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19/09/2023

JUAN PABLO CÁRDENAS S.
Chili : Kissinger, la droite indécrottable et la gauche boboriche

Juan Pablo Cárdenas S., Política y Utopía, 18/9/2023
Traduit par Fausto Giudice
, Tlaxcala

Cinquante ans après le coup d’État de septembre 1973, au-delà des justes hommages rendus au Chili et dans le monde à Salvador Allende, nous avons tous eu l’occasion d’observer la tension que cet anniversaire national et mondial produit toujours au sein de la droite.

Ricardo, El Mundo, 13/9/2023

Bien que les années passées nous apportent de plus en plus de preuves que le renversement a été conçu et organisé par Henry Kissinger et le gouvernement usaméricain sous Nixon, curieusement, ce fait a été ignoré par les actes officiels, bien que cette fois-ci il y ait eu des reconnaissances fortes de la part de Washington.

En particulier lorsque la Maison Blanche a dévoilé de nouveaux documents secrets concluants qui révélaient un certain nombre d’actions et de contributions en millions de la CIA visant à déstabiliser le gouvernement de l’Unité populaire afin d’installer Pinochet à la tête de notre pays à l’issue d’une opération criminelle et terroriste.

Bien entendu, les dirigeants chiliens actuels ne sont pas disposés à mettre l’accent sur  la responsabilité de l’impérialisme usaméricain dans des dizaines de coups d’État sur notre continent et dans le monde. Et encore moins d’exiger que les cerveaux usaméricains soient envoyés dans notre pays pour y être jugés en tant que séditieux et assassins.

Ce serait certainement trop demander que l’impunité ne prévale pas à cet égard, de sorte que les dirigeants usaméricains actuels et futurs bénéficient de l’immunité pour continuer à mener des opérations criminelles visant à renverser les gouvernements de toute tendance politique qui mettent en péril les intérêts usaméricains.

Avec le coup d’État de 1973, la puissance impériale a clairement indiqué que ses efforts ne se limitaient pas à la lutte contre les gouvernements de gauche, mais aussi contre tout régime qui propose des changements substantiels en faveur de la justice sociale susceptibles d’affecter ses investissements à l’étranger.

Il y a cinquante ans, un gouvernement démocratiquement élu a été renversé pour imposer un régime néolibéral qui a annulé les acquis démocratiques et sociaux, par exemple la nationalisation du cuivre et la réforme agraire.

Nous trouvons inacceptable que cette année, il n’y ait pas eu non plus de condamnation large et sévère des actions des USA. Cela s’explique par la complicité de la droite et des entités politiques qui ont promu le coup d’État.

Et maintenant, ce qui est encore pire, c’est le silence éhonté de la gauche néolibérale, c’est-à-dire de ces socialistes, démocrates-chrétiens et autres pour lesquels c’est un honneur de serrer la main du secrétaire d’État usaméricain lui-même, qui a atteint 100 ans d’existence sans reproche de la part de ceux qui ont observé et même subi dans leur propre chair les violations des droits humains également encouragées par Washington.

12/09/2023

Chili, le coup d’État et les gringos, par Gabriel García Márquez (1974)

 Gabriel García Márquez, Alternativa, 1974
Original
Traduit par Tlaxcala, 11/9/2023

Ce texte, publié en 1974, reste d’actualité car il explique avec simplicité et clarté, en particulier pour la jeune génération, la chute du gouvernement Allende et désigne les exécutants directs et indirects du coup d’État.

Fin 1969, trois généraux du Pentagone ont dîné avec quatre officiers militaires chiliens dans une maison de la banlieue de Washington. L’hôte était alors le colonel Gerardo Lopez Angulo, attaché aérien à la mission militaire chilienne aux États- Unis, et les invités chiliens étaient ses collègues des autres armes. Le dîner était organisé en l ’honneur du directeur de l’école d’aviation chilienne, le général Toro Mazote, arrivé la veille pour une visite d ’étude. Les sept soldats ont mangé de la salade de fruits, du rôti de bœuf et des petits pois, bu les vins chaleureux de leur lointaine patrie méridionale où les oiseaux brillaient sur les plages tandis que Washington faisait naufrage dans la neige, et parlé en anglais de la seule chose qui semblait intéresser les Chiliens à ce moment-là : les élections présidentielles de septembre prochain. Au dessert, l’un des généraux du Pentagone a demandé ce que ferait l’armée chilienne si le candidat de gauche Salvador Allende remportait les élections. Le général Toro Mazote lui répond : « Nous prendrons le palais de la Moneda en une demi-heure, même si nous devons y mettre le feu ».

L’un des invités était le général Ernesto Baeza,  ’actuel directeur de la sécurité nationale du Chili, qui a mené l’assaut contre le palais présidentiel lors du récent coup d’État et qui a donné l’ordre d’y mettre le feu. Deux de ses subordonnés de l’époque sont devenus célèbres le même jour : le général Augusto Pinochet, président de la junte militaire, et le général Javier Palacios, qui a participé à la dernière échauffourée contre Salvador Allende. Le général de brigade aérienne Sergio Figueroa Gutiérrez, actuel ministre des travaux publics, et ami proche d’un autre membre de la junte militaire, le général d’aviation Gustavo Leigh, qui a donné l’ordre de bombarder le palais présidentiel à l’aide de roquettes, était également présent à la table. Le dernier invité était l ’actuel amiral Arturo Troncoso, aujourd’hui gouverneur naval de Valparaíso, qui a procédé à la purge sanglante des officiers progressistes de la marine et a déclenché le soulèvement militaire aux premières heures du 11 septembre.

