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25/07/2025

RIM AL-ATTRACHE
La pensée de Sultan al-Attrache d’après ses archives

Dr. Rim Mansour Sultan al- Attrache, Sabahelkheyr.com, n° 142, 25/7/2025

Original arabe  فكر سلطان الأطرش: من أرشيفه

Traduit par Fausto GiudiceTlaxcala

سلطان الأطرش: شعلة الثورة السورية الكبرى

Sultan al-Atrash : La flamme inextenguible de la Syrie


Durant un quart de siècle, j’ai travaillé à éditer les archives de Sultan al- Attrache, publiées à Beyrouth.

La Grande Révolution syrienne a éclaté le 21 juillet 1925, mais elle a capté l’attention du monde après la bataille d’al-Mazraa (2-3 août). Le tumulte fut tel que les Européens commencèrent à envoyer des journalistes – d’Allemagne notamment – pour observer la situation dans le Djebel Druze ; ainsi, les nationalistes ont commencé à s’y intéresser !

Sultan al- Attrache déclara alors aux journalistes allemands :

« Les Français ne cherchent pas sincèrement la paix dans leurs négociations... Ils veulent simplement nous distraire en attendant l’arrivée de leurs nouvelles troupes…

Nous n’acceptons rien d’autre que l’indépendance totale et l’unité de la Syrie, avec l’établissement d’un gouvernement national constitutionnel. Le mandat de l’État mandataire doit se limiter à une assistance technique et administrative via des conseillers qualifiés, conformément au Pacte de la Société des Nations de 1919. »

Refusant toute division confessionnelle du pays. Il proclamait clairement les objectifs de la révolution : l’unité du territoire syrien, côte et intérieur (Le Levant), et l’indépendance totale, comme déclaré dans son manifeste « Aux armes ».

Il refusa une offre royale du roi George V en 1927 : un château à Jérusalem et une pension mensuelle à vie. Il répondit : « Notre bonheur réside dans l’indépendance de notre patrie, son unité et la liberté de notre peuple, avec le retrait des troupes étrangères. »

Autour de lui se rassemblèrent les pauvres, les patriotes.



Combattants avant la bataille d’Al-Mazraa

La révolution de 1925 ne fut pas seulement un acte militaire spectaculaire, mais une initiative de refus et de résistance. Les envahisseurs ne doivent jamais se sentir en paix, quelle que soit la durée de leur occupation…

Quand le roi Fayçal quitta Damas, contraint par l’ultimatum du général Gouraud, Sultan dépêcha Hamad al-Barbour pour le convaincre de rejoindre le Djebel et y lancer une résistance armée, pour préserver la légitimité du pouvoir national. »
Une gifle au colon français et un rejet clair du confessionnalisme.

Une conscience profonde de la citoyenneté égale.
Notre lutte n’en est encore qu’au stade de la floraison. Nous ne voulons pas en cueillir les fruits tant que nous ne sommes pas unis en tant qu’Arabes.
Fils de la Révolution et enfants du désert, nous nous sommes voués à être les offrandes sacrées sur l’autel de l’arabisme.
Cet arbre ne portera pas de fruit tant qu’il restera infesté de parasites destructeurs.
Il ne portera pas de fruit tant que la voix de la liberté ne s’élèvera pas de Palestine, et que les ambitions coloniales ne seront pas écartées d’Irak, d’Égypte et de Transjordanie.
Alors, seulement, que vienne le fruit mûr, savoureux, symbole des générations qui ont porté la flamme de la civilisation, flamme qui ne s’éteindra plus ».

Sultan al- Attrache comprit l’importance des médias pour la cause nationale syrienne. Ainsi, le 15 octobre 1925, il adressa une lettre en arabe et en anglais au rédacteur du journal britannique The Times, pour informer l’opinion publique européenne des véritables raisons de la Révolution syrienne, que les Français tentaient de dissimuler afin d’induire l’Europe en erreur. Il y dénonça les atrocités françaises, comme le bombardement des femmes venues puiser de l’eau et le meurtre d’enfants. Les révolutionnaires, quant à eux, respectaient les conventions internationales dans le traitement des prisonniers et avaient renvoyé les femmes d’officiers français à leurs familles saines et sauves depuis Soueïda.

Les archives de Sultan al- Attrache apportent une contribution inédite à l’histoire du Levant. On y apprend par exemple que la révolution dura 12 ans. Sa période d’exil et de refuge fut marquée par de nombreuses prises de positions politiques qui influencèrent les négociations diplomatiques jusqu’au retrait total des troupes françaises le 17 avril 1946. Il est à noter que de nombreux combattants de la Révolution syrienne participèrent ensuite à la révolte palestinienne, comme le martyr Saïd al-’Ass (1936).

Sultan fut nommé commandant en chef de la révolution lors de la conférence de Rimat al-Fukhour (23 août 1925), après sa victoire contre la campagne du général Michaud à la bataille d’al-Mazraa. Le docteur Chahbandar prit en charge les affaires politiques de la révolution et en devint le porte-parole officiel. Toutefois, Sultan traçait les grandes lignes politiques, fixait les orientations, et planifiait les opérations militaires en coordination avec les commandants locaux.

Il existait un lien entre la Révolution syrienne et celle de l’émir Abdelkrim al-Khattabi au Maroc. La révolution du Rif allégea la pression sur la Syrie jusqu’à la reddition d’al-Khattabi, après quoi beaucoup de Marocains enrôlés dans l’armée française rejoignirent la révolution syrienne contre les Français.

Les révolutionnaires avaient mis en place une organisation ingénieuse : un quart des hommes de chaque village était mobilisé avec des provisions suffisantes pour la durée de service fixée par le commandant en chef. Une fois leur mission terminée, ils étaient remplacés par un second quart, et ainsi de suite, pendant que ceux restés au village assuraient les travaux agricoles au nom de tous.

En exil, Sultan appelait à l’unité, à dépasser les clivages partisans pour le bien commun, convaincu que la cause syrienne représentait le noyau de l’unité arabe. Dans ses lettres (1930), il insistait sur son indépendance vis-à-vis des partis et sa volonté de poursuivre la révolution pour une Syrie unie et libre.

