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30/06/2024

L’homme qui murmure à l’oreille des présidents demande à Uncle Joe de prendre sa retraite

Thomas Friedman, l’éditorialiste star du New York Times, vient de publier l’édito suivant, qui reflète l’état de consternation du camp démocrate. Traduit avec jubilation par Fausto Giudice, Tlaxcala  et illustré par les meilleurs dessins de la presse US. Le débat de jeudi soir sur CNN a été du pain bénit pour les dessinateurs, qui s'en sont donné à cœur joie.
Ossama Hajjaj

Biden est un homme bon et un bon président. Il doit se retirer de la course.

Thomas L. Friedman, The New York Times, 28/6/2024

J’ai regardé le débat Biden-Trump seul dans une chambre d’hôtel de Lisbonne, et cela m’a fait pleurer. Je ne me souviens pas d’un moment plus déchirant de campagne présidentielle usaméricaine de mon vivant, précisément en raison de ce qu’il a révélé : Joe Biden, un homme bon et un bon président, n’a pas intérêt à se représenter. Et Donald Trump, un homme malveillant et un président mesquin, n’a rien appris ni rien oublié. Il est le même canon à eau de mensonges qu’il a toujours été, obsédé par ses doléances - bien loin de ce qu’il faudra pour que l’Amérique soit à la tête du XXIe siècle [sic].

-La wifi déconne: l'image est glauque, gelée et le son est inaudible
-C'est pas la wifi: tu es en train de regarder Joe Biden en débat

Christopher Weyant

La famille Biden et son équipe politique doivent se réunir rapidement et avoir la plus difficile des conversations avec le président, une conversation d’amour, de clarté et de détermination. Pour donner à l’Amérique la meilleure chance possible de dissuader la menace Trump en novembre, le président doit déclarer qu’il ne se représentera pas et qu’il libère tous ses délégués pour la convention nationale du parti démocrate.

Le parti républicain, si ses dirigeants avaient une once d’intégrité, exigerait la même chose, mais il ne le fera pas, parce qu’ils ne veulent pas. Il est donc d’autant plus important que les démocrates fassent passer les intérêts du pays en premier et annoncent le lancement d’un processus public permettant aux différents candidats démocrates de concourir pour l’investiture : assemblées publiques, débats, réunions avec les donateurs, etc. Oui, cela pourrait être chaotique et désordonné lorsque la convention démocrate débutera le 19 août à Chicago, mais je pense que la menace Trump est suffisamment grave pour que les délégués puissent rapidement se rallier à un candidat consensuel.


-Mon handicap est meilleur !
- Mon handicap est meilleur !
-OK, vous êtes tous les deux handicapés

Rick MacKee

 Si la vice-présidente Kamala Harris veut concourir, elle doit le faire. Mais les électeurs méritent un processus ouvert à la recherche d’un candidat démocrate à la présidence qui puisse unir non seulement le parti mais aussi le pays, en offrant ce qu’aucun homme sur cette scène d’Atlanta n’a fait jeudi soir : une description convaincante de la situation actuelle du monde et une vision convaincante de ce que l’USAmérique peut et doit faire pour continuer à le diriger - moralement, économiquement et diplomatiquement [resic].

 
Jeffrey Koterba

Car nous ne nous trouvons pas à une charnière historique ordinaire. Nous sommes au début des plus grandes ruptures technologiques et du plus grand dérèglement climatique de l’histoire de l’humanité. Nous sommes à l’aube d’une révolution de l’intelligence artificielle qui va TOUT changer POUR TOUS - comment nous travaillons, comment nous apprenons, comment nous enseignons, comment nous commerçons, comment nous inventons, comment nous collaborons, comment nous menons des guerres, comment nous commettons des crimes et comment nous les combattons. Cela m’a peut-être échappé, mais je n’ai pas entendu l’expression “intelligence artificielle” mentionnée par l’un ou l’autre des participants au débat.

S’il est un moment où le monde a besoin d’une USAmérique à son meilleur niveau, dirigée par son meilleur niveau, c’est bien maintenant, car de grands dangers et de grandes opportunités se présentent à nous. Un Biden plus jeune aurait pu être ce leader, mais le temps l’a finalement rattrapé. C’est ce qui est apparu douloureusement et inéluctablement jeudi.

M. Biden est l’un de mes amis depuis que nous avons voyagé ensemble en Afghanistan et au Pakistan après le 11 septembre 2001, alors qu’il était président de la commission des Affaires étrangères du Sénat, et c’est donc avec une grande tristesse que je dis tout ce qui précède.

Je suis plus SUPER que toi !, par KAL
 Mais s’il met fin à sa présidence maintenant, en reconnaissant qu’en raison de son âge, il n’est pas en mesure d’effectuer un second mandat, on se souviendra de son premier et unique mandat comme l’une des meilleures présidences de notre histoire. Il nous a évité des mandats consécutifs de Trump, et rien que pour cela, il mérite la médaille présidentielle de la liberté, mais il a également promulgué une législation importante, cruciale pour faire face aux révolutions climatiques et technologiques qui nous attendent.

Jusqu’à présent, j’étais prêt à accorder à M. Biden le bénéfice du doute, car les fois où je me suis engagé avec lui en tête-à-tête, je l’ai trouvé à la hauteur de sa tâche. Il est clair qu’il ne l’est plus. Sa famille et son équipe devaient le savoir. Cela faisait des jours qu’ils se terraient à Camp David pour préparer ce débat capital. Si c’est la meilleure performance qu’ils ont pu obtenir de lui, il devrait préserver sa dignité et quitter la scène à la fin de ce mandat.

S’il le fait, les USAméricains salueront Joe Biden pour avoir fait ce que Donald Trump ne ferait jamais : faire passer le pays avant lui-même.

