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22/01/2023

MICHELE GIORGIO
Il y a un champ de bataille au cœur de Naplouse

Michele Giorgio, Pagine Esteri, 20/1/2023 (Photos de l’auteur)
Traduit par
Fausto Giudice, Tlaxcala

La circulation est chaotique comme tous les jours. Les usines, les ateliers d’artisans et les magasins sont ouverts. Comme tous les matins, les étudiants de l’université Al Najah se rendent au campus à un rythme rapide et, dans l’après-midi, se pressent dans les cafés autour de l’université, remplissant l’air de sons, de mots, de rires. Naplouse semble vivre un quotidien tranquille. Ce n’est qu’une apparence. La deuxième ville palestinienne de Cisjordanie vit dans un climat de guerre depuis l’été dernier, une guerre qui se déroule principalement la nuit et qui n’épargne personne. Le principal champ de bataille est la casbah, la vieille ville. Les hommes des unités spéciales de l’armée israélienne, les mista'arvim [“arabisés”] en civil qui se font passer pour des Palestiniens, ouvrent la nuit, par des actions éclair, la voie aux raids des unités de l’armée à la chasse aux militants de la Tanière des lions, le groupe qui rassemble des combattants de toutes les orientations politiques et qui est devenu l’icône de la lutte armée palestinienne. Des raids qui s’accompagnent d’intenses échanges de tirs et se terminent par des meurtres de Palestiniens, presque toujours perpétrés par des tireurs d’élite.


« Nous vivons comme si nous étions en guerre, avec les occupants (israéliens) qui entrent dans la ville presque chaque nuit pour tuer ou capturer quelqu’un, et les civils en paient souvent le prix », nous dit Majdi H., un éducateur qui a accepté de nous accompagner. « La casbah est la principale cible d’Israël, ajoute-t-il, car elle représente le refuge de la résistance. Mais les raids ont lieu partout et se transforment en batailles au Tombeau de Joseph ». Majdi fait référence aux “visites” nocturnes périodiques de colons israéliens sur le site religieux situé dans la zone A, sous contrôle palestinien total. Leur arrivée, avec une escorte de dizaines de soldats et de véhicules militaires, déclenche de violents échanges de tirs avec la Tanière des lions. « Nous voulons vivre notre vie, sans plus voir de colons et de soldats, mais on ne nous le permet pas », poursuit Majdi, qui mène depuis plusieurs années des activités de soutien psychologique aux mineurs avec d’autres collègues. « Ils sont les plus touchés par ce climat, explique-t-il, les enfants et les jeunes sont les plus exposés aux dommages causés par cette guerre de faible intensité mais toujours violente ». La situation actuelle rappelle à beaucoup l’opération “Mur de défense” lancée par Israël en 2002, lorsque l’armée a réoccupé des villes autonomes palestiniennes au plus fort de la deuxième Intifada. On a estimé le nombre de morts palestiniens à environ 300 à Naplouse, qui a été traversée et dévastée pendant des mois par les chars et les véhicules blindés. Aujourd’hui comme alors, le commandement militaire et le gouvernement israéliens justifient leur main de fer par la “lutte contre le terrorisme” et les organisations armées palestiniennes responsables d’attaques qui, dans certains cas, ont tué ou blessé des soldats et des colons.

La beauté de la casbah de Naplouse n’est comparable qu’à celle de la vieille ville de Jérusalem. Les travaux de rénovation entrepris ces dernières années par les autorités locales, grâce également à des projets internationaux, ont redonné une nouvelle splendeur aux bâtiments anciens et aux coins cachés. Les hammams qui ont contribué à rendre la ville célèbre ont été rénovés, tout comme les fabriques de carrelages et de savon à l’huile d’olive et les ateliers familiaux qui produisent les gelées enrobées de sucre glace. « Mais la reine des sucreries à Naplouse était et reste la kunafa [knafeh] », souligne Majdi, en référence à l’un des délices de la cuisine palestinienne. L’atmosphère est agréable. Après la mosquée al Khader, on rencontre de petits restaurants avec des pots de fleurs et des lumières colorées se reflétant sur la pierre blanche des maisons. Les commerçants exposent des marchandises de toutes sortes et les marchands ambulants vantent les mérites des fruits et légumes qu’ils ont apportés en ville.


