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26/06/2025

GIDEON LEVY
Rendons à César ce qui est à César : Netanyahou a mis fin à la guerre contre l’Iran lorsque Trump lui a ordonné de le faire

Gideon LevyHaaretz, 26/6/2025
Traduit par Fausto GiudiceTlaxcala 

Pouvons-nous dire du bien de Benjamin Netanyahou ? Le Premier ministre savait comment et quand mettre fin à la guerre contre l’Iran.

Pouvons-nous également dire quelque chose de positif à propos de Donald Trump ? Sans l’intervention précise et puissante du président usaméricain, ce conflit se serait transformé en une guerre d’usure démoralisante et sans fin qui aurait dévasté Israël encore plus qu’elle n’aurait dévasté l’Iran, qui a beaucoup plus d’expérience en matière de guerre prolongée.

 
Netanyahou sur les lieux d’une frappe de missile iranien à Rehovot la semaine dernière. Photo Itai Ron

 Il est très douteux que les prédécesseurs de Trump, Barack Obama et Joe Biden, tous deux hésitants, auraient osé ordonner à Netanyahou de mettre fin à la guerre comme l’a fait leur successeur.

Comme il s’agissait d’une guerre d’une dangerosité sans précédent, il est impératif d’exprimer notre gratitude à ceux qui y ont mis fin. Il est facile de dire que la crainte de Netanyahou envers Trump l’a conduit à mettre fin à la guerre, mais on peut supposer qu’il avait également la possibilité de la poursuivre, ne serait-ce que pour une brève période, et de s’attirer des ennuis.

Netanyahou a fait preuve de leadership et de détermination, quelques instants après que son grotesque ministre de la Défense eut gazouillé : « J’ai donné instruction à l’armée israélienne de répondre avec force à la violation du cessez-le-feu par l’Iran. » Sur les questions les plus importantes, Israël a le plus petit gouvernement de son histoire : un gouvernement composé d’un seul homme.

Israël est divisé en deux camps. L’un est convaincu que tout ce que fait Netanyahou est un acte de Dieu ; l’autre, que tout ce qu’il fait est un acte de Satan. Netanyahu n’est ni l’un ni l’autre.

Le principal responsable du massacre du 7 octobre, et en particulier de la guerre sanglante que mène Israël contre Gaza depuis lors, fait parfois des choses qui peuvent et doivent être saluées. La conclusion rapide de la guerre avec l’Iran en est un exemple. Netanyahou mérite d’être salué, car s’il ne l’avait pas terminée rapidement, nous nous serions retrouvés dans une situation terriblement compliquée.

Il aurait été facile de céder à la tentation de continuer à envahir le ciel iranien et à semer davantage de destruction sous les acclamations des médias israéliens, qui sont fascinés par chaque sortie et s’inclinent devant chaque communiqué de presse du porte-parole militaire. Netanyahou a mis fin à la fête alors même que la droite sanguinaire en voulait davantage. Ce fut la sortie de sa vie, même si elle fut motivée par la pression de Trump. Il est regrettable que Trump et Netanyahou refusent depuis des mois de faire la même sortie à Gaza.

La nécessité de cette guerre, dont les résultats sont tout à fait incertains, est très douteuse. La plupart, sinon la totalité, des résultats auraient pu être obtenus par la voie diplomatique. Seul le temps dira s’il s’agissait d’une guerre trompeuse, qui n’a pas réussi à éliminer l’option nucléaire de l’Iran et l’a peut-être même fait progresser, ou d’une guerre qui a mis fin au rêve nucléaire de Téhéran pour de nombreuses années au moins. Il faut également des preuves supplémentaires pour déterminer l’étendue des dommages causés aux mandataires de l’Iran à Gaza et au Liban. Peut-être un Moyen-Orient meilleur, peut-être pas.

On peut s’incliner devant le Mossad et s’émerveiller des capacités démontrées par l’armée de l’air, mais sans pouvoir citer de résultats significatifs et durables, ça n’a aucune valeur, si ce n’est pour faire saliver les fans du genre et pour la performance embarrassante de Yossi Cohen [chef du Mossad de 2016 à 2021, NdT] sur Channel 12 news, qui cherche à s’attribuer le mérite de cette opération.

Nos James Bond tant vantés ont-ils rendu Israël plus sûr ? Seul le temps le dira. Au moins, cette guerre n’était pas génocidaire : en Israël, l’amputation massive s’appelle « Opération Bipeurs » et les gens regardent avec des yeux d’enfants chaque tuerie pyrotechnique et cinématographique sans s’interroger sur sa véritable valeur.

