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23/07/2024

JEREMY SCAHILL
Kamala Harris peut-elle effacer le sang de ses mains ?

Si la probable candidate démocrate n'a pas les 50 ans d’histoire de soutien de Joe Biden au militarisme israélien, ses antécédents indiquent qu'elle maintiendrait une politique pro-israélienne sans faille.

Jeremy Scahill, Drop Site News, 22/7/2024
Schuyler Mitchell a contribué aux recherches pour cet article
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

  

Kamala Harris s'adressant à la conférence 2017 de l'AIPAC à Washington, D.C. Photo : Michael Brochstein/SOPA Images/LightRocket via Getty Images.

Quelques heures après que Joe Biden a annoncé qu'il ne se représenterait pas à l’élection présidentielle du 4 novembre prochain, l'élite du Parti démocrate a commencé à consolider son soutien à la vice-présidente Kamala Harris pour qu'elle prenne la tête de la campagne contre Donald Trump. Si elle obtient l'investiture démocrate, Kamala Harris devra notamment regagner le soutien des électeurs indignés par le fait que l'administration Biden a facilité la guerre génocidaire d'Israël contre les Palestiniens de Gaza. Rien que dans l'État critique du Michigan - où un sondage dévastateur de la Detroit Free Press a montré dimanche matin que Biden avait perdu 7 points de pourcentage par rapport à Trump dans l'ensemble de l'État - il y a eu plus de 100 000 électeurs primaires “non engagés”.

Le maire de Dearborn (Michigan), Abdullah Hammoud, ne s'est pas immédiatement prononcé en faveur de Mme Harris. Au lieu de cela, il a gazouillé : « Les démocrates ont l'occasion de faire preuve d'audace lors de cette convention. De désigner un candidat capable de mettre en place une politique intérieure historique ET d'abandonner la voie génocidaire tracée à Gaza et au-delà. L'Amérique a besoin d'un candidat qui puisse donner envie aux électeurs de se rendre aux urnes en novembre prochain ».

Mme Harris se trouve dans une position historique inhabituelle. L'équipe de presse de la Maison Blanche a donné l'image d'une Harris plus sensible à la situation humanitaire des Palestiniens, alors même qu'elle soutient l'agenda de Biden dans la région. En tant que candidate à la présidence, elle pourrait expliquer aux électeurs les divergences internes qu'elle a pu avoir dans les discussions autour de la guerre de Gaza. En tant que vice-présidente en exercice, cependant, de telles démarches poseraient des problèmes à Biden. 

La vérité est que, comme la plupart des démocrates, Harris a soutenu les politiques de Biden, même si elle a soulevé des objections tactiques ou exprimé un malaise moral face au nombre effroyable de morts. Si Harris n'est pas Biden - et n'a pas au compteur un demi-siècle de soutien massif à la brutalité et au militarisme d'Israël qui alimente ses positions - elle a ses propres antécédents de soutien intransigeant à Israël, à la fois en tant que sénatrice et que vice-présidente.  


Ben Jennings, The Guardian, 23/7/2024

 Peu après son élection au Sénat en 2016, Mme Harris a acquis une réputation d'ardente défenseuse d'Israël. Elle a pris la parole deux années de suite lors de conférences de l'AIPAC et a coparrainé une législation visant à saper une résolution des Nations unies condamnant l'annexion illégale de terres palestiniennes par Israël. L'un de ses premiers voyages internationaux en tant que sénatrice a eu lieu en Israël, où elle a rencontré le Premier ministre Benjamin Netanyahou en 2017. « Je soutiens l'engagement des USA à fournir à Israël une aide militaire de 38 milliards de dollars au cours de la prochaine décennie", a déclaré Mme Harris lors d'une conférence de l'AIPAC cette année-là. « Je crois que les liens entre les USA et Israël sont indéfectibles, et nous ne pouvons jamais laisser quiconque creuser un fossé entre nous. Tant que je serai sénatrice usaméricaine, je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour assurer un soutien large et bipartisan à la sécurité d'Israël et à son droit à l'autodéfense ».

Mme Harris a comparé le soutien à Israël aux coalitions forgées pendant le mouvement des droits civiques aux USA et a approuvé les accords d'Abraham du président Donald Trump, une série d'accords de normalisation entre Israël et les États arabes qui ont contourné les demandes d'un État palestinien indépendant. Mme Harris a coparrainé une loi qualifiant ces accords de “réalisation historique”. Dans un entretien en 2016, Mme Harris a déclaré : « Le mouvement de boycott, désinvestissement et sanctions repose sur l'hypothèse erronée qu'Israël est le seul responsable du conflit israélo-palestinien ». Elle a ajouté :  « le mouvement BDS cherche à affaiblir Israël, mais il ne fera qu'isoler le pays et braquer les Israéliens contre les compromis préalables à la paix ».

Lors d'une conférence privée de l'AIPAC en 2018, on a demandé à Mme Harris pourquoi elle soutenait Israël de manière aussi catégorique. « C'est simplement quelque chose qui a toujours fait partie de moi », a-t-elle répondu. « Je ne sais pas quand cela a commencé, c'est presque comme dire quand vous avez réalisé pour la première fois que vous aimiez votre famille, ou que vous aimiez votre pays, c'était juste toujours là. Cela a toujours été là ». 

 « Son soutien à Israël est au cœur de sa personnalité », a déclaré Lily Adams, directrice de la communication de la campagne de Mme Harris, en 2019, lorsque cette dernière était candidate à l'investiture démocrate. 

