La trahison des Verts allemands ne date pas d’hier : souvenons-nous de Joschka Fischer, l’ancien lanceur de cocktails Molotov en baskets (désormais, il porte des costumes sur mesure provenant de Saville Road), prenant la tête de la croisade guerrière contre la Serbie en 1999. 24 ans plus tard, avec les sinistres Baerbock et Habeck, les Grünen sont arrivés au bout de leur chemin de parjure en acceptant d’aller au charbon. Partisans de la guerre et des énergies fossiles, il ne leur reste plus qu’à changer de nom. Proposition de nouveau nom : Die Grauen, les Gris. Ci-dessous 2 articles du quotidien italien il manifesto, traduits par mes soins.- Fausto Giudice, Tlaxcala
Les Verts au gouvernement criminalisent les écologistes
Marco Bascetta, il manifesto, 15/1/2023
Lützerath, le nom de ce petit bourg agricole de Rhénanie-du-Nord-Westphalie restera longtemps dans la mémoire politique de la Bundesrepublik. Non seulement en raison de l'affrontement, pas vraiment pacifique, qui oppose actuellement les militants qui l'occupent et entendent le défendre jusqu'au bout face à un déploiement policier massif chargé de le dégager à tout prix pour permettre, après démolition, l'agrandissement de la mine de charbon, déjà immense, appartenant au géant énergétique RWE.
Il n'est pas facile d'expliquer comment
et pourquoi dans un pays où les Verts occupent une position de premier plan au
sein du gouvernement fédéral et dans un Land où ils gouvernent à leur tour,
mais ici avec la CDU chrétienne-démocrate, ils soutiennent l'expulsion par la
police et l'augmentation de l'exploitation minière parmi les plus néfastes pour
le changement climatique. Depuis quelque temps champions d'un “réalisme
politique” qui se confond avec une vocation gouvernementale qui semble
l'emporter sur tout autre ordre de considérations, les Grünen revendiquent le
mérite d'avoir obtenu en échange du trou de Lützerath une sortie anticipée de
l'utilisation de l'énergie du charbon.
Un excellent compromis, disent les dirigeants du parti. Le fait est que,
au-delà des engagements pour le futur, toujours incertains et prêts à être
suspendus face à tel ou tel facteur de crise, le signal politique immédiat va
dans la direction diamétralement opposée à toute voie d’opposition au
changement climatique et à la dévastation du territoire, sans parler de la
sensibilité environnementaliste. Ce choix est d'autant plus incompréhensible
que différents centres de recherche se prononcent sur l'inutilité absolue de
l'expansion minière dans la région rhénane pour les besoins énergétiques du
pays.
L'invasion russe de l'Ukraine a donné un bon coup de pouce aux maîtres des combustibles fossiles et du nucléaire, de sorte qu'il n'est pas exclu qu'une fois la guerre terminée, ils en profitent pour remettre en jeu leurs immenses gisements. Dans le contexte du conflit, les Verts allemands s'étaient déjà convertis au réarmement massif de l'Allemagne et à son coût stratosphérique, tant symbolique que financier.
Parti modéré et centriste, peu enclin à s'associer à tout conflit social, plus que prudent dans ses rapports avec les grands intérêts économiques, il était inévitable que les Grünen se retrouvent sur une trajectoire de collision avec les mouvements écologistes et pacifistes, sans parler de l'exécrée Dernière Génération, ainsi que (comme cela était déjà arrivé au SPD dans les années 1960 avec la sécession des étudiants du SDS) avec sa propre organisation de jeunesse, qui se range du côté des occupants de Lützerath. Un lieu qui symbolise aujourd'hui un énorme paradoxe et qui doit être effacé avant tout pour rétablir un ordre de priorités politiques qui repoussera la crise climatique dans un arrière-plan si cosmiquement obscur et inatteignable qu'il peut être supprimé d'un coup de baguette magique.
