المقالات بلغتها الأصلية Originaux Originals Originales

Affichage des articles dont le libellé est Français. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est Français. Afficher tous les articles

22/07/2025

RUWAIDA AMER
Nous crevons de faim

Mon corps est à bout. Ma mère s’effondre d’épuisement. Mon cousin défie la mort chaque jour pour obtenir un peu d’aide. Les enfants de Gaza meurent sous nos yeux, et nous sommes impuissants à les aider.

Ruwaida Amer  ,+972 Magazine, 21/7/2025
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

Ruwaida Kamal Amer est une journaliste, productrice et réalisatrice (sur)vivant à Gaza. Elle a précédemment travaillé comme enseignante de sciences. Après le déclenchement de la guerre, elle est restée avec sa famille à Gaza, d’où elle rend compte du génocide en cours et de ses effets dévastateurs sur la population civile. Son travail a été publié par plusieurs médias internationaux tels qu’Al Jazeera English, Euronews et ABC News. Elle écrit régulièrement pour le magazine +972 sur la réalité quotidienne de la vie dans Gaza assiégée et sur la crise humanitaire, et elle met souvent en lumière des histoires qui sont souvent ignorées par les médias grand public.

 


Des Palestiniens tentent de recevoir un repas chaud préparé par des bénévoles, à Khan Younès, dans le sud de la bande de Gaza, le 20 juin 2025. (Abed Rahim Khatib/Flash90)

J’ai tellement faim.

Je n’ai jamais pensé ces mots comme je les pense aujourd’hui. Ils véhiculent une sorte d’humiliation que je ne peux pas vraiment décrire. À chaque instant, je me surprends à souhaiter : « Si seulement ce n’était qu’un cauchemar. Si seulement je pouvais me réveiller et que tout soit fini. »

Depuis mai dernier, après avoir été contrainte de fuir mon foyer  et trouver refuge chez des proches dans le camp de réfugiés de Khan Younès, j’ai entendu ces mêmes mots prononcés par d’innombrables personnes autour de moi. Ici, la faim est vécue comme une atteinte à notre dignité, une cruelle contradiction dans un monde qui se targue de progrès et d’innovation.

Chaque matin, nous nous réveillons avec une seule idée en tête : trouver quelque chose à manger. Je pense immédiatement à notre mère malade, qui a subi une opération de la colonne vertébrale il y a deux semaines et qui a maintenant besoin de se nourrir pour se rétablir. Nous n’avons rien à lui offrir.

Et puis il y a ma petite nièce et mon petit neveu, Rital, 6 ans, et Adam, 4 ans, qui réclament sans cesse du pain. Et nous, les adultes, nous essayons de résister à notre propre faim afin de garder les miettes pour les enfants et les personnes âgées.

Depuis qu’Israël a imposé un blocus total  sur Gaza début mars (qui n’a été que légèrement assoupli fin mai), nous n’avons pas mangé de viande, d’œufs ou de poisson. En fait, nous avons dû renoncer à près de 80 % de notre alimentation habituelle. Nos corps sont à bout. Nous nous sentons constamment faibles, désorientés et déséquilibrés. Nous sommes facilement irritables, mais la plupart du temps, nous restons silencieux. Parler demande trop d’énergie.

 

Huda Abu Al-Naja, 12 ans, accompagnée de sa mère, reçoit un traitement contre la malnutrition à l’hôpital Nasser de Khan Younès, dans le sud de la bande de Gaza, le 25 juin 2025. (Doaa Albaz/Activestills)

Nous essayons d’acheter tout ce qui est disponible sur les marchés, mais les prix deviennent impossibles. Un kilo de tomates coûte désormais 90 NIS (= 23€). Les concombres sont à 70 NIS le kilo (= 18€). Un kilo de farine coûte 150 NIS (= 39€). Ces chiffres semblent scandaleux et cruels.

Nous survivons avec un seul repas par jour : généralement du pain, fait avec la farine que nous avons réussi à trouver. Si nous avons de la chance, le déjeuner comprend parfois un peu de riz, mais cela ne suffit pas à nous rassasier. Nous essayons de mettre un peu de nourriture de côté pour ma mère, peut-être quelques légumes, mais ce n’est jamais assez. La plupart du temps, elle est trop faible pour se tenir debout, trop épuisée pour même prier.

Nous ne sortons presque plus de chez nous, de peur que nos jambes ne nous lâchent. C’est déjà arrivé à ma sœur : alors qu’elle cherchait dans les rues quelque chose, n’importe quoi, pour nourrir ses enfants, elle s’est soudainement effondrée sur le sol. Son corps n’avait même plus la force de rester debout.

Nous avons commencé à prendre conscience de la gravité de la crise alimentaire lorsque le boulanger Abou Hussein, connu de tous dans le camp, a commencé à réduire son activité. Il cuisait auparavant pour des dizaines de familles chaque jour, dont la nôtre, qui n’avons plus ni gaz ni électricité pour cuisiner. Du matin au soir, ses fours à bois fonctionnaient sans interruption.

Mais récemment, il a été contraint de réduire progressivement son temps de travail hebdomadaire. Ma sœur rentrait à la maison et disait : « Abou Hussein est fermé. Il travaillera peut-être demain. » Aujourd’hui, trouver de la pâte et de la farine est devenu une véritable épreuve.

Trois générations en proie à la famine

Dans le camp, j’ai compris la véritable cruauté de ce génocide : la promiscuité étouffante, la foule de réfugiés chassés de leurs maisons et les innombrables récits de famine.

 

Une femme palestinienne déplacée nourrit des enfants à Al-Mawasi, dans le sud de la bande de Gaza, le 13 juillet 2025. (Doaa Albaz/Activestills)

Je vis actuellement chez ma tante, qui nous a recueillis après notre déplacement et nous héberge depuis deux mois. Comme presque tous les autres bâtiments du camp, sa maison a été presque entièrement détruite par les attaques israéliennes. Les frères et sœurs de ma tante ont travaillé sans relâche pour réparer ce qu’ils pouvaient et ont réussi à rendre une pièce habitable.

