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22/11/2024

GIDEON LEVY
Adnan Al Bursh, le docteur fantôme de Gaza

Gideon Levy, Haaretz,  22/11/2024
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

Le docteur Adnan Al Bursh était chirurgien, chef du service d’orthopédie de l’hôpital Al Shifa de la ville de Gaza. C’était un homme charismatique et séduisant qui utilisait les médias sociaux pour montrer qu’il travaillait dans des conditions invraisemblables, sans électricité, sans médicaments ni anesthésiques, et souvent sans lits pour les patients. Une vidéo le montre, pelle à la main, en train de creuser une fosse commune dans la cour de l’hôpital pour y déposer les cadavres des patients, après que les congélateurs ont été débordés par le nombre de corps. Il est devenu un héros local de son vivant et un héros international après sa mort. Il n’est presque jamais rentré chez lui après le début de la guerre, explique sa veuve, Yasmin. Après le début de la guerre, lui et son équipe ont été contraints de fuir trois hôpitaux que l’armée israélienne a détruits dans le cadre de leur « respect scrupuleux du droit international ».

En décembre, Al Bursh a été arrêté par l’armée dans le dernier hôpital où il travaillait, l’hôpital Al Awda à Jabalya. On lui a dit de sortir et on l’a enlevé. Au cours des mois suivants, il a apparemment subi d’horribles tortures dans un centre d’interrogatoire du Shin Bet et, plus tard, dans le camp de détention de Sde Teiman. Il a ensuite été transféré à la prison d’Ofer, où il est décédé le 19 avril. « Nous pouvions à peine le reconnaître », a déclaré un médecin palestinien qui l’a vu dans le centre de détention. « Il était évident qu’il avait vécu l’enfer. Ce n’était pas l’homme que nous connaissions, mais l’ombre de cet homme ». Al Bursh, qui restait en forme et nageait souvent, s’est transformé en fantôme. Spécialiste de l’orthopédie chirurgicale, il avait étudié en Jordanie et en Grande-Bretagne ; s’il avait vécu ailleurs, les choses auraient pu être bien différentes.

Sa mort en prison a été accueillie par un haussement d’épaules caractéristique en Israël, bien que l’acteur et rappeur Tamer Nafar lui ait consacré une belle élégie dans Haaretz, où j’ai également écrit sur Al Bursh. Les autorités ont évité de prendre la responsabilité de sa mort. L’administration pénitentiaire, contrôlée par le ministre de la sécurité nationale Ben-Gvir, a déclaré qu’elle ne s’occupait pas des « combattants illégaux ». Il s’agit donc soudainement de « combattants », avec lesquels ils ne traitent pas. L’armée a déclaré qu’elle ne détenait pas Al Bursh au moment de sa mort.

Des dizaines de détenus sont morts dans les prisons israéliennes cette année, comme dans les pires prisons du monde - et ce n’est pas un sujet qui mérite d’être discuté par le mouvement de protestation pour la démocratie en Israël. Des centaines de membres du personnel médical ont été tués à Gaza, et cela n’intéresse même pas l’Association médicale israélienne. Quelle honte !

Mais Al Bursh est devenu un médecin fantôme, dont le personnage, la vie et la mort refusent de disparaître. La semaine dernière, son image a été évoquée dans un reportage de John Sparks sur Sky News. Alors que la journaliste d’investigation israélienne Ilana Dayan se plaint auprès de Christiane Amanpour sur CNN que « nous ne couvrons pas suffisamment les souffrances humaines à Gaza » et présente ensuite un autre reportage héroïque sur l’armée, la chaîne de télévision pour laquelle elle travaille ne montre même pas un aperçu de ce qui se passe à Gaza. « Les téléspectateurs ne sont pas intéressés », a déclaré cette semaine l’un des responsables de la deuxième autorité israélienne pour la télévision et la radio. Cette déclaration résume le nouveau concept du journalisme : le paiement à la séance.

Mais dans un monde où il existe d’autres sources médiatiques, le Dr Al Bursh n’a pas été oublié. Le rapport d’enquête de Sky News a révélé qu’il avait été jeté dans la cour de la prison d’Ofer alors qu’il était gravement blessé, nu à partir de la taille. Francesca Albanese, rapporteure spécial des Nations unies sur les territoires palestiniens occupés, a évoqué la possibilité qu’il ait subi des abus sexuels avant sa mort, étant donné qu’il a été retrouvé à moitié nu.

Qui a tué al-Bursh, et comment ? Nous ne le saurons jamais. Cependant, nous avons appris une fois de plus à quel point la préoccupation sélective d’Israël pour la vie humaine est immorale. Une société dans laquelle au moins quelques personnes sont horrifiées et ébranlées par le sort des otages israéliens - se préoccupent d’eux jour et nuit, protestent avec véhémence et accrochent des banderoles dans les rues - est la même société qui ne se préoccupe pas d’autres êtres humains et détermine leur sort cruel. Cette hypocrisie est indéfendable. Il est impossible de faire le lien entre le choc profond des Israéliens face à la mort d’otages du Hamas et leur indifférence totale face à la mort d’Al Bursh, un otage détenu par Israël. Il n’y a aucun moyen de résoudre ces contradictions, si ce n’est de conclure que la conscience d’Israël a été irrémédiablement altérée.