Netanyahou a lancé et gagné cette guerre, et tous ceux qui pensent qu’elle était bonne pour Israël doivent l’admirer pour cela, même s’ils le considèrent comme « le Juif le plus méprisable de l’histoire », comme c’est souvent le cas dans le camp « tout sauf Bibi ». D’un autre côté, ses partisans stupides devraient comprendre à présent qu’il est responsable d’horribles crimes de guerre à Gaza, crimes qui n’ont fait que s’intensifier sous le couvert de la guerre avec l’Iran.

Rendez à César ce qui est à César, et à Dieu ce qui appartient à Dieu, dit le Nouveau Testament. ça s’applique aussi bien à un César cruel comme Netanyahu qu’à un dieu matamore comme Trump.

 

“Si rien d’autre ne marche, yaka bombarder le comité Nobel norvégien et piquer le prix !”
Sajith Kumar, Inde

22/06/2025

GIDEON LEVY
Est-il légitime de tuer un chef d’État ?

Gideon LevyHaaretz, 22/6/2025
Traduit par Fausto GiudiceTlaxcala 

Est-il légitime de discuter de l’assassinat du guide suprême iranien, l’ayatollah Ali Khamenei ? Est-il légitime de tuer un chef d’État, sauf dans de très rares cas ? Si oui, quels chefs d’État sont des cibles légitimes et lesquels ne le sont pas, et qui en décide ? Qui peut affirmer que Khamenei peut être assassiné, mais pas Benjamin Netanyahou ? Que Vladimir Poutine peut être tué, mais pas Donald Trump ? Lequel de ces deux hommes représente le plus grand danger pour le monde ? Tout dépend du point de vue de chacun.

Rick McKee


Quels scientifiques peuvent être tués ? Les scientifiques nucléaires iraniens, oui, les scientifiques nucléaires israéliens, non ? Sur quelle base ? Les deux groupes sont des scientifiques au service de l’industrie la plus monstrueuse qui soit, celle du meurtre. Cela conduit naturellement à la question de savoir si un pays a le droit de posséder des armes nucléaires alors qu’un autre ne l’a pas.

Après tout, le niveau de dangerosité d’un pays peut changer. L’Iran n’a pas toujours été un pays dangereux, et Israël ne sera pas toujours un pays sans danger. Il y a déjà beaucoup de politiciens fous en Israël qui représentent un risque pour toute la région. Serait-il légitime de leur confier le code secret ? Serait-il légitime de les assassiner ?

Ces questions sont extrêmement sensibles ; Israël évite d’en discuter et élude les réponses, invoquant l’argument sacré : « Comment pouvez-vous même comparer ? » Israël ne peut être comparé à aucune autre entité dans le monde. Yigal Amir, qui a assassiné l’ancien Premier ministre Yitzhak Rabin en 1995, estimait que Rabin représentait une menace existentielle pour l’État d’Israël. Peu d’Israéliens pensent que cela donnait à Amir le droit d’assassiner le Premier ministre.

Aujourd’hui, Israël considère que Khamenei représente une menace existentielle et qu’il est donc permis de l’assassiner : « assassiner » est le mot correct ici, le plus précis. Si l’on met de côté l’hypothèse qu’Israël s’est inventée, selon laquelle il est permis de faire ce qui est interdit au reste du monde, il est très difficile de répondre à ces questions. L’argument selon lequel Israël est un cas particulier, parce que tout nous est permis, parce que nous sommes les survivants de l’Holocauste et du massacre du 7 octobre, ne tient pas la route. Le monde commence également à s’en lasser. La réponse à ces questions doit être universelle.

Israël invoque une comparaison entre Khamenei et Hitler pour justifier l’assassinat imminent. Il est clair qu’Hitler devait être éliminé, mais Khamenei n’est pas Hitler. Israël affirme qu’il s’abstient de nuire aux civils. Khamenei est un civil, pas le chef d’état-major ou un général. Nous pouvons également mettre de côté momentanément la question de la légitimité et nous demander s’il est sage de le tuer.

La guerre en Iran est sur le point de se compliquer. Yaniv Kubovich a rapporté que les responsables militaires israéliens affirment soudainement qu’Israël ne peut être soumis à un délai. C’est ainsi que l’on commence à s’enfoncer dans le marécage. Assassiner Khamenei ne ferait qu’empirer les choses.

Pendant ce temps, le ministre de la Défense joue à Dieu. À ce titre, Isrel Katz a annoncé que Khamenei ne pouvait pas être autorisé à « continuer d’exister ». Quels sont les critères de Katz pour être autorisé à « exister » ? Décide-t-il qui doit vivre et qui doit mourir ? Une cour céleste dirigée par un membre ridicule du cabinet israélien ? Le ministre iranien de la Défense est-il autorisé à menacer son homologue israélien de mort ?

