATTRACHE
La pensée de Sultan al-Attrache d’après ses archives

Dr. Rim Mansour Sultan al- Attrache, Sabahelkheyr.com, n° 142, 25/7/2025

Original arabe  فكر سلطان الأطرش: من أرشيفه

Traduit par Fausto GiudiceTlaxcala

سلطان الأطرش: شعلة الثورة السورية الكبرى

Sultan al-Atrash : La flamme inextenguible de la Syrie


Durant un quart de siècle, j’ai travaillé à éditer les archives de Sultan al- Attrache, publiées à Beyrouth.

La Grande Révolution syrienne a éclaté le 21 juillet 1925, mais elle a capté l’attention du monde après la bataille d’al-Mazraa (2-3 août). Le tumulte fut tel que les Européens commencèrent à envoyer des journalistes – d’Allemagne notamment – pour observer la situation dans le Djebel Druze ; ainsi, les nationalistes ont commencé à s’y intéresser !

Sultan al- Attrache déclara alors aux journalistes allemands :

« Les Français ne cherchent pas sincèrement la paix dans leurs négociations... Ils veulent simplement nous distraire en attendant l’arrivée de leurs nouvelles troupes…

Nous n’acceptons rien d’autre que l’indépendance totale et l’unité de la Syrie, avec l’établissement d’un gouvernement national constitutionnel. Le mandat de l’État mandataire doit se limiter à une assistance technique et administrative via des conseillers qualifiés, conformément au Pacte de la Société des Nations de 1919. »

Refusant toute division confessionnelle du pays. Il proclamait clairement les objectifs de la révolution : l’unité du territoire syrien, côte et intérieur (Le Levant), et l’indépendance totale, comme déclaré dans son manifeste « Aux armes ».

Il refusa une offre royale du roi George V en 1927 : un château à Jérusalem et une pension mensuelle à vie. Il répondit : « Notre bonheur réside dans l’indépendance de notre patrie, son unité et la liberté de notre peuple, avec le retrait des troupes étrangères. »

Autour de lui se rassemblèrent les pauvres, les patriotes.



Combattants avant la bataille d’Al-Mazraa

La révolution de 1925 ne fut pas seulement un acte militaire spectaculaire, mais une initiative de refus et de résistance. Les envahisseurs ne doivent jamais se sentir en paix, quelle que soit la durée de leur occupation…

Quand le roi Fayçal quitta Damas, contraint par l’ultimatum du général Gouraud, Sultan dépêcha Hamad al-Barbour pour le convaincre de rejoindre le Djebel et y lancer une résistance armée, pour préserver la légitimité du pouvoir national. »
Une gifle au colon français et un rejet clair du confessionnalisme.

Une conscience profonde de la citoyenneté égale.
Notre lutte n’en est encore qu’au stade de la floraison. Nous ne voulons pas en cueillir les fruits tant que nous ne sommes pas unis en tant qu’Arabes.
Fils de la Révolution et enfants du désert, nous nous sommes voués à être les offrandes sacrées sur l’autel de l’arabisme.
Cet arbre ne portera pas de fruit tant qu’il restera infesté de parasites destructeurs.
Il ne portera pas de fruit tant que la voix de la liberté ne s’élèvera pas de Palestine, et que les ambitions coloniales ne seront pas écartées d’Irak, d’Égypte et de Transjordanie.
Alors, seulement, que vienne le fruit mûr, savoureux, symbole des générations qui ont porté la flamme de la civilisation, flamme qui ne s’éteindra plus ».

Sultan al- Attrache comprit l’importance des médias pour la cause nationale syrienne. Ainsi, le 15 octobre 1925, il adressa une lettre en arabe et en anglais au rédacteur du journal britannique The Times, pour informer l’opinion publique européenne des véritables raisons de la Révolution syrienne, que les Français tentaient de dissimuler afin d’induire l’Europe en erreur. Il y dénonça les atrocités françaises, comme le bombardement des femmes venues puiser de l’eau et le meurtre d’enfants. Les révolutionnaires, quant à eux, respectaient les conventions internationales dans le traitement des prisonniers et avaient renvoyé les femmes d’officiers français à leurs familles saines et sauves depuis Soueïda.