En mars 2019, au milieu des appels de militants du Parti démocrate à boycotter la conférence de l'AIPAC de cette année-là, Mme Harris a rejoint d'autres candidats, dont les sénateurs Bernie Sanders et Elizabeth Warren, pour ne pas participer à la réunion. Au lieu de cela, elle a gazouillé qu'elle avait rencontré en privé « les dirigeants de l'AIPAC de Californie pour discuter de la nécessité d'une alliance forte entre les USA et Israël, du droit d'Israël à se défendre et de mon engagement à lutter contre l'antisémitisme dans notre pays et dans le monde entier ».

Alors que Mme Harris s'exprime généralement en faveur de l'autodétermination palestinienne et d'une solution à deux États -conformément aux positions politiques générales du parti démocrate depuis l'accord d'Oslo de 1993 - elle s'est simultanément opposée aux efforts visant à imposer des conséquences à Israël pour ses violations flagrantes du droit international. 

Mme Harris a donné le ton de sa position sur Israël en tant que sénatrice lorsqu'elle a coparrainé en 2017 une loi condamnant la décision de l'ancien président Barack Obama de s'abstenir d'opposer son veto à une résolution du Conseil de sécurité de l'ONU critique à l'égard d'Israël. La résolution, adoptée en décembre 2016, affirmait que « L'établissement par Israël de colonies dans le territoire palestinien occupé depuis 1967, y compris Jérusalem-Est, n'a aucune validité juridique et constitue une violation flagrante du droit international et un obstacle majeur à la réalisation de la solution à deux États et d'une paix juste, durable et globale ». Mme Harris et ses collègues du Sénat ont affirmé que le refus d’Obama de bloquer la résolution de l'ONU était « incompatible avec la politique menée de longue date par les USA ». Ils ont déclaré que la politique usaméricaine devrait viser à empêcher l'ONU de prendre des mesures qui « isolent davantage Israël par le biais de boycotts économiques ou autres ou de toute autre mesure » et ont exhorté les futures administrations « à maintenir la pratique du veto à toutes les résolutions du Conseil de sécurité des Nations Unies qui reconnaissent les actions palestiniennes unilatérales, dont la déclaproclamation ration d'un État palestinien, ou qui dictent les termes et le calendrier d'une solution au conflit israélo-palestinien ».

 « Je pense que lorsqu'une organisation délégitime Israël, nous devons nous lever et nous exprimer pour qu'Israël soit traité de manière égale », a déclaré Mme Harris à propos de son vote. 

Lors de la course à la présidence de 2020, le New York Times a demandé à Mme Harris si elle pensait qu'Israël respectait les normes internationales en matière de droits humains. « Dans l'ensemble, oui », a-t-elle répondu. 

Lors du premier appel de Mme Harris avec M. Netanyahou après sa nomination à la vice-présidence, le 3 mars 2021, elle a dit au dirigeant israélien que les USA s'opposaient à ce que la Cour pénale internationale enquête sur les crimes de guerre présumés d'Israël contre les Palestiniens. Harris et Netanyahou « ont noté l'opposition de leurs gouvernements respectifs aux tentatives de la Cour pénale internationale d'exercer sa juridiction sur le personnel israélie », selon un compte-rendu par la Maison Blanche de cet appel. 

Harris, le 7 octobre et le génocide à Gaza

Après les attaques menées par le Hamas en Israël le 7 octobre, Mme Harris a adopté une position publique qui divergeait rhétoriquement de celle de Joe Biden. Tout en plaidant pour un soutien militaire, financier et diplomatique des USA à la guerre d'Israël, Harris a fréquemment souligné qu'Israël devait respecter les lois de la guerre, protéger les vies civiles et permettre l'acheminement de l'aide humanitaire. Par rapport à  Biden, Harris a plus souvent mis l'accent sur les souffrances des civils palestiniens. « Israël a incontestablement le droit de se défendre. Cela dit, il est très important de ne pas faire d'amalgame entre le Hamas et les Palestiniens », a déclaré Mme Harris lors de l'émission “60 Minutes” diffusée sur la chaîne CBS le 29 octobre 2023. « Les Palestiniens méritent les mêmes mesures de sûreté et de sécurité, d'autodétermination et de dignité, et nous avons été très clairs sur le fait que les règles de la guerre doivent être respectées et que l'aide humanitaire doit être acheminée ».

Fin 2023, des proches de Harris ont commencé à divulguer aux médias que la vice-présidente avait fait pression sur Biden pour qu'il adopte une position plus “dure” à l'égard de Netanyahou et pour que l'administration exprime plus publiquement son inquiétude face aux décès de civils palestiniens. À certains moments, Biden et d'autres hauts responsables ont critiqué publiquement les bombardements israéliens “aveugles” et ont appelé Israël à faire preuve de plus de retenue dans ses tactiques. Au début de l'année 2024, il est devenu évident que l'administration Biden reconnaissait que son soutien à la guerre d'Israël allait probablement poser des problèmes majeurs à sa campagne de réélection. Elle a organisé une série de réunions avec des dirigeants arabo-usaméricains pour tenter de stopper l'hémorragie et a commencé à donner aux hauts fonctionnaires usaméricains les moyens de s'exprimer plus ouvertement sur le sort des civils palestiniens, tout en affirmant toujours qu'Israël avait le droit de se défendre.