Les commentateurs des studios d’information israéliens parlent de la « chasse aux scientifiques » en Iran, faisant peut-être allusion à la chasse aux scientifiques allemands menée par le Mossad en Égypte dans les années 1960. La terminologie a son importance, et elle est aussi ignoble que les propos du ministre de la Défense. On ne « chasse » pas les scientifiques, car ce ne sont pas des animaux (dont la chasse est également horrible), même s’ils sont iraniens.

Les appels à l’assassinat de chefs d’État ne sont légitimes de la part d’aucune partie. Notre Netanyahou est désormais responsable du meurtre de dizaines de milliers de personnes à Gaza. Est-il permis d’appeler à son assassinat afin de sauver ce qui reste de la nation là-bas ? De nombreux Israéliens pensent également qu’il est un tyran, qu’il détruit le pays et ruine la démocratie israélienne, qu’il est le Juif le plus méprisable de l’histoire et lui adressent une foule d’autres insultes – mais personne, espérons-le, n’imagine même discuter de son assassinat.

Le débat sur l’élimination de Khamenei ouvre la voie à la légitimité : désormais, il est permis d’assassiner des chefs d’État. La seule question qui reste à débattre est de savoir qui est une cible légitime et qui ne l’est pas. Les Israéliens ne le sont pas.

17/06/2025

RICH WILLED
Le miroir du tyran : ce que Netanyahou ne dira pas sur l’Iran et la démocratie

Rich Willed, 16/6/2025
Traduit par Fausto GiudiceTlaxcala


S’il y a une chose qui commence vraiment à m’agacer ces derniers temps, c’est la façon dont les Occidentaux privilégiés regardent avec mépris les Palestiniens ou les Iraniens « non civilisés », sans la moindre goutte d’introspection.

Nous parlons de ces personnes en termes binaires. Antisémites. Théocratie. Axe du mal.

 

Pas d’histoire. Pas de contexte. Aucune reconnaissance de notre propre rôle dans cette histoire.

 

En écoutant Netanyahou expliquer ces derniers jours les raisons qui le poussent à attaquer l’Iran, je ne peux m’empêcher de penser qu’il existe une forme particulière d’hypocrisie réservée aux puissants. Une hypocrisie qui ne se nourrit pas du silence, mais des discours.

 

Elle se dissimule derrière le langage de la démocratie, de la liberté et de la moralité, tout en commettant les crimes qu’elle prétend condamner. Peu de personnalités illustrent mieux cette inversion que Benjamin Netanyahou. Ces derniers temps, je me surprends à inverser le sens de ses propos en temps réel. Ce serait presque drôle s’il ne traînait pas le monde au bord de la guerre nucléaire.

 

Le titre d’aujourd’hui en est un parfait exemple : « L’Iran a tenté d’assassiner Trump – à deux reprises ». Aucune preuve. Aucun détail. Juste : « Faites-moi confiance ».

 

Comme s’il allait de soi que nous devions croire un homme qui a menti plus de fois qu’on ne peut compter. Un homme actuellement jugé pour corruption dans son propre pays. Un homme sous le coup d’un mandat d’arrêt de la Cour pénale internationale.

 

Et pourtant, Netanyahou monte sans cesse sur la scène internationale pour dépeindre l’Iran comme un régime tyrannique. Une théocratie brutale qui menace la stabilité régionale, la paix mondiale et l’ordre moral des nations « civilisées ». Il parle de répression, d’autoritarisme religieux, d’ambitions nucléaires...

 

Et pourtant, pendant qu’il parle, des enfants palestiniens gisent sous les décombres israéliens. Dans son propre pays, les juges sont privés de leur indépendance. Les manifestants envahissent Tel-Aviv pour mettre en garde contre la descente d’Israël vers l’autocratie. Et pourtant, les médias et les politiciens occidentaux répètent ses paroles comme s’ils n’en voyaient pas la fausseté.

 

C’est l’astuce séculaire de l’empire : présenter la résistance comme un danger et la domination comme la paix. Traiter son ennemi de tyran tout en larguant des bombes, en construisant des murs et en réduisant au silence toute dissidence. Il s’agit d’un renversement psychologique si profondément ancré dans la psyché occidentale que nous ne le remarquons même plus.

 

Mais que se passerait-il si nous inversions les rôles ?

 

Et si la vraie question n’était pas de savoir ce qui ne va pas en Iran, mais ce qui s’est passé la dernière fois que l’Iran a tenté de se libérer ?

 

Car derrière chaque accusation portée contre l’Iran se cache une histoire que nous ne sommes pas censés nous rappeler. Une histoire qui n’est pas celle du fanatisme, mais celle de la démocratie. Non pas celle de l’extrémisme, mais celle de l’autodétermination nationale. Et c’est cette histoire, et non les missiles ou les milices, que des hommes comme Netanyahou redoutent le plus.

