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15/05/2024

ALEX COCOTAS
“Nous sommes tous des (faux) Juifs allemands” : du mea culpa au déguisement, raison d’État sur fond de psychodrame collectif

Alex Cocotas , The Baffler, 9/5/2024
Traduit par
Fausto Giudice, Tlaxcala

Alex Cocotas est un écrivain et photographe californien vivant à Berlin.

Après le 7 octobre, des hommes politiques allemands ont proposé de retirer la nationalité à des citoyens allemands, de restreindre les droits civils des résidents étrangers non ressortissants de l’UE et de limiter le nombre d’enfants issus de l’immigration pouvant fréquenter une école donnée, ces propositions étant présentées comme des moyens de préserver et de soutenir la « vie juive » dans le pays. Un homme politique allemand, accusé de manière crédible d’avoir nourri des sympathies néo-nazies dans sa jeunesse, a imputé l’antisémitisme du pays aux immigrés. Le plus grand journal allemand, Bild, a publié un manifeste en cinquante points sur ce que signifie être allemand ; le numéro quarante-sept dit : « L’Allemagne a un cœur pour les enfants. Ils ne sont pas battus mais promus » [« Allemagne, nous avons un problème !», Bild, 29/10/2023, publié simultanément en allemand, anglais, arabe, turc et russe]. Un éminent journaliste allemand a publié un article intitulé : « Les Juifs ou les Aggro-Arabes : nous devons décider qui nous voulons garder » [“aggro” = raccourci d’agressif, mot d’argot anglo-US entré dans le vocabulaire allemand pour désigner des extrémistes, de préférence arabo-musulmans ou désignés tels NdT]. Le commissaire à l’antisémitisme du Bade-Wurtemberg, qui n’est pas juif, a écrit : « Les nazis cachaient encore leurs meurtres de masse, alors que le Hamas les célébrait dans les médias, comme Daesh avant eux ».

Staatsräson, par petwall, 2013

En Allemagne, tout n’est pas comme on le croit. Cet arbre ? C’était un juif. Ce bâtiment a été juif. Ce lampadaire était juif. Et les Juifs ? Il semble qu’ils soient tous allemands.

En 2021, l’écrivain Fabian Wolff a publié dans Die Zeit un long essai intitulé “Seulement en Allemagne”. Il s’agit d’un excellent exemple d’un genre d’essai de plus en plus populaire, qu’il énonce dès le deuxième paragraphe : “Je suis juif en Allemagne”.

« Je n’aime pas écrire en allemand, une langue que je ressens souvent comme un fardeau », commence l’essai. L’histoire de la famille de Wolff l’a doté de « la fameuse valise prête sous le lit », écrit-il. « Pourquoi tout est-il si allemand en Allemagne ? », se demande-t-il. L’essentiel de l’essai est consacré à la dénonciation de l’assurance condescendante des attitudes allemandes à l’égard des Juifs, avec une attention particulière pour une campagne menée par le gouvernement assimilant toute critique d’Israël à de l’antisémitisme. Cette campagne a pris forme en 2019, lorsque le gouvernement allemand a qualifié d’antisémites les « méthodes et modèles d’argumentation » du mouvement Boycott, Désinvestissement et Sanctions (BDS). Comme le démontre Wolff dans un cas après l’autre, même une accusation d’antisémitisme suffit à vous exclure de la vie publique en Allemagne. Bon nombre des personnes accusées par les fonctionnaires goys et diligents de l’Allemagne sont elles-mêmes juives.

Wolff termine son essai par un appel à un judaïsme pluraliste qui dépasse les limites de l’instrumentalisation allemande. « Si nous ne pouvons pas choisir notre propre voie », écrit-il, « j’aimerais au moins voir, les yeux ouverts, où la tempête du progrès nous emporte, au lieu d’être bâillonné et d’avoir les yeux bandés par les goyim, qui prétendent, comme toujours, savoir ce qui est le mieux pour moi, ce qui est le mieux pour nous » L’essai est traduit en anglais et Wolff accède à la notoriété internationale. Il semblait représenter un nouveau type d’intellectuel juif allemand : jeune, combatif, ironique, de gauche, capable de faire successivement référence à Susan Taubes et à la musique trap. Mais la publicité a ses dangers.

Il ne semble pas se passer une année sans qu’un scandale n’éclate à propos de l’identité d’un Juif allemand de premier plan.

En juillet 2023, Wolff a publié dans Die Zeit un mea culpa décousu et évasif qui a fait encore plus sensation que son essai “Seulement en Allemagne”. Il pourrait être résumé succinctement comme suit : « Je ne suis pas juif en Allemagne ». Wolff révèle qu’il n’a pas d’ancêtres juifs. C’est un épisode de Curb Your Enthusiasm dans lequel Larry David pense qu’il n’est pas juif, écrit-il, qui l’a amené à s’interroger sur son identité juive. Il se souvient avoir demandé à sa mère après l’épisode : « Maman, est-ce qu’on est vraiment juifs ? » « Pas vraiment », lui a-t-elle répondu, « mais il y a une histoire à propos de grand-mère ». La grand-mère de la grand-mère maternelle de Wolff était supposée être juive, un gage de descendance matrilinéaire à travers les bouleversements de l’histoire juive européenne. « Soudain, se souvient-il, tout semblait avoir un sens. Je savais tout simplement ce que cela signifiait d’être juif ». Si l’histoire était vraie, Wolff aurait été ethniquement un seizième de juif. Mais l’histoire n’était pas vraie : Wolff, hélas, a seize parties de goy.

Aux yeux de nombreux critiques allemands, le plus grand péché de Wolff a été de soutenir, sous couvert d’une identité juive, que le fait de soutenir un boycott d’Israël n’est pas nécessairement antisémite, même s’il ne soutenait pas lui-même un tel boycott. Wolff a ensuite été fustigé comme juif costumé (Kostümjude) par les plus grands journaux juifs et gentils d’Allemagne. Il a été qualifié d’aspirant Kronzeugejude (Juif témoin clé). Contredisant les plaintes de Wolff concernant l’allemand, il s’agit d’une langue dotée d’une capacité étonnamment agile à créer des néologismes sur le mot “juif” :

Alibijude : un juif alibi, qui couvre la rhétorique antisémite (ou anti-israélienne).

Berufsjude : un juif professionnel, un juif de profession

Faschingsjude : un juif de carnaval

Großvaterjude : quelqu’un qui a un grand-père juif

Kostümjude : un juif costumé

Kronzeugejude : un témoin clé juif, qui témoigne de la rhétorique antisémite (ou anti-israélienne).

Meinungsjude : Un juif d’opinion ? Ou un juif par opinion ?

Modejude : Un juif à la mode, ou juif fashionable ?

Schmusejude : un juif câlin, un juif qui fait vraisemblablement des câlins aux Allemands

Vaterjude : quelqu’un qui a un père juif, un juif patrilinéaire

Vorzeigejude : un juif modèle, ou exemplaire

À l’exception peut-être de Vaterjude, ces constructions sont des termes péjoratifs pour désigner le fait de se faire passer pour juif ou d’utiliser son identité juive à des fins lucratives. Loin d’être une aberration, la révélation de l’identité juive fabriquée par Wolff s’avère être une sorte de tradition allemande. Il ne semble pas se passer une année sans qu’un scandale impliquant l’identité d’un éminent Juif allemand n’éclate.

Günther Schäfer, La Patrie, East Side Gallery, Berlin

 Avant Wolff, le cas le plus célèbre était celui de Marie Sophie Hingst, une écrivaine et historienne populaire. Son blog mémorialiste aurait eu un quart de million de lecteurs réguliers. Hingst a écrit que ses grands-parents ont commémoré la Nuit de Cristal en arrêtant les horloges et en attendant le retour des parents perdus dans l’obscurité croissante. Sa grand-mère, dit-elle, organisait des fêtes d’été dans le jardin pour les survivants de l’Holocauste, avec des gâteaux et des discours puissants. En 2019, Der Spiegel a publié un article révélant que Mme Hingst avait inventé vingt-deux victimes de l’Holocauste et soumis de faux documents à Yad Vashem pour étayer son identité supposée. Il n’y avait ni grand-mère juive, ni famille juive. Elle s’est suicidée peu après la publication de ces révélations.

Wolfgang Seibert a été pendant quinze ans le chef de la communauté juive de Pinneberg, une petite ville près de Hambourg. Comme l’a montré une enquête de Der Spiegel en 2018, Seibert a été baptisé protestant par des parents sans ascendants juifs et n’a pas, contrairement à ce qu’il prétend, perdu de parents dans l’Holocauste. Interrogé sur ses origines, Seibert a répondu qu’il s’était toujours “senti” juif. Il existe de nombreux autres cas, chacun impliquant des allégations d’identité juive non fondées : Irena Wachendorff, Manfred Böhme, Peter Loth, Karin Mylius, Frank Borner. Et il ne s’agit là que des cas rendus publics.