Le 3 mars, après des mois de bombardements israéliens massifs sur la bande de Gaza et plus de 30 000 Palestiniens tués, Kamala Harris a pris l'initiative de plaider en faveur d'un cessez-le-feu conditionnel de six semaines à Gaza. « Ce que nous voyons chaque jour à Gaza est dévastateur. Nous avons vu des familles manger des feuilles ou des aliments pour animaux. Des femmes donnent naissance à des bébés souffrant de malnutrition, avec peu ou pas de soins médicaux, et des enfants meurent de malnutrition et de déshydratation », a déclaré Mme Harris. « Nos cœurs se brisent pour les victimes de cette horrible tragédie et pour tous les innocents de Gaza qui souffrent de ce qui est clairement une catastrophe humanitaire. Les habitants de Gaza meurent de faim. Les conditions sont inhumaines ». Le lendemain, le Washington Post titrait : « Harris joue un rôle plus public en critiquant les actions d'Israël à Gaza ».

Alors que de nombreux démocrates espèrent que l'abandon de Biden ouvrira la voie à une réinitialisation, l'histoire politique de Mme Harris indique qu'elle continuera à poursuivre l'agenda bipartisan du gouvernement usaméricain sur Israël et la Palestine, y compris les politiques qui ont aidé et encouragé la mort de plus de 40 000 Palestiniens en neuf mois.

En réalité, la guerre de Gaza n'est pas la question centrale de la campagne de 2024, même si, dans une course où chaque voix compte, elle pourrait causer des dommages substantiels aux démocrates. Le Parti démocrate mise sur l'espoir que les électeurs désillusionnés par la guerre sont tellement terrifiés par le retour de Trump à la Maison Blanche qu'ils mettront de côté leur indignation au sujet de Gaza et se rallieront à un candidat qui n'est pas Joe Biden. La question sera de savoir si les électeurs tiennent Harris pour responsable de la politique de l'administration à l'égard de Gaza ou s'ils se contenteront du retrait de Biden du ticket.

« Pendant des mois, nous avons prévenu que le soutien de Biden à l'assaut israélien contre Gaza nuirait à son éligibilité », a déclaré Layla Elabed, l'une des dirigeantes du mouvement Uncommitted*, qui a appelé Biden à mettre fin aux livraisons d'armes à Israël par les USA.

« En finançant un gouvernement qui commet des violations des droits humains, nous compromettons la position de notre parti contre l'extrémisme de droite et contredisons notre engagement en faveur de la démocratie et de la justice. Il est temps d'aligner nos actions sur nos valeurs. La vice-présidente Harris peut entamer le processus de reconquête de la confiance en tournant la page des politiques horribles de Biden à Gaza ».

 NdT

*Uncommitted= Non engagés. Lors des primaires présidentielles démocrates du Michigan 2024, du Minnesota 2024 et de Washington 2024, de nombreux militants et élus, dont le maire de Dearborn Abdullah Hammoud et la représentante à la Chambre des représentants Rashida Tlaib, ont fait campagne pour que les électeurs choisissent l'option de non-engagement en signe de protestation contre la gestion par Biden de la guerre contre Gaza. Certains USAméricains d'origine arménienne ont également suggéré de voter sans engagement en raison des actions de Biden concernant l'offensive azerbaïdjanaise de 2023 au Nagorno-Karabakh. À Washington, le plus grand syndicat de l'État, United Food and Commercial Workers, a soutenu l'option sans engagement. En réponse, le groupe de lobbying  Democratic Majority for Israel a diffusé des publicités arguant que voter “sans engagement” affaiblirait Biden et soutiendrait Donald Trump. Gretchen Whitmer, gouverneure du Michigan, a déclaré que bien qu'elle reconnaisse la “douleur” ressentie par les gens à propos de la guerre, elle encourageait tout de même à voter pour Biden car « tout vote qui n'est pas exprimé en faveur de Joe Biden soutient un second mandat de Trump ». Au final, dans le Michigan, Joe Biden a reçu 81,1 % des voix (618 426 votes), les candidats non engagés ont reçu 13,3 % des voix (101 100 votes), tandis que les autres candidats ont reçu 5,7 % des voix (43 171 votes). La part des non engagés a dépassé celle de Barack Obama en 2012, la dernière campagne de réélection d'un président démocrate (bien qu'en 2012 il se soit agi d'un caucus et non d'une primaire. Dans le Minnesota, les non engagés ont obtenu une part encore plus importante des voix, soit 18,9 %, tandis que Biden n’obtenait que 70,6 %.
Le Mouvement National Non-Engagé, né dans le Michigan, mène campagne pour appeler les électeurs à voter « Uncommitted » afin de promouvoir 3 revendications :

1-Assurer un cessez-le-feu immédiat et permanent

2-Arrêter toute livraison de munitions et toute aide militaire à Israël

3-Mettre fin au siège interminable de Gaza (6248 jours depuis le 15 juin 2007)

 


 

16/07/2024

PHILIP WEISS
Israël est en train de se désagréger, et les dirigeants usaméricains sont dans le déni


Philip Weiss, Mondoweiss, 15/7/2024
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

Philip Weiss (USA, 1955) est un journaliste et écrivain usaméricain juif et antisioniste, fondateur, avec Adam Horowitz, du site ouèbe Mondoweiss en 2007.
Biographie

L’incapacité d’Israël à résoudre la question palestinienne autrement que par l’apartheid et les massacres a favorisé l’émergence d’une culture politique fasciste et raciste dans le pays. Mais cette vérité doit être cachée aux USAméricains.

Plusieurs voix de gauche ont récemment déclaré qu’Israël était en train de se désagréger. La société est déchirée par la guerre, le gouvernement est dominé par des racistes brutaux et la seule réponse du pays à la question fondamentale - la moitié de la population est palestinienne -, c’est l’apartheid et les massacres à répétition.