En entrant dans le quartier Al Yasmin, Majdi devient plus sérieux et tendu. Nous sommes dans la zone rouge, c’est le fief de la Tanière des lions et d’autres groupes armés. « Ici, il y a des fusillades presque toutes les nuits entre nos jeunes et les soldats israéliens. Tu ne peux pas prendre de photos et si tu croises des combattants, ne les suis pas des yeux trop longtemps. La peur des espions et des collabos est forte », nous dit-il à voix basse. Au-dessus de nos têtes, dans les ruelles, de longs draps noirs ont été étendus pour cacher les mouvements des tireurs aux drones israéliens. Les murs sont couverts d’affiches avec les visages des martyrs, anciens et nouveaux, ceux tués pendant la première Intifada il y a trente ans et ceux abattus ces dernières semaines. Une sorte de mausolée installé sur une petite place commémore les plus célèbres d’entre eux, dont Ibrahim Nabulsi, qui en août dernier, encerclé par les soldats israéliens, a préféré mourir et ne pas se rendre. Avant d’être abattu, Nabulsi a envoyé un message audio à sa mère qui est devenu viral pendant des mois. Pour les Palestiniens, c’est un héros. Pour Israël, en revanche, le premier chef de la Tanière des lions était un “dangereux terroriste” et faisait partie des responsables de graves attaques armées contre des soldats et des colons. Les mista'arvim israéliens ont déjà décapité la direction de la Tanière des lions à plusieurs reprises, mais le groupe voit ses rangs grossir chaque jour. Entre 100 et 150 habitants de Naplouse et des villages voisins en feraient partie. Quelques-uns d’entre eux nous dépassent, nous ne pouvons pas les photographier ou les arrêter pour leur poser quelques questions, répète sèchement Majdi, qui entre-temps a été rejoint par Amer, un de ses amis qui vit dans la casbah, pour nous garant un "laissez-passer" supplémentaire. L’uniforme des hommes armés est noir, le visage est recouvert d’une cagoule, un bandeau de couleur portant le logo du groupe entoure le sommet de la tête. L’arme est presque toujours un pistolet-mitrailleur M-16.


Un « uniforme»similaire est porté par les membres du bataillon de Balata, dans le plus grand camp de réfugiés de la ville, également connu pour être un bastion de la résistance aux forces de sécurité de l’Autorité nationale palestinienne, que beaucoup à Naplouse, y compris ceux du parti Fatah du président Abou Mazen, considèrent désormais comme étant « au service » d’Israël. Les opérations (répressives) de sécurité menées à Naplouse par les forces spéciales de l’ANP sont à l’origine de violentes protestations et les rues du centre-ville se transforment en un champ de bataille entre jeunes et policiers. «Cela fait des décennies que nous demandons en vain la fin de l’occupation israélienne, le principal problème de Naplouse, de chaque ville, de chaque Palestinien », déclare Osama Mustafa, directeur du centre culturel Yafa dans le camp de Balata. « Nous avons essayé avec les accords d’Oslo, avec les négociations mais cela n’a servi à rien, nous restons sous occupation, les colonies israéliennes nous encerclent », ajoute Mustafa. « Israël prétend que sa pression sur Naplouse est due à la présence d’hommes armés dans la ville et met en œuvre des mesures punitives qui touchent l’ensemble de la population ».La frustration est palpable, l’exaspération face au désintérêt des pays occidentaux détériore la relation avec l’Europe. « Au centre Yafa, nous menons des activités culturelles et adaptées aux enfants, explique Mustafa, ce sont des projets civils, presque toujours pour les enfants. Pourtant, pour nous accorder un financement, l’UE nous demande de signer des déclarations condamnant la résistance à l’occupation. Elle le fait parce que c’est Israël qui l’impose. Mais aucun Palestinien ne peut faire ça ».