Tout le monde n’assume pas une identité juive, certains se contentent des apparences.

La journaliste de télévision Lea Rosh a été le visage public et la défenseure le plus virulente de la campagne pour la construction du Mémorial aux Juifs assassinés d’Europe à Berlin. Rosh a cultivé une aura juive - une Scheinbarjüdin [juive apparente], peut-être. « Je n’ai pas l’air si aryen que ça », s’est-elle réjouie un jour lors d’une interview. Rosh a changé son prénom d’Edith en Lea, et a poursuivi sans succès l’auteure (juive) Ruth Gay qui avait écrit qu’elle l’avait fait pour paraître plus juive. Un jour, elle a farouchement rejeté une proposition visant à placer le mémorial de l’Holocauste en face du Reichstag : « Le “peuple allemand” a-t-il assassiné les Juifs ? Pas du tout ».

Il y a aussi les personnes costumées en juif·ves au sens propre. J’ai vu à deux reprises de grands groupes d’Allemands porter des kippot. Une fois lors d’un rassemblement contre l’antisémitisme et une autre fois marchant avec une importante escorte policière dans la Sonnenallee, le centre de la vie arabe à Berlin, en scandant des slogans pro-israéliens. Tenir aujourd’hui dans cette même rue une pancarte portant l’inscription « Stop au génocide » ou « De la rivière à la mer » conduirait à une arrestation certaine, voire à des poursuites pénales. La police a violemment réprimé les manifestations et même les symboles élémentaires de l’identité palestinienne sur la Sonnenallee dans les semaines qui ont suivi le 7 octobre ; j’ai dû extirper un ami, journaliste (juif) de premier plan, d’une de ces manifestations après qu’il eut été aspergé de gaz au poivre pour avoir filmé l’arrestation brutale d’un homme dont le crime était de brandir un drapeau palestinien. Mais rares sont ceux qui, ici, tentent d’afficher une identité palestinienne.


Il y a quelques années, un de mes amis a été invité à un dîner de shabbat. Les participants donnaient tous l’impression d’être pratiquants. Ils connaissaient les hymnes, les hommes portaient des kippahs, l’un d’entre eux avait même des papillotes. Les hôtes ont insisté pour que mon ami récite les différentes bénédictions. À la suite d’une remarque fortuite au cours du dîner, il a découvert qu’il était le seul juif présent. Il s’agissait d’Allemands qui aimaient mettre en œuvre des rituels juifs et qui voulaient qu’un Juif donne involontairement sa bénédiction.

Beaucoup plus d’Allemands que Wolff, Hingst et Seibert « se sentent juifs ». Les archives de la communauté juive prouvent que de nombreux Allemands ont tenté de « découvrir » leur héritage juif après la guerre. Ici, tout le monde semble avoir une tante juive. Ou bien leurs grands-parents étaient dans la résistance. Ou peut-être était-ce leur grand-tante. D’autres se sont simplement convertis. Walter Homolka s’est converti au judaïsme à l’adolescence et est devenu l’un des rabbins les plus puissants d’Allemagne. Il a effectivement contrôlé les principales institutions associées au judaïsme non orthodoxe en Allemagne et a partagé la scène avec Angela Merkel et d’autres politicien·nes.

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Homolka et Bergoglio, 2015

Homolka n’a pas hésité à parler au nom de tous les Juifs lorsqu’il a déclaré que « la Shoah n’est plus centrale pour ma génération ». Même son intérêt démesuré pour Jésus n’a pas pu entamer son statut d’autorité juive prééminente. Sa chute a commencé en 2022, lorsqu’il est apparu que son partenaire de longue date avait envoyé à un étudiant en cantorat une vidéo d’un pénis en érection caressé en 2019. Homolka a ensuite été accusé d’abus de pouvoir et de discrimination par le Conseil central des Juifs d’Allemagne. Le dénonciateur identifié comme “A” dans le rapport de huit cents pages du Conseil sur l’affaire témoigne que Homolka l’a un jour encouragé à accepter un emploi en Afrique du Sud, où il y avait « d’énormes bites noires » (riesige schwarze Schwänze).

Homolka n’est pas non plus une anomalie dans la vie juive allemande, où les convertis (gerim) jouent un rôle disproportionné. En 2022, une cantor d’origine juive - que l’on pourrait appeler Biojüdin [biojuive] en allemand - a perdu son emploi dans une synagogue berlinoise après avoir dénoncé l’influence des convertis dans la vie juive allemande. Une historienne juive allemande, Barbara Steiner, a écrit un livre sur le phénomène et l’histoire des Allemands qui se convertissent au judaïsme. Elle constate, sans surprise, que les principales motivations de la plupart des convertis sont des manifestations de culpabilité sous une forme ou une autre. Mme Steiner a par ailleurs qualifié Fabian Wolff d’antisémite qui a pris son identité dans le but exprès de critiquer Israël. Elle aussi est une convertie.

Wolff n’était pas le seul intellectuel juif allemand (ou ex-juif) à écrire de tels essais. Il en était peut-être le représentant le plus spectaculaire, mais de tels essais quasi-confessionnels sur l’expérience d’être juif en Allemagne ont été publiés de plus en plus fréquemment au cours de la dernière décennie. La plupart de ces essais ont été publiés dans le feuilleton, la section culturelle des principaux journaux nationaux du pays, qui sont consacrés aux comptes rendus de lecture, aux critiques et aux essais. Autrefois réservés à Heine, Walter Benjamin, Joseph Roth, etc., les feuilletons d’aujourd’hui servent à flatter l’intelligence d’un Allemand cultivé et sont accompagnés d’instructions de lecture. Maintenant je vais discuter, ici nous allons revenir, plus tard j’expliquerai ... .

Les journaux allemands les plus importants ont un Juif domestique - le Hausjude, peut-être - prêt à commenter les questions pertinentes, telles que : qui est Juif, qu’est-ce qui est Juif, l’antisémitisme de la gauche, l’antisémitisme des artistes, l’antisémitisme de tout le monde sauf des Allemands. Certains de ces écrivains sont des célébrités mineures. En Allemagne, il existe un intérêt voyeur et démesuré pour les notions de « culture juive », de « voix juives », de « vie juive », de préférence exemptes d’influences étrangères impures. Il y a à peu près autant de musées juifs en Allemagne (dont beaucoup sont installés dans d’anciennes synagogues) qu’aux USA, un pays dont la population est quatre fois plus importante et qui compte entre trente et soixante fois plus de Juifs, et qui, en tant que tel, n’a pas besoin de les mettre sous verre.

La télévision allemande a récemment diffusé un talk-show primé intitulé Freitagnacht Jews (Juifs du vendredi soir), qui présentait un talk show de Juifs parlant de ce que c’est que de grandir en tant que Juif en Allemagne. Vogue Allemagne a publié un jour une chronique intitulée “Jüdisch heute” (Juif aujourd’hui), avec pour sous-titre : « La vie quotidienne d’une Juive allemande, qui nous emmène en voyage dans un monde que nous connaissons à peine », où les lecteurs pouvaient s’informer sur les corps juifs, le sexe juif, le doute juif, la prise de décision juive et la raison pour laquelle les hommes juifs ne jouissent pas aussi rapidement grâce à la circoncision. Les Allemands aiment la particularité des chagrins sémites, la spécificité des joies juives. Ils aiment la musique klezmer. Ils hocheront solennellement la tête lorsque vous leur direz : « Mon grand-père est un arbre ».

Les grands bénéficiaires de cet intérêt funèbre, à condition qu’ils ne critiquent pas trop Israël, sont les Israéliens. Dans la perception commune, Israélien est synonyme de Juif. La réalité est plus complexe à l’intérieur d’Israël, mais les Israéliens sont néanmoins considérés comme la somme de tout ce qui est juif par un public allemand dont la pensée est encore fondamentalement caractérisée par le cadre de l’État-nation. Et les prédilections culturelles de la société israélienne - une obsession pour l’interrogation sur l’identité israélienne comme une sorte de condition existentielle spéciale, une énorme capacité à s’auto-féliciter et à s’apitoyer sur son sort - s’alignent commodément sur les attentes allemandes en matière de « culture juive », et reflètent largement celles de la société allemande. L’Allemagne est le plus grand marché au monde pour la littérature israélienne traduite.

