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18/01/2025

FRANCISCO CARRIÓN
“Le régime marocain n’est pas viable. Un soulèvement populaire est inévitable”
Entretien avec le journaliste marocain Aboubakr Jamaï


Francisco Carrión, El Independiente, 7 / 01 / 25
Traduit par Tafsut Aït Baâmrane, Tlaxcala
                  
Il dit être « radioactif » dans les milieux du pouvoir espagnol et français, mais son analyse et sa connaissance des tenants et aboutissants du Maroc sont des trésors. Aboubakr Jamaï, journaliste et homme d’affaires marocain en exil, connaît bien le passé du régime alaouite, ses projets d’ouverture aujourd’hui enterrés et son engagement renouvelé en faveur de la répression et des privilèges d’une élite qui partage un avenir sur lequel planent de sombres nuages.

« Je n’ai rien à cacher. Je dis la même chose à la presse et derrière des portes closes », déclare-t-il au pied levé dans un long entretien accordé à El Independiente. En 1997, Aboubakr Jamaï (Rabat, 1968) fonde à 29 ans Le Journal Hebdomadaire et, un an plus tard, son pendant arabophone, Assahifa al-Ousbouiya. Son journalisme inconfortable, compris comme un appel à la démocratisation du royaume, est devenu la cible de la colère du gouvernement, en particulier après l’accession au trône de Mohammed VI en 1999. Il a résisté à la diffamation, à l’interdiction, à la censure et à l’asphyxie économique pendant plus d’une décennie. En février 2010, Jamaï a annoncé sa fin. « Le journalisme sérieux est devenu impossible au Maroc aujourd’hui », plaide-t-il devant la foule.

Lauréat du prix international de la liberté de la presse décerné par le Comité pour la protection des journalistes,  Jamaï réside aujourd’hui à Madrid, où il est doyen de la Donna Dillon Manning School of Global Affairs de l’American College of the Mediterranean.