 

21/11/2024

FRANCISCO CARRION
Le Maroc utilise le changement de position de la France comme monnaie d’échange pour exiger de nouvelles concessions de la part de l’Espagne


Un homme politique marocain souligne publiquement que la démarche de Macron impose à l’Espagne d’adopter “une position plus claire et essentiellement opérationnelle”.

Francisco Carrión, El Independiente, 15/11/2024
Traduit par Tafsut Aït Baamrane, Tlaxcala

Mohamed VI avec le président français Emmanuel Macron à Rabat. Photo EFE

Il était prévisible, mais le mouvement a commencé à se manifester de toute évidence. Pour s’imposer, sans demi-mesure ni euphémisme. À peine deux semaines après la visite d’Emmanuel Macron à Rabat, méritant tous les honneurs et agrémentée d’accords d’une valeur de 10 milliards d’euros, le régime marocain offre en public les premiers témoignages exigeant de nouvelles concessions de la part de l’Espagne et l’avertissant qu’elle est à la traîne.

La thèse défendue dans les officines de Rabat est que le virage copernicien opéré par Pedro Sánchez en mars 2022 a vite et mal vieilli. Il est dépassé par les événements et manifestement insuffisant au regard de la nouvelle position du président français, ardent défenseur depuis juillet non seulement des « trois pages » du plan marocain d’autonomie pour le Sahara, mais aussi de la souveraineté marocaine sur l’ancienne colonie espagnole, dont l’Espagne reste la puissance administrante de jure.

« Il ne fait aucun doute que le soutien exprimé par Sánchez dans sa lettre à Mohamed VI le 14 mars 2022 était à l’époque un pas courageux et considérable, mais dans le contexte actuel, il ne suffit pas que  l’Espagne considère la proposition marocaine d’autonomie présentée en 2007 comme la base la plus sérieuse, la plus crédible et la plus réaliste pour la résolution de la question du Sahara », déclare Mohamed Benabdelkader, ancien ministre de la Justice (2019-2021, dans le gouvernement El Otmani II) et dirigeant de l’Union socialiste des forces populaires, une organisation sœur du PSOE et incluse dans l’Internationale socialiste* avec le soutien exprès de la rue Ferraz [siège du PSOE, NdT], dans une interview accordée au média officiel marocain Rue20.com

Cette affirmation n’est pas isolée au sein de l’establishment alaouite, même si, jusqu’à présent, on avait évité de la formuler aussi clairement en public. Pour Benabdelkader, « la nouvelle perspective qui s’ouvre au niveau régional et mondial nécessitera certainement l’adoption d’une position plus claire et essentiellement opérationnelle ». Un avertissement direct à Sánchez, lancé par un parti d’opposition mais qui pratique une loyauté absolue envers le makhzen, qui pourrait être un avant-goût de nouvelles exigences et concessions.


Sanctions commerciales

La principale serait de suivre les traces de l’Elysée et de proclamer la souveraineté marocaine sur le Sahara occidental. C’est l’intention du Maroc, qui a célébré un prétendu erratum publié dans le BOE [Journal officiel de l’État espagnol, NdT] l’année dernière comme un signe qu'on était sur la bonne voie. En février, El Independiente a rapporté que le gouvernement espagnol avait reconnu la souveraineté marocaine sur le Sahara dans le cadre d’un appel d’offres pour la rénovation de l’école espagnole d’El Ayoun, accompagné d’une série de documents l’identifiant comme un territoire marocain. L’information a provoqué des versions contradictoires entre les ministères de l’Education et de la Culture, respectivement aux mains du PSOE et de Sumar. Finalement, le département d’Ernest Urtasun [ministre de la Culture, NdT] a refusé de rectifier le document, affirmant qu’elle s’était produite des mois auparavant, lorsque le socialiste Miquel Iceta dirigeait le ministère.

L’un des leviers que le Maroc utilisera pour imposer de nouvelles concessions est l’atout commercial, en élargissant et en attisant le différend entre les entreprises espagnoles et françaises. Lors de la tournée de Macron, le Maroc a récompensé la nouvelle direction prise par la France avec des contrats de milliards après deux années de crise déclenchée par l’espionnage du président français et d’une bonne partie de son cabinet par les services marocains utilisant le logiciel israélien Pegasus. Le gros lot est revenu à la société française Alstom avec la fourniture de 18 trains pour la future ligne ferroviaire à grande vitesse Kénitra-Marrakech, qui, pour 1,8 milliard d’euros, était en concurrence avec les sociétés espagnoles CAF et Talgo, la société coréenne Hyundai Rotem et la société chinoise China Railway Rolling Stock Corp.