Les politiques le consultaient même durant son exil de dix ans. Il présida la Conférence du Désert en octobre 1929, en présence de nombreuses figures nationalistes. Six décisions majeures y furent prises, dont la condamnation de la suspension de l’Assemblée constituante syrienne, la dénonciation des propos du Haut-commissaire français Henri Ponsot ignorant la cause nationale, le rejet des résolutions du 16ème Congrès sioniste de Zurich, et la demande adressée au ministère britannique du Travail d’annuler la Déclaration Balfour, en reconnaissant les droits nationaux des Arabes.

Cet homme, qui comprit tôt les ambitions coloniales en Orient, refusa tout poste politique après l’indépendance syrienne (1946), tout comme toute compensation financière. Il répétait aux dirigeants arabes :

« Préservez l’indépendance pour laquelle nous avons sacrifié nos vies pour lui. »

Il craignait sans cesse le retour des convoitises coloniales. Sa dernière volonté, publiée, en témoigne : il est le seul révolutionnaire syrien à avoir laissé un testament politique.

Il avait planifié une grande campagne vers la région de Balan, au pied du Mont Hermon, une autre pour soutenir les révolutionnaires de la Ghouta de Damas, et une troisième vers le Hauran. La révolution s’étendit vers le nord avec Fawzi al-Qawuqji, qui demandait qu’on lui envoie armes et hommes depuis le Djebel Druze.



Il n’abandonna jamais le slogan :

« La religion pour Dieu, la patrie pour tous ».

Une archive de la Bibliothèque nationale de Damas rapporte que le consul britannique au Levant écrivit à son ministère : « Sultan al-Attrache est incorruptible. »

La chercheuse française Lenka Bokova a dit à mon père Mansour al-Attrache  : « Sans cette forte personnalité, la Grande Révolution syrienne n’aurait pas vu le jour. »

Voici un extrait d’un article de Mansour al-Attrache, « L’initiative dans l’histoire » :

« Il faut distinguer les initiateurs des suiveurs dans le déroulement de l’histoire. L’initiateur accomplit son rôle en allumant la mèche de l’événement majeur. Le suiveur, bien qu’important, arrive plus tard…

La révolution de 1925 ne fut pas seulement un acte militaire spectaculaire, mais une initiative de refus et de résistance. Les envahisseurs ne doivent jamais se sentir en paix, quelle que soit la durée de leur occupation…

Quand le roi Fayçal quitta Damas, contraint par l’ultimatum du général Gouraud, Sultan dépêcha Hamad al-Barbour pour le convaincre de rejoindre le Djebel et y lancer une résistance armée, pour préserver la légitimité du pouvoir national. »

Sultan al-Attrache, conscient de son rôle, s’opposa aussi au sionisme, rejetant toute négociation avec les sionistes. Il faisait parvenir clandestinement des armes à la révolution palestinienne de 1936, avec le combattant Chékib Wahhab, depuis Karak. Il fut l’un des cinq leaders syriens à refuser toute forme de dialogue avec le sionisme.

Adib Chichakli lança une campagne militaire brutale contre Soueïda, croyant pouvoir asseoir son pouvoir. Environ 100 civils furent tués, soit un martyr pour 500 habitants. La maison de Sultan fut vandalisée. Il quitta alors sa demeure pour éviter le bain de sang, déclarant :

« Je refuse de brandir les armes contre l’armée syrienne. Ce sont mes fils ! »

Il partit à pied dans la neige depuis Qrayya vers la Jordanie. Il avait alors 66 ans. À la frontière, les autorités jordaniennes lui envoyèrent une voiture portant le drapeau britannique, qu’il refusa malgré le danger. Elles lui envoyèrent alors un autre véhicule, arborant cette fois le drapeau jordanien : il accepta et entra ainsi en Jordanie, où il resta jusqu’à la chute de Chichakli. Même dans les circonstances les plus difficiles, Sultan Pacha n’a pas recours aux étrangers.

Il revint alors triomphant à Qrayya.

Quand les gens vinrent le féliciter de la mort de Chichakli, il répondit :

« Je n’ai plus rien à voir avec lui depuis qu’il a quitté le pouvoir. Son assassinat est un acte isolé. Nous ne nous vengeons pas et ne nous réjouissons pas de la mort ! »

Trois leçons majeures que nous enseigna Sultan al-Attrache.

Il ne renonça jamais au slogan de la révolution :

« La religion pour Dieu, la patrie pour tous ».

Il écrivait à son frère Zeid, commandant la campagne du Ballan : « Protégez les chrétiens. Ne laissez personne leur faire de mal. Assurez leur sécurité, leur vie, leurs biens. Empêchez toute agression à leur encontre. Nous sommes tous enfants d’une même patrie, tous des Arabes syriens à égalité. »

Je conclus avec une pensée de Sultan al-Attrache, écrite en 1961 :

« Ils disent que nous avons cueilli le fruit de notre lutte, le fruit de cet arbre que nous avons nourri de notre sang. Non ! Ce fruit n’est pas encore mûr.
Notre lutte n’en est encore qu’au stade de la floraison. Nous ne voulons pas en cueillir les fruits tant que nous ne sommes pas unis en tant qu’Arabes.
Fils de la Révolution et enfants du désert, nous nous sommes voués à être les offrandes sacrées sur l’autel de l’arabisme.
Cet arbre ne portera pas de fruit tant qu’il restera infesté de parasites destructeurs.
Il ne portera pas de fruit tant que la voix de la liberté ne s’élèvera pas de Palestine, et que les ambitions coloniales ne seront pas écartées d’Irak, d’Égypte et de Transjordanie.
Alors, seulement, que vienne le fruit mûr, savoureux, symbole des générations qui ont porté la flamme de la civilisation, flamme qui ne s’éteindra plus ».


Mausolée de Sultan al-Attrache à Qrayya

 

 

24/07/2025

SERGIO RODRÍGUEZ GELFENSTEIN
Que se passe-t-il en Syrie… et en Asie occidentale ?

   Sergio Rodríguez Gelfenstein, 24/7/2025

Traduit par Fausto GiudiceTlaxcala

À Carlos Pereyra Mele, professeur et maître.

L’un des plus aigus et brillants analystes en géopolitique
qui nous a quittés hier, trop tôt.
Adieu, Maestro !

Comme cela devient habituel, , les médias transnationaux à but lucratif, censés informer, se consacrent paradoxalement à la désinformation. On peut le constater de manière particulièrement aberrante lorsqu’il s’agit des événements en Asie occidentale. Bien que la déformation des faits soit une pratique quotidienne, la situation est aujourd’hui atroce lorsqu’on tente de reconstruire les péripéties et les actions qui se déroulent dans cette région depuis deux ans et demi.