De nombreuses grandes villes allemandes et certains États ont leur propre festival culturel « israélo-juif » ou "juif", un festival du film « juif », etc. Weh, comme pourrait le dire un personnage de Wagner. L’appareil culturel allemand a allègrement planté sa bouche plissée et mal aimée sur le plus médiocre robinet culturel de l’histoire juive, les élevant au rang d’envoyés de l’expérience juive « authentique » et, ce faisant, a contribué à inculquer l’idée qu’Israël est le « vrai » foyer du peuple juif. Les Allemands ne savent pas vraiment quoi faire des Juifs usaméricains qui, comme ces mystérieuses particules subatomiques, semblent être usaméricains une seconde et juifs l’instant d’après. Lorsqu’un ancien voisin a appris que j’étais juif, il a ressenti le besoin de me dire qu’il aimait le houmous. Un arbre est un arbre.

Une exception usaméricaine à cette dynamique est Deborah Feldman, l’auteure de Unorthodox. L’histoire d’une jeune femme fuyant les liens barbares de l’hassidisme pour l’Allemagne, pays épris de liberté, a mystérieusement trouvé un énorme public ici. « Deborah Feldman est peut-être la juive la plus connue au monde après Anne Frank », peut-on lire dans une récente critique de son nouveau livre. Le thème du livre est la fétichisation des Juifs par l’Allemagne. Ou plutôt : elle était une exception, jusqu’à ce qu’elle commence récemment à critiquer la conception sélective de la « vie juive » en Allemagne, qui marginalise systématiquement les Juifs qui critiquent Israël et ne se conforment pas à cette perception ossifiée.

Les exemples récents ne manquent pas pour étayer ses affirmations. Un centre culturel de Berlin s’est vu retirer son financement après avoir accueilli une veillée pour la paix organisée par un groupe juif, avec l’avertissement que des mesures seraient prises contre « toute forme cachée d’antisémitisme ». Un musée a annulé l’exposition d’une artiste juive qui avait eu la témérité d’appeler à un cessez-le-feu. Lorsque le cinéaste israélien Yuval Abraham et le cinéaste palestinien Basel Adra ont été récompensés au festival du film de la Berlinale pour leur documentaire sur le déplacement forcé de Palestiniens par des colons israéliens, ils ont prononcé des discours appelant à la fin de l’apartheid israélien et des livraisons d’armes de l’Allemagne à Israël.

Kai Wegner, le maire de Berlin, a condamné leurs discours et déclaré qu’il n’y avait « pas de place pour l’antisémitisme à Berlin" »; quelques semaines plus tard, il a été photographié en train de sourire avec Elon Musk, qui a approuvé l’année dernière un post sur les Juifs haïssant les Blancs comme étant « la vérité réelle ». Le ministre de la justice Marco Buschmann (libéral) a menacé de poursuites pénales. La ministre verte de la culture, Claudia Roth, a déclaré que les discours étaient « scandaleusement partiaux » et « caractérisés par une profonde haine d’Israël ». Après avoir été filmée en train d’applaudir le duo, Claudia Roth a précisé que ses applaudissements ne visaient que « le juif-israélien » Abraham.

Tous les essais sur le thème "Je suis juif" ne proviennent pas du feuilleton. Le livre Désintégrez-vous (2018) de Max Czollek, peut-être l’ouvrage de critique juive le plus influent des lettres allemandes contemporaines, a été ostensiblement écrit comme un appel aux armes pour d’autres Juifs. Pourtant, même cette polémique s’adresse clairement à un public de lecteurs goys de feuilleton. Comme Wolff, Czollek s’intéresse à l’attitude des Allemands à l’égard des Juifs. Il affirme que l’existence de Juifs vivants dans l’Allemagne d’aujourd’hui a été utilisée dans un « théâtre de la mémoire » pour réhabiliter l’image que l’Allemagne a d’elle-même. Chacun joue un rôle : les Allemands contrits, les Juifs conciliants.

Czollek identifie correctement de nombreux problèmes pour mieux s’y enfoncer. Un personnage juif de l’une des pièces de Czollek, cité dans Désintégrez-vous, dit : « Nous ne sommes pas vos bonnes victimes, nous sommes les mauvaises ». Bonnes victimes, mauvaises victimes - qu’en est-il du fait de ne pas être une victime ? L’intérêt qu’il porte à la vengeance juive est tout aussi myope. La vengeance peut titiller la fantaisie, mais l’inclusion du nationaliste enragé Meir Kahane (trop raciste même pour Israël) dans son panthéon de vengeurs juifs aurait pu être l’occasion de réfléchir à ce à quoi la « vengeance juive » ressemble réellement dans la pratique, et à qui en subit les conséquences. Bien qu’il prenne parfois soin de préciser qu’il parle de l’Allemagne, il extrapole bien trop souvent pour en faire une histoire universelle. Le sous-titre de la récente traduction anglaise est : « A Jewish Survival Guide for the 21st Century ».

Czollek a lui-même fait l’objet d’une controverse concernant son identité. En 2021, l’écrivain Maxim Biller a accusé Czollek d’être un Meinungsjude et un Faschingsjude pour les gauchistes, parce qu’il n’est pas halachiquement juif. Czollek n’a qu’un seul grand-parent juif. L’affaire Czollek a déclenché une avalanche de feuilleton pendant plusieurs semaines. Mirna Funk, peut-être l’auteure la plus prolifique d’essais sur le thème « Je suis juif·ve en Allemagne », a d’abord réprimandé ses collègues chroniqueurs en affirmant qu’il s’agissait d’une affaire intra-juive, avant d’accuser publiquement Czollek de mentir sur son identité et de le traiter de Großvaterjude. Outre son travail dans le feuilleton, Mme Funk a écrit la rubrique “Jüdisch heute” pour Vogue Allemagne. La guide allemande du judaïsme a appris vers l’âge de vingt ans qu’elle n’était pas juive d’un point de vue halakhique. Elle est une Vaterjüdin ; sa mère est allemande non-juive. La filiation patrilinéaire n’est pas reconnue par les autorités juives en Allemagne, et elle s’est convertie depuis, mais le sujet est une obsession dans son travail, tout comme sa quête, aidée par Wikipédia, pour définir le judaïsme.

Le judaïsme, selon Funk, est « la culture du débat », « la recherche éternelle de soi ». L’identité juive, semble-t-elle dire, consiste à répondre continuellement à la question de savoir ce que signifie être juif. « Ce qu’il y a de plus juif chez le Juif, c’est son autodéfinition. De lui-même, de la religion et du monde » . Après le doute, rien n’est plus juif que l’idée du libre choix. De telles définitions du judaïsme apparaissent régulièrement dans le corpus « Je suis juif en Allemagne ». Wolff cite avec approbation une notice nécrologique sur David Berman : « Lutter avec Dieu, jouer l’étranger ». D’autres ont un côté macabre. « Mon problème », écrit Czollek, « est que ma propre conception de la judéité a commencé par un énorme tas de cadavres. » Ce qui ressort de ces essais, c’est l’identité juive formulée comme un sentiment. C’est le sentiment d’être un étranger, c’est le sentiment de rechercher sa véritable identité. C’est surtout le sentiment de ne pas être allemand.

Et maintenant, comme l’indiquerait la consigne de lecture du feuilleton, j’en viens à l’essentiel : être juif en Allemagne aujourd’hui, c’est abroger la possibilité d’être allemand et juif. « La façon la plus fondamentale dont la Seconde Guerre mondiale a transformé le monde », écrit l’historien Yuri Slezkine, « est qu’elle a donné naissance à un nouvel absolu moral : les nazis en tant que mal universel ». Et ce mal a un contenu ethnique : allemand.

Cette notion a été intégrée dans l’idée que l’Allemagne se fait d’elle-même. Être allemand, c’est être un Täter, un coupable, bourreau. Mais le cœur de l’identité nationale allemande, sa célèbre culture de la mémoire et le « surpassement du passé » sont, paradoxalement, ses relations avec les Juifs, les victimes universelles. En sympathisant avec les Juifs,  opportunément incarnés par l’État d’Israël, et en les soutenant, les Allemands peuvent expier le mal inhérent à l’être allemand, transmis de génération en génération comme s’il était dans leur sang. Les Juifs deviennent les porteurs d’une vertu héritée en tant que victimes.

Pourtant, loin de surmonter le passé, cette dynamique semble exiger qu’il soit constamment reconstitué. Les non-allemands ne peuvent devenir allemands qu’en laissant leur propre histoire à la porte. La ministre de la Culture, Frau Roth, a récemment déclaré au nouveau directeur d’origine camerounaise d’une institution culturelle publique : « Vous faites désormais partie de la Täternation ». Le Cameroun était autrefois une colonie allemande.

