Ricardo
Romero Romero, teleSur,
11/8/2024
Traduit par Fausto
Giudice, Tlaxcala
Ricardo
Romero Romero (Venezuela, 1968) s’assume comme lecteur, avec la présomption d’être
poète. Éditeur, promoteur de la lecture et journaliste de fait, il a publié
plusieurs livres et écrit des scénarios pour l’audiovisuel. Cinéphile et passionné
de théâtre, il se promène les jours de congé dans le parc national Waraira
Repano. Il est actuellement directeur de rédaction à teleSUR.
« Je
rêve de donner naissance
à
un enfant qui demandera :
“Maman,
c’était quoi la guerre ?” »
Eve
Merriam
Les
réseaux sociaux et les médias à but lucratif ont tenté de faire croire qu’il
existe une dictature au Venezuela et que l’élection présidentielle du 28
juillet a été entachée de fraude. Washington désavoue le président réélu
Nicolás Maduro et plusieurs pays alliés aux intérêts usaméricains ont suivi le
scénario, qui se répète, mais cette fois-ci renforcé dans le domaine virtuel
(internet).
En ce
sens, les spécialistes et les universitaires du domaine de la communication ont
qualifié ce phénomène de guerre cognitive+. L’Université internationale des
communications (Lauicom) définit le concept comme suit : « Il s’agit d’un
processus complexe et progressif de démolition programmée et systématique des
capacités cérébrales normales, individuelles et collectives ».
À cet
égard, des universitaires et des chercheurs qui suivent ce qui se passe dans la
patrie bolivarienne ont fait part de leurs impressions et de leur analyse de la
situation. L’écrivain et documentariste Eduardo Viloria Daboín, lauréat
du prix Casa de las Américas 2023 pour son livre de non-fiction Después del
Incendio (Papeles de Guerra : Venezuela 2017-2021), qui traite d’une partie
de ce problème, a expliqué que cette confrontation dure depuis un certain temps
:
« Depuis
plus de 20 ans, le Venezuela a été transformé en un gigantesque laboratoire où
les techniques et les méthodes les plus novatrices, agressives et violentes de
manipulation psychologique et de travail contre l’esprit humain ont été
testées, expérimentées et pratiquées de manière incessante, soutenue, continue,
profonde, voire cruelle. Pourquoi ? Pour façonner, réinitialiser
et redessiner toute la subjectivité d’un peuple entier. Il est difficile
d’imaginer une forme de violence plus agressive que celle-là, car les dommages
et les conséquences, qui sont certainement d’une profondeur énorme, sont
extrêmement difficiles à estimer, à retracer, voire à vérifier ».
Prions tous avec notre lideure Maria Corina Machado pour la liberté du Venezuela.
Une
bataille historique qui se répète
De même,
le mathématicien, historien et écrivain José Sant Roz soutient qu’il y a
des éléments de spiritualité présents dans cette réalité désormais quotidienne
pour les citoyens vénézuéliens, quelque chose qui traîne depuis l’époque
coloniale et dans la lutte pour l’indépendance, quelque chose pour lequel le
libérateur Simón Bolívar a dû se battre à l’époque, et qui se répète aujourd’hui
:
« Il
s’agit en quelque sorte de construire un fantasme, un sentiment. Aujourd’hui,
avec María Corina Machado, il s’agit de fonder quelque chose plutôt sur des
éléments religieux. La plupart des gens qui la soutiennent sont, par
essence, des catholiques qui recherchent l’idée d’une sainte, d’une héroïne,
mais d’une héroïne divine, sacrée, et ils la construisent par leurs propres
moyens …
Cette
folie est très profonde, elle dure depuis de très nombreuses années, elle est
inoculée aux personnes âgées, aux personnes pieuses et impies, mais elle est
transmise par les valeurs catholiques, et c’est là qu’elle trouve son soutien
le plus important. C’est quelque chose qui a été prouvé...
partout où elle est allée, là où elle est allée en premier, c’étaient des
temples, les prêtres la bénissaient, lui donnaient des rosaire et appelaient
les gens à se rassembler autour d’elle et à l’élever au ciel comme une
véritable sainte. Je l’ai vue dans des images, dans de très nombreuses
images qui me sont parvenues, au-dessus de la Vierge Marie ».