La maison déborde de petits-enfants, chacun luttant contre la faim. Mon cousin aîné, Mahmoud, est père de quatre d’entre eux. Il a lui-même perdu près de 40 kilos au cours des derniers mois. Les signes de malnutrition sont visibles partout sur son visage pâle et son corps émacié.

Chaque jour avant l’aube, Mahmoud se rend dans les centres de distribution d’aide humanitaire gérés par les USA, risquant sa vie  pour essayer de ramener de quoi manger à ses enfants affamés. Depuis que je suis arrivé chez eux, il me raconte jour après jour les mêmes histoires poignantes.

« Aujourd’hui, j’ai rampé à quatre pattes parmi une foule de milliers de personnes », m’a-t-il récemment confié en me montrant un sac rempli de restes de nourriture qu’il avait réussi à récupérer. « J’ai dû ramasser tout ce qui était tombé par terre : des lentilles, du riz, des pois chiches, des pâtes, même du sel. J’ai mal partout où j’ai été piétiné, mais je dois le faire pour mes enfants. Je ne supporte pas d’entendre leurs cris de faim. »

Un jour, Mahmoud est revenu les mains vides. Il était livide et semblait sur le point de s’effondrer. Il m’a raconté que l’armée israélienne avait ouvert le feu sans avertissement. « Le sang d’un jeune homme à côté de moi a éclaboussé mes vêtements, m’a-t-il dit. Pendant un instant, j’ai cru que c’était moi qui avais été touché. Je me suis figé, persuadé que la balle était dans mon corps. »

Le jeune homme s’est effondré juste devant lui, mais Mahmoud n’a pas pu s’arrêter pour lui venir en aide. « J’ai couru plus de six kilomètres sans me retourner. Mes enfants ont faim et attendent que je leur ramène à manger », a-t-il déclaré d’une voix brisée, « mais ils ne seront pas contents si je rentre mort ».

 
Un Palestinien blessé récupère de l’aide humanitaire distribuée par des organisations internationales à Gaza, dans le nord de la bande de Gaza, le 26 juin 2025. (Yousef Zaanoun/Activestills)

Mon autre cousin, Khader, a 28 ans. Il a une fille de 2 ans et sa femme est enceinte. Il est rongé par l’inquiétude pour leur enfant à naître, qui doit venir au monde dans deux mois. Sa femme ne mange pas correctement et chaque jour, il reste assis en silence, tourmenté par les mêmes questions : Cette famine va-t-elle nuire à ma femme ? L’enfant qu’elle mettra au monde sera-t-il en bonne santé ou malade ?

Sa fille de deux ans, Sham, pleure toute la journée parce qu’elle a faim. Elle réclame du pain, n’importe quoi d’autre que les aliments insipides et lourds à digérer qui composent son régime quotidien, à savoir du riz, des lentilles et des haricots, qui lui ont donné la diarrhée à plusieurs reprises.

Un jour, une amie de Khader lui a donné une poignée de raisins pour elle. C’était un petit miracle. Khader s’est agenouillé à côté de Sham et lui a offert les raisins, mais elle les a simplement regardés, jouant avec eux dans ses petites mains et refusant de les manger. Elle ne les reconnaissait pas : en deux ans de vie à Gaza, elle n’avait jamais vu de raisins.

Ce n’est que lorsque son père en a mis un dans sa bouche et lui a souri qu’elle l’a imité avec hésitation. Elle a mâché. Puis elle a ri.

Les corps s’éteignent

Je me tiens souvent à la porte de la maison, à regarder les enfants du camp. Ils passent la plupart de leur temps assis par terre, le regard vide, fixant les passants. Quand je demande à l’un d’eux de m’acheter une carte Internet pour que je puisse travailler ou appeler ma nièce depuis la maison du voisin, ils me répondent d’une voix faible et fatiguée. Ils me disent qu’ils ont faim. Qu’ils n’ont pas mangé de pain depuis des jours.

Je n’ai que 30 ans, mais je ne suis plus la femme énergique que j’étais autrefois. Avant, je travaillais de longues heures. entre l’enseignement et le journalisme, mais depuis que cette guerre a commencé, je n’ai pas eu un instant de répit. Je jongle entre des tâches ménagères épuisantes — prendre soin de ma mère et de ma famille — tout en essayant simultanément de continuer à documenter et à rédiger  à propos de tout ce qui se passe autour de moi.

 

Une femme palestinienne déplacée prépare du pain sous sa tente, à Al-Mawasi, dans le sud de la bande de Gaza, le 13 juillet 2025. (Doaa Albaz/Activestills)

Mais depuis environ un mois, je ne suis plus capable de suivre l’actualité. Je n’arrive plus à me concentrer. Mon corps est à bout. Je souffre d’anémie après avoir mangé exclusivement des lentilles et d’autres légumineuses pendant des mois. Et depuis deux jours, je ne peux plus avaler à cause d’une grave inflammation de la gorge, conséquence de ma consommation excessive de dukkah et de piments rouges pour tenter d’apaiser ma faim.

Mahmoud, un photographe de 28 ans qui travaille avec moi sur des reportages vidéo, est également en difficulté. « Je n’ai rien mangé depuis deux jours, à part de la soupe », m’a-t-il récemment confié. « Je n’ai plus la force de travailler. » Personne n’en a la force. Travailler pendant un génocide exige une force impossible à maintenir. La famine a paralysé la productivité de tous les travailleurs de Gaza.

Hier, j’ai accompagné ma mère à l’hôpital Nasser pour une séance de kinésithérapie après son opération. Sur le chemin, nous avons vu des dizaines de personnes qui ne pouvaient pas marcher plus de quelques mètres sans devoir s’arrêter pour se reposer. Ma mère était dans le même état : ses jambes étaient trop faibles pour la porter. Elle s’est assise sur une chaise en plastique au bord de la route, rassemblant le peu d’énergie qu’elle pouvait pour continuer.

Alors que nous continuions à marcher, nous avons entendu des cris. Des jeunes hommes et femmes couraient en criant de joie : « Il y a des camions de farine dans la rue ! » Une foule immense s’était formée. Les gens couraient désespérément vers les camions pour tenter d’obtenir un sac de farine.