Ce dîner historique fut le premier contact du Pentagone avec les officiers des quatre armes chiliennes. Au cours d’autres réunions successives, tant à Washington qu’à Santiago, il a été convenu que les militaires chiliens les plus dévoués à l’âme et aux intérêts des États-Unis prendraient le pouvoir en cas de victoire de l’Unité Populaire aux élections. Ils l’ont planifié à froid, comme une simple opération de guerre, et sans tenir compte des conditions réelles au Chili.

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27/05/2023

GREG GRANDIN
Henry Kissinger, un criminel de guerre, est toujours en liberté à 100 ans

Greg Grandin, The Nation, 15/5/2023
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

Greg Grandin (1962), membre du comité de rédaction de The Nation, est un historien usaméricain, professeur d’histoire à l’université de Yale et auteur de nombreux ouvrages. Il a notamment écrit Kissinger’s Shadow: The Long Reach of America’s Most Controversial Statesman (Metropolitan Books, 2015) et The End of the Myth : From the Frontier to the Border Wall in the Mind of America (Metropolitan Books, 2019), qui a reçu le prix Pulitzer 2020 pour la non-fiction générale.

Nous savons aujourd’hui beaucoup de choses sur les crimes qu’il a commis quand il était en fonction, qu’il s’agisse d’aider Nixon à faire échouer les négociations de paix de Paris et à prolonger la guerre du Viêt Nam, ou de donner son feu vert à l’invasion du Cambodge et au coup d’État de Pinochet au Chili. Mais nous savons peu de choses sur les quatre décennies qu’il a passées au sein de Kissinger Associates.

Henry Kissinger aurait dû tomber avec les autres : Haldeman, Ehrlichman, Mitchell, Dean [les plombiers du Watergate, NdT] et Nixon. Ses empreintes digitales étaient partout dans le Watergate. Pourtant, il a survécu, en grande partie en jouant sur la presse.


Illustration de Steve Brodner

Jusqu’en 1968, Kissinger avait été un républicain de Nelson Rockefeller, bien qu’il ait également été conseiller au département d’État dans l’administration Johnson. Selon les journalistes Marvin et Bernard Kalb, Kissinger a été stupéfait par la défaite de Richard Nixon face à Rockefeller lors des primaires. « Il a pleuré », écrivent-ils. Kissinger pensait que Nixon était « le plus dangereux de tous les hommes en lice à avoir comme président ».

Kissinger n’a pas tardé à ouvrir une voie détournée vers l’entourage de Nixon, en proposant d’utiliser ses contacts à la Maison Blanche de Johnson pour divulguer des informations sur les pourparlers de paix avec le Nord-Vietnam. Encore professeur à Harvard, il traite directement avec le conseiller en politique étrangère de Nixon, Richard V. Allen, qui, dans une interview accordée au Miller Center de l’université de Virginie, déclare que Kissinger, « de son propre chef », a proposé de transmettre des informations qu’il avait reçues d’un assistant qui participait aux pourparlers de paix. Allen a décrit Kissinger comme agissant de manière très discrète, l’appelant depuis des téléphones publics et parlant en allemand pour rendre compte de ce qui s’était passé pendant les pourparlers.

Fin octobre, Kissinger déclare à la campagne de Nixon : « Ils sabrent le champagne à Paris ». Quelques heures plus tard, le président Johnson suspend les bombardements. Un accord de paix aurait pu permettre à Hubert Humphrey, qui se rapprochait de Nixon dans les sondages, de prendre le dessus. Les collaborateurs de Nixon ont réagi rapidement en incitant les Sud-Vietnamiens à faire échouer les pourparlers.

Grâce aux écoutes téléphoniques et aux interceptions, le président Johnson a appris que la campagne de Nixon disait aux Sud-Vietnamiens de « tenir jusqu’après les élections ». Si la Maison-Blanche avait rendu cette informationpublique, l’indignation aurait pu faire basculer l’élection en faveur de Humphrey. Mais Johnson hésite. « C’est de la trahison  », a-t-il déclaré, cité dans l’excellent ouvrage de Ken Hughes, Chasing Shadows : The Nixon Tapes, the Chennault Affair, and the Origins of Watergate. « Ça ébranlerait le monde ».

Johnson a gardé le silence. Nixon a gagné. La guerre a continué.

Cette surprise d’octobre a donné le coup d’envoi d’une série d’événements qui allaient conduire à la chute de Nixon.