19/12/2022

  MICHELE GIORGIO
Sondage : sans négociations ni droits, les Palestiniens “votent” pour la lutte armée

Michele Giorgio, Pagine Esteri, 17 /12/ 2022
Traduit par
Fausto Giudice, Tlaxcala 

En faisant défiler les résultats du sondage que vient de publier le Palestinian Center for Policy and Survey Research (Pcpsr), le sociologue Khalil Shikaki n'hésite pas à parler d'un « changement radical survenu en quelques mois » dans l'opinion publique palestinienne, notamment en Cisjordanie. Le chiffre le plus frappant est la forte augmentation, par rapport au sondage précédent, du soutien à la lutte armée contre l'occupation israélienne. « Soixante-douze pour cent des 1 200 personnes interrogées sont favorables à l'émergence de groupes armés similaires à La Tanière des lions », indique Shikaki en faisant référence à l'organisation qui a son fief dans la casbah de Naplouse et qui rassemble des militants de différentes orientations politiques.

L'emblème du groupe armé de Naplouse Arin Al Ousoud (La Tanière des Lions) 

Une croissance que Shikaki voit également comme une conséquence de l'escalade en Cisjordanie où les raids de l'armée israélienne se répètent, presque quotidiennement. Le bilan provisoire des Palestiniens tués en 2022 est de 166, dont des femmes et des mineurs. Dans le même temps, souligne le sociologue, « nous assistons à un net recul du pourcentage de ceux qui soutiennent la solution des deux États (Israël et Palestine), compte tenu de l'absence de négociations diplomatiques ». Le soutien à une résolution négociée du conflit est maintenant de 32%. Il y a dix ans, le soutien était de 55 %.

Le sondage n'a fait que révéler en chiffres ce qui est palpable dans les rues de Cisjordanie. L'absence de toute perspective de solution politique à l'occupation qui a commencé en 1967, et l'intensification de la campagne militaire israélienne, semblent avoir convaincu un nombre croissant de Palestiniens, en particulier les plus jeunes, que la seule option est la lutte armée.

Pendant ce temps, une grande partie de la population perd confiance dans l'Autorité nationale palestinienne (ANP) du président Abou Mazen. 87% des personnes interrogées ont déclaré aux chercheurs du Pcpsr que l'ANP n'a pas le droit d'arrêter les membres des groupes armés pour empêcher les attaques contre l'armée israélienne. 79% se sont également opposés à la reddition des combattants et à la remise de leurs armes à l'ANP.

Ces chiffres prennent une signification encore plus grande si l'on tient compte du fait que la classe moyenne palestinienne - composée principalement d'employés, d'entrepreneurs et de professionnels de l'ANP - a été, au cours des vingt dernières années, largement opposée non seulement à la lutte armée, mais également réticente à soutenir une nouvelle Intifada populaire contre l'occupation, car cela aurait remis en question son statut. Une position qui, expliquent les analystes palestiniens, a changé face à l'insoutenabilité de l'occupation qui dure depuis 55 ans.

Les entrepreneurs, grands et petits, pour ne citer qu'un exemple, ont de plus en plus de mal à opérer dans les marges étroites autorisées par les règles et procédures imposées par l'Administration civile israélienne (AC), qui, pour le compte des forces armées, est chargée de gérer la vie quotidienne de millions de Palestiniens, à l'exception des compétences spécifiques de l’ANP d'Abou Mazen. En accordant des permis de travail en Israël à 140 000 travailleurs palestiniens, l’AC a rendu une proportion importante de familles de Cisjordanie dépendantes de l'État juif, tout en améliorant leurs conditions de vie. En même temps, elle n'a rien fait pour tous les autres.

Les Palestiniens, des travailleurs aux entrepreneurs, sont soumis chaque jour à l'obligation d'obtenir des permis, des autorisations et autres auprès des occupants, tandis que, parfois à quelques centaines de mètres seulement de leurs maisons, les colons israéliens jouissent de la liberté de mouvement et de tous les droits. Ces aspects se reflètent également dans les résultats de l'enquête du Pcpsr.

Et les Palestiniens s'attendent à ce que la situation générale se dégrade lorsque les ministres et les dirigeants de l'aile droite ultra-nationaliste du nouveau gouvernement israélien prendront leurs fonctions. 61% des personnes interrogées pensent que l'exécutif dirigé par Benyamin Netanyahou sera plus extrémiste, 64% s'attendent à ce que le prochain gouvernement expulse des familles palestiniennes du quartier de Cheikh Jarrah à Jérusalem-Est, 68% qu'il évacue de force les Bédouins palestiniens de Khan al-Ahmar, et 58% qu'il modifie le statu quo à la mosquée Al-Aqsa. Des prédictions qui ne sont certainement pas infondées.