« Des soldats israéliens ont mis le feu à la bibliothèque de l’université Al Aqsa dans la ville de Gaza et se sont photographiés devant les flammes », a rapporté le journaliste Younis Tirawi sur X le 23 mai. Tirawi a montré que la photo avait été partagée sur les médias sociaux par le soldat israélien Tair Glisko. 424e  bataillon, brigade Givati, qui a ensuite rendu son compte privé.

La culture politique israélienne a des relents de fascisme. Les derniers massacres de civils à Gaza sont immédiatement approuvés par les politiciens centristes, tandis que les ministres de droite lancent des appels à l’exécution des prisonniers palestiniens. L’ensemble de la société dénonce la libération d’un médecin innocent enlevé par les forces israéliennes à Gaza et se lance dans (ce que Gideon Levy appelle) « une campagne hystérique de panique, d’incrimination, de haine, de déshumanisation, de soif de vengeance, de soif de sang ».

On a l’impression qu’Israël n’a pas d’issue. Il n’est pas étonnant que des centaines de milliers d’Israéliens aient fui le pays depuis octobre dernier.

Comment les USA font-ils face à ces réalités ? La réponse à ces 20 dernières années de haine anti-palestinienne a été le déni. La réponse à ce cycle politique est également un déni total.

L’establishment usaméricain insiste sur le fait qu’Israël est une démocratie saine et qu’il est capable d’évoluer vers une solution à deux États dans laquelle les Palestiniens vivraient côte à côte avec les Israéliens.

Aucun expert de la situation ne le croit, mais ces fictions soutiennent notre classe politique, comme Paul Begala qui a déclaré la semaine dernière sur CNN que Biden avait fait preuve d’un grand leadership sur Gaza. Si nos experts regardaient la vérité en face - Israël est un État juif suprémaciste qui ne cherche qu’à obtenir plus de terres avec moins de Palestiniens, et qui tue de jeunes Palestiniens sans aucune hésitation - , les USA devraient prendre des mesures, avec le reste du monde, pour isoler Israël.

C’est la leçon que l’on peut tirer de la défaite de Jamaal Bowman : ce membre du Congrès a vu l’occupation de près en 2021 lors d’un voyage de J Street en Israël et en Palestine et, selon l’excellent rapport de Calder McHugh dans Politico, il n’a pas pu mentir sur l’impasse dans laquelle se trouve Israël et sur les crimes de guerre.

« [La solution à deux États] était la chose que vous disiez pour que tout le monde vous laisse tranquille... pour qu’au moins vous puissiez satisfaire les deux parties, la liberté palestinienne et l’État juif », explique [Bowman]. Mais ce qu’il a retenu de ces cinq jours de réunions et d’entretiens, de déjeuners en boîte et de dîners chics, c’est qu’il n’y avait aucune volonté politique au sommet du gouvernement israélien de poursuivre une solution à deux États ou de s’engager dans un quelconque processus de paix durable - et que la volonté des USA d’envoyer une aide importante à Israël sans aucune condition n’était donc pas judicieuse.

Et après que Bowman a qualifié ce qui se passait à Gaza de génocide et a déclaré que le boycott était légitime, J Street lui a retiré son soutien.

27/05/2024

THE WASHINGTON POST
Des titans du monde des affaires ont demandé entre-quatre-z-yeux au maire de New York d’envoyer sa police contre les manifestants de Columbia : des tchats le prouvent

Hannah Natanson et Emmanuel Felton, The Washington Post, 16/5/2024
Traduit par Layân Benhamed, édité par Fausto Giudice, Tlaxcala

Un tchat [groupe de discussion] sur WhatsApp lancé par quelques riches USAméricains après l’attaque du Hamas du 7 octobre révèle les pressions qu’ils ont exercé sur le maire noir de New York Eric Adams [ancien policier issu du ghetto, démocrate, diabétique, franc-maçon, végétarien, grand chasseur de SDF et pro-israélien virulent, NdE] et leur travail pour façonner l’opinion usaméricaine sur la guerre de Gaza.

 
Des manifestants propalestiniens scandent des slogans tout en faisant face à des agents de la police de New York à l’université de Columbia, à la fin du mois d’avril. (Ed Ou pour le Washington Post)

Un groupe de milliardaires et d’hommes d’affaires qui s’efforcent de façonner l’opinion publique usaméricaine sur la guerre à Gaza a fait pression en privé sur le maire de New York le mois dernier pour qu’il envoie la police disperser les manifestations propalestiniennes à l’université de Columbia, selon des communications obtenues par le Washington Post et des personnes familières du groupe.

Des hommes d’affaires, dont le fondateur de la société de snacks Kind, Daniel Lubetzky, le gestionnaire de fonds spéculatifs Daniel Loeb, le milliardaire Len Blavatnik et l’investisseur immobilier Joseph Sitt, ont tenu un appel vidéo Zoom le 26 avril avec le maire Eric Adams (Démocrate), environ une semaine après que le maire avait envoyé la police new-yorkaise sur le campus de Columbia, comme le montre un registre de messages de tchat. Pendant l’appel, certains participants ont discuté de la possibilité de faire des dons politiques à M. Adams, ainsi que de la manière dont les membres du groupe de discussion pourraient faire pression sur le président et les administrateurs de Columbia pour qu’ils autorisent le maire à envoyer la police sur le campus pour s’occuper des manifestants, d’après les messages de discussion résumant la conversation.