C’était le chaos. Personne n’escortait les camions pour s’assurer que tout le monde puisse obtenir sa part en toute sécurité. Au lieu de cela, nous avons vu la foule se précipiter vers des zones dangereuses contrôlées par l’armée israélienne, juste pour obtenir de la farine.

Certaines personnes sont revenues avec des sacs. D’autres ont été tuées. Nous avons vu des corps emportés sur les épaules d’hommes, abattus à bout portant là où l’aide était censée leur sauver la vie.

Des Palestiniens transportent un homme blessé par des tirs israéliens alors qu’il tentait d’obtenir de l’aide alimentaire dans la rue Al-Rashid, au nord de la ville de Gaza, le 16 juin 2025. (Yousef Zaanoun/ActiveStills)

18 morts de faim en 24 heures

Après la séance de thérapie, nous avons quitté l’hôpital et sommes passées devant des femmes qui pleuraient sur leurs enfants affamés, mourant sous nos yeux. Une femme, Amina Badir, hurlait en serrant son enfant de 3 ans dans ses bras.

« Dites-moi comment sauver ma fille Rahaf de la mort », s’écria-t-elle. « Depuis une semaine, elle ne mange qu’une cuillère de lentilles par jour. Elle souffre de malnutrition. Il n’y a pas de traitement, pas de lait à l’hôpital. Ils lui ont retiré son droit à la vie. Je vois la mort dans ses yeux. »

Selon le ministère de la Santé à Gaza, le nombre de morts dus à la faim et à la malnutrition depuis le 7 octobre a augmenté  à 86 personnes, dont 76 enfants. Hier, il a  signalé  que 18 personnes étaient mortes de faim au cours des dernières 24 heures seulement. Le personnel médical a tenu un piquet de protestation à l’hôpital Nasser pour demander l’intervention internationale avant que davantage de personnes ne meurent de faim.

Je n’ai pas trouvé de taxi pour nous ramener à la maison. Ma mère a attendu à la porte de l’hôpital pendant que je cherchais un moyen de transport, mais le carburant est rare et les taxis sont pratiquement inexistants. J’ai passé une heure entière à essayer.

Quand je suis revenue, j’étais étourdie et faible. Je me suis effondrée. J’ai essayé de rester forte pour ma mère, mais il n’y avait personne d’autre avec nous. Autour de moi, je voyais des gens s’évanouir partout. Un homme m’a dit : « S’il y avait eu de la nourriture convenable, ta mère ne serait pas tombée aussi malade. »

Nous essayons tous de nous réconforter mutuellement dans cette famine sans fin. Sur Facebook, les gens expriment leur colère, publiant post après post sur la politique d’affamement menée par Israël qui a mis Gaza à genoux. Nous ne pouvons plus faire les choses les plus élémentaires que les gens font chaque jour partout dans le monde. La faim nous a tout pris.

ODED CARMELI
Quand les Israéliens ont-ils cessé de lire des livres ?

En Israël, un livre salué par la critique peut se vendre à 200 exemplaires, voire un seul. Les lecteurs ne s’intéressent plus au célèbre romancier David Grossman : ils préfèrent la littérature érotique et la propagande de droite.


Lire tout en tenant un parapluie en équilibre et en flottant dans la mer Morte, au début du XXe siècle. Photo : Bibliothèque du Congrès, Science Photo Library

Oded Carmeli, Haaretz, 20/7/2021
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

Oded Carmeli (Kfar Saba, 1985) est un poète, journaliste et éditeur israélien vivant à Tel Aviv. En 2006, il a cofondéKetem, un fanzine littéraire avant-gardiste (2006-2008), ainsi que le premier Festival de poésie de Tel Aviv (2007). Il travaille actuellement comme rédacteur et écrit pour plusieurs journaux et magazines, dont Hava ALehaba (Allons vers l’avenir.), fondée en 2011, à laquelle est rattachée une maison d’édition, Hava Laor, créée en 2015. Carmeli a remporté le prix « Poetry for the Road » de Tel Aviv en 2008.Bibliographie


 Si vous visitez la bibliothèque publique Beit Ariela à Tel Aviv, vous n’en croirez pas vos yeux. L’endroit est bondé. La salle de lecture est pleine à craquer, la salle d’étude est bondée, et n’espérez pas trouver une place à une table dans la bibliothèque Rambam. Mais comme dans le sketch « Cheese Shop » des Monty Python, il manque une chose : les livres.

De nombreuses autres formes d’activité humaine s’y déroulent. Les architectes dessinent, les avocats tamponnent des documents, les monteurs vidéo montent des films. Ils font tout sauf lire des livres.

J’ai vu un homme en chemise déchirée s’approcher d’une étagère et en sortir un gros ouvrage intitulé « Encyclopédie des idées ». « Waouh, me suis-je dit, voilà quelqu’un qui aime approfondir ses connaissances ! » Mais il a posé le livre à plat et a placé son ordinateur portable dessus. Il avait raison. C’est mieux pour les articulations quand le clavier est surélevé.

Bas du formulaire

Il y a peu, la bibliothèque a publié une annonce sur Facebook (je pense que la municipalité de Tel Aviv bat tous les autres gouvernements locaux du monde en matière de publicités par habitant). La vidéo montre un homme qui s’approche d’une bibliothécaire et lui demande : « Avez-vous le nouveau livre de... » Mais la bibliothécaire l’interrompt : « Oh ! Les livres, c’est un bon début. Laissez-moi vous montrer ce que nous avons d’autre à la bibliothèque. »

Elle lui montre ensuite des choses  comme un studio de podcast et une imprimante 3D. Et quand le pauvre garçon lui rappelle : « Mais tu m’avais promis de me prêter ce livre », elle lui propose des conférences, des ateliers et des spectacles. J’avais envie de crier : « Donne-lui ce livre ! Ce garçon veut un livre ! Il est la preuve vivante que quelqu’un veut encore lire des livres ! »


Des visiteurs travaillant sur leurs ordinateurs portables à la Bibliothèque nationale d’Israël à Jérusalem. Photo Yahel Gazit

• • •

Un bon livre publié par un bon éditeur et bénéficiant de bonnes critiques se vend à environ 500 exemplaires de nos jours (oui, ça inclut les livres électroniques et les livres audio). Un livre plus populaire se vendra à 1 000 exemplaires, et un best-seller pourra atteindre les 10 000 exemplaires.