S’il insiste pour se présenter et qu’il perd face à Trump, Joe Biden et sa famille - ainsi que son équipe et les membres du parti qui l’ont soutenu - ne pourront que voiler leur face.

Ils méritent mieux. L’USAmérique a besoin de mieux. Le monde a besoin de mieux.


L'heure de la retraite a sonné, par Bob Englehart

 

07/05/2024

GABY DEL VALLE
Morts et emprisonnements à la frontière du Texas

Gaby Del Valle, The New York Review of Books, 5/5/2024
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

Gaby Del Valle est une journaliste indépendante spécialisée dans l’immigration, le travail et l’extrême droite. Elle a écrit pour The Baffler, Politico Magazine, The New Republic, The Nation, The Intercept et d’autres médias. En septembre 2019, elle a cofondé avec Felipe de la Hoz la lettre d’information hebdomadaire sur la politique d’immigration BORDER/LINES. @gabydvj

 

 

Alors que Joe Biden et Greg Abbott (gouverneur républicain du Texas]intensifient leur bras de fer sur le blindage de la frontière, les migrants se retrouvent pris entre deux feux.

Immigrants marchant près de la « barrière flottante » dans le Rio Grande (Rio Bravo) près d’Eagle Pass, Texas, 16 juillet 2023. Photo  Suzanne Cordeiro/AFP/Getty Images

Au départ, il s’agissait d’un petit groupe : quelques dizaines de voyageurs dérivant vers la frontière, pleins de peur et d’espoir, unis dans la conviction qu’ils pouvaient changer leur destin. Le long de la route, des personnes bienveillantes s’étaient rassemblées pour leur souhaiter bonne chance, prier pour eux et leur rappeler qu’ils étaient sur la bonne voie. Les rangs du groupe grossissaient à mesure qu’il se rapprochait de la ligne invisible qui sépare les USA du Mexique. Les autorités surveillaient le cortège de loin et probablement de l’intérieur, recueillant des informations sur ses membres, dont certains étaient considérés comme des criminels. Les habitants qui vivent près de la frontière parlaient à voix basse d’une menace de violence. Les nouveaux arrivants semblaient hostiles.

Il y a six ans, le président Donald Trump et le ministère de la Sécurité intérieure ont utilisé un langage similaire pour décrire une caravane de demandeurs d’asile, dont la plupart avaient traversé le Mexique à pied depuis l’Amérique centrale. En février dernier, cependant, ce n’étaient pas des migrants qui se dirigeaient vers la frontière, mais le convoi “Take Back Our Border”, composé de camionneurs, de miliciens et de “patriotes” qui s’étaient mobilisés pour repousser ce qu’ils considéraient comme une invasion de migrants. Les marcheurs, dont certains se sont baptisés “Armée de Dieu”, se sont arrêtés à plusieurs endroits avant de faire une arrivée spectaculaire dans la petite ville de Quemado, au Texas. Des pasteurs portant des chapeaux de cow-boy ont prêché contre l’accueil de l’étranger ; des fidèles ont été baptisés dans des baignoires en fer-blanc ; Ted Nugent a donné un concert.

« Le monde entier a les yeux rivés sur le Texas en ce moment », a déclaré Sarah Palin lors d’un rassemblement de convois à Dripping Springs, à quelque 300 km au nord-est de Quemado. « Il est de notre devoir de nous lever et de nous battre pour ce qui est juste, parce que ce que notre gouvernement fédéral est en train de nous faire en approuvant une invasion est inadmissible, c’est une trahison ». Le Parti patriote unifié de Caroline du Nord, l’un des nombreux groupes qui ont fait le déplacement depuis d’autres États, s’est engagé à protéger la frontière « par bulletin de vote, par choix » ou « par balles, s’il y est contraint ». Le FBI a ensuite arrêté un homme qui a déclaré à des agents infiltrés que son organisation paramilitaire prévoyait de tuer des migrants.

Après les menaces et la fanfare, le convoi s’est dispersé. Certains de ses membres se sont dirigés vers l’Arizona et la Californie, où ils se sont filmés en train de harceler les migrants et les volontaires de l’aide humanitaire. D’autres sont rentrés chez eux, heureux d’avoir fait leur part pour le mouvement. En fin de compte, le convoi n’était rien d’autre qu’une remarquable manifestation de haine, le dernier exemple en date d’une longue tradition d’autodéfense frontalière d’extrême droite. Mais le projet dont il faisait partie s’est avéré moins éphémère. Comme les convois et milices nativistes précédents, l’Armée de Dieu s’est mobilisée non seulement pour s’opposer aux migrants, mais aussi pour soutenir les efforts gouvernementaux visant à contrôler les frontières, menés en l’occurrence par le gouverneur du Texas Greg Abbott.

Au cours des trois dernières années, Abbott a accusé à plusieurs reprises le président Joe Biden de permettre l’invasion des migrants. Lui et ses partisans affirment que le président a ouvert la frontière à des personnes qui n’ont pas le droit de la franchir, qu’il a transformé la patrouille frontalière en une sorte de comité d’accueil et qu’il a laissé le département de la Sécurité publique du Texas et la Garde nationale de l’État se charger de la tâche. En février, treize autres gouverneurs républicains ont afflué à la frontière pour promettre leur soutien à Abbott ; certains ont envoyé leurs propres troupes de la Garde nationale sur place. Des membres républicains du Congrès ont également félicité Abbott pour ce qu’il décrit comme « tenir le cap ».