Kissinger, qui a été nommé conseiller à la sécurité nationale, conseille à Nixon d’ordonner le bombardement du Cambodge afin de faire pression sur Hanoi pour qu’il revienne à la table des négociations. Nixon et Kissinger étaient prêts à tout pour reprendre les pourparlers qu’ils avaient contribué à saboter, et leur désespoir s’est manifesté par la férocité. L’un des collaborateurs de Kissinger se souvient que le mot “sauvage” a été utilisé à maintes reprises lors des discussions sur les mesures à prendre en Asie du Sud-Est. Le bombardement du Cambodge (un pays avec lequel les USA n’étaient pas en guerre), qui allait finir par briser le pays et conduire à la montée des Khmers rouges, était illégal. Il fallait donc le faire en secret. La pression exercée pour garder le secret a fait naître la paranoïa au sein de l’administration, ce qui a conduit Kissinger et Nixon à demander à J. Edgar Hoover de mettre sur écoute les téléphones des fonctionnaires de l’administration. La fuite des Pentagon Papers de Daniel Ellsberg a fait paniquer Kissinger. Il craignait qu’Ellsberg, ayant accès aux documents, puisse également savoir ce que Kissinger combinait au Cambodge.

Le lundi 14 juin 1971, le lendemain de la publication par le New York Times de son premier article sur les Pentagon Papers, Kissinger a explosé en s’écriant : « Ça va totalement détruire la crédibilité américaine pour toujours.... Ça détruira notre capacité à mener une politique étrangère en toute confiance.... Aucun gouvernement étranger ne nous fera plus jamais confiance ».

« Sans la stimulation d’Henry », écrit John Ehrlichman dans ses mémoires, Témoin du pouvoir, « le président et le reste d’entre nous auraient pu conclure que les documents étaient le problème de Lyndon Johnson, et non le nôtre ». Kissinger « a attisé la flamme de Richard Nixon ».

Pourquoi ? Kissinger venait d’entamer des négociations avec la Chine pour rétablir les relations et craignait que le scandale ne sabote ces pourparlers.

Pour attiser les rancœurs de Nixon, il a dépeint Ellsberg comme un homme intelligent, subversif, aux mœurs légères, pervers et privilégié : « Il a épousé une fille très riche », a dit Kissinger à Nixon.

« Ils ont commencé à s’exciter l’un l’autre », se souvient Bob Haldeman (cité dans la biographie de Kissinger par Walter Isaacson), « jusqu’à ce qu’ils soient tous les deux dans un état de frénésie ».

Un artiste du subterfuge : Bien que le Watergate ait été autant son œuvre que celle de Nixon, Kissinger s’en est sorti indemne grâce à ses admirateurs dans les médias. Ici, avec Lê Đức Thọ, le dirigeant du FNL du Sud-Vietnam, avec lequel il a reçu le Prix Nobel de la Paix en 1973. Lê Đức Thọ a refusé le prix, et Mister K. ne l'a jamais réceptionné. (Photo Michel Lipchitz / AP)

Si Ellsberg s’en sort indemne, dit Kissinger à Nixon, « Cela montrera que vous êtes un faible, Monsieur le Président », ce qui incite Nixon à créer les Plombiers, l’unité clandestine qui a procédé à des écoutes et à des cambriolages, y compris au siège du Comité national démocrate dans le complexe du Watergate.

Seymour Hersh, Bob Woodward et Carl Bernstein ont tous publié des articles accusant Kissinger d’être à l’origine de la première série d’écoutes téléphoniques illégales mises en place par la Maison Blanche au printemps 1969 pour garder le secret sur les bombardements du Cambodge.

Atterrissant en Autriche en route pour le Moyen-Orient en juin 1974 et découvrant que la presse avait publié davantage d’articles et d’éditoriaux peu flatteurs à son sujet, Kissinger a tenu une conférence de presse impromptue et a menacé de démissionner. Tout le monde s’accorde à dire qu’il s’agissait là d’un coup d’éclat. « Lorsque l’histoire sera écrite », a-t-il déclaré, apparemment au bord des larmes, « on se souviendra peut-être que certaines vies ont été sauvées et que certaines mères peuvent dormir plus tranquilles, mais je laisse cela à l’histoire. Ce que je ne laisserai pas à l’histoire, c’est une discussion sur mon honneur public ».

La manœuvre a fonctionné. Il « semblait totalement authentique », s’extasie le New York Magazine. Comme s’ils reculaient devant leur propre acharnement à dénoncer les crimes de Nixon, les journalistes et les présentateurs de journaux télévisés se sont ralliés à Kissinger. Alors que le reste de la Maison Blanche se révèle être une bande de voyous à deux balles, Kissinger reste quelqu’un en qui l’Amérique peut croire. « Nous étions à moitié convaincus que rien ne dépassait les capacités de cet homme remarquable », a déclaré Ted Koppel, d’ABC News, dans un documentaire de 1974, décrivant Kissinger comme « l’homme le plus admiré d’Amérique ». Il était, ajoutait Koppel, « le meilleur atout que nous ayons eu ».

Nous en savons aujourd’hui beaucoup plus sur les autres crimes de Kissinger, sur les immenses souffrances qu’il a causées pendant les années où il a occupé des fonctions publiques. Il a donné son feu vert à des coups d’État et permis des génocides. Il a dit aux dictateurs de tuer et de torturer rapidement, a vendu les Kurdes et a dirigé l’opération bâclée d’enlèvement du général chilien René Schneider (dans l’espoir de faire échouer l’investiture du président Salvador Allende), qui s’est soldée par l’assassinat de Schneider. Après le Vietnam, il s’est tourné vers le Moyen-Orient, laissant cette région dans le chaos, ouvrant la voie à des crises qui continuent d’affliger l’humanité.