 

Il est révélateur que si peu de gens connaissent cette histoire. Mais je suppose que c’est le but recherché.

 

Car si le monde se souvenait de ce qui s’est passé en Iran en 1953, le discours de Netanyahou commencerait à s’effriter. Toute la supériorité morale de l’Occident commencerait à s’écrouler.



Il y a soixante-dix ans, l’Iran n’était pas une théocratie. C’était une démocratie. Et son Premier ministre, Mohammad Mossadegh, n’était pas un religieux extrémiste ou un fanatique anti-occidental. C’était un réformateur laïc et instruit, largement respecté dans tout l’Iran et même dans certaines régions d’Europe.

 

Il était également profondément attaché à une idée révolutionnaire : les ressources naturelles de l’Iran devaient profiter à son propre peuple.

 

À l’époque, les entreprises britanniques contrôlaient le pétrole iranien, notamment l’Anglo-Iranian Oil Company (BP). Les travailleurs iraniens vivaient dans la pauvreté tandis que les élites britanniques engrangeaient les profits. Mossadegh voyait cela pour ce que c’était : un vol colonial. C’est pourquoi, en 1951, il a fait ce que tout dirigeant qui se respecte aurait dû faire. Il a nationalisé le pétrole iranien.

 

Cet acte a scellé son destin.



Mossadegh porté en triomphe par la foule après la nationalisation de l'Anglo-Iranian

 

Les Britanniques étaient furieux. Mais leur empire déclinant, ils avaient besoin d’aide. Ils se sont donc tournés vers leur partenaire d’après-guerre dans le contrôle mondial : les USA. Ensemble, la CIA et le MI6 ont lancé l’opération Ajax, un coup d’État secret qui a renversé Mossadegh et rétabli le Shah, un monarque aligné sur l’Occident qui a dirigé l’Iran d’une main de fer pendant les 26 années qui ont suivi.

 

Oui, vous avez bien entendu. Et non, ce ne sont pas des rumeurs. Tout cela est accessible à quiconque souhaite s’informer.

 

Dans les années 1950, l’Iran était une démocratie qui fonctionnait. Son dirigeant était élu au suffrage universel. Ce dirigeant agissait dans l’intérêt de son peuple. Et pour cela, l’Occident l’a écrasé.

 

Pourquoi ? Pas à cause de la tyrannie. Mais à cause de la souveraineté.

 

Parce qu’un Iran libre qui contrôlait son propre pétrole était bien plus dangereux pour les intérêts occidentaux qu’un régime brutal qui se pliait aux règles de l’empire.

 

Avant de juger ces pays comme arriérés ou mauvais, nous devrions peut-être prendre le temps de réfléchir. Et faire un peu d’introspection.

 

Car l’Iran n’était pas le seul.

 

Le renversement de Mossadegh n’était pas une anomalie. C’était un modèle. Un coup de semonce à toute nation, en particulier celles riches en ressources, qui osait imaginer l’indépendance. Au cours des décennies qui ont suivi, le schéma est devenu indéniable : chaque fois qu’un pays du Sud tentait d’affirmer sa souveraineté, en particulier sur ses propres ressources, les puissances occidentales intervenaient. Non pas pour défendre la démocratie, mais pour la démanteler.

 

Au Chili, ce fut Salvador Allende. Élu démocratiquement en 1970, il entreprit de nationaliser l’industrie du cuivre, contrôlée en grande partie par des sociétés usaméricaines. Trois ans plus tard, avec le soutien de la CIA, l’armée chilienne organisa un coup d’État violent. Allende fut tué. À sa place, le dictateur Pinochet prit le pouvoir, torturant et faisant disparaître des milliers de personnes. Washington qualifia cela de victoire pour la stabilité.

 

Au Congo, c’était Patrice Lumumba. Jeune, charismatique et déterminé à se libérer de l’exploitation belge, il a été élu Premier ministre en 1960. En quelques mois, il a été renversé puis exécuté, son assassinat ayant été orchestré avec la complicité de la CIA. Le pays a été livré à Mobutu, un homme fort corrompu qui l’a saigné à blanc pendant des décennies.

 

En Irak, Saddam Hussein a été armé et soutenu par les USA jusqu’à ce qu’il se retourne contre les intérêts de l’empire. Lorsqu’il a osé vendre du pétrole en dehors du système pétrodollar et laissé entendre qu’il souhaitait exercer un leadership régional échappant au contrôle usaméricain, le mensonge des armes de destruction massive a vu le jour. La guerre a été présentée comme une libération. Elle s’est transformée en occupation, en chaos et en mort.

