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Sergio Rodríguez Gelfenstein
¿Qué hará Marcos Rubio? 

30/06/2023

Omer Benjakob/Avi Scharf
La manière dont Israël a investi dans les logiciels espions est au cœur du scandale grec et de l’enquête de l’UE

Omer Benjakob et Avi Scharf, Haaretz, 28/6/2023
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

En 2017, le fabricant d’armes public israélien a investi dans deux entreprises pour tenter de concurrencer NSO. Il a vendu Cytrox à Intellexa, une entreprise opérant en dehors d’Israël, mais des documents montrent qu’il est toujours lié à l’autre entreprise.


Il y a six ans, l’entreprise publique de défense Israel Aerospace Industries (IAI) a annoncé qu’elle investissait des millions dans deux entreprises étrangères prometteuses : L’une, enregistrée aux Pays-Bas, fournit des “solutions de cybersécurité de pointe”, l’autre, enregistrée en Hongrie, se concentre sur le “cyber-renseignement” pour les gouvernements.

Cependant, des documents montrent que les deux sociétés - Inpedio et Cytrox - ont en fait été créées par les mêmes ressortissants israéliens qui ont été impliqués dans le développement puis la vente du logiciel espion connu sous le nom de Predator. Ce même logiciel espion est actuellement au cœur d’un énorme scandale politique en Grèce, où il a été utilisé pour pirater les téléphones d’un journaliste et de hauts responsables politiques, ce qui soulève des inquiétudes en matière de respect de la vie privée et des droits dans toute l’Union européenne.

Dans son communiqué de presse de juin 2017, l’IAI présentait Inpedio et Cytrox comme deux entreprises distinctes. Le produit d’Inpedio, disait-on, “protège les appareils cellulaires iOS et Android contre les attaques sophistiquées”. Cytrox, quant à lui, était censé faire l’inverse, en “recueillant des renseignements à partir des appareils terminaux”, comme les téléphones portables.

Le premier était censé offrir des services défensifs, en recherchant d’éventuelles failles de sécurité dans les ordinateurs et les appareils mobiles afin de les protéger contre les cyberattaques. La seconde a ensuite développé Predator, un logiciel espion qui exploite les failles des cyberdéfenses pour pirater les appareils mobiles.

Des documents et des sources indiquent qu’elles ont été créées en tant qu’entreprises jumelles afin d’offrir aux clients potentiels un éventail complet de solutions cybernétiques - défensives et offensives. Selon d’anciens employés de Cytrox, les entreprises ont d’abord opéré conjointement à partir des mêmes bureaux, et des employés d’Inpedio ont également participé aux premiers développements du logiciel espion Predator.

IAI a réalisé cet investissement par l’intermédiaire de sa filiale singapourienne Custodio PTE. Ce double investissement devait permettre à IAI « d’étendre ses activités de recherche et de développement dans le domaine de la cybernétique et de renforcer son empreinte mondiale dans ce domaine », comme l’indiquait le communiqué de presse d’IAI à l’époque. Si IAI a ensuite vendu sa participation dans Cytrox, elle a conservé Inpedio, bien que l’entreprise ait pratiquement fermé ses portes et que les millions investis aient été perdus.



Rotem Farkash

Deux entreprises, un bureau

Haaretz a examiné des documents d’entreprise des Pays-Bas, de Hongrie, de Macédoine du Nord, de Singapour et d’Israël qui montrent que les fondateurs et les directeurs des deux entreprises étaient les mêmes Israéliens. Inpedio a été enregistrée aux Pays-Bas en 2016 par deux fondateurs : Rotem Farkash et Abraham Rubinstein. Ces mêmes Farkash et Rubinstein ont créé Cytrox Holdings en Hongrie - où IAI a investi - et une filiale, Cytrox Software, en Macédoine du Nord, en 2017. Les deux ont enregistré Cytrox avec leurs comptes de messagerie Inpedio.

Farkash est un pirate informatique devenu cyber-entrepreneur, qui est ensuite devenu partenaire et haut responsable d’Intellexa, une alliance d’entreprises de surveillance numérique fondée à Chypre et en Grèce par l’ancien commandant des services de renseignement de l’armée israélienne, Tal Dilian. Rubinstein, entrepreneur dans le domaine de la technologie, a fini par poursuivre Dilian pour avoir dilué ses propres actions dans Intellexa. Ce litige a été résolu depuis.

Le communiqué de presse d’IAI de juin 2017 n’a pas révélé de détails spécifiques, mais les documents vus par Haaretz montrent qu’elle a initialement acheté 31 % de Cytrox. IAI avait même un directeur dans l’entreprise. Après un an et demi, au cours duquel la cyber-entreprise offensive n’a pas réussi à décoller, IAI a vendu sa participation à la société des îles Vierges britanniques qui contrôle Intellexa. Deux ans plus tard, Intellexa, propriété de Dilian, achève le rachat de Cytrox.

En 2022, l’utilisation abusive de Predator par les clients de Cytrox allait propulser ses nouveaux propriétaires au cœur d’une tempête – une tempête qui, à la suite de l’affaire NSO, a fait des entreprises israéliennes de logiciels espions une menace mondiale.

Bien qu’IAI ait rapidement abandonné ses participations dans Cytrox et pris ses distances avec le domaine explosif de la cybernétique offensive, elle a conservé une participation minoritaire dans Inpedio. Et par l’intermédiaire d’Inpedio, elle détient également une part dans sa filiale à 100 % CyberLab, qui lui sert de succursale en Macédoine.