En revanche, nous savons peu de choses sur ce qui s’est passé plus tard, au cours de ses quatre décennies de travail avec Kissinger Associates. La « liste des clients » de la société est l’un des documents les plus recherchés à Washington depuis au moins 1989, lorsque le sénateur Jesse Helms a demandé en vain à la voir avant d’envisager de confirmer Lawrence Eagleburger (un protégé de Kissinger et un employé de Kissinger Associates) au poste de secrétaire d’État adjoint. Plus tard, Kissinger a démissionné de son poste de président de la Commission du 11 septembre plutôt que de soumettre la liste à l’examen du public.

Kissinger Associates a été l’un des premiers acteurs de la vague de privatisations qui a suivi la fin de la guerre froide dans l’ex-Union soviétique, en Europe de l’Est et en Amérique latine, contribuant à la création d’une nouvelle classe oligarchique internationale. Kissinger avait utilisé les contacts qu’il avait noués en tant que fonctionnaire pour fonder l’une des entreprises les plus lucratives au monde. Puis, ayant échappé à la bavure du Watergate, il a utilisé sa réputation de sage de la politique étrangère pour influencer le débat public - au profit, on peut le supposer, de ses clients. Kissinger a été un ardent défenseur des deux guerres du Golfe, et il a travaillé en étroite collaboration avec le président Clinton pour faire passer l’ALENA au Congrès.

L’entreprise a également profité des politiques mises en place par Kissinger. En 1975, en tant que secrétaire d’État, Kissinger a aidé Union Carbide à installer son usine chimique à Bhopal, en travaillant avec le gouvernement indien et en obtenant des fonds des USA. Après la catastrophe provoquée par la fuite de produits chimiques de l’usine en 1984, Kissinger Associates a représenté Union Carbide, négociant un règlement à l’amiable dérisoire pour les victimes de la fuite, qui a causé près de 4 000 décès immédiats et exposé un demi-million d’autres personnes à des gaz toxiques.

Il y a quelques années, la donation par Kissinger de ses documents publics à Yale a fait grand bruit. Mais nous ne connaîtrons jamais la plupart des activités de son entreprise en Russie, en Chine, en Inde, au Moyen-Orient et ailleurs. Il emportera ces secrets dans la tombe. [il n’est donc pas immortel ?, NdT]


 

 

16/05/2023

LUIS CASADO
Il condottiero...

Luis Casado, Politika, 15/5/2023
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

Cela fait maintenant plus de 60 ans que j'ai fréquenté le Liceo Neandro Schilling à San Fernando. Je ne l'ai jamais oublié, car il a été pour moi - et il l'est toujours - la meilleure preuve de l'excellence de l'enseignement public, laïque et gratuit. Un must.

En écoutant des opéras, un air de Boris Godounov est apparu, et je me suis souvenu que M. Benavides, notre professeur de musique, nous avait parlé de Moussorgski, ainsi que de Rimski-Korsakov et d'autres compositeurs russes.

Ma belle professeure de français avait la gentillesse d'inviter chez elle deux ou trois de ses élèves, dont moi, et de nous faire écouter La vie en rose et Je ne regrette rien de la voix d'Édith Piaf. A cette époque, il n'était pas courant d'avoir un “tourne-disques”. Loin de moi l'idée que, grâce à la dictature et à ses crimes, je finirais par m'ancrer à Paris.

Don Heriberto Soto, professeur d'histoire, a abordé le sujet du Moyen-Âge européen et a évoqué les condottieri. Les quoi ? Au Moyen Âge, un condottiero était un aventurier, un chef de soldats mercenaires mis au service de ceux qui avaient les moyens de les payer. Les mercenaires ont joué un rôle important au service des empires tout au long de l'histoire.

La créativité règne en maître sur le terrain. Les tirailleurs sénégalais étaient des troupes d'infanterie coloniales françaises recrutées en Afrique subsaharienne. Les premiers soldats noirs au service de la France étaient d'anciens esclaves de confiance - les “laptots” - recrutés au XVIIIe siècle pour assurer la sécurité des navires de la Compagnie générale des Indes, qui faisait commerce avec l'Afrique. Mercenaires et affaires allaient souvent de pair.

Les USA en savent quelque chose. Le coût des guerres perdues - Vietnam, Irak, Afghanistan... - est stupéfiant. Plus de 8 000 milliards de dollars pour les guerres au Moyen-Orient après les attentats contre les tours jumelles le 11 septembre 2001, conflits qui ont fait environ 900 000 morts (Watson Institute of Public and International Affairs - Brown University - Boston).

Les USA ont donc renforcé l'OTAN, dont Mon Général disait qu'elle n'était qu'un masque derrière lequel l'Empire cachait sa domination et ses desseins. De Gaulle avait raison. Au fur et à mesure que l'Empire se rétrécit, l'OTAN s'étend. Première cible : la Russie.

Comme vous le savez, la Russie est désormais capitaliste. La querelle usaméricaine ne porte pas sur l'idéologie, mais sur le contrôle de la planète. Le premier objectif était d'encercler la Russie par l'OTAN : tous les pays voisins devaient adhérer à l'Alliance, acheter des armements aux USA, oublier l'industrie européenne de l'armement et obéir.