 

27/10/2022

Tsahal ne se laisse pas “fragiliser” par les terroristes (parole d'expert)

“L'épisode Abou Aqleh aurait pu fragiliser Tsahal”, mais il n'en a rien été : c'est une des perles de cet “expert” militaire israélien, habitué du studio de la chaîne de propagande israélienne en français i24, interviewé récemment à propos de l'opération destinée à “éliminer le zoo”, comme il appelle les combattants du groupe de Naplouse Arin Al Ousoud (La Tanière des Lions). Notre expert considère en outre que Naplouse se trouve en Israël. Bref, il officialise l'annexion de fait de la Cisjordanie. Deux exemples scolaires du volet médiatique de la guerre contre-insurrectionnelle menée par l'armée la plus morale du monde, en concurrence sérieuse pour ce titre avec l'armée ukrainienne.

 


23/10/2022

JACK KHOURY
Israël est accusé d'avoir exécuté Tamer Al Kilani, un combattant de la Tanière des Lions

Jack Khoury, Haaretz, 23/10/2022
Traduit par Tlaxcala

Le groupe basé à Naplouse a accusé Israël de la mort du militant, Tamer Al Kilani, affirmant qu'un engin explosif avait été fixé sur sa moto.

Le groupe militant palestinien Anir Al Ousoud (La Tanière des Lions)  a imputé à Israël la mort de l'un de ses militants, Tamer Al Kilani, dans une explosion survenue tôt dimanche [à 1h30] dans la ville de Naplouse, en Cisjordanie.

Israël et l'Autorité palestinienne n'ont pas encore publié de déclarations officielles à la suite de l'incident, mais le groupe militant affirme qu'Israël a tué Al Kilani avec l'aide d'un résident local.

La Tanière des Lions a accusé Israël de la mort d'Al-Kilani, ajoutant qu'un jour de deuil a été déclaré à Naplouse. Selon le groupe, le militant a été tué après qu'un engin explosif a été fixé sur sa moto.

 

Une personne non identifiée peut être vue en train d'amener une moto dans une allée de Naplouse - la même moto qu'Al-Kilani conduisait lorsque l'explosion s'est produite.

Une vidéo montrant l'explosion fatale a été publiée et partagée sur les réseaux sociaux de la Tanière des Lions, dont Telegram [https://t.me/areennabluss]. Dans deux des vidéos, on peut voir une personne non identifiée amener une moto dans une allée de Naplouse, la même moto que celle que conduisait Al Kilani au moment de l'explosion. Selon le groupe, cela prouve que le militant a été assassiné et non tué accidentellement.

Les Palestiniens affirment qu'Al Kilani a été grièvement blessé après l'explosion et est décédé peu après.

Tamer Al Kilani. Il avait 33 ans


Les militants d’Anir Al Ousoud sont actifs dans la région de Naplouse, principalement dans la vieille ville et dans le camp de réfugiés de Balata. Leur objectif déclaré est d'affronter les soldats de l'armée israélienne lorsqu'ils entrent dans la ville ou qu'ils viennent escorter les fidèles du Tombeau de Joseph, à la périphérie de la ville. La plupart sont des hommes jeunes et laïques, âgés de 18 à 24 ans, qui ne fréquentent pas les mosquées et ne sont pas influencés par les personnalités religieuses.

 
Photo de groupe d'Arin Al Ousoud, septembre 2022

Logo de la chaîne Telegram du groupe (qui ne publie ses messages qu'en hébreu)

Les responsables de la sécurité israélienne pensent que le groupe est composé de personnes qui étaient auparavant membres d'autres factions et qu'une série d'événements les a conduits à se rebaptiser Anir Al Ousoud.