Les archives de Sultan al- Attrache apportent une contribution inédite à l’histoire du Levant. On y apprend par exemple que la révolution dura 12 ans. Sa période d’exil et de refuge fut marquée par de nombreuses prises de positions politiques qui influencèrent les négociations diplomatiques jusqu’au retrait total des troupes françaises le 17 avril 1946. Il est à noter que de nombreux combattants de la Révolution syrienne participèrent ensuite à la révolte palestinienne, comme le martyr Saïd al-’Ass (1936).

Sultan fut nommé commandant en chef de la révolution lors de la conférence de Rimat al-Fukhour (23 août 1925), après sa victoire contre la campagne du général Michaud à la bataille d’al-Mazraa. Le docteur Chahbandar prit en charge les affaires politiques de la révolution et en devint le porte-parole officiel. Toutefois, Sultan traçait les grandes lignes politiques, fixait les orientations, et planifiait les opérations militaires en coordination avec les commandants locaux.

Il existait un lien entre la Révolution syrienne et celle de l’émir Abdelkrim al-Khattabi au Maroc. La révolution du Rif allégea la pression sur la Syrie jusqu’à la reddition d’al-Khattabi, après quoi beaucoup de Marocains enrôlés dans l’armée française rejoignirent la révolution syrienne contre les Français.

Les révolutionnaires avaient mis en place une organisation ingénieuse : un quart des hommes de chaque village était mobilisé avec des provisions suffisantes pour la durée de service fixée par le commandant en chef. Une fois leur mission terminée, ils étaient remplacés par un second quart, et ainsi de suite, pendant que ceux restés au village assuraient les travaux agricoles au nom de tous.

En exil, Sultan appelait à l’unité, à dépasser les clivages partisans pour le bien commun, convaincu que la cause syrienne représentait le noyau de l’unité arabe. Dans ses lettres (1930), il insistait sur son indépendance vis-à-vis des partis et sa volonté de poursuivre la révolution pour une Syrie unie et libre.

Les politiques le consultaient même durant son exil de dix ans. Il présida la Conférence du Désert en octobre 1929, en présence de nombreuses figures nationalistes. Six décisions majeures y furent prises, dont la condamnation de la suspension de l’Assemblée constituante syrienne, la dénonciation des propos du Haut-commissaire français Henri Ponsot ignorant la cause nationale, le rejet des résolutions du 16ème Congrès sioniste de Zurich, et la demande adressée au ministère britannique du Travail d’annuler la Déclaration Balfour, en reconnaissant les droits nationaux des Arabes.

Cet homme, qui comprit tôt les ambitions coloniales en Orient, refusa tout poste politique après l’indépendance syrienne (1946), tout comme toute compensation financière. Il répétait aux dirigeants arabes :

« Préservez l’indépendance pour laquelle nous avons sacrifié nos vies pour lui. »

Il craignait sans cesse le retour des convoitises coloniales. Sa dernière volonté, publiée, en témoigne : il est le seul révolutionnaire syrien à avoir laissé un testament politique.

Il avait planifié une grande campagne vers la région de Balan, au pied du Mont Hermon, une autre pour soutenir les révolutionnaires de la Ghouta de Damas, et une troisième vers le Hauran. La révolution s’étendit vers le nord avec Fawzi al-Qawuqji, qui demandait qu’on lui envoie armes et hommes depuis le Djebel Druze.



Il n’abandonna jamais le slogan :

« La religion pour Dieu, la patrie pour tous ».

Une archive de la Bibliothèque nationale de Damas rapporte que le consul britannique au Levant écrivit à son ministère : « Sultan al-Attrache est incorruptible. »

La chercheuse française Lenka Bokova a dit à mon père Mansour al-Attrache  : « Sans cette forte personnalité, la Grande Révolution syrienne n’aurait pas vu le jour. »

Voici un extrait d’un article de Mansour al-Attrache, « L’initiative dans l’histoire » :

« Il faut distinguer les initiateurs des suiveurs dans le déroulement de l’histoire. L’initiateur accomplit son rôle en allumant la mèche de l’événement majeur. Le suiveur, bien qu’important, arrive plus tard…

La révolution de 1925 ne fut pas seulement un acte militaire spectaculaire, mais une initiative de refus et de résistance. Les envahisseurs ne doivent jamais se sentir en paix, quelle que soit la durée de leur occupation…