Un membre du groupe de discussion WhatsApp a déclaré au Washington Post qu’il avait fait un don de 2 100 dollars, la limite maximale légale, à Adams ce mois-là. Certains membres ont également proposé de payer des enquêteurs privés pour aider la police new-yorkaise à gérer les manifestations, comme le montre le journal de tchat - une offre qu’un membre du groupe a rapportée dans le tchat et que M. Adams a acceptée. Le département de la police de New York n’utilise pas et n’a pas utilisé d’enquêteurs privés pour aider à gérer les manifestations, a déclaré une porte-parole de la mairie.

Les messages décrivant l’appel avec Adams faisaient partie de milliers de messages enregistrés dans une discussion WhatsApp entre certains des chefs d’entreprise et financiers les plus importants du pays, notamment l’ancien PDG de Starbucks Howard Schultz, le fondateur et PDG de Dell Michael Dell, le gestionnaire de fonds spéculatifs Bill Ackman et Joshua Kushner, fondateur de Thrive Capital et frère de Jared Kushner, le gendre de l’ancien président Donald Trump [et chargé de mission au Moyen-Orient par lui, NdE].

Des personnes ayant un accès direct au contenu du journal de discussion l’ont communiqué au Post. Elles ont communiqué ces informations sous le couvert de l’anonymat, car le contenu de la discussion était censé rester privé. Des membres du groupe ont vérifié l’existence du tchat et leurs commentaires.

La discussion a été lancée par un collaborateur du milliardaire et magnat de l’immobilier Barry Sternlicht - qui ne s’est jamais joint directement au groupe, communiquant plutôt par l’intermédiaire du collaborateur, selon les messages de la discussion et une personne proche de Sternlicht. Dans un message daté du 12 octobre, l’un des premiers envoyés dans le groupe, l’employé qui s’exprimait au nom de Sternlicht expliquait aux autres membres que l’objectif du groupe était de “changer le discours” en faveur d’Israël, notamment en faisant connaître « les atrocités commises par le Hamas [...] à tous les Américains ».

Israël estime que 1 200 personnes ont été tuées lors de l’attaque du Hamas du 7 octobre. Au cours des mois qui ont suivi le début de la guerre, le nombre de morts à Gaza a dépassé les 35 000, selon le ministère de la santé de Gaza.

Le groupe de discussion s’est formé peu après l’attaque du 7 octobre et son activisme s’est étendu au-delà de New York, touchant les plus hauts niveaux du gouvernement israélien, le monde des affaires usaméricain et les universités d’élite. Intitulé “Israel Current Events”, le groupe de discussion a fini par compter une centaine de membres, comme le montre le journal de bord. Plus d’une douzaine de membres du groupe figurent sur la liste annuelle des milliardaires de Forbes ; d’autres travaillent dans l’immobilier, la finance et les communications.

Dans l’ensemble, les messages donnent un aperçu de la manière dont certaines personnalités ont utilisé leur argent et leur pouvoir pour tenter de façonner l’opinion des UAméricains sur la guerre de Gaza, ainsi que les actions de dirigeants universitaires, commerciaux et politiques, dont le maire de New York.

« Il est ouvert à toutes les idées que nous avons », a écrit Sitt, membre du tchat et fondateur de la chaîne de magasins Ashley Stewart et de la société immobilière Thor Equities, le 27 avril, le lendemain de l’appel Zoom du groupe avec Adams. « Comme vous l’avez vu, il est d’accord pour que nous engagions des enquêteurs privés et que l’équipe de renseignements de sa police travaille avec eux ».

Sitt s’est refusé à tout commentaire par l’intermédiaire d’une porte-parole.

Une demi-douzaine de membres éminents du groupe ont confirmé officiellement leur participation à la discussion. Plusieurs personnes connaissant bien le groupe ont confirmé les noms d’autres membres.

Le milliardaire chypriote israélien de l’immobilier, Yakir Gabay, a écrit dans une déclaration transmise par un porte-parole qu’il avait rejoint le groupe parce qu’il voulait « partager son soutien dans un moment difficile et douloureux », aider les victimes des attaques du Hamas et « essayer de corriger les informations fausses et trompeuses diffusées intentionnellement dans le monde entier pour nier ou dissimuler les souffrances causées par le Hamas ».

Interrogé sur la réunion e Zoom avec les membres du groupe de discussion, le bureau du maire n’a pas abordé directement la question, préférant partager une déclaration du maire adjoint Fabien Levy* qui souligne que la police new-yorkaise a pénétré à deux reprises sur le campus de Columbia en réponse à des « demandes écrites spécifiques » émanant de la direction de l’université. « Toute suggestion selon laquelle d’autres considérations auraient été prises en compte dans le processus de décision est totalement fausse », a déclaré Levy. Il a ajouté : « L’insinuation selon laquelle des donateurs juifs ont secrètement comploté pour influencer les opérations du gouvernement est un trope antisémite bien trop familier que le Washington Post devrait avoir honte d’évoquer, et encore plus de normaliser dans la presse ».

Dès le début, M. Adams s’est montré disposé à envoyer les forces de l’ordre pour s’occuper des manifestants sur les campus. Il a envoyé la police sur le campus de Columbia pour disperser les manifestants propalestiniens le 18 avril, à la demande de l’université, environ un jour après que les manifestants avaiient érigé leur campement de solidarité avec Gaza. Les policiers ont arrêté plus de 100 manifestants. Le maire a par la suite affirmé que les étudiants activistes étaient affectés par des « influences extérieures » et que l’intervention de la police était nécessaire pour empêcher que des « enfants » soient « radicalisés ».

