المقالات بلغتها الأصلية Originaux Originals Originales

Affichage des articles dont le libellé est Français. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est Français. Afficher tous les articles

22/02/2025

JAKE LAHUT
Quand Kash Patel, candidat de Trump à la tête du FBI, attaquait Elon Musk
Un épisode de la guéguerre entre techno-féodaux et national-populistes

ACTUALISATION
Le Sénat a confirmé le 20 février la nomination de Kash Patel à la tête du FBI, par 51 voix contre 49 (tous les démocrates + 2 républicains)

En 2022 Kash Patel s’en est pris à Elon Musk dans des épisodes de podcast : “il va devenir un maous trust”

Jake Lahut, Drop Site News, 7/2/2025
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

L’un des plus importants affrontements idéologiques qui se déroule actuellement aux USA est celui entre Elon Musk et Steve Bannon, qui représentent deux ailes de l’univers trumpesque, les techno-féodaux contre les populistes MAGA. L’article ci-dessous de Jake Lahut revient sur les commentaires enflammés de Kash Patel, un allié de Steve Bannon pressenti pour diriger le FBI [la commission judiciaire du Sénat est en train d’examiner sa candidature, qui pourrait être rejetée, NdT].

Dave Whamond

WASHINGTON, DC — Un épisode inédit d’un podcast animé par Kash Patel, fidèle de Trump et candidat au poste de directeur du FBI, révèle une tension préexistante sous-jacente au mariage déjà difficile entre les populistes du MAGAworld et les élites de la Silicon Valley dirigées par Elon Musk qui ont soutenu la campagne de Donald Trump.

Après 15 mois chaotiques passés à travailler pour la première administration Trump, Patel, un fidèle loyaliste de Trump, avait lancé Kash’s Corner, un podcast dans lequel il proposait son point de vue depuis le MAGAfied sur l’actualité aux côtés de son co-animateur, le rédacteur en chef de l’ Epoch Times, Jan Jekielek.

Dans un épisode d’octobre 2022, Patel a mis en garde non seulement contre les motivations financières de Musk, mais aussi contre ses ambitions monopolistiques et sa soif de données sur les consommateurs et de contrats de défense - les mêmes choses qui préoccupent l’aile économiste-populiste du monde de Trump.


Kash Patel témoigne lors d’une audition de la commission judiciaire du Sénat sur sa nomination au poste de directeur du FBI le 30 janvier 2025. Photo Mandel Ngan / AFP via Getty Images

À l’époque, Musk venait de décider qu’il ne voulait finalement pas acheter Twitter, car le coût exorbitant de la plateforme de médias sociaux l’obligerait à s’endetter de plusieurs milliards de dollars sans perspective évidente de rentabilité. Le milliardaire et [alors] éventuel soutien de Trump a finalement procédé à l’achat quand même, car Twitter l’a poursuivi en justice lorsqu’il a tenté de se rétracter et de ne pas acheter Twitter au prix convenu précédemment.

Mais Patel n’a pas entièrement adhéré à son raisonnement. En fait, sa diatribe contre Musk a révélé un profond scepticisme quant à ses intentions monopolistiques, une préoccupation fondamentale des économistes populistes du MAGAvers.

Patel semblait presque perturbé en dénonçant les intentions de Musk de tenter d’acheter la plateforme de médias sociaux. « En fin de compte », a déclaré Patel, « j’ai réfléchi un moment, et c’est de l’argent. »

LUIS CASADO
Johannes Kaiser, empereur de l’apocalypse : l’homme qui veut euthanazier le Chili

 Luis CasadoRebelión, 19/2/2025
Traduit par Fausto GiudiceTlaxcala

Johannes Maximilian Kaiser Barentsvon Hohenhagen, le Führer du Parti National-Libertarien, candidat à la candidature pour l’élection présidentielle chilienne, prévue pour novembre 2025, a inventé le fil à couper le beurre : la réduction de « la charge fiscale pour faciliter l’esprit d’entreprise et la création d’emplois », ainsi que l’élimination de « la bureaucratie inutile qui freine l’épargne, l’investissement et la création de richesses ».

Le libre marché, l’ultra-libéralisme : il essaie de vendre sa poudre de perlimpinpin comme la nouveauté de l’année, alors qu’elle est plus vieille que les crinolines.

Ce n’est pas moi qui le dis : le Marchand de Venise de Shakespeare le savait dans sa pièce écrite en 1596-1597, il y a donc cinq siècles.

Le marchand Antonio accepte un prêt de Shylock, et la garantie qu’il offre est d’accepter que l’usurier lui coupe une tranche de sa propre chair s’il ne paie pas.

William n’invente rien : le paiement par le sang a été la règle (sans jeu de mots...) et reste très populaire aujourd’hui. Mieux encore, certains suggèrent que le rasoir et la tronçonneuse sont des versions de la même technique, ajoutant que nous Chiliens devrions adopter notre propre version de l’arnaque, revisitée et mise à jour.

Précisément parce que saigner les chrétiens à blanc était the must depuis l’arrivée de Pedro de Valdivia. Et pour ne pas manquer de chrétiens à saigner, l’Église s’est chargée de convertir la population autochtone avec le vieux truc usé du Paradis et de la Vierge Marie... Gloire à eux !

Le quotidien El Mercurio, plongé à fond dans la campagne du Führer Kaiser - ou Kaiser Führer, comme vous voudrez - met en exergue les brillantes idées du « cerveau économique » du candidat.

« ...le coordinateur économique de son programme, Victor Espinosa*, avait glissé - au moins - l’idée d’éliminer la Banque centrale, au milieu d’une explication plus large sur la possibilité d’ouvrir à la concurrence des monnaies à l’intérieur du pays ».

Parmi les monnaies qui entreraient en concurrence... la crypto-monnaie de Milei ?