Ces derniers jours, ce sont les faits en Syrie dominent l’actualité régionale. Comme si le génocide en Palestine, l’agression permanente contre le Liban et la rhétorique belliciste contre les voisins s’étaient arrêtés, la falsification des faits cache la véritable toile de fond de l’affaire.


La situation géographique de la Syrie, située au carrefour des peuples et des civilisations, en a fait, tout au long de l’histoire, un joyau inestimable pour ceux qui aspiraient à contrôler la région. La présence de peuples différenciés dans certaines zones du pays a créé des aires d’influence traditionnelles d’idéologies, de leaders et de tribus ayant leur propre identité, culture et histoire. Par exemple, les Kurdes se trouvent au nord, les Druzes au sud-est, les Alaouites sur la côte méditerranéenne, et les Sunnites dans la zone centrale.

Cette situation, stabilisée sans grands conflits [sic] sous le gouvernement de Bachar Al Assad, a été détruite par une intervention étrangère qui, en attisant les différences sectaires et religieuses à son avantage, a engendré la division et la disparition de la sécurité fondée sur l’équilibre.

Au-delà de la dynamique interne syrienne, trois puissances étrangères ont joué un rôle déterminant dans la situation actuelle : Israël, les USA (avec la France en appendice), et la Turquie.

Comme je l’ai écrit à d’autres occasions, il est presque impossible aujourd’hui d’analyser un scénario de manière isolée. De même, tout événement international doit être compris dans ses trois dimensions — locale, régionale et globale — si l’on veut réellement en cerner les fondements et les implications.

Ce texte tente donc d’analyser ce scénario complexe sous une vision holistique, seule capable de fournir des pistes pour sa compréhension. Malgré l’accord de cessez-le-feu entre Israël et le Liban conclu en novembre dernier, l’entité sioniste l’a violé à de multiples reprises. Les USA et la France, garants de cet accord, ont trahi leur engagement en permettant que l’agression — qui a déjà causé la mort de près de 400 Libanais — se poursuive en toute impunité.



Cet accord était censé prolonger la résolution 1701 de 2006 du Conseil de sécurité de l’ONU, signée après 34 jours de guerre suite à l’invasion du Liban par Israël. L’accord établissait un cessez-le-feu total et le retrait des troupes israéliennes. Israël n’avait pas atteint ses objectifs à l’époque : détruire le mouvement chiite libanais Hezbollah et « démilitariser » le Liban.

Ce non-respect de la résolution 1701 reste une épée de Damoclès suspendue au-dessus de toute tentative de stabilisation. Dans le contexte actuel, Thomas Barrack, envoyé spécial du président Donald Trump pour la Syrie, a insisté sur l’obligation du gouvernement libanais de désarmer le Hezbollah, menaçant Beyrouth de détruire le Liban pour l’annexer à la Syrie si cela n’était pas fait. En réalité, si cet ultimatum était mis à exécution, il signifierait la fin des Accords Sykes-Picot de 1916, qui avaient organisé le contrôle de la région selon les intérêts européens sous le couvert d’une stabilité jamais atteinte.

L’instabilité nécessaire au maintien des intérêts occidentaux s’est poursuivie ces dernières années. De la première guerre du Golfe (1990–1991), à celle d’Irak (2003–2011), en passant par l’Afghanistan (2001–2021), le prétendu Printemps arabe débuté en 2011, la guerre au Yémen commencée en 2015, le génocide permanent contre le peuple palestinien, les attaques israéliennes intermittentes contre le Liban, l’intervention turque en Syrie, ou encore les guerres contre le terrorisme d’Al-Qaïda et de Daech en Irak et Syrie, toutes ont pour objectif le maintien de l’instabilité, pour affaiblir, fragmenter, dominer et contrôler la région.

Pour les USA, la priorité stratégique est d’assurer leur sécurité énergétique. Les centres de production pétrolière sont donc constamment dans leur viseur, ce qui explique leur présence active en Asie occidentale — région possédant les plus grandes réserves mondiales. Cela explique aussi leur implication dans le conflit ukrainien. Dans ce cadre, le Venezuela est également concerné, mais en tant que pays d’Amérique latine — « l’arrière-cour » de Washington — sa dynamique est différente et ne sera pas abordée ici.

Rassemblant tous ces éléments, on peut commencer à répondre à la question : Pourquoi la Syrie ? Bien avant le conflit actuel, même avant la guerre du Golfe, des projets de construction d’oléoducs existaient déjà. L’un devait partir du Golfe Persique, traverser l’Irak et la Syrie jusqu’à la Turquie pour approvisionner l’Europe. Le second a motivé le coup d’État de 1953 en Iran contre le Premier ministre Mossadegh, après qu’il eut nationalisé le pétrole [jusque-là “british”]. Ce projet fut définitivement écarté après la révolution islamique de 1979. Aujourd’hui, plusieurs projets d’oléogazoducs partant du Golfe Arabo-Persique vers l’Europe passent par la Syrie.

C’est dans la continuité de ces projets que, presque en même temps que le Printemps arabe de 2011, une grande conspiration occidentale a vu le jour pour affaiblir la région et s’emparer de ses ressources. Les USA et l’OTAN ont ainsi conçu, financé et mis en œuvre un coup d’État en Ukraine pour atteindre le même but : éliminer la Russie comme fournisseur énergétique de l’Europe. Il s’agissait de faire venir l’énergie du Golfe Arabo-Persique, région dominée par des monarchies conservatrices aisément contrôlables.

Dans un premier temps, après la chute de l’URSS et devant la faiblesse de la Russie sous Eltsine, l’Occident a tenté d’exciter les minorités nationales et religieuses russes. Cette tentative ayant échoué, il a reporté leurs efforts sur l’Asie occidentale.

Bachar Al Assad a été pressé par l’Occident d’approuver les projets d’oléoducs. Il a toujours refusé. C’est ce qui explique pourquoi, après avoir renversé Kadhafi en Libye, le Printemps arabe a « atterri » en Syrie. Ce refus d’Al Assad est l’une des raisons du coup d’État en Ukraine en 2014, et de l’implication directe de la Russie : Moscou avait compris que la cible stratégique de cette guerre était la Russie, pas la Syrie.

