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22/08/2024

JAIME JIMÉNEZ
Les va-et-vient de Colombia Humana et de Gustavo Petro

Jaime Jiménez, La Pluma, 22/8/2024
Traduit par 
Fausto GiudiceTlaxcala

L’auteur est un historien et avocat colombien

Au sein de Colombia Humana, le parti fondé par le président Gustavo Petro, il y a eu une grande effervescence à l’occasion de la deuxième assemblée ordinaire du parti qui s’est tenue à Bogota les 17 et 18 août. Il s’agissait d’une affaire tortueuse dès sa convocation, puisqu’il y avait deux assemblées, l’une autoproclamée « populaire », tenue à la CODEMA de Bogotá, et l’autre officielle, à laquelle ont participé le président Petro, des députés, des parlementaires, des délégués, des invités, etc., tenue au centre de congrès CORFERIAS.


Ce texte se réfère à l’Assemblée officielle. Selon des rapports fragmentaires sur les réseaux sociaux, il y a eu des moments de désordre absolu, de cris et de sabotage des interventions de la part de certains participants. L’élection du Conseil de coordination a laissé de nombreux participants satisfaits, d’autres mécontents. Espérons que cet organe trouvera les mécanismes adéquats pour garantir la démocratie interne et éradiquer les coutumes telles que le fait que les listes pour participer aux élections régionales soient choisies à Bogota, ou que les postes gouvernementaux soient choisis en fonction de l’appartenance au cercle d’amis de hauts responsables de l’administration et non en fonction de la trajectoire et de l’engagement de celles et ceux qui occuperaient ces postes, après consultation de la base dans les régions.

Sans aucun doute, l’intervention la plus marquante a été celle du camarade Petro et les lignes qui suivent s’y réfèrent, car ses paroles, ses pauses et ses silences donnent des indices sur la conception que le président de la République a du pays.


1. Petro citoyen libre contre Petro collaborateur et solidaire (organisateur)

Son discours présente une énorme incohérence philosophique : peut-on être un citoyen libre et s’engager dans une organisation populaire ? En principe, oui, du point de vue de la liberté qui accompagne chaque personne d’adhérer ou non à l’organisation de son choix, mais cette liberté est limitée en ce sens qu’elle doit assumer les conclusions et les tâches issues de la délibération populaire, qui devraient avoir un effet contraignant. Ainsi, affirmer « j’ai été en politique plus un homme libre qu’un homme de parti » (minute 13:00 et 25:34), c’est sous-entendre que le membre du parti, du mouvement, du front, de la coalition ou autre, n’est pas soumis à ses décisions, car « je suis un homme libre », « un citoyen libre » qui fait ce qu’il veut, arrive à l’heure qu’il veut, sabote ce qu’il veut, et qui dira « je suis un homme libre », comme le président Petro.

La collaboration, la solidarité, l’amour, pour être efficaces, comme le dirait le prêtre Camilo Torres, exigent une forte dose d’organisation, de discipline et de travail, car il s’agit de construire une nouvelle société. Le président, dans de nombreux discours, dont celui-ci (1:02:20), appelle à l’organisation populaire, mais il pense qu’elle germe spontanément. Le travail des masses prend des années, surtout dans notre pays, qui porte un lourd fardeau de désunion et de jalousies hérité des Espagnols et qui, de plus, a l’épée de Damoclès du terrorisme d’extrême droite suspendue au-dessus de sa tête. L’État doit fournir les instruments permettant de tisser cet univers d’organisations naturelles de manière à devenir un réseau indestructible. L’organisation populaire construite uniquement sur le temps libre des gens et financée par l’argent du marché est faible et vulnérable.

2. Petro avant-gardiste

Il a rappelé avec insistance la « volonté de pouvoir » de son organisation, le M-19 (13:20), qu’ils avaient bien la volonté de puissance, que les autres ne voulaient que participer. Bien qu’il ait mentionné de manière tangentielle les 5000 morts de l’Union Patriotique, il oublie que ce n’est pas seulement le M-19 qui, dans l’opposition, a eu une volonté de pouvoir. Jaime Pardo Leal et Bernardo Jaramillo Ossa, assassinés respectivement en 1987 et 1990, n’avaient-ils pas une volonté de pouvoir ? Les milliers de morts tombés pour défendre une utopie, que ce soit dans l’insurrection ou dans les organisations sociales, n’avaient-ils pas la volonté de pouvoir ?