Shahak Shavel

D’après les documents, CyberLab a été créé par un ressortissant macédonien qui était également un haut responsable de Cytrox. Un autre homme, Shahak Shalev, vétéran de l’unité cybernétique de l’armée israélienne, était enregistré - en utilisant son adresse électronique Cytrox - en tant que directeur. Selon des informations et des sources, des employés de CyberLab et d’autres entreprises fondées par les mêmes Israéliens travaillaient dans les mêmes bureaux que ceux utilisés par Cytrox et Inpedio dans la capitale macédonienne, Skopje, et étaient également impliqués dans le développement du Predator.

“Nous travaillions tous sur les mêmes tâches... nous travaillions pour Intellexa”, a déclaré un travailleur local anonyme aux journalistes d’Inside Story en Grèce et de l’Investigative Reporting Lab, basé à Skopje. Shalev, présenté sur LinkedIn toujours comme le vice-président de la technologie d’Inpedio, aurait été « le principal responsable, envoyé par les Israéliens pour superviser les opérations de production ».

D’anciens travailleurs affirment qu’en dépit du fait qu’ils partageaient un bureau, des tentatives ont été faites - après que IAI a vendu sa participation dans Cytrox - pour maintenir les activités de Cytrox et d’Inpedio séparées. Néanmoins, alors qu’Inpedio s’efforçait de développer un produit défensif, certains de ses employés travaillaient toujours pour Cytrox. Alors que cette dernière allait réussir à développer son logiciel espion, Inpedio est considérée comme une entreprise infructueuse - une société qui a brûlé ses investissements et n’a pas réussi à produire de véritables ventes.

Shalev, Farkash et Rubinstein n’ont pas répondu aux demandes de commentaires.

Tal Dilian. Predator fait partie du portefeuille d’outils d’espionnage d’Intellexa. Photo : Yiannis Kourtoglou / REUTERS

 Kaymera/NSO

Cytrox n’était qu’une des nombreuses entreprises israéliennes installées à l’étranger. Après avoir racheté l’entreprise, Intellexa a intégré son logiciel espion Predator dans un portefeuille complet d’outils de surveillance numérique. Comme l’ont révélé les enquêtes de Haaretz l’année dernière, ceux-ci étaient également vendus à une milice tristement célèbre au Soudan et au Bangladesh - des pays avec lesquels il est actuellement interdit aux Israéliens de faire des affaires, du moins officiellement.

Ces révélations, ainsi que le scandale du “Watergate grec”, ont suscité un rare aveu de la part de responsables israéliens concernant les activités de Tal Dilian, qui opère en dehors d’Israël. L’ancien directeur général du ministère de la défense a déclaré : « Cela me dérange certainement qu’un vétéran de nos unités de renseignement et de cybernétique, qui emploie d’autres anciens hauts fonctionnaires, opère dans le monde entier sans aucun contrôle ».



Sur sa page Linkedin, Kaymera a adopté le drapeau LGBTIQ+

Selon certaines sources, l’investissement d’IAI en 2017 dans les entreprises jumelles Cytrox et Inpedio a été réalisé conformément à ce que l’on appelle le modèle Kaymera/NSO : une entreprise vend des capacités offensives aux gouvernements, comme le tristement célèbre logiciel espion Pegasus, tandis que l’autre « vend des produits qui se défendent contre cette même technologie [comme Kaymera]... ce qui permet à des startups telles que NSO et Kaymera de jouer sur des camps opposés dans les cyber-guerres », comme l’explique un communiqué de presse de 2014 de NSO et Kaymera dans ses propres termes.

NSO, tristement célèbre pour son logiciel espion Pegasus, opère depuis Israël sous le contrôle des exportations de défense, et s’est imposé au cours de la dernière décennie comme l’acteur dominant dans ce domaine. Selon certaines sources, les grandes entreprises israéliennes du secteur de la défense, comme IAI, sont entrées tardivement dans la danse, ce qui a permis à NSO de devenir le leader du marché et le favori de l’État israélien. Les outils d’espionnage de NSO ont été le fer de lance de la “cyber-diplomatie” du Premier ministre Benjamin Netanyahou avec les États arabes et africains.

Cependant, en tant qu’entreprise de cybernétique dans le domaine militaire et de la sécurité intérieure, NSO “est l’exception”, explique une source de l’industrie. « La plupart des activités israéliennes dans ce domaine sont généralement menées par Elta (IAI), Elbit et Rafael - et non par des entreprises privées à vocation unique ».

Le double investissement dans Cytrox et Inpedio, toutes deux enregistrées à l’étranger, était censé permettre à Israël de rattraper le temps perdu et de concurrencer le NSO réglementé par Israël. Mais alors qu’une branche de l’État israélien encourageait les entreprises locales qui vendaient leurs produits dans le cadre d’une réglementation stricte, une autre branche investissait dans deux entreprises israéliennes enregistrées à l’étranger, qui pouvaient prétendre se soustraire à cette même surveillance.