Kaiser et son “cerveau économique” Victor Espinosa

Le “cerveau” de Kaiser, qui personnifie la réponse chilienne à l’IA par l’imbécillité naturelle, a inventé la réduction de « la charge fiscale pour faciliter l’esprit d’entreprise et la création d’emplois », ainsi que l’élimination de « la bureaucratie inutile qui freine l’épargne, l’investissement et la création de richesse ». (1)

Un certain Elon Musk réclame des royalties, tandis que Milei se réjouit d’être devenu célèbre.

El Mercurio demande « Quels impôts prévoyez-vous de réduire ou d’éliminer ? »

Le “cerveau” du Führer déploie la doxa, enfin, sa doxa :

« Il existe un large consensus sur la nécessité de réduire l’impôt sur les sociétés, car c’est lui qui pèse le plus sur l’investissement et la croissance. En une décennie, l’augmentation de cet impôt, à contre-courant de la tendance mondiale, a coûté à notre économie l’équivalent de 8 points de PIB. Aujourd’hui, avec un taux de 27%, le Chili se situe au-dessus de la moyenne de l’OCDE (23%). Mais nous ne nous contentons pas d’égaler la moyenne ; nous voulons que le Chili soit l’un des pays les plus compétitifs au monde. C’est pourquoi nous nous tournons vers les économies qui ont réussi à mettre en place des politiques fiscales intelligentes. L’Estonie, par exemple, maintient un taux d’imposition sur les sociétés de 20 %, alors que les USA, première économie mondiale, cherchent à le ramener à 15 %. Nous éliminerons les impôts qui créent des distorsions et des freins à la croissance. Il s’agit notamment de l’impôt sur les plus-values, qui représente une double imposition injuste, puisque ces plus-values sont déjà soumises à l’impôt sur le revenu. Nous réformerons également l’impôt foncier, qui est actuellement calculé sur la base d’évaluations volatiles du marché. Nous proposons de supprimer cet impôt pour les personnes âgées et de le remplacer par un système plus prévisible. Nous allons également revoir la TVA sur la construction ».

L’exemple qui réconforte le “cerveau” du Führer est... l’Estonie, qui en 1997 avait un PIB bien plus élevé qu’aujourd’hui, et qui montre dans les dernières années des baisses significatives de ce même PIB : -14,6% en 2009, -2,9% en 2020, -3,0% en 2023...

Une note de Wikipédia décrit le miracle estonien :

« À partir de 2009, le pays a subi une grave crise économique, et a vu son taux de chômage dépasser les 15,2 % en janvier 2010. L’économie de ce petit pays, très dépendant financièrement des banques suédoises, s’est alors révélée très fragile. La crise financière de 2008 a provoqué une débâcle dans le petit pays balte qui avait créé sa propre bulle immobilière : entre juin 2008 et juin 2009, le PIB a chuté de 15 %, la production industrielle de 34 % ». (2)

L’Estonie représente 0,22 % du PIB de l’UE et 0,3 % de sa population. La population de l’Estonie est de 1 315 000 habitants, ou plutôt elle diminue de manière significative chaque année.

L’Estonie a subi une perte importante de population depuis la fin des années 1990 (-4,9/1000 en 1998 ; -3,8/1000 en 1999), due à l’émigration d’une partie de ses habitants, mais surtout à un taux de fécondité très bas (1,37 enfant par femme en 2000 et 1,64 en 2010).

Dans le merveilleux exemple du “cerveau” Espinosa, la population émigre ou ne souhaite pas avoir d’enfants.

La comparaison avec le Chili pourrait être plus éloquente. Le PIB de l’Estonie représente 13,30 % du PIB du Chili et sa population 6,5 % de la nôtre. On se demande pourquoi le “cerveau” Espinosa n’a pas choisi l’exemple de l’Andorre ?

Les futés du Mercurio, inquiets du destin probable des fortunes chiliennes, ont interrogé le “cerveau” Espinosa sur la “méritocratie”. La réponse, la voici - détendez-vous, tout va très bien, madame etc.- :

« Selon les données du SII [Trésor Public], la principale richesse des Chiliens est constituée d’actions d’entreprises, souvent des groupes familiaux qui, dans de nombreux cas, ont créé leur entreprise à partir de rien au fil des ans. Il est donc normal que les fondateurs souhaitent assurer la continuité de ces projets et que leurs héritiers s’intéressent au maintien de la richesse créée par les générations précédentes. Il est évident que cette continuité passe par la méritocratie ; ceux qui prennent les rênes doivent être activement impliqués dans l’entreprise et avoir les compétences nécessaires pour la faire progresser. Nous pensons que le capital doit être taxé, mais sans devenir un obstacle à la continuité familiale. À cet égard, nous considérons que le modèle estonien d’imposition des successions, qui attribue la richesse aux héritiers à un coût nul et ne la taxe que lorsqu’elle est vendue, est très raisonnable. Cette approche nous semble essentielle pour renforcer les entreprises familiales, comme en Espagne, où les entreprises familiales sont sur un pied d’égalité avec les grandes entreprises ».


Kaiser et Milei, les crypto-führer

Comme on l’a dit, le bavardage du “cerveau” Espinosa est plus vieux que sassoir sur son cul, et a déjà provoqué un désastre planétaire en 2008 quand tout le système financier mondial, enthousiasmé par la dérégulation, le libre marché, l’ultra libéralisme et le vas-y, c’est pas toi qui paies, a fait faillite partout et que les États ont été obligés de faire des émissions monétaires insensées pour les remettre à flot.

Les banques prononcent alors cette fameuse phrase devenue mythique : Dieu vous le rendra !

Déjà dans ces années-là, un homme politique européen, un social-démocrate connu pour sa sagesse, sa prudence et sa grande capacité à ne rien faire pour fâcher le grand capital, expliquait la cause du désastre financier qui a secoué l’empire, l’Union européenne et les cinq continents.