Quand le roi Fayçal quitta Damas, contraint par l’ultimatum du général Gouraud, Sultan dépêcha Hamad al-Barbour pour le convaincre de rejoindre le Djebel et y lancer une résistance armée, pour préserver la légitimité du pouvoir national. »

Sultan al-Attrache, conscient de son rôle, s’opposa aussi au sionisme, rejetant toute négociation avec les sionistes. Il faisait parvenir clandestinement des armes à la révolution palestinienne de 1936, avec le combattant Chékib Wahhab, depuis Karak. Il fut l’un des cinq leaders syriens à refuser toute forme de dialogue avec le sionisme.

Adib Chichakli lança une campagne militaire brutale contre Soueïda, croyant pouvoir asseoir son pouvoir. Environ 100 civils furent tués, soit un martyr pour 500 habitants. La maison de Sultan fut vandalisée. Il quitta alors sa demeure pour éviter le bain de sang, déclarant :

« Je refuse de brandir les armes contre l’armée syrienne. Ce sont mes fils ! »

Il partit à pied dans la neige depuis Qrayya vers la Jordanie. Il avait alors 66 ans. À la frontière, les autorités jordaniennes lui envoyèrent une voiture portant le drapeau britannique, qu’il refusa malgré le danger. Elles lui envoyèrent alors un autre véhicule, arborant cette fois le drapeau jordanien : il accepta et entra ainsi en Jordanie, où il resta jusqu’à la chute de Chichakli. Même dans les circonstances les plus difficiles, Sultan Pacha n’a pas recours aux étrangers.

Il revint alors triomphant à Qrayya.

Quand les gens vinrent le féliciter de la mort de Chichakli, il répondit :

« Je n’ai plus rien à voir avec lui depuis qu’il a quitté le pouvoir. Son assassinat est un acte isolé. Nous ne nous vengeons pas et ne nous réjouissons pas de la mort ! »

Trois leçons majeures que nous enseigna Sultan al-Attrache.

Il ne renonça jamais au slogan de la révolution :

« La religion pour Dieu, la patrie pour tous ».

Il écrivait à son frère Zeid, commandant la campagne du Ballan : « Protégez les chrétiens. Ne laissez personne leur faire de mal. Assurez leur sécurité, leur vie, leurs biens. Empêchez toute agression à leur encontre. Nous sommes tous enfants d’une même patrie, tous des Arabes syriens à égalité. »

Je conclus avec une pensée de Sultan al-Attrache, écrite en 1961 :

« Ils disent que nous avons cueilli le fruit de notre lutte, le fruit de cet arbre que nous avons nourri de notre sang. Non ! Ce fruit n’est pas encore mûr.
Notre lutte n’en est encore qu’au stade de la floraison. Nous ne voulons pas en cueillir les fruits tant que nous ne sommes pas unis en tant qu’Arabes.
Fils de la Révolution et enfants du désert, nous nous sommes voués à être les offrandes sacrées sur l’autel de l’arabisme.
Cet arbre ne portera pas de fruit tant qu’il restera infesté de parasites destructeurs.
Il ne portera pas de fruit tant que la voix de la liberté ne s’élèvera pas de Palestine, et que les ambitions coloniales ne seront pas écartées d’Irak, d’Égypte et de Transjordanie.
Alors, seulement, que vienne le fruit mûr, savoureux, symbole des générations qui ont porté la flamme de la civilisation, flamme qui ne s’éteindra plus ».


Mausolée de Sultan al-Attrache à Qrayya

 

 

17/04/2025

FAUSTO GIUDICE
Fanon façon Barny : tout faux

Fausto GiudiceBastaYeki !, 17 avril 2025

Samedi 12 avril 2025, Jean-Claude Barny a réalisé une sacrée performance à Tunis et sa banlieue. Son film était projeté à 18h au cinéma Le Rio, à 19h à l’IFT (Institut français de Tunisie) et à 21h à L’Agora de La Marsa. Il était présent à l’issue de chaque projection, en compagnie de trois de ses acteurs : Alexandre Bouyer – l’incarnation de Frantz Fanon himself -, qui a raconté que durant le tournage, il a perdu 10 kilos, et deux jeunes acteurs tunisiens, Sfaya Mbarki, jouant le rôle de Farida, une militante du FLN très peu crédible (voir plus bas), et un jeune garçon dont je n’ai pas capté le nom.