Sant Roz
ajoute que les représentations symboliques qui relient la religiosité à la
figure de María Corina Machado, font partie de l’héritage mantuano++ auquel elle appartient et qu’elle a assumé comme un mandat divin, puisqu’elle
est convaincue qu’il s’agit de sa sainte croisade.
Anonymous et Elon Musk, instigateurs du crime
D’autre part, le sociologue et podcasteur Robert Galbán met en garde
contre le fait que l’ultra-droite du pays profite d’intérêts transnationaux
(dont elle fait partie) et s’allie au terrorisme informatique. Galbán mentionne
précisément ceux qui jouent un rôle de premier plan dans les coulisses de ce
scénario non conventionnel et d’influence sociale :
« María
Corina continue de jouer avec les fake news et la presse
internationale continue d’être la grande chambre d’écho de ces mensonges...
Donc, quand nous disons qu’Elon Musk et les hackers d’Anonymous - certaines
cellules d’Anonymous, plutôt, parce que nous savons qu’Anonymous n’est pas une
structure -, opèrent contre le Venezuela, c’est parce qu’ils cherchent, entre autres...
des stratégies pour imposer ce récit, l’isolement de leur peuple, c’est-à-dire
qu’ils leur ont fait bloquer tous les médias et tous les chavistes qui sont sur
leurs réseaux sociaux.
Ce n’est
pas seulement pour les garder sous contrôle, au niveau discursif, mais aussi
pour éviter que dans ce mur d’“infophrénie” dans lequel ils vivent, des
discours autres que ceux qu’ils imposent puissent filtrer. En d’autres
termes, vous ne verrez pas l’opinion d’un chaviste, vous l’enfermerez, vous le
réduirez au silence, et c’est important parce qu’il s’agit d’une sorte de
thérapie de choc. Selon la sociologue Susan Sontag, dans une thérapie de
choc, le sujet doit être isolé sensoriellement, c’est-à-dire qu’il ne doit pas
percevoir la lumière ou le son, de sorte que votre discours entre directement
et inconsciemment, et c’est ce qui se passe ici ».
Sur cette
analyse, Galbán complète sa réflexion sur la sensation artificielle qui se
reflète dans les médias hégémoniques et les opérateurs locaux qui ont participé
avec des discours de haine sur les réseaux électroniques, ainsi que dans les
actes de vandalisme et les attaques contre les personnes qui soutiennent le
gouvernement de Nicolás Maduro :
« Il
y a beaucoup de gens qui croient qu’en ce moment, dans les rues de Caracas, il
y a des guarimbas, il y a des meurtres, il y a des persécutions, bref, alors
que les rues sont plus calmes que la pluie. L’autre sujet qu’il
est important de garder à l’esprit dans cette guerre gnoséologique est le rôle
de la pègre dans tout cela. En effet, il y a environ deux ans, ils ont
positionné le Tren de Aragua, une organisation qui n’existe pas en dehors des
médias.
Ils l’ont
présenté comme une force criminelle qui contrôle la pègre sur tout le continent
et jusqu’en Espagne. Aujourd’hui, ils sont les alliés fondamentaux
et les libérateurs qui sont mis en avant dans les réseaux sociaux pour libérer
le Venezuela. Il y a là une inversion de sens. Ainsi, ce qu’ils
appelaient la pègre et qu’il fallait répudier parce qu’ils étaient des délinquants
et qu’ils venaient de Petare+++, Petare est un quartier qu’ils
ont tous voulu bombarder toute leur vie ».