Question : Comment le Maroc est-il perçu de l’étranger ?
Réponse : L’État et le régime marocains nous disent que tout va bien, mais apparemment tout ne va pas bien. La raison pour laquelle je commence à m’inquiéter de la santé du monarque est qu’elle a des implications en termes de gouvernance du pays, parce que le roi est si important d’un point de vue constitutionnel que son bien-être est essentiel pour comprendre ce qui se passe dans le pays. S’il ne fonctionne pas pleinement, qui est responsable, qui prend les décisions ? Je pense que le roi a toujours été en charge. Il n’a peut-être pas prêté attention à certaines questions, mais c’est lui qui prend les décisions en dernier ressort. Je n’ai jamais cru que certaines décisions importantes avaient été prises sans son approbation, même lorsqu’il était à l’étranger. Je ne pense pas que de grandes décisions aient été prises sans qu’il en soit informé. La grande question est de savoir s’il est vraiment bien informé de ces décisions. Nous savons qu’il y a une sorte de division du travail autour de lui ; que le volet politique de sécurité, par exemple, était entre les mains d’Ali El Himma.
Q.- Où se place le chef de l’appareil policier, Abdellatif Hammouchi, dans cette division du travail ?
R.- C’est un des débats au Maroc, mais il est très peu probable qu’il ait pris la place d’El Himma. Il y a une constante dans le gouvernement du roi : les gens qui sont proches de lui sont des gens qui ont littéralement étudié avec lui à l’université. Ceux qui occupent encore les postes les plus importants sont des gens qui étaient avec lui dans ce que j’appelle sa zone de confort psychologique. Il est intéressant de les comparer à ceux qui entouraient Hassan II. La principale différence est que la plupart de ceux qui étaient avec Hassan II avaient une réputation bien établie en dehors du palais et avaient leur propre itinéraire politique. Ils étaient des personnalités à part entière. Aujourd’hui, ce sont ses amis. Au-delà du fait qu’ils sont autour de lui, ils sont inconnus. Je veux dire que si l’on retire de leur CV le fait qu’ils fréquentent le palais, qui sont-ils ? Ils n’ont aucune expérience professionnelle ou autre en dehors du palais.
Q.- Quel est le résultat de son gouvernement ?
R.- Je mentionne toujours les indicateurs de gouvernance de la Banque mondiale et c’est l’un des rares qui commence avant Mohamed VI. Vous pouvez voir l’évolution au cours des dernières années de Hassan II et immédiatement après en termes de corruption ou de libertés politiques. On peut voir qu’elle progresse positivement jusqu’en 2000 et qu’elle se dégrade depuis. Depuis le début de la monarchie de Mohammed VI, les droits humains et la liberté d’expression se sont dégradés par rapport aux dernières années de Hassan II.
Q.- Mais dans les premières années du règne de Mohammed VI, on projetait l’image d’un monarque compréhensif. On le surnommait « le roi des pauvres »...
R.- C’est une des raisons pour lesquelles, en tant que journaliste, j’ai eu des problèmes parce que dès le début nous avons commencé à tirer la sonnette d’alarme, parce que pour nous les signes avant-coureurs étaient déjà là. L’attitude de la monarchie à l’égard des entreprises est un indicateur important, car Hassan II, au cours de ses dernières années, a désengagé la monarchie du secteur privé. Un tournant important dans l’histoire politique récente du Maroc est ce qui s’est passé entre 2001 et 2003. Si l’on compare ce qui s’est passé dans la région dans les années 1990, on constate une régression en termes de droits humains et de démocratie. Il y a eu un proto-Printemps arabe. Les premières élections démocratiques dans le monde arabe ont eu lieu en Algérie en 1999. Elles ont débouché sur une guerre civile, mais il s’agissait d’élections démocratiques. Les élections les plus libérales de l’histoire de la Jordanie ont eu lieu en 1989, par exemple, et le Maroc a également rejoint la vague. La différence entre le Maroc et les autres pays est que le Maroc n’a pas reculé dans les années 1990. Hassan II a continué sur sa lancée. Je ne pense pas qu’il y ait eu un autre pays qui ait maintenu l’élan d’ouverture aussi dynamique que le Maroc, et le Maroc a été une bonne exception dans les années 1990. Il n’a jamais été une démocratie. Et cela a duré jusqu’au début des années 2020. Mon journal a été interdit à deux reprises en 2000. Hassan II ne l’a jamais interdit et j’ai été rédacteur en chef de novembre 1997 jusqu’à sa mort en juillet 1999 et nous n’avons jamais été interdits.
Q.- J’ai cru comprendre que pour vous, ce qui se passe au Maroc était prévisible ?
R.- Oui, bien sûr. Pour moi, les choses ont commencé à mal tourner très tôt. Tout d’abord, l’interdiction des journaux. Si vous regardez en arrière, vous vous rendez compte que les premières personnes qui ont été arrêtées sur la base des nouvelles lois antiterroristes étaient des journalistes, vous savez, après 2008. L’une des principales raisons pour lesquelles ce faux récit d’ouverture a persisté est liée au parti socialiste en France. Hassan II a nommé Abderrahmane Youssoufi premier ministre parce qu’il avait besoin du soutien des socialistes à l’étranger sur la question du Sahara. Cette nomination l’a aidé à s’entendre avec le Parti socialiste français.
Q.- Quel est l’héritage de Mohamed VI ?
R.- C’est une occasion manquée.
Q.- Je ressens une certaine méfiance à l’égard de l’Europe et de ses relations avec le Maroc...
R.- Lorsque nous avons été interdits de travailler en tant que journalistes et de publier, le seul pays où nous avons trouvé une société civile qui nous a soutenus ont été les USA. Je n’ai pas beaucoup d’espoir du côté de l’Europe en ce qui concerne les droits humains au Maroc. Leurs propos ne résonnent plus en moi. D’abord, la proximité entre les socialistes français et marocains a sacrifié les militants des droits humains et les démocrates. Ils ont acheté le discours des socialistes marocains. La deuxième raison est ce que j’appellerais la maladie française : le problème de l’islamisme. Il s’agit de la notion selon laquelle l’alternative aux socialistes et même au régime marocain est l’islamisme, ce qui, soit dit en passant, est conceptuellement stupide parce que la nature du régime actuel est islamiste. La raison pour laquelle le roi est roi est qu’il dit être un descendant du prophète et qu’il gouverne selon la loi de Dieu.
Lorsque vous parlez en ces termes, ceux d’entre nous qui, au Maroc, croient en la démocratie et aux libertés, s’entendent dire que nous sommes les idiots utiles de l’islamisme, que nous préparons le terrain pour l’islamisme. Et ceci est basé sur une vision très orientaliste selon laquelle nos sociétés sont des sociétés islamiques, ce qui n’est pas vrai. Nos sociétés sont très complexes. La preuve en est que les quelques ouvertures que nous avons eues dans la région en termes d’élections n’ont pas été balayées par les islamistes. Pas même en Tunisie. Et même si l’opposition était fracturée et brisée, elle n’a pas été en mesure d’obtenir de fortes majorités où que ce soit. La troisième raison concerne l’Espagne. Si vous me demandez pourquoi Pedro Sánchez fait ce qu’il fait vis-à-vis du Maroc, c’est parce que le Maroc est devenu beaucoup plus offensif dans sa diplomatie et utilise des arguments qu’il n’utilisait pas officiellement auparavant : « si vous ne jouez pas le jeu avec nous, nous vous ouvrons les portes de l’immigration ». C’est en mai 2022 que les Marocains ont envoyé des milliers de personnes à Ceuta, ce qui n’était pas arrivé auparavant.
Il y a aussi une nouvelle stratégie de diplomatie et de sécurité. Hammouchi est décoré en Espagne et en France. Il voyage aux USA et est proche du FBI et de la CIA. Il ne donne pas d’interviews, mais il publie des photos. Des gens écrivent des articles publicitaires sur eux. Ce n’était pas le cas auparavant.
Q.- Il semble que la diplomatie et l’appareil sécuritaire du Maroc gagnent la partie...
R.- Je ne sais pas, qu’avons-nous gagné exactement ? Si vous me demandez en termes d’efficacité, le jury n’a pas encore tranché. Le Roi a fait un discours et a dit que la lentille à travers laquelle nous allons juger nos partenaires dans le monde est leur attitude envers le Sahara Occidental. Quelle est votre mesure ? Quand on me dit que j’ai réussi, qu’avez-vous réussi à faire exactement ? Ce que le Maroc cherche, c’est la reconnaissance par l’ONU du fait que le Sahara occidental est marocain, donc pour moi c’est la mesure. Ce n’est pas le cas si Sanchez envoie une lettre et se contredit ensuite lorsqu’il s’exprime à l’ONU. Il en va de même pour les USA et la France, qui sont de plus gros poissons, car ils disposent d’un droit de veto au Conseil de sécurité de l’ONU.
Q.- Le plan marocain d’autonomie pour le Sahara a été présenté en 2007 et n’a pas été développé depuis.
R.- A l’époque, j’ai interviewé Mohamed Abdelaziz [le défunt leader du Polisario] pour lui demander ce qu’il pensait du plan d’autonomie et il n’a pas dit non. Il a dit que pour le moment, nous avions le processus de l’ONU : « voyons ce qui se passe et ensuite parlons ». Je l’ai interviewé à l’hôtel Mayflower à Washington. À la fin de l’entretien, l’un de ses conseillers est venu me voir et m’a dit : « Si le plan d’autonomie nous aide à sauver la face, pourquoi pas ? » Je l’ai écrit et personne n’a dit que c’était faux. Pour moi, le problème du plan d’autonomie n’est pas que le Sahara le rejette, c’est la hiérarchie des choses à faire pour avoir un plan d’autonomie acceptable. Le plan d’autonomie du Maroc n’est pas assez bon parce que nous n’avons pas les institutions pour le mettre en œuvre. Dans les déclarations de l’ambassadeur allemand à Rabat qui ont provoqué la crise avec l’Allemagne, il a dit quelque chose d’essentiel : si les Marocains pensent que les réformes de régionalisation qu’ils sont en train de faire sont suffisantes, ils se trompent. C’est mon attitude depuis le début.
Q.- Et que pensez-vous actuellement du plan d’autonomie pour le Sahara ?
R.- Le Maroc n’est pas capable. Nous n’avons pas les institutions pour mettre en œuvre un plan d’autonomie. Nous n’avons pas de système judiciaire indépendant. Nous ne sommes pas constitutionnellement développés pour avoir un plan d’autonomie internationalement acceptable. C’est notre problème et j’ai souvent dit en plaisantant que si le Polisario voulait ennuyer les Marocains, il devrait dire : « Oui, discutons de votre plan d’autonomie de trois pages ». Le Maroc n’a pas de plan sérieux parce que nous n’avons pas les bonnes institutions. Nous sommes institutionnellement sous-développés pour ce genre de choses parce que nous ne sommes pas une démocratie et nous demandons au monde de reconnaître que ces gens sont des Marocains. Donnez-nous ces gens qui sont les nôtres. Hassan II a utilisé une formule intéressante : « Je veux que l’ONU me donne mon titre de propriété ». Si tel est l’objectif, je ne pense pas que nous ayons fait beaucoup de progrès car, en fait, nous sommes toujours dans les résolutions de l’ONU. Il y a un paragraphe sur la solution politique et le respect du droit à l’autodétermination des peuples. Tant que cette phrase existera, nous ne gagnerons pas.
Nous en sommes toujours au même point. L’une de mes questions est de savoir pourquoi le Polisario est aujourd’hui totalement opposé au plan d’autonomie. Il ne parle que du droit à l’autodétermination. Que s’est-il passé en 2000 pour que le Polisario change d’avis ? Le Maroc était perçu comme un pays en voie de démocratisation et le Polisario a pris peur, car il craignait que son peuple ne l’accepte. La stratégie du Maroc devrait être telle que le peuple du Sahara pèse essentiellement deux choses : la démocratie et la liberté ou l’indépendance. Parce que si vous avez l’indépendance, il n’est pas sûr que vous soyez une démocratie... mais si vous l’avez déjà, si vous êtes sous le gouvernement d’un État qui se démocratise vraiment et que vous pouvez voir que vos ressources sont investies dans votre partie du pays ; si vous voyez que vous êtes traités de manière égale, que vous avez la liberté d’expression, que vous avez toutes ces choses, alors vous pourriez vous demander pourquoi l’indépendance. Parce que l’Algérie n’est pas la plus grande démocratie du monde et je sais que mes dirigeants ont un lien très fort avec les Algériens. Qu’est-ce que cela signifierait pour mon gouvernement ? Je ne soutiens pas l’argument marocain selon lequel il s’agirait d’une dictature. Je n’en sais rien. Je ne préjuge pas.
Q.- Mais cette possible stratégie de séduction est complètement enterrée aujourd’hui ?
R.- Aujourd’hui, il ne semble pas y avoir d’autre voie que le système prédateur du business royal, la collaboration avec les puissances du monde en torturant les gens qu’ils pensent être des terroristes ; l’arrêt de l’immigration s’ils le veulent en échange de la propriété marocaine du Sahara. Les droits humains ne nous intéressent plus. Nous avons maintenant une diplomatie de la sécurité.
Q.- Y a-t-il encore de la place pour une démocratisation au Maroc ?
R.- Oui, bien sûr. Je n’ai pas de réponse à cette question, mais je vais vous dire ce que je ne sais pas avec certitude. Ce que je sais avec certitude, c’est que ce régime n’est pas disposé à se démocratiser et qu’à un moment donné, il y a eu un espoir que ce régime soit disposé à s’ouvrir. L’indice de Freedom House est très utile. Hassan II a laissé un régime sans journalistes en prison, à quelques exceptions près, mais sans prisonniers politiques majeurs. Aujourd’hui, nous avons des prisonniers politiques et la torture au Maroc.
Q.- Le Maroc actuel est-il viable à long terme ?
R.- Je ne pense pas que ce type de gouvernement soit viable, mais il y a une bonne nouvelle dans l’histoire récente du Maroc, qui pour moi est formidable : lorsque nous avons eu le printemps populaire et le soulèvement du Rif, cela a montré que nous avons un peuple pacifique. Nous avons des gens organisés et articulés qui ne travaillent pas dans le cadre de syndicats, qui ne travaillent pas dans le cadre de partis politiques. Il existe donc une société en dehors de la société politique publique officielle qui est en fait beaucoup plus mûre que je ne le pensais moi-même. Je n’ai pas grandi à Casablanca, mais je la connais très bien. Il y avait des dizaines de milliers de personnes qui manifestaient dans un quartier très populaire. Pas une seule vitre n’a été brisée. Et je connais ces quartiers, il n’y a pas un jour sans qu’il y ait des pleurs, sans qu’il y ait des bagarres. Dans le Rif, c’était exactement la même chose. La violence est toujours venue de l’État.
Q.- Y aura-t-il un nouveau soulèvement à l’avenir ?
R.- Je pense que c’est inévitable. Lorsque vous analysez ce qui s’est passé dans toute la région et que vous voulez identifier le secteur démographique qui a été le principal moteur du Printemps arabe et du soulèvement du Rif, il s’agit de la jeunesse urbaine qui est au chômage, plus éduquée que le reste de la population et plus active. Par rapport à 2010, la situation est pire au Maroc parce que le régime n’a pas réussi à résoudre le problème principal, qui est de donner des emplois aux jeunes, qui sont ceux qui se rebellent. Nous sommes dans un monde différent avec l’internet. Ils y ont accès. J’emmène des étudiants usaméricains au Maroc et chaque fois que j’y vais, je suis stupéfait par le nombre de jeunes que nous rencontrons et qui ont appris l’anglais en regardant YouTube. Les gens ont donc d’autres moyens d’augmenter leur QI et pour moi, le QI de la société a augmenté non pas à cause du système éducatif, mais parce qu’ils sont exposés au reste du monde. La contestation va continuer à se développer. Nous ne prêtons pas trop attention à ce qui se passe démographiquement au Maroc. Aujourd’hui, la pyramide des âges marocaine commence à ressembler à une femme enceinte. La majorité de sa population est la partie productive entre 20 et 40 ans. La croissance moyenne pendant les 25 ans de Mohammed VI est de 3,6%. Le taux de croissance dont le Maroc a besoin, selon les économistes, pour absorber les nouveaux entrants sur le marché du travail se situe entre 6 et 7 %.
Je ne vois pas comment, s’il n’y a pas de relations appropriées, notamment avec l’Europe, organiser l’immigration de la manière la plus civilisée possible avec les pays qui ont besoin de l’immigration. L’Espagne a besoin de l’immigration. C’est un problème pour l’Espagne, mais surtout pour le Maroc. Le régime devrait avoir peur. Dans le Rif, ils ont réussi à mettre fin au soulèvement par la répression - ils ont rassemblé les leaders du mouvement et les ont condamnés à des peines de prison insensées et ils sont toujours en prison - et par l’ouverture du couloir de migration. Ils ont ouvert la porte : ils ont dit aux gens d’aller en Espagne. [Feront-ils avorter la prochaine révolte avec la même recette ?] Je ne sais pas, parce qu’ils sont entre le marteau et l’enclume.
Q.- Avec tous ces éléments, comprenez-vous la position de Sánchez au Maroc ?
R.- C’est très malheureux la façon dont cela s’est passé parce que je ne pense pas que ce soit un bon reflet des institutions espagnoles. Ce n’est pas non plus une bonne chose pour le Maroc. Je comprends la difficulté d’un chef de gouvernement espagnol et sa mission de stopper l’immigration illégale et de lutter contre le terrorisme en connaissant l’origine de ceux qui ont commis des attentats dans le passé. Et si les Marocains sont vraiment attachés au fait que le Sahara occidental devrait être marocain et qu’ils vont essentiellement évaluer toutes les autres politiques à mon égard à travers la lentille de cette question, qui est le Sahara occidental, alors j’aimerais les contenter. C’est logique. Mais la question est de savoir comment vous le faites, si c’est la bonne façon, s’il n’y a pas d’autre façon de le faire ? L’Espagne devrait prendre le Sahara occidental au sérieux et c’est difficile parce que le régime marocain est sourd et muet en ce moment. Nous sommes confrontés à une situation de fierté mal placée. Je n’aime pas ce chauvinisme venant du Maroc. Si je suis un partenaire du Maroc, je trouve qu’il est très difficile de parler au Maroc. Même à huis clos, je pense que les seules personnes que les Marocains écoutent sont les USAméricains. Les Marocains se moquent des Espagnols et des Français. Soyons clairs. Ils sont très arrogants en ce moment.
Il est très important de défendre les intérêts marocains, mais pas de cette manière. Ce n’est pas la bonne façon de le faire. Il y a d’autres façons d’être ferme, même sur la marocanité du Sahara, mais pas en menaçant d’être négligent dans la lutte contre le terrorisme et quand je dis lutte contre le terrorisme, je veux être clair ici. Je suis quelqu’un qui pense que la menace terroriste a été exagérée. Notre gouvernement ne doit pas être le gendarme des sociétés européennes. Il y a une très mauvaise perception de l’Islam, à la limite du racisme, dans ces sociétés. Par conséquent, lorsque je parle de terrorisme, je parle en fait de criminalité. Je ne parle pas d’arrêter quelqu’un qui porte une barbe. Mais pour moi, il est important que mon pays soit réellement impliqué dans la lutte contre cette criminalité. Il s’agit de ne pas laisser mes enfants risquer leur vie en essayant d’aller à Ceuta. J’ai mauvaise réputation lorsque j’utilise cela contre vous. Je sais que je vous contrarie. Je sais que c’est un outil contre vous, mais ce n’est pas bon. Ce n’est pas le pays dont je serais fier. Je me mets à la place de Pedro Sánchez. Si les Espagnols, les Français et les USAméricains sont vraiment sérieux sur la question du Sahara, ils devraient s’asseoir et dire que le plan d’autonomie a des conditions.