Israel Aerospace Industries a répondu qu’elle « ne s’occupe que de cyberdéfense . IAI détient une participation minoritaire de moins de 10 % dans Inpedio, une entreprise de cyberdéfense qui est actuellement en cours de liquidation. IAI n’a aucun lien avec les détails de ce rapport. IAI propose des solutions défensives avancées aux entreprises et aux États, dans le respect des réglementations en matière d’exportation ». [Nous voilà rassurés, NdT]

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29/06/2023

GIDEON LEVY
Un commandant de brigade de Tsahal est-il un meurtrier ?

Gideon Levy, Haaretz, 29/6/2023
Traduit par
Fausto Giudice, Tlaxcala

Ils lui ont crié “assassin” et il s’est éloigné, penaud, en disant qu’il était “blessé en tant que personne” mais qu’il “n’allait pas craquer”. Les dirigeants de l’État se sont empressés d’exprimer leur inquiétude, de condamner les attaques verbales et de louer son héroïsme.

Le commandant de la brigade Binyamin, le colonel Eliav Elbaz, était venu réconforter la famille de Harel Masoud, un colon d’un avant-poste particulièrement violent et sauvage, qui a été tué la semaine dernière lors d’une fusillade dans la colonie d’Eli, en Cisjordanie. Elbaz a été accueilli par un flot d’insultes de la part des voyous colons.

S’agissait-il d’un acte honteux ? Je n’en suis pas certain. Parfois, les colons peuvent nous apprendre quelque chose sur la manière de protester.

Elbaz mérite d’être la cible de manifestations de colère, mais dans un lieu différent et pour des raisons diamétralement opposées. Dans cet autre endroit, il serait une cible digne des slogans désobligeants et des insultes qui lui ont été lancés par les colons. Mais dans cet autre lieu, ni Elbaz ni aucun autre membre de l’armée n’est venu consoler les familles endeuillées, personne n’a protesté et personne ne portera la responsabilité.

S’il fallait insulter Elbaz pour ternir son image et noircir son nom, il aurait fallu le faire loin de la maison de la famille Masoud à Yad Binyamin. Au lieu de cela, il aurait fallu le faire dans la maison de la famille Tamimi à Nabi Saleh.

C’est cette famille qui avait besoin d’être réconfortée et indemnisée et qui avait toutes les raisons de l’insulter. Mais Elbaz, comme ses collègues officiers de l’occupation, est trop lâche pour prendre la responsabilité de l’assassinat d’un bébé. Il est encore plus lâche de ne pas exprimer son chagrin et de ne pas partager la douleur d’une famille dont le monde entier a été détruit par ses soldats.

Elbaz est le commandant de la brigade responsable de l’unité Duhifat, dont les soldats ont tué au début du mois le bambin Mohammed Tamimi. Il est le commandant de la brigade qui a truqué l’enquête et n’a jamais pensé à poursuivre qui que ce soit. C’est lui qui a inutilement envoyé les soldats à Nabi Saleh, lui qui est responsable de la confusion embarrassante qui s’en est suivie, et du doigt sur la gâchette qui a fini par abattre un enfant en bas âge et son père. Elbaz est responsable de ce terrible crime, et plus encore de la dissimulation qui a suivi.

Comme dans tout crime, celui qui envoie quelqu’un commettre un crime partage le blâme, voire en porte une part encore plus grande.

Pour ce crime et d’autres du même genre, Elbaz est sorti aussi pur que la rosée du matin. Personne n’a tué de bébé, et s’il l’a fait, c’est par erreur, et s’il s’agit d’une erreur, il n’y a pas de problème juridique ou moral.

C’est peut-être une justice poétique que ce soient les voyous colons, les voleurs de terres racistes et violents, qui aient sali l’honneur de l’officier qui méritait d’être sali, au lieu du sang de Tamimi, qui aurait dû crier contre lui depuis la terre et conduire à la révocation d’Elbaz.

Soit dit en passant, en avril de l’année dernière, Elbaz a tué de ses propres mains un homme ayant des besoins spéciaux qui tenait un fusil jouet à Ashkelon. Cette histoire a également été rapidement passée sous silence, même si la victime était juive.

Les forces de défense israéliennes doivent décider si le meurtre d’un enfant en bas âge sous les yeux de son père est un acte acceptable ou non. Les soldats auraient-ils tiré sur le bambin et son père s’il s’était agi d’une colonie juive et non d’un village palestinien, un village réputé pour sa résistance à l’occupation ? Si un tel acte est acceptable, alors nous devrions protester contre les responsables de ces normes perverties, y compris Elbaz.

Si un tel acte n’est pas acceptable, s’il est illégal et criminel, alors les suspects auraient dû être traduits en justice, y compris Elbaz, qui a cherché à dissimuler l’incident. La gauche [quelle gauche ? NdT] aurait dû réclamer cela, mais lorsque la gauche est faible et découragée, et que l’occupation ne l’intéresse plus, le résultat honteux est que personne n’est venu protester contre Elbaz pour le meurtre d’un enfant en bas âge.

Il est douteux que beaucoup de personnes de gauche oseraient traiter de “meurtrier” un officier des FDI responsable de la mort d’un bébé. Ce type de protestation - flagrante, violente et courageuse - est réservé aux jeunes des collines. Pour la gauche, des personnages comme Elbaz restent des héros dont la dignité, à Dieu ne plaise, ne doit jamais être touchée. Ils sont les vaches sacrées de la gauche.