Il y a dix ans, un livre ordinaire se vendait à 1 000 exemplaires, un livre à succès à quelques milliers et un best-seller atteignait les dizaines de milliers. Mais la population de lecteurs a diminué. Israël connaît une explosion démographique, mais l’Israël intellectuel est en voie d’extinction.

En réalité, un livre encensé par la critique peut se vendre à 200 ou 300 exemplaires. Et un livre qui fait la une des journaux du week-end peut ne pas se vendre à un seul exemplaire ce week-end-là.

• • •

Selon le ministère de la Culture, 74 % de la population dans la colonie d’Efrat, en Cisjordanie ont emprunté des livres à leur bibliothèque locale en 2022, contre seulement 8 % à Tel Aviv. Dans la colonie de Kiryat Arba, 71 % des habitants étaient abonnés à une bibliothèque, contre 10 % à Kfar Sava.

Dans la colonie d’Elkana, ce chiffre était de 62 % ; à Metula, dans le nord, il était de 13 %. Tout comme dans les unités d’élite de l’armée, chaque année, on voit de plus en plus de personnes portant la kippa dans les bibliothèques, les librairies et les salons du livre.

• • •

Chaque année, des sondages sur la lecture sont publiés pendant la Semaine du livre hébreu. Par exemple, le quotidien Israel Hayom a publié une enquête montrant que l’année dernière, 51 % des Israéliens ont lu entre un et cinq livres, 18 % entre six et dix, 10 % entre onze et vingt, 19 % plus de vingt, et 2 % ont donné la réponse étrange : « Je ne m’en souviens pas ».

Mais les sondages mentent. Ou plutôt, les personnes interrogées mentent. Il n’est pas agréable d’admettre son ignorance. Comment le sais-je ? Parce que si 51 % des Israéliens lisaient réellement entre un et cinq livres par an, nous, les éditeurs, serions millionnaires.

Pour savoir combien lisent réellement les Israéliens, il faut creuser profondément dans les données fournies par le Bureau central des statistiques. En 2022, les dépenses moyennes des ménages en Israël s’élevaient à 17 600 shekels (4 490€) par mois. Sur ce montant, les ménages consacraient en moyenne 22 shekels [=5,61€] à l’achat de livres, soit un peu plus 0,1%.

En 2003, ces chiffres étaient respectivement de 10 139 shekels [=2587€] et 19,1 shekels [=4,87€], soit près de 0,2%. En bref, les Israéliens dépensent aujourd’hui deux fois moins pour les livres qu’il y a vingt ans.

Étant donné que le prix moyen d’un livre neuf est d’environ 80 shekels [=20€], une famille moyenne de 3,17 personnes achète aujourd’hui un tiers de livre par mois, y compris les livres pour enfants et les livres religieux. Ainsi, l’Israélien moyen, qui dépense 7,07 shekels [=1,80€] par mois en livres, atteint le montant total nécessaire pour acheter un livre tous les 11,5 mois. En d’autres termes, les Israéliens achètent un livre par an. (Ils l’achètent, mais cela ne signifie pas qu’ils le lisent.)


La bibliothèque publique Beit Ariela à Tel Aviv pendant une grève. Photo Daniel Bar-On

• • •

La bonne question n’est pas pourquoi nous avons arrêté de lire. Après tout, lire n’est pas une partie de plaisir ; se saouler ou boire en regardant une émission culinaire à la télévision est bien plus agréable.

La bonne question est pourquoi les gens lisent. Et la réponse est que jusqu’à récemment, tout le monde s’accordait à dire qu’il était impossible d’être cultivé sans lire de livres. Et tout le monde s’accordait à dire qu’une personne cultivée était un euphémisme pour désigner une personne intelligente.

Il n’y a pas si longtemps, les membres de la classe moyenne invitaient leurs amis dans leur salon et voulaient paraître cultivés. Ils leur demandaient donc : « Avez-vous lu le dernier roman d’A. B. Yehoshua ? Et si vous ne le faisiez pas, vous étiez humilié. Vous étiez un idiot.

Mais aujourd’hui, quiconque poserait cette question serait considéré comme un idiot. C’est ainsi que les lecteurs de la classe moyenne ont été éliminés.

Le problème, bien sûr, c’est qu’il est vraiment impossible d’être intelligent sans lire de livres. Mais aujourd’hui, vous pouvez obtenir une licence et une maîtrise – en littérature – sans vraiment lire quoi que ce soit. Vous en ressortirez complètement idiot, mais avec un diplôme.

C’est dommage, car toute l’histoire de l’humanité (dans tous les domaines, de la physique à l’architecture, de l’intellect aux émotions) est codée dans un code spécial, et les livres sont le moyen le moins cher et le plus démocratique de le déchiffrer.

Tout le monde peut désormais se rendre dans un magasin physique ou en ligne et, à un prix raisonnable, acheter une biographie d’Hitler et savoir qui était Hitler. Mais les gens écouteront 100 épisodes de podcasts sur Hitler ou regarderont 1 000 documentaires Netflix sur le Führer et éviteront la source.

Pourquoi ? Parce que le lendemain, devant la machine à café au travail, ils pourront recommander un documentaire Netflix. Mais il est impossible de recommander une biographie de Ian Kershaw. Recommander un livre ? Parler de livres ? C’est une source de honte. Les livres sont passés d’un signe d’honneur à une marque de Cain.


La librairie Matmon dans le quartier Teder de Tel Aviv. Photo Avshalom Halutz

• • •

En 2014, des chercheurs de l’université de Haïfa ont découvert que l’Israélien sioniste religieux moyen ouvrait un livre six fois par mois, contre deux fois par mois pour l’Israélien laïc moyen. Pour l’Israélien moyen dont la relation à la religion est qualifiée de « traditionnelle », ce chiffre était d’une fois par mois.

