La vaste campagne de propagande menée par le bureau du Premier ministre vise à convaincre l’opinion publique israélienne que l’establishment de la défense est le seul responsable de l’échec, et à empêcher la création d’une commission d’enquête publique. Une seule chose fait obstacle à cette ligne de défense : les faits.
La carrière politique de Bibi, par Manny Francisco, Philippines
Les enquêtes menées par le service de sécurité Shin Bet et la police israélienne, qui menacent d’impliquer plusieurs personnes au sein du cabinet du Premier ministre, tournent autour d’une seule question principale : les efforts déployés par les membres du cercle rapproché de Benjamin Netanyahu pour le dédouaner de toute responsabilité dans les échecs qui ont conduit au massacre du 7 octobre de l’année dernière et, plus tard, des accusations selon lesquelles il aurait délibérément fait échouer un accord pour la libération d’autres otages. La vaste campagne d’influence menée par le cabinet du Premier ministre depuis le début de la guerre avec le Hamas dans la bande de Gaza vise à persuader le public israélien et à empêcher la création d’une commission d’enquête nationale sur l’événement. Une partie de l’affaire a fait l’objet d’une enquête criminelle et ravive des tensions de longue date entre Netanyahou, d’une part, et les forces de l’ordre et les hauts gradés de la défense, d’autre part. Ronen Bergman a rapporté dans Yedioth Aharonot lundi que l’enquête se concentre sur ce que le cabinet du Premier ministre savait de l’opération carte SIM avant le déclenchement de la guerre. Comme cela a été rapporté, le Shin Bet a surveillé des centaines de cartes SIM installées dans les téléphones portables des membres du Hamas à Gaza. Ces cartes devaient permettre aux militants de diffuser des vidéos de l’attaque directement dans la bande de Gaza et de communiquer avec leurs membres après leur passage en Israël. L’activation des cartes SIM était connue en Israël pour signaler une attaque imminente du Hamas - et le Shin Bet savait qu’elles étaient utilisées dans les heures précédant l’aube du 7 octobre. Ce fait, ainsi que les changements de localisation des responsables et des principaux activistes du Hamas, ont été la principale raison des consultations menées par le chef d’état-major des FDI, Herzl Halevi, et le chef du Shin Bet, Ronen Bar, dans les heures qui ont précédé l’attaque. La ligne de défense publique de Netanyahou est la suivante : « Personne ne m’a prévenu ». Selon sa version des faits, le Shin Bet et Tsahal ne l’ont pas informé avant qu’un barrage massif de roquettes ne s’abatte sur Israël à 6h29 le 7 octobre, et il n’est donc pas responsable de la débâcle. Ses partisans et leurs porte-parole sur les réseaux sociaux et dans les médias ont formulé des allégations plus graves : les renseignements ont été intentionnellement cachés au premier ministre. Ils laissent entendre que cela est lié aux tensions entre Netanyahou et l’establishment de la défense au sujet de la réforme judiciaire et de la menace de milliers de réservistes de ne pas se présenter à leur poste en signe de protestation. Le mois dernier, Omri Maniv de Channel 12 News a rapporté que le Shin Bet avait effectivement publié une mise à jour concernant l’activation des cartes SIM à 2h58 du matin, par le biais d’un réseau informatique qui fournit des informations simultanément au Conseil de sécurité nationale (qui rend compte directement au Premier ministre) et à la police israélienne. L’avertissement était accompagné d’une déclaration indiquant qu’il pouvait s’agir d’une préparation à une attaque du Hamas. Plus tard, Bar a décidé d’envoyer deux équipes d’intervention rapide (« Tequila ») dans la zone frontalière de Gaza, mais bien que les évaluations aient continué à parler d’une présence du Hamas le long de la frontière, elles ne prévoyaient pas une attaque simultanée sur des dizaines de sites. Une autre alerte concernant les cartes SIM et d’autres développements inquiétants a été transmise au secrétaire militaire de Netanyahou, le général de division Avi Gil, par le Shin Bet quelques minutes avant le début de l’attaque. Gil en a discuté par téléphone avec Netanyahou au milieu de la première série de tirs de roquettes ; ils ont eu une seconde conversation environ 11 minutes plus tard. Au cours des trois heures et demie qui ont précédé le début de l’attaque, le bureau du Premier ministre a été tenu informé par deux canaux différents : le Conseil de sécurité nationale et son secrétaire militaire. On ne sait toujours pas exactement quand Gil a été mis au courant et si les informations lui ont été communiquées en temps utile par l’intermédiaire de son conseiller en renseignement, le colonel S. Netanyahou a affirmé à plusieurs reprises qu’il n’avait entendu parler pour la première fois des événements de cette nuit-là que lors de la conversation qui s’est déroulée à 6h29. Son bureau a même cherché à nier qu’il était au courant du suivi des cartes SIM, et a été contraint de se rétracter lorsqu’il est apparu clairement que cette affirmation était sans fondement. Quoi qu’il en soit, l’enquête semble montrer que le Shin Bet a tenté d’informer l’équipe de. Netanyahou sur les deux canaux dans les heures qui ont précédé le massacre. Cela contredit la ligne de défense de Netanyahou, qui affirme que l’information lui a été cachée. On peut donc soupçonner que ce n’est pas l’imaginaire « État profond », les FDI et le Shin Bet qui lui ont délibérément refusé l’information ; ce sont plutôt des problèmes dans sa propre cour - son secrétaire militaire et le Conseil de sécurité nationale - qui ont empêché sa transmission rapide. Si tout ce qui s’est passé cette nuit-là est une absence de rapport, ce n’est pas criminel en soi. Mais cela met en évidence des problèmes opérationnels au sein du cabinet du Premier ministre et sape les efforts déployés pour transférer la responsabilité au Shin Bet. Cela explique probablement les tensions croissantes entre Netanyahou et Bar. Pour Netanyahou, Bar et ses collaborateurs sont les premiers responsables de l’échec, mais au lieu de tomber à bras raccourcis sur le Premier ministre, ils sont engagés dans les enquêtes en cours sur son bureau (les partisans de Netanyahou laissent même entendre qu’ils extorquent des aveux contre lui à ceux qui font l’objet de l’enquête). Le Shin Bet mène une autre enquête sur l’affaire du vol d’informations sensibles des services de renseignement militaire, qui ont ensuite été divulguées aux médias étrangers. L’enquête a conduit à l’arrestation par le Shin Bet d’Eli Feldstein, l’un des porte-parole du premier ministre, un fait que le cabinet du premier ministre a également tenté de nier dans un premier temps. En outre, quatre autres officiers du renseignement militaire et du Shin Bet ont également été arrêtés. D’autres membres du cabinet du premier ministre et des personnalités qui lui sont proches pourraient être convoqués pour être interrogés. Le Premier ministre et son entourage sont confrontés à un mouvement de tenaille mené par le Shin Bet. Ceci explique probablement les menaces de limogeage de Bar qui ont émergé la semaine dernière. Le chef du Shin Bet est aussi celui qui a parlé le plus fort dans les discussions internes sur la nécessité de parvenir rapidement à un accord sur les otages avec le Hamas. Bar a récemment répété aux ministres qu’un accord était à portée de main, ce que nie Netanyahou. Lundi, un autre haut fonctionnaire de la défense a démissionné : Le bureau du nouveau ministre de la défense, Israel Katz, a annoncé que le général de division (à la retraite) Eyal Zamir, directeur général du ministère et nommé par Yoav Gallant, avait demandé à démissionner. Jusqu’à