Michel Rocard, qui a été maire, député, candidat à la présidence de la République, ministre et Premier ministre de la France, a été interviewé en 2011 sur TV5Monde à propos de la crise de 2008 :

Dans l’interview, un journaliste demande : « Qui est responsable de ce désastre ? »

Michel Rocard : « Il s’appelle Milton Friedman, il a eu le prix Nobel d’économie en 1976, il a produit une doctrine terrifiante par sa nocivité, dont personne ne s’est rendu compte. C’est l’homme suivi par treize autres prix Nobel d’économie... »

Journaliste : « Et par Margaret Thatcher et Ronald Reagan... »

Michel Rocard : « Ronald Reagan s’est mis à l’appliquer, et comme les États-Unis c’est gros, ça avait de l’importance... Les idées peuvent tuer, et c’est pas rien de faire tout un moment sur des idées... Dans toute une science économique qui, jusqu’à Keynes, et peut-être d’abord avec Keynes, avait le chômage comme préoccupation principale.... »

Journaliste : « ...et la régulation des marchés... »

Michel Rocard : « La régulation du marché en conséquence, le souci était le bien vivre, le plein emploi et la croissance. Dans ce système-là, les monétaristes, cet homme-là (Milton Friedman), ont inventé une philosophie qui dit, premièrement, que le marché s’auto-équilibre, et deuxièmement, que chaque équilibre de marché est optimal »

Journaliste : « Il n’y a pas besoin de régulation... »

Michel Rocard : « Pas besoin de régulation... Et ça fait plaisir... Les principaux gouvernements qui y sont allés tout de suite, c’est l’anglais, l’américain, le japonais, trente autres etc... La plupart des grands gouvernements de la planète ont adopté cette doctrine qui est devenue le cœur de l’enseignement de l’économie. Parce que le drame, c’est ce qui est arrivé à l’économie, comme si en médecine on découvrait que Louis Pasteur avait tout faux. Et qu’aujourd’hui, pour le gouvernement grec, pour le gouvernement français, ils voudraient recevoir des avis d’économistes qui ne soient pas des politiquement corrects de l’agrégation ancienne mode, qui ne soient pas formés par ce système de concepts dont les faits ont démontré qu’ils étaient toxiques. La grande responsabilité réside dans le fait que les gouvernements du monde entier se sont rués là-dedans. Pourquoi ? Parce qu’ils ont dit : débarrassons-nous e l’État, débarrassons-nous de l’impôt, gagnons plus et vive le profit, mais ça ne marche pas. Et maintenant, nous sommes obligés d’en sortir par une pratique - austérité, etc. - une pratique qui est antagonique à ce que disait le système, par une intervention publique pour sauver les banques, ce qu’on a fait en 2008, ce qui dément le système lui-même, et il faut réinventer une cohérence économique. La voilà, la responsabilité... »

Milton Friedman, ce grand irresponsable, ce sage fou qui a fondé l’école d’économie de Chicago, est l’une des idoles du “cerveau” Espinosa, avec Ludwig von Mises, autre prophète de l’Apocalypse.

Pour mesurer ce que le “cerveau” Espinosa célèbre comme des succès, il suffit de mentionner la dette publique de deux grandes puissances embarquées dans les politiques économiques ultra-libérales prônées par le conseiller du Führer : les USA et la France.

La dette publique des USA, cumulée par une douzaine de présidents, a franchi la barre des 34 000 milliards de dollars. Ce montant équivaut à 120% du PIB yankee.

La dette publique française dépasse les 3 303 milliards d’euros, soit 114% du PIB.

Pour prouver l’incohérence des ultra-libéraux, rappelons que pour entrer dans la zone euro, le traité de Maastricht impose à chaque pays d’avoir une dette publique inférieure à 60% de son PIB et un déficit budgétaire inférieur à 3% du PIB (le déficit français est de plus de 6%...). 

Les USA n’ont pas cette épée de Damoclès au-dessus de la tête : ils émettent de la monnaie quand bon leur semble, ont un déficit budgétaire qui “ m’en touche une sans faire bouger l’autre”, et ils exportent l’inflation dans le monde entier. Petit détail : le Chili ne jouit pas de ce privilège insensé.

L’arrivée éventuelle du Führer Kaiser à la présidence de ce qui reste de la république serait la pire catastrophe de l’histoire du Chili, avec la dictature de Pinochet.

On vous aura prévenus.

NdT

*Victor Espinosa a rédigé une thèse de doctorat à Madrid sous la houlette de Jesús Huerta de Soto, grand ponte de l’anarcho-capitalisme et militant du Parti de la Liberté Individuelle (P-LIB) espagnol, et l’ un des mentors de Javier Milei

NdA

(1) https://www.emol.com/noticias/Economia/2025/02/16/1157506/cerebro-economico-kaiser-propuestas.html

(2) https://fr.wikipedia.org/wiki/Économie_de_l%27Estonie

 

21/02/2025

LUIS CASADO
Croissance, vous avez dit croissance ?

Luis Casado, 21/2/2025
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala


Le dictionnaire de la RAE (Académie royale d’Espagne] est une mine infinie de trésors. Depuis mon enfance, dans la bibliothèque du Lycée de San Fernando, j’ai cherché le sens des mots qui m’attiraient autant ou plus que les sourires de Paulina. Elle ne fut qu’une illusion éphémère, mais l’envie de connaître les étymons qui composent notre langue m’a marqué à jamais.

Si vous cherchez le mot “crecimiento” (croissance), le RAE propose deux significations, mais gardez l’œil ouvert :

 * Action et effet de croître (crecer)

* Augmentation de la valeur intrinsèque de la monnaie.

 J’espère que vous êtes partis en courant et que vous avez été satisfaits : des réactions différentes mais compréhensibles. Peut-être pas tant que ça, puisque depuis mon enfance je me souviens que la monnaie avait une tendance irrépressible à se transformer en merde et à finir par ne plus rien valoir. Tout d’abord, la monnaie n’a pas de valeur intrinsèque, mais seulement la valeur que lui donnent ceux qui la créent, la manipulent et l’instrumentalisent.