Au cours de la décennie qui a suivi, l’appétit intellectuel des sionistes religieux s’est accru, tandis que celui des laïcs s’est réduit aux dimensions de celui des Israéliens « traditionnels ». Il s’agit là d’un changement tectonique dans les habitudes de lecture des Israéliens. Les religieux ont également commencé à lire des livres laïques, tandis que les laïcs ont cessé de lire.

En 2019, Dvir Sorek, un soldat issu d’une yeshiva hesder – qui combine le service militaire et l’étude de la Torah – a été tué dans une attaque terroriste dans le bloc de colonies de Gush Etzion. Son père, Yoav Sorek, est l’un des chroniqueurs sionistes religieux les plus en vue et le rédacteur en chef du journal Hashiloach.

Dvir, âgé de 19 ans, a été poignardé à mort alors qu’il tenait un livre à la main du célèbre romancier David Grossman. Il avait acheté cette œuvre une heure plus tôt comme cadeau de fin d’année pour son rabbin.

Peut-on imaginer un adolescent de Tel Aviv lire Grossman ? Peut-on imaginer un adolescent de Tel Aviv acheter un livre de Grossman pour l’offrir à son professeur ?


Projection d’un film palestinien à la librairie Café Yafa à Jaffa. Photo Avshalom Halutz

• • •

Lorsque la police a fait une descente dans une succursale de la librairie Educational Bookshop à Jérusalem-Est cet hiver, les gauchistes se sont empressés de citer Heine, le poète allemand qui a écrit : « Là où l’on brûle les livres, on finit par brûler les hommes. » Si seulement la moitié des personnes qui ont été si choquées achetaient un seul livre – à Jérusalem-Est ou à Jérusalem-Ouest – et le lisaient réellement, le Messie viendrait.

Mais en réalité, la distance culturelle entre les forces de police du ministre de la Sécurité nationale Itamar Ben-Gvir et les personnes qui le détestent est faible, et elle ne cesse de se réduire.

• • •

« Fahrenheit 451 » (c’est un livre) raconte l’histoire de soi-disant pompiers dans un monde futuriste dont le travail consiste à brûler des livres. Mais il s’avère qu’il ne s’agit que de pyrotechnie, car les gens ont tout simplement cessé de lire. Une loi interdisant la lecture n’est promulguée que bien plus tard. Vous voulez vous engager dans la résistance ? Lisez un livre.

• • •

Quiconque souhaite acheter une bibliothèque peut faire défiler des dizaines de photos de beaux modèles sans jamais voir un seul livre. Au lieu de livres, les bibliothèques servent à ranger des bibelots, des poteries, de la vaisselle en porcelaine, des plantes grimpantes et des trains miniatures. Même le mot « bibliothèque » cède peu à peu la place à des alternatives telles que « armoire », « étagère » ou « solution de rangement ».

Il n’y a pas si longtemps, un salon sans bibliothèque était une anomalie. Mais bientôt, ce sera l’inverse. Le salon comprendra une cuisine ouverte, un canapé et un écran géant, et personne ne regrettera ces livres aux couvertures abîmées, ces témoins de notre identité.

• • •

Le romancier usaméricain Joshua Cohen m’a dit un jour qu’en yiddish, un mur recouvert de livres s’appelait « papier peint juif ».

• • •

La nouvelle coutume qui consiste à laisser des livres dans la rue à la disposition de toute personne intéressée ne peut être interprétée que d’une seule manière : les vivants ne sont pas enclins à hériter des trésors culturels des morts. Fils et filles, petits-fils et petites-filles se lamentent devant les riches bibliothèques de leurs mères et pères, grands-pères et grands-mères.

Ils feuillent rapidement les livres de science-fiction, les biographies de grands hommes, les classiques russes qui semblent contenir toutes les souffrances du monde, et ils ne peuvent se résoudre à les jeter à la poubelle. Ils posent donc les livres sur un banc en espérant que quelqu’un d’autre les trouvera intéressants. Mais bien sûr, il n’y a personne d’autre.

Il existe une vieille blague au sein du parti de gauche Meretz qui dit que chaque fois que l’on entend une ambulance, c’est soit un gauchiste qui meurt, soit un droitier qui naît. On pourrait également dire que chaque fois que l’on entend une ambulance, c’est soit un lecteur qui meurt, soit un téléspectateur qui naît.


Bibliothèque nationale d’Israël. Photo Yahel Gazit

• • •

Les éditeurs reviennent des salons du livre de Paris et de Francfort comme s’ils avaient assisté à une résurrection. Il y a vraiment des lecteurs, rapportent-ils. La littérature est bien vivante à l’étranger.

Ce n’est bien sûr pas tout à fait exact. Le voile de l’ignorance tombe sur le monde entier. C’est une pandémie d’ignorance. Mais la littérature francophone, avec environ 80 millions de lecteurs en Europe, peut survivre en marge. Et la littérature germanophone, avec plus de 90 millions de lecteurs, peut survivre et même prospérer en marge, car les marges de l’Allemagne sont larges.

Mais la littérature hébraïque ne peut pas survivre comme un passe-temps, à l’instar de la philatélie ou de la photographie naturaliste. Elle n’existerait tout simplement pas. Les frontières de la littérature hébraïque s’étendent du Jourdain à la mer Méditerranée. Et à l’intérieur de ces frontières, on compte environ 6 millions de locuteurs natifs de l’hébreu qui lisent également de la littérature profane. C’est tout.

Si ces 6 millions de personnes ne lisent pas de livres traduits, rien ne sera traduit en hébreu. Si ces 6 millions de personnes ne s’intéressent pas à la non-fiction, il n’y aura pas de non-fiction en hébreu. Et si ces 6 millions de personnes ne lisent pas de poésie, il n’y aura pas de poésie en hébreu.

La « littérature de la diaspora » est une absurdité hédoniste. Personne n’imprimera un livre en hébreu pour les 20 000 Israéliens de Berlin ou les 5 000 du nord du Portugal. Tous deux dépendent de la république littéraire d’Israël. Et la république littéraire d’Israël dépend de trois ou quatre librairies indépendantes situées dans ou à proximité de la rue Allenby à Tel Aviv.

« Si Hamigdalor n’existait pas, je ne trouverais pas de littérature originale », m’a confié un ami éditeur, en référence à la librairie située rue Mikveh Israel.