HAARETZ
Des journalistes étrangers en Israël fustigent la ministre de la diplomatie publique de Netanyahou pour avoir qualifié leurs reportages de “fake”

Haaretz, 29/6/2023
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

La ministre de la diplomatie publique, Galit Distel Atbaryan*, en remet une couche et annonce que “la guerre pour la vérité ne fait que commencer”

Les attaques de la ministre de la diplomatie publique Galit Distel Atbaryan contre la presse internationale “pourraient mettre en danger les reporters en Israë”, a déclaré jeudi l’Association de la presse étrangère en réponse à une vidéo du ministère décriant les “fausses” informations des médias internationaux.

« Le terme "fake" pour décrire la presse est souvent utilisé par des gouvernements peu démocratiques dans le monde entier », a déclaré l’Association de la presse étrangère, qui représente des centaines de correspondants étrangers en Israël, dans un communiqué, affirmant que l’utilisation d’un tel langage « sape les valeurs de la démocratie et d’une presse libre ».

Dans une vidéo publiée sur les comptes Twitter et Youtube du ministère de la diplomatie publique, qui semble avoir été produite en collaboration avec le service de presse du gouvernement, Lital Shemesh, présentatrice du journal télévisé de la chaîne 14, a accusé certains des plus importants journalistes et médias internationaux d’avoir une couverture biaisée et de diffuser délibérément de fausses informations sur Israël.

"Fight the fake : a quick guide in reading the news about Israel"


Distel Atbaryan avait demandé aux porte-parole des agences de sécurité israéliennes et des ministères de partager la vidéo de relations publiques, ce qui a suscité des réactions négatives de la part des fonctionnaires qui travaillent en étroite collaboration avec la presse.

Les membres de l’unité des porte-parole de Tsahal ont réagi furieusement, avec des commentaires très critiques dans un groupe WhatsApp utilisé pour coordonner les messages en cas de crise, écrivant qu’il était inacceptable que des porte-parole affiliés à des organismes de sécurité ou à des ministères qui travaillent avec ces mêmes médias et journalistes soient invités à “partir en guerre contre les médias internationaux”.

Un porte-parole ayant reçu le message de la ministre a déclaré à Haaretz : « Il est ahurissant que quelqu’un utilise un canal comme celui-ci pour nous faire dire au monde que Christiane Amanpour est une menteuse et que la BBC et le New York Times ne font pas de journalisme ».

Dans sa déclaration, l’Association de la presse étrangère s’est dite « profondément préoccupée par le fait que le GPO [Bureau de presse du gouvernement], qui facilite notre travail en Israël, joue un rôle dans cette vidéo » et que, bien que l’organisation accueille favorablement les “critiques équitables”, « les exemples de titres rectifiés dans la vidéo ne font qu’illustrer l’engagement de ces médias en faveur d’une couverture équitable ».

Demandant le retrait de la vidéo des médias sociaux, l’organisation a déclaré qu’elle « serait heureuse de rencontrer la ministre Distel Atbaryan pour discuter de notre travail ».

En réponse à la demande de l’organisation, Distel Atbaryan en a remis une couche, déclarant : « la vidéo ne sera pas retirée et ma guerre pour le déluge de vérité [sic] ne fait que commencer ».
« Israël est un pays démocratique qui sanctifie la liberté d’expression et d’opinion. Mais en tant que ministre de l’information, je ne laisserai pas la couverture biaisée qui est faite dans notre arrière-cour exister sans une réponse appropriée », a-t-elle gazouillé.

Depuis leur retour au pouvoir, les alliés du Premier ministre Benjamin Netanyahu ont préconisé un certain nombre de mesures visant à faire pression sur les médias indépendants en Israël.
Au début de l’année, le ministre des communications Shlomo Karhi, qui avait menacé de mettre fin au financement public de la publicité dans Haaretz, a annoncé son intention de fermer le radiodiffuseur national Kan - un projet qui a récemment été suspendu pendant que le gouvernement se concentre sur le système judiciaire.

Entre-temps, Boaz Bismuth, député du Likoud, qui a travaillé auparavant comme rédacteur en chef du tabloïd gratuit pro-Netanyahou Israel Hayom, a déposé un projet de loi visant à interdire la publication d’un enregistrement contenant des informations “sensibles” ou “personnelles”.

Une telle loi aurait empêché la publication d’un enregistrement récent du ministre des finances Bezalel Smotrich qualifiant le premier ministre de “menteur fils de menteur” et aurait, selon les critiques, un effet dissuasif sur la capacité des médias à s’engager dans le journalisme d’investigation, en particulier sur les personnes occupant des postes de pouvoir.

Les deux propositions ne font plus l’objet d’une promotion active.

 


 Une vidéo plus ancienne de Mrs. Galit contre une exposition de l’ONU sur la Palestine à New York

NdT

Mme Galit Distel Atbaryan, née en 1971 de parents iraniens, ancienne pilote de l’armée de l’air, vit dans la colonie illégale de Kfar HaOranim près de Modi’in, où elle tenait une boutique de vêtements appelée “Ma sœur”. Membre du Likoud, elle a d’abord été nommée ministre de l’Information dans le gouvernement de coalition formé en décembre 2022, puis est devenue titulaire du nouveau ministère pour la Diplomatie publique, créé en janvier 2023, dont les tâches étaient auparavant assurées par le ministère des Affaires stratégiques.  Les médias israéliens se sont demandé durant les premiers mois de son ministère à quoi il allait servir. C’est désormais clair : à faire de la hasbara as usual, de la propagande, en ciblant les grands médias anglophones. Mais, dans ce rôle, la concurrence est acharnée entre les 40 ministres et sous-ministres (un effectif pléthorique pour satisfaire les 6 partis de la coalition) du panier de crabes qu’est le 37ème gouvernement israélien, dans lequel chacun et chacune tire dans les pattes de son voisin ou sa voisine. Mais Galit a de la ressource : elle a expliqué en 2021 sur une chaîné de télévision que “l’autisme, ça n’existe pas” : quand son fils avait 3 ans, a-t-elle raconté, elle lui a tiré les cheveux, l’a enfermé dans une chambre, ne lui donnant ni à boire ni à manger, jusqu’à ce qu’il se décide à parler. Heureusement pour eux, ni les Palestiniens ni les grands médias anglophones ne sont autistes.