 Un billet de banque sur lequel vous écrivez 20 000 pesos vaut intrinsèquement la même somme d’argent que celui sur lequel vous écrivez 100 pesos, 1 000 pesos ou ce qui vous chante. Dans l’histoire récente, le peso a déjà été remplacé par l’escudo (mille anciens pesos pour un escudo), escudo qui a été bientôt remplacé par le peso (mille escudos pour un peso), ce qui porte la perte de valeur à un million de fois, rappelez-moi d’écrire à la RAE.

 Si je m’attarde sur le petit mot “crecer” c’est parce qu’il concentre toute la capacité programmatique des baladins qui aspirent au pouvoir politique au Chili, ce qui est la preuve irrémédiable du caractère farfelu de leur message.

 Une acromégalie gonadique a dû les traumatiser dans leur enfance. Ces types vendent de la pommade, ils en vivent, comme l’inventeur de l’arnaque au tonton malade, mais en moins drôle. Felipe m’a fait remarquer à juste titre qu’on ne peut pas faire la différence entre l’un et l’autre, car il n’y a rien de plus semblable à un crétin progressiste qu’un crétin réactionnaire.

 Le premier est destiné à disparaître, tandis que le second est dans les douleurs de m’accouchement.

Il a un avenir, du moins en apparence, un peu comme Adolf en septembre 1919, lorsqu’il a rejoint le Deutsche Arbeiterpartei. Un an plus tard, le Führer le rebaptise Nationalsozialistische Deutsche Arbeiterpartei, le parti nazi pour les amis, et on a vu ce qu’on a vu.

Une publication liée aux “hommes de travail” (c’est ainsi qu’on appelle le capitaliste au Chili) s’efforce de nous introduire (c’est le terme approprié) auprès de l’Elon Musk chilien, enlevez votre chapeau et saluez.

Il s’agit d’un “chercheur” qui a pris en charge la coordination du programme économique d’un certain Kaiser, avec pour mission de ramener l’impôt sur les sociétés de 27% à 15% et de réduire le nombre de ministères de 25 à seulement 9.

L’empereur, je veux dire Kaiser (en allemand Kaiser = empereur), terminait sa énième relecture de Mein Kampf quand l’idée géniale lui est venue : ce n’est pas autre chose, c’est l’histoire du Troisième Reich que ce Kaiser connaît.

Il se souvient de Hjalmar Schacht, un escroc impérial (pendant la Première Guerre mondiale, Schacht avait été nommé administrateur économique des territoires occupés en Belgique, puis révoqué peu après par les autorités militaires : il avait contacté son ancien employeur, la Dresdner Bank, pour recevoir les fonds du gouvernement belge saisis par les forces allemandes...) qui aida Adolf Hitler à collecter des fonds pour ses campagnes politiques. En 1932, Schacht organise une pétition d’industriels pour exiger la nomination d’Hitler au poste de chancelier. Une fois au pouvoir, Hitler nomme Schacht président de la Reichsbank puis ministre de l’Économie en 1934.

Kaiser a donc trouvé son Hjalmar Schacht, un certain Victor Espinosa, un “chercheur” qui, jusqu’à présent, n’a su qu’enthousiasmer Kaiser.

La publication affirme qu’ « il a un profil académique", ce qui ne veut pas dire grand-chose ou tout dire : c’est un gugusse inexpérimenté. La même publication déclare : "Il a fait ses études de troisième cycle en Espagne et n’a pas occupé de postes à responsabilité dans l’État ou dans le monde privé. Il a été formé par l’un des mentors intellectuels de Milei ».

En clair, c’est un idiot qui n’a jamais travaillé pour personne, ce qui, en économie, n’est pas un obstacle à l’ascension vers les sommets.

Espinosa reconnaît qu’il appartient à une école de pensée où le travail, c’est les autres, puisque ces génies - et leurs employeurs - ne font que penser. Son mémoire de fin d’études s’intitulait « Ludwig von Mises et le rôle de l’économiste : une approche historique ».

Ludwig von Mises est le père putatif de Milei, Musk, Trump et d’autres fanatiques talentueux de la croissance du profit tels que Milton Friedman et Friedrich Hayek. Le truc de Ludwig von Mises, c’est le raisonnement pragmatique :

* s’ils ou elles tètent, ce sont des mammifères....

* s’ils rongent, ce sont des rongeurs

* s’ils pratiquent l’onanisme, ce sont des économistes...

Ludwig von Mises a prononcé des phrases pour l’éternité, genre :

« L’économie de marché n’a besoin ni d’apologistes ni de propagandistes. ... Si vous cherchez un monument [à sa gloire], regardez autour de vous ».

Ludwig regardait vers La Dehesa [équivalent chilien d’Auteuil-Neuilly-Passy]...

Mais votre serviteur et ses lecteurs regardent surtout les favelas, les bidonvilles, les chabolas, les chozas the huts and shacks, die Strohhütten, трущобы.... Bref, nous regardons la misère générée par le marché libre d’une part, et la concentration inimaginable de la richesse entre quelques mains d’autre part.

Voulez-vous une autre citation de Ludwig von Mises ? La voici :

« Le système de production capitaliste est une démocratie économique dans laquelle chaque centime donne droit à un vote. Les consommateurs constituent le peuple souverain ».

Un consommateur comme Elon Musk, avec une fortune de 38 000 000 000 000 000 de cents de dollar, a droit à 38 milliards de voix. C’est pour cela qu’il est là où il est.

Et comme les “consommateurs” constituent le peuple souverain, les connards comme Donald Trump, Elon Musk, Jeff Bezos, Mark Zuckerberg et consorts... règnent sur le beau monde imaginé par Ludwig von Mises et ses épigones.

Regardez ce qui nous attend avec ce putain d’empereur néo-nazi, et son “chercheur” Victor Espinosa, on vous aura prévenus.