En réalité, les politiques frontalières fédérales ont été, pour la plupart, extraordinairement sévères sous le président Biden. Il a prolongé le Titre 42, une politique que Trump a invoquée en mars 2020 sous le prétexte de lutter contre la pandémie, ce qui a permis aux douanes et à la protection des frontières (CBP), l’agence mère de la patrouille frontalière, d’“expulser” les migrants qui franchissaient la frontière pour les renvoyer au Mexique. (La CBP a procédé à 1,4 million d’expulsions après l’entrée en fonction de M. Biden et avant avril 2022, date à laquelle il a tenté de lever le titre 42, mais en a été empêché par un tribunal fédéral). À la différence des déportations, les expulsions étaient presque immédiates : les personnes étaient renvoyées quelques minutes ou quelques heures après leur entrée aux USA, sans audience devant un juge de l’immigration. D’un point de vue juridique, ces personnes n’ont jamais été admises sur le territoire usaméricain.

Au total, plus de 2,8 millions d’expulsions ont été prononcées en vertu du titre 42. Pourtant, cette politique n’a pas empêché d’autres migrants de franchir la frontière ; c’est simplement que ceux qui ont essayé ont presque toujours été renvoyés. Des tentatives de franchissement ont également eu lieu sous Trump, mais pour les critiques conservateurs de Biden, elles sont la preuve d’une nouvelle ère d’anarchie.

Des participants écoutent un discours lors du rassemblement du convoi “Take Back Our Border” [Reprenons notre frontière], Cornerstone Children’s Ranch, Texas, 3 février 2024. Photo Sergio Flores/AFP/Getty Images

En mars 2021, alors que peu de choses avaient effectivement changé à la frontière depuis l’entrée en fonction de Biden, Abbott a officiellement lancé sa croisade contre les autorités fédérales chargées de l’immigration. Au début, il a vaguement décrit l’opération Lone Star comme un plan visant à “sécuriser la frontière” en déployant la police de l’État et la Garde nationale du Texas dans plusieurs comtés où le nombre de passages de migrants est élevé. Très vite, des agents ont arrêté des migrants, mais pas pour des raisons liées à l’immigration, du moins pas sur le papier. Abbott a affirmé que près de 60 % des arrestations effectuées dans le cadre de l’opération Lone Star concernaient le trafic de stupéfiants ou des actes de violence, mais bon nombre de ces infractions se produisent loin de la frontière et impliquent des citoyens usaméricains. Les migrants arrêtés pour intrusion criminelle représentent les 40 % restants. (Les accusations d’intrusion sont possibles car près des trois quarts des terres situées le long de la frontière sud du Texas sont des propriétés privées). En mai, en réponse à l’augmentation du nombre de migrants rencontrés, Abbott a publié une déclaration de catastrophe qui lui a donné le droit de construire des clôtures le long de la frontière méridionale de l’État.

À ce jour, les forces d’Abbott ont appréhendé plus de 507 000 personnes dans le cadre de l’opération Lone Star,  ce qui a donné lieu à plus de 41 500 arrestations criminelles. Il présente ces chiffres comme la preuve que son administration a pris des mesures alors que le gouvernement fédéral piétine. Pourtant, en arrêtant les migrants pour violation de propriété et en les détenant dans les prisons locales, la Garde nationale du Texas a contourné la procédure fédérale d’expulsion. Les migrants qui, autrement, auraient été refoulés à la frontière, pourraient désormais demander l’asile.

En mai 2023, lorsque Biden a déclaré que la pandémie était terminée, le titre 42 a expiré, modifiant la directive de la patrouille frontalière. Après avoir expulsé les migrants en masse pendant trois ans, l’agence devait à nouveau traiter toute personne se présentant à la frontière en vertu du titre 8, la loi sur l’immigration qui déclenche les procédures d’expulsion pour les “inadmissibles”. En fait, sous Biden, les expulsions au titre 42 et les admissions au titre 8 ont eu lieu simultanément : tandis que certains migrants étaient expulsés, d’autres se voyaient accorder des “dérogations humanitaires” qui leur permettaient de demander l’asile. Ce système désordonné a semé la confusion parmi les demandeurs d’asile et l’opinion publique usaméricaine. Mais après la levée de l’ordre d’expulsion, les migrants ne pouvaient plus être jetés de l’autre côté de la frontière et abandonnés à leur sort. Désormais, du moins en théorie, ils pourront être entendus par un tribunal.

La procédure de demande d’asile est en elle-même contraignante. Une fois remis à la CBP, les migrants sont soumis à un entretien de “crainte crédible”, au cours duquel les agents déterminent s’ils risquent d’être persécutés dans leur pays d’origine. Les demandeurs qui réussissent l’examen initial reçoivent des avis de comparution devant le tribunal, des mois ou des années plus tard. La menace d’une expulsion plane tout au long du processus ; les personnes qui n’obtiennent pas l’asile sont renvoyées dans le pays qu’elles ont fui.

Au lieu de rétablir cette procédure imparfaite, l’administration Biden a rendu plus difficile l’introduction d’une demande d’asile aux postes frontières officiels et a imposé de nouvelles sanctions à ceux qui ne le font pas. Les demandeurs doivent désormais prendre rendez-vous via une application appelée CBP One avant de pouvoir se présenter à un point d’entrée. Les créneaux d’entretien sont limités à 1 450 par jour, et ils partent vite. Par conséquent, les migrants sont contraints d’attendre en moyenne deux mois au Mexique avant de demander l’asile.

Leur autre option est de braver le désert ou, au Texas, le fleuve, ce qui compromet leurs chances de s’installer durablement aux USA. Alors que le titre 42 arrivait à expiration, l’administration Biden a publié un règlement interdisant à la plupart des personnes qui traversent entre les points d’entrée d’obtenir l’asile, à moins qu’elles n’aient d’abord déposé une demande au Mexique ou dans un autre pays. Ce règlement a également élargi le “renvoi accéléré”, une procédure par laquelle le ministère de la Sécurité intérieure expulse des personnes des USA avec des garanties de procédure limitées. L’administration a affirmé que le règlement punissait les migrants pour avoir « contourné les voies légales » d’entrée dans le pays, c’est-à-dire pour ne pas avoir utilisé l’application foireuse.