récemment, le nom de Zamir avait été cité comme l’un des principaux candidats à la succession de Halevi en tant que chef d’état-major. Fermeture pour travaux Entre-temps, plusieurs personnes impliquées dans l’affaire des procès-verbaux falsifiés ont fait des déclarations. La tentative présumée de modifier les heures officielles des entretiens que Netanyahou a eus avec Gil et d’autres personnes, dans les premières heures qui ont suivi l’attentat du 7 octobre, constitue une infraction pénale évidente. On soupçonne des personnes de l’entourage du premier ministre d’avoir tenté de modifier les documents pour « améliorer » sa ligne de défense vis-à-vis du 7 octobre et pour en faire porter la responsabilité à l’establishment de la défense. Entre-temps, un différend est apparu entre le bureau du procureur de l’État et la police au sujet de l’enquête. Le premier a l’impression que la police, qui est contrôlée par le ministre de la sécurité nationale Itamar Ben-Gvir, est influencée par son désir de minimiser les allégations faisant l’objet de l’enquête et de s’assurer qu’elle ne mette pas en danger le premier ministre. Netanyahou a pris la peine de publier lundi une vidéo dans laquelle il affirme que son bureau « fait l’objet d’attaques sauvages et incontrôlées, alors que le gouvernement et le cabinet que je dirige s’efforcent constamment de repousser nos ennemis qui cherchent à nous détruire ». En plus d’envoyer un message aux autorités chargées de l’enquête, il semble qu’il tente de faire savoir à son peuple qu’il continue à le soutenir et qu’il ne le renoncera pas. Dans le même temps, quelqu’un s’est assuré de divulguer aux médias que Feldstein coopère effectivement avec les enquêteurs, bien qu’il n’ait pas signé d’accord pour livrer les preuves de l’État. Les personnes qui se sont entretenues avec Netanyahou lundi ont indiqué qu’il était très inquiet au sujet de l’enquête. Lors d’une réunion avec le cabinet de sécurité, il a attaqué la procureure générale Gali Baharav-Miara en réponse aux informations de presse selon lesquelles elle avait l’intention de soutenir le licenciement de Ben-Gvir et a averti que ce serait « un court chemin vers une crise constitutionnelle ». Netanyahou utilise son implication dans la guerre comme excuse pour une nouvelle tentative, attendue de longue date, de retarder son témoignage dans son procès pénal. Celui-ci était prévu pour le 2 décembre, mais il demande qu’il soit reporté de deux mois et demi. Ses avocats avancent deux arguments principaux : la première est qu’il n’a pas eu le temps de préparer son témoignage en raison d’une « série d’événements extraordinaires », notamment l’escalade de la guerre à Gaza et au Liban. La seconde est qu’en témoignant dans le bâtiment non protégé du tribunal de district de Jérusalem, il risquerait d’être victime d’une tentative d’assassinat. Ils ont cité le drone du Hezbollah qui a frappé la résidence privée de Netanyahou à Césarée le mois dernier (la famille n’était pas à la maison), endommageant la fenêtre de la chambre du couple. Il serait intéressant de savoir si une telle demande de sécurité pourrait être soulevée par un citoyen ordinaire cherchant à être exempté de comparaître devant un tribunal de Haïfa ou d’Acre (bien qu’il s’agisse ici d’un risque posé à Netanyahu personnellement). Les avocats du premier ministre affirment notamment qu’il était occupé en août par des négociations sur les otages. Les cyniques diront qu’à l’époque, Netanyahou et ses collaborateurs étaient surtout préoccupés par l’échec d’un accord, comme l’a révélé la fuite dans le journal allemand Bild, qui est au centre de l’enquête Feldstein. Quant à l’affirmation selon laquelle la guerre prend tout le temps de Netanyahou, cela ne l’a pas empêché, au cours des deux derniers mois, de trouver le temps d’évincer Gallant, de relancer la réforme judiciaire et de passer de nombreuses heures à trouver un moyen de donner une sanction légale à l’évitement de la conscription par les Haredim [juifs orthodoxes exemptés de service militaire, NdT], alors même que les réservistes s’effondrent sous l’effet de la tension due à des mois de service interminables.
Le Réseau d’information
de la Résistance (Resistance News Network) a rapporté le 3 mars que
« des colons sionistes ultra-orthodoxes bloquent une autoroute de Tel Aviv
pour protester contre la loi de conscription de l’entité, qui les verrait
incorporés pour la première fois dans les FOI [Forces d’occupation israéliennes], alors que les
FOI s’efforcent de compenser leurs
pertes significatives et exigent un recrutement plus important. Un certain
nombre de colons ont été arrêtés ». Aucun drapeau israélien n’était
visible lors de cette confrontation entre les colons fascistes et la police.
Les colons ultra-orthodoxes bénéficiaient jusqu’à présent d’une exemption
totale du service militaire.
Qu’est-ce
que cette nouvelle loi sur la conscription ? Elle propose d’allonger la durée
de la conscription militaire pour les colons sionistes de deux à trois ans,
ainsi que de porter la limite d’âge des soldats de réserve à 45 ans.Actuellement, des milliers de ces colons
fuient Israël pour éviter la conscription.
Le ministre
israélien de la guerre, Yoav Gallant, a déclaré dans un discours prononcé le 28
février : « Nous payons un prix très élevé dans nos rangs. Les coûts que
nous encourons en termes de nombre de morts et de blessés sont très élevés.
Nous n’avons pas connu une telle guerre depuis 75 ans, et cela nous appelle à
approuver des amendements à la loi sur la conscription ».
Gallant est
le même criminel de guerre monstrueux qui a qualifié les Palestiniens d’ »animaux
humains », alors qu’il a coupé la nourriture, l’eau et les médicaments à
plus de 2 millions de personnes.Il a
également lancé un appel à l’aide internationale et à l’augmentation du nombre
d’Israéliens pour soutenir une force d’occupation dégonflée.
Au-dessus de Gaza, par Mohamed Afefa, Palestine
Il s’agissait
d’un aveu public stupéfiant sur le fait que les forces d’occupation
israéliennes, bien armées et bien entraînées, ont subi un nombre sans précédent
de morts et de blessés depuis que le déluge d’Al-Aqsa a été déclenché par les
forces de la résistance islamique, le Hamas, le 7 octobre.
La
résistance démoralise le régime sioniste
Le Hamas,
ainsi que d’autres forces de résistance palestiniennes, se sont regroupés avec
des armes artisanales à leur disposition. Grâce à des tactiques de guérilla, la
résistance a réussi à démoraliser le régime d’apartheid soutenu par USA dans
les territoires occupés de Gaza et de Cisjordanie pendant près de cinq
mois.
Depuis le 8
février, il a été prouvé que les brigades Al-Qassam du Hamas ont détruit ou mis
hors d’usage plus de 1 100 véhicules militaires de l’armée israélienne, et que
d’autres engins militaires ont été détruits par d’autres factions de la
résistance armée.
Cette
protestation contre l’allongement de l’âge de la conscription militaire
intervient au moment même où l’opposition de masse croissante dans les rues
contre le régime israélien, dirigé par un autre criminel de guerre, le Premier
ministre Benjamin Netanyahu, appelle à sa démission. L’assassinat de trois
autres otages israéliens lors d’une tentative de sauvetage malheureuse de l’armée
israélienne a jeté de l’huile sur le feu en ce qui concerne la demande de
démission de Netanyahou.
De plus en
plus d’Israéliens exigent que Netanyahou accepte un cessez-le-feu négocié avec
la résistance pour mettre fin au génocide catastrophique que lui et Gallant ont
perpétré contre les habitants de Gaza et qu’il libère des milliers de
prisonniers palestiniens en échange de la centaine d’otages israéliens encore
détenus par le Hamas.
