Noa Shpigel, Haaretz, 18/5/2023
Traduit par Fausto
Giudice, Tlaxcala
Le projet de loi parrainé par un député d’extrême droite a franchi la première des quatre étapes législatives ■ Les contrevenants pourraient risquer jusqu’à un an derrière les barreaux si la législation est approuvée.
Le Parlement israélien est en train de faire avancer un projet de loi qui interdirait le déploiement public de drapeaux d’une “entité hostile”. La Knesset a voté une approbation préliminaire du projet de loi, qui doit maintenant passer trois votes supplémentaires.
Le projet de loi, parrainé par Almog Cohen, député d’Otzma Yehudit [Force juive, parti kahaniste d’Itamar Ben-Gvir, NdT], stipule que trois personnes ou plus brandissant le drapeau d’une entité ou d’une organisation ennemie seront considérées comme un rassemblement interdit. Si le projet de loi est adopté, le fait de brandir le drapeau palestinien en public serait passible d’une peine pouvant aller jusqu’à un an de prison.
Le drapeau palestinien est souvent arboré par des citoyens arabes d’Israël, dont beaucoup s’identifient comme Palestiniens [sic], et par des Israéliens de gauche qui sont opposés à la politique de colonisation du gouvernement.
Le commissaire de police est autorisé à interdire le déploiement publique de drapeaux palestiniens s’il estime que ces drapeaux sont « un symbole susceptible de perturber la paix ». Toutefois, l’application de cette interdiction est laissée à la discrétion du commandant sur le terrain. En outre, conformément aux instructions du procureur général en 2006 et 2014, la police n’applique cette interdiction que lorsqu’il y a « une forte probabilité d’atteinte grave à la sécurité publique ».
Le projet de loi stipule que si au moins trois personnes se rassemblent et déploient en public des drapeaux d’un État ennemi, ou d’un État, d’une entité ou d’un organisme qui n’est pas ami d’Israël, ou qui n’autorise pas l’affichage du drapeau israélien dans sa juridiction, il s’agira d’un rassemblement interdit. Les personnes qui y participent peuvent donc être arrêtées et sont passibles d’une peine d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à un an. Il serait également possible de disperser un tel rassemblement en vertu de la loi.
L’explication du projet de loi indique que celui-ci « oriente le comportement public en Israël. En tant que démocratie, Israël permet à ses citoyens de protester contre les décisions sur lesquelles ils ne sont pas d’accord avec les autorités. Mais la proposition trace une ligne rouge entre une protestation légitime et une protestation où sont déployés des drapeaux de ceux qui ne reconnaissent pas l’État d’Israël, de ceux qui ne sont pas amicaux à son égard ou qui ne permettent pas à Israël de hisser son drapeau sur son territoire ».
Une manifestante brandit un drapeau palestinien lors d’une manifestation en faveur de la démocratie à Tel Aviv, le mois dernier. Photo : Hadas Parush
Adalah, le Centre juridique pour les droits de la minorité arabe en Israël, a déclaré dans un communiqué que les policiers qui confisquent les drapeaux lors des manifestations et arrêtent ceux qui les tiennent enfreignent gravement leur autorité et la loi. Adalah a déclaré que ce projet de loi est encore plus extrême que les dispositions de l’accord de coalition avec Otzma Yehudit, car il impose des sanctions pénales pour le déploiement du drapeau dans l’ensemble de la sphère publique, et pas seulement dans les institutions de l’État ou soutenues par l’État.
Un projet de loi doublant la peine pour harcèlement sexuel si le motif de l’infraction est déterminé comme étant nationaliste a également été approuvé lors d’un vote préliminaire mercredi. Ce projet de loi, également parrainé par Otzma Yehudit, est formulé dans un langage qui suggère, sans le dire explicitement, qu’il vise le harcèlement de femmes juives par des hommes arabes. Il prévoit une indemnisation des victimes pouvant aller jusqu’à 240 000 shekels (près de 60 000 €), sans qu’il soit nécessaire de prouver l’existence d’un préjudice.
En janvier dernier, suite à l’interdiction (illégale) par Itamar Ben-Gvir de tout drapeau palestinien dans l’espace public, le dessinateur Michael Rozanvov, alias Mysh, a publié son autoportrait aux couleurs du drapeau interdit. De nombreux Israéliens lui ont demandé de faire leur portrait aux mêmes couleurs. Et même Itamar a eu droit à son portrait...