En résumé, la procédure mise en place par l’administration Biden après l’expiration du titre 42, qui était censée être « sûre, ordonnée et humaine », a en fait provoqué davantage de dysfonctionnements, de chaos et de morts. S’il s’agissait d’une tentative d’apaisement des critiques conservateurs, elle s’est clairement retournée contre ses initiateurs : ils lui reprochent toujours de ne pas être assez sévère. Les migrants sont pris au milieu de cette impasse politique, bloqués au Mexique par les politiques de Biden, forcés d’emprunter des itinéraires encore plus périlleux par Abbott, et punis à nouveau pour cela par Biden. Mais s’ils déterminent que les risques de rester chez eux sont plus grands que ceux à la frontière, ils tenteront leur chance quelles que soient les mesures mises en place.

*

Depuis des décennies, la Border Patrol et la CBP ont pour mission non seulement de traquer, d’appréhender et d’arrêter les migrants non autorisés, mais aussi de les secourir sur le terrain hostile des zones frontalières. Ceux qui se retrouvent perdus dans le désert de Sonora ou emportés par les forts courants du Rio Bravo peuvent considérer un agent de la patrouille frontalière comme une sorte de sauveur pervers : Les agents de la patrouille frontalière sont à la fois responsables de pousser les migrants sur des routes périlleuses et de les sauver des dangers qu’ils y rencontrent. L’opération Lone Star a modifié cette dynamique, rendant la frontière plus mortelle que jamais.


La Garde nationale du Texas derrière le gouverneur Greg Abbott lors d’une conférence de presse, Eagle Pass, Texas, 4 février 2024. Photo Raquel Natalicchio/Houston Chronicle/Getty Images

 Au début de l’année 2022, le département militaire du Texas, qui supervise la Garde nationale de l’État, a installé des fils de fer barbelé concertina le long de certaines parties de la frontière. La démonstration de force s’est concentrée dans le siège du comté de Maverick, Eagle Pass, une ville d’environ 28 000 habitants située à moins de vingt miles de Quemado. Le directeur de la Sécurité publique du Texas a justifié cette décision en qualifiant la ville de « centre de gravité de la contrebande ».

La frontière est depuis longtemps poreuse dans cette partie du Texas. Le Rio Bravo et une « clôture pour piétons » sont les seuls éléments qui séparent Eagle Pass de la ville mexicaine de Piedras Negras. Même avant l’entrée en fonction de Biden, c’était un lieu de passage pour les migrants, un endroit où ils pouvaient traverser le fleuve à la nage et demander l’asile. En 2019, alors que le nombre de passages dans le secteur Del Rio de la patrouille frontalière a augmenté de 200 % par rapport à l’année précédente, l’agence a érigé des tentes à Eagle Pass pour traiter les demandes. En janvier dernier, le secteur de Del Rio a enregistré le deuxième plus grand nombre d’arrestations, après Tucson, en Arizona.

Depuis 2023, Abbott a largement concentré ses efforts de répression sur une petite partie d’Eagle Pass, le parc Shelby, que la CBP utilisait comme « zone de transit » pour le traitement des migrants. Le parc, l’une des plus grandes zones de loisirs publiques d’Eagle Pass, porte le nom d’un général confédéré qui, en 1865, s’est réfugié au Mexique pour y fonder une colonie d’exilés confédérés ayant juré fidélité à l’empereur Maximilien, installé dans le pays par les Français. En juin dernier, sans l’avis ni l’approbation du conseil municipal, le maire d’Eagle Pass, Rolando Salinas, a délivré une déclaration sous serment transformant le parc de 47 hectares en propriété privée sous son autorité, ce qui a permis aux forces d’Abbott d’arrêter les migrants qui s’y trouvaient sans autorisation. Le mois suivant, une « barrière flottante » de 300 mètres de long est apparue au milieu du fleuve. Elle était conçue pour empêcher les migrants de passer par-dessus et de nager en dessous : ses bouées orange vif étaient séparées par des lames de scie en métal, et un filet anti-plongée se trouvait en dessous.

Le “mur” de bouées a rendu le Rio Bravo pratiquement impossible à traverser à la nage. En août, Jessie Fuentes, un habitant d’Eagle Pass, a déclaré au Texas Tribune que ce mur « nous faisait ressembler à un pays du tiers-monde ». Enseignant à la retraite, né et élevé dans la ville, Fuentes a été l’un des premiers à s’opposer à l’occupation du parc Shelby par Abbott. En juillet, il a intenté une action en justice contre le gouverneur, l’État et le ministère de la Sécurité publique, affirmant que la barrière avait causé un « préjudice imminent et irréparable » à son entreprise de location de kayaks.

Début août, les autorités mexicaines ont repêché deux corps dans la rivière. Ces décès ont marqué un tournant pour de nombreux habitants d’Eagle Pass, dont certains avaient soutenu les initiatives d’Abbott, mais qui ont commencé à changer d’avis. Dans une plainte déposée auprès du département de la Sécurité publique, l’un des policiers dépêchés à la frontière affirme avoir reçu l’ordre de priver les migrants d’eau et de les « repousser dans l’eau pour qu’ils aillent au Mexique ». Il décrit avoir intercepté un homme blessé, qui « a déclaré qu’il avait un enfant coincé dans un piège dans l’eau... Il a extirpé son enfant et, ce faisant, le piège du baril lui a lacéré la jambe ». Deux agriculteurs mariés, Magali et Hugo Urbina, ont demandé au service de sécurité publique d’enlever les barbelés de leur propriété après avoir vu une femme enceinte sortir de la rivière avec du sang coulant le long de ses bras.