Cam Cardow, The Ottawa Citizen, Canada
L’isolement
croissant d’Israël dans le monde
La
détérioration de la situation interne d’Israël trouve son origine dans la
dégradation de son image mondiale, qui n’a été qu’une façade depuis sa
création. Dans une tribune du New York Times du 27 février, intitulée « Israël
perd son plus grand atout : l’acceptation », Thomas Friedman écrit : « J’ai
passé ces derniers jours à voyager de New Delhi à Dubaï et Amman, et j’ai un
message urgent à délivrer au président Biden et au peuple israélien : Je
constate l’érosion de plus en plus rapide de la position d’Israël parmi les
nations amies - un niveau d’acceptation et de légitimité qui a été
laborieusement construit au cours des décennies. Et si Biden n’y prend pas
garde, la position mondiale de l’Amérique s’effondrera en même temps que celle
d’Israël.
« Je ne
pense pas que les Israéliens ou l’administration Biden mesurent pleinement la
rage qui bouillonne dans le monde entier, alimentée par les médias sociaux et
les images télévisées, après la mort de milliers de civils palestiniens, en
particulier des enfants, avec des armes fournies par les USA dans la guerre d’Israël
à Gaza. Le Hamas a beaucoup à se reprocher dans le déclenchement de cette
tragédie humaine, mais Israël et les USA sont perçus comme les moteurs des
événements et comme les principaux responsables ».
La vérité
est que la position mondiale des USA et d’Israël s’est déjà tellement dégradée
qu’il n’y a pas d’inversion dans l’avenir immédiat. L’article de Friedman
énonce une évidence : Israël et son plus grand soutien financier et militaire,
les USA, sont de plus en plus isolés et méprisés, non seulement dans le Sud,
mais aussi dans le Nord. Des millions de personnes continuent de protester dans
le monde entier, non seulement contre le génocide, mais aussi pour défendre le
droit des Palestiniens à toutes les formes de résistance contre le
génocide.
Le régime
sioniste est également confronté à une crise de plus en plus profonde de son
économie, qui a déjà chuté de 20 % depuis le 7 octobre, en raison non seulement
des pertes humaines et des dépenses militaires, mais aussi de l’efficacité du
mouvement mondial de boycott, de désinvestissement et de sanctions contre
Israël.
Ali Divandari, Iran
Plus de 50
pays ont poursuivi Israël devant les tribunaux internationaux pour accuser le
régime colonial de génocide. Nombre de ces mêmes pays ont coupé le commerce d’armes
et les relations diplomatiques avec Israël. Les forces navales yéménites ont
empêché des centaines de navires de livrer des marchandises destinées à Israël,
causant des pertes qui se chiffrent en milliards de dollars.
L’Union
européenne et d’autres pays ont rétabli leur financement à l’Office de secours
et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine après qu’un
petit nombre d’employés de l’UNWRA ont été accusés par Israël d’être membres du
Hamas. Cette réprimande est un coup politique porté à Israël.
L’auto-immolation
d’Aaron Bushnell le 24 février pour exprimer sa solidarité avec la Palestine a
contribué à renforcer l’indignation face à l’horrible rôle de complice joué par
les USA dans le nettoyage ethnique à Gaza.
Comme l’a déclaré le président
vénézuélien Nicolás Maduro le 2 mars, « ce soldat [Aaron Bushnell] de l’armée
de l’air usaméricaine a ébranlé la société usaméricaine et le monde entier.
Nous assistons à l’épuisement, au déclin définitif de l’empire usaméricain et
du système de domination impérial occidental. Nous vivons un moment historique ».
Le général de
division ER David Elkana Ivry, né en 1934, a été vice-président de Boeing
International et président de Boeing Israël de 2003 à 2021. Il a participé à
toutes les guerres menées par Israël de 1956 à 1996. Ce vétéran du “sionisme à
visage humain” s’est livré dans une série d’entretiens avant et après le 7
octobre. Encore un criminel de guerre qui mourra paisiblement dans son lit.-FG
David Ivry était dans la salle de guerre à presque tous les moments
critiques de la défense israélienne. Aujourd’hui, dans sa 90e année,
alors que le pays traverse peut-être la pire crise de son histoire, l’ancien
commandant de l’armée de l’air, chef d’état-major adjoint de Tsahal et
ambassadeur à Washington est prêt à en venir au fait
David Ivry :
« La première chose qui aurait dû se produire [après le 7 octobre], c’est
que le dirigeant déclare : “J’annule la réforme judiciaire - nous sommes tous
dans le même bateau”. Ça n’a pas été le cas »
David Ivry est inquiet. « Nous entrons dans une guerre d’usure »,
déclare-t-il d’une voix calme, avant de soupirer. Nous sommes au début du mois
de janvier, lorsque le nombre de victimes israéliennes était bien inférieur à
ce qu’il est aujourd’hui. « Je connais cette dynamique depuis le Liban,
lorsque j’étais chef d’état-major adjoint des forces de défense israéliennes
[1983-85]. Nous sommes dans un endroit que nous avons conquis, les gens s’habituent
à la situation et nous passons progressivement du statut de conquérants à celui
de cibles. Et cette fois, c’est plus grave qu’au Liban, à cause du
“métro” [labyrinthe de tunnels souterrains] et d’autres infrastructures
souterraines [à Gaza]. La question est de savoir combien de temps nous pourrons
tenir le coup, et comment y parvenir alors que le gouvernement refuse de parler
de solutions politiques ».
« Je vous dis que nous sommes déjà dans le bourbier de Gaza. Nous n’avons
pas de solution claire sur ce qui va se passer, alors nous continuons à dire
que nous serons là pour très longtemps. Et nous n’avons pas encore dit un mot
sur ce qui se passe dans le nord ».[àla frontière avec le Liban, NdT].
Partagez-vous le sentiment que nous nous trouvons à l’un
des moments les plus difficiles de notre histoire ?
« Oui. Le 7 octobre est une
catastrophe épouvantable qui a changé la stratégie de toute la région. L’échec est
immense. Il est impardonnable. Pendant Yom Kippour [la guerre de 1973], l’arrière
n’a pratiquement pas été attaqué. Ici, des communautés ont été capturées, ce
qui ne s’était pas vu depuis la guerre d’indépendance. À l’intérieur même du
pays, nous avons aujourd’hui le plus grand nombre de réfugiés israéliens que j’aie
jamais vu. Mais je ne pense pas qu’il s’agisse d’une menace existentielle.
Pendant la guerre d’indépendance, nous avons été confrontés à une menace
existentielle. Jusqu’à la guerre des six jours, nous avons vécu avec le
sentiment d’une menace existentielle. Le Hamas et le Hezbollah ne constituent
pas une menace existentielle. La menace existentielle est interne ».
Toute sa vie, Ivry a contribué à forger la puissance stratégique de l’État
d’Israël. En plus d’avoir été chef d’état-major adjoint de Tsahal, l’ancien
pilote est surtout connu pour avoir été commandant de l’armée de l’air
israélienne, directeur général du ministère de la défense, fondateur et chef du
Conseil de sécurité nationale, président d’Israel Aerospace Industries et
ambassadeur d’Israël à Washington. En septembre dernier, il a fêté ses 89 ans.
Il ne fête pas les anniversaires : sa mère est décédée alors qu’il était très
jeune le jour de l’un de ses anniversaires, et son fils Gil, pilote de F-16, a
été tué dans un accident d’entraînement le jour d’un autre anniversaire. La
montre fêlée de Gil, retrouvée sur le site de l’accident, est exposée dans une
armoire à souvenirs dans sa maison de Ramat Hasharon, à côté des médailles et
autres récompenses qu’il a accumulées au cours de sa vie.
Le poids des années ne se fait pas sentir chez lui. Ivry est vigoureux,
actif et analytique, et il a une mémoire phénoménale. Il est marié à Ofra – « Nous
nous connaissons depuis l’âge de zéro an, nous faisions partie du même groupe
pendant notre enfance. L’offre formelle de sortir ensemble est venue après que
je l’ai invitée à la cérémonie au cours de laquelle nous avons obtenu nos ailes
en tant que pilotes ». Au cours de l’année écoulée, nous avons eu une
série de longues conversations portant sur la mission de sa vie par rapport à
la défense et à la sécurité de l’État. Nos rencontres ont commencé dans l’ombre
de la menace d’une refonte judiciaire qui s’est manifestée il y a un an et de
la grave fracture qui en a résulté au sein de la nation et qui l’a empêché de
dormir.