Espinosa rêve de jouer le rôle de Terminator, de supprimer l’impôt sur les sociétés, les ministères, les syndicats, le droit du travail, le salaire minimum, l’éducation publique, la santé publique, tout ce qui sent le service public et, surprise, même la Banque centrale. Ce n’est pas une plaisanterie :

« Espinosa s’est montré favorable à l’élimination de la Banque centrale. Dans une émission en continu, il a déclaré que « pour éliminer la Banque centrale et ne pas nous obliger à utiliser le peso, il faut modifier la Constitution. Et nous avons besoin d’une majorité de 4/7. Si nous avons ce quorum, ce sera merveilleux ».

Espinosa ne dit pas s’il veut utiliser le reichsmark ou une autre de ses inventions. Il pourrait tout aussi bien revenir au mode de paiement utilisé autrefois dans les campagnes chiliennes : la “galleta”[du français galette, aujourd’hui on dit cookie, NdT].

En attendant, le progressisme doit encore identifier son prochain traître, pardon, candidat.

Voilà où nous en sommes.


 NdT

Johannes Maximilian Kaiser Barents‐von Hohenhagen, 49 ans, n’a pas créé le parti national-socialiste, mais national-libertarien. Il se voit déjà élu président du Chili en novembre 2025, avec un programme à faire pâlir d’envie Javier Milei. Un exemple de ses positions : « qui ne contribue pas, on le déporte ». Dehors donc les Vénézuéliens, les Haïtiens et autres Boliviens, qui taillent les rosiers, font le ménage et la cuisine et cirent les chaussures de ces messieurs-dames de la haute…

 

 Herr Kaiser a défrayé la chronique lorsqu'il fut élu député par les followers de sa chaîne youtube il y a 4 ans. Il se vantait d'avoir suivi 7 cursus universitaires, de Santiago à Innsbruck en passant par Heidelberg, mais n'en avait mené aucun à bien.

 

HAGAI AMIT
“idf.farsi”, l’unité de l’armée israélienne chargée d’atteindre les Iraniens sur les médias sociaux
Rencontres du énième type

La guerre a amené des centaines de milliers de personnes à suivre la messagerie en persan de l’armée israélienne sur les médias sociaux. S’il y a une chose dont le personnel de l’unité est convaincu, c’est que « seul le peuple iranien renversera le régime »


Shamsian, “R.” et Pinhasi, photographiés au quartier général du porte-parole des FDI, à Ramat Aviv. Photo :  Eyal Toueg, Borna_Mirahmadian/Shutterstock

Hagai Amit, Haaretz, 20/2/2025
Traduit par Fausto GiudiceTlaxcala


« Vos prisonniers sont toujours entre nos mains, le Yémen est la honte de votre vie, le rugissement de l’Iran vous détruira, les autorités israéliennes vous ont trompés. Habitants de la maison de l’araignée, partez, et le plus tôt sera le mieux ».

J’ai montré ce texte au personnel de l’unité de langue persane du bureau du porte-parole des forces de défense israéliennes au début de la réunion que j’ai eue avec eux au début du mois. Le message était arrivé la veille au soir d’une adresse non identifiée. « Il s’agit apparemment d’une source iranienne, des pirates informatiques au nom des gardiens de la révolution », m’a-t-on dit à propos de la personne qui avait ciblé mon numéro de téléphone et qui essayait de m’influencer.

Mes interlocuteurs se sont toutefois indignés lorsque je leur ai demandé si les citoyens iraniens qui suivent leur messagerie ne ressentaient pas la même chose que moi lorsque je recevais un texte de ce genre : de la peur et de l’hostilité. Du point de vue du sergent-chef Kamal Pinhasi, qui dirige l’unité et est le porte-parole des FDI pour les médias persans, de la sergent-chef Shirly Shamsian, qui parle cette langue lors des discussions en ligne avec les citoyens iraniens, et du sergent de première classe R., qui est chargé du suivi des médias et des traductions (et qui préfère ne pas être identifié par son nom), le peuple iranien a soif des messages des FDI.

« Le meilleur sondage montrant que la majorité de la population iranienne s’oppose au régime a été la récente élection [présidentielle], à l’été 2024 », note Pinhasi. « Malgré toutes les pressions exercées par les gardiens de la révolution sur les partisans du régime pour qu’ils aillent voter, il a fallu un second tour pour décider de l’élection, et même là, seuls 39 % des électeurs éligibles se sont rendus aux urnes, et le candidat élu, Masoud Pezeshkian, a gagné de justesse - et on ne sait pas comment ils ont compté les bulletins de vote ».

Haut du formulaire

Bas du formulaire

« Je connais l’Iran [professionnellement] depuis 36 ans », poursuit-il, « et le gouvernement de ce pays n’a pas le soutien de plus de 20 % de la population ».

« La situation là-bas est tout simplement mauvaise », ajoute Shamsian. « Les coupures de courant sont fréquentes, et il en va de même pour l’eau et le gaz à usage domestique ».

Pinhasi : « Le peuple iranien attend la croissance économique depuis 46 ans, mais elle n’est pas au rendez-vous. Pendant cette période, ils sont restés coupés du monde, et cette coupure a eu pour effet qu’une grande partie [de la population] est également déçue par l’Occident. Lorsqu’ils se rendent aux urnes, ils se disent que s’ils ont le choix entre le terrible et le mauvais, ils voteront pour le mauvais ».

Pinhasi, Shamsian et R. sont tous nés en Iran. Pinhasi est arrivé en Israël en 1978, à l’âge de 15 ans, juste avant la révolution de l’ayatollah Khomeini ; Shamsian est arrivée en Israël en 1988, pendant la guerre Iran-Irak, à l’âge de 12 ans ; et R. est ici depuis l’âge de 11 ans, en 1989. Depuis le début de la guerre dans la bande de Gaza, ils dirigent l’unité, créée il y a cinq ans dans le but d’atteindre le public iranien par le biais des médias sociaux et de l’informer de la réalité de la situation telle qu’Israël la perçoit.