Hamigdalor

Lorsque j’ai écrit cet article, le livre le plus vendu sur le site web de la librairie en ligne Ivrit, la plus grande librairie en ligne d’Israël pour les livres électroniques et l’une des plus importantes pour les livres imprimés, était le premier ouvrage de la série « Billionaires of Manhattan » : « Most Eligible Billionaire ». La traduction en hébreu a été publiée par Darling Publishing, un éditeur dont vous n’avez sûrement jamais entendu parler.

Voici un résumé du livre : « La rumeur dit que Henry, génie des affaires, est tout aussi doué au lit. Et oui, il est irrésistible. Du sexe dans un costume à 7 000 dollars. Mais... il est arrogant et agaçant. ... Il n’y a aucune chance que ce sourire narquois me fasse craquer. ... De toute façon, qui a besoin de culottes ? »


Ahmad Muna, l’un des propriétaires de la librairie Educational Bookshop à Jérusalem-Est, est assis devant son magasin fermé après une descente de la police israélienne en mars. Photo Olivier Fitoussi

• • •

Comme chacun sait, la lecture est inversement proportionnelle à la qualité de l’écriture. « L’année dernière a vu une augmentation significative du nombre de livres publiés, avec plus de 1 000 nouveaux titres », se vantait un communiqué de presse d’une maison d’édition indépendante qui a atterri dans ma boîte mail. La société ajoutait une citation festive de son PDG : « Le rayon livres israélien s’est considérablement enrichi en 2024. »

J’ai donc demandé à l’agent de relations publiques combien d’exemplaires de chacun de ces 1 000 livres avaient été vendus en moyenne. Je n’ai pas obtenu de réponse.

Mais avec des éditeurs comme ceux-là, au moins, vous savez à quoi vous attendre. Malheureusement, même les vrais éditeurs ont cessé de vendre des livres aux lecteurs. À la place, ils vendent désormais des livres aux écrivains.

Pour publier quelques centaines d’exemplaires d’un livre chez Nine Lives Press, il faut compter entre 35 000 [=8 900€] et 50 000 shekels [=12 750€]. Selon les rumeurs qui circulent dans le milieu, chez les grands éditeurs comme Yedioth ou Kinneret, ce plaisir pourrait même vous coûter 90 000 shekels [= 23 000€].

Je pense que toute cette industrie des rêves et des cauchemars est immorale. Il n’y a aucune différence entre quelqu’un qui aborde une fille dans un centre commercial, la complimente sur sa beauté et lui propose de lui créer un book de mannequin tout en sachant pertinemment que personne ne le regardera jamais, et un éditeur ou un rédacteur en chef qui publie un livre dont il sait qu’il ne vaut rien, encaisse le chèque et renvoie le pauvre écrivain chez lui pour écouter le chant des criquets.

Mon objectif n’est pas de protéger les auteurs, mais les lecteurs. Qui regarderait la télévision si un programme sur trois était financé par des acteurs qui rêvent de passer à l’écran ? Qui visiterait une galerie d’art qui expose 100 artistes par an si la moitié de leurs œuvres étaient méprisables, mais que la galerie ne vous disait pas lesquelles, car la moitié qu’elle considérait comme méprisables finançait l’autre moitié qu’elle considérait comme exceptionnelles ?

Un livre dont la publication est financée par l’auteur devrait comporter un avertissement, tout comme les cigarettes ou les céréales pour petit-déjeuner riches en sucre. Pourquoi un article de journal intitulé « Cinq conseils pour les jeunes qui contractent un emprunt immobilier » doit-il être étiqueté « contenu promotionnel », alors que le même auteur peut s’acheter un livre documentaire et le laisser trôner parmi tous les autres ouvrages sur les étagères ?

• • •

Une autrice dont le premier roman a été publié par une grande maison d’édition s’est un jour épanchée sur mon épaule. « Personne ne s’intéresse à mon livre, m’a-t-elle confié, parce que tout le monde pense que je l’ai payé. »

• • •

Les quelques personnes qui se sont rendues à la Semaine du livre hébreu à Tel Aviv l’année dernière se souviennent sans doute des deux files d’attente qui ont fait fleurir le désert.

L’une était une file de jeunes filles hurlantes qui roulaient des valises vides dans le but de les remplir de littérature érotique. (Adel Yahalomim est apparemment la maison d’édition la plus rentable d’Israël.)

L’autre était une file de jeunes hommes tendus qui prenaient soin de détourner les yeux des jeunes filles qui criaient. Ils se dirigeaient vers des maisons d’édition de droite. (Sella Meir est apparemment la deuxième maison d’édition la plus rentable d’Israël.)

Il y a dix ans, l’écrivain Gabriel Moked m’a dit que la gauche était en train de perdre parce qu’elle s’était débarrassée de ses atouts intellectuels et avait cessé de soutenir la publication de revues et de livres. C’était une réponse bizarre à une question sur « le problème de la gauche », et il était tellement évident qu’il cherchait de l’argent pour ses revues et ses livres que je l’ai enfoui au fond de mon esprit. Mais aujourd’hui, je me rends compte qu’il avait tout à fait raison.

Lorsque la droite veut quelque chose, elle ne lance pas une campagne, elle publie des ouvrages volumineux, comme les deux livres en hébreu de Simcha Rothman, membre du parti Sionisme religieux : « Le parti de la Cour suprême » et « Pourquoi le peuple devrait-il choisir les juges ? ». Il existe également un recueil d’écrits traduits de l’ancien juge de la Cour suprême usaméricaine Antonin Scalia ; le titre du livre en hébreu se traduit par « Au nom de la loi ». Les éditeurs de droite proposent ensuite ces ouvrages à prix réduit – « le pack judiciaire » – sans aucune gêne.

Il existe également un coffret intitulé « Les fondements de la démocratie », qui comprend des ouvrages des commentateurs de droite Gadi Taub, Nave Dromi et Erez Tadmor, ainsi que le « coffret Ben Shapiro », qui comprend le best-seller « Comment débattre avec les gauchistes et les détruire : 11 règles pour gagner le débat ». Le ministre des Affaires de la diaspora, Amichai Chikli, a un jour qualifié Sella Meir d’« arme intellectuelle ». Il avait raison.