Ces tendances dominantes sont devenues de plus en plus évidentes à la suite des violences horribles commises en Israël et en Palestine au cours des derniers mois. Les élites politiques, médiatiques et culturelles allemandes se sont empressées de démontrer qui était le plus proche d’Israël. L’identification a été si intense et la sécurité d’Israël si souvent invoquée comme une question de Staatsräson que je me suis parfois demandé si certains Allemands ne croyaient pas que l’attaque du Hamas était indirectement dirigée contre l’Allemagne. Le vice-chancelier Robert Habeck a prononcé un discours très applaudi dans lequel il a appelé les musulmans d’Allemagne à « prendre clairement leurs distances avec l’antisémitisme afin de ne pas porter atteinte à leur propre droit à la tolérance ». Aucun impératif similaire n’a été donné aux bons citoyens chrétiens d’Allemagne. Friedrich Merz, le leader de la CDU (le parti d’Angela Merkel) qui est largement pressenti pour devenir le prochain chancelier, a proposé de faire de la reconnaissance du droit à l’existence d’Israël une condition d’acquisition de la citoyenneté allemande. Sa proposition est devenue réalité dans l’État est-allemand de Saxe-Anhalt.

Cette formulation de l’identité allemande n’offre pas une vision inclusive pour un pays qui se diversifie. La compagne d’un ami, descendante de « travailleurs invités » kurdes arrivés après la guerre, a été tellement impressionnée par ses leçons scolaires véhémentes sur les méfaits des générations précédentes de l’Allemagne qu’elle a pendant un temps cru que son propre grand-père avait lui aussi massacré des Juifs en Europe pendant la guerre. La germanité en tant que telle n’a pas d’aspiration ni de contenu positif. Il n’est pas difficile de comprendre pourquoi certains voudraient échapper à ce cycle de culpabilité pathologisée, tout comme il n’est pas surprenant que certains fassent un pas de plus dans l’identification aux Juifs.

Le problème de ces notions abstraites du judaïsme est qu’il devient facilement une toile peinte avec la texture et les teintes de vos propres sentiments. Névrose, dislocation, aliénation : il n’y a pas un grand pas entre l’identité juive en tant que sentiment et le fait de « se sentir juif ». Ces sentiments ne sont pas propres aux Juifs, mais la fréquence de ces cas est propre à l’Allemagne. Ils apparaissent rarement dans d’autres pays. Pas même en Autriche, qui partage avec l’Allemagne une histoire nazie, sinon une mémoire historique.

Il est significatif que Wolff, Czollek et Funk soient tous nés à Berlin-Est. Enfermés dans un mur, les Juifs de l’ancienne RDA entretiennent un lien ténu avec la vie juive d’avant-guerre : le fantasme d’une continuité. « Je suis l’un des rares Juifs dont l’histoire en Allemagne remonte à l’avant-guerre », a déclaré Czollek à un journaliste du New York Times. La grande majorité des Juifs d’Allemagne sont aujourd’hui des immigrés de l’ex-Union soviétique. De nombreuses synagogues allemandes fonctionnent comme des centres communautaires russophones. Mais il n’y a pas de continuité car l’Allemagne a assassiné les Juifs. Cette communauté de Juifs allemands, parmi lesquels il était courant de se vanter d’être « plus allemand que les Allemands », a disparu, dispersée. Pourtant, l’allemand reste la langue des plus grandes contributions séculaires de la culture juive à la culture mondiale, et cette communauté perdure comme un cadeau et un exemple pour nous tous, juifs ou non.

Les essais « Je-suis-juif-en-Allemagne » expriment quelque chose comme le contraire : une identité fragile et incertaine dans un pays qui offre aux Juifs de nombreuses assurances mais aucune certitude. Ils définissent "juif" et "allemand" comme une dichotomie d’identités distinctes et irréconciliables. Ces essais célèbrent « l’humour juif » et sont de boput en bout peu drôles. Ils font un clin d’œil à la profondeur et à la facticité de la culture juive et se conforment au schéma de la Weltanschauung locale. Les manières sociales profondément maladroites abondent. C’est presque comme s’ils étaient … allemands.

La farce de cette situation est évidente. Mais la tragédie n’a jamais été loin de la surface, et cette tragédie est apparue plus clairement depuis le 7 octobre, qui s’est produit quelques semaines après que j’ai rendu une première version de cet essai à un autre magazine. Depuis le 7 octobre, les hommes politiques allemands ont autorisé des violations de l’ordre constitutionnel du pays sur la base de sensibilités nébuleuses, créant involontairement un précédent ruineux pour l’arrivée au pouvoir du parti d’extrême droite Alternative für Deutschland. Depuis le 7 octobre, les livraisons d’armes allemandes à Israël ont tellement augmenté que le total pour 2023 a été multiplié par dix par rapport à l’année précédente. Elles représentent désormais 30 % des importations d’armes israéliennes (un autre rapport parle même de 47 %). Et depuis le 7 octobre, ces munitions ont été utilisées par les forces israéliennes pour tuer plus de 14 000 enfants à Gaza. L’Allemagne a un cœur pour les enfants.

Ironiquement, c’est Fabian Wolff qui a le plus plaidé en faveur d’une perspective plus globale parmi les Juifs allemands. Mais il avait aussi un rôle à jouer : celui du juif de gauche. Et pour avoir fondamentalement remis en question l’idée que les Allemands se faisaient d’eux-mêmes, il a payé plus cher qu’un bouffon comme Walter Homolka, qui a récemment recommencé à enseigner à l’université où il exerçait autrefois une influence considérable.

« Rien de ce qui vous appartient vraiment ne peut vous impressionner », a écrit Witold Gombrowicz, qui s’est attaqué au jeu de rôle inhérent à l’identité avec plus d’acuité que n’importe quel autre écrivain. « Si, par conséquent, notre grandeur ou notre passé nous impressionne, c’est la preuve qu’il n’est pas encore entré dans notre sang ».

Que signifie être juif ? Les rares fois où j’ai réfléchi à cette question, la phrase « le plus beau cadeau de ma vie » m’est revenue de manière inexplicable. Alors, merci à tante Estelle, merci à oncle Stan, tante Renata, oncle David, et merci à grand-père Max et grand-mère Stefanie - mariés à Breslau en 1938 - et surtout merci à ma mère.

On raconte que lorsque Pompée conquit Jérusalem, il entra dans le temple et demanda l’accès au sanctuaire intérieur, le Saint des Saints, et se retrouva dans une salle vide.

 

14/05/2014

ALEX COCOTAS
Wie deutsch ist es nicht: die zeremonielle Aufführung des Jüdischseins in Deutschland


Alex Cocotas , The Baffler, 9.5.2024
von Fausto Giudice, Tlaxcala, übersetzt

Alex Cocotas ist ein Schriftsteller aus Kalifornien, der in Berlin lebt.

Nach dem 7. Oktober haben deutsche Politiker vorgeschlagen, deutschen Staatsbürgern die Staatsangehörigkeit zu entziehen, die Bürgerrechte von Nicht-EU-Ausländern einzuschränken und die Zahl der Kinder mit Migrationshintergrund, die eine bestimmte Schule besuchen dürfen, zu begrenzen. Dies wurde als Mittel zur Erhaltung und Förderung des „jüdischen Lebens“ im Land propagiert. Ein deutscher Politiker, dem glaubhaft vorgeworfen wird, in seiner Jugend Neonazi-Sympathien gehegt zu haben, machte die Einwanderung für den Antisemitismus im Land verantwortlich. Deutschlands größte Zeitung veröffentlichte ein fünfzig Punkte umfassendes Manifest darüber, was es bedeutet, deutsch zu sein; Nummer siebenundvierzig lautet: „Deutschland hat ein Herz für Kinder. Sie werden nicht geschlagen, ­sondern gefördert.[Deutschland, wir haben ein Problem!, Bild, 29.10.2023, gleichzeitig auf Deutsch, Englisch, Arabisch, Türkisch und Russisch veröffentlicht]. Ein prominenter deutscher Journalist veröffentlichte einen Artikel mit dem Titel: Die Juden oder die Aggro-Araber: Wir müssen uns entscheiden, wen wir halten wollen“. Der baden-württembergische Antisemitismusbeauftragte, der kein Jude ist, schrieb: „Schon mehrfach habe ich darüber gesprochen & geschrieben, dass die #Nazis ihre Massenmorde noch versteckten - die #Hamas diese aber wie zuvor #Daesh medial zelebriert“.

In Deutschland ist nicht alles so, wie es scheint. Dieser Baum? Er war einmal ein Jude. Dieses Gebäude war einmal ein Jude. Die Straßenlaterne war ein Jude. Und die Juden? Das sind wohl alles Deutsche.