Ils travaillent sur X, Instagram et TikTok. « Nous sommes moins impliqués sur TikTok et beaucoup plus sur Instagram », explique Shamsian. Une fois par semaine, ils se mettent en ligne et tiennent une conversation ouverte avec les Iraniens qui les suivent sur l’une des plateformes.

Le compte Instagram de l’unité compte 220 000 followers et le compte TikTok environ 93 000. Ils soulignent que l’État bloque tous les médias sociaux étrangers, de sorte que les partisans iraniens doivent contourner les blocages de l’État au moyen d’un VPN ou d’une autre technologie, ce qui réduit la vitesse de navigation.

SERGIO RODRÍGUEZ GELFENSTEIN
De Bruxelles à Riyad en passant par Munich : huit jours qui ont ébranlé le monde (I)


Sergio Rodríguez Gelfenstein, 20-2-2025
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

Les développements internationaux ont pris un rythme extraordinairement rapide. J’ai consulté quelques collègues et nous avons conclu qu’il devenait difficile de suivre le mouvement des événements qui secouent, transforment et restructurent le système international à une vitesse inégalée au moins au cours des 80 dernières années. Ce qui est certain, c’est que le monde de l’après-guerre semble s’effondrer. Le consensus obtenu en 1945 à Yalta et à Potsdam vient de recevoir un coup fatal à Munich.


« Rendre l’Europe à nouveau petite » - Tom Janssen, Pays-Bas

Jetons un bref coup d’œil sur les événements de ces derniers jours pour confirmer cette affirmation qui reflète l’empreinte que l’administration Trump impose au monde :

12 février. Le président usaméricain a indiqué avoir eu un appel téléphonique “long et très productif” avec son homologue russe Vladimir Poutine. Il a déclaré que Poutine souhaitait la fin de la guerre en Ukraine et qu’il pensait qu’un cessez-le-feu interviendrait “dans un avenir assez proche”. Il s’agit de la première conversation connue entre les deux présidents depuis l’entrée en fonction de Trump le mois dernier.

12 février. Lors de sa réunion à Bruxelles avec les membres de l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN), le secrétaire usaméricain à la Défense, Pete Hegseth, a déclaré “directement et sans ambiguïté” que Washington n’accorderait plus la priorité à la sécurité de l’Europe et que la guerre entre l’Ukraine et la Russie “doit cesser”, sa priorité étant de sécuriser les frontières des USA et d’éviter une guerre avec la Chine.

Hegseth a affirmé que les réalités stratégiques actuelles empêchent les USA de rester le principal garant de la sécurité en Europe. Ces mêmes réalités imposent, selon le chef du Pentagone, une réduction des forces usaméricaines dans la région. La priorité pour Washington est de faire face à la Chine, qu’il a qualifiée de “concurrent majeur” parce qu’elle a la capacité et l’intention de menacer la sécurité nationale et les intérêts fondamentaux des USA dans la région indopacifique. Hegseth a souligné que la dissuasion d’un conflit avec la Chine dans le Pacifique était la mission la plus importante de son ministère. Il a reconnu la rareté des ressources et la nécessité de prendre des décisions difficiles pour garantir que le processus n’échoue pas.

Le secrétaire à la Défense a exhorté les alliés européens de l’OTAN à jouer un rôle actif. Il leur a dit sans ambages : « La Maison Blanche ne tolérera plus une relation déséquilibrée qui favorise la dépendance. Au lieu de cela, les relations américano-européennes se concentreront sur l’autonomisation des pays européens afin qu’ils prennent la responsabilité de leur propre sécurité ».

14 février. Le vice-président usaméricain J.D. Vance a prononcé un discours lors de la 61e conférence de Munich sur la sécurité, le 14 février, surprenant à la fois les participants et les alliés européens de Washington. Dans son discours, le haut fonctionnaire usaméricain a déclaré : « La menace qui m’inquiète le plus pour l’Europe n’est ni la Russie, ni la Chine, ni aucun autre acteur extérieur. Ce qui m’inquiète, c’est la menace qui vient de l’intérieur, le recul de l’Europe par rapport à certaines de ses valeurs les plus fondamentales, des valeurs partagées avec les USA ». Ignorant la perplexité suscitée par ses propos, il a ajouté que « lorsque nous voyons des tribunaux européens annuler des élections, avec des hauts fonctionnaires menaçant d’en annuler d’autres, nous devons nous demander si nous nous imposons des normes suffisamment élevées ».

14 février. Le sénateur républicain du Texas, John Cornyn, a déclaré qu’il espérait que les Européens reconnaîtraient que leur privilège de profiter des USA avait pris fin, ajoutant : « Ils en ont bien profité, et cette époque est révolue ».

14 février. Keir Giles, chercheur principal au sein du groupe de réflexion Chatham House, basé à Londres, a déclaré à NBC News que l’Europe a ignoré des décennies de signes indiquant que la patience des USA s’était “épuisée” face à la dépendance de l’Europe à l’égard de la défense usaméricaine.

14 février. Patrick Wintour, rédacteur diplomatique du journal britannique The Guardian a noté que les remarques de M. Vance démontraient que « le différend préexistant entre l’Europe et les USA ne portait plus sur le partage des charges militaires ou la nature de la future menace de sécurité posée par la Russie, mais sur quelque chose de plus fondamental : le partenariat ».

16 février. Dans un article intitulé « Donald Trump’s assault on Europe », le journal en ligne londonien The Economist note que les dirigeants européens participant à la conférence de Munich ont été “stupéfaits” de voir l’administration Trump « saborder des décennies de diplomatie qui ont fait de l’OTAN l’alliance militaire la plus réussie de l’histoire moderne ».

18 février. Le Premier ministre hongrois déclare : « L’Union européenne (UE) a été “piégée dans la guerre” et apprendra les résultats des négociations sur l’Ukraine par la presse ».