Sifriyat Shibolet, une coentreprise de Sella Meir et du Fonds Tikvah qui traduit des ouvrages conservateurs étrangers, compte actuellement 3 000 abonnés. Combien de personnes sont encore abonnées à Sifriya La’am, un projet de la maison d’édition Am Oved qui propose à ses abonnés des ouvrages originaux et traduits en hébreu ?

• • •

Dans dix ans, il ne restera plus ici que des cafards, Benjamin Netanyahou [s’il n’est pas dans une cellule à La Haye, NdT] et de la littérature [prétendument] érotique.



21/07/2025

Syrie : centenaire de la Victoire d'Al Kafr
سوريا: الذكرى المئوية لانتصار الكَفْر
Syria: Centenary of Al-Kafr victory

د. ريم منصور سلطان الأطرش

اليوم 21 تموز، هو الذكرى المئوية لانطلاق الثورة السورية الكبرى، بمعركة الكَفْر المظفّرة.

تُرى، ماذا ينتظرنا اليوم من أحداث؟!

في بيانه إلى السلاح، أعلن القائد العام سلطان الأطرش أن الهدف الأول للثورة هو توحيد البلاد السورية ساحلا وداخلا (أي توحيد بلاد الشام كلها التي مزقتها اتفاقيات سايكس بيكو 1916، ومهّدت لوعد بلفور 1917)، والهدف الثاني للثورة هو الاستقلال.

وبعد مئة عام، ها نحن نواجه التحدّيات ذاتها في بلادنا، الهادفة لتفتيتها... تُرى، هل نكون نحن على مستوى تلك التحديات اليوم لنقوم بمواجهتها ونعود لتوحيد بلاد الشام، كما كان هدف ثورة ال 1925؟ أم أن هذه البلاد استحقت رجالاتها ونساءها من مؤسسي دولتها، لكننا نحن لم نستحقها هي لأننا لم نحافظ على سيادتها واستقلالها برموش عيوننا؟!

Dr. Rim Mansour Sultan al-Attrache

Aujourd'hui, 21 juillet, marque le centenaire du début de la Grande Révolution syrienne, avec la bataille victorieuse de Kafr.

Que nous réservent les événements d'aujourd'hui ?

Dans son appel aux armes, le commandant en chef Sultan al-Atrash a déclaré que le premier objectif de la révolution était d'unifier le pays syrien, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur (c'est-à-dire unifier l'ensemble du pays du Levant, déchiré par les accords Sykes-Picot de 1916, qui ont ouvert la voie à la promesse Balfour de 1917), et que le deuxième objectif était l'indépendance.

Cent ans plus tard, nous sommes confrontés aux mêmes défis dans notre pays, qui visent à le diviser... Sommes-nous aujourd'hui à la hauteur de ces défis pour les relever et revenir à l'unification du Levant, comme le voulait la révolution de 1925 ? Ou bien ce pays méritait-il ses hommes et ses femmes qui ont fondé son État, mais nous ne le méritons pas parce que nous n'avons pas préservé sa souveraineté et son indépendance au prix de notre vie ?

Dr. Reem Mansour Sultan al-Atrash

Today, July 21, marks the 100th anniversary of the start of the Great Syrian Revolution with the victorious Battle of Al-Kafr.

What events await us today?

In his statement to the armed forces, Commander-in-Chief Sultan al-Atrash declared that the primary goal of the revolution was to unite Syria, both inside and outside its borders (i.e., to reunite the entire Levant, which had been torn apart by the Sykes-Picot Agreement of 1916 and paved the way for the Balfour Declaration of 1917). The second goal of the revolution was independence.

A hundred years later, we are facing the same challenges in our country, which aim to fragment it... Are we up to the task of facing these challenges today and reuniting the Levant, as was the goal of the 1925 revolution? Or did this country deserve its men and women who founded it, but we did not deserve it because we did not defend its sovereignty and independence with our lives? 




 Syria's Revolution Against French Mandate (1925-1937)

These documents describe the French occupation of Syria and Lebanon in the period following World War I, with a particular focus on the Great Syrian Revolt (1925–1937). The sources detail French strategies for control, including military repression, economic pressure, and attempts to exploit local divisions. The documents also illustrate the resistance of the Druze, the people of Hauran, and the Lajja, highlighting the grievances that drove the population to revolt, such as taxation and land confiscation. In addition, they reveal attempts to organise the revolution and unite national ranks, as well as internal leadership challenges and tribal divisions that influenced the course of events.

La révolution syrienne contre le mandat français (1925-1937)

Ces documents décrivent l'occupation française de la Syrie et du Liban après la Première Guerre mondiale, en mettant particulièrement l'accent sur la Grande Révolte syrienne (1925-1937). Les sources détaillent les stratégies françaises pour maintenir leur contrôle, notamment la répression militaire, la pression économique et les tentatives d'exploitation des divisions locales. Les documents illustrent également la résistance des Druzes, des habitants du Hauran et de la Lajja, et mettent en évidence les injustices qui ont poussé la population à se soulever, telles que l'imposition de taxes et la confiscation des terres. En outre, ils révèlent les tentatives d'organisation de la révolution et d'unification des rangs nationaux, ainsi que les défis liés au leadership interne et les divisions tribales qui ont influencé le cours des événements.

الثورة السورية الكبرى ضد الانتداب الفرنسي 

(1937-1925)

تصف هذه الوثائق الاحتلال الفرنسي لسوريا ولبنان في الفترة التي تلت الحرب العالمية الأولى، مع التركيز بشكل خاص على الثورة السورية الكبرى (1925-1937). تُفصّل المصادر الاستراتيجيات الفرنسية للسيطرة، بما في ذلك القمع العسكري، والضغط الاقتصادي، ومحاولات استغلال الانقسامات المحلية. كما توضح الوثائق مقاومة الدروز وأهل حوران واللجاة، وتبرز المظالم التي دفعت السكان للانتفاض، مثل فرض الضرائب وسلب الأراضي. بالإضافة إلى ذلك، تكشف عن محاولات تنظيم الثورة وتوحيد الصفوف الوطنية، إلى جانب تحديات القيادة الداخلية والانقسامات القبلية التي أثرت على مسار لأحداث.