Le président de Columbia et lui-même se sont depuis lors attirés des critiques - mais aussi des soutiens - pour avoir impliqué la police, ce qui vient s’ajouter à une période difficile pour Adams, qui doit être réélu en 2025 et qui fait face à une enquête du FBI pour corruption, selon laquelle sa campagne de 2021 aurait reçu des dons illégaux de la part de la Turquie. M. Adams a défendu cette campagne, affirmant qu’il l’avait menée dans le respect des « normes éthiques les plus strictes ».

Quatre jours après l’appel vidéo des membres du tchat avec M. Adams, des étudiants protestataires ont occupé un bâtiment du campus et le président de Columbia a invité la police à revenir sur le campus pour évacuer le bâtiment. Les policiers ont évacué et arrêté des dizaines de manifestants, bousculant, frappant et traînant des étudiants dans le processus, a rapporté le Post. Un officier a accidentellement tiré avec son arme.

Le maire de New York, Eric Adams, s’exprime lors d’une conférence de presse le 1er mai, après que les policiers new-yorkais ont évacué les manifestants du campus de l’université Columbia le 30 avril. (Mike Segar/Reuters)

Quelques mois avant les manifestations à Columbia au printemps, certains membres du tchat ont assisté à des réunions d’information privées avec l’ancien Premier ministre israélien Naftali Bennett, Benny Gantz, membre du cabinet de guerre israélien, et l’ambassadeur d’Israël aux USA, Michael Herzog, d’après les registres du tchat.

Les membres du groupe ont également collaboré avec le gouvernement israélien pour projeter à New York un film d’environ 40 minutes présentant des images compilées par les forces de défense israéliennes (FDI), intitulé « Bearing Witness to the October 7 Massacre » (Témoigner du massacre du 7 octobre). Le film présente des meurtres commis par le Hamas. Un membre du tchat a demandé l’aide d’autres membres pour projeter le film dans des universités ; il a ensuite été projeté à Harvard, une projection qu’Ackman, membre du tchat, a contribué à faciliter, à laquelle il a assisté et qu’il a promue publiquement.

Sternlicht s’est refusé à tout commentaire, bien qu’une personne proche de lui - s’exprimant sous le couvert de l’anonymat car elle n’était pas autorisée à discuter publiquement du groupe de discussion - ait confirmé que le magnat de l’immobilier était à l’origine de la discussion. D’autres membres du groupe de discussion, dont Ackman et Schultz, ont confirmé leur appartenance au groupe.

Un porte-parole a déclaré que M. Ackman n’avait pas participé au tchat depuis le 10 janvier, ajoutant qu’il n’avait jamais parlé à M. Adams des manifestations à Columbia et qu’il n’avait jamais fait de don à la campagne de M. Adams, même si M. Ackman « aime bien le maire et le soutient ». Joshua Kushner s’est refusé à tout commentaire.

 

Le magnat de l’immobilier Barry Sternlicht en janvier. (Bloomberg/Getty Images)

Le 12 octobre, un collaborateur de Sternlicht a transmis un message de son patron décrivant la mission du groupe : alors qu’Israël s’efforçait de « gagner la guerre physique », les membres du groupe de discussion « aideraient à gagner la guerre » de l’opinion publique usaméricaine en finançant une campagne d’information contre le Hamas. La campagne était désignée dans le tchat comme « Facts for Peace ».

Le site d’information Semafor a rapporté en novembre que M. Sternlicht lançait une campagne médiatique anti-Hamas de 50 millions de dollars avec divers milliardaires de Wall Street et d’Hollywood. Les personnes impliquées, selon le rapport de Semafor, comprennent certains membres du tchat WhatsApp, selon une étude du Post. Les messages du tchat, dont le contenu n’a jamais été rapporté auparavant, semblent révéler le début de la campagne, ainsi que des activités pro-israéliennes distinctes entreprises plus tard par les membres du tchat. On ignore dans quelle mesure le groupe de discussion et la campagne médiatique se sont chevauchés.

Certaines des activités de la campagne médiatique étaient publiques, notamment son site web et ses comptes Instagram, TikTok, YouTube, Facebook et X, qui ont attiré ensemble plus de 170 000 followers.

Contacts à haut niveau, briefings privés

Dans un contexte de montée de l’antisémitisme, le collaborateur de Sternlicht a écrit dans l’un des premiers messages de tchat que son patron était fier de son héritage juif et voulait soutenir Israël, mais qu’il était également préoccupé par la sécurité. L’anonymat, a écrit le collaborateur le 12 octobre au nom de Sternlicht, « est un besoin pratique et une préoccupation pour la sécurité de ma famille dans un monde de plus en plus complexe ».

Le membre du personnel a écrit que Sternlicht comprenait si d’autres membres ressentaient la même chose et a promis que toutes les contributions à la campagne médiatique resteraient anonymes. « Je suis sensible à la crainte d’être moins efficace s’il apparaît qu’il s’agit d’une initiative juive », a écrit l’employé au nom de M. Sternlicht.

Dès le début du tchat, les membres ont cherché à obtenir des conseils et des informations auprès de fonctionnaires du gouvernement israélien.

Certains membres du tchat WhatsApp ont déclaré avoir assisté à des réunions d’information privées sur la guerre de Gaza avec M. Gantz, membre du cabinet de guerre israélien, M. Bennett, ancien premier ministre, et M. Herzog, l’ambassadeur. Le journal du tchat montre des invitations de Zoom pour ces réunions.