 

En Libye, Mouammar Kadhafi était peut-être un personnage complexe, mais une chose est sûre : sa proposition d’une monnaie panafricaine adossée à l’or constituait une menace directe pour la domination des systèmes financiers occidentaux. Quelques mois après avoir lancé cette idée, il a été pris pour cible, bombardé et brutalement exécuté. Son pays n’a plus connu la paix depuis.

 

Et ce ne sont là que quelques exemples parmi les plus connus.

 

Le scénario de l’empire se répète sans cesse. Les dirigeants qui servent les intérêts occidentaux, aussi brutaux soient-ils, sont tolérés, voire soutenus. Mais ceux qui remettent en cause l’ordre économique, qui revendiquent le contrôle de leur pétrole, de leur eau, de leurs terres ou de leur monnaie, sont qualifiés de fous, d’extrémistes ou de terroristes. Leurs démocraties sont déstabilisées. Leurs pays sont sanctionnés, envahis ou réduits en ruines.

 

Il ne s’agit pas de liberté. Cela n’a jamais été le cas.

 

Il s’agit d’obéissance.

 

Et nous revoilà dans le présent, où le scénario continue de se dérouler, presque mot pour mot. Même si, peut-être enfin, il commence à s’effriter.

 

L’Iran est une fois de plus présenté comme le grand méchant. Netanyahou, Trump, les politiciens occidentaux et les médias parlent d’une voix presque unanime. L’Iran est un État voyou, une force déstabilisatrice, le premier sponsor mondial du terrorisme. Israël a mené une « frappe préventive ». Il a le droit de se défendre. Le monde doit défendre Israël contre la théocratie vicieuse qui ne vit que pour le détruire. Le langage est clinique. Répété. Incontesté.

 

Mais arrêtons-nous un instant.

 

Qu’a fait exactement l’Iran ? A-t-il envahi un voisin ? Renversé des gouvernements ? Commis des assassinats ciblés sur le sol étranger ? Posé des bombes dans des hôpitaux et des écoles ?

 

Ou son véritable crime est-il tout autre, bien plus familier et bien moins pardonnable ?

 

L’Iran soutient la résistance palestinienne. Il était l’un des sept pays cités dans le désormais tristement célèbre plan du Pentagone visant à « éliminer » certains pays après le 11 septembre. Le seul qui soit encore debout...

 

L’Iran refuse de s’incliner devant Israël. Il ne se soumettra pas aux USA. Il détient d’immenses réserves de pétrole et de gaz et a insisté, à maintes reprises, pour tracer sa propre voie. Et pour cela, il est présenté comme un grand danger pour la paix mondiale.

 

Pendant ce temps, Israël, un régime d’apartheid doté de l’arme nucléaire et se livrant à un génocide sans vergogne, est en quelque sorte considéré comme l’acteur responsable.

 

Il s’agit là d’un renversement d’une ampleur presque incompréhensible.

 

C’est la tyrannie vendue comme démocratie. La résistance qualifiée de terrorisme.

 

Posez-vous la question suivante : si la guerre nucléaire était vraiment la préoccupation qui motive les actions d’Israël, pourquoi personne ne s’inquiète-t-il du pacte de défense conclu entre l’Iran et l’une des deux plus grandes puissances nucléaires de la planète, la Russie ?

 

Ou peut-être que les menaces nucléaires ne sont des menaces que lorsqu’elles proviennent de ceux qui ne suivent pas les ordres ?

 

Et pendant ce temps, Netanyahou, qui a passé des décennies à démanteler les institutions démocratiques d’Israël, à inciter à la haine raciale et à entraîner son peuple dans un état de guerre sans fin, se tient à la tribune et donne des leçons de liberté au monde entier.

 

Ce serait risible si ce n’était pas aussi mortel.

 

La vérité profonde est la suivante : l’Occident ne craint pas l’extrémisme religieux. Il ne craint pas l’autoritarisme. S’il le craignait, il aurait sanctionné Israël depuis longtemps. Ce qu’il craint, ce qu’il a toujours craint, c’est l’indépendance. Une nation qui pense par elle-même, défend sa dignité et refuse de vendre son âme à l’empire.

 

C’est là la véritable menace.

 

Et peut-être que la question la plus importante que nous devons nous poser est la suivante : qui a le droit d’être libre ?

 

Car c’est là le cœur du problème. Pas seulement en Iran, à Gaza ou en Libye, mais partout où le joug de l’empire a écrasé ceux qui ont osé rêver d’autre chose.

 

Qui a le droit de revendiquer sa souveraineté ? Qui a le droit de nationaliser son pétrole, son eau, ses terres ? Qui a le droit de répondre aux puissances qui dominent le monde ?

