La perle du jour

 « Le public n'est plus dupe des mensonges propagandistes qui résonnent dans les médias. Ces lettres ont été écrites par un petit groupe de radicaux, manipulés par des organisations financées par des fonds étrangers dans le seul but de renverser le gouvernement de droite. Ce n'est pas une vague. Ce n'est pas un mouvement. C'est un petit groupe de retraités bruyant, anarchiste et déconnecté, dont la plupart n'ont pas servi [dans l’armée] depuis des années ». C’est ainsi que Netanyahou a réagi aux pétitions qui se succèdent en rafales, émanant de centaines et de milliers de réservistes de l’armée de l’air, du corps médical militaire, de la marine, demandant au gouvernement d’arrêter de bombarder Gaza pour épargner les Israéliens encore captifs [les fameux « otages », qui sont encore une trentaine en vie plus une trentaine à l'état de cadavres]]. Bibi, qui a 75 ans, n’a pas l’intention, quant à lui de devenir un paisible retraité, ni bruyant ni silencieux. Les pilotes signataires de la première pétition seront rayés des cadres de l’armée génocidaire, ce qui est une bonne chose.

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25/05/2021

Feu sur les Indiens : chronique de la haine à Cali, Colombie

 Victoria Solano, 070, 15/5/2021

Traduit par Fausto Giudice

Victoria Solano est une documentariste et journaliste colombienne, réalisatrice notamment des documentaires 9.70 (Prix National de journalisme Simon Bolivar) et Sumercé.

Être indigène en Colombie, c'était jusqu'à cette semaine vivre sous la menace : garants de la production d'aliments sains et du maintien de la biodiversité, ils sont le plus grand obstacle à l'extractivisme qui cherche à progresser dans le pays. Les populations indigènes de Colombie sont raflées, appauvries et persécutées, en vue de leur extinction. Mais avec les manifestations qui ont pris d'assaut le pays ces 12 derniers jours, une nouvelle étape a été franchie : des civils organisés sont sortis pour leur donner la chasse.

Les premières images ont été transmises en direct.

Une douzaine d'hommes courent le long de la 127ème  rue, une artère secondaire dans l'un des quartiers les plus exclusifs de Cali. La caméra se déplace avec le groupe, on entend une respiration haletante. On entend aussi le bruit des coups de feu et le sifflement des balles qui fendent l'air, passant près, très près. Quelqu'un crie « en bas, dans le coin », en désignant l'endroit d'où ils tirent. Le groupe continue à se déplacer dans la même direction que précédemment - vers l'endroit d'où proviennent les coups de feu - mais pas en ligne droite, mais en se croisant comme un zigzag. La personne qui filme se laisse tomber au sol et pendant quelques secondes, le téléphone portable passe de la caméra frontale à la caméra selfie, on peut voir un homme allongé sur le sol en train de se protéger. C'est un indigène. On ne peut voir que ses yeux noirs. Un foulard rouge et vert couvre une partie de son visage et il porte sur la tête l’écusson du CRIC (Consejo Regional Indígena del Cauca). La caméra étant de nouveau en mode frontal, il se lève et dit : « Ils tirent sur la minga, ils veulent la liquider ».

La minga est une forme d'organisation des communautés indigènes colombiennes. Un mot qui désigne de nombreuses formes de rassemblement et de travail solidaire - d'une récolte à une manifestation. C'est aussi le nom donné à un collectif de plus d'une centaine de communautés indigènes qui ont trouvé dans ce mot ancestral une forme de représentation politique. En Colombie, être indigène, c'est être menacé : la plupart des peuples vivent dans des territoires convoités par l'agrobusiness, les méga-mines et d'autres formes d'accaparement de l'eau et des terres. De nombreuses communautés se consacrent à la production alimentaire agroécologique, à la gestion des semences et à la préservation de la biodiversité. Selon le Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR), 34 peuples autochtones sont en danger d'extinction dans ce pays, soit 60 % ; et 15 % des 4 millions de réfugiés vivant dans le pays sont autochtones, bien qu'ils ne représentent que 2 % de la population. La haine des indigènes - qui expliquera ce qui va se passer - fait vibrer ce pays depuis 500 ans.