Il convient d’examiner la matrice politique du M-19. Il s’agit d’une organisation originale, qui plonge ses racines dans le Parti communiste et les FARC, dont certains de ses fondateurs étaient membres. Ils se sont « nourris du peuple » en soutenant un parti conservateur comme l’Alianza Nacional Popular (ANAPO), dirigé par un militaire génocidaire pendant l’« Ère de la violence » (1946-1958), en plus d’être méga-corrompu, avec sa fille María Eugenia et son mari Samuel, un organisateur efficace des chulavitas [équivalent colombien des tontons macoutes haïtiens ou des escadrons de la mort brésiliens, NdT] s pendant la « Violence »[1].

Organisation audacieuse qui se démarquait des autres guérillas, le M-19 se proposait des projets politiques et militaires qui restèrent à mi-chemin. Voyons ses actions les plus significatives. Le vol d’armes au Cantón Norte de Bogota (Opération Baleine Bleue), une opération hollywoodienne fin 1978 début 1979, 7 200 armes tombées aux mains de la guérilla, un camouflet pour les militaires : mais un important lot d’armes fut récupéré par l’armée parce que le cerveau de l’opération avait désobéi à l’ordre de quitter la ville et, une fois arrêté et torturé, indiqua la planque principale[2].

La prise de l’ambassade de la République dominicaine en février 1980, une action spectaculaire au cours de laquelle 16 ambassadeurs furent pris en otage en échange de la libération d’un grand nombre de prisonniers politiques. Aucun prisonnier ne fut libéré, en échange d’une énorme publicité, d’une importante somme d’argent et du transfert des participants à l’opération vers Cuba.

Puis, en 1981, un important groupe de guérilleros cubains a voulu faire des incursions en Colombie. Oubliant la maxime guévariste selon laquelle « un mouvement de guérilla sans le soutien des masses est le prélude à un désastre inévitable », ils tentèrent d’atteindre la région caféière par le Chocó et furent anéantis ; il en fut de même dans le Nariño et le front du Caquetá s’éteignit peu à peu.

Un processus de paix lancé en 1984, qui n’a pas été respecté par les élites politiques et militaires, a tenté d’être relancé après la prise du Palais de Justice de Bogota en novembre 1985. Le fait que les hautes juridictions aient jugé le président Belisario Betancur, avec leurs magistrats en armes dans leurs tribunaux, a violé l’aspect le plus sacré d’un juge : son indépendance. De plus, le président de la Cour suprême n’était pas l’ambassadeur des USA, ce qui signifiait que la plus haute juridiction colombienne n’allait pas répéter ce qui s’était passé à l’ambassade dominicaine cinq ans plus tôt. Le massacre du Palais de justice a marqué un tournant dans le conflit colombien ; les élites ont pris conscience de leur vulnérabilité et ont décidé qu’elles devaient enlever l’eau au poisson comme formule efficace pour anéantir l’insurrection en Colombie : le terrorisme d’État était né.

Après la tragédie du Palais de justice, le M-19 a mené une grande initiative internationaliste : le Bataillon Amérique. Composé de militants de différentes organisations nationales et étrangères, 420 combattants se regroupent en décembre 1985 et mènent une campagne admirable dans la région du Cauca ; plusieurs villages écoutent leurs harangues et leurs fusils, jusqu’au quartier de Pance à Cali. Mais les pertes sont évidentes, la logistique d’une telle force n’est pas aisée, et le Bataillon Amérique s’évapore [3].

C’est alors qu’apparaît la Coordination guérilléra Simón Bolívar (CGSB), précédé par le Coordination guérilléra nationale (CNG). Lors d’un sommet des commandants de la CNG tenu à La Havane à la fin de l’année 1986, Carlos Pizarro fait au gouvernement de Virgilio Barco une proposition de négociation ambitieuse, mais le reste des organisations n’est pas d’accord ; Pizarro déclare qu’ils prendront seuls l’initiative : l’esprit unitaire est mis à mal. Quelque temps plus tard, la CGSB est fondé en 1987 et, lors des premier et deuxième sommets, il est convenu de suivre un scénario similaire en termes de propositions stratégiques ; certaines opérations militaires sont même revendiquées au nom de la CGSB, mais deux mois après le deuxième sommet, le M-19 enlève Álvaro Gómez Hurtado à Bogota, le 29 mai 1988. Gómez était l’intermédiaire idéal pour une proposition de paix du M-19, qui incluait la recette de l’élite : concentration, démobilisation et désarmement du groupe rebelle [4].