Rassemblement de la Coalition frontalière d’Eagle Pass lors du vote au conseil municipal en août 2023

Deux jours avant la découverte des corps, Salinas - le maire qui avait initialement cédé le parc à Abbott - et le conseil municipal ont voté à l’unanimité pour que le parc redevienne une propriété publique. « Il est évident que si c’est inhumain, je ne vais pas dire “Oui, je suis tout à fait d’accord pour que les gens soient lacérés” », a-t-il déclaré avant le vote. Mais deux semaines plus tard, la ville a voté pour « poursuivre les négociations » avec le gouvernement de l’État sur l’utilisation du parc. Depuis, d’autres vies ont été perdues. Le comté de Maverick stocke les corps repêchés dans la rivière dans d’immenses congélateurs qui accueillaient à l’origine les victimes de la Covid-19.

*

La volonté affichée par Abbott de rétablir l’ordre public est probablement illégale. En juillet dernier, le ministère fédéral de la Justice a intenté une action en justice au motif que les bouées du Texas violaient la loi sur les rivières et les ports (Rivers and Harbors Act), qui interdit d’obstruer les eaux navigables sans l’autorisation du corps des ingénieurs de l’armée. Le gouvernement fédéral a demandé à un tribunal fédéral d’ordonner à Abbott de retirer les bouées. Quelques mois plus tard, après que des agents de la patrouille frontalière ont coupé des câbles que l’État avait installés sur les rives du Rio Bravo, le Texas a intenté un procès à l’administration Biden pour destruction illégale d’une propriété de l’État. Jusqu’à présent, les actions en justice ont permis à Abbott de remporter de timides victoires. En octobre dernier, en réponse à la plainte du Texas, un juge fédéral a ordonné aux agents de l’immigration de cesser de démonter les fils de concertina installés à Eagle Pass. Trois mois plus tard, la cour d’appel du cinquième circuit, considérée comme la plus conservatrice du pays, a déclaré que les bouées pouvaient rester en place tant que le gouvernement n’aurait pas statué sur la plainte déposée contre Abbott.

 



Immigrants traversant à gué le Rio Bravo, près d’Eagle Pass, Texas, le 7 janvier 2024. Photo John Moore/Getty Images

En janvier dernier, Abbott a encore fait monter les enchères lorsque la Garde nationale du Texas a pris le contrôle du parc Shelby et a empêché les agents de la patrouille frontalière d’accéder au fleuve. Deux semaines plus tard, après que la Cour suprême a déclaré que la patrouille frontalière pouvait couper les barbelés, il a écrit une lettre accusant le gouvernement fédéral d’avoir ouvert toutes grandes les portes du mur frontalier. Abbott a invoqué à la fois l’article IV de la Constitution, qui « promet que le gouvernement fédéral “protégera chaque [État] contre l’invasion” », et la section 10, clause 3 de l’article I, « qui reconnaît “l’intérêt souverain des États à protéger leurs frontières” ». Le maire Salinas a déclaré que le département de la Sécurité publique du Texas l’avait informé que le gouverneur avait émis une autre déclaration d’urgence lui donnant « le plein contrôle et la garde du parc Shelby », avec effet immédiat.

Ce jeudi, la Garde nationale avait empêché la patrouille frontalière d’entrer dans Shelby Park pour répondre à un appel concernant des migrants qui s’étaient noyés. Le lendemain matin, les corps d’une mère et de ses deux enfants ont été retrouvés dans le Rio Bravo, à proximité. Dans sa lettre, Abbott impute ces noyades à la « politique frontalière anarchique » de la Maison-Blanche, qui, selon lui, « a incité les immigrants illégaux à quitter les 28 points d’entrée légaux situés le long de la frontière sud de cet État - des ponts où personne ne se noie - pour se réfugier dans les eaux dangereuses du Rio Grande ». (En fait, les politiques de Biden - punir les passages illégaux et limiter le nombre de personnes pouvant demander l’asile aux points d’entrée légaux - n’ont pas tant “attiré” les migrants vers le danger que les y ont poussés). Fin mars, après que des centaines de migrants ont franchi une barrière en fil de fer à El Paso, les médias conservateurs ont présenté la situation comme une nouvelle preuve que Biden avait perdu le contrôle de la frontière. Mais il est presque certain que les migrants se rendaient eux-mêmes à la patrouille frontalière.

L’administration Biden, pour sa part, a fait valoir que le Texas avait violé à plusieurs reprises la clause de suprématie de la Constitution, qui confère au gouvernement fédéral l’autorité suprême en matière d’immigration. C’est pourquoi, en 2021, la Garde nationale du Texas a reçu pour instruction d’arrêter les migrants pour violation de propriété, et non pour infraction à la législation sur l’immigration. Au cours des trois années suivantes, Abbott a étendu l’opération Lone Star jusqu’à ce que le Texas entrave indéniablement la capacité du gouvernement fédéral à contrôler l’immigration à la frontière sud. La violation la plus flagrante de la clause de suprématie par le Texas a pris la forme du SB4, une loi signée par Abbott en décembre, mais qui n’est pas entrée en vigueur en raison d’une décision de justice fédérale. Cette loi fait de l’immigration illégale un crime d’État et permet à la police texane d’interroger toute personne dont elle pense qu’elle se trouve dans le pays sans autorisation légale. L’administration Biden n’a pas eu grand-chose à dire sur la question, si ce n’est qu’elle a intenté un procès au Texas pour certaines des mesures prises par  Abbott.