Q.- La perception interne qui est restée est que l’Espagne a été humiliée par le Maroc ?
R.- Oui, le paradoxe est que je pense que l’Espagne devrait soutenir l’autonomie, mais le Maroc a besoin de vrais partenaires. Le Maroc n’a pas besoin de partenaires faibles qui montrent la faiblesse dont Pedro Sánchez a fait preuve. Nous avons besoin de partenaires forts. Nous avons besoin d’amis forts qui nous soutiennent et qui soutiennent le fait que le Sahara est marocain [sic]. Nous parlions de la durabilité du Maroc. Quelle est la durabilité de ce type de relations diplomatiques lorsqu’il n’y a pas de gagnant-gagnant ? Les Marocains pensent avoir dompté la diplomatie espagnole et la diplomatie française, ce qui n’est pas le cas. Car Sánchez a envoyé la lettre et est ensuite allé à l’ONU pour dire autre chose. J’attends toujours que la France présente une résolution au Conseil de sécurité de l’ONU. Elle a le droit de veto, alors j’attends qu’elle dise : « Vous devez agir parce que ce n’est qu’une étape vers la solution finale ». Et la seule façon de résoudre ce problème est de reconnaître la souveraineté du Maroc sur ce territoire. Dans le cas de l’Espagne, le Maroc veut que l’Espagne reconnaisse le Sahara marocain et je ne pense pas que l’Espagne le fera pour une raison très simple. Il y a un élément dans l’analyse que je ne pense pas que les diplomates marocains comprennent vraiment concernant le comportement de leurs alliés. Les plus grands bénéficiaires de l’ordre mondial sont les pays occidentaux. Il n’est pas dans leur intérêt de déstabiliser complètement le système. Mais la plupart du reste du monde occidental est complètement hypocrite quand il s’agit de la question palestinienne, mais cela ne signifie pas qu’ils n’ont aucun intérêt à faire fonctionner le système des Nations Unies et l’ordre international, parce qu’il fonctionne pour eux, ce qui signifie qu’ils ne peuvent pas trop l’affaiblir et la question du Sahara fait partie de cette histoire. Ils ne vont pas faire n’importe quoi.
Q.- Depuis plus d’un an, le Maroc défend ses relations avec Israël...
R.- Il y a des débats dans les milieux d’affaires marocains pour savoir qui bénéficie de la connexion israélienne et je sais qu’il y a du mécontentement parce que ce sont des gens proches du régime qui en profitent. Tout le monde n’en profite pas. Le Maroc et les USA en tirent un grand bénéfice. La société marocaine est très pro-palestinienne. L’un des dangers que je perçois dans la connexion israélienne est l’attitude à l’égard de l’Algérie. Il existe un concept dans les relations internationales appelé le dilemme de sécurité. Et le dilemme de sécurité dit que lorsque vous vous sentez menacé par moi, que faites-vous ? Vous achetez plus d’armes... Si vous achetez plus d’armes, vous le faites de manière défensive parce que vous avez peur. Mais comment vais-je le percevoir ? Je le percevrai comme si vous vouliez m’attaquer. Je suis donc également sur la défensive, je vais construire mon armée. Encore une fois, c’est un cercle vicieux qui pourrait conduire à la guerre. Budgets militaires : les budgets militaires marocains ont doublé il y a quelques années, la même année que le budget militaire algérien, et nous ne sommes pas dans une économie qui dispose de ce type de ressources pour construire une armée forte. Bien sûr, nous devons nous défendre, mais nous devons être dans un environnement où nous n’avons pas à payer des milliards et des milliards de dollars chaque année pour maintenir une armée énorme, car c’est quelque chose qui pèse sur l’économie.
Q.- Le scénario d’une guerre entre le Maroc et l’Algérie est-il probable ?
R.- Nous sommes dans un monde fou. Si vous m’aviez parlé il y a quelques mois, je vous aurais répondu par un non catégorique. Aujourd’hui, franchement, je ne suis sûr de rien. Ni les Européens ni les USAméricains ne veulent d’une guerre dans les pays frontaliers de l’Europe.




24/12/2024

LUCA CELADA
El plan de Silicon Valley para apoderarse del Estado
El irresistible (¿o resistible?) ascenso de los broligarcas

USA: Una plutocracia “armada” y extremista está a punto de apoderarse de la mayor superpotencia mundial

Luca Celada, il manifesto, 17/12/2024

Traducido por María Piedad Ossaba, Tlaxcala 

Luca Celada es corresponsal en Los Ángeles del diario italiano il manifesto

Esta semana, Jeff Bezos, de Amazon, Sam Altman, de Open AI, y Mark Zuckerberg anunciaron donaciones de un millón de dólares cada uno como contribución a la ceremonia de investidura de Donald Trump el 20 de enero. Los magnates digitales han sido atacados a menudo por Trump, quien todavía hace unas semanas afirmó que Zuckerberg, en particular, debería «ir a la cárcel» por censurar opiniones de derechas en sus plataformas. Tras su victoria, hubo prácticamente una procesión desde Silicon Valley para hacer un acto de sumisión. La semana pasada, el jefe de Meta había volado a Mar a Lago para reunirse con Trump, Bezos tiene una cita en los próximos días.

Muchos otros plutócratas son una presencia fija en la corte giratoria que gira en torno al presidente que regresa desde las elecciones de noviembre. Muchos de los numerosos magnates que han contribuido generosamente a su reelección han sido puntualmente recompensados con nombramientos en ministerios. Entre ellos se encuentra su pariente político Charles Kushner, padre de su yerno Jared, que primero fue indultado en 2020 [ había sido condenado por malversaciones fiscales], y luego honrado con el cargo de embajador en Francia.

(Otro nombramiento «dinástico» es el de la (posiblemente ex) prometida del primogénito Donald Jr, Kimberley Guilfoyle, como nueva embajadora en Grecia, mientras que se espera que su nuera, Lara Trump, debería pasar del comité central del Partido Republicano al Senado).

Entre los ministros con carteras opulentas (cada uno con una riqueza estimada en más de 1.000 millones de dólares) están Linda McMahon en Educación Pública, Scott Bessent, en Hacienda, Doug Burgum en Interior, Howard Lutnick en Comercio, Jared Isaacman, director de la NASA, y Steve Witkoff -socio de Trump en una nueva empresa de criptomonedas, World Liberty Financial- como enviado especial a Oriente Medio.

Además de crear otro flagrante conflicto de intereses para el nuevo presidente, la entrada de la familia en la producción de “Trump coin” es el último indicio de una creciente asociación entre Trump y el nuevo capitalismo incubado en Silicon Valley. Los magnates de Silicon son fantásticamente ricos, y para Trump la riqueza siempre ha sido un ostentoso símbolo de éxito. Según un reciente artículo del New York Times, le gusta exhibir a sus nuevos socios políticos como trofeos en su palacio kitsch. «He traído a dos de los hombres más ricos del mundo», habría dicho recientemente, según el Times, presentándose en una reunión de periodistas en compañía de Elon Musk y el consejero delegado de Oracle, Larry Ellison. «¿A quién habéis traído?».

Encarna la influencia de los aceleracionistas de Silicon Valley en la restauración de Trump el propio Musk, a quien, como es bien sabido, se le ha otorgado, junto a otro multimillonario, Vivek Ramaswami, un puesto central como administrador del «departamento de efficiencia gubernamental» (DOGE). Musk tendría, sin embargo, mayor libertad de acción, incluso sobre la composición del propio cuadro gubernamental, en el que trabajarían, en Florida, numerosos colaboradores 'prestados' por sus empresas.