C’est que le film de Barny, Fanon, censé se passer en bonne partie à Blida en Algérie, a été tourné en Tunisie avec une majorité d’acteurs et de figurants tunisiens, dans des décors naturels tunisiens, ce qui suscite la première gêne chez le spectateur quelque peu averti.

Tout le monde n’est pas Spike Lee et ne peut pas trouver 34 millions de dollars pour faire jouer à Denzel Washington le rôle de Malcolm X.
Tout le monde n’est pas Abdenour Zahzah pour être capable de réaliser avec seulement 500 000 € un film de fiction impeccable et véridique, car étayé, documenté et réfléchi pendant une vingtaine d’années.
En tout cas, Monsieur Barny, c’est clair, n’est ni Spike Lee ni Abdenour Zahzah.

Et il n’a pu ramasser que 4 millions d’Euros pour réaliser son inepte biopic. Heureusement, des personnes qui lui voulaient du bien lui avaient refilé une première version du scénario d’Abdenour, dans lequel il a pompé allègrement pour concocter sa chorba. Mais ça n’a pas suffi à rendre son film digne, ne serait-ce que du Festival de Montpellier.

Monsieur Barny, quand donc allez-vous vous vous décider à arracher votre masque noir et nous montrer votre peau blanche ? Blanche comme le linceul dans lequel vous avez enveloppé Frantz, après l’avoir assassiné.
Une fois poussé mon cri du cœur et du cerveau, je vais tenter de l’expliquer ci-dessous, en détail.

Remarques générales

Il est clair d’emblée que Barny a vu Le Vent des Aurès de Lakhdar-Hamina (1967), le premier long métrage de l’Algérie indépendante, mais qu’il n’a ni la formation ni le talent pour lui arriver ne serait-ce qu’à la cheville. Au départ, Barny avait un projet mégalomane de raconter les 36 ans de vie de Frantz Fanon, de Fort-de-France à la Dominique, au Maroc, à Lyon et Saint-Alban, à Blida, Tunis, Accra, Bamako etc. Devant l’ampleur du projet, il se rabat sur les 8 dernières années de la vie du héros, choisissant de ne mettre en scène que Blida et Tunis. À partir de là, il a pratiquement tout faux, nous offrant une vision totalement faussée des divers événements qu’il cherche à raconter.

Ses acteurs, mal dirigés, ne savent pas sur quel pied danser et semblent hésiter à chaque scène. Le commissaire de police qui craque après s’être retrouvé dans le rôle de tortionnaire devient dans le film un sergent névrotique de l’armée, Josie, la femme militante de Frantz, devient une épouse d’une platitude consternante jouée par la pauvre actrice belge Déborah François, qui a l’air de se demander ce qu’elle fout là et semble regretter les frères Dardenne. Le seul Belge qui s’en sort est Olivier Gourmet, devenu le grand spécialiste des rôles secondaires de méchant sournois.

Détails incongrus

Venons-en maintenant aux quelques plus gros ratés du récit.

Frantz Fanon avait deux types d’écriture, l’une professionnelle, l’autre politique.
La première était constituée de notes cliniques quotidiennes, manuscrites, et consignées dans les archives de l’hôpital de Blida, où Abdenour Zahzah et Bachir Ridouh les ont consultées pour leur premier film de 2002, Franz Fanon, mémoire d’asile et dans lesquelles Zahzah a puisé pour son deuxième film de 2024, Chroniques fidèles survenues au siècle dernier à l’hôpital psychiatrique de Blida-Joinville, au temps où Docteur Frantz Fanon était Chef de la cinquième division entre l’an 1953 et 1956.