Abbott, quant à lui, a exprimé son opposition à Biden, qu’il a accusé d’utiliser les migrants comme des “pions politiques”. « Nous n’allons pas nous limiter à ce parc », a déclaré le gouverneur en février, quelques jours après le départ du convoi de Quemado. « Nous nous étendons à d’autres zones pour nous assurer que nous augmentons notre niveau de dissuasion et de refus de l’entrée illégale aux USA ». L’occupation du parc Shelby se poursuit, bien qu’il s’agisse essentiellement d’un show : un gouvernement d’État ne peut pas légalement appliquer la loi fédérale sur l’immigration. Même s’il le pouvait, l’histoire ne montre guère que la dissuasion puisse mettre un terme à l’immigration clandestine.

Pendant ce temps, les politiques d’Abbott causent des problèmes plus près de chez nous. En effet, une foule de nouveaux arrivants, munis d’armes et de badges, s’est emparée d’une zone autrefois paisible, faisant naître un sentiment d’insécurité chez les habitants. Le chaos et les dysfonctionnements qui règnent à la frontière ont entraîné la perte de vies innocentes. Le vrai problème, cependant, n’est pas causé par les migrants, mais par les personnes qui se donnent beaucoup de mal pour les empêcher d’entrer.

La Coalition frontalière d'Eagle Pass a planté 700 croix dans le parc Shelby en hommage aux vies perdues le long du Rio Bravo en 2023

 

15/08/2023

ALEJANDRO GRIMSON
Argentine : nouvelle droite, nouveaux défis

Alejandro Grimson, Página 12, 15/8/2023
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

Alejandro Grimson (Buenos Aires, 1968) est un anthropologue argentin, professeur et directeur de thèses de doctorat en anthropologie sociale à l’Institut de Hautes Études Sociales de l’Université San Martín, chercheur principal au CONICET (Conseil national de recherches scientifique et technique). Spécialiste entre autres des inégalités, des discriminations, des migrations, des zones frontalières, des cultures politiques, des identiéts et de l’interculturalité, il est l’auteur de six livres. CV

Le résultat choquant des élections primaires de dimanche donne lieu à d'importants débats. Je considère qu'il est essentiel d'examiner au moins dix questions :

1) La croissance exponentielle de l'extrême droite est un phénomène mondial qui a commencé en 2015 et 2016 avec les triomphes de Trump et de Bolsonaro. Boric et Petro ont remporté leurs scrutins contre des candidats du même type et ces forces font partie de tous les parlements en Europe. Nous sommes dans une nouvelle étape historique, de grande instabilité économique et politique et de renforcement des forces d'extrême droite.

2) Au niveau mondial, cette droite radicalisée s'est manifestée de deux manières. Soit par l'émergence de nouvelles forces, comme Vox en Espagne, soit par la radicalisation des partis traditionnels, comme aux USA. En Argentine, les deux se produisent en même temps. Ces droites ont des agendas économiques différents dans le monde entier et ne cadrent pas toutes facilement avec les stéréotypes sur les vieilles extrêmes droites.

3) Dans le cas de l'Argentine, il s'agit de néolibéraux en surrégime. Ils ont des candidats liés à la dictature et d'autres qui font partie de la vie démocratique depuis des décennies. Au fond, ils sont xénophobes, l'écrasante majorité est anti-droits des femmes et anti-diversité, mais ils sont ambivalents parce qu'ils ne pensent pas tous de la même façon et aussi parce que pour l'instant ce ne sont pas ces aspects qui opèrent dans la société. Ce qui fonctionne, c'est l'invention d'une issue prétendument simple à une crise économique déjà insupportable. La “dollarisation”, la “caste” et la promesse de répression et d'ordre ont conduit à cette performance électorale.

12/01/2022

MEDEA BENJAMIN/NICK DAVIES
Hé, les USA ! Vous avez largué combien de bombes aujourd'hui ?

Medea Benjamin et Nicolas J. S. Davies, CodePink, 10/1/2022
Traduit par
Fausto Giudice, Tlaxcala

Le Pentagone a enfin publié son premier Airpower Summary depuis l'entrée en fonction du président Biden il y a près d'un an. Ces rapports mensuels sont publiés depuis 2007 pour documenter le nombre de bombes et de missiles largués par les forces aériennes dirigées par les USA en Afghanistan, en Irak et en Syrie depuis 2004. Mais le président Trump avait cessé de les publier après février 2020, entourant de secret la poursuite des bombardements usaméricains.

Août 2021 : une frappe de drone US à Kaboul a tué 10 civils afghans. Photo : Getty Images

Au cours des 20 dernières années, comme le documente le tableau ci-dessous, les forces aériennes usaméricaines et alliées ont largué plus de 337 000 bombes et missiles sur d'autres pays. Cela représente une moyenne de 46 frappes par jour pendant 20 ans. Ce bombardement sans fin n'a pas seulement été mortel et dévastateur pour ses victimes, mais il est largement reconnu comme portant gravement atteinte à la paix et à la sécurité internationales et diminuant la position de l'USAmérique dans le monde.

Le gouvernement et l'establishment politique usaméricains ont remarquablement réussi à maintenir le public usaméricain dans l'ignorance des conséquences horribles de ces campagnes de destruction massive à long terme, ce qui leur a permis de maintenir l'illusion du militarisme usaméricain comme force du bien dans le monde dans leur rhétorique politique intérieure.

Aujourd'hui, même face à la prise de pouvoir par les talibans en Afghanistan, ils redoublent d'efforts pour vendre ce récit contrefactuel au public usaméricain afin de rallumer leur vieille guerre froide avec la Russie et la Chine, augmentant ainsi de façon spectaculaire et prévisible le risque de guerre nucléaire.       