Entre las figuras clave estaría Jared Birchall, director de Neuralink, la empresa encargada de los implantes neurológicos, pero también administrador de las finanzas personales del magnate y, en general, su mano derecha, a cargo de las negocios  familiares,  de la fundación, así como de los bienes inmuebles, los viajes y la seguridad de Musk. A estas tareas se han añadido ahora las conversaciones con posibles funcionarios del Departamento de Estado. El hecho de que Birchall no tenga experiencia en negocios internacionales no se considera, evidentemente, un problema en una selección que, al igual que para los demás departamentos, parece centrarse principalmente en las afinidades ideológicas y la lealtad de los candidatos al presidente.

Otro asesor, esta vez para seleccionar al personal de inteligencia, es Shaun Maguire, una figura de Caltech que se hizo multimillonario como socio de Sequoia, uno de los principales fondos de inversión de Silicon Valley y (no hace falta decirlo) amigo de Elon Musk, con quien comparte el culto, tan de moda en el Valley, del genio díscolo e inadaptado, quizá incluso un poco misántropo, pero aun así brillante.

En otras palabras, muchas de las decisiones destinadas a dar forma al gobierno Trump bis están en manos de una facción ideológica de «meritócratas» extremistas, por no decir teóricos «darwinistas» del triunfo de los mejores sobre los mediocres. Otro “asesor” fijo en Palm Beach, por ejemplo, es Marc Andreesen, el multimillonario fundador de Netscape y uno de los principales ideólogos de la oligarquía neorreaccionaria, es un ferviente defensor del liberalismo radical y de la mínima interferencia del Estado en los asuntos empresariales.

Gracias a su alianza estratégica con Trump, una asociación que solo maduró realmente en las fases finales de la campaña electoral, este pequeño grupo de empresarios radicalizados por el éxito de los oligopolios de Silicon Valley, tiene ahora la oportunidad de trasladar las filosofias de la gestión (y la eugenesia) al aparato estatal. Musk, por ejemplo, ha expresado en repetidas ocasiones la idea de que la inmigración debería gestionarse como una campaña de selección de «un club deportivo», obligado a seleccionar a los mejores jugadores y descartar a los perdedores, los «losers» que que él y Trump tanto detestan.

Pero la principal obsesión de Musk es el recorte del gasto público, contra el que despotrica incesantemente en X post como fuente de inflación y de déficits  presupuestarios insostenibles. Estos son los temas clásicos de la filosofia económica conservadora que la derecha del silicio ha imbuido, sin embargo, de un celo casi religioso. Y llama la atención cómo una facción que hasta hace poco habría sido considerada fanáticamente extremista, ha ascendido a una posición de tanto poder casi extemporáneamente. La propia creación del superministerio de Musk se produjo «en directo» durante la retransmisión grabada por los dos hombres de X, tras el fallido intento de asesinato  de Trump en julio.

«Para reducir la inflación, tenemos que reducir el gasto público en todos los ámbitos», señaló en aquella conversación el propietario de Space X (que recauda miles de millones en contratos espaciales públicos). «¿Qué te parece, Donald, una comisión especial sobre efficiencia gubernamental? Yo estaría dispuesto a presidirla». «¡Genial, me vendría muy bien alguien como tú, que no se acobarda, como aquella vez que hicieron huelga en esa empresa tuya y los despediste a todos en el acto!». (Risas).

Musk y Ramaswamy no pierden la oportunidad de señalar que las principales fuentes de gastos superfluos son programas como la asistencia alimentaria a familias necesitadas, las pensiones y la sanidad.  «Al principio, puede causar algunas molestias», admite Musk sobre el temido remedio (el recorte de 2 billones de dólares del gasto público, lo que equivale a más de un tercio del presupuesto del Estado), “pero a la larga, será mejor para todos”.

«Veremos qué pasa», afirmó Trump a este respecto. «Van a ser unos meses interesantes. Pero el país está atascado de reglamentaciones y de personas innecesarias que podrían ser más productivas en el sector privado.» Ahora, con una influencia sin precedentes, los «broligarcas» de Silicon Valley están a punto de meter mano en el aparato de protección social como se haría con una filial recién adquirida, con la intención de aplicar una colosal reforma «empresarial».

Las fortunas acumuladas por la plutocracia actual invitan a comparaciones con la ‘Edad Dorada” de principios del siglo XX, cuando la riqueza estratosférica de los Rockefeller, los Vanderbilt y las grandes familias industriales y bancarias subrayaba la abismal desigualdad con las clases económicas subalternas. Pero la influencia política, por notable que fuera, de aquellos «barones ladrones» palidece ante la situación actual.

Aquella época fue el preludio de una temporada de enorme conflicto social en el país, y de la creación, bajo Franklin Roosevelt, de la red social (sanidad y pensiones) que aún existe actualmente. Hoy, sin embargo, las tensiones producidas por la globalización y la desigualdad social rampante han producido, al parecer, un gobierno controlado directamente por los monopolios más gigantescos generados por el capitalismo neoliberal, que, en alianza con un demagogo populista, y las partes más reaccionarias de la derecha ideológica, se disponen a desmantelar ese pacto social.

Todo ello desafiando un flagrante conflicto de intereses por parte de las corporaciones que, de hecho, se encargan de desmantelar las agencias federales encargadas de regularlas. Las primeras cabezas que la industria tecnológica querría ver rodar son las de Lina Kahn, arquitecta  en la Comisión Federal de Comercio (FTC) de la campaña antimonopolio que recientemente llevó a Google y Amazon a los tribunales, y Elizabeth Warren, la senadora de Massachusetts que como presidenta de la autoridad de protección del consumidor es una de las voces más invariablemente de izquierdas contra las extralimitaciones corporativas (Andreesen ha pedido específicamente que la «supriman»).

Sin embargo, no se trata solo de asegurarse los servicios de una administración amiga (aunque con un negociante como Trump, estos estarán prácticamente asegurados). La diezmación del «Estado profundo» prometida por Trump como dispositivo de agregación populista antisistema es, para la plutocracia militante de Silicon Valley, un objetivo ideológico que Musk persigue con especial fervor.

En su reciente libro, «Character Limit», Kate Conger y Ryan Mac retrasan lo que sucedió en los días posteriores a la compra de Twitter por Musk. Una sucesión de despidos, destituciones comunicadas por correo electrónico, jefes de departamento convocados por sorpresa a los que se les pidió que justificaran la utilidad de su empleo en 60 segundos, indemnizaciones retenidas. Una «reestructuración» económica convertida en un teatro de la crueldad, basado en la humillación ritual y punitiva. Un terreno de fuerte afinidad entre Musk y Trump, dueño ya de un programa de tele-realidad cuyo eslogan era «You're Fired!» (¡Estás despedido!). 

La liquidación del 80% de los empleados “sin consecuencias” para la empresa (a no ser que se quiera contar la destrucción de una plataforma reducida a megáfono de desinformación y propaganda), ha convertido a Musk en una especie de héroe anarcocapitalista para un nutrido grupo de seguidores. Y es esta misma receta la que muchos esperan de él para diezmar de una vez por todas al “Estado profundo”. En las últimas semanas, Musk ha sido visto a menudo en compañía de otro socio, Steve Davis, uno de los directivos de la Boring Company (la empresa de excavaciones del grupo Musk). Según el Times, Davis, especializado en reducción de costes, también ha entablado conversaciones con otros expertos para «optimizar el presupuesto federal». Es probable que él también desempeñe un papel destacado en el nuevo ministerio de DOGE. 

Puede que no sea posible reproducir los recortes del 80% de Twitter, pero incluso la paradójica reducción de casi el 50% del gasto público que está ventilando Musk representaría una apoteosis catastrófica de la guerra de los ricos contra los pobres. Para preparar el terreno, la campaña, amplificada por Musk, para vilipendiar a los «gorrones» de las subvenciones públicas, y por la «liberación» de las empresas de las «burocracias sofocantes» ya ha comenzado en 'X'.

El otro impulso es la privatización, con otro responsable del Team Musk: Shervin Pishevar, director y cofundador de Hyperloop (la empresa de cápsulas supersónicas con varios proyectos en fase experimental). Pishevar escribió sobre la «oportunidad de reimaginar las funciones gubernamentales a la luz de una evolución económica y tecnológica sin precedentes». Una frase que resume los intereses económicos y el mesianismo tecnológico imperantes en Silicon Valley. Según Pishevar, servicios como Correos, la NASA o el sistema penitenciario «se beneficiarán enormemente del ingenio del sector privado». Todo en aras de crear un «futuro alineado con la propiedad y la prosperidad». Una característica de los ultra capitalistas es cómo hacen alarde público despreocupadamente de lo que hasta hace poco, y todavía durante el primer mandato de Trump, los partidos propietarios habrían callado y negado públicamente.

Captain X, por Vasco Gargalo

La privatización gradual de los servicios es parte integrante de los programas de muchos gobiernos liberalistas occidentales. Pero los giga-capitalistas ven ahora la oportunidad de completar el trabajo muy rápidamente, adoptando el lema «muévete rápido y rompe cosas». El lema de Mark Zuckerberg, favorecido por los taumaturgos de la tecnología, se aplicaría así al aparato del Estado que hay que «reinventar». Después de todo, incluso el infame Proyecto 2025 se basa en una «guerra relámpago» diseñada para aplastar la resistencia de las instituciones (o terraplenes constitucionales) y blindar el aparato sin dejar tiempo a que la resistencia se organice.

El proyecto de “blitzkrieg” promete invertir en todos los campos, empezando por la investigación, la salud y la educación pública, y en algunos casos ya está muy avanzado. La red de centros de internamiento para inmigrantes en vías de deportación, por ejemplo (más de 200 en el país, y que las deportaciones masivas prometen aumentar considerablemente), ya está subcontratada por el gobierno a empresas del “complejo industrial penitenciario”, empresas como Corrections Corporation of America y Geo Group, pagadas por el preso, y cuya cotización en bolsa se disparó el día de la elección de Trump.