 Im Jahr 2021 veröffentlichte der Schriftsteller Fabian Wolff in Die Zeit einen langen Essay mit dem Titel „Nur in Deutschland“. Es ist ein Paradebeispiel für ein immer beliebter werdendes Essay-Genre, das er im zweiten Absatz ausbuchstabiert: „Ich bin Jude in Deutschland“.

Ich mag es nicht, diesen Text auf Deutsch zu schreiben, manchmal empfinde ich Deutsch an sich als Belastung“, beginnt der Essay. Wolffs Familiengeschichte hat ihm „den berühmten gepackten Koffer unterm Bett“ beschert, schreibt er. „Warum ist in Deutschland alles so deutsch?“, fragt er sich. Der größte Teil des Essays ist dem Angriff auf die herablassende Gewissheit der deutschen Haltung gegenüber Juden gewidmet, mit besonderem Augenmerk auf eine von der Regierung geführte Kampagne, die jede Kritik an Israel mit Antisemitismus gleichsetzt. Diese Kampagne nahm 2019 ihren Lauf, als die deutsche Regierung die „Methoden und Argumentationsmuster“ der Boykott-, Desinvestitions- und Sanktionsbewegung (BDS) als antisemitisch bezeichnete. Wie Wolff in einem Fall nach dem anderen aufzeigt, reicht schon der Vorwurf des Antisemitismus aus, um in Deutschland aus dem öffentlichen Leben ausgeschlossen zu werden. Viele derjenigen, die von Deutschlands fleißigen nichtjüdischen Beamten beschuldigt werden, sind selbst Juden.

Wolff schließt den Essay mit einem Aufruf zu einem pluralistischen Judentum jenseits der deutschen Instrumentalisierung. „Und wenn wir unseren Weg schon nicht selbst wählen können“, schreibt er, , „dann möchte ich wenigstens mit offenen Augen erblicken, wohin uns der Sturm des Fortschritts weht, und nicht, dass mir irgendwelche Goyim die Augen und den Mund zu halten, weil sie sagen, dass sie einfach besser wissen, was gut für mich, für uns ist. Wer weiß, wo sie uns sonst hinbringen“. Der Essay wurde ins Englische übersetzt und Wolff erlangte internationale Bekanntheit. Er schien eine neue Art von deutsch-jüdischem Intellektuellen zu verkörpern: jung, kämpferisch, ironisch, links, fähig, nacheinander Susan Taubes und Trap-Musik zu zitieren. Aber Publicity hat ihre Tücken.

Es scheint kein Jahr zu vergehen, in dem nicht ein Skandal um die Identität eines prominenten deutschen Juden aufgedeckt wird.

Im Juli 2023 veröffentlichte Wolff in der „Zeit“ ein weitschweifiges, ausweichendes mea culpa, das noch mehr Aufsehen erregte als sein „Nur in Deutschland“-Aufsatz [Mein Leben als Sohn]. Man könnte es kurz und bündig so zusammenfassen: Ich bin kein Jude in Deutschland. Wolff offenbart, dass er keine jüdische Abstammung hat. Es war eine Folge von Curb Your Enthusiasm, in der Larry David glaubt, er sei nicht jüdisch, schreibt er, die ihn zunächst dazu brachte, sich nach einer jüdischen Identität zu erkundigen. „Mama, sind wir eigentlich jüdisch?“, fragte er seine Mutter danach. „Na ja, nicht wirklich“, antwortete sie, „aber du weißt ja das mit deiner Großmutter“. Die Großmutter von Wolffs Großmutter mütterlicherseits war angeblich Jüdin, eine Silberkugel der matrilinearen Abstammung über die Umbrüche der europäischen jüdischen Geschichte hinweg. „Plötzlich“, erinnert er sich, „schien alles Mögliche Sinn zu ergeben. Ich wusste einfach, was es bedeutet, jüdisch zu sein“. Wäre die Geschichte wahr, wäre Wolff ethnisch zu einem Sechzehntel jüdisch. Aber die Geschichte war nicht wahr: Wolff ist leider zu sechzehn Teilen Nichtjude.

In den Augen vieler deutscher Kritiker bestand Wolffs größte Sünde darin, unter dem Deckmantel einer jüdischen Identität zu argumentieren, dass die Unterstützung eines Boykotts gegen Israel nicht zwangsläufig antisemitisch sei, obwohl er selbst einen solchen Boykott nicht unterstützte. Wolff wurde daraufhin von Deutschlands größten jüdischen und nichtjüdischen Zeitungen als „Kostümjude“ gegeißelt. Man nannte ihn einen aufstrebenden Kronzeugejuden. Im Gegensatz zu Wolffs Beschwerden über das Deutsche ist dies eine Sprache mit einer erstaunlich flinken Fähigkeit, Neologismen für das Wort Jude zu schaffen:

Alibijude, Berufsjude, Faschingsjude, Großvaterjude, Kostümjude, Kronzeugejude, Meinungsjude, Modejude, Vaterjude, Vorzeigejude.

Mit der möglichen Ausnahme von Vaterjude handelt es sich bei diesen Konstruktionen um pejorative Ausdrücke, die den Anschein erwecken, jüdisch zu sein, oder die jüdische Identität zum eigenen Vorteil ausnutzen. Die Enthüllung von Wolffs erfundener jüdischer Identität ist kein Einzelfall, sondern hat in Deutschland Tradition. Es scheint kein Jahr ohne einen Skandal um die Identität eines prominenten deutschen Juden zu vergehen.

Vor Wolff war der berüchtigtste Fall der von Marie Sophie Hingst, einer bekannten Schriftstellerin und Historikerin. Ihr Blog mit ihren Memoiren hatte Berichten zufolge eine Viertelmillion regelmäßiger Leser. Hingst schrieb, dass ihre Großeltern der Kristallnacht gedachten, indem sie die Uhren anhielten und auf die Rückkehr der verlorenen Verwandten in der hereinbrechenden Dunkelheit warteten. Ihre Großmutter habe für Holocaust-Überlebende sommerliche Gartenpartys mit Kuchen und eindringlichen Reden veranstaltet. Im Jahr 2019 veröffentlichte Der Spiegel einen Artikel, in dem enthüllt wurde, dass Hingst zweiundzwanzig Holocaust-Opfer erfunden und Yad Vashem falsche Unterlagen vorgelegt hatte, um ihre angebliche Identität zu untermauern. Es gab keine jüdische Großmutter, keine jüdische Familie. Kurz nach Bekanntwerden der Enthüllungen nahm sie sich das Leben.

Wolfgang Seibert war fünfzehn Jahre lang Vorsitzender der jüdischen Gemeinde von Pinneberg, einer Kleinstadt in der Nähe von Hamburg. Seibert wurde, wie eine Spiegel-Recherche aus dem Jahr 2018 zeigt, von Eltern ohne jüdisches Erbe protestantisch getauft und hatte, anders als er behauptet, keine Verwandten im Holocaust verloren. Auf die Frage nach seiner Herkunft antwortete Seibert, er habe sich immer jüdisch „gefühlt“. Es gibt noch viele weitere Fälle, in denen es um die Behauptung einer unbegründeten jüdischen Identität geht: Irena Wachendorff, Manfred Böhme, Peter Loth, Karin Mylius, Frank Borner. Und das sind nur die öffentlichen Fälle.

Nicht jeder nimmt eine jüdische Identität an; manche begnügen sich mit dem äußeren Anschein.

Die Fernsehjournalistin Lea Rosh war das öffentliche Gesicht und die lautstärkste Befürworterin der Kampagne zum Bau des Berliner Denkmals für die ermordeten Juden Europas. Rosh hat eine jüdische Aura kultiviert - eine Scheinbarjüdin, vielleicht. „Ich sehe nicht so arisch aus“, schwärmte sie einmal in einem Interview. Rosh änderte ihren Namen von Edith in Lea und verklagte erfolglos die (jüdische) Autorin Ruth Gay, weil sie schrieb, sie habe dies getan, um jüdischer zu klingen. Einst lehnte sie einen Vorschlag, das Holocaust-Denkmal gegenüber dem Reichstag aufzustellen, vehement ab: „Hat das 'deutsche Volk' die Juden ermordet? Wohl kaum“.