 


JEAN-FRANÇOIS BAYART
¿Adónde va Francia?

 Jean-François Bayart, Le Temps, 8/5/2023
Traducido por Fausto Giudice, Tlaxcala

Jean-François Bayart (Boulogne-Billancourt, 1950), especialista en sociología histórica y comparada de la política, es profesor en el IHEID de Ginebra, donde ocupa la cátedra Yves Oltramare de “Religión y política en el mundo contemporáneo”. También es titular de la Cátedra de Estudios Africanos Comparados de la Universidad Politécnica Mohamed VI (Rabat). Es autor de varios ensayos, entre ellos L'Illusion identitaire (Fayard, 1996) y Le Gouvernement du monde (Fayard, 2004). Ha publicado L'impasse national-libérale, Globalisation et repli identitaire (La Découverte, 2017) y L'énergie de l'État, Pour une sociologie historique et comparée du politique (2022). Publicaciones

OPINIÓN. Según Jean-François Bayart, profesor del IHEID, Francia está entrando de lleno en el campo de las democracias “antiliberales”. Para él, Emmanuel Macron vive en una realidad paralela y juega con fuego.

 Agentes de policía armados custodian el Consejo Constitucional, poco antes de su decisión de rechazar un referéndum sobre la reforma de las pensiones. París, 3 de mayo de 2023 - © YOAN VALAT / keystone-sda.ch

¿Adónde va Francia? se pregunta Suiza. La respuesta equivocada sería detenerse en la burla culturalista de los galos eternamente descontentos. La crisis es política. Emmanuel Macron se proclama miembro del “extremo centro” encarnado a lo largo de la historia de Francia por el Directorio, el Primer y el Segundo Imperio, y diversas corrientes tecnocráticas sansimonianas. Es el último avatar de lo que el historiador Pierre Serna llama el “veneno francés”: la propensión al reformismo estatista y antidemocrático a través del ejercicio cameral y centralizado del poder.

El conflicto de las pensiones es un síntoma del agotamiento de este gobierno de extremo centro. Durante treinta años, no han faltado advertencias, que las sucesivas mayorías han desoído con un gesto de la mano, clamando corporativismo, pereza e infantilismo del pueblo. Administrada de forma autoritaria y a menudo grotesca, la pandemia de Covid-19 sirvió de prueba de choque para los servicios públicos de los que el país se enorgullecía y que, además de sus servicios, proporcionaban parte de su identidad.

Emmanuel Macron, con todo su estilo jupiteriano, está exacerbando la aporía en la que ha caído Francia. Nunca ha habido nada “nuevo” en él, y su postura de hombre “providencial” es una figura trillada del repertorio bonapartista. No puede imaginar otra cosa que el modelo neoliberal del que es puro producto, aunque sea combinándolo con una concepción cursi de la historia nacional, a medio camino entre el culto a Juana de Arco y la fantasía reaccionaria del Puy du Fou. Su ejercicio del poder es el de un niño inmaduro, narcisista, arrogante, sordo a los demás, bastante incompetente, sobre todo en el frente diplomático, cuyos caprichos tienen fuerza de ley desafiando la Ley o las realidades internacionales.

Podría ser gracioso si no fuera peligroso. La prohibición del “uso de aparatos de sonido portátiles” para evitar que los opositores armen jaleo, el acordonamiento policial de los lugares por donde transita el Jefe del Estado, el lanzamiento de campañas de rectificación ideológica contra el “wokismo”, la “teoría de género”, el “islamo-gauchisme” “islamozquierdismo”, el “ecoterrorismo” o la “ultraizquierda” son sólo algunas de las muchas pequeñas pistas que no engañan al especialista en regímenes autoritarios que soy. Francia está entrando de lleno en el campo de las democracias “iliberales”.

Un arsenal represivo a disposición de los  poderes siguientes

Algunos gritarán exageración polémica. Yo les pediría que se lo pensaran dos veces, teniendo en cuenta, en primer lugar, la erosión de las libertades civiles en nombre de la lucha contra el terrorismo y la inmigración desde hace al menos tres décadas y, en segundo lugar, los peligros que plantean desde este punto de vista las innovaciones tecnológicas en materia de control político y la inminencia de la llegada al poder de la Agrupación Nacional, a la que los gobiernos anteriores habrán proporcionado un arsenal represivo que hará superfluas nuevas leyes destructoras de libertades.

No se trata aquí de “buenas” o “malas” intenciones por parte del Jefe de Estado, sino de una lógica de situación a la que se presta y que favorece sin comprenderla necesariamente. Macron no es ni Putin ni Modi. Pero prepara el advenimiento de su clon en Francia. En el mejor de los casos, su política es la de Viktor Orban: aplicar el programa de la extrema derecha para evitar su acceso al poder.