Pero la venerada “disruption” [perturbación] debe, en el proyecto de los “broligarcas”, extenderse a toda la sociedad. Lo que Pishevar define eufemísticamente como la «reestructuración revolucionaria de las instituciones públicas», seguirá el guión familiar de su sabotaje y desfinanciamiento con vistas a su sustitución por empresas de «gestión» y, por tanto, una gigantesca transferencia masiva de fondos públicos a las arcas privadas. Gran parte se aplicará probablemente por decreto, pero en esta ocasión Trump y sus patrocinadores cuentan con las dos cámaras del Parlamento y una supermayoría reaccionaria en el Tribunal Supremo: una convergencia sin precedentes de propósitos y poder.

También en el contexto de la «innovación», una nominación significativa ha pasado en parte desapercibida, la de David Sachs para el puesto inventado de “zar de la criptodivisa y la inteligencia artificial”. Sachs, inversor de capital riesgo y viejo conocido de Musk desde sus tiempos de PayPal, es uno de los sudafricanos que desempeñan un papel más destacado en el ala reaccionaria de Silicon Valley. Roelof Botha (nieto del último ministro de Asuntos Exteriores del régimen del apartheid, Pik Botha) es inversor de Sequoia (el mismo que Shaun Maguire), Patrick Soon-Shiong es el propietario de Los Angeles Times que prohibió el editorial pro-Kamala Harris en su consejo editorial y recientemente anunció un algoritmo de IA para «corregir» el sesgo progresista de sus editores.

De todos los magnates digitales vinculados al hemisferio sur, es sin duda Peter Thiel quien tiene el mayor perfil. Vinculado al think-tank anarcocapitalista Property & Freedom Conference y al Grupo Bilderberg, el magnate, criado en Namibia en el seno de una familia alemana, no sólo es partidario de Trump, sino que ha sido el financista y mentor de la carrera de JD Vance, cuyo nombramiento como vicepresidente patrocinó y garantizó directamente.

También miembro original de la mafia PayPal, Thiel estudió en Stanford, donde fundó el Young Conservative Journal. Famoso por haber teorizado que «la democracia ya no es compatible con la libertad», ahora es la eminencia gris del culto neorreaccionario de Silicon Valley.

El mes pasado, en una entrevista con Bari Weiss, comparó a los ultracapitalistas tecnológicos que llevaron a Trump a la victoria con los combatientes de la resistencia que derribaron al Imperio en “La guerra de las galaxias” (una analogía en la que presumiblemente Biden interpretaría a Darth Vador).

Además de liderar la santa alianza contra “el establishment”, Thiel es el propietario de Palantir, una empresa de análisis de datos e inteligencia artificial con múltiples aplicaciones militares (la compañía debe su nombre a las piedras adivinatorias del mago Sauron en los libros de JRR Tolkien). El control de la inteligencia artificial, como es bien sabido, será crucial para la próxima fase capitalista y geopolítica, por lo que la unión Trump-oligarcas se ha consumado también en la perspectiva de una nueva carrera armamentística de la IA, especialmente con el archirrival chino.

Fundada en 2003, Palantir proporcionó inicialmente redes neuronales y algoritmos para el análisis de datos a agencias de inteligencia y luego a departamentos especiales del ejército. Hoy es líder en aplicaciones militares de IA, que también suministra a numerosos clientes mundiales. Siempre, se dice, los del lado “correcto”. El director general de la empresa, Alex Karp, es un ferviente partidario de Israel y un defensor del nuevo maniqueísmo mundial liderado por los USAmericanos. «Debemos explicar a los usamericanos que el mundo está dividido en dos partes y que una de ellas está dominada por terroristas que tienen la vista puesta en dominar Occidente», afirmó en una reciente conferencia del Instituto Reagan.

En el pensamiento de Karp, la supremacía tecnológica está perfectamente unida a la superioridad moral del Occidente usamericano. Y el supremacismo es inseparable de la lógica de la guerra permanente (que al fin y al cabo se corresponde con el modelo de negocio corporativo). Karp afirma que “los usamericanos son las personas más temerosas, imparciales, menos racistas y bien dispuestas del mundo. Al mismo tiempo, quieren que sepamos que si te levantas por la mañana pensando que vas a hacernos daño, capturarnos como rehenes o enviarnos fentanilo para matarnos en nuestras casas, algo muy malo te va a pasar a ti o a tu primo, a tu amante o a tu familia”.

Los desvaríos del Dr. Insólito de los algoritmos Karp son habituales. «Disponemos de la mejor tecnología y así tiene que seguir siendo», declara en otro vídeo. «No podemos permitirnos equivalencias con nadie porque nuestros adversarios no tienen nuestros escrúpulos morales. Sionista convencido y partidario de Netanyahu, Karp ha puesto la «superioridad moral» de su compañía al servicio de las FDI en la campaña contra Gaza, y puso a prueba su propia inteligencia artificial en el teatro de operaciones ucraniano. En la nueva «pax digital americana» de Karp, el doctor Insólito se encuentra con Terminator en un escenario en el que los cielos «enemigos» están permanentemente pavimentados con satélites Starlink (la filial de Musk ya tiene 6.500 en órbita) y otros muchos armados con misiles. 

Hace quince días, 166 miembros de la ONU votaron a favor de una resolución que pide un tratado sobre armas «inteligentes», los llamados robots asesinos, dotados de «autonomía de decisión». El tratado  es solo una “esperanza piadosa” porque USA se opone a cualquier limitación obligatoria. De hecho, la proliferación de armas inteligentes ya está en marcha y seguirá siendo una de las principales prioridades para la próxima Casa Blanca.

En la sede del nuevo complejo militar-industrial digital de Silicon Valley se trabaja ya a buen ritmo para asegurar la supremacía usamericana también en el espacio y los océanos, por donde ya cruzan “enjambres” de robots-submarinos autónomos, fabricados por otra empresa puntera del sector, Anduril (nombre también tomado de “”El Señor de los Anillos, esta vez la espada de Aragorn). Escenarios cada vez más frecuentes en los que el transhumanismo de los giga-capitalistas vira hacia lo poshumano.

El modelo puede ahora ser definitivamente consolidado por una Casa Blanca en la que la ideología reaccionaria y los intereses industriales se superpondrán infinitamente sin distinción, un gobierno compuesto a partes iguales por ideólogos apocalípticos y fabricantes de armas que tendrán en el Despacho Oval un socio comercial al 100%.

El estado de excepción, las redadas y modificaciones constitucionales por decreto (el fín del derecho de suelo, para empezar, seguido de restricciones radicales a la disidencia) se vislumbran en el horizonte a partir del próximo enero. Detrás de este proyecto hay una facción que, además de la certeza de tener razón, tendrá ahora el poder de aplicarlas  con el pleno apoyo de una presidencia imperial.


22/12/2024

LUCA CELADA
Silicon Valley’s plan to take over the state
The irresistible (or resistible?) rise of the broligarchs

USA: A weaponized and extremist plutocracy is on the verge of taking control of the world’s greatest superpower.

Luca Celada, il manifesto, 17/12/2024

Translated by John Catalinotto, Tlaxcala 

 Luca Celada is the Los Angeles correspondent for the Italian daily il manifesto.

This week, Amazon’s Jeff Bezos, Open AI’s Sam Altman and Mark Zuckerberg announced donations of $1 million each as contributions to Donald Trump’s inauguration ceremony on January 20. Digital moguls have often been under attack by Trump, who until a few weeks ago asserted that Zuckerberg, in particular, should “go to jail” for censoring right-wing views on his platforms. After Trump’s victory, there was a virtual pilgrimage from Silicon Valley to Mar-a-Lago to perform an act of submission. Last week, Meta’s boss flew there for a meeting with Trump; Bezos has an appointment in the next few days.
Many other plutocrats have a permanent presence in the revolving court that has been orbiting around the returning president since the November elections. Among the many tycoons who generously contributed to his re-election, many were immediately rewarded with ministerial appointments. Among them, Charles Kushner, father of Trump’s son-in-law Jared, whom he pardoned in 2020 [he had been convicted of tax evasion and witness tampering] , honored with the post of ambassador to France.
(Another “dynastic” appointment is that of first-born Donald J’s (possibly ex) fiancée, Kimberley Guilfoyle, as the new ambassador to Greece, while his daughter-in-law, Lara Trump, is set to move from the Republican Party National Committee to the Senate).
Ministers with opulent fortunes (over $1 billion) include Linda McMahon at Public Education, Scott Bessent at Treasury, Doug Burgum at Interior, Howard Lutnick at Commerce, Jared Isaacman as head of NASA, and Steve Witkoff - Trump’s business partner in a new crypto-currency company, World Liberty Financial - as special envoy to the Middle East.
 