Avant le 7 octobre, nous étions assis ici et vous avez
exprimé votre profonde inquiétude.
« J’étais très inquiet au sujet d’une guerre civile, et je crains qu’elle
[cette menace] ne refasse surface. Une guerre civile est une menace
existentielle. Lorsque le coup d’État a commencé, je suis devenu vraiment
déprimé. Les gens parlent constamment d’unité en temps de guerre et de « ensemble,
nous vaincrons », etc. La première chose qui aurait dû se produire [après
le 7 octobre] était que le dirigeant déclare : « J’annule maintenant la
réforme judiciaire - nous sommes tous dans le même bateau ». ça ne s’est pas produit. [Netanyahou n’a
pas dit ça. C’est important. En fin de compte, les Arabes nous ont aidés au
moins à arrêter la réforme. Sinon, je ne sais pas où nous en serions aujourd’hui.
Mais le prix à payer est très élevé. Trop élevé ».
Des soldats
des FDI évacuent un soldat blessé dans la bande de Gaza, le mois dernier. « Le
passage du statut de conquérant à celui de cible ». Photo: AFP
La période de service d’Ivry en tant que commandant de l’armée de l’air
israélienne, de 1977 à 1982, a été principalement marquée par l’un des plus
grands succès de l’histoire de ce corps : la destruction, en 1981, du réacteur
nucléaire irakien, situé au sud-est de Bagdad, à quelque 1 600
kilomètres d’Israël.
« Dès le premier jour de ma prise de fonction, une réunion a été
organisée avec tous les responsables de la communauté du renseignement afin d’évaluer
le réacteur qui était alors en construction », raconte Ivry. « La
conclusion était qu’il s’agissait d’un réacteur ayant des missions militaires
et qu’il représentait donc un danger. Les recommandations étaient de poursuivre
l’activité diplomatique afin d’inciter la France [fournisseur du réacteur d’Osirak]
à résilier son contrat avec les Irakiens, de perturber leurs progrès de
diverses manières et, entre-temps, de préparer un plan d’attaque. À partir de
ce moment-là, j’ai réfléchi à la manière d’augmenter la portée de la FAI [Force
aérienne d’Israël] : lorsque les premiers commandants d’escadron de F-16 se
sont rendus aux USA pour ramener les avions, je leur ai dit : “Dites-moi quelle
est la plus longue portée que vous pouvez obtenir avec lui [un F-16] pour une
attaque au sol”. Ils ne comprenaient pas pourquoi j’insistais autant sur ce
point ».
Pendant quelques années, vous et la FAI vous êtes
préparés à mener l’opération.
« Nous ne sommes pas les premiers à avoir décidé qu’il était permis d’attaquer
un réacteur nucléaire. Les Iraniens ont essayé de l’attaquer à deux reprises et
ont tout gâché. Le problème, c’est qu’après chaque attaque iranienne, les
Irakiens ont renforcé leur défense. Ils ont construit de hauts murs, ils ont
envoyé des ballons avec des câbles en fer, de sorte que si vous voliez à basse
altitude, vous les heurtiez ; ils ont apporté des SAM [missiles sol-air]. Il a
été décidé d’attaquer avant qu’ils atteignent un certain seuil d’uranium
enrichi ».
L’opération est planifiée pour le printemps 1981. « Des discussions
quotidiennes ont eu lieu au sein de l’état-major des FDI », poursuit Ivry.
« Au milieu des préparatifs et des discussions [en mai], le fils de Raful
[chef d’état-major de Tsahal de l’époque, Rafael Eitan] a été tué dans un
accident d’avion. Il pilotait un Kfir, est parti en vrille et s’est écrasé au
sol. Lors des funérailles, “Eizer” [Ezer Weizman], qui n’était plus ministre de
la défense, m’a attrapé et m’a dit : “Vous êtes tous fous, vous ne pouvez pas
le faire [attaquer le réacteur]”. Je n’ai rien dit. »
NdT : Selon une croyance populaire juive
largement partagée en Israël, un Juif mort ne pourra ressusciter lors de la
venue du Messie que si son corps était entier lors de son enterrement. Mais
selon des rabbins éclairés, tous les morts ressusciteront, quel qu’ait été l’état
de leur cadavre lors de leurs funérailles : « Si Dieu a pu créer le
monde à partir de rien, il pourra bien redonner vie aux morts, même désintégrés ».
C’est sur cette base que des groupes orthodoxes se sont spécialisés dans la récupération
de toutes les parties de corps désintégrés lors d’accidents, d’attentats ou de
combats. L’un de ces groupes s’appelle Zaka. Dans les deux articles ci-dessous,
on en apprend des belles sur ses pratiques. -Traductions de Fausto Giudice, Tlaxcala
Zaka pourrait avoir coûté à Israël son procès devant
la Cour internationale de Justice
La semaine dernière, Haaretz a publié une enquête révélant des
failles dans le travail de Zaka, une organisation de sauvetage haredi
[orthodoxe juive] surtout connue pour récupérer des parties de corps après des
attaques terroristes (voir article ci-dessous). L’enquête a révélé que dans le
chaos des premiers jours qui ont suivi le massacre du 7 octobre, les Forces de
défense israéliennes ont confié une partie du travail de collecte des corps et
d’autres preuves à Zaka, dont les bénévoles ont profité de leur présence sur
les lieux pour filmer des vidéos de relations publiques et pour collecter des
fonds.
Des volontaires de Zaka nettoient une maison attaquée dans le sud d’Israël
Leur travail était souvent bâclé et, selon un membre du rabbinat militaire
qui est également un volontaire de Zaka, « nous sommes arrivés sur les
lieux au début de la guerre et il n’y a pas eu un seul corps ou une seule
découverte sur le terrain que nous n’ayons pas correctement documenté. [...]
Zaka a à peine écrit quelque chose sur les sacs, et vous pouvez oublier toute
documentation ». Cette négligence a
peut-être coûté à Israël son procès devant la CIJ et a laissé
de nombreuses parties de corps non identifiées.
Les volontaires de Zaka ont été exposés à des paysages inimaginables,
effectuant un travail que personne d’autre ne veut faire. Mais on doit
également se rappeler que ce type de travail est également effectué d’une
manière ou d’une autre partout dans le monde. Israël n’est pas le seul pays où
se produisent des attaques terroristes. Ce n’est pas le seul pays où des
personnes âgées meurent seules chez elles et où, plus tard, leur cadavre en
décomposition doit être évacué. Ce n’est pas le seul pays où des
meurtres-suicides se produisent dans les familles. Et partout dans le monde, il
existe des équipes de police scientifique qui recueillent les preuves et
nettoient ces scènes sans envelopper cette activité d’une aura de
"sainteté" et de respect pour les morts.
Des catastrophes se produisent partout dans le monde, mais Israël est le
seul pays où il existe un monopole sur la gestion des victimes de tels
événements (si elles sont juives, bien sûr), et ce monopole appartient à Zaka.
Un monopole qu’ils ont choisi, un monopole qu’ils veulent ; ils ne nous rendent
pas service en enlevant des corps. Ils le font parce qu’ils croient en l’importance
de collecter chaque morceau de tissu imbibé de sang.
L’importance qu’ils accordent à ce travail est contagieuse. Une forte
majorité de juifs israéliens laïques y voit également un véritable acte de
bonté et est donc prête à détourner le regard lorsque quelque chose ne va pas.