L'enterrement de Tamer Al Kilani. Jack Khoury écrit : "Naplouse. Des milliers de personnes aux funérailles de Tamer Al Kilani, le militant de la Tanière des Lions. Chaque événement de ce genre ne fait qu'augmenter la colère et la frustration

Pour le Mouloud, anniversaire de la naissance du Prophète de l’Islam, les Lions ont fait une opération de relations publiques dans la Vieille Ville de Naplouse, distribuant des bonbons

21/10/2022

GIDEON LEVY
Des “arsim” avec des armes

Gideon Levy, Haaretz, le 20/10/2022
Traduit par
Fausto Giudice, Tlaxcala

 C'est ainsi que le haut commandement des Forces de défense israéliennes perçoit l'ennemi de l'armée en Cisjordanie : «des  arsim avec des armes ». (« Ars » signifie « proxénète » en arabe, et « voyou » en argot hébreu*.) Dans une série de briefings à huis clos et au moins une interview publique, les dirigeants de l'armée ont décrit la résistance à Jénine et la nouvelle organisation à Naplouse, la « Tanière des Lions», comme des activités d’« arsim ».

La chasse aux arsim près de Naplouse. Photo :  JAAFAR ASHTIYEH - AFP

Du chef d'état-major Aviv Kochavi au chef du commandement central Yehuda Fuchs et jusqu’au bas de l’échelle, ils voient les jeunes hommes armés qui s'opposent aux invasions de l'armée israélienne dans leurs villes et camps de réfugiés comme des arsim. Maintenant, les FDI éliminent les arsim. Six arsim de la Tanière es Lions ont déjà été tués et un a été capturé. Les permis d'entrée en Israël ont été retirés à 164 membres de leurs familles.

Les FDI sont en train d'éradiquer le phénomène des arsim. Une armée de beaux jeunes hommes proprets, les plus moraux de l'univers, face à l'armée des arsim.

C'est dur de savoir ce que veulent dire les officiers supérieurs quand ils parlent d'arsim. Il n'est pas politiquement correct d'appeler un Israélien un ars, mais bien sûr, c'est permis dans le cas d'un Palestinien. Le commandant de la brigade Menashe, le colonel Arik Moyal, a expliqué ce qui s'était passé à Jénine comme suit :

« Des bandes d'arsim qui ont du temps à perdre et jouent aux petits soldats. Ils forment toutes sortes d'unités, de confusion et d'autres absurdités pour leur propre compte … Il y a des arsim qui ont perdu leur sang-froid, et nous devons leur taper sur les doigts maintenant et en finir avec eux », selon l'officier colon de Tapuah, qui est maintenant celui qui a perdu son sang-froid

Mettons de côté ce langage arrogant et méprisable des officiers supérieurs de Tsahal, qui sont des m’as-tu-vu professionnels. Mettons aussi de côté l'humiliation de l'autre. La police des frontières et les policiers dans les unités d'occupation sont de merveilleux exemples de la définition tsahalesque des « arsim armés», certainement pas moins que les jeunes de Naplouse et de Jénine. Le terme « arsim armés » leur convient parfaitement. Ce n'est pas par hasard qu'Israël envoie ses propres « arsim » pour affronter les arsim palestiniens.

Il se peut que la « Tanière des Lions », la nouvelle organisation armée à Naplouse, dont le nom puéril aurait pu être craché par l'ordinateur de Tsahal qui sait donner des noms comme « Formation d’acier » et « Formation de feu » aux divisions de Tsahal, soit composée d'arsim. C'est comme ça quand on grandit dans un camp de réfugiés comme Balata ou Askar, avec un passé de réfugiés, un présent d'occupation et un futur de désespoir : on devient arsim.

Il est difficile de savoir lequel des arsim serait le plus violent s'ils devaient se battre à armes égales, mais dans des conditions d'occupation, les arsim israéliens sont certainement plus violents. Il y a aussi une concurrence sérieuse quand il s'agit de comportement d’arsouille [gredin, voyou, truand], et là je pense que c’est l'ars israélien qui gagne.

Beaucoup de soldats et de policiers dans les territoires ne savent plus comment parler aux Palestiniens, ils savent seulement leur aboyer dessus. Voir la nouvelle description grotesque des « combattants des carrefours/points de passage », voir la police des frontières à Jérusalem-Est ou les soldats de la brigade Kfir, dont le bataillon ultra-orthodoxe Netzah Yehuda, avec de leurs invasions nocturnes de chambres à coucher, de chambres d'enfants.