Le M-19 a à son actif une dose d’audace et de créativité qu’aucune autre guérilla colombienne n’a jamais eue, ainsi qu’une part de superficialité et d’irresponsabilité dans les actes du Palais de Justice, car ils ont déclenché une réponse qui aurait dû être plus tard accompagnée de plus d’audace, de créativité, de courage et de soutien de la part des autres organisations de guérilla. Elles ne l’ont pas fait. Il aurait pu fusionner avec les FARC ou l’ELN, mais non, il a préféré commencer à négocier : il n’en pouvait plus, car depuis 1986 il se savait défait.

La lutte armée révolutionnaire n’a pas commencé en 1974, avec la fondation du M-19, ni ne s’est terminée en 1990, lorsqu’ils se sont officiellement rendus et ont déposé les armes. Cette organisation a cessé de combattre, a cru à la paix, alors que des dizaines de milliers de Colombiens étaient massacrés de la manière la plus dantesque, que la polarisation brutale qu’ils ont contribué à déclencher était dénoncée par eux dans l’arène législative, presque à la fin d’une époque aussi macabre, et les auteurs intellectuels de ces crimes restent impunis.

Les FARC ont tenu le coup pendant plus de 25 ans après cette époque, l’ELN, avec toutes ses incohérences, est toujours en activité : un peu de modestie et de respect pour ceux qui ont emprunté des chemins si difficiles ferait du bien à l’unité nationale.

3. Petro le messianique : « la gauche ne m’a jamais vraiment soutenu ».

Dans un avertissement énergique aux militants qui se disputent dans  les régions, Petro les compare à des chevaux qui courent dans une course hippique poussés par leur égocentrisme, affirme que ce n’est pas ainsi que l’on construit un leadership et condamne : « Je suis une démonstration de leadership politique, je n’ai pas utilisé de partis politiques, la gauche ne m’a jamais vraiment soutenu [...] j’étais seul avec les gens et avec quelques équipes qui restaient de la politique... » (39:14 à 39:40). Fatal. En d’autres termes, soit le Pacte historique, une coalition de partis, est de droite, soit ils ne l’ont pas soutenu. L’Unión Patriótica-Partido Comunista, le Polo Democrático Alternativo, l’Alianza Democrática Amplia, le Movimiento Alternativo Indígena y Social, le Partido del Trabajo de Colombia, Unida et Todos Somos Colombia, entre autres, doivent être assez pensifs.

Notre président ne se souvient-il pas qu’il a représenté le Polo Democrático Alternativo aux élections présidentielles de 2010, obtenant 1,4 million de voix ? Non, dit-il, « la gauche ne l’a jamais soutenu ».

Le leadership politique ou populaire est une chose, l’organisation du peuple en est une autre. Le M-19 dans sa transhumance guérillera n’a pas appris à organiser les communautés. Le Parti communiste colombien, les FARC, voire l’ELN, en savent un peu long sur comment organiser le peuple...

4. Petro a besoin d’un intellectuel organique pour concevoir les stratégies de l’État

De l’extérieur, le gouvernement est perçu comme étant géré sur la base de cercles d’amis, selon que l’on est plus ou moins ami du président ou d’un certain dignitaire. Cela pose deux problèmes. D’une part, les amis ont tendance à dire à leurs supérieurs ce qu’ils veulent entendre et, d’autre part, en temps de crise, l’amitié cède la place au chacun pour soi.

« Selon Gramsci, les intellectuels sont tous ceux qui interviennent dans la conception et l’organisation des politiques publiques de l’État ». Et ils doivent être organiques dans la mesure où ils doivent être organisés pour que leurs contributions parviennent au bon endroit et au bon moment. L’intellectuel organique doit être comme le miroir, qui ne ment jamais à celui qui est devant lui, et comme son ombre, qui ne le quitte jamais.