« Je suis très reconnaissant à Naftali Bennett de m’avoir informé en coulisses », a écrit M. Schultz, l’ancien PDG de Starbucks, au groupe le 16 octobre. « « C’est tout à fait extraordinaire ! »

M. Bennett n’a pas répondu à une demande de commentaire. M. Gantz n’a pas pu être joint pour un commentaire. Un porte-parole de l’ambassade d’Israël à Washington a déclaré que la séance d’information donnée par M. Herzog aux membres du tchat était « l’une des dizaines » que l’ambassadeur avait données ce mois-là, ajoutant que « les communautés ici aux USA voulaient, à juste titre, en savoir plus sur ce qui se passait sur le terrain en Israël ».

Un porte-parole de M. Schultz a confirmé dans un communiqué qu’il avait assisté à la réunion d’information avec M. Bennett, mais il a précisé que M. Schultz « n’a pas participé ni contribué financièrement aux travaux du groupe ». M. Schultz n’a pas participé aux discussions sur M. Adams et les manifestations à Columbia, ni aux projections du film, selon le porte-parole.

À la fin du mois d’octobre, les enregistrements du tchat montrent que des membres du tchat semblent avoir suggéré aux responsables israéliens d’organiser une projection privée à New York pour les membres des médias de « Bearing Witness », le film de l’armée israélienne présentant des séquences choquantes enregistrées par les tireurs du Hamas sur des caméras corporelles et des téléphones portables alors qu’ils attaquaient Israël. Sitt a écrit dans un message adressé au groupe le 27 octobre que les responsables israéliens voulaient les remercier « d’avoir eu l’idée d’organiser un événement pour la presse à New York ».

Le mois suivant, le groupe a projeté le film à New York. Sitt a écrit le 10 novembre que le gouvernement israélien « s’est arrangé pour que nous » projetions le film au Gotham Hall le 17 novembre, ajoutant dans un message ultérieur que la projection « sera répertoriée comme un événement des FDI non affilié à Facts for Peace afin de les séparer ».

Au cours des mois suivants, les membres du groupe ont écrit dans le tchat pour signaler des articles de presse ou des messages sur les médias sociaux concernant Israël, les événements à Gaza ou, plus tard, les manifestations sur les campus universitaires.

Pour que la police de New York puisse revenir

Les étudiants de Columbia ont d’abord installé un campement le 17 avril, ce qui a conduit certains étudiants juifs à alléguer que les manifestations avaient créé une atmosphère hostile et de harcèlement. La police est intervenue pour dégager le campement à la demande du président de Columbia le 18 avril, arrêtant plus de 100 manifestants.

Lors du tchat, la discussion sur la manière dont Adams gérait les manifestations à Columbia - et sur la manière dont les membres du groupe pouvaient aider - a pris de l’ampleur le lendemain, après que les étudiants protestataires ont construit un nouveau campement pour remplacer celui qui avait été démoli.

Lubetzky, de la société de snacks Kind, a posté dans le tchat partageant un lien vers une vidéo Instagram montrant un journaliste arabe israélien se faire frapper par un homme que la légende de la vidéo affirme être un « manifestant anti-israélien ». Peu de temps après, le milliardaire Blavatnik a posté une photo d’Adams et a écrit : « Il a besoin d’aide ».

Daniel Loeb, dirigeant d’un fonds spéculatif, en janvier. (Bloomberg/Getty Images)

M. Sitt a répondu qu’il avait déjà « apporté son aide mais qu’il [Adams] avait besoin de plus de soutien ». Il a demandé si d’autres personnes étaient « prêtes à donner » [de l’argent] à Adams.

Gabay, le milliardaire chypriote israélien de l’immobilier, a répondu : « Veuillez envoyer l’information. Merci ». Puis Blavatnik a posté un lien ActBlue [plateforme de donations à des candidats démocrates] permettant de faire des dons au comité Eric Adams 2025.

Lubetzky a envoyé un message : Sitt a répondu qu’il était en train de mettre en place un « code » pour de tels dons ; interrogé sur ce message, Vito Pitta, conseiller de la campagne 2025 d’Adams, a déclaré « qu’il n’y a pas de ‘code spécial’ pour les contributions ».

Une porte-parole de M. Blavatnik a déclaré qu’il avait contribué à hauteur de 2 100 dollars à la campagne de réélection de M. Adams en avril. Elle a précisé que ce don avait été fait « pour soutenir le maire Adams dans son soutien indéfectible à Israël et sa position ferme contre l’antisémitisme ».

Les porte-parole de Lubetzky, Sitt et Gabay ont déclaré qu’ils n’avaient pas fait de dons à Adams. Loeb s’est refusé à tout commentaire.

Lors du tchat, la discussion a porté sur le fait que Columbia devait accorder une autorisation à Adams avant qu’il puisse envoyer la police municipale sur le campus.

Un membre a demandé si le groupe pouvait faire quelque chose pour pousser les administrateurs de Columbia à coopérer avec le maire. En réponse, l’ancien membre du Congrès Ted Deutch (Démocrate De Floride), PDG du Comité juif américain, a partagé le PDF d’une lettre que son organisation avait envoyée le jour même à la présidente de Columbia, Minouche Shafik, lui demandant de « mettre fin à ces manifestations ».

« Je suis également en contact avec le conseil d’administration », a écrit M. Deutch au groupe de discussion, « pour que la police de New York puisse revenir ».

Interrogée pour un commentaire, une porte-parole de Deutch a écrit dans un courriel au Post que le Comité juif américain « apprécie toutes les occasions de s’engager avec diverses personnes et institutions qui soutiennent le peuple juif et l’État d’Israël ». Interrogé sur le groupe de discussion et ses activités, un porte-parole de Columbia a répondu : « Nous n’en avons pas connaissance ».