18 février. Le Premier ministre polonais Donald Tusk a déclaré que le sommet d’urgence de l’UE à Paris n’avait pris aucune décision sur le conflit ukrainien. Les contradictions entre les dirigeants réunis ont empêché l’émergence d’une solution commune. Le site politico indique qu’à l’issue des trois heures et demie de réunion, leurs réactions ont été “décevantes”.

19 février. Une réunion à Riyad, capitale de l’Arabie saoudite, entre des délégations de haut niveau de la Russie et des USA s’est achevée avec succès après un dialogue fluide et sans heurts, selon le conseiller présidentiel du Kremlin, Yuri Ushakov, qui a participé à la réunion avec le ministre des Affaires étrangères, Sergeï Lavrov. Ushakov a souligné qu’au cours des discussions, toutes les questions ont été examinées sérieusement et en profondeur, et qu’un consensus a été atteint pour faire avancer les relations bilatérales.

19 février. Évoquant la réaction de l’Ukraine et de son dirigeant Volodymir Zelensky aux pourparlers entre les USA et la Russie à Riyad, en Arabie saoudite, le président Trump a déclaré : 3Pensez-y : un humoriste au succès modeste, Volodymir Zelensky, a convaincu les États-Unis d’Amérique de dépenser 350 milliards de dollars pour entrer dans une guerre ingagnable, qui n’aurait jamais dû commencer, mais une guerre que lui, sans les USA et Trump, ne sera jamais en mesure de résoudre. L’Amérique a dépensé 200 milliards de dollars de plus que l’Europe, et l’argent de l’Europe est garanti, alors que l’Amérique n’aura rien en retour. Pourquoi Joe Biden endormi n’a-t-il pas exigé l’égalité, puisque cette guerre est tellement plus importante pour l’Europe que pour nous ? Nous avons un grand et bel océan qui nous sépare. En outre, Zelensky admet que la moitié de l’argent que nous lui envoyons a disparu. Il refuse d’organiser des élections, sa cote de popularité est très basse et la seule chose pour laquelle il était doué, c’était de manipuler Biden “comme un violon”. Zelensky est un dictateur non élu qui doit agir vite sous peine de ne plus avoir de pays. Pendant ce temps, nous négocions avec succès la fin de la guerre avec la Russie, ce que tout le monde admet que seuls Trump et l’administration Trump peuvent faire. Biden n’a jamais essayé, l’Europe n’a pas réussi à apporter la paix et Zelensky veut probablement continuer à faire tourner le jackpot. J’aime l’Ukraine, mais Zelensky a fait un travail terrible, son pays est en lambeaux et des millions de personnes sont mortes inutilement. Et ainsi de suite... »

Pour paraphraser le titre du célèbre livre de John Reed, on pourrait parler des “huit jours qui ont ébranlé le monde”. Les Européens sont abasourdis et, comme l’a montré leur sommet de Paris, totalement désunis et sans réaction. Ils sont venus à Munich en s’attendant à ce que Vance parle des questions de sécurité et de défense pour le bloc européen, mais au lieu de cela, il a “attaqué violemment” les alliés de Washington en dénonçant “la désinformation, la mésinformation et les droits à la liberté d’expression”. Selon RT, « un haut fonctionnaire européen qui a parlé à Foreign Policy sous le couvert de l’anonymat, a déclaré que M. Vance « a fait en Allemagne quelque chose que les Allemands savent très bien faire : donner des leçons aux autres ».

La Russie n’a été ni surprise ni désarçonnée. Depuis 2014, avec patience et une vision à long terme, elle a élaboré un plan qu’elle applique à la lettre. Il y a quelques mois, le président Poutine a exposé sa conception de la paix et son idée d’un nouvel ordre international. Lors du forum « Interconnexion des temps et des civilisations, base de la paix et du développement » qui s’est tenu à Achgabat, capitale du Turkménistan, en octobre 2024, il a expliqué : « ...La paix mondiale ne peut être atteinte qu’en prenant en compte les intérêts de tous les peuples de la planète ». Dans le discours qu’il a prononcé à cette occasion, le président russe a fait savoir que son pays était convaincu que « la paix universelle et le développement global ne peuvent être assurés qu’en tenant compte des points de vue de chaque peuple, tout en respectant le droit de chaque État à son propre cours souverain, à sa propre vision du monde, à ses propres traditions et idées religieuses », notant que la majorité des États du monde prônaient « une répartition plus équitable des bénéfices ».

C’est sur cette base que les dirigeants russes et usaméricains ont pu se parler au téléphone la semaine dernière et convenir de mettre fin à une période “absolument anormale” des relations entre les deux pays, au cours de laquelle il n’y avait pas de contacts mutuels.

À SUIVRE

 

 

 


20/02/2025

GIDEON LEVY
Il n’y a aucun pavé de la mémoire à Gaza pour honorer la mémoire des Palestiniens morts

Gideon Levy, Haaretz, 19/02/2025
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

Dans le quartier berlinois de Charlottenburg, a écrit Naama Riba (Haaretz en hébreu, mardi), il y a une rue avec des dizaines de Stolpersteine, ou pavés de la mémoire, de couleur dorée, incrustés dans le trottoir en mémoire des Juifs qui y ont vécu autrefois. Le droit d’Israël à exister, a fait valoir Riba, découle des événements que ces pierres commémorent.


Les « Stolpersteine », des “pierres sur lesquelles on trébuche”, commémorent les dernières résidences volontaires de Juifs tués par les nazis. Photo Markus Schreiber/AP Photo

En revanche, dans le quartier de Rimal, à Gaza, il ne reste plus de trottoirs, seulement une dévastation totale. L’hôpital Al-Shifa de la ville a également été détruit, ainsi que des immeubles d’habitation, des écoles et des hôtels. Il n’y a pas de « Stolpersteine » dorés à Rimal pour honorer la mémoire des centaines de ses résidents palestiniens tués pendant la guerre. Si de telles pierres existaient, elles pourraient témoigner de la lutte du peuple palestinien pour un État qui le protégerait.