C’est en raison de l’importance accordée à ce travail que le fondateur de Zaka,
Yehuda Meshi Zahav, a pu commettre tous ses méfaits [une longue série d’actes
pédo-criminels et de crimes et délits sexuels restés impunis jusqu’à sa mort en
2022, NdT], car « on ne peut pas toucher à Zaka » (mais on peut
toucher aux enfants). Au nom de cette importance, Meshi Zahav, l’ancien “officier
des opérations” de la Edah Haredit [Communauté des Craignant-Dieu,
fédération de groupes orthodoxes autonomes, historiquement
opposés au sionisme, NdT], a eu l’honneur d’allumer une torche le jour de l’indépendance
en 2003.
Au nom de cette importance attribuée à leur travail, l’organisation à but
non lucratif a été autorisée à terminer quatre des cinq dernières années avec
un déficit, bien qu’elle reçoive des centaines de millions de shekels par an
sous forme de dons et qu’elle verse à ses cinq principaux salariés plus de 1,2
million de shekels (305 000 € par an) à eux seuls.
Au nom de cette importance, on a fermé les yeux pendant des années sur le
fait que l’organisation gonflait le nombre de ses volontaires afin d’augmenter
les subventions qu’elle recevait de l’État. Et c’est au nom de cette importance
qu’on l’a laissée agir pratiquement à sa guise dans les zones du massacre du 7
octobre.
Les problèmes de
Zaka seront
traités d’une manière ou d’une autre. Par le registre des organisations à but
non lucratif, par une enquête criminelle ou par une suspension des dons jusqu’à
ce que les problèmes soient résolus et que les responsables soient évincés.
Mais l’histoire va plus loin. Le problème n’est pas que l’importance perçue
confère essentiellement l’immunité, mais cette importance perçue elle-même.
Cette attitude est une conséquence de l’auto-négation du public laïc devant le
public haredi, qui est censé être "meilleur juif" que nous. C’est
pourquoi certaines choses sont laissées entre leurs mains parce que “c’est
important”. Important pour qui ?
Mort et dons : Le groupe de volontaires
israéliens qui s’est occupé des morts du 7 octobre a-t-il exploité son monopole
?
Le groupe de bénévoles Zaka
a commencé à collecter des corps dans les communautés dévastées du sud d’Israël
immédiatement après l’attaque du Hamas, tandis que les FDI ont mis à l’écart
les soldats formés pour récupérer les dépouilles. Une enquête révèle des cas de
négligence, de désinformation et une campagne de collecte de fonds qui a
utilisé les morts comme accessoires.
Volontaires de Zaka à Be’eri en octobre. Les personnes n’ont aucun lien
avec le contenu de cet article. Photo : Olivier Fitoussi
Un groupe de
personnes est assis autour d’une table en plastique, s’abritant sous les
branches d’un arbre par une chaude journée. L’atmosphère est détendue et les
conversations vont bon train. Certains fument des cigarettes, tandis que d’autres
sirotent des boissons rafraîchissantes et grignotent des amuse-gueules. Une
jeune femme est perchée sur un banc voisin, absorbée par son téléphone. Ambiance
pastorale dans le petit arpent du bon Dieu.
Même le corps à terre à côté d’eux, enveloppé dans un sac en plastique
blanc, ne perturbe pas la scène. Il n’est pas extérieur à l’histoire, il en
fait partie.
Cette scène se déroule à Kfar Azza au début de la deuxième semaine de la
guerre contre le Hamas. Le groupe assis au milieu des
maisons brûlées et de la dévastation est composé d’une dizaine de volontaires de la
branche de Jérusalem de Zaka, l’organisation ultra-orthodoxe qui récupère les
restes humains après les attaques et les catastrophes. Le sac mortuaire blanc
porte le logo de l’organisation.
« C’était tout simplement bizarre qu’il y ait un cadavre juste à côté
d’eux, et qu’ils soient assis, qu’ils mangent et qu’ils fument », a
déclaré l’un des deux bénévoles d’une autre organisation qui étaient présents. « C’est
incroyable ».
Haut du formulaire
Les volontaires n’appartenant pas à Zaka leur ont demandé pourquoi ils ne
transféraient pas le corps dans une ambulance ou dans le camion frigorifique
garé de l’autre côté de la route. Ils ont répondu avec indifférence qu’on s’en
occuperait plus tard et sont retournés à leurs occupations.
En s’approchant un peu plus du groupe, on s’aperçoit que trois des
volontaires de Zaka sont en train de passer des appels vidéo et de réaliser des
vidéos à des fins de collecte de fonds. Selon l’observateur non-zakiste, le
corps faisait partie d’une mise en scène - une exposition destinée à attirer
les donateurs, au moment où la course contre la montre pour rassembler et
retirer les corps des victimes du massacre était la plus urgente.
« Ils y ont ouvert une salle de crise pour recueillir des dons »,
a déclaré un autre témoin de l’événement, qui a travaillé tout au long de la
guerre dans les communautés frontalières de Gaza attaquées le 7 octobre. « Deux
semaines plus tard, je les ai vus agir de la même manière à Be’eri : ils
étaient assis et faisaient des vidéos et des appels de fonds à l’intérieur du
kibboutz ».
Zaka a répondu à cette description par une déclaration indiquant qu’ « aucun
appel de fonds n’a été effectué sur le terrain au nom de l’organisation, et si
un incident spécifique est porté à notre attention, nous l’examinerons et y
donnerons suite ».
Une enquête du Haaretz soulève plusieurs questions sur les
procédures suivies lors de la récupération des corps. Elle s’appuie sur les
récits du personnel militaire présent lors de la récupération des corps et de
la base militaire de Shura (qui a été
transformée en centre d’identification des corps), ainsi que des
volontaires de Zaka et d’autres organisations de secours qui ont travaillé dans
les communautés frontalières.
Il est clair que des centaines de bénévoles de Zaka Jerusalem ont accompli
un travail important en ramassant
les corps des victimes dans des conditions difficiles.
Parallèlement, certaines des activités de l’organisation - qui, à la veille de
la guerre, était empêtrée dans des dettes de plusieurs millions de shekels -
étaient orientées vers la collecte de fonds, les relations publiques, les
interviews avec les médias et les tournées de pêche aux donateurs.
Les volontaires de Zaka travaillent à la collecte de fonds alors qu’un
corps gît à proximité.
Au cours des premiers jours critiques de la guerre, les FDI ont décidé de
renoncer au déploiement de centaines de soldats spécialement formés à l’identification
et à la collecte de restes humains lors d’incidents impliquant un grand nombre
de victimes. Le commandement du front intérieur a choisi de faire appel à Zaka,
une organisation privée, ainsi qu’à des soldats de l’unité de recherche du
rabbinat militaire, connue sous l’acronyme Yasar, pour le sud du pays.
Des effectifs supplémentaires étaient nécessaires, mais lorsque les soldats
de l’unité de recherche du Rabbinat militaire dans le nord et de l’unité de
collecte des soldats tombés au combat du Commandement du front intérieur se
sont présentés pour le service de réserve le 7 octobre, on leur a dit qu’ils
devaient attendre.
« Je n’ai aucune explication sur la raison pour laquelle ils n’ont pas
déployé [l’unité du commandement du front intérieur] et nos gens du nord »,
dit un officier de l’unité de recherche du Rabbinat pour le sud.
Les officiers de la base de
Shura ont également été incapables d’expliquer pourquoi l’armée n’a pas déployé
le personnel qui avait déjà été appelé, tous des soldats de combat qui savaient
comment opérer sous le feu. Un officier de l’unité du commandement du front
intérieur a déclaré que ses commandants avaient “supplié” les hauts
responsables de les déployer, mais qu’ils s’étaient heurtés à une fin de
non-recevoir. Ce n’est qu’au cours de la deuxième semaine de la guerre que ces
soldats ont commencé à opérer dans la région - et encore, pas complètement.