As well as creating another blatant conflict of interest for the new president, the family’s entry into production of “Trump coin” is the latest indication of a growing partnership between Trump and the new capitalism incubated in Silicon Valley. Silicon tycoons are fantastically wealthy, and for Trump wealth has always been an ostentatious symbol of success. According to a recent New York Times article, he likes to show off his new political associates like trophies in his kitschy palace. “I’ve brought two of the richest men in the world,” he was recently quoted by the Times as saying, as he introduced himself to a meeting of journalists in the company of Elon Musk and Oracle CEO Larry Ellison. “You, who did you bring?”
It’s Elon Musk who epitomizes the influence of Silicon Valley’s accelerationists in Trump’s restoration: as we know, he has been entrusted, along with another billionaire, Vivek Ramaswami, with a central post as administrator of the “Department of Government Efficiency” (DOGE). Musk would, however, have greater freedom of action, including over the composition of the government framework itself, on which numerous collaborators “on loan” from his companies would work in Florida.
Among the key figures would be Jared Birchall, director of Neuralink, the company in charge of neurological implants, but also administrator of the tycoon’s personal finances and generally his right-hand man, in charge of family affaires, the foundation, as well as Musk’s real estate, travel and security. To these tasks are now added talks with potential State Department representatives. The fact that Birchall has no experience of international affairs is clearly not seen as a problem in a selection which, as with other departments, would seem to focus primarily on ideological affinities and the nominees’ loyalty to the President.
Another advisor, this time to select intelligence personnel, is Shaun Maguire, a Caltech physicist who became a billionaire as a partner in Sequoia, one of Silicon Valley’s leading investment funds and (needless to say) a friend of Elon Musk, with whom he shares the cult, so fashionable in the Valley, of the undisciplined, misfit genius, perhaps even a little misanthropic, but always brilliant.
In other words, many of the decisions destined to shape the Trump 2.0 government are in the hands of an ideological faction of extremist “meritocrats,” not to say “Darwinist” theorists of the triumph of the best over the mediocre. Another “advisor” located  in Palm Beach, for example, is Marc Andreesen, the billionaire founder of Netscape and one of the leading ideologues of the neo-reactionary oligarchy, a fervent advocate of radical libertarianism and minimal state interference in corporate affairs.
 
Thanks to its strategic alliance with Trump, a partnership that only really matured in the final stages of the election campaign, this small group of entrepreneurs radicalized by the success of the Silicon Valley oligopolies, now has the opportunity to transport the philosophies of management (and eugenics) to the state apparatus. Musk has, for example, repeatedly expressed the idea that immigration should be managed like a “sports club” selection campaign, required to select the best players and discard the people who for him as for Trump are the much-hated “losers.”
But Musk’s main obsession is cutting public spending, against which he constantly rails in X-posts as a source of inflation and unsustainable budget deficits. These are the classic themes of conservative economic philosophy that the Silicon Valley right has imbued with an almost religious zeal. It is striking that a faction which, until recently, would have been considered fanatically extremist, has risen to such a position of power almost without prior planning. The very creation of Musk’s super-ministry occurred “live” during the recorded live X broadcast of the two men after the failed attack on Trump last July.
“A lot of people just don’t understand where inflation comes from. Inflation comes from government overspending because the checks never bounce when it’s written by the government. So if the government spends far more than it brings in, that increases the money supply,” the Space X owner (who collects billions of dollars in public space contracts) remarked during the conversation. “I think it would be great to just have a government efficiency commission that takes a look at these things and just ensures that the taxpayer money, to the taxpayers’ hard-earned money is spent in a good way. And I’d be happy to help out on such a commission.”
“I’d love it. […]Well, you, you’re the greatest cutter. I mean, I look at what you do. You walk in and you just say, you want to quit? They go on strike. I won’t mention the name of the company, but they go on strike and you say, that’s okay. You’re all gone. You’re all gone. So every one of you is gone and you are the greatest. You would be very good. Oh, you would love it.” (Laughs).
Musk and Ramaswamy don’t miss an opportunity to point out that the main sources of unnecessary spending are programs such as food aid for needy families, pensions and healthcare. “At first, it may cause some discomfort,” Musk even admitted of the dreaded remedy (cutting $2 trillion in public spending, equivalent to more than a third of the state budget), ”but in the long run, it will be better for everyone.”


 ’Captain X’, by Vasco Gargalo

“We’ll see what happens,” Trump asserted in this regard. “It will be an interesting few months. But the country is cluttered with regulations and unnecessary people who could be more productive in the private sector.” Now, with unprecedented influence, Silicon Valley’s “broligarchs”   are preparing to get their hands on the social welfare apparatus like one would a recently acquired subsidiary, with the intention of implementing a colossal “entrepreneurial” reform.
The fortunes accumulated by today’s plutocracy invite comparisons with the “golden age” of the early twentieth century, when the stratospheric wealth of the Rockefellers, Vanderbilts and major industrial and banking families underscored the abysmal inequality with the subordinate economic classes. But the political influence of these “robber barons,” remarkable as it was, pales in comparison with the current situation.
That era had been the prelude to a season of enormous social conflicts in the country and to the creation, under Franklin Roosevelt, of the social safety net (health care and pensions) that still exists today. Today, however, the tensions produced by globalization and rampant social inequality have apparently produced a government directly controlled by the most gigantic monopolies generated by neoliberal capitalism, which, in alliance with a populist demagogue and the most reactionary parts of the ideological right, are preparing to dismantle this social pact.
All this is despite a blatant conflict of interest on the part of the corporations who are in fact responsible for dismantling the federal agencies charged with regulating them. The first heads the tech industry would like to see fall are those of Lina Kahn, architect at the Federal Trade Commission (FTC) of the antitrust campaign that recently dragged Google and Amazon through the courts, and Elizabeth Warren, the Massachusetts senator who, as chairwoman of the Consumer Protection Authority, is one of the most consistently left-wing voices against corporate overreach (Andreesen has expressly called for her to be “removed”).
However, it’s not just a matter of securing the services of a friendly administration (although with a dealer like Trump, these will be all but assured). Trump’s promised decimation of the “deep state” as an anti-system populist aggregation device is, for Silicon Valley’s activist plutocracy, an ideological goal that Musk pursues with particular fervor.
In their recent book “Character Limit,” Kate Conger and Ryan Mac trace what happened in the days following Musk’s purchase of Twitter. A succession of layoffs, communicated by e-mail, department heads summoned by surprise and asked to justify the usefulness of their jobs in 60 seconds, with their severance packages withheld. An economic “restructuring” was transformed into a theater of cruelty, based on ritual and punitive humiliation. An area of strong affinity between Musk and Trump, already the owner of a reality TV show whose slogan was “You’re Fired!”
The liquidation of 80% of employees “without consequences” for the company (not to mention the destruction of a platform now reduced to a megaphone of disinformation and propaganda), turned Musk into a kind of anarcho-capitalist hero for a large group of followers. And it’s the same recipe many expect him to use to decimate the “Deep State” once and for all. In recent weeks, Musk has often been seen in the company of another associate, Steve Davis, one of the heads of the Boring Company (Musk’s tunnel-building company). According to the Times, Davis, who specializes in cost-cutting, has also engaged in discussions with other experts to “optimize the federal budget.” He too is likely to play a leading role in the new DOGE department.
It may not be possible to replicate Twitter’s 80% cuts, but even Musk’s paradoxical reduction of nearly 50% in government spending would represent a catastrophic apotheosis in the war of the rich against the poor. To prepare the ground, the campaign, amplified by Musk, to vilify the “profiteers” of public subsidies and “liberate” businesses from “suffocating bureaucracies” has already begun on “X.”
The other impulse is privatization, with another Musk team leader: Shervin Pishevar, director and co-founder of Hyperloop (the supersonic capsule company with several projects in the experimental phase). Pishevar hails “the opportunity to reimagine government functions in light of unprecedented economic and technological developments.” A phrase that sums up Silicon Valley’s economic interests and technological messianism. According to Pishevar, services such as the post office, NASA and the prison system “will benefit immensely from the ingenuity of the private sector.” All with the aim of creating a “future aligned with ownership and prosperity”. One of the hallmarks of ultracapitalists is that they glibly boast about what, until recently, and again during Trump’s first term, employer groups would have hushed up and publicly denied.
The progressive privatization of services is an integral part of the programs of many Western liberal governments. But the giga-capitalists now see an opportunity to finish the job very quickly, adopting the slogan “move fast and break things.” Mark Zuckerberg’s motto, favored by tech thaumaturges, would thus apply to the state apparatus to be “reinvented.” After all, even the infamous Project 2025 is based on a “blitzkrieg” aimed at crushing institutional resistance (or constitutional roadblocks) and armoring the apparatus without giving resistance time to organize.

The “blitzkrieg” project promises to assault all areas, starting with research, health and public education, and in some cases is already well advanced. The network of detention centers for migrants to be deported, for example (over 200 in the country, and which mass deportations promise to increase dramatically), is already outsourced by the government to companies in the prison industrial complex, companies like Corrections Corporation of America and Geo Group, paid for each prisoner held, and whose share price soared on the day of Trump’s election.
But the revered “disruption” must, in the project of the “broligarchs”, extend to society as a whole. What Pishevar euphemistically calls the “revolutionary restructuring of public institutions” will follow the familiar script of their sabotage and withholding funds with a view to their replacement by “management” companies and, consequently, a massive transfer of public funds to private coffers. Much of this is likely to be implemented by executive order, but on this occasion, Trump and his sponsors have both houses of parliament and a reactionary supermajority on the Supreme Court - an unprecedented convergence of purpose and power.
Still in the context of “innovation”, one significant appointment has partly flown under the radar, that of David Sachs to the invented post of “cryptocurrency and artificial intelligence czar.” A venture capitalist and old acquaintance of Musk’s from his PayPal days, Sachs is one of several South Africans who play a prominent role in Silicon Valley’s reactionary wing. Roelof Botha (grandson of the apartheid regime’s last foreign minister, Pik Botha) is a Sequoia investor (the same as Shaun Maguire), Patrick Soon-Shiong is the owner of the Los Angeles Times, which had banned pro-Kamala Harris editorials from its editorial board and recently announced the introduction of an AI algorithm to “correct” the progressive biases of its editors.
Of all the digital tycoons with ties to the southern hemisphere, it’s certainly Peter Thiel who has the highest profile. Linked to the anarcho-capitalist think-tank Property & Freedom Conference and the Bilderberg Group, the tycoon, who grew up in Namibia in a German family, is not only a Trump supporter, but has also been the financier and career mentor of JD Vance, whose vice-presidential nomination he directly sponsored and guaranteed.
A founding member of PayPal, Thiel studied at Stanford, where he founded the Young Conservative Journal. Famous for theorizing that “democracy is no longer compatible with freedom,” he is today the eminence grise of Silicon Valley’s neo-reactionary cult.
 
