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09/04/2023

GIDEON LEVY
Israël ne voulait pas le calme

Gideon Levy, Haaretz, 9/4/2023
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

Israël ne voulait pas de calme, ne serait-ce qu’un instant. Les motifs des agitateurs varient, mais ils partagent le même objectif : attiser, enflammer et faire exploser les choses. L’histoire nous a déjà appris que lorsqu’Israël veut le calme, celui-ci est presque toujours merveilleusement maintenu. Quand il veut une escalade, il suffit d’attendre et de la voir arriver. Qui n’avait pas mis en garde contre la vague actuelle de violence ? Qui ne l’a pas vue venir ? Et d’un autre côté, qui n’a rien fait pour l’empêcher et qui, au contraire, l’a attisée ?

Des policiers israéliens prennent position près de l’esplanade d’Al Aqsa, connue par les juifs sous le nom de Mont du Temple, alors que des tensions apparaissent lors d’affrontements avec des Palestiniens dans la vieille ville de Jérusalem, mercredi. Photo : AMMAR AWAD/ REUTERS

 Aujourd’hui, nous allons à nouveau déplorer notre sort amer, les roquettes et les attaques terroristes, la violence de nos voisins et nos victimes sacrées qui sont mortes en vain. Israël aurait pu empêcher tout cela, et cette fois-ci, il aurait pu le faire assez facilement.

Quand Israël ne veut pas de calme, il sait exactement ce qu’il faut faire. Quatre ou cinq bombardements aériens anonymes de cibles iraniennes en Syrie, un coup et un autre contre la souveraineté syrienne et la puissance iranienne, en sachant parfaitement qu’à un moment donné, l’Iran et la Syrie ne seront plus en mesure de se retenir.

Quand Israël ne veut pas de calme, il lâche des troupes en uniforme de police dans un lieu extrêmement saint pour les musulmans pendant leur mois sacré. Lorsqu’Israël ne veut pas de calme, il envoie sa police pour frapper les fidèles de manière barbare, en ligotant des centaines de personnes sur les tapis de la mosquée Al Aqsa à Jérusalem afin de les humilier devant les caméras, pour que le monde arabe puisse les voir.

Aucun musulman, ni aucun être humain d’ailleurs, n’a pu rester insensible aux scènes choquantes qui se sont déroulées dans la mosquée. Bien sûr, il est possible de répandre des histoires sur la façon dont les gens se sont “terrés” dans la mosquée, mais la vérité est que de nombreux jeunes veulent passer les vendredis soir du Ramadan à l’intérieur de la mosquée sacrée. C’est leur droit, certainement dans le dernier endroit au monde où les Palestiniens ont encore des restes de souveraineté.

Les frapper de cette manière, ce n’est pas vouloir la tranquillité, mais plutôt la mort. Tuer un étudiant en médecine israélien de la ville bédouine de Hura à l’entrée de l’enceinte de la mosquée, puis donner une version ridicule des circonstances et ne pas révéler ne serait-ce que l’ombre de la vérité, est également un moyen de provocation. Ne pas vouloir le calme, c’est permettre à des centaines de colons émeutiers d’envahir sans cesse une ville palestinienne, de se livrer à des incendies criminels, à des destructions et à des agressions à leur guiseau vu et au su des soldats des forces de défense israéliennes qui n’ont jamais pensé à faire leur devoir et à protéger les Palestiniens. Ne traduire aucun des émeutiers en justice est aussi une façon d’empêcher le calme à tout prix.

Un pays qui ne veut pas se calmer saigne lentement ceux qui sont sous son occupation. Ces derniers mois, il ne s’est pas passé une semaine sans qu’il y ait des morts palestiniens insupportables, puis tout le monde s’étonne, se demande ce que ces animaux humains nous font, en lançant une voiture-bélier à Tel-Aviv et en tirant dans la vallée du Jourdain.

Ne pas vouloir le calme, c’est envoyer, après chaque attentat terroriste, un nombre fou de soldats dans les camps de réfugiés palestiniens et dans les villes, bouleverser la vie des habitants pendant une longue période, démolir les maisons des familles de terroristes et arrêter des milliers de personnes. La détention de 1 000 personnes pendant de longs mois sans procès est également un moyen éprouvé d’obtenir un manque de tranquillité, ce qu’Israël a également réussi à faire.

Emprisonner la bande de Gaza pour toujours, bombarder la Syrie sans limites et soumettre cruellement les Palestiniens. Qu’est-ce que le bellicisme exige d’autre ?

Les motifs changent mais l’objectif reste toujours le même. Aujourd’hui, c’est l’extrême droite qui est assoiffée de sang au sein du gouvernement et qui s’extasie chaque fois que le sang palestinien est versé, espérant ainsi réaliser Gog et Magog, suivis de la seconde Nakba tant espérée.

Et avec eux, il y a la droite pro-Bibi qui veut écraser le mouvement [juif israélien] de protestation, qui ne pourrait être anéanti que par une nouvelle effusion de sang. Et plus tard, on pourra toujours dire que ce sont les Arabes qui ont fait ça.

 

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