 

Est-ce que je vis vraiment dans un pays démocratique si le simple fait de poser ces questions me met en danger ? Est-ce cela que nous prétendons être la liberté ?

 

Car les preuves sont claires : l’Occident applaudira une dictature tant qu’elle respectera ses règles. Et il écrasera une démocratie dès qu’elle sortira du rang.

 

L’Iran n’est pas devenu une dictature parce qu’il était tyrannique. Il est devenu ce qu’il est parce qu’il a osé être libre. La théocratie est née des cendres d’un rêve qui n’a jamais pu se réaliser.

Il ne s’agit pas ici de romancer le régime actuel de l’Iran. Il est brutalement répressif. Les dissidents sont réduits au silence, les femmes sont asservies et la violence d’État est bien réelle. Mais si nous nous arrêtons là, si nous isolons cette vérité du contexte qui l’a fait naître, nous ne nous livrons pas à une réflexion honnête. Nous nous livrons à une morale sélective.

 

La République islamique n’est pas apparue dans le vide. Elle s’est élevée des décombres d’une démocratie écrasée par l’Occident, comme beaucoup de dictatures qui l’ont suivie. Et tant que nous ne serons pas prêts à nous demander comment nous en sommes arrivés là, nous continuerons à commettre la même erreur : réagir aux flammes tout en ignorant l’étincelle.

 

Il en va de même pour le 7 octobre. Cette journée a été horrible. Des vies innocentes ont été perdues. Mais l’isoler, le traiter comme une explosion inexplicable du mal, c’est participer à une amnésie narrative. Car l’horreur ne survient jamais de manière isolée. Elle éclate sous la pression. Et si nous parlons du sang versé ce jour-là sans parler du siège, de l’occupation, de la dépossession, des décennies de déshumanisation qui l’ont précédé, nous ne recherchons pas la vérité. Nous préservons le pouvoir.

 

Netanyahou peut parler de menaces autant qu’il veut. Il peut battre les tambours de guerre, se draper dans le langage de la liberté et appeler au feu au nom de la civilisation.

 

Mais il ne craint pas l’Iran parce que c’est une théocratie. Il le craint parce que c’est une mauvaise théocratie, une théocratie qui ne se plie pas à ses règles et ne se soumet pas à son agenda.

 

Et au final, tout semble toujours revenir à la Palestine.

 

En 2001, sept pays de la région soutenaient ouvertement la cause palestinienne. Aujourd’hui, il n’en reste plus qu’un, qui est désormais dans le collimateur d’Israël.

 

Il est difficile de ne pas se poser la question suivante : si le monde avait agi plus tôt, s’il avait combattu l’injustice au cœur du conflit israélo-palestinien au lieu de la laisser perdurer pendant des décennies, en serions-nous là aujourd’hui ? Cette guerre serait-elle également nécessaire ?

 

Car peut-être, juste peut-être, que résoudre la blessure la plus ancienne du Moyen-Orient pourrait commencer à en guérir d’autres.

 

L’histoire jugera ce moment avec beaucoup plus de clarté que nous ne pouvons le faire aujourd’hui.

 

Mais je ne peux m’empêcher de penser que nous avons peut-être le luxe du recul.

L’avenir de l’humanité exige peut-être que nous allions droit au cœur du problème, dès maintenant.

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16/06/2025

AMOS HAREL
Trump tient Netanyahou à distance alors que le front intérieur israélien fait les frais de la guerre contre l’Iran

L’armée de l’air israélienne a endommagé des installations, tué des scientifiques et ralenti les capacités d’enrichissement d’uranium, mais chaque roquette iranienne qui atteint sa cible porte un coup dur, et ce nouveau front lointain pourrait nous faire oublier ceux qui sont retenus en otages juste à côté de chez nous.

Amos Harel, Haaretz, 16/6/2025

 Traduit par Fausto GiudiceTlaxcala

Trois jours après le début de la nouvelle guerre entre Israël et l’Iran, les règles du jeu commencent à se préciser. Pour l’instant, il s’agit avant tout d’une épreuve d’endurance et d’une course aux dégâts. Après avoir porté un coup d’envoi sévère et assuré sa supériorité aérienne dans l’ouest de l’Iran, Israël veut se garantir suffisamment de temps pour frapper efficacement le plus grand nombre possible de cibles gouvernementales, militaires et nucléaires, par ordre de priorité croissant.


Emad Hajjaj, Jordanie

Dans le même temps, l’Iran tente d’infliger des dommages d’une ampleur similaire sur le front intérieur israélien. Cette fois-ci, il n’hésite pas à viser des infrastructures et des installations militaires situées au cœur de zones civiles densément peuplées.

