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17/09/2021

ANTONIO MAZZEO
Des migrants égyptiens réexpédiés par pont aérien depuis l'Italie vers l'enfer du dictateur Al Sissi

 Antonio Mazzeo, Africa Express, 16/9/2021
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala 

Neuf vols fantômes pour expulser des centaines de citoyens fantômes égyptiens. Nous ne connaissons pas leurs visages, leurs noms, leurs prénoms, leurs âges, leurs espoirs et leurs rêves brisés, les véritables raisons qui les ont poussés à abandonner leurs foyers et leurs familles et à   s'embarquer pour un long et dangereux voyage à travers la mer et le désert. À vrai dire, nous ne savons même pas combien ont été réellement rejetés ou expulsés en six mois seulement, car les comptes des bureaucrates de l'État sont tout sauf précis et méticuleux. Il est question de « rapatriement et de réadmission » mais, à trois reprises, l'aéroport de destination n'est pas en Égypte mais dans un pays tiers situé à 3 000 kilomètres, la Tunisie.

Nous ne savons pas à qui et avec quelles garanties ont été remis les citoyens égyptiens entrés illégalement sur le territoire italien, ni qui et comment Rome a vérifié qu'ils ne fuyaient pas les répressions sanglantes du régime du maréchal Al Sissi - disparitions forcées, exécutions extrajudiciaires, torture - dont tout le monde en Italie a désormais connaissance après le cas tragique du chercheur Giulio Regeni et l'emprisonnement pour une durée indéterminée de l'étudiant Patrick Zaki de l'université de Bologne.


Les avis d'appel d'offres pour le transport aérien d'immigrants, attribués par le département de la sécurité publique du ministère de l'Intérieur (direction centrale de l'immigration et de la police des frontières), qui peuvent être consultés sur le site web de la police d'État, décrivent un scénario inédit et inquiétant : entre le 19 mars et le 31 août 2021, les autorités italiennes ont dépensé 652 290 euros pour louer neuf avions et expulser un nombre indéterminé de citoyens égyptiens « destinataires d'ordres d'expulsion ou de rejet par les préfectures ». Ces opérations sont déplorables en raison du climat de violence et d'oppression qui règne dans ce pays d'Afrique du Nord et de la dépense injustifiée de ressources financières et humaines. Pour les "services d'éloignement et d'accompagnement nécessaires" des migrants ou des demandeurs d'asile potentiels, entre 650 et 1 000 policiers ont été employés, avec des frais de mission (internationale) non quantifiés, ainsi que des dépenses non quantifiées pour le transfert des Égyptiens des centres de détention et d'expulsion vers les aéroports d'embarquement.

« Il est possible de rapatrier les citoyens égyptiens arrivés illégalement sur le territoire national, après avoir effectué les procédures d'identification nécessaires, conformément à l'accord de coopération entre la République italienne et la République arabe d'Égypte sur la réadmission du 9 janvier 2007 », peut-on lire dans les neuf procédures négociées dont la police d'État confie le transport aérien des migrants à des sociétés privées. « Le rapatriement des étrangers faisant l'objet d'une mesure d'expulsion doit toujours être effectué immédiatement ou, en tout état de cause, si les intéressés sont détenus dans un CPR (Centres de rétention pour  rapatriement), dès que les situations transitoires qui ont fait obstacle à son exécution ont été surmontées, indépendamment de la durée de détention déjà validée par l'Autorité judiciaire (...).) On considère donc qu'il est impératif de prévoir le rapatriement des citoyens égyptiens faisant l'objet d'une mesure d'éloignement de l'Italie, par la location d'un avion et des services connexes ».