Haut du formulaire
Bas du formulaire
Pendant ce temps, les volontaires de Zaka étaient sur place. La plupart d’entre
eux travaillaient sur les lieux des meurtres et des destructions du matin au
soir. Toutefois, d’après les témoignages, il apparaît clairement que d’autres s’adonnaient
à de toutes autres activités. Dans le cadre de leurs efforts pour se faire
connaître des médias, les zakistes ont diffusé des récits d’atrocités qui n’ont
jamais eu lieu, ont publié des photos sensibles et explicites et ont agi de
manière non professionnelle sur le terrain.
Selon des sources à Shura, le choix de Zaka a eu un prix. « Nous avons
reçu des sacs sans documentation et parfois avec des parties de corps qui n’avaient
aucun rapport entre elles’, explique un officier du camp. Ces problèmes ont
rendu le processus d’identification très difficile. Certains sacs sont arrivés
plusieurs jours après le début de la guerre, ajoute-t-il.
L’un des bénévoles qui a travaillé à Shura raconte : « Il y avait des
sacs avec deux crânes, des sacs avec deux mains, sans qu’il soit possible de
savoir à qui ils ou elles appartenaient ».
Des volontaires de Zaka nettoient une maison dans le sud d’Israël après une
attaque. Une personne qui a visité la zone avec Zaka affirme avoir vu des
restes dans les bâtiments marqués comme étant nettoyés.
Dans les semaines qui ont suivi, plusieurs centaines de cas sont restés en
suspens : des sacs contenant des parties de corps collectées tardivement et attendant
d’être associées à des victimes. Certaines sont encore inconnues au moment de
la rédaction de cet article. Un volontaire de Zaka Jérusalem qui sert dans le
rabbinat militaire dit qu’il y avait une différence notable entre le
professionnalisme des soldats et celui des volontaires de Zaka.
« Nous sommes arrivés sur les lieux au début de la guerre et il n’y a
pas eu un seul corps ou une seule découverte sur le terrain que nous n’ayons
pas correctement documenté », explique-t-il. « Zaka a à peine écrit
quelque chose sur les sacs, et vous pouvez oublier toute documentation ».
Le même soldat-volontaire pointe un doigt accusateur vers l’armée, qui a confié
cette tâche à Zaka.
Cependant, le personnel de la Zaka n’a pas été le seul à poser des
problèmes. Un officier de l’unité de recherche du Rabbinat militaire a déclaré
qu’au départ, son personnel n’avait pas non plus enregistré l’endroit où chaque
corps avait été prélevé, ce qui a encore retardé l’identification.
« Au début, il n’était pas possible de tout documenter, car la charge
de travail et la pression étaient énormes », explique-t-il. « Mais
nous avons travaillé de manière systématique et, plus tard, on nous a demandé
de faire une reconstitution rétrospective de notre travail ».
Plus tard, lorsque les sacs des militaires sont arrivés, la différence
était évidente, affirme un bénévole qui a travaillé à la base. « Il était
évident qu’un travail plus approfondi y était effectué ».
Les soldats du Commandement du front intérieur et les volontaires d’autres
organisations ont décrit le travail négligent des Zaka dans d’autres domaines
également. Selon eux, à de nombreuses reprises, ils ont approché des véhicules
et des maisons portant un autocollant de Zaka indiquant que l’endroit avait été
débarrassé des parties de corps, alors que ce n’était pas le cas.
Enlèvement des corps à Ofakim le 8 octobre. Des centaines de volontaires de
Zaka ont réalisé un travail important en collectant les dépouilles dans des
conditions difficiles. Photo : Ilan Assayag
« Zaka a pris une partie d’un corps et a laissé l’autre partie dans la
même maison », raconte un volontaire de Shura. Une personne qui a fait le
tour des kibboutzim de la région avec Zaka a déclaré qu’avec des membres de l’organisation,
elle est entrée dans des maisons qui avaient été déclarées nettoyées, mais qu’elle
y a vu des restes humains.
Il y a d’autres exemples. Dans le parking aménagé dans le moshav de Tkuma,
où se trouvaient les véhicules endommagés lors des massacres sur les routes et
près du festival de musique de Re’im, des morceaux de corps non ramassés ont
été trouvés. « Nous y avons trouvé des morceaux d’os et d’autres parties »,
explique un soldat du commandement du front intérieur. « Beaucoup de gens
ici sont en colère, [demandant] “Pourquoi nous avez-vous formés pour cela, et
le jour du bilan, vous ne nous avez pas laissé faire le travail ?” ».
Même lorsque les soldats ont commencé à travailler, au cours de la deuxième
semaine de la guerre, ils ont été envoyés pour ramasser les corps des
terroristes et les transporter à la base de Sde
Teiman à Be’er Sheva. Ils ont également été chargés de s’occuper des
scènes d’attaques contre des installations militaires.
Du personnel de Zaka manipule un véhicule détruit après les attaques du
Hamas. Selon un soldat, on a retrouvé des restes que Zaka n’avait pas réussi à
localiser.
« Nous avons demandé aux commandants pourquoi ils ne nous laissaient
pas entrer, et à chaque fois nous avons eu une réponse différente »,
raconte un soldat. « Une fois, ils nous ont dit : “Vous avez été entraînés
pour les tremblements de terre”, une autre fois, ils ont dit qu’ils ne
voulaient pas risquer la vie des soldats. Et une autre fois encore, ils nous
ont expliqué que le général commandant avait confié [la mission] à l’équipe
nationale de sauvetage de Tsahal, dont l’un des membres est également un haut
responsable de Zaka. »
Il ajoute : « Si nous avions travaillé comme ils nous l’ont appris,
nous aurions pu épargner des souffrances inutiles à de nombreuses personnes
[et] amener [les victimes] à l’enterrement beaucoup plus tôt ». Plusieurs
volontaires de Zaka ont admis vis-à-vis de Haaretz que le travail aurait
été meilleur, plus rapide et plus précis si les soldats avaient travaillé à
leurs côtés.
Le pouvoir du gilet
Tout au long des premiers jours de la guerre et par la suite, des soldats
en uniforme du Commandement du front intérieur sont apparus à plusieurs
reprises dans les médias. Mais par-dessus leurs uniformes, ils portaient des
gilets qui n’appartenaient pas aux FDI et sur lesquels était inscrit le nom “Zaka”.
Les officiers militaires qui ont été informés de ce détail flagrant n’ont pas
pu l’expliquer.
Haim Outmezgine, chef des “forces spéciales” de Zaka, sert dans les
réserves de l’unité de sauvetage du Commandement du front intérieur et est l’un
des hauts fonctionnaires qui est apparu fréquemment dans cette tenue - et pas
seulement à l’écran. Vers la fin du mois d’octobre, alors que les membres de l’organisation
travaillaient encore dans les kibboutzim, il a été la vedette d’un clip musical
élaboré et mis en scène, dans lequel il était enregistré sur le terrain.
La base militaire de Shura, où les corps ont été rassemblés à des fins d’identification,
en octobre. Un volontaire raconte que dans un cas, Zaka a récupéré une partie
du corps et a laissé le reste sur place. Photo Naama Grynbaum
Dans la vidéo, il chante avec son fils une chanson qu’il a lui-même écrite.
La vidéo est accompagnée de sous-titres qui visent à toucher la corde sensible
ainsi que le portefeuille.
« Des centaines de volontaires de Zaka ont laissé derrière eux une
famille qui les soutenait, sont partis avec dévouement et ont été exposés aux
terribles atrocités qui ont eu lieu dans le sud, et ils rentrent chez eux avec
un sac débordant d’émotions. Vous êtes invités à les saluer », peut-on
lire dans la description de la vidéo, accompagnée d’un lien permettant de faire
des dons.