Comme les frappes israéliennes sont menées par des avions qui volent juste au-dessus des cibles, elles sont plus précises et plus meurtrières (à ce propos, il est presque amusant de se rappeler qu’il y a moins de deux ans, les studios de télévision de droite israéliens étaient remplis de porte-parole du gouvernement expliquant que l’armée de l’air n’était pas indispensable, en raison de leur colère contre la participation des pilotes aux manifestations contre le coup d’État du gouvernement).

Mais les armes iraniennes sont également très précises, comme le montrent certaines frappes documentées, les ogives des missiles laissant derrière elles d’énormes dégâts. Les régions de Tel-Aviv et de Haïfa ont subi des dégâts sans précédent. Au moins 19 civils ont été tués, des centaines d’autres blessés et cinq personnes sont toujours portées disparues dimanche soir.

Lors d’un rassemblement organisé la semaine dernière en l’honneur des réservistes du Commandement du front intérieur, un officier supérieur a déclaré que ses unités avaient répondu aux exigences élevées qui leur avaient été imposées jusqu’à présent, mais a ajouté que la guerre qui a débuté le 7 octobre 2023 n’avait pas entraîné une seule scène de destruction massive en Israël. Depuis vendredi, on dénombre près de dix sites de ce type. Le tir direct de missile à Bat Yam, au sud de Tel-Aviv, a donné lieu à une opération complexe visant à retrouver des personnes ensevelies sous les décombres.

Les deux camps souffrent, mais de manière inégale pour l’instant. Comme il s’agit également d’une guerre de l’image, qui utilise intensivement les nouveaux et les anciens médias, des tentatives de dissimulation sont faites. L’Iran a un problème plus important et, par conséquent, est contraint d’inventer des histoires sur la destruction d’avions de combat israéliens.

En marge : un compte libanais plutôt favorable à Israël a publié dimanche en mon nom une fausse information selon laquelle Israël serait prêt à signer un accord de reddition, compte tenu de la gravité des attaques à la roquette. Cela n’a jamais eu lieu.

Qu’ont accompli les attaques israéliennes jusqu’à présent ? Le programme nucléaire est l’objectif principal et déclaré, mais les résultats semblent quelque peu limités. L’armée de l’air a endommagé des installations, détruit du savoir-faire (en tuant des scientifiques) et des capacités d’enrichissement d’uranium.

Il n’y a pour l’instant aucune information sur les dommages causés aux stocks d’uranium enrichi ou aux grandes concentrations de centrifugeuses. Il semble possible de retarder l’avancement du programme nucléaire, mais Israël aura du mal à le détruire. En ce qui concerne les missiles, Israël a remporté une grande victoire en frappant des lanceurs et en « éclaircissant » quelque peu l’arsenal de missiles.

Kamal Sharaf, Yémen

Dimanche après-midi, l’Iran a tiré une salve de missiles relativement peu importante visant des sites stratégiques. Il faudra encore attendre un jour ou deux pour voir si les Iraniens se montrent plus parcimonieux dans leurs tirs. Néanmoins, chaque missile qui échappe aux systèmes d’interception israéliens peut causer beaucoup de dégâts.

Il est possible que le résultat le plus important obtenu jusqu’à présent dans cette guerre soit l’effet combiné de l’assassinat de nombreux hauts dirigeants et commandants et de la supériorité aérienne acquise. Le régime dirigé par le guide suprême, l’ayatollah Ali Khamenei, est répressif et impopulaire. Si Khamenei lève les yeux et imagine un F-35 israélien dans le ciel, cela affectera certainement sa confiance en lui.

Il est également possible que les actions d’Israël le rendent encore plus déterminé, par crainte que des concessions soient perçues comme une faiblesse et pourraient très bien accélérer la chute du régime. C’est pourquoi on craint une percée iranienne très médiatisée vers l’arme nucléaire, par exemple sous la forme d’un essai nucléaire public dans le désert.

Dans le même temps, ces derniers jours, Khamenei a également perdu un nombre important de personnes qui l’ont accompagné au cours des quatre dernières décennies, voire plus, depuis l’époque de la guerre Iran-Irak. On ne peut qu’espérer qu’il se demande s’il n’a pas trop mis en danger sa propre personne et le régime en minimisant les conséquences de l’attaque israélienne prévue, et s’il ne risque pas de finir comme Hassan Nasrallah, le chef du Hezbollah tué en septembre dernier, ou Bachar al-Assad, le dirigeant syrien dont le régime est tombé en novembre.