Les nouvelles données Airpower Summary révèlent que les USA ont largué 3 246 bombes et missiles supplémentaires sur l'Afghanistan, l'Irak et la Syrie (2 068 sous Trump et 1 178 sous Biden) depuis février 2020.

La bonne nouvelle est que les bombardements usaméricains sur ces 3 pays ont considérablement diminué par rapport aux plus de 12 000 bombes et missiles qu'ils ont lâchés sur eux en 2019. En fait, depuis le retrait des forces d'occupation usaméricaines d'Afghanistan en août, l'armée US n'a officiellement mené aucune frappe aérienne dans ce pays, et n'a largué que 13 bombes ou missiles sur l'Irak et la Syrie - ce qui n'exclut pas des frappes supplémentaires non signalées par des forces sous le commandement ou le contrôle de la CIA.

Les présidents Trump et Biden ont tous deux le mérite d'avoir reconnu que des bombardements et une occupation sans fin ne pouvaient pas assurer la victoire en Afghanistan. La rapidité avec laquelle le gouvernement mis en place par les USA est tombé aux mains des talibans une fois le retrait usaméricain engagé a confirmé que 20 ans d'occupation militaire hostile, de bombardements aériens et de soutien à des gouvernements corrompus n'ont finalement servi qu'à ramener le peuple afghan, las de la guerre, sous la coupe des talibans.

La décision insensible de Biden de faire suivre 20 ans d'occupation coloniale et de bombardements aériens en Afghanistan par le même type de guerre de siège économique brutale que les USA ont infligée à Cuba, à l'Iran, à la Corée du Nord et au Venezuela ne peut que discréditer davantage l'USAmérique aux yeux du monde.

Il n'y a eu aucune demande de reddition de comptes pour ces 20 années de destruction insensée. Même avec la publication des Airpower Summaries, l'horrible réalité des guerres de bombardement usaméricaines et les pertes massives qu'elles infligent restent largement cachées au peuple usaméricain.

De combien des 3 246 attaques documentées dans l'Airpower Summary depuis février 2020 étiez-vous au courant avant de lire cet article ? Vous avez probablement entendu parler de l'attaque de drone qui a tué 10 civils afghans à Kaboul en août 2021. Mais qu'en est-il des 3 245 autres bombes et missiles ? Qui ont-ils tué ou mutilé, et quelles maisons ont-ils détruites ?

09/11/2021

RYAN DEVEREAUX
Tras 14 meses en prisión, juicio a la activista indígena Amber Ortega por protestar contra el muro de Trump

Ryan Devereaux, The Intercept, 3/11/2021
Traducido del inglés por
Sinfo Fernández, Tlaxcala 

Ryan Devereaux es un galardonado periodista usamericano de investigación que cubre temas de justicia penal, aplicación de la ley de inmigración y seguridad nacional. Ha informado sobre la guerra contra el narcotráfico en México y fue uno de los principales reporteros de la premiada serie de The Intercept “Drone Papers”, en la que sacó a la luz una campaña antiterrorista de EE. UU. en el noreste de Afganistán que tuvo graves consecuencias para los civiles sobre el terreno. Ganador del Premio de Periodismo Online 2017 a la mejor redacción de reportajes para una pequeña redacción, Devereaux ha informado sobre las prácticas policiales desde la ciudad de Nueva York hasta Ferguson, Missouri. Devereaux recibió el premio 2020 del Deadline Club al mejor reportaje periodístico o digital por “Bodies in the Borderlands” (Cuerpos en la frontera), una investigación de un año sobre la represión de la administración Trump contra los voluntarios de ayuda humanitaria que prestan asistencia a los migrantes en el desierto de Arizona. Ha informado ampliamente sobre el Departamento de Seguridad Nacional y, en 2019, reveló una operación conjunta de recopilación de inteligencia entre EE. UU. y México dirigida contra periodistas, abogados y defensores de la inmigración en la frontera entre ambos países; ha hecho el seguimiento de las protestas por la separación de familias por parte de una empresa de inteligencia privada; y se ha infiltrado en un grupo secreto y profundamente controvertido de Facebook utilizado por miles de agentes actuales y antiguos de la Patrulla Fronteriza, incluido el jefe de esta. Antes de colaborar con The Intercept, Devereaux trabajó en el Guardian US. Sus trabajos se han publicado también en Rolling Stone, The Nation y Village Voice. Vive en Brooklyn, Nueva York.

Amber Ortega fue detenida por bloquear la construcción en tierras sagradas del sur de Arizona. Ahora se enfrenta a un juicio en Tucson.

Amber Ortega, una activista de la tribu hia ced o’odham y tohono o’odham posa ante el Monumento Nacional Organ Pipe Cactus el 9 de noviembre de 2019. (Foto: Kitra Cahana/MAPS para The Intercept)

Han pasado cuatro meses desde que Amber Ortega, miembr@ de la tribu hia ced o'odham, de 35 años, fue detenida por bloquear la construcción del muro fronterizo que amenazaba un oasis sagrado del desierto en el sur de Arizona. Ortega fue detenida junto con Nellie Jo David, otra mujer hia ced o'odham, en el manantial de Quitobaquito Springs, un ecosistema de fama mundial situado en el extremo sur del Monumento Nacional Organ Pipe Cactus que ha sido un centro de tradición cultural y espiritual para los o'odham durante miles de años.

Bajo el mandato del presidente Donald Trump y para abrir paso al muro, los contratistas del gobierno atravesaron el prístino hábitat desértico de Organ Pipe en vehículos de varias toneladas, bombeando cientos de miles de galones de agua del acuífero que sustenta los manantiales y destrozando secciones de un cementerio cercano con potentes explosivos. En septiembre de 2020, Ortega y David estaban rezando en los manantiales cuando se encontraron con uno de los equipos de construcción. La pareja se sentó encima de los vehículos del equipo y les dijo que no eran bienvenidos. Los trabajadores llamaron a los equipos tácticos de los agentes de la Patrulla Fronteriza y de la policía del parque, y Ortega y David fueron detenidas.