Aujourd’hui, après la chute de Bachar Al Assad et le génocide à Gaza, le plan des oléoducs a été relancé. Le terroriste Ahmed Al Charaa alias Al Joulani, devenu président de la Syrie, agit comme instrument des USA et d’Israël. Sur leurs ordres, il a attaqué la province de Soueïda, peuplée majoritairement de Druzes. Bien qu’ils ne représentent que 3 % de la population, les Druzes ne sont pas monolithiques et sont divisés politiquement — ce qui « facilite » l’action des terroristes devenus gouvernement. Une faction soutient Al Joulani, une autre Israël, menée par Hikmat al Hijri, né au Venezuela comme beaucoup d’habitants de Soueïda [surnommé « le peitit Venezuela », ce dernier étant appelé « Venesueida », NdT]. Une troisième est nationaliste et avait de bonnes relations avec Al Assad.

MBS, Trump et Al Charaa, mai 2025

Al Joulani ne gouverne pas vraiment. Sa coalition est pleine de contradictions ethniques, religieuses, et politiques. Il se maintient au pouvoir grâce aux USA, à Israël et à la Turquie, et se consacre au massacre des minorités : d’abord les Kurdes au nord, puis les Alaouites sur la côte, et maintenant les Druzes au sud.

Pour attaquer Soueïda, Al Joulani utilise des sunnites de Daraa (frontalière avec la Jordanie), des tribus bédouines locales, et une armée composée à 40 % de terroristes étrangers (principalement ouïghours de Chine et du Pakistan, mais aussi Afghans, Tchétchènes, Daguestanais…), 40 % de terroristes syriens loyaux à Al Joulani, et 20 % de membres de diverses tribus et courants musulmans. Ensemble, ils forment une force de 60 000 hommes.

Les attaques visent à justifier l’intervention israélienne en Syrie sous prétexte que les tribus bédouines menacent la sécurité du pays. Mais en réalité, c’est Al Joulani qui orchestre cette instabilité sur ordre de Washington et Tel-Aviv. Le gouvernement syrien actuel n’a pris aucune mesure contre l’intervention militaire sioniste.

Al-Charaa, vu par Kamal Sharaf, Yémen

Soueïda est devenue la pierre angulaire des intérêts internationaux. Israël veut y créer un “Corridor de David” sécurisant le territoire syrien qu’il occupe [le Golan]. Les USA visent les gisements pétroliers. La Turquie veut des oléogazoducs qui traverseraient son territoire, ce qui lui rapporterait d’énormes revenus.



Mais les ambitions vont plus loin : les USA et Israël veulent démembrer la Syrie en quatre micro-États ethnico-confessionnels, pour justifier l'existence raciste de l'entité sioniste. Ces mini-États, dirigés par des marionnettes comme Al Joulani, permettraient la réalisation du plan du “Grand Israël” et la création d’un nouveau Moyen-Orient.

Ainsi, la Syrie serait divisée en :

  • un secteur kurde au nord sous influence turque,
  • une région alaouite sur la côte (Lattaquié et Tartous),
  • un émirat islamique contrôlé par Al Joulani au centre,
  • un corridor israélo-druze au sud-est, aux frontières jordanienne et irakienne.

Si ce plan est mis en œuvre, toute la région serait morcelée, permettant à l’Occident de s’approprier les ressources énergétiques et d’écarter la Russie du marché européen. Le Golfe Arabo-Persique, via la Syrie et la Turquie, deviendrait le nouveau fournisseur.

Erdoğan le marionettiste, par Adnan Al Mahakri,Yémen

La Turquie cherche à devenir ce pont énergétique vers l’Europe. Cela explique son rôle dans la chute d’Al Assad. Le projet des Frères musulmans, dont Erdogan est issu, vise à devenir le porte-parole des musulmans du monde. Mais cela nécessite un Iran affaibli, ce qu’ils n’ont pas réussi à obtenir.

Les événements de Soueïda doivent donc être compris dans une perspective plus large :

  • Les USA veulent nuire à la Russie et s’approprier le pétrole.
  • Israël veut construire son corridor pour fragmenter davantage le monde arabe.
  • La Turquie veut des bénéfices énergétiques et un rôle de leader.

Ce plan n’a pas abouti à cause de la résistance de l’Iran et de ses alliés (Irak, Liban, Yémen…). Les prochaines cibles pourraient être la Jordanie et surtout l’Égypte, qui possède une des plus grandes armées du monde et un fort sentiment national. Un rapprochement Iran-Égypte serait un obstacle majeur aux projets impérialistes.

Le journaliste égyptien Mohamed Hassanein Heikal (sunnite et panarabiste) affirmait que seule une alliance stratégique Iran-Égypte pouvait sauver le monde arabe. C’est la plus grande peur de l’Occident.

Des erreurs égyptiennes ont empiré les choses : la cession des îles de Tiran et Sanafir à l’Arabie saoudite en 2017, puis leur probable transformation en bases militaires usaméricaines, a provoqué une vive opposition au sein de l’armée égyptienne.

De même, les pressions usaméricaines sur les pays du Conseil de Coopération du Golfe (CCG) pour réduire leur aide à l’Égypte après qu’elle les eut pourtant défendus, ont été mal vues.

Une alliance Iran-Égypte créerait un bloc de 200 millions d’habitants et une armée de plus de 2,5 millions de soldats, contrôlant le détroit d’Ormuz, le canal de Suez et Bab el-Mandeb — les trois nœuds clés de la circulation énergétique mondiale.

Dans ce contexte, la désintégration de la Syrie et de l’Asie occidentale, et la construction d’oléogazoducs passant par ces territoires, devient un enjeu stratégique majeur.

Voici les acteurs en jeu. Le reste — même l’Arabie saoudite — compte peu. Les monarchies médiévales ne cherchent qu’à conserver leur richesse, maintenir leur pouvoir, et apaiser leur population au strict minimum. La cause palestinienne, arabe ou musulmane ne les intéresse que si elle ne menace pas le statu quo ni ne dérange les puissances occidentales qui garantissent leur contrôle sur leurs peuples.

21/07/2025

Syrie : centenaire de la Victoire d'Al Kafr
سوريا: الذكرى المئوية لانتصار الكَفْر
Syria: Centenary of Al-Kafr victory

د. ريم منصور سلطان الأطرش

اليوم 21 تموز، هو الذكرى المئوية لانطلاق الثورة السورية الكبرى، بمعركة الكَفْر المظفّرة.