Le progressisme authentique tend inexorablement vers la gauche, sinon, surtout en Colombie, il tombera entre les mains des bourreaux du peuple colombien.

5. Par son ingérence dans les affaires vénézuéliennes, Petro fait le jeu de l’Empire et de la droite internationale

Bien que le sujet du Venezuela n’ait pas été abordé dans son discours, il s’agit de quelque chose de capital. Petro a proposé un Front National (alternance de partis pendant un certain temps) et un remake des élections au Venezuela. Le président oublie que le Front national colombien a donné naissance au M-19, dans la mesure où la fraude électorale de 1970 a été l’un des moteurs de cette insurrection. Or, suggérer de refaire des élections, c’est ignorer que le pays voisin dispose d’institutions qui savent compter les voix et de juges pour trancher les différends.

Les recommandations de Petro ont été une mauvaise décision de politique étrangère, et ont laissé en lambeaux l’excellente image du Président au niveau international.

Notes

[1] Nous recommandons le livre d’Alberto Donadio et Silvia Galvis : EL JEFE SUPREMO : Rojas Pinilla en la Violencia y el poder.

[2] Nous recommandons l’ouvrage de Hollman Morris : Operación Ballena Azul.

[3] Villamizar, Darío. Las guerrillas en Colombia. Bogotá : Debate, 2017, pp.. 517-521

[4] Villamizar, Idem. pp. 529, 532-558

NdT

L’Assemblée de Colombia Humana a adopté à l’unanimité la décision de convertir le mouvement Pacto Histórico, qui regroupe 12 partis et mouvements, en parti unitaire dans la perspective des élections de 2026. Certaines composantes du pacte ont exprimé leur désaccord avec cette décision. À suivre


 

 

22/06/2022

REINALDO SPITALETTA
Colombie : Gustavo Petro, capitalisme et liberté

Reinaldo Spitaletta, El Espectador, 21/6/2022
Traduit par
Fausto Giudice, Tlaxcala

Du discours de victoire, dans lequel Gustavo Petro a prévenu qu'il ne trahirait pas l'électorat, il faut retenir les slogans de ne pas gouverner avec haine ou sectarisme. Ces sentiments, dans une longue histoire de désastres, ont fait couler du sang et des larmes, surtout pour les gens ordinaires, toujours chair à canon et éternelles victimes du pouvoir.

Après la victoire. Photo : DANIEL MUNOZ

Le princier et féodal « quoi que dise Uribe », maître d'une sorte de pays-hacienda pendant plus de 20 ans, semble s'être effondré peut-être pour toujours. Plus de 6 402* raisons ont été répandues pour mettre en échec une domination féroce dans laquelle les droits des travailleurs étaient violés, le pays a été bousillé, des accords de libre-échange léonins ont été signés, le secteur agricole s’est étiolé et le pouvoir latifundiste a eu le champ libre.

Le naufrage de ce navire de pirates, passés maîtres dans la dépossession de milliers de personnes et le maintien de privilèges pour une poignée de caïds oligarchiques, donne la sensation que le jouet du « messie » [Uribe] désormais has been a été réduit en miettes après 40 ans d’outrages.

Avec le triomphe du Pacte historique, un empire de « sortilèges autoritaires », de corruption, de politicaillerie et autres pourritures officielles s'est effondré, du moins en apparence.

On peut dire qu'une période est terminée, même si son influence méphitique n'est pas entièrement morte et que ses tentacules n'ont pas été coupés. Mais le début d'un temps différent est évident, qui, selon les vainqueurs de ces élections débridées, est l'écriture d’« une nouvelle histoire ». Le triomphe électoral de Gustavo Petro et du Pacte historique, avec un vote écrasant, a été le coup de grâce (du moins, c'est ce qu'il semble) à l'uribisme agonisant, dont les râles d’agonie se sont manifestés au cours de cette période infâme de quatre ans.