Dans tous les cas, l'expulsion de Lützerath n'est pas une simple affaire d'heures ou de jours. Les occupants, barricadés dans des cabanes construites dans les arbres, sur les toits et dans les greniers, se sont organisés de manière à rester le plus longtemps possible sous les yeux du public, qui n'a guère de sympathie pour le géant du charbon. Au fil du temps, il est probable que la confrontation aura tendance à s'intensifier, de même que les tensions entre partis, institutions et mouvements, avec toutes leurs implications répressives.
Les mises en garde ne manquent pas et depuis des semaines, certains fulminent contre la naissance d'une supposée “RAF verte”. Depuis 1991, un groupe d'intellectuels et de linguistes de l'université Philipps de Marbourg choisit, parmi des milliers de propositions spontanées, l'Unwort de l'année, c'est-à-dire le “non-mot” ou le “mot indigne”, bref un non-sens délibéré. Pour 2022, le choix s'est porté sur Klimaterroristen, un terme souvent apposé aux militants de Last Generation et qui combine un non-sens total (qui serait terrorisé et comment?) avec une intention évidente de « criminaliser les protestations non violentes, la désobéissance civile et la résistance démocratique », telle est la motivation du jury, telles qu’elles sont pratiquées par les mouvements qui luttent contre un modèle de développement aujourd'hui généralement considéré comme insoutenable. Il s'agit en tout cas d'une tentative maladroite d'opposer la noblesse, même quelque peu utopique, des objectifs environnementalistes à l'illégalité et à la violence (imaginaire) des moyens utilisés pour les faire connaître. Avec peu de capacité, cependant, à gagner l'opinion publique. La démolition de Lützerath s'avère être un faux pas majeur, un coup définitif porté à la “diversité” déjà discréditée des Verts (avec des répercussions probables sur les prochaines élections à Berlin) et une soumission aux profits de RWE plutôt qu'un soutien nécessaire aux besoins énergétiques du pays.
Lützerath, 14 janvier 2023 : 35 000 manifestants selon les organisateurs, 15 000 selon la polizei
La résistance écologiste : « Les Verts nous ont trahis »
Sebastiano Canetta, il manifesto, 15/1/2023
Lors de la grande manifestation du samedi 14 janvier à Lützerath contre la mine de charbon, Greta Thunberg a également pointé du doigt les Grünen au pouvoir. Dès demain, le géant de l'énergie RWE pourra creuser la zone pour exploiter plus de 250 millions de tonnes de lignite du sous-sol : un combustible indispensable pour les cinq centrales électriques réactivées par le gouvernement Scholz. Un projet que même l'Institut économique fédéral a rejeté.
« Dans le village de Lützerath, il y avait cinquante habitants avant la mobilisation. Aujourd'hui, nous sommes plus de 30 000 ». C'est ainsi que la jeune militante de Last Generation déchiffre la “victoire politique” de la manifestation de solidarité avec ceux qui résistent à l'expulsion de la ZAD de Garzweiler.
Pratiquant les démentis en série, les services de renseignement de la police fédérale s'attendaient à “un maximum de 8 000 personnes”, le gouvernement de Rhénanie-du-Nord-Westphalie était prêt à rejeter la manifestation comme celle de “quelques irréductibles” et le vice-chancelier du gouvernement Scholz, Robert Habeck, co-leader des Verts, est convaincu que Lützerath est “un faux symbole de la lutte pour le climat”.
Même si le “debunking” le plus autorisé vient de Greta Thunberg, qui était hier au premier rang pour dénoncer le bradage du territoire aux patrons de la Ruhr avec la complicité des Grünen, qui gouvernent à la fois l'État charbonnier et la République fédérale. « Les accords avec le géant de l'énergie RWE - propriétaire de la mine - montrent quelles sont vraiment leurs priorités. Vous êtes la preuve que le changement ne viendra pas de ceux qui sont au pouvoir, des gouvernements ou des entreprises, des soi-disant leaders. Non, les dirigeants sont ici, ce sont les personnes qui défendent Lützerath depuis des années. Les vrais leaders, c'est vous », répète la lideure mondiael de l'association Fridays For Future sous les applaudissements de milliers de militants, tandis que Greenpeace met en garde contre le risque de ne pas atteindre les objectifs de la COP-21 de Paris.