Il est difficile de penser à un comportement plus « arsimiesque » que cela. Peut-être qu'il est impossible de servir dans les territoires occupés depuis 1967 sans être un ars. Est-ce que le lieutenant-général Kochavi pense vraiment que les soldats qu'il envoie sur les Palestiniens sont moins “arsim” que les lions de la tanière ? De quelle manière exactement ? Plus éduqués ? Plus éthiques ? Plus humains ?

Dégradez dégradez les Palestiniens. Pour ce qui est de la disparité des forces entre la Tanière des Lions et « Netzah Yehuda », qui est le plus fort, le mieux armé, équipé et organisé ? Il y a pas photo. Mais le plus fort n'a aucun avantage éthique dans cette histoire, bien au contraire.

Les arsim de la Tanière prennent des mesures pour protéger leurs maisons, leurs camps et leurs villes, lorsqu'une armée étrangère les envahit. Ils peuvent perdre leur temps et jouer aux petits soldats, selon le diagnostic savant du commandant de brigade Moyal, mais lui et ses soldats n'ont aucun avantage sur eux. « Un soldat noir frappe un soldat blanc », a écrit le dramaturge Hanokh Levin** … « Pleurs dans les chambres et silence dans les jardins ».

NdT

*Le mot arabe ars (jeune berger et par extension, proxénète) a été approprié en hébreu israélien (féminin arsit, pluriel arsim) d’abord pour désigner méliorativement une personne rusée et intelligente. Il a évolué, à partir des années 1970, pour désigner péjopratovement une personne qui est, ou se comporte comme, un petit criminel, qui se vante et prétend être prospère, et, surtout, est apparemment d’origine sépharade (Al Andalous, Maghreb) ou mizrahie (terme fourre-tout englobant tous les juifs originaires du monde arabe, persan, caucasien, berbère, kurde, turc et indien)

**Hanokh Levin (1943-1999) a sans doute été le plus grand dramaturge israélien. Ses deux pièces satiriques Toi, moi et la prochaine guerre (1968) et La Reine de la baignoire (1970), un mix hébreu de Brecht et des Monty Python, mirent à mal l’euphorie suscitée chez les sionistes par la victoire de la Guerre des Six-Jours de 1967.

Une citation de Hanokh Levin, extraite de la pièce Le Patriote :

« Consignes de sécurité dans les territoires occupés

Bienvenue à la résidence du gouverneur militaire de Beit Jarjur.

Instructions de sécurité :

Un homme qui descend la rue en jetant des regards nerveux d'un côté à l'autre et par-dessus son épaule - sera suspecté d'être un terroriste arabe.

Un homme descendant la rue et regardant calmement devant lui - sera suspecté d'être un terroriste arabe à tête froide.

Un homme descendant la rue et regardant le ciel - sera suspecté d'être un terroriste arabe religieux.

Un homme descendant la rue et fixant le sol - sera suspecté d'être un terroriste arabe timide.

Un homme descendant la rue les yeux fermés - sera soupçonné d'être un terroriste arabe somnolent.

Un homme ne descendant pas la rue - sera suspecté d'être un terroriste arabe malade.

Tous les suspects énumérés ci-dessus doivent être arrêtés. En cas de tentative d'évasion, un coup de semonce sera tiré en l'air.

Le corps sera transporté à l'institut médico-légal. »

Sur Hanokh Levin, on peut lire en français Le Théâtre de Hanokh Levin-Ensemble à l'ombre des canons, de Nurit Yaari, Éditions théâtrales, 2008

 

  YANIV KUBOVICH/JACK KHOURY
La Tanière des Lions de Naplouse, un sacré casse-tête pour l’occupant israélien et l’(In)autorité palestinienne

Yaniv Kubovich et Jack Khoury, Haaretz, 12/10/2022
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

La “Tanière des Lions” [عرين الأسد arin al ousoud  גוב האריות gov-ha-ar-ayot, Lion’s Den] est une cellule laïque et inorganisée [une façon de parler, NdT] composée principalement de jeunes hommes palestiniens. En quelques semaines, elle est devenue le principal auteur des tirs contre les soldats israéliens autour de Naplouse
 

Des jeunes de Naplouse attaquent les forces de sécurité de l'(In)autorité palestinienne après l'arrestation de Shtayeh en début d'année. Photo : JAAFAR ASHTIYEH - AFP

Au début de 2022, les responsables de la sécurité israélienne ont noté une augmentation du nombre d'incidents de tirs dirigés contre des cibles militaires israéliennes dans la région de Naplouse, dans le nord de la Cisjordanie. L'augmentation des incidents a été attribuée, à l'époque, à un groupe appelé les Bataillons de Naplouse, qui avait intensifié son activité dans la vieille ville de Naplouse.