تُرى، ماذا ينتظرنا اليوم من أحداث؟!

في بيانه إلى السلاح، أعلن القائد العام سلطان الأطرش أن الهدف الأول للثورة هو توحيد البلاد السورية ساحلا وداخلا (أي توحيد بلاد الشام كلها التي مزقتها اتفاقيات سايكس بيكو 1916، ومهّدت لوعد بلفور 1917)، والهدف الثاني للثورة هو الاستقلال.

وبعد مئة عام، ها نحن نواجه التحدّيات ذاتها في بلادنا، الهادفة لتفتيتها... تُرى، هل نكون نحن على مستوى تلك التحديات اليوم لنقوم بمواجهتها ونعود لتوحيد بلاد الشام، كما كان هدف ثورة ال 1925؟ أم أن هذه البلاد استحقت رجالاتها ونساءها من مؤسسي دولتها، لكننا نحن لم نستحقها هي لأننا لم نحافظ على سيادتها واستقلالها برموش عيوننا؟!

Dr. Rim Mansour Sultan al-Attrache

Aujourd'hui, 21 juillet, marque le centenaire du début de la Grande Révolution syrienne, avec la bataille victorieuse de Kafr.

Que nous réservent les événements d'aujourd'hui ?

Dans son appel aux armes, le commandant en chef Sultan al-Atrash a déclaré que le premier objectif de la révolution était d'unifier le pays syrien, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur (c'est-à-dire unifier l'ensemble du pays du Levant, déchiré par les accords Sykes-Picot de 1916, qui ont ouvert la voie à la promesse Balfour de 1917), et que le deuxième objectif était l'indépendance.

Cent ans plus tard, nous sommes confrontés aux mêmes défis dans notre pays, qui visent à le diviser... Sommes-nous aujourd'hui à la hauteur de ces défis pour les relever et revenir à l'unification du Levant, comme le voulait la révolution de 1925 ? Ou bien ce pays méritait-il ses hommes et ses femmes qui ont fondé son État, mais nous ne le méritons pas parce que nous n'avons pas préservé sa souveraineté et son indépendance au prix de notre vie ?

Dr. Reem Mansour Sultan al-Atrash

Today, July 21, marks the 100th anniversary of the start of the Great Syrian Revolution with the victorious Battle of Al-Kafr.

What events await us today?

In his statement to the armed forces, Commander-in-Chief Sultan al-Atrash declared that the primary goal of the revolution was to unite Syria, both inside and outside its borders (i.e., to reunite the entire Levant, which had been torn apart by the Sykes-Picot Agreement of 1916 and paved the way for the Balfour Declaration of 1917). The second goal of the revolution was independence.

A hundred years later, we are facing the same challenges in our country, which aim to fragment it... Are we up to the task of facing these challenges today and reuniting the Levant, as was the goal of the 1925 revolution? Or did this country deserve its men and women who founded it, but we did not deserve it because we did not defend its sovereignty and independence with our lives? 




 Syria's Revolution Against French Mandate (1925-1937)

These documents describe the French occupation of Syria and Lebanon in the period following World War I, with a particular focus on the Great Syrian Revolt (1925–1937). The sources detail French strategies for control, including military repression, economic pressure, and attempts to exploit local divisions. The documents also illustrate the resistance of the Druze, the people of Hauran, and the Lajja, highlighting the grievances that drove the population to revolt, such as taxation and land confiscation. In addition, they reveal attempts to organise the revolution and unite national ranks, as well as internal leadership challenges and tribal divisions that influenced the course of events.

La révolution syrienne contre le mandat français (1925-1937)

Ces documents décrivent l'occupation française de la Syrie et du Liban après la Première Guerre mondiale, en mettant particulièrement l'accent sur la Grande Révolte syrienne (1925-1937). Les sources détaillent les stratégies françaises pour maintenir leur contrôle, notamment la répression militaire, la pression économique et les tentatives d'exploitation des divisions locales. Les documents illustrent également la résistance des Druzes, des habitants du Hauran et de la Lajja, et mettent en évidence les injustices qui ont poussé la population à se soulever, telles que l'imposition de taxes et la confiscation des terres. En outre, ils révèlent les tentatives d'organisation de la révolution et d'unification des rangs nationaux, ainsi que les défis liés au leadership interne et les divisions tribales qui ont influencé le cours des événements.

الثورة السورية الكبرى ضد الانتداب الفرنسي 

(1937-1925)

تصف هذه الوثائق الاحتلال الفرنسي لسوريا ولبنان في الفترة التي تلت الحرب العالمية الأولى، مع التركيز بشكل خاص على الثورة السورية الكبرى (1925-1937). تُفصّل المصادر الاستراتيجيات الفرنسية للسيطرة، بما في ذلك القمع العسكري، والضغط الاقتصادي، ومحاولات استغلال الانقسامات المحلية. كما توضح الوثائق مقاومة الدروز وأهل حوران واللجاة، وتبرز المظالم التي دفعت السكان للانتفاض، مثل فرض الضرائب وسلب الأراضي. بالإضافة إلى ذلك، تكشف عن محاولات تنظيم الثورة وتوحيد الصفوف الوطنية، إلى جانب تحديات القيادة الداخلية والانقسامات القبلية التي أثرت على مسار لأحداث.


 

20/07/2025

Soueïda assiégée : le nettoyage ethnique des Druzes de Syrie
Appel urgent – Juillet 2025

عربية English Español

Traduit par Tlaxcala

Cette déclaration est émise par une coalition d'étudiants, de chercheurs et d'activistes druzes d’Amérique du Nord (Canada, USA et Mexique).
Nous nous exprimons en tant que membres de la diaspora ayant des liens familiaux et culturels directs avec Soueïda, et nous refusons de rester silencieux face à cette campagne de nettoyage ethnique contre notre peuple. Contact

Le 15 juillet 2025, les forces du gouvernement intérimaire syrien dirigées par Ahmed al-Charaa, connu des Syriens sous le nom d’Abou Mohammad al-Jolani — ancien commandant de la branche syrienne d’Al Qaïda et ancien affilié de l’État islamique — ont lancé une offensive de grande ampleur contre la ville à majorité druze de Soueïda.