En el contexto del hundimiento de los partidos gobernantes, un “bucanero” -por utilizar el término de Marx para referirse al futuro Napoleón III- se ha apoderado del botín electoral cuando Nicolas Sarkozy, François Hollande, Alain Juppé, François Fillon y Manuel Valls abandonan la escena. Le pareció “inteligente”, por seguir citando a Marx, destruir a la izquierda y a la derecha “al mismo tiempo” para instalarse en la comodidad de un cara a cara con Marine Le Pen. Pero Emmanuel Macron sólo fue elegido y reelegido gracias a los votos de la izquierda, ansiosa por conjurar la victoria de la Agrupación Nacional. Su programa, liberal y proeuropeo, nunca ha correspondido a las preferencias ideológicas de más de una cuarta parte del electorado, aparte del creciente número de votantes no inscritos y de abstencionistas que socavan la legitimidad de las instituciones.

Un Presidente ciego y despectivo

A pesar de esta obviedad, Emmanuel Macron, cuya formación y trayectoria le han hecho ajeno a las realidades del “Estado profundo”, y que fue elegido por primera vez a la magistratura suprema sin haber ocupado nunca el más mínimo cargo local o nacional, ha tratado de hacer prevalecer la combinación schmittiana de “Estado fuerte” y “economía sana” promulgando sus reformas neoliberales mediante ordenanzas, pasando por encima de los organismos intermedios y de lo que él llama el “Estado profundo” de la función pública, apoyándose en consultorías privadas o en consejos a-constitucionales como el Consejo de Defensa, reduciendo a Francia al estatus de “nación start-up” y dirigiéndola como un jefe que desprecia a sus empleados, los “galos refractarios”.

El resultado no se hizo esperar. El hombre que quería apaciguar a Francia provocó el movimiento social más grave desde mayo del 68, los Gilets jaunes [Chalecos amarillos], cuyo espectro sigue persiguiendo a la familia Macron. Con la mano en el corazón, Emmanuel Macron aseguró, al comienzo de la pandemia de Covid-19, que comprendía que no todo podía entregarse a las leyes del mercado. En varias ocasiones, prometió haber cambiado para calmar la indignación provocada por su arrogancia. Sin embargo, enseguida demostró que era incapaz de hacerlo. Mantuvo su rumbo neoliberal y se alió con Nicolas Sarkozy en 2022 para imponer una reforma financiera de las pensiones a pesar de la persistente oposición de la opinión pública y de todos los sindicatos, no sin ignorar sus contrapropuestas.

Ante el nuevo movimiento social masivo que le siguió, Emmanuel Macron se refugió en la negación y el sarcasmo. Reivindicó la legitimidad democrática, repitiendo que la reforma formaba parte de su programa y que había sido adoptada por una vía institucional validada por el Consejo Constitucional.

Una realidad paralela

Salvo que: 1) Emmanuel Macron sólo fue reelegido gracias a los votos de la izquierda, hostil al retraso de la edad de jubilación; 2) el pueblo no le dio la mayoría parlamentaria en las elecciones legislativas que siguieron a la elección presidencial; 3) el proyecto de ley trataba de los “principios fundamentales de la seguridad social”, que entran en el ámbito de la legislación ordinaria, y no de un proyecto de ley de “financiación de la seguridad social” (artículo 34 de la Constitución), una cláusula adicional legislativa que permitía utilizar el artículo 49.3 para imponer el texto; 4) el Gobierno se resignó a este procedimiento porque no contaba con mayoría positiva, sino con la ausencia de mayoría para tumbarlo al final de una moción de censura; 5) el Consejo Constitucional está compuesto por políticos y altos funcionarios, no por juristas, y se preocupa menos por el respeto del Estado de Derecho que por la estabilidad del sistema, como ya demostró con su aprobación de las cuentas fraudulentas de la campaña electoral de Jacques Chirac en 1995; 6) el abuso del procedimiento parlamentario suscitó la desaprobación de numerosos constitucionalistas y fue acompañado del rechazo de toda negociación social.

Como en 2018, Emmanuel Macron responde a la ira popular con violencia policial. Las infracciones de la libertad constitucional de manifestación, el uso de técnicas policiales de confrontación y la utilización de armamento de uso militar que causa lesiones irreversibles como abrasiones y mutilaciones han llevado a Francia a ser condenada por organizaciones de derechos humanos, el Consejo de Europa, el Tribunal de Justicia Europeo y las Naciones Unidas.

Frente a estas acusaciones, Emmanuel Macron se hunde en una realidad paralela y radicaliza su discurso político. Apenas reelegido gracias a los votos de la izquierda, incluidos los de La France insoumise, sitúa a esta última fuera del “arco republicano”, cuya delimitación reivindica como monopolio. Ve la mano de la “ultraizquierda” en las protestas contra su reforma. Justifica la violencia policial alegando que es necesaria para combatir la violencia de ciertos manifestantes.