 

Por un delito menor que normalmente se resuelve con una multa por allanamiento, las dos mujeres fueron desnudadas, encadenadas y conducidas a una cárcel gestionada con carácter privado a unos 210 kilómetros de distancia, donde las mantuvieron incomunicadas, sin poder acceder a un abogado, durante casi 24 horas. Al principio de su caso, un abogado designado por el tribunal le dijo a Ortega que era probable que los esfuerzos para luchar contra sus cargos, que conllevan una condena máxima de seis meses, pudieran acabar en fracaso. Ortega decidió no seguir con ese abogado. Aunque comprende su opinión, no luchar no era una opción para ella.

 

“Quería seguir adelante para concienciar sobre la opresión que hemos sufrido los nativos, los o'odham. Siempre nos han negado tener voz”, dijo Ortega a The Intercept. “El gobierno de Estados Unidos nos ha arrebatado nuestros derechos y el acceso a las tierras, a los lugares sagrados, y esto ha venido sucediendo desde la colonización”.

 

El jueves, Ortega se declarará no culpable en su caso y argumentará ante un tribunal de Tucson que las acciones por las que fue detenida estaban arraigadas en creencias espirituales profundamente enraizadas. El nuevo abogado de Ortega, Paul Gattone, abogado de derechos civiles con sede en Tucson, cree que su caso es sólido. “Es una joven indígena que tiene creencias muy arraigadas, religiosas y culturales, por eso estaba allí”, dijo Gattone a The Intercept. “Debido a esas creencias culturales y religiosas, se sintió obligada a actuar, y eso es lo que hizo”.

 

El juicio marca la primera instancia de la administración de Biden, que prosigue con la persecución de la era de Trump contra una defensora de las tierras fronterizas en Arizona, y la segunda vez en los últimos años en la que una activista del estado ha articulado una defensa de la libertad religiosa en respuesta a los cargos de alto perfil vinculados al aparato de seguridad fronteriza del gobierno. El trabajador humanitario Scott Warren, a quien la administración de Trump acusó de contrabando de personas por proporcionar ayuda a los migrantes en el desierto, realizó una exitosa defensa de la libertad religiosa contra dos intentos de procesamiento federal en 2019. Sustentado por el Servicio de Parques Nacionales, el caso de Ortega hace que el Departamento del Interior la procese por intentar detener la misma construcción contra la que la propia funcionaria principal de la agencia, y primera secretaria nativa americana, Deb Haaland, se había manifestado ya como miembr@ del Congreso.

 

03/11/2021

WIM LAVEN
La crisis en Sudán representa una lección para USA

Wim Laven, PeaceVoice, 28/10/2021
Traducido del inglés por
Sinfo Fernández, Tlaxcala 
 

Wim Laven, doctor en gestión de conflictos internacionales, imparte cursos de ciencias políticas y resolución de conflictos en la Universidad Estatal de Kennesaw, en Georgia (USA), y forma parte del Consejo de administración de la Asociación Internacional de Investigación sobre la Paz. Pertenece al equipo editorial de la revista The Peace Chronicle y contribuye frecuentemente con artículos de opinión para su sindicación por PeaceVoice, un programa del Oregon Peace Institute.

Hace unos 2.700 años, un esclavo narrador llamado Esopo contaba cuentos sobre temas políticos, religiosos y sociales que se hicieron populares por sus dimensiones éticas y que se han utilizado como fábulas infantiles por la moral y la sabiduría que transmiten.

En “Los cuatro bueyes y el león”, Esopo habla de un poderoso león que merodea por un campo en busca de una buena comida. Los cuatro bueyes que lo habitan se colocan rabo contra rabo y le ofrecen al león los cuernos sin importar la dirección en la que se les aproxime. Un día, sin embargo, una discusión hace que los cuatro bueyes tomen caminos distintos. Por sí solos, los bueyes no tienen ninguna posibilidad de enfrentarse al león, que los va eliminando uno a uno con gran facilidad.

 La moraleja de la historia es que la unión hace la fuerza y que la discordia debilita.

 Las cuestiones de seguridad colectiva son eternas. En Estados Unidos, la seguridad colectiva era tan importante que el Compromiso de las 3/5 partes (que convierte a los esclavos en 3/5 partes de una persona a efectos del censo y del poder político), que infló el poder de los estados esclavistas, la prohibición de la abolición de la esclavitud (el artículo I, sección 9, de la Constitución impedía al Congreso prohibir la importación de esclavos antes de 1808) y el colegio electoral (el esclavista de Virginia James Madison admitió célebremente que el voto directo del Presidente era lo “más adecuado”, pero que perjudicaría al Sur porque tenían muchos esclavos sin derecho a voto) perseguía el objetivo de  crear “unidad”.

El compromiso es un esfuerzo estratégico en el que las partes de una disputa hacen concesiones -renuncian a parte de sus demandas- para lograr otros objetivos o satisfacer otras necesidades.


Sudán es actualmente noticia porque los militares han disuelto la alianza entre grupos militares y civiles, bloqueando así el Consejo Soberano de reparto de poder y el gobierno de transición acordado. Para ser claros, la transición de la brutalidad de las tres décadas de poder de Omar al-Bashir, que terminó en una
insurrección popular no violenta en 2019, a un gobierno civil democrático, estaba en un terreno inestable porque no había un Consejo Soberano electo.

Viñeta de
Nayer Talal Nayer, Etiopia