Pour le seigneur féodal, ça a dû être un direct à la mâchoire. D'échec en échec avec ses « filleuls », d'abord Óscar Iván Zuluaga, qu'il a renvoyé sans ménagement pour le remplacer par Fico [Federico Gutiérrez], un mannequin de ventriloque (semblable à celui qui est encore président de la Colombie, Iván Duque) qui, ayant été battu sans appel, s'est métamorphosé en péquenaud jouant au playboy, admirateur d'un génocidaire et à qui, à ce qu’on a vu, la Vierge (et pas vraiment une Vierge de minuit [titre d’un célèbre boléro]) a fait payer pour ses divagations blasphématoires**.

Que l'on soit d'accord ou non avec le vainqueur de l'élection, dimanche dernier a marqué un chapitre différent de l'histoire électorale colombienne. Un mouvement différent et un candidat différent ont gagné (bien qu'ils aient été rejoints par des personnages aux références moins recommandables), mettant fin à une longue succession de présidents de système, marionnettes d'intérêts étrangers et dont le bilan se résume à ne pas avoir promu de réformes agraires et à avoir maintenu le statu quo au détriment des plus pauvres et des plus oubliés.

Du discours de victoire, dans lequel Gustavo Petro a prévenu qu'il ne trahirait pas l'électorat, il convient de retenir les slogans de ne pas gouverner avec haine ou sectarisme. Ces sentiments, dans une longue histoire de catastrophes, ont fait couler du sang et des larmes, surtout pour les gens ordinaires, toujours chair à canon et éternelles victimes du pouvoir.

Et quand on s'attend le moins à ce qu'un homme politique, et plus encore sous nos latitudes, brandisse des bannières de prédicateurs et de santons, le président élu a parlé d'amour. La nécessité d'une compréhension, d'un dialogue, d'une entente entre les uns et les autres. Et puis, comme un prêtre de village, il a souhaité la bienvenue à l’espérance, une vertu théologique.

Sa position sur le développement du capitalisme en Colombie est en tout cas intéressante, alors qu'en fait, surtout dans les campagnes, il n'y a eu que des expressions d'arriération et d'arriération féodale. « Nous allons développer le capitalisme non pas parce que nous le vénérons, mais parce que nous devons d'abord surmonter la pré-modernité en Colombie, le féodalisme en Colombie, les nouveaux servages et le nouvel esclavage ».

Pour mettre en œuvre le capitalisme et avoir les possibilités d'un marché intérieur, il faut promouvoir la paix. « Plus jamais de guerre ! » ont crié les milliers de personnes présentes à la cérémonie de victoire, tandis que le candidat vainqueur a évoqué la nécessité d'un grand accord national pour construire « un consensus maximal pour une vie meilleure » et pour des réformes, notamment en faveur des jeunes, des femmes et des personnes âgées. « La paix doit être construite comme une garantie des droits des personnes », a-t-il déclaré.

L'ambiance était à l'optimisme collectif, à la liesse populaire, à l'idée qu'une nouvelle ère était en train de naître. Il y a eu des pétards et des sifflets dans de nombreux endroits, ainsi que des blagues sur ceux qui annonçaient qu'ils quitteraient le pays si Petro gagnait. Mais, pas question. Tout le monde restera sûrement, car, comme on le disait en chœur, ici tout le monde gagne du « flouss » et les banquiers, par exemple, ont déjà salué cette élection et « un grand accord national ».

Rien n'a été dit sur la défense de la souveraineté nationale, ni sur le fait que ce pays continuera à être une néo-colonie, ce qui n'est pas une mince affaire. Mais il a été indiqué que ce sera « le gouvernement de la vie, de la paix, de la justice sociale et environnementale ». Le nouveau gouvernement a un énorme défi à relever : combattre l'énorme pauvreté, le chômage, l'informalité, le trafic de drogue et d'autres maux qui frappent le pays. Et un engagement, comme il l'a dit, en faveur de la liberté afin que « plus jamais un gouvernement n'assassine ses jeunes ».

NdT

*6 402 : c’est le nombre, établi par la Juridiction spéciale pour la paix, des « faux positifs » commis par l’armée colombienne entre 2002 et 2008, autrement dit des exécutions extrajudiciaires de personnes présentées comme des guérilléros.

** En avril dernier, « Fico » était allé à Boyacá demander la bénédiction de la Vierge « miraculeuse » de la Basilique de Notre Dame du Rosaire de Chiquinquirá, censée être la sainte patronne du pays.