S’adressant à Haaretz, Outmezgine a déclaré qu’il avait produit le
clip vidéo en privé et que l’organisation avait ensuite décidé de l’utiliser
pour la campagne de collecte de fonds. Il a ajouté que le tournage et la
production du clip n’avaient pas pris beaucoup de temps : « « J’ai
écrit le texte le vendredi, je l’ai enregistré en studio le samedi soir et le
clip a été tourné un jour ou deux plus tard ».
Outmezgine ne faisait pas seulement partie de la campagne médiatique de
Zaka Jerusalem. Selon certaines sources, il a également joué un rôle central
dans l’association entre l’organisation et les FDI et a commandé plusieurs
sites dès le soir des attaques - principalement dans la zone du parti à Re’im,
Kfar Aza et Be’eri. Environ un mois après le début de la guerre, Outmezgine a
empêché un volontaire d’une organisation rivale d’entrer à Be’eri, bien que le
volontaire ait reçu des ordres d’un officier.
Outmezgine a confirmé qu’il l’avait bloqué, disant qu’il avait pensé qu’il
s’agissait d’un imposteur. Une source de Zaka Tel Aviv (un autre concurrent) a
également déclaré que les membres ont été bloqués par des agents de Zaka lorsqu’ils
ont essayé d’atteindre la zone. « Ils nous ont dit spécifiquement que Haim
[Outmezgine] avait dit qu’ils n’avaient pas besoin de nous là-bas », a
déclaré la source.
Cela soulève la question suivante : quelle est la relation entre l’unité de
sauvetage du Commandement du front inétrieur et Zaka Jérusalem ? La réponse,
semble-t-il, c’est Outmezgine, qui n’est pas seulement un réserviste de l’unité,
mais qui est également considéré comme très proche de ses commandants.
Un volontaire de Zaka qui le connaît bien affirme que c’est Outmezgine qui
est à l’origine de la prise de commandement des sites d’attaque par l’unité -
et de l’utilisation de Zaka. « C’est lui qui a le pouvoir de dire aux
commandants : “C’est notre affaire” », explique le volontaire. Il ajoute
avec un demi-sourire : « Les autres volontaires n’ont pas pu entrer car il
s’agit d’une zone militaire fermée ».
Une maison à Kfar Azza, un mois après son incendie, le 7 octobre. Certains
volontaires de Zaka admettent que le travail aurait été plus efficace s’ils
avaient travaillé aux côtés de l’armée.
Outmezgine décrit la situation de la même manière. « J’ai compris que
nous étions engagés dans une course contre la montre », a-t-il déclaré
dans un entretien accordé à Arutz Sheva, une station de radio de colons.
« J’ai appelé mon commandant, le colonel Golan Vach, et je lui ai dit que
c’était notre mission ».
En effet, le Commandement du front intérieur a officiellement pris le
contrôle des zones d’attaque, et son bras opérationnel, en particulier au cours
de la première semaine, était Zaka. Selon Outmezgine, il existe un accord entre
Tsahal et Zaka qui permet à l’organisation d’opérer sur le terrain.
Un indice des procédures opérationnelles personnelles d’Outmezgine peut
être trouvé dans au moins un incident au cours duquel il a pris un sac de
matériel collecté sur le lieu d’une attaque et en a apporté le contenu dans la
cour de sa maison pour un “examen privé”. Les sources militaires qui ont été
informées de cet incident l’ont considéré comme une affaire grave et n’ont pas
pu dire qui l’avait autorisé. Outmezgine, pour sa part, affirme qu’il s’agit d’un
incident unique dont il est fier. « C’était un sac contenant des ordures
que j’aurais pu laisser sur le terrain, mais j’ai pris mes responsabilités »,
déclare-t-il.
Rivalité historique
D’une manière générale, les conflits entre les organisations qui
travaillent à la collecte des restes humains sur les sites d’attentats, d’accidents
et de catastrophes en Israël n’ont rien de nouveau. Ce qui se cache derrière n’est
pas nouveau non plus : de l’argent, et beaucoup d’argent. Des dizaines de
millions de shekels sont alloués à cette mission par le biais de dons et d’un
soutien financier de l’État.
Aujourd’hui, il existe trois organisations principales sur le terrain :
Zaka Jérusalem, Zaka Tel Aviv et l’organisation Unité 360. Au fil des ans, la
concurrence entre ces organisations a causé plus d’un problème dans les
opérations - par exemple, la diffusion de photos choquantes qui ne respectaient
pas la dignité du défunt. À tel point qu’il y a deux ans, la police a introduit
une nouvelle directive sur la procédure de collecte des dépouilles afin de
réglementer le processus.
Le clip musical
Selon cette procédure, seules les personnes qui se portent volontaires
auprès de la police et qui portent un gilet de police sont autorisées à
travailler sur les lieux d’un incident. Dans le cadre de ce règlement, les
volontaires doivent suivre une formation, sont soumis à une hiérarchie claire
avec la police, n’ont pas le droit d’être interrogés sans autorisation et n’ont
pas le droit de divulguer des détails ou des images des scènes de crime.
Il semble que toutes les règles aient été enfreintes depuis le 7 octobre.
Des vidéos et des photos explicites des sites horribles ont rempli les comptes
de médias sociaux de Zaka Jerusalem : des rangées de corps dans des sacs, des
taches de sang, et bien d’autres choses encore. Ces messages avaient un
dénominateur commun : les appels à la collecte de fonds.
Le moment était critique. Avant le 7 octobre, l’organisation risquait l’insolvabilité.
Depuis, selon une source à Zaka, elle a collecté plus de 50 millions de shekels
(12,7 millions d’€).
Haim Outmezgine reçoit une citation de Tsahal en 2022. Il affirme qu’il
existe un accord entre Zaka et l’armée qui lui permet de travailler.
Pendant toute la durée de la guerre, et malgré la course contre la montre
pour collecter les corps, les bénévoles de l’organisation ont organisé des
visites privées pour les donateurs. Les civils n’ont cependant pas été
autorisés à pénétrer dans les zones frontalières, définies comme des zones
militaires fermées.
Quelqu’un qui a organisé cette visite raconte qu’un bénévole zakiste
expérimenté l’a organisée et a emmené les participants à Be’eri. « Il nous
a rencontrés dans une station-service voisine, nous a donné, ainsi qu’aux
donateurs, des gilets Zaka, et c’est ainsi que nous sommes entrés, avec deux
véhicules », explique-t-il. Haaretz a obtenu un enregistrement dans
lequel un bénévole de la Zaka coordonne une visite similaire.
Zaka affirme que toutes les visites ont été coordonnées avec les autorités
compétentes et qu’elles ont été effectuées avec leur autorisation. « De
nombreux donateurs demandent des conseils et des explications au personnel de
Zaka afin d’établir un lien avec la terrible catastrophe », peut-on lire
dans un communiqué de l’organisation.
« L’organisation Zaka a été invitée par la Direction nationale de l’information
[au sein du cabinet du Premier ministre] à participer à des activités d’information
destinées aux donateurs et aux leaders d’opinion du monde entier et considère
que ces tournées font partie des efforts déployés par le pays pour remporter
une victoire dans l’opinion publique. L’organisation Zaka accompagne également
les tournées des donateurs au profit des kibboutzim et de leur reconstruction,
considérant cela comme un privilège et un honneur ».
La question de la collecte de fonds
La collecte de fonds a commencé le 8 octobre. Le lendemain des attaques
dans le sud, un tweet sur le compte de l’organisation indiquait : « Nos
volontaires sur le terrain sont entourés de corps tués et de tirs d’artillerie et
ont un besoin urgent de protection et d’équipement ». Cette déclaration
était bien sûr vraie : le personnel de Zaka travaillait en effet sous le feu de
l’ennemi, avait besoin d’équipements supplémentaires et était entouré de
cadavres.