Salvo que, una vez más 1) la negativa, recurrente desde la aportación de los votos de la izquierda a Jacques Chirac en 2002 y el puenteo parlamentario del no en el referéndum de 2005, a tener en cuenta el voto de los electores cuando disgusta o procede de una familia política distinta de la propia desacredita la democracia representativa, alimenta el deletéreo abstencionismo y anima a la gente a emprender acciones directas para hacer valer sus opiniones, no sin éxito en el caso de los Gilets jaunes y los jóvenes alborotadores nacionalistas corsos, a los que se concedió lo que se había negado a sindicatos y representantes electos; 2) el incumplimiento por parte del Estado de las sentencias judiciales cuando están en juego intereses agroindustriales lleva a los ecologistas a ocupar los emplazamientos de los proyectos conflictivos, a riesgo de enfrentarse a ellos; 3) la estigmatización de una ultraizquierda cuya importancia está por demostrar va de la mano del silencio del gobierno ante las agresiones de la ultraderecha identitaria y de los agricultores productivistas que multiplican sus ataques contra los ecologistas.

“Denunciar los excesos estructurales de la policía no significa pertenecer al black bloc

No es ser "amish" y querer volver a la "luz de las velas" para cuestionar el 5G o la incoherencia del gobierno cuando usa granadas para defender megapiscinas mientras las napas freáticas del país se secan. No es ser un bloque negro para denunciar los excesos estructurales de la policía. No hace falta ser de izquierdas para diagnosticar la creciente sobreexplotación de los trabajadores a medida que se precarizan los empleos, en nombre de la lógica financiera, para identificar el desvío de bienes públicos en beneficio de intereses privados, o para deplorar la “pasta loca” repartida entre las empresas más ricas y los contribuyentes. Tampoco hace falta ser un genio para darse cuenta de que la Macronía no ama a los pobres. Su única respuesta es criminalizar las protestas. Ahora quiere disolver la nebulosa Soulèvements de la terre, patrocinada por el antropólogo Philippe Descola, el filósofo Baptiste Morizot y el novelista Alain Damasio. Cuando el ministro de Interior Gérald Darmanin oye la palabra cultura, saca su LBD [Escopeta de Balas de defensa].

En esta carrera precipitada, se dio un paso decisivo cuando el gobierno atacó a la Ligue des droits de l'homme (Liga de Derechos Humanos). Al hacerlo, el gobierno de Macron se situó fuera del “arco republicano”. Esta asociación, surgida del asunto Dreyfus, es inseparable de la idea republicana. Sólo el régimen de Pétain se atrevió a atacarla. En todo el mundo, son los Putin y los Orban, los Erdogan y los Modi, los Kaïs Saïed y los Xi Jinping quienes hacen tales comentarios. Sí, Francia se está volcando.


 Mural de Lekto en Aviñón

 

 

28/06/2023

JOAQUIN URIAS
Sans nibards, il n'y a pas de démocratie
Cachez ce sein que je ne saurais voir

Joaquín Urías, Publico, 27/6/2023
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

Joaquín Urías (Séville, 1968) est professeur de droit constitutionnel, ancien avocat auprès de la Cour constitutionnelle et militant espagnol des droits de l'homme.

NdT : un policier est intervenu lors d’un concert à Murcia pour obliger la chanteuse Rocio Saiz à couvrir ses seins avec un drapeau LGBTQI+. Cet incident a apporté un peu de sel dans la campagne insipide pour les élections générales du 23 juillet 2023. Ci-dessous le point de vue d’un juriste.

Depuis dix ans, chaque fois que la chanteuse Rocío Saiz chante “como yo te amo” lors d'un concert, elle le fait en montrant ses seins. Elle le fait, entre autres, comme un acte militant, pour rendre visible le corps féminin.


Dans la société dans laquelle nous vivons, le fait pour une femme de montrer ses seins est encore une provocation. Montrer ses tétons en public a toujours été un privilège masculin. Sur la plage, à un concert ou dans une fête, il est courant que les hommes se mettent torse nu sans que cela ne soit considéré comme indécent ou ne suscite de rejet. Les femmes, en revanche, ont toujours été confrontées à un interdit moral sévère selon lequel leurs seins, et en particulier leurs tétons, ne peuvent être exposés à la vue de tous. La sexualisation des seins en a fait non seulement quelque chose d'intime, l'objet d'un désir masculin omniprésent, mais aussi quelque chose de moralement interdit.

Dans les systèmes autoritaires, toujours masculins et patriarcaux, cette morale devient un droit. Dans toute dictature qui se respecte (même dans les dictatures communistes qui prétendaient transformer le monde à l’enseigne de l'égalité), les valeurs traditionnelles en matière de sexualité font loi. Les juges, la police et tout le système répressif sont utilisés pour punir toute personne dont le comportement ou les idées remettent en cause la morale traditionnelle. Le franquisme et le régime islamique des ayatollahs, les idées de Trump et celles de Poutine ne sont pas différentes. Ils punissent tous ceux qui baisent la mauvaise personne et ceux qui montrent leurs seins.

Face à cela, les sociétés démocratiques reposent sur un idéal de liberté qui exige l'espace le plus large possible pour exprimer toute dissidence sans être maltraité pour ça. La démocratie repose sur deux valeurs qui n'en sont pas moins séduisantes et utopiques pour autant : l'égalité et la liberté. La première est une condition nécessaire, la seconde un but et une méthode. L'essence de la liberté démocratique réside dans la possibilité de remettre en cause le pouvoir pour être soi-même comme on le souhaite. Tant le pouvoir politique et économique que le pouvoir majoritaire qui impose des valeurs et des jugements moraux.