Dann gibt es noch die buchstäblichen Kostümjuden. Ich habe zweimal erlebt, wie große Gruppen von Deutschen Kippot trugen. Einmal bei einer Kundgebung gegen Antisemitismus und einmal, als sie mit einer großen Polizeieskorte die Sonnenallee, das Zentrum des arabischen Lebens in Berlin, entlang marschierten und pro-israelische Slogans skandierten. Wer heute auf dieser Straße ein Schild mit der Aufschrift „Stoppt den Völkermord“ oder „Vom Fluss zum Meer“ in der Hand hält, würde mit Sicherheit verhaftet und möglicherweise strafrechtlich verfolgt werden. Die Polizei unterdrückte in den Wochen nach dem 7. Oktober gewaltsam Demonstrationen und sogar grundlegende Symbole der palästinensischen Identität in der Sonnenallee; ich musste einen Freund, einen prominenten (jüdischen) Journalisten, aus einer solchen Demonstration herausholen, nachdem er mit Pfefferspray besprüht worden war, weil er die brutale Verhaftung eines Mannes gefilmt hatte, dessen Verbrechen darin bestand, eine palästinensische Flagge zu halten. Aber nur wenige hier versuchen, sich eine palästinensische Identität anzueignen.

Vor einigen Jahren war ein Freund von mir zu einem Schabbatessen eingeladen. Die Anwesenden machten alle den Eindruck, als seien sie religiös. Sie kannten die Hymnen, die Männer trugen Kippot, einer hatte sogar Payot [Schläfenlocken]. Die Gastgeber bestanden darauf, dass mein Freund die verschiedenen Segenssprüche rezitierte. Durch eine zufällige Bemerkung während des Essens erfuhr er, dass er der einzige Jude unter den Anwesenden war. Es waren Deutsche, die gerne jüdische Rituale zelebrierten und wollten, dass ein Jude unwissentlich seinen Segen sprach.

Viel mehr Deutsche als Wolff, Hingst und Seibert „fühlen sich jüdisch“. Jüdische Gemeindearchive belegen, dass viele Deutsche nach dem Krieg versucht haben, ihr jüdisches Erbe zu „entdecken“. Jeder scheint hier eine jüdische Tante zu haben. Oder die Großeltern waren im Widerstand. Oder vielleicht war es die Großtante. Andere sind einfach konvertiert. Walter Homolka konvertierte als Jugendlicher zum Judentum und wurde später einer der mächtigsten Rabbiner in Deutschland. Er kontrollierte faktisch die wichtigsten Institutionen, die mit dem nicht-orthodoxen Judentum in Deutschland verbunden sind, und teilte die Bühne mit Angela Merkel und anderen Politikern.

Homolka zögerte nicht, im Namen aller Juden zu sprechen, als er sagte: „Die Shoah ist für meine Generation nicht mehr zentral“.  Nicht einmal sein übermäßiges Interesse an Jesus konnte seine Stellung als herausragende jüdische Autorität schmälern. Sein Niedergang begann 2022, als bekannt wurde, dass seine langjährige Lebensgefährtin einem Kantoratsstudenten 2019 ein Video geschickt hatte, auf dem ein erigierter Penis gestreichelt wurde. Homolka wurde daraufhin vom Zentralrat der Juden in Deutschland wegen Machtmissbrauchs und Diskriminierung angeklagt. Der in dem achthundertseitigen Bericht des Rates über die Affäre als „A.“ bezeichnete Informant sagt aus, dass Homolka ihn einst ermutigt habe, einen Job in Südafrika anzunehmen, wo es „riesige schwarze Schwänze“ gebe.

Homolka ist auch keine Anomalie im deutschen Judentum, in dem Konvertiten (Gerim) eine unverhältnismäßig große Rolle spielen. Im Jahr 2022 verlor eine jüdischstämmige Kantorin, die man auf Deutsch als Biojüdin bezeichnen könnte, ihre Stelle in einer Berliner Synagoge, nachdem sie sich gegen den Einfluss von Konvertiten im deutschen Judentum ausgesprochen hatte. Eine deutsch-jüdische Historikerin, Barbara Steiner, hat ein Buch über das Phänomen und die Geschichte der zum Judentum konvertierten Deutschen geschrieben. Sie stellt fest, was vielleicht nicht überrascht, dass die Hauptmotivation der meisten Konvertiten in der einen oder anderen Form Schuldgefühle sind. An anderer Stelle charakterisiert Steiner Fabian Wolff als Antisemiten, der seine Identität mit dem ausdrücklichen Ziel angenommen hat, Israel zu kritisieren. Auch sie ist eine Konvertitin.

Wolff war nicht der einzige deutsch-jüdische (oder ehemals jüdische) Intellektuelle, der solche Essays schrieb. Er war vielleicht der spektakulärste Vertreter, aber solche quasi-konfessionellen Essays über die Erfahrung des Jüdischseins in Deutschland sind in den letzten zehn Jahren immer häufiger veröffentlicht worden. Die meisten dieser Essays sind im Feuilleton, dem Kulturteil der großen überregionalen Zeitungen des Landes, erschienen, der sich Rezensionen, Kritiken und Essays widmet. Einst das Revier von Heine, Walter Benjamin, Joseph Roth usw., dienen die heutigen Feuilletons dazu, der Intelligenz eines gebildeten Deutschen zu schmeicheln, und werden mit Leseanweisungen versehen. Jetzt werde ich diskutieren, hier werden wir zurückkehren, später werde ich erklären...

Die wichtigsten deutschen Zeitungen verfügen über einen Hausjuden, der sich zu relevanten Themen äußert, z. B. zu der Frage, wer Jude ist, was Jude ist, zum Antisemitismus der Linken, zum Antisemitismus von Künstlern, zum Antisemitismus von allen außer Deutschen. Einige dieser Autoren sind selbst kleine Berühmtheiten. In Deutschland gibt es ein übergroßes, voyeuristisches Interesse an hochgradig kuratierten Vorstellungen von „jüdischer Kultur“, „jüdischen Stimmen“, „jüdischem Leben“, vorzugsweise frei von unreinen, ausländischen Einflüssen. In Deutschland gibt es etwa so viele jüdische Museen (viele davon in ehemaligen Synagogen) wie in den Vereinigten Staaten, einem Land mit einer viermal so großen Bevölkerung und etwa dreißig- bis sechzigmal so vielen Juden, das es daher nicht nötig hat, sie hinter Glas zu stellen.

Das deutsche Fernsehen hat vor kurzem eine preisgekrönte Talkshow mit dem Titel „Freitagnacht Jewsausgestrahlt, in der Juden am runden Tisch darüber sprachen, wie es ist, als Jude in Deutschland aufzuwachsen. Die Vogue Deutschland hatte einmal eine Kolumne von Mirna Funk mit dem Titel „Jüdisch heute“ - Untertitel: „Der Alltag einer deutschen Jüdin, die uns auf eine Reise durch eine Welt mitnimmt, die wir kaum kennen“- in der die Leserinnen und Leser etwas über jüdische Körper, jüdischen Sex, jüdische Zweifel, jüdische Entscheidungen und darüber erfahren konnten, warum jüdische Männer dank Beschneidung nicht so schnell kommen können. Die Deutschen lieben die Besonderheit semitischen Leids, die Besonderheit jüdischer Freuden. Sie lieben Klezmer-Musik. Sie werden feierlich mit dem Kopf nicken, wenn man ihnen sagt: „Mein Großvater ist ein Baum“.

Die großen Nutznießer dieses Bestattungsinteresses sind die Israelis, vorausgesetzt, sie kritisieren Israel nicht zu sehr. In der allgemeinen Wahrnehmung ist „israelisch“ ein Synonym für „jüdisch“. Innerhalb Israels ist die Realität komplizierter, aber Israelis werden dennoch von einer deutschen Öffentlichkeit, deren Denken immer noch grundlegend von einem nationalstaatlichen Rahmen geprägt ist, als die Summa aller jüdischen Dinge angesehen. Und die kulturellen Vorlieben der israelischen Gesellschaft - die Besessenheit, die israelische Identität als eine Art besondere existenzielle Bedingung zu hinterfragen, eine enorme Fähigkeit zur Selbstverherrlichung und zum Selbstmitleid - stimmen bequem mit den deutschen Erwartungen an die     „jüdische Kultur“ überein und spiegeln weitgehend die der deutschen Gesellschaft wider. Deutschland ist der größte Markt für übersetzte israelische Literatur in der Welt.

Die Existenz der heute in Deutschland lebenden Juden wird in einem „Theater der Erinnerung“ genutzt, um das deutsche Selbstbild zu rehabilitieren. Jeder hat eine Rolle: zerknirschte Deutsche, versöhnliche Juden.