Cette opération, présentée comme une mission visant à « rétablir l’ordre » et à faire respecter « la sécurité dans la province », fut en réalité le début d’un massacre sectaire minutieusement planifié. En l’espace de quatre jours, ce qui s’est déroulé fut un nettoyage ethnique orchestré de la population druze, mené par des forces djihadistes alignées sur l’État et soutenues par les mêmes individus qui avaient déjà dirigé des escadrons de la mort sous des bannières extrémistes.

Massacres et assassinats ciblés de civils

De nombreux rapports crédibles et témoignages directs confirment que les forces gouvernementales syriennes et les milices alliées ont exécuté des civils druzes chez eux et dans les rues. L’un des épisodes les plus atroces fut le meurtre de 12 à 15 civils druzes non armés, rassemblés dans la maison d’hôtes de la famille Radwan, tués à bout portant. Dans un autre cas, six hommes druzes ont été sommairement exécutés devant chez eux.

Selon Sky News, Reuters et The Guardian, les exécutions sur le terrain furent généralisées et les victimes incluaient des femmes, des enfants et du personnel médical. Dès le premier jour du massacre, le Réseau syrien pour les droits de l’homme (SNHR) confirmait au moins 321 morts civils, dont des enfants de seulement 18 mois, tués devant leurs familles. Certains furent mutilés, violés ou décapités. Des hommes druzes furent humiliés, des religieux tournés en dérision, et des captifs forcés de renier leur foi avant d’être exécutés. Dans une vidéo authentifiée, des hommes druzes sont jetés d’un balcon puis abattus en plein vol — un crime de guerre filmé.

Alors que les premiers rapports évoquaient des centaines de morts entre le 13 et le 18 juillet 2025, le bilan réel dépasserait désormais les 1 000 victimes, et continue d’augmenter. De nombreux corps restent introuvables, enterrés dans des fosses communes ou méconnaissables du fait des destructions et du ciblage systématique des familles.

Ville coupée du monde

Le régime intérimaire syrien a coupé l’électricité, l’eau et les communications, transformant Soueïda en une prison à ciel ouvert. Le HCR et d’autres organisations humanitaires ont indiqué ne pas pouvoir accéder à la ville, bloquées qu’elles étaient par les tirs et les barrages. Les hôpitaux étaient submergés, avec plus de 200 corps entassés dans les morgues et les couloirs. L’hôpital national de Soueïda a été pris d’assaut par des combattants armés, qui y ont ouvert le feu, détruit les équipements et tué le personnel. À ce jour, seuls quelques centres de santé locaux restent fonctionnels, les principaux hôpitaux ayant été bombardés.

La nourriture s’est épuisée. Les nourrissons n’avaient plus de lait. Les magasins ont été vidés et pillés par des milices tribales alliées au régime. Des quartiers entiers ont été réduits en cendres. Au 18 juillet, on estimait entre 25 000 et 60 000 personnes déplacées, beaucoup sans abri ni vivres. Les efforts de secours ont été délibérément entravés.

Des preuves documentées

Les médias internationaux Reuters, The Guardian, Associated Press, Sky News, et le Times of Israel ont confirmé les atrocités à l’aide de reportages sur le terrain, de vidéos, et de témoignages de survivants.

Le Réseau syrien pour les droits de l’homme (SNHR) et l’Observatoire syrien des droits de l’homme (SOHR) ont tous deux qualifié cette opération de campagne de nettoyage sectaire, le SNHR la décrivant comme « l’un des massacres les plus marquants de nettoyage ethnique et religieux de l’histoire récente de la Syrie ».

Même Ahmed al-Charaa, président autoproclamé du gouvernement intérimaire syrien, a reconnu que des crimes avaient eu lieu, mais a rejeté la faute sur des “groupes hors-la-loi” non identifiés, malgré les preuves accablantes impliquant ses propres combattants, issus pour beaucoup d’anciens réseaux djihadistes et déjà connus pour leurs crimes de guerre.

Le monde ne peut détourner le regard. Nous exigeons :

● Une enquête internationale formelle sur le massacre de Soueïda et des poursuites contre les responsables, y compris Ahmed al-Charaa (Jolani) et les membres de son commandement militaire.

● Un corridor humanitaire d’urgence via la Jordanie pour acheminer nourriture, eau et soins médicaux.

● La reconnaissance immédiate par l’ONU et les instances internationales que ce qui s’est produit à Soueïda constitue des crimes contre l’humanité et un acte de nettoyage ethnique.

Les Druzes de Soueïda ont déjà été menacés de génocide — ce n’est pas la première fois que leur sang est jugé dispensable. Mais aujourd’hui, leur massacre est filmé, documenté, et indéniable.

Si la communauté internationale reste passive, elle est complice.

 Emad Hajjaj

17/07/2025

JOSEPH MASSAD
L’agression israélienne contre la Syrie fait avancer un plan vieux d’un siècle visant à embrigader les Druzes

L’article ci-dessous du chercheur palestino-usaméricain Joseph Massad, datant du mois de mai dernier, met en lumière la logique historique derrière la nouvelle attaque israélienne contre la Syrie

Joseph Massad, Midle East Eye, 6/5/2025
Traduit par Fausto GiudiceTlaxcala 

De la Palestine de l’époque du mandat britannique à la Syrie post-Assad d’aujourd’hui, les dirigeants sionistes ont ciblé les communautés druzes pour fragmenter la société arabe et enraciner un ordre colonial de peuplement.


Des soldats israéliens empêchent une famille druze syrienne de s’approcher de la frontière près de Majdal Shams, sur le plateau du Golan occupé par Israël, le 3 mai 2025 (Jalaa Marey/AFP)

La semaine dernière (fin avril 2025), l’ armée israélienne a pris du temps sur son programme chargé d’extermination des Palestiniens de Gaza , de bombardement et de tirs sur les Palestiniens à travers la Cisjordanie, de bombardement du Liban et de lancement d’une série de bombardements sur le territoire syrien - dont la capitale Damas - pour lancer une série de bombardements très spéciaux .

Le dernier raid aérien visait ce qu’Israël a présenté comme « un groupe extrémiste » qui avait attaqué des membres de la communauté druze syrienne, qu’Israël avait « promis » de défendre en Syrie même.