La seconde était constituée par ses textes politiques. Il n’a jamais dicté un seul texte à sa femme Josie, contrairement à ce que Barny met en scène. Ses textes politiques, il les parlait (Sartre : « Fanon parle à haute voix »), marchant de long en large, et Marie-Jeanne Manuellan, assistante sociale mutée au Centre neuropsychiatrique de jour de l’hôpital Charles-Nicolle de Tunis dirigé par Fanon, les tapait sur une machine achetée pour l’occasion rue de Marseille, quand elle ne prenait pas en note tout ce qui se disait dans les consultations. Elle aura tapé les deux derniers livres de Fanon, L’An V de la Révolution algérienne et Les Damnés de la terre [écouter l’ entretien avec Marie-Jeanne Manuellan et voir son livre Sous la dictée de Fanon, Éditions de l’Amourier, 2017].

L’accent lyonnais/vénissian de Mehdi Senoussi, qui joue Hocine, le principal infirmier travaillant avec Fanon, est lui aussi fort mal venu.

Et que dire de Farida, la jeune militante du FLN interprétée par Sfaya Mbarki, qui se balade dans les rues d’une ville algérienne habillée d’un pantalon fuseau et portant négligemment un hijab décontracté, ce qui lui donne l’air d’une Iranienne ou d’une Afghane émancipée du XXIème siècle, mais en tout cas pas celui d’une jeune combattante clandestine dans l’Algérie des années 1950. Quiconque a une idée minimale de la société algérienne de cette époque, ne serait-ce que pour avoir vu le film La Bataille d’Alger de Gillo Pontecorvo, sait que « Farida » se serait déplacée soit vêtue d’un haïk (équivalent algérien du safsari tunisien) soit déguisée en petite pied-noire proprette, en jupe plissée ou tailleur.

La palme du grotesque revient à Salem Kali, lui aussi très mal venu -avec son passé de champion de kung fu et de protagoniste de film de zombies – pour incarner Abane Ramdane, parlant un arabe de karakouz [1] : le summum est atteint dans la scène où il fait un discours aux allures de prêche à des paysans réunis dans une étable. Le public tunisien n’a pas pu se retenir de rigoler lorsqu’il prononce, la bouche en cul-de-poule sous sa moustache : « Di-mou-kra-tttiiyaa ». Abane Ramdane était un Kabyle trilingue ayant reçu une éducation française et un modèle d’intellectuel organique, réalisant l’alchimie de la constitution du mouvement national de libération. Il pensait certes, avec Mao, que « le pouvoir est au bout du fusil », mais, toujours avec Mao, que « le parti commande aux fusils et il ne faut jamais permettre que les fusils commandent au parti ». Ce fut ce qui signa son arrêt de mort. Il fut étranglé sur ordre des 3 B (Belkacem, Boussouf, Bentobbal] et avec l’assentiment des trois autres B [Ben Bella, Boumediène, Bouteflika), dans une ferme entre Tétouan et Tanger où on lui avait tenu un traquenard, et non pas, comme le filme Barny, dans une villa de Tunis.

Et pour finir, la dernière scène, celle de l’enterrement. Fanon n’a pas été enterré par quelques fellahs en gandoura dans une plaine et dans un linceul, mais dans un cercueil à Aïn Kerma, en territoire algérien, par un détachement de l’Armée de Libération Nationale qui lui a rendu les honneurs militaires. Ces faits documentés – par exemple dans l’excellent documentaire d’Hassane Mezine, Fanon hier, aujourd’hui (2018) - ont été ignorés par Si Barny.

Pour conclure, Madame la France a trouvé dans le bioupik barnyen une occasion très bon marché - ça ne mange pas de pain - de se redorer le blason auprès de ses encore-colonisés de tous les continents. Mais pas auprès des décolonisés, dont votre serviteur pense faire partie. À bon entendeur salut. Quant aux autistes et autres narcissiques konparézon*, qu’ils continuent à contempler leur nombril.

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Notes

1 - Karakouz : terme tunisien désignant le théâtre d'ombres d'ombres d'origine ottomane, dérivé du turc Karagöz (oeil noir), nom du personnage plébéien et lourdaud, devenu en Grèce Karagiorgios. Karakouz en tunisien désigne généralement le cirque politicard.

*Par un hasard qui n’a rien de curieux, le film a eu son avant-première au Festival de Marrakech, au Maroc, un royaume dont tout le monde sait, au moins depuis la disparition forcée de Mehdi Ben Barka, qu’il est un bastion avancé des luttes de libération des peuples opprimés.

**Konparézon : prétentieux en kréyòl gwadloupèyen (créole guadeloupéen)