Last month, in an interview with Bari Weiss, he compared the tech ultra-capitalists who led Trump to victory to the resistance fighters who bring down the Empire in Star Wars (an analogy in which Biden would presumably play Darth Vader).
In addition to leading the holy alliance against the “establishment,” Thiel is the owner of Palantir, a data analytics and AI company with multiple military applications (the company is named after the wizard Sauron’s divination stones in JRR Tolkien’s books). Control of artificial intelligence, as we know, will be crucial to the next capitalist and geopolitical phase, and the Trump-oligarchs cabal has therefore also been consumed with a view that they must pursue a new AI arms race, notably with the Chinese arch-rival.
Founded in 2003, Palantir first supplied neural networks and data analysis algorithms to intelligence agencies, then to military special departments. Today, it is a leader in military AI applications, which it also supplies to numerous global customers. Always, it is said, those who are on the “right” side. The company’s CEO, Alex Karp, is a staunch supporter of Israel and a defender of the new U.S.-led global Manichaeism. “We have to explain to Americans that the world is divided into two parts, and one of them is run by terrorists whose goal is to dominate the West,” he asserted at a recent Reagan Institute conference.
In Karp’s thinking, technological supremacy goes hand in hand with the moral superiority of the U.S.-led West. And supremacism is inseparable from the logic of permanent war (which, after all, corresponds to the corporate business model). Karp asserts that “[U.S.] Americans are the most fearful, impartial, least racist and best-disposed people in the world. At the same time, they want us to know that if you wake up in the morning thinking you’re going to hurt us, take us hostage or send fentanyl to kill us at home, something very bad is going to happen to you, your cousin, your lover or your family.”
At Karp’s headquarters, his rantings sounding like a Doctor Strangelove of algorithms are commonplace. “We have the best technology and it has to stay that way,” he declares in another video. “We can’t afford to be equivalent with anyone because our opponents don’t have our moral scruples.” A staunch Zionist and Netanyahu supporter, Karp put his company’s “moral superiority” to work for the IDF in the campaign against Gaza and tested his own artificial intelligence in the Ukrainian theater. In Karp’s new “digital pax americana,” Dr. Fiolamour meets Terminator in a scenario where the “enemy” sky is permanently paved with Starlink satellites (Musk’s subsidiary already has 6,500 in orbit) and numerous others armed with missiles.
 A fortnight ago [Dec. 2, by 166-3 with 15 abstentions], 166 members of the U.N. General Assembly passed a resolution calling for a treaty on “intelligent” weapons, “killer robots” with “autonomous decision-making.” This treaty is nothing more than wishful thinking, as the USA is opposed to any compulsory limitation. In fact, the proliferation of smart weapons is already well underway, and will remain a top priority for the next White House.
At the headquarters of Silicon Valley’s new digital military-industrial complex, work is well underway to ensure U.S. supremacy in space and in the oceans, where “swarms” of autonomous robot submarines are already crossing paths, produced by another leading company in the sector, Anduril (a name also taken from Lord of the Rings, this time Aragorn’s sword). These are increasingly common scenarios in which the transhumanism of giga-capitalists veers into the post-human.
The model can now be definitively consolidated by a White House where reactionary ideology and industrial interests will overlap infinitely without distinction, a government composed in equal parts of apocalyptic ideologues and arms industrialists who will have a 100% business partner in the Oval Office.
A state of emergency, roundups and constitutional modifications by decree (the end of birthright citizenship), to start with, followed by radical restrictions on dissent) are on the horizon starting in late January. Behind this project is a faction which, in addition to their certainty they are right, will now have the power to enforce it with the full support of an imperial presidency.

21/12/2024

LUCA CELADA
Le plan de la Silicon Valley pour s’emparer de l’État
L'irrésistible (ou résistible ?) ascension des broligarques

USA : Une ploutocratie « armée » et extrémiste est sur le point de prendre le contrôle de la plus grande superpuissance du monde.

Luca Celada, il manifesto, 17/12/2024
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

Luca Celada est le correspondant à Los Angeles du quotidien italien il manifesto


Cette semaine, Jeff Bezos d’Amazon, Sam Altman d’Open AI et Mark Zuckerberg ont annoncé des dons d’un million de dollars chacun en guise de contribution à la cérémonie d’investiture de Donald Trump le 20 janvier prochain. Les magnats du numérique ont souvent été attaqués par Trump, qui, il y a encore quelques semaines affirmait que Zuckerberg, en particulier, devrait « aller en prison » pour avoir censuré des opinions de droite sur ses plateformes. Après sa victoire, il y a pratiquement eu une procession depuis la Silicon Valley pour faire acte de soumission. La semaine dernière, le patron de Meta s’était envolé vers Mar a Lago pour une rencontre avec Trump, Bezos a rendez-vous dans les prochains jours.

De nombreux autres ploutocrates sont une présence fixe dans la cour tournante qui virevolte depuis les élections de novembre autour du président de retour. Parmi les nombreux magnats qui ont généreusement contribué à sa réélection, beaucoup ont été ponctuellement récompensés par des nominations dans des ministères. Parmi eux, Charles Kushner, père de son gendre Jared, qu’il a gracié en 2020 [il avait été condamné pour malversations fiscales] , honoré par le poste d’ambassadeur en France.

(Une autre nomination « dynastique » est celle de la (peut-être ex)  fiancée du premier-né Donald Jr, Kimberley Guilfoyle, en tant que nouvelle ambassadrice en Grèce, tandis que sa belle-fille, Lara Trump, devrait passer du comité central du parti républicain au Sénat).

Parmi les ministres aux fortunes opulentes (plus d’un milliard de dollars), on trouve Linda McMahon à l’éducation publique, Scott Bessent au Trésor, Doug Burgum à l’intérieur, Howard Lutnick au commerce, Jared Isaacman à la tête de la NASA, et Steve Witkoff - partenaire en affaires de Trump dans une nouvelle société de crypto-monnaies, World Liberty Financial – comme envoyé spécial au Moyen-Orient 

En plus de créer un autre conflit d’intérêts flagrant pour le nouveau président, l’entrée de la famille dans la production de « Trump coin » est la dernière indication d’un partenariat croissant entre Trump et le nouveau capitalisme incubé dans la Silicon Valley. Les magnats siliconiens sont fantastiquement riches, et pour Trump, la richesse a toujours été un symbole ostentatoire de réussite. Selon un récent article du New York Times, il aime exhiber ses nouveaux associés politiques comme des trophées dans son palais kitsch. « J’ai amené deux des hommes les plus riches du monde », aurait-il récemment déclaré, selon le Times, en se présentant à une réunion des journalistes en compagnie d’Elon Musk et du PDG d’Oracle, Larry Ellison. « Vous, vous avez amené qui ? »

C’est Elon Musk qui incarne l’influence des accélérationnistes de la Silicon Valley dans la restauration de Trump : comme on le sait, il s’est vu confier, avec un autre milliardaire, Vivek Ramaswami, un poste central d’administrateur du « département de l’efficacité gouvernementale » (DOGE). Musk aurait cependant une plus grande liberté d’action, y compris sur la composition du cadre gouvernemental lui-même, sur lequel travailleraient, en Floride, de nombreux collaborateurs « prêtés » par ses entreprises.

Parmi les personnages clés figurerait Jared Birchall, directeur de Neuralink, l’entreprise en charge des implants neurologiques, mais aussi administrateur des finances personnelles du magnat et généralement son bras droit, en charge des affaires familiales, de la fondation, ainsi que des biens immobiliers, des déplacements et de la sécurité de Musk. À ces tâches s’ajoutent désormais les pourparlers avec d’éventuels représentants du département d’État. Le fait que Birchall n’ait aucune expérience en matière d’affaires internationales n’est manifestement pas considéré comme un problème dans une sélection qui, comme pour les autres départements, semblerait se concentrer principalement sur les affinités idéologiques et la loyauté des candidats à l’égard du président.

Un autre conseiller, cette fois pour sélectionner le personnel du renseignement, est Shaun Maguire, un physicien de Caltech devenu milliardaire en tant qu’associé de Sequoia, l’un des principaux fonds d’investissement de la Silicon Valley et (ça va sans dire) ami d’Elon Musk, avec qui il partage le culte, si à la mode dans la Valley, du génie indiscipliné et inadapté, peut-être même un peu misanthrope, mais toujours brillant.

En d’autres termes, de nombreuses décisions destinées à façonner le gouvernement Trump bis sont entre les mains d’une faction idéologique de « méritocrates » extrémistes, pour ne pas dire de théoriciens « darwinistes » du triomphe des meilleurs sur les médiocres. Un autre « conseiller » fixe à Palm Beach, par exemple, est Marc Andreesen, le fondateur milliardaire de Netscape et l’un des principaux idéologues de l’oligarchie néo-réactionnaire, fervent défenseur du libéralisme radical et d’une ingérence minimale de l’État dans les affaires des corporations.

Grâce à son alliance stratégique avec Trump, un partenariat qui n’a vraiment mûri que dans les dernières étapes de la campagne électorale, ce petit groupe d’entrepreneurs radicalisés par le succès des oligopoles de la Silicon Valley, a désormais la possibilité de transporter les philosophies du management (et de l’eugénisme) vers l’appareil d’État. Musk a, par exemple, exprimé à plusieurs reprises l’idée que l’immigration devrait être gérée comme une campagne de sélection d’« un club sportif », tenu de sélectionner les meilleurs joueurs et d’écarter les « losers » tant honnis, pour lui comme pour Trump.


Captain X, par Vasco Gargalo

15/12/2024

ZVI BAR’EL
La Syrie pourrait devenir un protectorat turc, ce qui limiterait la liberté d’action d’Israël

La Turquie, qui a un intérêt stratégique à faire de la Syrie un rempart contre les Kurdes, cherche à prendre la place de la Russie et de l’Iran, notamment en contrôlant l’espace aérien syrien.