La Russie a prévenu que mettre en péril ce qu'elle considère comme sa sécurité conduirait à des problèmes, mais c’est tombé dans des oreilles de sourds. Les USA, la Grande-Bretagne, l'Allemagne, la France et d'autres membres de l'UE ont participé aux manœuvres. Angela Merkel a reconnu que les accords de Minsk, censés mettre fin à l'agression ukrainienne contre deux provinces russophones, n'étaient rien d'autre qu'un prétexte pour armer les fous de Kiev : les mercenaires.

Si, en Europe, la plupart des dirigeants politiques se sont reconvertis en clowns, les USA ont trouvé à Kiev un clown dont ils ont fait un condottiere : Volodymyr Zelinsky.



À l'échelle historique, les sociaux-démocrates allemands Bernstein et Kautsky, qui ont trahi la cause des peuples, sont de vieux godillots comparés à des contemporains comme Tony Blair, Felipe Gonzalez, Josep Borrell et Jens Stoltenberg. Ces deux derniers méritent une reconnaissance particulière : Jens Stoltenberg est secrétaire général de l'OTAN et Josep Borrell secrétaire aux Affaires étrangères de l'Union européenne. Tous deux comptent parmi les promoteurs les plus enthousiastes de la guerre en Ukraine.

Dit comme ça, ça ne veut rien dire. Mais il faut savoir qu'à l'heure où nous écrivons ces lignes, l'“aide” militaire usaméricaine à Kiev s'élève à plus de 73 milliards de dollars. Pour leur part, les pays de l'UE ont apporté une “aide” de l'ordre de 65 milliards d'euros supplémentaires.

Les USA sont aux prises avec une dette publique qui a atteint son plafond - 31 000 milliards de dollars - et qui constitue un danger de déstabilisation de l'économie du monde entier. Le Congrès usaméricain doit voter pour augmenter le niveau de la dette fédérale, une procédure utilisée 78 fois depuis les années 1960, souvent sans débat. Le risque est que les USA se retrouvent en défaut de paiement le 1er juin. Cette fois, les Républicains ne semblent pas prêts à donner plus de mou à Mister Biden.

De leur côté, les pays de l'Union européenne affirment, les uns après les autres, qu'il n'y a pas d'argent pour les écoles, pas d'argent pour les hôpitaux, pas même d'argent pour les investissements. Alors, ils font comme la France : ils dansent sur la musique des investisseurs étrangers et baissent leur froc...

Pendant ce temps, le clown transformé en condottiero parcourt l'Europe pour demander des armes, des avions de chasse, des missiles et tout ce qui lui passe par la tête, tout en cachant dans d'autres pays le bakchich qu'il prend chaque fois que Kiev reçoit de l'argent.

L'objectif immédiat des USA est de soumettre la Russie, puis la Chine.

C'est pour ça qu'ils utilisent ces condottieri....

Cimetière d'Irpin, Ukraine, avril 2022. Photo Zohra Bensemra / REUTERS

 

30/04/2023

JORGE MAJFUD
Lettre ouverte à l'ambassadeur des USA chargé du Venezuela

  Jorge Majfud, 28/4/2023
Traduit par Faustinho Das Mortes

 Monsieur l'Ambassadeur James Story, 

Je suis heureux d'apprendre que la nouvelle politique du gouvernement usaméricain inclut la possibilité de lever les sanctions économiques contre le Venezuela, une vieille pratique de Washington depuis le début du 20ème siècle et qui consistait à ruiner les économies des pays ayant des gouvernements indépendants ou non-alignés. Comme ce fut le cas au Chili, où les sanctions contre le gouvernement démocratique d'Allende n'ont été levées que lorsque Washington et la CIA ont comploté pour détruire cette démocratie le 11 septembre 1973 et la remplacer par la dictature brutale d'Augusto Pinochet. Ce n'est qu'ensuite que les sanctions ont été remplacées par des millions de dollars d'aide pour produire le fameux “miracle chilien”, qui n'a pas empêché plusieurs crises économiques et sociales. Les exemples sont nombreux, mais je n'entrerai pas dans les détails. Ce qui est sûr, c'est que les responsables ne comparaîtront jamais devant un tribunal national ou international pour leurs crimes contre l'humanité. La justice est pour les pauvres et pour les perdants.

Comme vous le savez, en 1989, la population vénézuélienne est descendue dans la rue pour protester contre la politique de son gouvernement, qui tentait de mettre en œuvre ce que l'on a appelé plus tard la doctrine du consensus de Washington. Des centaines de personnes (probablement des milliers) ont été massacrées par les forces de répression, mais le président George H. Bush n'a pas bloqué ou puni le gouvernement vénézuélien par des sanctions ; au contraire, il est venu à la rescousse du président Carlos Andrés Pérez avec une aide de plusieurs millions de dollars et un engagement à radicaliser les mesures mêmes contre lesquelles la population protestait.