Après la chute du régime de l’ancien président Bachar al-Assad provoquée en décembre dernier par Hay’at Tahrir al-Cham (HTS), ancienne branche d’Al-Qaïda, des violences sectaires liées à l’État ont éclaté contre  les Alaouites et les Druzes syriens . Les minorités religieuses se sentent assiégées et craignent de plus en plus l’avenir.

Malgré les assurances du président syrien  autoproclamé par intérim  et ancien commandant d’Al-Qaïda , Ahmed al-Charaa, selon lesquelles les minorités religieuses seraient protégées, le régime a déjà commencé à imposer des restrictions « islamistes sunnites » sur de nombreux aspects de la société, y compris  les programmes scolaires  et la ségrégation des sexes dans  les transports publics .

Pendant ce temps, la violence sectaire perpétrée par des groupes liés à l’État et des milices non étatiques persiste . 

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C’est dans le contexte de cette violence sectaire qu’Israël a vu une opportunité de poursuivre un programme que le mouvement sioniste poursuivait depuis les années 1920 : créer de nouveaux schismes, ou exploiter les schismes existants, entre les groupes religieux en Palestine et dans les pays arabes environnants, dans une stratégie classique de diviser pour mieux régner.

Cette politique israélienne continue vise à donner une plus grande légitimité à la prétendue raison d’être d’Israël – non pas en tant que colonie sioniste européenne servant les intérêts impériaux européens et usaméricains, mais en tant qu’État sectaire religieux dont le modèle devrait être reproduit dans tout le Moyen-Orient, en divisant les groupes religieux autochtones en petits États distincts pour « protéger » les minorités.

Plan sectaire

Israël estime que la normalisation des relations dans la région ne peut se faire que si de tels États sectaires sont créés, notamment au Liban et en Syrie.

Dès les années 1930, les dirigeants israéliens s’allièrent aux sectaires maronites libanais et, en 1946, ils signèrent un accord politique avec l’Église maronite sectaire.

Leur soutien ultérieur à des groupes chrétiens fascistes libanais, comme les Phalangistes – qui cherchaient à établir un État maronite au Liban – s’inscrivait dans les plans sionistes pour la communauté druze palestinienne. Cette stratégie a débuté dans les années 1920, lorsque les colons sionistes ont commencé à cibler la population druze palestinienne.

Au lendemain de la Première Guerre mondiale et suite au soutien britannique au colonialisme de peuplement sioniste en Palestine, les dirigeants sionistes ont lancé des efforts pour créer des divisions sectaires entre chrétiens et musulmans palestiniens.

Les Palestiniens, cependant, étaient unis dans leur opposition au sionisme et à l’occupation britannique à travers les « Associations musulmanes-chrétiennes », établies en 1918 comme instruments institutionnels d’unité nationale et de résistance au régime colonial.

Un projet sioniste connexe visait à isoler la petite communauté religieuse druze palestinienne afin de la cultiver comme un allié potentiel.

Au début du mandat britannique en 1922, les Druzes palestiniens étaient au nombre de 7 000 , vivant dans 18 villages à travers la Palestine et représentant moins d’un pour cent des 750 000 habitants du pays.

Mythologie coloniale

Les puissances coloniales s’appuyaient souvent sur des mythologies raciales pour diviser les populations autochtones. Alors que les Français affirmaient que les Berbères algériens descendaient des Gaulois pour les distinguer de leurs compatriotes arabes, les Britanniques présentaient les Druzes comme des descendants des Croisés, les décrivant comme une « race blanche plus ancienne » non arabe et « une race beaucoup plus propre et plus belle » que les autres Palestiniens, en raison de la prédominance de la peau claire et des yeux bleus parmi eux.

Bien que les Druzes aient été initialement considérés comme trop marginaux pour être embrigadés, à la fin des années 1920 et au début des années 1930, les dirigeants sionistes ont mené une campagne concertée pour les intégrer.

Tout comme ils avaient exploité les rivalités entre les familles palestiniennes importantes de Jérusalem – les Husayni et les Nashashibi – les sionistes ont cherché à faire de même avec les Druzes, en encourageant le factionnalisme entre les Tarifet les Khayr , et en promouvant une identité sectaire particulariste.

Dans les années 1920, les autorités d’occupation britanniques ont instauré un système sectaire en Palestine pour servir la colonisation juive européenne – un système qui séparait la communauté druze palestinienne du reste du peuple palestinien. 

Aux côtés des sionistes, les Britanniques ont encouragé le factionnalisme et le communautarisme religieux – des efforts qui ont abouti à la fondation de la Druze Union Society sectaire en 1932, aux côtés de nouvelles sociétés musulmanes et chrétiennes orthodoxes formées à la même période dans le sillage de la politique britannique.

La même année, les efforts sionistes pour coopter les dirigeants druzes s’intensifient, se concentrant sur une faction en particulier et encourageant son sectarisme.

Cela provoqua des affrontements entre les différentes factions druzes en 1933, mais la famille nationaliste Tarif conserva son leadership et vainquit la faction collaborant avec les sionistes. Ces derniers espéraient que la cooptation des Druzes palestiniens ouvrirait la voie à des alliances avec les populations druzes plus importantes de Syrie et du Liban.

Tactiques anti-révolte

Dans la seconde moitié des années 1930, pendant la Grande Révolte palestinienne contre l’occupation britannique et la colonisation sioniste européenne (1936-1939), les sionistes et les Britanniques ont intensifié leur campagne sectaire pour empêcher les Palestiniens druzes de rejoindre le soulèvement anticolonial.

À cette fin, ils enrôlèrent Cheikh Hassan Abou Rukun , chef de faction druze du village palestinien d’Isfiya, à une époque où des Druzes de Palestine, de Syrie et du Liban avaient rejoint la révolte . En novembre 1938, Abou Rukun fut tué par les révolutionnaires palestiniens en tant que collaborateur, et son village fut attaqué pour expulser d’autres collaborateurs.

Les sionistes ont exploité son assassinat dans leur campagne sectaire visant à embrigader la communauté druze, affirmant qu’il était ciblé parce qu’il était druze plutôt que parce qu’il était un collaborateur.

En fait, pendant la révolte palestinienne, les révolutionnaires ont tué environ 1 000 collaborateurs palestiniens – la plupart d’entre eux étaient des musulmans sunnites, dont beaucoup étaient issus de familles importantes.