 

20/7/2025 : Frantz Fanon a 100 ans turns 100 years cumple 100 años

 




20/07/2025

GIDEON LEVY
C’est clair : Israël a désormais un plan pour procéder au nettoyage ethnique des Palestiniens de Gaza

Quelqu’un l’a conçu, il y a eu des discussions sur les avantages et les inconvénients, des alternatives ont été proposées, et tout ça s’est déroulé dans des salles de conférence climatisées. Pour la première fois depuis le début de la guerre de vengeance à Gaza, il est clair qu’Israël a un plan – et celui-ci est ambitieux.

Gideon Levy, Haaretz, 20/7/2025
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

Adolf Eichmann a commencé sa carrière nazie en tant que chef de l’Agence centrale pour l’émigration juive au sein de l’agence de sécurité chargée de protéger le Reich. Joseph Brunner, le père du chef du Mossad David Barnea, avait trois ans lorsqu’il a fui l’Allemagne nazie avec ses parents, avant la mise en œuvre du plan d’évacuation.


La semaine dernière,
Barnea, le petit-fils, s’est rendu à Washington afin de discuter de l’« évacuation » de la population de la bande de Gaza. Barak Ravid a rapporté sur Channel 12 News que Barnea avait déclaré à ses interlocuteurs qu’Israël avait déjà entamé des pourparlers avec trois pays sur cette question, et l’ironie de l’histoire s’est cachée, honteuse. Un petit-fils d’un réfugié victime d’un nettoyage ethnique en Allemagne discute de nettoyage ethnique, et aucun souvenir ne lui vient à l’esprit.

Pour « évacuer » deux millions de personnes de leur pays, il faut un plan. Israël y travaille. La première étape consiste à transférer une grande partie de la population dans un camp de concentration afin de faciliter une expulsion efficace.

Bas du formulaire

La semaine dernière, la BBC a publié un reportage d’investigation basé sur des photos satellites, montrant la destruction systématique menée par les Forces de défense israéliennes dans toute la bande de Gaza, village après village, des localités sont rayées de la carte, rasées pour faire place à un camp de concentration, afin que la vie à Gaza ne soit plus possible.

Les préparatifs pour le premier camp de concentration israélien battent leur plein. Une destruction systématique est en cours dans toute l’enclave afin qu’il n’y ait plus aucun endroit où retourner à part le camp de concentration.

Pour mener à bien ces travaux, des bulldozers sont nécessaires. La BBC a présenté deux offres d’emploi. L’une décrivait « un projet de démolition de bâtiments à Gaza nécessitant des conducteurs de bulldozers (40 tonnes). Le salaire est de 1 200 shekels (308€) par jour, repas et hébergement compris, avec la possibilité d’obtenir un véhicule privé ». La deuxième annonce précisait que « les horaires de travail sont du dimanche au jeudi, de 7 h à 16 h 45, avec d’excellentes conditions de travail ».

Israël commet en silence un crime contre l’humanité. Il ne s’agit pas ici de détruire une maison ici et là, ni de répondre à des « nécessités opérationnelles », mais d’éliminer systématiquement toute possibilité de vie dans cette région, tout en préparant les infrastructures nécessaires pour concentrer la population dans une ville « humanitaire » destinée à servir de camp de transit – avant expulsion vers la Libye, l’Éthiopie et l’Indonésie, les destinations indiquées par Barnea, selon Channel 12.



Tel est le plan pour le nettoyage ethnique de Gaza. Quelqu’un l’a conçu, il y a eu des discussions sur les avantages et les inconvénients, des alternatives ont été proposées, des options de nettoyage total ou par étapes ont été envisagées, et tout cela s’est déroulé dans des salles de conférence climatisées, avec des procès-verbaux et des décisions prises. Pour la première fois depuis le début de la guerre de vengeance à Gaza, il est clair qu’Israël a un plan, et qu’il est ambitieux.

Ce n’est plus une guerre sans fin. On ne peut plus accuser Benjamin Netanyahou de mener une guerre sans but. Cette guerre a un but, et c’est un but criminel. On ne peut plus dire aux commandants de l’armée que leurs soldats meurent sans raison : ils meurent dans une guerre de nettoyage ethnique.

Le terrain est prêt, on peut passer au transfert des personnes, les annonces sont en cours de publication. Une fois le transfert de la population achevé, et lorsque les habitants de la ville humanitaire commenceront à regretter leur vie parmi les ruines, entre famine, maladie et bombardements, il sera possible de passer à la dernière étape : le placement forcé dans des camions et des avions à destination de leur nouvelle patrie tant attendue, la Libye, l’Indonésie ou l’Éthiopie.

Si l’entreprise d’aide humanitaire a coûté la vie à des centaines de personnes, la déportation en coûtera des dizaines de milliers. Mais rien n’empêchera Israël de réaliser son projet.

Oui, il y a un plan, et il est plus diabolique qu’il n’y paraît. À un moment donné, des gens se sont assis et ont concocté ce complot. Il serait naïf de penser que tout cela s’est produit tout seul. Dans 50 ans, les procès-verbaux seront rendus publics, et nous saurons qui était pour et qui était contre ce plan. Qui a pensé à peut-être laisser un hôpital intact.

Outre les fonctionnaires et les politiciens, il y avait également des ingénieurs, des architectes, des démographes et des membres du service budgétaire. Il y avait peut-être aussi des représentants du ministère de la Santé. Nous le saurons dans 50 ans.

Pendant ce temps, le chef de l’Agence centrale pour l’émigration palestinienne, David Barnea, a mis en place une étape supplémentaire. C’est un haut fonctionnaire obéissant, qui n’a jamais causé de friction avec ses supérieurs. Cela vous dit quelque chose ? C’est le héros de la campagne d’amputations massives par talkie-walkie. Si vous l’envoyez sauver des otages, il y va. Si vous l’envoyez préparer la déportation de millions de personnes ? Pas de problème pour lui. Après tout, il ne fait qu’obéir aux ordres.