Viele deutsche Großstädte und einige Bundesländer haben ihr eigenes „israelisch-jüdisches“ Kulturfestival oder ein „jüdisches“ Kulturfestival, „jüdisches“ Filmfestival usw.,  das eigentlich Israel, Israel, Israel ist... Weh, wie eine Wagner-Figur sagen könnte. Der deutsche Kulturapparat hat sein verkniffenes, liebloses Maul genüsslich auf den mittelmäßigsten Kulturzapfhahn der jüdischen Geschichte gesteckt und sie zu Abgesandten der „authentischen“ jüdischen Erfahrung erhoben und damit dazu beigetragen, die Vorstellung zu verbreiten, dass Israel die „wahre“ Heimat des jüdischen Volkes ist. Die Deutschen wissen nicht so recht, was sie mit den US-amerikanischen Juden anfangen sollen, die, wie eines dieser mysteriösen subatomaren Teilchen, in der einen Sekunde US-amerikanisch und in der nächsten jüdisch zu sein scheinen. Als ein ehemaliger Nachbar herausfand, dass ich Jude bin, hatte er das Bedürfnis, mir zu sagen, dass er Hummus liebt. Ein Baum ist ein Baum.

Eine US-amerikanische Ausnahme von dieser Dynamik ist Deborah Feldman, die Autorin von Unorthodox. Die Geschichte einer jungen Frau, die aus den barbarischen Fesseln des Chassidismus in das freiheitsliebende Deutschland flieht, fand hier auf mysteriöse Weise ein großes Publikum. „Deborah Feldman ist vielleicht die bekannteste Jüdin der Welt nach Anne Frank“, hieß es kürzlich in einer Rezension zu ihrem neuen Buch. Das Thema des Buches ist die Fetischisierung der Juden in Deutschland. Oder besser gesagt: Sie war eine Ausnahme, bis sie vor kurzem begann, die selektive Auffassung von „jüdischem Leben“ in Deutschland zu kritisieren, die Juden, die Israel kritisch gegenüberstehen und auch sonst nicht in diese verknöcherte Wahrnehmung passen, systematisch ausgrenzt.

An aktuellen Beispielen, die ihre Behauptungen untermauern, herrscht kein Mangel. Einem Kulturzentrum in Berlin wurde die Finanzierung gestrichen, nachdem es eine Friedensmahnwache einer jüdischen Gruppe veranstaltet hatte, die mit der Warnung einherging, dass Maßnahmen gegen „jede versteckte Form von Antisemitismus“ ergriffen würden. Ein Museum sagte die Ausstellung einer jüdischen Künstlerin ab, nachdem diese die Frechheit besessen hatte, zu einem Waffenstillstand aufzurufen. Als der israelische Filmemacher Yuval Abraham und der palästinensische Filmemacher Basel Adra auf der Berlinale für ihren Dokumentarfilm über die Zwangsvertreibung von Palästinensern durch israelische Siedler ausgezeichnet wurden, hielten sie Reden, in denen sie ein Ende der israelischen Apartheid und der deutschen Waffenlieferungen an Israel forderten.

Kai Wegner, der Bürgermeister von Berlin, verurteilte ihre Reden und sagte, es gebe „keinen Platz für Antisemitismus in Berlin“; Wochen später wurde er lächelnd mit Elon Musk fotografiert, der im vergangenen Jahr einen Beitrag über Juden, die Weiße hassen, als „die tatsächliche Wahrheit“ bezeichnete. Justizminister Buschmann (FDP) drohte mit Strafverfolgung. Die grüne Kulturministerin Claudia Roth sagte, die Reden seien „schockierend einseitig“ und „von einem tiefen Hass auf Israel geprägt“. Nachdem sie vor laufender Kamera dabei erwischt wurde, wie sie den beiden applaudierte, stellte Roth klar, dass ihr Beifall nur dem „jüdisch-israelischen“ Abraham galt.

Nicht alle „Ich bin Jude“-Essays stammen aus dem Feuilleton. Max Czolleks 2018 erschienenes Buch Desintegriert euch!, das vielleicht einflussreichste Werk jüdischer Kritik in der zeitgenössischen deutschen Literatur, wurde angeblich als Aufruf zu den Waffen für andere Juden geschrieben. Doch selbst diese Polemik richtet sich eindeutig an ein Publikum nichtjüdischer Feuilletonisten. Wie Wolff interessiert sich auch Czollek für die Haltung der Deutschen gegenüber den Juden. Er argumentiert, dass die Existenz der heute in Deutschland lebenden Juden in einem „Theater der Erinnerung“ zur Rehabilitierung des deutschen Selbstbildes genutzt wird. Jeder hat eine Rolle: zerknirschte Deutsche, versöhnliche Juden.

Czollek stellt zahlreiche Probleme richtig fest, nur um sich selbst noch tiefer in sie hineinzusteigern. Eine jüdische Figur aus einem von Czolleks Stücken, die in Desintegriert euch! zitiert wird, sagt: „Wir sind nicht eure guten Opfer, wir sind die bösen“.  Gute Opfer, böse Opfer - wie wäre es, kein Opfer zu sein? Sein Interesse an jüdischer Rache ist ähnlich kurzsichtig. Rache mag die müßige Fantasie kitzeln, aber dass er den fanatischen Nationalisten Meir Kahane (selbst für Israel zu rassistisch) in sein Pantheon jüdischer Rächer aufnimmt, hätte ein Anlass sein können, darüber nachzudenken, wie „jüdische Rache“ in der Praxis aussieht und wer die Konsequenzen trägt. Obwohl er gelegentlich darauf achtet, zu präzisieren, dass er von Deutschland spricht, extrapoliert er dies viel zu oft zu einer universellen Geschichte. Der Untertitel der neuen englischen Übersetzung lautet: „A Jewish Survival Guide for the 21st Century“.

Czollek war selbst Gegenstand einer Kontroverse über seine Identität. Im Jahr 2021 warf der Schriftsteller Maxim Biller Czollek vor, ein Meinungsjude und Faschingsjude für Linke zu sein, weil er nicht halachisch jüdisch ist. Czollek hat nur einen jüdischen Großelternteil. Die Czollek-Affäre löste eine wochenlange Feuilleton-Bonanza aus. Mirna Funk, die heute vielleicht produktivste Autorin von „Ich bin Jude in Deutschland“-Essays, schimpfte zunächst mit ihren Kollegen, dass es sich um eine innerjüdische Affäre handele, dann beschuldigte sie Czollek öffentlich, über seine Identität zu lügen, und nannte ihn einen Großvaterjuden. Neben ihrer Feuilletonarbeit schrieb Funk zuvor die Kolumne „Jüdisch heute“ für die Vogue Deutschland. Deutschlands Wegweiserin zum Judentum erfuhr erst mit Mitte zwanzig, dass sie halachisch nicht jüdisch ist. Sie ist eine Vaterjüdin; ihre Mutter ist Deutsche. Die patrilineare Abstammung wird von den jüdischen Behörden in Deutschland nicht anerkannt, und sie ist inzwischen konvertiert, aber das Thema ist eine Obsession in ihrer Arbeit, ebenso wie ihre Suche, mit Hilfe von Wikipedia, das Judentum zu definieren.

Das Judentum, so Funk, ist „Diskussionskultur“, „die ewige Suche nach mir selbst“. Eine jüdische Identität, so scheint sie zu sagen, besteht darin, ständig die Frage zu beantworten, was es für einen bedeutet, Jude zu sein. „Das Jüdischste am Juden war seine Selbstdefinition. Über sich selbst, über die Religion und über die Welt“.  „Neben dem Zweifel ist nichts so jüdisch wie die Idee der freien Wahl“. Solche Definitionen des Judentums finden sich regelmäßig im „Ich bin Jude in Deutschland“-Korpus. Wolff zitiert zustimmend einen Nachruf auf David Berman: „Mit Gott ringen, den Fremden spielen“. Andere haben einen makabren Beigeschmack. „Mein Problem“, schreibt Czollek, „ist, dass meine eigene Vorstellung von Jüdischsein mit einem riesigen Leichenberg begann“. Aus diesen Essays geht hervor, dass jüdische Identität als Gefühl formuliert wird. Es ist ein Gefühl, ein Außenseiter zu sein, es ist ein Gefühl der Suche nach der eigenen wahren Identität. Es ist vor allem ein Gefühl, nicht deutsch zu sein.

Und nun komme ich, wie es die Feuilleton-Leseanweisung nahelegt, zum Hauptpunkt: Jude in Deutschland zu sein, bedeutet heute, die Möglichkeit aufzuheben, deutsch und jüdisch zu sein. „Die grundlegendste Art und Weise, wie der Zweite Weltkrieg die Welt verändert hat“, schreibt der Historiker Yuri Slezkine, „war, dass er ein neues moralisches Absolutum hervorbrachte: die Nazis als universelles Übel“. Und dieses Böse hat einen ethnischen Inhalt: Deutsch.