Alors même que les sionistes travaillaient assidûment à répandre le sectarisme parmi les communautés druzes de Palestine, de Syrie et du Liban, à la fin de 1937, ils prévoyaient simultanément d’expulser toute la population druze - alors au nombre de 10 000 personnes - de l’État juif projeté par la Commission Peel britannique , puisque tous les villages druzes se trouvaient à l’intérieur des frontières que celle-ci recommandait.

Pendant ce temps, les autorités d’occupation britanniques ont fait avancer leur projet sectaire en payant certains dirigeants druzes pour qu’ils s’abstiennent de participer à la révolte.

Schémas de transfert

En 1938, les sionistes établirent des relations avec le chef anticolonial druze syrien Sultan al-Attrache , dont la révolte de 1925-1927 contre le régime français avait été réprimée dix ans plus tôt. Ils proposèrent à al-Attrache le « plan de transfert » – l’expulsion de la communauté druze palestinienne, présentée comme un moyen de la protéger des attaques des révolutionnaires palestiniens.

Al-Attrache n’acceptait que la migration volontaire de ceux qui cherchaient refuge, mais refusait tout accord d’amitié avec les sionistes.

Pour atteindre al-Attrache, les sionistes ont fait appel à l’un de leurs contacts, Yusuf al-’Aysami , un ancien assistant druze syrien qui avait été en exil en Transjordanie dans les années 1930. Pendant son exil, il a rendu visite aux Druzes palestiniens et a établi des liens avec les sionistes.

En 1939, Haïm Weizmann, chef de l’Organisation sioniste, était favorable à l’idée d’expulser les Druzes. L’émigration « volontaire » de 10 000 Palestiniens – qui, selon lui, « seraient sans doute suivis dautres » – offrait une précieuse opportunité de faire progresser la colonisation européenne juive en Galilée, région du nord de la Palestine.

Le financement de l’achat de terres druzes ne se matérialisa cependant jamais. En 1940, la réconciliation entre certaines familles druzes et les révolutionnaires palestiniens allégea la pression sur les dirigeants druzes et ébranla le pari initial des sionistes sur la communauté.

En 1944, l’organisation de renseignement sioniste (alors connue sous le nom de « Shai ») et le syrien al-’Aysami ont élaboré un plan visant à transférer les Druzes en Transjordanie et à financer l’établissement de villages là-bas en échange de toutes les terres druzes en Palestine.

Les sionistes envoyèrent même une expédition d’exploration à l’est de Mafraq, en Transjordanie, pour mettre en œuvre le projet. Cependant, face à l’opposition des Druzes et des Britanniques, le projet échoua fin 1945. Néanmoins, en 1946, les sionistes réussirent à acquérir des terres appartenant aux Druzes en Palestine par l’intermédiaire de collaborateurs locaux.

Embrigadement

En décembre 1947, davantage de Druzes palestiniens rejoignirent la résistance, alors même que les sionistes et les collaborateurs druzes s’efforçaient de maintenir la neutralité de la communauté ou de la recruter du côté sioniste.

En fait, les Druzes de Syrie et du Liban ont rejoint la résistance palestinienne à la conquête sioniste en 1948.

En avril 1948, les combattants de la résistance druze palestinienne ont riposté contre la colonie juive de Ramat Yohanan en réponse à l’attaque d’un colon contre une patrouille druze et ont subi de lourdes pertes .

Cependant, malgré les victoires sionistes, la désertion et le désespoir parmi les combattants druzes ont donné aux agents de renseignement sionistes – parmi lesquels le leader sioniste ukrainien Moshe Dayan - et aux collaborateurs druzes l’occasion de recruter des transfuges druzes .

Lorsque la colonie israélienne fut établie en 1948, l’un de ses premiers actes fut d’institutionnaliser les divisions au sein du peuple palestinien en inventant des identités ethniques fictives, dessinées selon des lignes religieuses et sectaires.

À ce stade, l’État israélien a reconnu les Druzes palestiniens – alors au nombre de 15 000 – comme une secte religieuse « distincte » des autres musulmans et a établi des tribunaux religieux distincts pour eux.

Peu après, Israël a commencé à qualifier la population druze de « Druze » plutôt que d’« Arabe », tant sur le plan ethnique que national. Pourtant, à l’époque comme aujourd’hui, celle-ci a continué à subir la même discrimination raciale et l’oppression de type suprémaciste juif que tous les Palestiniens d’Israël, y compris l’ appropriation de leurs terres.

À ce moment-là, avec le soutien de l’État israélien, les collaborateurs druzes avaient pris le dessus au sein de la communauté. Certains de leurs dirigeants ont même appelé le gouvernement à enrôler des Druzes dans l’armée israélienne – une offre qu’Israël a dûment acceptée, même si les soldats druzes restent interdits de rejoindre les unités « sensibles ».

Résistance druze

Malgré la cooptation par l’État israélien de nombreux membres de la communauté druze, la résistance à la colonisation s’est poursuivie à un rythme soutenu.

Le poète druze palestinien Samih al-Qasim (1939-2014) demeure l’une des trois figures les plus célèbres du panthéon palestinien des poètes connus pour leur résistance au sionisme (les deux autres étant Tawfiq Zayyad et Mahmoud Darwish). Son œuvre est non seulement largement récitée dans la société palestinienne, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de la Palestine, mais nombre de ses poèmes ont été mis en musique par des chanteuses telles que Kamilya Jubran et Rim al-Banna .

Parmi les autres figures littéraires et universitaires druzes palestiniennes de premier plan à l’avant-garde de la résistance au sionisme et au colonialisme israélien figurent le romancier Salman Natour (1949-2016) ; le poète contemporain Sami Muhanna, qu’Israël a emprisonné à plusieurs reprises pour ses opinions politiques ; le regretté érudit Sulayman Bashir (1947-1991) qui a écrit sur l’histoire des relations de l’URSS avec le nationalisme palestinien et les « communistes » juifs sionistes ; et l’historien Kais Firro (1944-2019), connu pour ses histoires de la communauté druze.

La tentative actuelle d’Israël de coopter les dirigeants druzes syriens vise à reproduire ce qu’il a déjà réussi avec les collaborateurs druzes palestiniens.

Cependant, les dirigeants druzes syriens résistent à cette offensive israélienne en affirmant faire partie intégrante du peuple syrien, tout en condamnant la politique du nouveau régime « islamiste » et sectaire. 

Pourtant, la volonté d’Israël de détruire l’unité arabe reste intacte.