Mais Riba est aveugle aux ruines de Rimal et de Gaza. Elle ne voit que la façon dont les Palestiniens traitent les personnes LGBTQ+. Dans son éditorial, elle critique trois auteurs de Haaretz : Hanin Majadli, Michael Sfard et moi-même, pour avoir remis en question la légitimité de l’existence d’Israël, un État dont la justification – affirme-t-elle – réside dans les pierres de la rue Giesebrecht à Berlin-Charlottenburg.

Je n’ai jamais remis en question le droit d’Israël à exister. Ce que je remets en question, en revanche, c’est son droit d’agir comme il le fait et de commettre les atrocités qu’il commet. Ce sont les actions d’Israël qui remettent en question sa légitimité.

Depuis un siècle, les Palestiniens subissent des persécutions, des dépossessions, des meurtres et des destructions incessants. Aucun meurtre, pas même celui de l’arrière-grand-père de Riba, tué par des Arabes alors qu’il se rendait à la synagogue de Haïfa, ne peut justifier cela.

MICHAEL SFARD
Grâce à son régime, Israël est en train de perdre la justification de son existence

 L’abandon de ses citoyens en captivité au profit de la poursuite de l’idéologie messianique de la droite radicale, en plus de la répression effrénée des détracteurs du gouvernement, a fait d’Israël un État en faillite.

Michael Sfard , Haaretz,  18/2/2025
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

Israël est en train de perdre progressivement la justification de son existence. D’un point de vue démocratique et humaniste, un État n’est pas une fin en soi, mais plutôt un moyen de réaliser les droits de ses citoyens et sujets. Tout comme une coopérative, l’État ne possède rien en propre ; tout ce qu’il a appartient à ses membres, et tous ses pouvoirs en découlent.

Un État est une entité politique destinée à servir les êtres humains. S’il ne le fait pas, surtout s’il aggrave leur situation, la justification de son existence s’évapore.

Il existe des États dont les régimes sapent cet objectif, des États qui ne servent que la classe dirigeante, qui exploitent ceux qui n’en font pas partie et sont indifférents au bien-être de leurs sujets. Ce sont des États corrompus, criminels, comme une banque qui vole les fonds de ses clients.

Il n’y a aucune justification à leur existence. Tout flirt avec le concept de l’État comme une fin en soi – comme une entité ayant son propre but plutôt qu’un moyen – est un flirt dangereux avec le fascisme. Cela peut sembler innocent au début, mais cela conduit finalement à des goulags où les opposants au régime sont emprisonnés.

L’objectif d’un État qui se dit démocratique est de créer un environnement juridique, politique, culturel, économique et sécuritaire qui permette à ses sujets de réaliser leurs talents, d’écrire librement leur propre histoire, d’exercer pleinement leur autonomie et de rechercher leur bonheur. Un tel environnement n’est possible que sur une base normative qui sanctifie les libertés fondamentales, la dignité humaine et l’égalité.

C’est pourquoi les droits humains et la démocratie sont indissociables. Il ne peut y avoir de véritable démocratie sans un système de gouvernance qui place au cœur de ses préoccupations la protection des droits fondamentaux de chaque individu sous l’autorité de l’État. De même, il n’y a pas de droits humains sans une structure politique fondée sur des valeurs démocratiques telles que des législateurs élus, la séparation des pouvoirs et l’État de droit appliqué de manière égale à tous. Cela devrait être aussi simple que cela. C’est ce que l’on devrait enseigner aux enfants en première année. Mais ce n’est pas ce qui se passe autour de nous, et ce n’est pas ce que l’on enseigne à nos enfants à l’école.


Patrick Chappatte, Le Temps, Genève

Le projet israélien prétendait établir une démocratie libérale, mais aujourd’hui, il est loin de cet idéal et continue de se déplacer rapidement dans la direction opposée chaque jour qui passe.

JACK KHOURY
Mahmoud Abbas limoge le haut responsable de l’Autorité palestinienne qui s’est opposé à la réduction des paiements aux familles des Palestiniens emprisonnés par Israël

Qaddura Fares s’est opposé à l’ordre donné la semaine dernière par le président palestinien de modifier la manière dont sont calculés les paiements aux familles de Palestiniens emprisonnés en Israël pour des infractions liées au “terrorisme”.

 Jack Khoury, Haaretz, 19/2/2025
Traduit par Fausto GiudiceTlaxcala

Le président palestinien Mahmoud Abbas a limogé le chef de sa Commission des affaires des détenus et des anciens détenus parce qu’il s’était opposé à un décret limitant les paiements reçus par les familles des Palestiniens emprisonnés en Israël.

Kamal Sharaf

En vertu du décret présidentiel qu’Abbas a publié la semaine dernière, les critères de paiement aux Palestiniens emprisonnés en Israël pour des infractions “terroristes” vont changer. Auparavant, le montant des allocations versées aux familles des prisonniers était fonction de la durée de leur peine, les paiements les plus élevés étant versés aux familles de ceux qui purgeaient les peines les plus longues. Désormais, les paiements seront basés sur la situation socio-économique des familles.


Mais Qaddura Fares, le chef de la commission et un responsable de longue date du parti Fatah d’Abbas, a fustigé le décret.

« Il n’est pas logique que les droits des prisonniers et des martyrs soient soumis à de nouveaux critères administratifs ou financiers qui ignorent l’aspect national de cette question », a-t-il déclaré lors d’une conférence de presse qu’il a convoquée la semaine dernière. Il a ajouté que le décret pourrait nuire à de larges pans de la société palestinienne et a exhorté Abbas à revoir sa décision en consultation avec les institutions nationales palestiniennes.

D’autres membres du Fatah ont exprimé des critiques similaires à l’égard du nouveau décret.