Bien que la collecte de fonds pour une organisation soit un acte tout à
fait légitime, le moment choisi et la manière dont elle a été effectuée
soulèvent des soucis. Ces préoccupations ne sont certainement pas atténuées par
le fait que Zaka a loué les services d’un bureau de relations publiques qui,
dès les premières semaines de la guerre, a accompagné et photographié les
volontaires.
Volontaires des organisations Unité 360 et Zaka le 7 octobre. La rivalité
entre les organisations a causé des problèmes pendant des années.
À partir de la deuxième semaine de la guerre, Zaka a commencé à être payée
par le ministère de la Défense, parallèlement aux appels aux dons du public. Un
accord avait été conclu entre le ministère et l’organisation, selon lequel Zaka
recevrait 500 000 shekels [127 000 €] pour le nettoyage des maisons, des
véhicules et des abris anti-bombes publics endommagés lors des attaques.
Selon le ministère, l’organisation s’est engagée à nettoyer 500 structures.
Zaka précise que ce paiement n’a financé qu’une partie des dépenses et qu’ « il
s’agit d’une mission unique qui a nécessité l’achat de matériel spécifique pour
les besoins de la mission... [ainsi que] le transport et la mobilisation de
centaines de volontaires ».
La campagne de collecte de fonds n’a cessé de prendre de l’ampleur. Le 29
octobre, un message posté sur X montrait des photos de famille tachées de sang
provenant de l’une des scènes, accompagnées de la légende suivante : « La
voix du sang de mes frères crie vers moi depuis le sol ».
Ce n’était là qu’une partie de l’activité qui se déroulait alors que de
nombreuses parties de corps attendaient encore d’être identifiées et enterrées,
un processus qui n’a été en grande partie achevé qu’une cinquantaine de jours
après le début de la guerre. Aujourd’hui encore, on découvre des parties de
corps.
Sur les lieux des attaques, la question n’était pas seulement de savoir ce
qu’il fallait photographier, mais aussi ce qu’il fallait montrer exactement.
Dans certains cas, des volontaires de Zaka ont été vus en train d’envelopper
des corps déjà enveloppés dans des sacs des FDI. Le nouveau sac affichait
clairement le logo de Zaka.
« Nous avons enveloppé le corps dans un sac mortuaire et, quelques
minutes plus tard, une équipe de Zaka est arrivée », raconte un volontaire
d’une autre organisation. « Le chef d’équipe, un membre important de l’organisation,
a enveloppé le corps dans un sac Zaka. Pourquoi ont-ils fait cela ? Tout le
monde sait c’est une question de relations publiques ».
Plusieurs officiers et volontaires qui ont travaillé à la base de Shura ont
déclaré à Haaretz que de nombreux corps sont arrivés enveloppés dans
deux sacs - le sac militaire et un sac Zaka qui le recouvrait. Selon un
officier du rabbinat militaire, c’était le cas pour des dizaines de corps, ce
qui a compliqué le travail.
« Dès que nous voyions un sac Zaka, nous transférions le corps à l’unité
civile de Shura », dit-il, « mais ils l’ouvraient sur place et
devaient ensuite le transférer à l’unité militaire ». Selon Outmezgine,
ces mesures ont été prises parce que les sacs militaires étaient défectueux.
Les officiers du rabbinat militaire ont nié qu’il y ait eu des problèmes avec
les sacs de Tsahal. « Il est intéressant de constater que nous n’avons pas
eu de problèmes », ont-ils déclaré.
Ce n’était pas la première fois que le personnel de Zaka avait échangé des
sacs ou ajouté les siens. Haaretz dispose d’une série de documents et de
comptes rendus d’activités similaires menées par les bénévoles de l’organisation
qui arrivent sur les lieux d’un meurtre, d’un accident ou d’un suicide. Zaka a
nié avoir changé ou recouvert des sacs et a déclaré que des doubles sacs
avaient été utilisés uniquement lorsque le premier était endommagé.
Contes imaginaires
« Nous avons vu une femme, âgée d’environ 30 ans, [et] elle était
allongée sur le sol dans une grande flaque de sang, face au sol », a
déclaré un bénévole de Zaka en larmes dans un récit publié sur les comptes de
médias sociaux de Zaka. « Nous l’avons retournée pour la mettre dans le
sac ».
« Elle était enceinte », ajoute-t-il en s’arrêtant pour reprendre
son souffle. « Son ventre était gonflé, et le bébé était encore attaché
par le cordon ombilical quand il a été poignardé, et elle a reçu une balle à l’arrière
de la tête. Je ne sais pas si elle a souffert et vu son bébé assassiné ou non. »
Cet horrible incident, qui, selon le volontaire de Zaka, s’est produit à Be’eri,
n’a tout simplement pas eu lieu et constitue l’une des nombreuses histoires qui
ont circulé sans aucun fondement. Il n’existe aucune preuve de cet incident et
personne dans le kibboutz n’a entendu parler de cette femme. Un haut
fonctionnaire de Zaka a admis dans une conversation avec Haaretz que l’organisation
sait que l’incident n’a pas eu lieu.
Dans une autre vidéo, qui met en scène le même volontaire, celui-ci décrit,
en pleurant, comment il a trouvé les corps brûlés et mutilés de 20 enfants dans
l’un des kibboutzim. Il a déclaré à Haaretz que c’était derrière le
réfectoire de Kfar Azza, tandis que dans un autre cas, il a dit que c’était à
Be’eri.
Cependant, les enfants qui ont été tués à Kfar Azza sont Yiftach Kutz, 14
ans, et son frère, Yonatan, 16 ans. Dix enfants ont été tués à Be’eri, mais on
sait qu’au moins certains d’entre eux étaient accompagnés d’un parent et ont
été tués chez eux.
L’organisation a déjà été accusée de diffuser de fausses informations. En
décembre 2022, Haaretz a rapporté que Zaka avait
gonflé le nombre de ses bénévoles pendant des années afin de recevoir davantage de
fonds.
En réponse à une demande de commentaire, Zaka a déclaré : « La
collaboration entre Zaka et les agences d’urgence a lieu en temps normal et
dans les situations d’urgence, sur la base d’une coordination des attentes et d’une
planification précoce. Les volontaires de Zaka ont travaillé en étroite et
totale coordination avec les organismes responsables sur le terrain. La
collaboration n’est pas un conflit d’intérêts mais un effort commun.
« Zaka est une organisation bénévole financée par des dons, et la
guerre a conduit Zaka à engager des dépenses massives pour l’achat d’équipements
et de fournitures », poursuit l’organisation. « La présence du
personnel de Zaka sur les lignes de front a permis au public de découvrir les
activités de l’organisation, qui sont également menées en privé en dehors des
périodes d’urgence.
Récupération de corps à Be’eri. Les bénévoles de Zaka ont organisé des
visites privées pour les donateurs alors que le site est une zone militaire
fermée.
Pour sa part, l’armée a répondu à une demande de commentaire : « À la
suite des événements du 7 octobre, un système opérationnel a été mis en place,
dirigé par un officier ayant le grade de colonel, pour mener la mission de
recherche et de récupération dans la région frontalière de Gaza. En raison de
la complexité de la mission et de l’ampleur des pertes, le ministère de la Défense
a contacté Zaka pour recevoir de l’aide et des renforts pour cette mission.
« Parmi les unités qui ont participé à l’effort militaire, il y avait
l’unité de recherche du corps du Rabbinat militaire. Des unités [du
Commandement du front intérieur] ont été recrutées en totalité au cours des
deux premières semaines de la guerre. Les FDI mèneront une enquête détaillée et
approfondie, y compris en ce qui concerne la mobilisation du personnel, afin de
clarifier complètement les détails lorsque la situation opérationnelle le
permettra, et publieront leurs conclusions. »