PEDRIPOL

Selon des économistes comme Jeffrey Sachs, les sanctions actuelles contre le peuple vénézuélien sont responsables de la mort de dizaines de milliers de Vénézuéliens et, en partie, des millions d'émigrants. Je comprends que la guerre contre la Russie et les derniers accords de paix négociés par la Chine entre deux autres grands producteurs de pétrole, l'Arabie Saoudite et l'Iran, rendent nécessaire et urgent un réexamen du cas vénézuélien.

Mais parlons de démocratie, c'est l'essentiel. Vous avez récemment fait une déclaration officielle appelant les Vénézuéliens à s'inscrire sur les listes électorales pour les prochaines élections. C'est une idée que nous soutenons presque tous. Mais cette déclaration officielle est le reflet d'une histoire vieille de deux siècles, au cours de laquelle l'Amérique latine a souffert de l'ingérence des gouvernements et des entreprises privées des USA.

Dans les années 1940, l'un des pays les plus éloignés de l'influence géopolitique des USA, l'un des plus rebelles et des plus détestés pour cette raison, selon les diplomates de Washington de l'époque, était l'Argentine. Son indépendance et son manque d'obéissance ont suscité des interventions politiques de la part de l'ambassadeur usaméricain de l'époque, Spruille Braden. En s'immisçant dans la campagne électorale de 1945, Braden a inventé l'anti-péronisme avant même que le péronisme ne naisse. On pourrait citer des dizaines de cas similaires et vous le savez. En géopolitique, la troisième loi de Newton se vérifie, mais jamais dans les mêmes proportions. Presque toujours, l'action écrase la réaction avec une dictature coloniale, mais parfois, c'est le contraire qui se produit et cela s'appelle une révolution.

Dans votre communication du 27 avril [voir vidéo ci-dessous], vous avez averti les Vénézuéliens que le gouvernement de M. Maduro essaierait de les convaincre de ne pas voter. Vous avez également qualifié certains représentants de l'Assemblée nationale de “scorpions” qui utilisent divers sigles politiques pour diviser les votes.

Pouvez-vous imaginer que la règle d'or des relations internationales, le principe de réciprocité, soit appliquée et que l'ambassadeur d'un pays d'Amérique latine s'adresse aux USAméricains dans un message officiel pour favoriser les républicains ou les démocrates ? Pouvez-vous imaginer que l'un d'entre eux demande aux USAméricains de démocratiser le système électoral en éliminant le collège électoral, un héritage du système esclavagiste, comme tant d'autres choses ? Ou le système disproportionné qui assure deux sénateurs par État, alors que certains États sont quarante fois plus peuplés que d'autres ? Ou que les citoyens usaméricains de la colonie de Porto Rico se mobilisent pour réclamer le droit de vote ? Ou que les entreprises cessent d'écrire les lois au Congrès et de donner des centaines de millions de dollars aux candidats à chaque élection ? Vous imaginez ?

Ce serait tout de même moins grave si l'on considère qu'il n'y a jamais eu de pays latino-américain qui ait envahi les USA, leur ait pris la moitié de leur territoire, ait renversé plusieurs gouvernements et ait installé des dictatures militaires pour protéger les entreprises privées latino-américaines. Connaissez-vous un seul exemple ? Vous n'en connaissez pas, n'est-ce pas ? Mais si un tel cas hypothétique se produisait, non seulement cet ambassadeur perdrait son poste, mais s'il s'agissait de l'ambassadeur de Bolivie ou du Venezuela, le monde attendrait déjà un “changement de régime” ou un nouveau blocus.

Comme si cela ne suffisait pas, vous avez demandé aux Vénézuéliens de “parler à leurs voisins” parce que “les élections peuvent être gagnées”. Ce n'est pas une nouveauté dans l'histoire tragique de l'Amérique latine, comme vous le savez et comme le savent beaucoup mieux les Latino-Américains, dont la mémoire ancienne et nouvelle est jonchée d'ingérences tragiques, de coups d'État et de “dictatures amies” sanglantes soutenues par Washington et les entreprises qui ont plus de pouvoir que vous et que n'importe quel autre ambassadeur. Ce qui est peut-être nouveau, c'est que cela n'est même plus caché ou nié, comme c'était le cas, par exemple, au temps de Mister Kissinger.

Quand allons-nous comprendre qu'il est dans l'intérêt du peuple usaméricain et latino-américain de cesser de se faire des ennemis avec cette ingérence paternaliste et arrogante, qui va à l'encontre des principes élémentaires des relations internationales ?

Quand allons-nous cesser de représenter des intérêts particuliers et penser sérieusement au bien commun des peuples libres et indépendants ?

Quand allons-nous comprendre qu'il est non seulement plus juste et moins tragique, mais encore plus économique de se faire des amis plutôt que des ennemis, que la “sécurité nationale” dépend de la première et non de la seconde option ?

Quand allons-nous cesser de voir le monde comme un film d'Indiens contre cow-boys, de super-héros contre méchants, de flics contre voleurs où nous nous arrogeons toujours le rôle de cow-boys, de flics et de super-héros, en oubliant l'histoire tragique qui est à l'origine des “méchants” alors que le monde nous laisse de plus en plus seuls ?

Quand allons-nous nous changer pour faire de ce monde un endroit plus juste, avec des règlements plus équitables et moins de guerres suprémacistes ?