Un appel vidéo Zoom avec les membres du groupe de discussion et Adams a eu lieu un peu après 11 heures le 26 avril, selon les enregistrements du tchat.

On ne sait pas exactement combien de membres ont assisté à la réunion, qui a duré environ 45 minutes, selon les registres de discussion. Parmi les personnes présentes figuraient au moins Blavatnik, Sitt, Loeb et Lubetzky, selon les registres.

Sitt a écrit quelques minutes après la fin de l’appel pour résumer les points « discutés aujourd’hui », y compris les dons à Adams, l’utilisation de l’ « influence » des membres du groupe pour aider à persuader le président de Columbia de laisser la police de New York revenir sur le campus, et le financement des « efforts d’enquête » pour aider la ville.

Lubetzky a répondu en énumérant des actions concrètes que les membres du groupe devraient entreprendre. Il s’agissait notamment de partager à nouveau un lien pour offrir un soutien financier à Adams, d’appeler et d’écrire au président et au conseil d’administration de Columbia, et d’ « amener les leaders noirs à condamner l’antisémitisme ». Il a cité plusieurs personnes qu’il contacterait et a demandé si l’un des membres du groupe connaissait Jay-Z, LeBron James ou Alicia Keys.

Interrogé sur ses commentaires, M. Lubetzky a écrit dans une déclaration au Post que « construire des ponts entre les communautés noire et juive (...) est plus important que jamais ».

M. Blavatnik, par l’intermédiaire d’une porte-parole, a confirmé qu’il avait participé à la conférence Zoom avec M. Adams, mais a déclaré qu’il n’avait pas « participé à une conversation sur les enquêteurs privés et qu’il n’était pas au courant des discussions liées à ce sujet ». La porte-parole a fait remarquer que d’autres participants à la conférence ont dit des choses que M. Blavatnik « n’a pas commentées ou avec lesquelles il n’était pas d’accord ». Elle a ajouté que le milliardaire, ancien élève et donateur de Columbia, n’avait rejoint le Zoom que pour comprendre comment Adams « pensait aux manifestations de Columbia ».

Le soir suivant l’appel, Sitt a partagé le lien ActBlue pour les dons au comité Adams 2025.

 

Daniel Lubetzky, PDG de Kind, en 2017. (Mark Lennihan/AP)

Le tchat n’indique pas qui a donné de l’argent à Adams ni quel en est le montant. Le site web de la commission de financement des campagnes de la ville de New York n’indique que les dons envoyés jusqu’en janvier de cette année ; les dons plus récents ne seront rendus publics qu’en juillet.

M. Pitta, l’avocat de la campagne d’Adams, a déclaré que la campagne n’avait pas reçu de dons de la part de Lubetzky, Loeb, Sitt ou Gabay. Il a confirmé que M. Blavatnik avait fait un don, mais n’a pas répondu aux questions portant sur la date de son don.

Un jour après le Zoom du 26 avril avec Adams, Loeb a écrit au groupe de discussion pour partager ses réflexions sur ce qui s’était passé pendant l’appel. Il a écrit qu’il était « triste que nous ressentions le besoin de ramper pour demander à nos élus de faire leur travail ». Il a ajouté : « Je serai reconnaissant lorsque les auteurs de ces actes seront traînés hors du campus ».

La police est revenue à Columbia le 30 avril, arrêtant des dizaines de manifestants qui avaient occupé un bâtiment de l’université. La présidente de Columbia, Mme Shafik, avait demandé l’aide des forces de l’ordre dans une lettre, écrivant que l’occupation du Hamilton Hall soulevait de « graves problèmes de sécurité ». Elle a demandé à la police de rester sur le campus au moins jusqu’au 17 mai.

Le lendemain matin, Adams a donné une conférence de presse pour résumer l’action. « Nous sommes entrés et avons mené une opération », a-t-il déclaré, « pour éliminer ceux qui ont transformé les manifestations pacifiques en un lieu où l’antisémitisme et les attitudes anti-israéliennes étaient omniprésents ».

Des étudiants propalestiniens et d’autres sympathisants se rassemblent devant la bibliothèque Elmer Holmes Bobst de l’université de New York en mai (Spencer Platt/Getty Images)

Début mai, sept mois après sa création, le tchat a été fermé. Une personne proche de Sternlicht a déclaré qu’il avait décidé de fermer le groupe parce que les activités dépassaient les objectifs initiaux et que les personnes qui l’avaient lancé - y compris lui-même - n’y participaient plus activement, et ce depuis des mois.

« Nous sommes incroyablement reconnaissants pour le dialogue et le soutien que ce groupe nous a apportés au cours des sept derniers mois », a écrit un collaborateur de Sternlicht. Il a ajouté que les membres « ne devaient pas hésiter à nous contacter s’ils avaient besoin de quoi que ce soit ».

« Nous sommes plus forts ensemble », a écrit le collaborateur en guise de conclusion.

NdE

*Fabien Levy, fils d’immigrés iraniens juifs né à Long Island, a été nommé en 2023 maire-adjoint chargé des communications -un poste nouvellement créé – après avoir été le porte-parole d’Eric Adams depuis lentrée en fonction de ce dernier comme maire le 1er janvier 2022.

 


Hannah Natanson est une journaliste du Washington Post qui couvre l’éducation nationale de la maternelle à la 12e année.
 

 

 

Emmanuel Felton est journaliste spécialisé dans les questions raciales [sic] et ethniques au bureau des USA du Washington Post.

 

 

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