C'est pourquoi le combat féministe est essentiellement démocratique. Il s'agit d'atteindre l'égalité entre les hommes et les femmes, mais aussi de reconquérir des espaces de liberté que les femmes ont perdus pendant des siècles. Il en va de même, par exemple, de la lutte pour les droits des LGTBI, à la recherche de l'égalité comme cadre permettant d'exercer librement le droit de chaque personne à être comme elle le souhaite, au-delà des limites étroites de ce que la religion et la morale conservatrice considèrent comme bien ou mal. La seule limite étant le respect de la liberté et de la personne d'autrui.

Et c'est pourquoi les libéraux espagnols autoproclamés sont souvent (et paradoxalement) des liberticides idéologiquement plus proches de l'autoritarisme que de la véritable démocratie. Ils disent défendre le libre licenciement ou la liberté des prix des loyers parce qu'ils recourent au jeu dialectique qui consiste à appeler liberté ce qui est dictature : que les puissants ou les plus riches puissent impunément imposer leur volonté aux moins favorisés en les empêchant d'avoir des conditions d'emploi ou d'accès à un logement décent. Le test décisif de ces soi-disant libéraux, c'est lorsqu'ils sont confrontés à des valeurs morales. Vous n'entendrez jamais Isabel Díaz Ayuso [présidente de la Communauté de Madrid, Parti Populaire] ou ses acolytes de VOX défendre le droit de montrer ses seins, l'éducation sexuelle, le droit de toujours parler sa propre langue ou tant d'autres droits. Ils caricaturent le féminisme ou le mouvement LGTBI parce qu'ils craignent que la lutte pour l'égalité ne conduise à une société sans privilèges. Démocratique.

C'est pourquoi, pendant la dictature franquiste, la morale chrétienne a imprégné une grande partie de notre système juridique. Il en reste des vestiges évidents, comme le délit de blasphème. D'autres, comme l'adultère ou le scandale public, ont heureusement été supprimés de notre code pénal, bien que ce dernier ait dû attendre 1988. Cependant, il semble que les politiciens, juges et policiers conservateurs se languissent de ce droit de la morale chrétienne et qu'à la moindre occasion, ils en profitent pour le récupérer (en détournant les règles existantes). Les exemples prolifèrent en ces temps d'involution démocratique.

Dans une démocratie, ce n’est pas un crime de se promener nu·e dans la rue. Ça ne peut pas l’être. Récemment, la Cour d’appel de Valence a été confrontée au cas d’Alejandro, un militant nudiste qui, confronté à des sanctions policières successives pour obscénité, a tenté d’entrer nu dans la salle d’audience où son appel était entendu. Il a obtenu gain de cause, mais a dû subir l’humiliation démocratique des juges qui ont déclaré que son comportement tombait dans un “vide juridique”. Ce que les juges appellent un vide juridique, d’autres l’appellent démocratie.

Le fait est que ce n’est pas un délit, ni punissable, mais notre police, si peu formée à la protection des droits et si diligente à la protection de la morale, n’est pas toujours d’accord. Les femmes souffrent particulièrement de ce harcèlement policier, car elles sont soumises à un concept de nudité plus large que celui des hommes, qui, dans leur cas, inclut les seins.

Alors que Rocío Saiz chantait l’amour avec enthousiasme, les seins à l’ air, à Murcia, un policier local lui a ordonné de s’ arrêter et a ensuite tenté de la sanctionner. Après le scandale, les autorités ultraconservatrices de cette communauté autonome ont tenté de faire profil bas et même le ministère public a demandé une enquête sur le policier. Mais ce n’est pas le seul cas, et il n’y a pas non plus le même rejet social lorsque la police inflige injustement une amende à une femme pour avoir montré ses seins.

La tendance à l’autoritarisme s’ insinue dans notre société par des failles bien connues. L’une des pires est la loi dite bâillon, conçue par le gouvernement conservateur et maintenue par la volonté explicite du parti socialiste. Cette loi permet à la police de punir n’importe quel citoyen pour tout ce qui lui semble irrespectueux, et c’ est l’ une des façons dont la morale est récemment devenue une loi. Parmi les très nombreuses conduites punissables incluses dans cette loi figure la commission d’actes obscènes”. Le caractère obscène ou non de l’acte est laissé à l’appréciation de l’ agent qui agit. Si l’agent en question estime que la poitrine d’une femme est obscène, il inflige une amende à la femme qui l’ exhibe, tout comme il peut infliger une amende à une personne qui se promène nue sur la plage ou à des personnes qui ont des relations sexuelles dans un parc public. On parle peu de cette tâche de nos forces de sécurité transformées en justiciers moraux à l’iranienne. Bien sûr, tout cela est très antidémocratique.

Face à la tentative de réduire nos droits, des gestes comme celui de Rocío Saiz sont admirables. La régression démocratique que nous vivons et qui se manifeste par le succès électoral d’options, comme VOX, qui nient les droits humains nécessite des actes individuels courageux qui ne semblent pas venir de nos hommes politiques. Espérons qu’un jour les candidats socialistes qui défendent encore la loi bâillon se décideront à l’abroger et que les candidat·es de Sumar qui jouent des coudes pour s’ inscrire sur les listes comprendront que c’ est la démocratie qui est en jeu. En attendant, il s’avère que les autocrates ont vraiment peur des nichons. Respect à celles qui les montrent, exposent leur corps et subissent une répression qu’ elles ne méritent pas.