À la diféfrence d’Israël, l’Iran a déjà été soumis à des bombardements intensifs de ses villes, lors de la guerre contre l’Irak en 1988. Le prédécesseur de Khamenei, l’ayatollah Khomeini, avait été contraint d’accepter la fin de la guerre avec l’Irak en raison des dégâts causés par la guerre d’usure menée par l’Irak dans la phase finale du conflit, appelée « guerre des villes ». C’était une décision que Khomeini avait alors qualifiée de « boire le calice empoisonné ». Israël espère obtenir quelque chose de similaire avec Khamenei, mais il est encore trop tôt pour dire s’il s’agit d’un espoir vain.


Muzaffar Yulchiboev, Ouzbékistan

Qu’en est-il des otages ?

En réponse aux critiques dont il a fait l’objet dimanche, le Premier ministre Benjamin Netanyahou a visité les lieux de la destruction. La plupart de ses ministres restent à l’écart (et dans la plupart des cas, c’est probablement mieux ainsi).

Netanyahou ne prend pas la peine de répondre aux questions qui ne sont pas rédigées par ses collaborateurs, il est donc difficile de savoir, d’après ses déclarations, si Israël a une stratégie pour mettre fin à la guerre. Et force est de constater une fois de plus que beaucoup dépendra du président usaméricain Donald Trump.

Dimanche, dans un autre tweet plutôt bizarre, Trump a appelé à un accord entre Israël et l’Iran, a promis de « rendre sa grandeur au Moyen-Orient » et, comme d’habitude, s’est plaint de ne pas être suffisamment reconnu. Il est difficile de deviner quelles sont ses intentions, mis à part son désir déclaré de mettre fin à la guerre.

Cependant, comme d’habitude, il semble peu probable que cela s’accompagne de capacités de médiation concrètes. Jusqu’à présent, mis à part le cessez-le-feu entre Israël et le Hamas et l’accord sur les otages conclu en janvier, ses collaborateurs ont échoué dans tous leurs efforts sur tous les fronts.

À l’heure actuelle, il semble (mais cela pourrait bien être faux) que Trump tente de maintenir son administration à distance des attaques israéliennes. Netanyahou, quant à lui, souhaite clairement impliquer les USAméricains, en partie parce qu’il a besoin d’eux pour attaquer des sites qu’Israël ne peut pas atteindre seul.

Dimanche, une vieille idée a refait surface : celle que les USA devraient louer à Israël certains de leurs armements spéciaux nécessaires à cette fin. Mais cette idée ne semble pas réalisable à court terme, compte tenu du savoir-faire nécessaire pour utiliser et entretenir cet équipement, qui est également important pour les USA eux-mêmes. Trump est capable de beaucoup de choses extrêmes, mais il est douteux qu’il puisse approuver une telle mesure.

Israël se prépare toujours à des scénarios qui pourraient être encore pires que les attaques iraniennes sur son territoire. Cette semaine, l’armée israélienne a considérablement réduit ses forces dans la bande de Gaza et a envoyé la plupart des troupes retirées à la frontière orientale, afin d’empêcher l’envoi de milices chiites depuis la Jordanie pour mener une attaque similaire à celle du 7 octobre.

L’opération militaire à Gaza fait du surplace et est désormais reléguée au second plan par le nouveau front avec l’Iran. Mais le risque est grand que la question des otages soit négligée, d’autant plus que le gouvernement n’a, de toute façon, montré que peu d’intérêt pour leur sort.

Dans le même temps, sans que l’opinion publique n’y prête guère attention, le mandat du directeur du Shin Bet, Ronen Bar, a pris fin dimanche. Bar avait été limogé par Netanyahou, s’était opposé à cette décision, avait battu le Premier ministre devant la Cour suprême dans un litige sur cette question, puis avait décidé de démissionner. Compte tenu de la grave crise que traversait sa relation avec Netanyahou, cette décision était en partie justifiée.

Il laisse néanmoins le service entre de bonnes mains. Son adjoint, S., assurera l’intérim à la tête de l’agence, et son ancien adjoint, M., reprendra ce poste jusqu’à la nomination d’un directeur permanent. L’annonce par Netanyahou de la nomination du général David Zini à ce poste est actuellement suspendue.

Sous la direction de Bar, le Shin Bet a échoué lamentablement le 7 octobre 2023, ce qui a contraint Bar à démissionner. Mais le traitement odieux que lui a réservé Netanyahou, notamment une campagne diffamatoire dans les médias de droite, reflétait une volonté de rejeter toute la responsabilité de cet échec sur les militaires et les professionnels du renseignement, tout en ignorant les succès remportés par les services sous la direction de Bar avant et après le massacre.

Mais tout comme la haine de la droite envers les pilotes de l’armée de l’air s’est éteinte à la lumière de leurs récentes réalisations, on peut au moins espérer qu’à l’avenir, le caractère et les actions de Bar mériteront également une évaluation plus juste et plus substantielle.

Suicide politique, par Vasco Gargalo, Portugal