Quand allons-nous cesser de contrôler la vie des autres au nom de bonnes vieilles excuses et nous atteler à résoudre nos propres problèmes nationaux, qui s'aggravent de jour en jour ?

Est-ce que nous acceptons seulement que le monde change (et, comme toujours, s'adapte à nos exigences) et que nous ne le fassions pas ?

Combien de temps allons-nous continuer à rater notre coup en prétendant donner des leçons au monde sur la liberté, la démocratie et les droits humains, toujours par la force des sanctions économiques, quand ce n'est pas par des bombardements notoires ? Combien de temps allons-nous donner des leçons sur la façon de vivre alors que nous ne savons même pas comment le faire nous-mêmes ?

Salutations distinguées,

Jorge Majfud
 
James "Jimmy" Story est l'ambassadeur de l'Unité des affaires vénézuéliennes, basée à l'ambassade des USA à Bogota, en Colombie.

27/04/2023

SERGIO RODRIGUEZ GELFENSTEIN
Vietnam, 48 ans après la défaite de l'impérialisme US


Sergio Rodríguez Gelfenstein, 27/4/2023
Original:
Vietnam, a 48 años de la derrota del imperialismo estadounidense
English:
Vietnam, 48 years after the defeat of US imperialism

Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

Le 6 juin 1969, le Front national de libération du Sud-Vietnam (FNL) et d'autres organisations politiques et sociales ont convoqué un congrès des représentants du Sud qui a donné lieu à la création du Gouvernement révolutionnaire provisoire de la République du Sud-Vietnam (PRG), qui allait commencer à jouer un rôle décisif dans la formation du pouvoir révolutionnaire dans cette partie du pays.

Congrès national des députés


L'architecte Huynh Tan Phat (au centre) est élu président du GRP


Le GRP

Il faut dire que depuis 1970, la lutte au Laos et au Cambodge, également occupés par les USA, a gagné en force et les patriotes de ces pays ont commencé à coordonner leurs efforts avec le FNL pour le développement de la guerre révolutionnaire.


En 1972, le Parti communiste vietnamien (PCV) ordonne la préparation d'une offensive stratégique pour remporter des victoires militaires majeures, perturber la stratégie impérialiste de “vietnamisation de la guerre” et obliger les USA à recourir à la négociation.

Mais, au vu des succès militaires vietnamiens, Washington, sous l'administration de Richard Nixon, ordonne un renforcement de ses forces en mobilisant une importante force aéronavale afin de renforcer l'agression contre le Sud et de déclencher ce que l'on a appelé la deuxième guerre d'agression contre le Nord. Dans le même temps, le président usaméricain a été contraint de faire une volte-face surprise à l'approche des élections de novembre 1972, de sa réélection et du rejet croissant de la guerre du Viêt Nam dans l'opinion publique usaméricaine. Il tentait manifestement d'obtenir des succès militaires qui lui permettraient de négocier en position de force à Paris.

Cependant, n'ayant pas atteint les objectifs qu'il s'était fixés dans la guerre et face aux brillantes propositions de la diplomatie vietnamienne qui recueillaient un large soutien dans le monde et en particulier dans l'opinion publique usaméricaine elle-même, Nixon a été contraint d'accepter les propositions vietnamiennes afin de faire gagner du temps à ses troupes tout en renforçant l'armée fantoche. Mais une fois élu, Nixon a ouvertement rejeté les accords qu'il avait signés, déclenchant des bombardements génocidaires sur les principales villes vietnamiennes.

L'assaut aérien infernal des USA sur Hanoi et Haiphong a été repoussé avec succès par les forces armées vietnamiennes, obligeant Nixon, le 27 janvier 1973, à signer les accords de Paris sur la cessation de la guerre et le rétablissement de la paix au Viêt Nam.

Les accords de Paris signifiaient que les USA devaient retirer leurs troupes et celles de leurs satellites et respecter l'indépendance du Viêt Nam. Ils devaient également cesser d'intervenir dans les affaires intérieures du pays et reconnaître le droit à l'autodétermination du peuple et le statu quo du Sud-Vietnam. Le Viêt Nam a ainsi remporté une nouvelle grande victoire contre une puissance étrangère, qui n'était toutefois pas encore totalement consommée.

Bien que les accords de Paris aient constitué une étape importante dans le processus de libération du Viêt Nam, l'impérialisme usaméricain a continué à soutenir le régime fantoche de Saigon (désormais dirigé par Nguyen Van Thieu). Il entendait ainsi maintenir sa domination coloniale et préserver la division du pays. Mais Washington a mal diagnostiqué la situation, pensant que les accords avaient paralysé l'élan libérateur du peuple vietnamien. Au contraire, le prestige du FNL et du GRP s’accrut de jour en jour, tant sur le plan intérieur qu'international.

Pour donner une idée de l'ampleur de l'intervention militaire usaméricaine au Viêt Nam, la puissance de feu de ses soldats était six fois supérieure à celle qu'ils possédaient pendant la Seconde Guerre mondiale. Les USA ont dépensé 400 000 dollars pour chaque Vietnamien tué, soit 75 bombes et 150 obus d'artillerie par cadavre.