GRETA CONTRE LES GRÜNEN : il ne s'agit pas seulement d'un gigantesque problème d'image pour le ministre de l'économie Habeck et la ministre des affaires étrangères Annalena Baerbock, mais d'un véritable casse-tête politique pour l'ensemble du parti : le camp de Thunberg est officiellement soutenu par les Jeunes Verts et les trois quarts de l'électorat des moins de 30 ans. Tandis qu'à Lützerath, les médias n'ont pratiquement retenu que l'histoire de l' « affrontement violent entre les antagonistes » au centre des communiqués de la police et l'inévitable « infiltration des black blocs » imaginée par une partie des médias grand public.
LA RÉSISTANCE des milliers de militants à Lützerath était en fait pacifique hier ; elle ne peut être qualifiée de passive que parce que la police a eu du mal à poursuivre dans la boue les manifestants éparpillés sur la moitié de la mine, et parce que quelques cordons de police ont été franchis par des militants pressés par le gaz au poivre et les canons à eau. Mais les équipes de télévision se sont également heurtées au filet de la police hier. Au sujet des affrontements violents, les matraquages reçus par les manifestants, certifiés par de nombreux témoignages directs, ont été rapportée.
Hier, à 17 h 30, la nouvelle s'est répandue qu'un militant avait été transporté à l'hôpital par l'hélicoptère de secours appelé en raison de la gravité des blessures subies lors de l'expulsion, tandis que le tam-tam des militants sur les médias sociaux diffusait les dernières nouvelles en provenance de Berlin : une lettre du sigle “NRW” (l'abréviation du Land) devant le bâtiment de la représentation diplomatique de Rhénanie-du-Nord-Westphalie a été enlevée en signe de protestation. La police de la capitale a arrêté deux suspects. C'est un autre signe que le jeu du charbon ne se joue pas seulement dans la mine de la Ruhr, où, cependant, la lutte ne se termine pas avec l'expulsion de la ZAD.
« LE CHARBON EST TOUJOURS dans le sous-sol de Lützerath. Nous devons continuer à nous battre, il est encore temps. Son extraction ne contribuera certainement pas à réduire la facture énergétique des Allemands », a rappelé Greta Thunberg, marchant aux côtés de Luisa Neubauer, lideure allemande de l'association Fridays For Future. De quoi tranquilliser les partisans du retrait des deux jeunes femmes de la scène politico-médiatique.
À Lützerath, lorsque le soleil se couche, seules les lumières des projecteurs installés par la police à la mine restent allumées. La plupart des manifestants se dirigent à la queue-leu-leu vers la gare. La Demo est terminée, l'analyse du résultat commence. « Aujourd'hui, nous avons obtenu plus que ce que nous pensions », dit Charly Dietz, porte-parole d'Ende-Gelände, l'une des dizaines d'ONG du cartel de l'environnement qui sont descendues sur le terrain pour défendre le village de Lützerath, le dernier des vingt hameaux de la région que la mine de RWE a englobés ces dernières années.
C'est grâce au feu vert du tribunal régional rhénan, qui a rejeté tous les recours des écologistes et donné le feu vert aux bulldozers de RWE, que le dernier habitant de Lützerath a vendu en octobre dernier son bout de terrain, qui bloquait la démolition du hameau. Dès demain, la compagnie charbonnière pourra creuser la zone afin d'exploiter plus de 250 millions de tonnes de lignite du sous-sol : un combustible indispensable pour les cinq centrales électriques réactivées par le gouvernement Scholz après la coupure de l'approvisionnement russe. Mais seulement sur le papier de propagande ; selon les experts de l'Institut fédéral de l'économie, la destruction de Lützerath est insensée même d'un point de vue strictement comptable. Le charbon de la mine actuelle, données à l'appui, est déjà suffisant pour couvrir les besoins énergétiques de l'Allemagne.