Diese Vorstellung hat sich in das deutsche Selbstverständnis eingeprägt. Deutscher zu sein heißt, ein Täter zu sein, ein Täter. Doch der Kern der nationalen Identität Deutschlands, seiner berühmten Erinnerungskultur und der „Vergangenheitsbewältigung“, ist paradoxerweise sein Verhältnis zu den Juden, den universellen Opfern. Indem die Deutschen sich in die Juden einfühlen und sie unterstützen, die praktischerweise im Staat Israel verkörpert werden, können sie das Böse, das dem Deutschsein innewohnt und von Generation zu Generation weitergegeben wird, sühnen, als ob es ihnen im Blut läge. Juden werden zu Trägern einer ererbten Opfertugend.

Doch weit davon entfernt, die Vergangenheit zu überwinden, scheint diese Dynamik ihre ständige Wiederholung zu verlangen. Nicht-Deutsche können nur deutsch werden, wenn sie ihre eigene Geschichte an der Tür abgeben. Kulturministerin Roth sagte kürzlich zum neuen im Kamerun geborenen Direktor einer staatlichen Kultureinrichtung: „Sie sind ein Teil der Täternation geworden“. Kamerun war früher eine deutsche Kolonie.

Diese vorherrschenden Tendenzen sind nach den schrecklichen Gewalttaten in Israel und Palästina in den letzten Monaten immer deutlicher geworden. Die politischen, medialen und kulturellen Eliten Deutschlands haben sich beeilt zu zeigen, wer am nächsten zu Israel stehen kann. Die Identifikation war so intensiv und die Sicherheit Israels wurde so häufig als Staatsräson beschworen, dass ich mich manchmal gefragt habe, ob einige Deutsche nicht glauben, dass der Angriff der Hamas indirekt auf Deutschland gerichtet war. Vizekanzler Robert Habeck hielt eine vielbeachtete Rede, in der er die Muslime in Deutschland aufforderte, „sich klar vom Antisemitismus zu distanzieren, um ihr eigenes Recht auf Toleranz nicht zu untergraben“. Eine ähnliche Aufforderung an die braven christlichen Bürger in Deutschland blieb aus. Friedrich Merz, der Vorsitzende der CDU (Angela Merkels Partei), der weithin als Spitzenkandidat für das Amt des nächsten Bundeskanzlers gilt, schlug vor, die Anerkennung des Existenzrechts Israels zur Bedingung für den Erwerb der deutschen Staatsbürgerschaft zu machen. Sein Vorschlag ist im ostdeutschen Bundesland Sachsen-Anhalt Realität geworden.

Diese Formulierung der deutschen Identität bietet keine integrative Vision für ein sich diversifizierendes Land. Die Lebensgefährtin eines Freundes, die von kurdischen „Gastarbeitern“ abstammt, die nach dem Krieg ins Land kamen, war von ihrem lautstarken Schulunterricht über die Untaten früherer Generationen in Deutschland so beeindruckt, dass sie kurzzeitig glaubte, ihr eigener Großvater habe während des Krieges ebenfalls Juden in Europa abgeschlachtet. Das Deutschtum als solches hat keinen erstrebenswerten, positiven Inhalt. Es ist nicht schwer zu verstehen, warum manche diesem Kreislauf der pathologisierten Schuld entkommen wollen, so wie es auch nicht überrascht, dass manche die Identifikation mit den Juden noch einen Schritt weiter treiben würden.

Das Problem mit solch abstrakten Vorstellungen vom Judentum ist, dass es leicht zu einer Leinwand wird, die man mit der Textur und den Farben seiner eigenen Gefühle bemalt. Neurotizismus, Dislokation, Entfremdung: Es ist kein großer Sprung von jüdischer Identität als Gefühl zu „sich jüdisch fühlen“. Diese Gefühle sind keine Besonderheit der Juden, aber die Häufigkeit dieser Fälle ist eine Besonderheit Deutschlands. In anderen Ländern tauchen sie selten auf. Nicht einmal in Österreich, das mit Deutschland eine Nazigeschichte, wenn nicht gar ein historisches Gedächtnis teilt.

Es ist bezeichnend, dass Wolff, Czollek und Funk alle in Ost-Berlin geboren wurden. Abgeschottet von der Welt, bieten die Juden der ehemaligen DDR eine schwache Verbindung zum jüdischen Leben der Vorkriegszeit: eine Fantasie des Fortbestands. „Ich bin einer der wenigen Juden, die eine Geschichte in Deutschland aus der Zeit vor dem Zweiten Weltkrieg haben“, sagte Czollek einmal in einem Interview mit der New York Times. Die große Mehrheit der Juden in Deutschland sind heute Einwanderer aus der ehemaligen Sowjetunion. Viele Synagogen in Deutschland fungieren als russischsprachige Gemeindezentren. Aber es gibt keine Kontinuität, weil Deutschland die Juden ermordet hat. Die Gemeinschaft der deutschen Juden, unter denen es üblich war, sich zu rühmen, „deutscher als die Deutschen“ zu sein, ist verschwunden, verstreut. Doch Deutsch bleibt die Sprache der größten säkularen Beiträge der jüdischen Kultur zur Weltkultur, und so bleibt diese Gemeinschaft als Geschenk und Beispiel für uns alle bestehen, ob wir Juden sind oder nicht.

Die „Ich bin Jude in Deutschland“-Aufsätze artikulieren so etwas wie das Gegenteil: eine brüchige, unsichere Identität in einem Land, das Juden viele Zusicherungen und keine Sicherheiten bietet. Sie markieren „jüdisch“ und "„deutsch“ als Dichotomie von unterschiedlichen, unvereinbaren Identitäten. Diese Essays feiern den „jüdischen Humor“ und sind chronisch unlustig. Sie verweisen auf die Tiefgründigkeit und Sachlichkeit der jüdischen Kultur und halten sich an das Schema der hiesigen Weltanschauung. Die sozialen Umgangsformen sind zutiefst unbeholfen. Es ist fast so, als wären sie … deutsch.

Das Problem mit abstrakten Vorstellungen vom Judentum ist, dass es leicht zu einer Leinwand wird, die man mit der Textur und den Farben seiner eigenen Gefühle bemalt.

Die Farce dieser Situation ist leicht erkennbar. Aber die Tragödie hat sich nie weit von der Oberfläche entfernt, und diese Tragödie ist seit dem 7. Oktober, der einige Wochen, nachdem ich den ersten Entwurf dieses Essays an eine andere Zeitschrift geschickt hatte, stattfand, noch deutlicher sichtbar geworden. Seit dem 7. Oktober haben deutsche Politiker auf der Grundlage nebulöser Befindlichkeiten Verstöße gegen die verfassungsmäßige Ordnung des Landes zugelassen und damit unwissentlich einen ruinösen Präzedenzfall für den Fall geschaffen, dass die rechtsextreme Alternative für Deutschland an die Macht kommt. Seit dem 7. Oktober sind die deutschen Waffenlieferungen an Israel so stark angestiegen, dass die Gesamtsumme für 2023 eine Verzehnfachung gegenüber dem Vorjahr darstellt und nun 30 Prozent der israelischen Waffenimporte ausmacht (ein anderer Bericht spricht sogar von 47 Prozent). Und seit dem 7. Oktober haben die israelischen Streitkräfte mit dieser Munition mehr als vierzehntausend Kinder in Gaza getötet. Deutschland hat ein Herz für Kinder.

Ironischerweise war es Fabian Wolff, der sich am stärksten für eine globalere Perspektive der deutschen Juden einsetzte. Doch auch er war eine Rolle: der linke Jude. Und dafür, dass er das deutsche Selbstverständnis grundlegend in Frage gestellt hat, hat er teurer bezahlt als ein Possenreißer wie Walter Homolka, der seit kurzem wieder an der Universität lehrt, an der er einst großen Einfluss hatte.

„Nichts, was einem wirklich gehört, kann einen beeindrucken“, schrieb Witold Gombrowicz, der sich wie kein anderer Schriftsteller, mit dem der Identität innewohnenden Rollenspiel auseinandergesetzt hat. „Wenn uns also unsere Größe oder unsere Vergangenheit beeindruckt, ist das ein Beweis dafür, dass sie noch nicht in unseren Blutkreislauf gelangt ist“.

Was bedeutet es, ein Jude zu sein? Bei den seltenen Gelegenheiten, bei denen ich über diese Frage nachgedacht habe, ist mir unerklärlicherweise immer wieder der Satz „das größte Geschenk meines Lebens“ eingefallen. Und so danke ich Tante Estelle, danke Onkel Stan, Tante Renata, Onkel David und danke Opa Max und Oma Stefanie - verheiratet in Breslau, 1938 - und vor allem danke meiner Mutter.

Es wird erzählt, dass Pompeius, als er Jerusalem eroberte, in den Tempel eindrang und Zugang zum Allerheiligsten verlangte, aber einen leeren Raum vorfand.

 

Maor X