Le régime de Van Thieu devait faire face non seulement à la puissance et à la force révolutionnaires dans les zones libérées, mais aussi à une résistance populaire croissante dans les zones sous son contrôle. En outre, l'aide de Washington avait été considérablement réduite par rapport aux années précédentes. De même, une profonde crise économique a débuté au second semestre 1973 et s'est aggravée l'année suivante, caractérisée par une forte inflation, une forte dévaluation et la perte de devises étrangères.

Dans ces conditions, le GRP et le FNL ont réagi en multipliant les actions armées et en décidant d'appliquer sans délai les accords de Paris. Dès juillet 1973, le PCV a estimé qu'il était nécessaire de préparer les forces à une offensive pour s'emparer définitivement du pouvoir. À la mi-1974, le cours de la guerre avait changé de manière significative en ce qui concerne la croissance des forces armées révolutionnaires, les actions offensives en cours, la consolidation des routes d'approvisionnement logistique du nord au sud et l'augmentation des actions dans les villes.

Tous ces éléments, ainsi que d'autres conditions favorables, ont permis au PCV, en octobre 1974, de conclure qu’un rapport de forces favorable aux révolutionnaires avait été créée, et il a donc pris la décision historique de mobiliser le parti, l'armée et le peuple pour mener une attaque générale afin d'anéantir et d'écraser les troupes du régime de Van Thieu, de renverser le pouvoir ennemi tant au niveau régional que national, de prendre le pouvoir pour le peuple et de libérer le sud. Le PCV et sa commission militaire centrale se sont attelés à la tâche de planifier et d'organiser les futurs combats.

L'offensive et le soulèvement général débutent le 10 mars 1975 sur le plateau occidental du pays. Les premiers succès permettent d'avancer vers la plaine côtière centrale. La campagne de Hué-Da Nang, deuxième ville du Sud-Vietnam, où la plus puissante base militaire des forces armées du régime pro-yankee est anéantie, marque un tournant. L'offensive s'est poursuivie par des attaques et des soulèvements au nord et au nord-ouest de Saigon. Le 25 mars, 16 provinces avaient été libérées, laissant au F.L.N. le contrôle des trois quarts du territoire et de la moitié de la population du Sud-Vietnam. L'effondrement de l'armée ennemie est jugé total et les USA sont impuissants face à la forte offensive vietnamienne. Les conditions sont réunies pour la bataille finale : la bataille de Saigon.

La bataille pour la libération de Saigon a été appelée la “campagne Ho Chi Minh”. Le président et fondateur de la République démocratique du Viêt Nam était décédé le jour où le pays commémorait le 24e  anniversaire de son indépendance, le 2 septembre 1969. Il avait été décidé que la dernière ville libérée porterait son nom.

Des groupes militaires colossaux sont mobilisés pour renforcer ceux qui se trouvent déjà dans la zone de combat. Pendant ce temps, l'ennemi se prépare à conserver son dernier bastion, tandis que les USA déploient toutes sortes de manœuvres diplomatiques pour empêcher ou retarder l'issue évidente des événements. Le 18 avril, le président usaméricain Gerald Ford ordonne l'évacuation urgente de tous les USAméricains du Viêt Nam. Le 21 avril, alors qu'il tente de sauver la situation, Washington limoge Van Thieu tout en cherchant à négocier un cessez-le-feu bilatéral.

Mais il est trop tard. Le 26 avril est déclenchée la “campagne Ho Chi Minh”, un plan d'attaque à partir de cinq directions, coordonné avec les forces armées locales et le peuple insurgé. Les 28 et 29 avril, les colonnes révolutionnaires avancent impétueusement, encerclant les forces ennemies sur le périmètre de Saigon. 

Le premier tank vietnamien à entrer dans l'enceinte du palais présidentiel fantoche

Les colonnes d'attaque ont occupé les cibles les plus importantes de la ville et, à 11h30 le 30 avril, au milieu de la ruée du personnel du gouvernement et de l'ambassade usaméricaine, le drapeau de la révolution a été hissé sur le palais du gouvernement. Le 1er mai, l'ensemble de la partie continentale du Sud-Vietnam était sous contrôle. Au cours de la campagne, 400 000 soldats ennemis ont été anéantis, désintégrant une armée de plus d'un million d'hommes, ainsi que les forces de sécurité et de police.


La fin de la “campagne Ho Chi Minh” et la libération totale du Viêt Nam, dont nous commémorons aujourd'hui le 48e  anniversaire, sont le fruit d'une brillante opération militaire menée par les forces armées et le peuple vietnamiens sous la direction du parti communiste. L'impérialisme usaméricain a été vaincu dans ce qui a été qualifié de plus grand désastre militaire et politique de son histoire. De même, l'ensemble de l'appareil militaire, politique et administratif du régime créé par Washington au Viêt Nam a été détruit. Cinq administrations usaméricaines ont déployé des efforts colossaux pour empêcher la victoire du peuple vietnamien et n'y sont pas parvenues, couronnant ainsi vingt années de lutte glorieuse contre l'agression usaméricaine et pour la réunification du pays.


Départ du dernier hélicoptère yankee de Saïgon au petit matin le 30 avril 1975.F ilm super8 pris de l'hôpital Grall par le Dr Bourdais, réanimateur