Zvi Bar’el, Haaretz , 15/12/2024
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala 


Des membres de la communauté syrienne d’Istanbul célèbrent la chute du régime Assad, la semaine dernière. Photo Yasin Akgul/AFP
 

Un jour après qu’Israël a pris le contrôle du Mont Hermon syrien et des zones autour de Quneitra, le nouveau gouvernement syrien dirigé par Ahmed Hussein al-Chara (alias Abou Mohammed al-Joulani) a rapidement envoyé deux lettres au Conseil de sécurité et au secrétaire général de l’ONU, demandant à Israël de retirer ses forces du territoire syrien et de cesser ses attaques.

« La République arabe syrienne entame un nouveau chapitre de son histoire, son peuple aspirant à construire un État fondé sur la liberté, l’égalité, l’État de droit et la réalisation de ses espoirs de stabilité et de paix. Pourtant, en ce moment même, l’armée israélienne a envahi de nouvelles zones du territoire syrien dans les provinces de Jebel El Cheikh [nom arabe du Mont Hermon] et de Quneitra », peut-on lire dans la toute première lettre du gouvernement au Conseil de sécurité.

Lors de sa visite sur le plateau du Golan dimanche dernier, le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou n’a laissé aucune place au doute : « L’accord de 1974 qui établissait la séparation des forces entre Israël et la Syrie par le biais d’une zone tampon s’est effondré... Les soldats syriens ont abandonné leurs postes. Nous ne permettrons à aucune force hostile de s’établir le long de notre frontière ». Jeudi, Walla News a rapporté que Netanyahou avait informé le conseiller à la sécurité nationale des USA, Jake Sullivan, que les forces de défense israéliennes resteraient dans la zone tampon syrienne « jusqu’à ce qu’une force capable de faire respecter l’accord de séparation soit établie ».

Il s’agit du deuxième accord international régional violé par Israël, après sa prise de contrôle du corridor Philadelphie et le déploiement de forces à Gaza - des actions qui, selon l’Égypte, violent à la fois les accords de Camp David et l’accord de 2005 sur les déplacements et l’accès. Les situations sont toutefois différentes. Avec l’Égypte, Israël maintient des négociations en cours.
Par le passé, il a même permis aux forces égyptiennes de dépasser les limites de Camp David en renforçant leur présence militaire dans le Sinaï, y compris par l’utilisation de la puissance aérienne, pour combattre les organisations islamistes dans la péninsule. En revanche, Israël ne dialogue pas avec la Syrie et n’a pas l’intention de se retirer dans un avenir prévisible des territoires qu’il a récemment saisis.
La déclaration d’al-Chara, samedi, selon laquelle « dans l’état d’affaiblissement où se trouve la Syrie, elle n’a pas l’intention d’entrer dans une confrontation militaire... et nous n’avons aucun intérêt à entrer en conflit avec Israël » n’est pas de nature à rassurer Israël ou à modifier sa position concernant les territoires occupés.

Une course à la normalisation
Contrairement à la liberté d’action pratiquement illimitée d’Israël à Gaza - soutenue par la légitimation internationale et arabe pour agir avec force contre le Hamas, mais pas contre les civils -, sa position à l’égard de la Syrie est nettement différente. Bien qu’Al-Chara et son gouvernement n’aient pas été élus démocratiquement et qu’ils soient arrivés au pouvoir par la force militaire, craignant une guerre civile potentielle, ils ont déjà acquis une grande crédibilité arabe et internationale. Il continue à renforcer ce soutien par des déclarations diplomatiques stratégiques qui laissent entrevoir les politiques qu’il entend mener, et ces efforts portent déjà leurs fruits.

Après avoir reçu les félicitations de grands États arabes comme l’Égypte, l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis, des mesures concrètes ont été prises. La Turquie a rouvert son ambassade à Damas samedi, et le Qatar devrait faire de même dimanche. Les pays européens semblent également prêts à normaliser leurs relations avec la Syrie après une interruption de 13 ans, d’autant plus que certains d’entre eux avaient déjà envisagé de rétablir des liens avec le régime d’Assad.
Le soutien international croissant au nouveau gouvernement syrien pourrait bientôt se traduire par des pressions sur Israël pour qu’il se retire des territoires nouvellement occupés. Contrairement au Hamas, qui fait face à un large consensus international [disons : occidental, NdT] contre son rôle dans la future gouvernance de Gaza, le Ha’yat Tahrir al-Cham de Syrie est de plus en plus considéré comme une autorité légitime - bien qu’il soit toujours inscrit sur la liste des organisations terroristes et que son chef fasse l’objet d’une prime de 10 millions de dollars.
La Turquie, qui dispose de l’influence la plus importante, se positionne pour diriger les efforts visant à normaliser les relations internationales du nouveau régime syrien. Cette position s’explique par de multiples facteurs : Le soutien de longue date de la Turquie aux milices de Ha’yat Tahrir al-Cham, son contrôle sur l’Armée nationale syrienne (anciennement l’Armée syrienne libre) et sa maîtrise des postes-frontières cruciaux qui constituent la ligne de vie économique de la Syrie.
La Turquie entend désormais jouer le rôle de principal protecteur de la Syrie que tenaient auparavant l’Iran et la Russie. Cela va au-delà de simples relations de « bon voisinage » entre pays frontaliers. La Turquie a un intérêt stratégique primordial : transformer la Syrie en un rempart contre les forces kurdes, qu’elle combat depuis des décennies. Alors que la Turquie a condamné l’incursion d’Israël sur le territoire syrien, elle a elle-même occupé par la force certaines parties du nord-ouest de la Syrie. La semaine dernière, les milices qui lui sont alliées se sont emparées de la ville de Manbij à l’ouest de l’Euphrate, un bastion kurde, et la Turquie ne cache pas son intention d’étendre ses opérations à l’est de l’Euphrate.
La question kurde devrait dominer les prochaines discussions turco-syriennes, car sa résolution est cruciale pour la capacité d’Al-Chara à établir un État unifié. Un accord réussi permettrait d’éviter que les conflits internes ne dégénèrent en affrontements armés entre le régime et la minorité kurde, de faciliter le retrait des forces turques de Syrie et d’apaiser les tensions entre les autres minorités religieuses et ethniques du pays.

La situation des Kurdes
Le Conseil d’administration autonome kurde, qui gouverne les provinces kurdes du nord de la Syrie, supervise les Forces démocratiques syriennes (FDS) - un corps militaire composé de combattants kurdes et arabes que les USA ont établi comme une force efficace contre ISIS. La semaine dernière, le Conseil a annoncé que « les provinces du nord et de l’est de la Syrie sont une partie inséparable de la géographie syrienne » et a décidé de hisser le nouveau drapeau syrien des rebelles sur tous les bâtiments publics. Cela montre que les Kurdes ont l’intention de continuer à faire partie de la Syrie plutôt que d’établir une région indépendante, en acceptant l’autorité du nouveau gouvernement.

Toutefois, les Kurdes, qui contrôlent la plupart des champs pétroliers et les principales régions agricoles de la Syrie, posent des conditions à cette acceptation. Un document circulant sur les médias sociaux jeudi, censé présenter des projets de demandes de négociation entre les forces kurdes et Hayat Tahrir al-Cham sous la supervision des USA, détaillait plusieurs points clés. Les Kurdes se retireraient de Deir ez-Zor, Raqqa et Tabqa en échange du retour des résidents kurdes à Afrin, Tel Abyad et Ras al-Ayn, occupés par les Turcs, ainsi que du retrait des Turcs de ces zones.
Parmi les autres revendications figurent la reconnaissance d’une gouvernance autonome kurde, une aide au retour des Kurdes déplacés dans les villes occupées par la Turquie, une représentation militaire kurde dans le gouvernement qui sera formé après mars 2025 (date limite fixée par Al-Chara pour le mandat du gouvernement temporaire), l’engagement de retirer toutes les forces turques et la reconnaissance du kurde en tant que deuxième langue officielle.
Bien que cette liste reste préliminaire et sujette à des négociations, elle illustre clairement l’ampleur des défis auxquels le gouvernement syrien est confronté s’il cherche une solution diplomatique plutôt que militaire. Al-Chara, pris entre les pressions turques et les exigences kurdes, doit naviguer prudemment sur ce terrain miné, en équilibrant les aspirations turques et les intérêts kurdes, tout en maintenant de bonnes relations avec la Turquie sans fragmenter l’État.
L’évolution des relations turco-syriennes pourrait avoir un impact significatif sur les opérations d’Israël en Syrie. Au-delà des efforts internationaux visant à retirer les forces de Tsahal de la zone tampon, la Turquie pourrait déterminer la liberté opérationnelle aérienne d’Israël en Syrie. Alors qu’Israël bénéficiait auparavant d’un accès presque illimité, coordonné avec le commandement russe, à la base aérienne de Khmeimim, les forces russes ont commencé à se retirer. La plupart des avions russes ont quitté la Syrie et Moscou négocie actuellement le maintien de sa présence navale dans le port de Tartous.
En l’absence des forces aériennes syriennes et russes, la Turquie pourrait devenir le contrôleur de facto de l’espace aérien syrien et, en partenariat avec le gouvernement syrien, mettre fin à la liberté opérationnelle d’Israël. Bien que le besoin d’Israël pour une telle liberté puisse diminuer de manière significative avec le départ de la plupart des forces iraniennes et l’intention d’al-Chara d’empêcher les activités du Hezbollah en Syrie, Israël reste sceptique quant à la capacité du nouveau gouvernement syrien à bloquer les transferts d’armes de la Syrie vers le Liban. Par conséquent, Israël devra probablement conclure des accords avec la Turquie - des accords qui pourraient avoir un coût politique dans d’autres régions, y compris à Gaza.