Sur la base des renseignements recueillis, les responsables de la sécurité ont manifesté un intérêt particulier pour plusieurs personnalités éminentes du groupe, et il a été décidé de prendre des mesures à leur encontre. En février, après que l'agence de sécurité Shin Bet eut déterminé que quatre membres du groupe prévoyaient d'attaquer des soldats israéliens prochainement, il a été décidé de procéder à leur assassinat ciblé.

Au cours de la journée du 8 février, les troupes de Yamam, l’unité spéciale ce contre-insurrection [“lutte contre le terrorisme”] de la police aux frontières, sont entrées dans le centre de Naplouse pour coincer la bande. Dans l’échange de tirs qui s’est ensuivi, trois membres du groupe palestinien ont été tués – Ashraf al-Mubaslat, Adham Mabrukeh et Mohammed al-Dakheel – qui étaient connus des autorités de sécurité israéliennes comme membres des Bataillons de Naplouse. Un quatrième homme, Ibrahim al-Nabulsi, qui dirigeait le groupe armé, n'était pas présent ce jour-là.

Six mois plus tard, le 9 août, les forces israéliennes ont tué al-Nabulsi, qui se cachait dans la région de Naplouse. Les Forces de défense israéliennes ont alors annoncé qu'il avait fait partie de la bande terroriste de Mabrukeh, qui n'était « pas affiliée à une organisation terroriste » [sic].

Soldats israéliens près de Naplouse, la semaine dernière. Photo  : Majdi Mohammed/AP

Un mois après la mort d'al-Nabulsi, un Israélien qui roulait en voiture près du village palestinien de Hawara en Cisjordanie a été abattu depuis un véhicule qui a fui les lieux. Un groupe appelé La Tanière des Lions, inconnu des autorités israéliennes, a revendiqué la responsabilité de la fusillade. Depuis lors, le groupe, qui a été responsable d'un grand nombre d'attaques armées dans la région de Naplouse, est devenu un problème majeur pour les forces de sécurité israéliennes et pour les forces de sécurité de l'(In)autorité palestinienne.

Les responsables de la sécurité israélienne pensent que le groupe est composé de personnes qui avaient précédemment été membres d'autres groupes et qu'une série d'événements les a amenés à se « rebaptiser » La Tanière des Lions.

Les membres du groupe sont actifs dans la région de Naplouse, principalement dans sa vieille ville et dans le camp de réfugiés de Balata, et leur objectif déclaré est d'affronter les soldats de Tsahal lorsqu'ils entrent dans la ville ou viennent escorter les juifs orthodoxes venant prier au Tombeau de Joseph à la périphérie de la ville. La plupart sont de jeunes hommes laïcs âgés de 18 à 24 ans qui ne fréquentent pas les mosquées et ne sont pas influencés par des personnalités religieuses.

Dans une conversation avec Haaretz, les membres du groupe ont reconnu que leurs opérations étaient centrées sur la réponse aux opérations de l'armée israélienne ou qu'elles étaient lancées au niveau local. « Il n'y a pas de salle d'opération au sens militaire, ni de plans ou d'objectifs officiels », disent-ils. Ils ajoutent qu'ils sont loin d'être une milice organisée et qu'ils ne mènent pas d'opérations telles que celles de la branche militaire du Hamas ou du Jihad islamique dans la bande de Gaza.

Un enregistrement attribué à al-Nabulsi, peu avant sa mort : « Je suis entouré maintenant, j'aime ma mère et je vais mourir comme un martyr. Protégez la patrie, je vous adjure tous de faire le serment de ne pas déposer les armes. »