« Quelle que soit la lecture en Espagne du nouveau rapprochement de la France avec le Maroc, il est clair que les médias de notre pays voisin ibérique, en soulignant l’ampleur des projets signés entre la France et le Maroc lors de cette visite, et en insistant sur l’engagement de Paris à accompagner Rabat dans la défense de son initiative d’autonomie, auront compris deux choses importantes », argumente l’homme politique marocain. La première est que le « partenariat d’exception renforcé » entre la France et le Maroc est un signal d’alarme pour l’Espagne qui a besoin d’une stratégie plus compétitive et coordonnée sur le marché marocain. La seconde est que le président français, en plaçant la barre plus haut, a montré l’exemple que la nouvelle dynamique de la question du Sahara marocain nécessite non seulement des mots, mais des gestes, et appelle à des actions concrètes en plus des belles déclarations ». Cette semaine, l’ambassadeur de France à Rabat s’est rendu pour la première fois dans les territoires occupés du Sahara, accompagné d’une délégation d’hommes d’affaires et d’une promesse d’ouverture de consulat, le prix habituel exigé par la diplomatie alaouite.

La carte du Maroc, avant et après
«Pour la France le présent et l’avenir du Sahara occidental s’inscrivent dans le cadre de la souveraineté marocaine»
Le ministère français des Affaires étrangères a modifié la carte du Maroc sur son site internet pour inclure le territoire du Sahara occidental dans la cartographie du pays maghrébin, profitant du voyage de Macron à Rabat.

Débloquer la cession de l’espace aérien
La stratégie du Maroc consiste également à avancer sur certains dossiers qui n’ont pas été satisfaits depuis la lettre de Sánchez à Mohammed VI en mars 2022. Parmi eux, la cession de l’espace aérien du Sahara occidental, actuellement contrôlé depuis les îles Canaries. Dans le jargon aéronautique, FIR est une région d’information de vol où est assuré un service d’information de vol et d’alerte (ALRS). L’OACI [Organisation de l’aviation civile internationale] délègue le contrôle opérationnel d’une FIR donnée à un pays, en l’occurrence, celle qui couvre les îles Canaries et le Sahara occidental relève de l’Espagne.

Le groupe de travail mis en place par le Maroc et l’Espagne depuis le virage copernicien du gouvernement espagnol dans le conflit du Sahara et le début de la « nouvelle ère » des relations hispano-marocaines se penche sur la question du transfert de la gestion, qui - s’il est réalisé - constituerait une violation du droit international. Le partenaire de la coalition s’oppose ouvertement à cette mesure. « Nous rejetons la souveraineté marocaine sur le territoire du Sahara occidental. Nous rejetons également la souveraineté du Maroc sur les eaux territoriales et l’espace aérien », ont déclaré des sources de Sumar à notre journal il y a plusieurs mois. D’autres mesures qui auraient conduit à la reconnaissance du statut marocain du territoire, comme l’installation d’un centre de l’Institut Cervantes, ont été suspendues**.

Ces nouvelles exigences de Rabat, exprimées par un politicien socialiste, interviennent au milieu de l’impasse dans laquelle se trouvent les bureaux de douane de Ceuta et Melilla, complètement bloqués du côté marocain et avec le sentiment qu’ils ne seront pas ouverts parce que, pour les autorités marocaines, cela signifierait reconnaître les frontières terrestres avec l’Espagne, ce qu’elles nient avec insistance.

Le PSOE omet le Maroc dans son document cadre du Congrès

Dans ce contexte de concurrence entre la France et l’Espagne pour obtenir les faveurs du Maroc, l’absence de toute mention du Maroc et du conflit du Sahara dans le document cadre du PSOE pour son congrès qui se tiendra à la fin du mois à Séville est frappante. Le document se targue que « le PSOE a ramené l’Espagne au premier plan de la politique internationale et a porté notre prestige et notre influence à des niveaux sans précédent dans l’histoire récente de notre pays », mais omet toute référence au Maroc.
Lors du Congrès de 2021, la rue Ferraz avait cependant décrit le Maroc comme un « partenaire clé sur la rive sud de la Méditerranée », donnant un avant-goût des actions qui allaient suivre dans les mois suivants. « Nous devons continuer à renforcer ces liens et ces intérêts, ce qui nous permettra de surmonter certaines difficultés. C’est pourquoi, au cours des prochaines années, nous progresserons dans le partenariat stratégique bilatéral à long terme que les gouvernements socialistes ont toujours promu ; d’autre part, et comme elle l’a fait depuis son entrée en fonction, l’Espagne continuera à défendre en Europe le caractère stratégique que ce pays a pour l’Espagne et pour l’Europe », promettait le document.

L’Espagne et la France, par leurs actions diplomatiques de ces dernières années, ont été prises dans la rivalité entre le Maroc et l’Algérie. « L’Algérie partage avec le Maroc la tendance à considérer ses interlocuteurs en fonction de leur position sur la question. Au fil des ans, alors que le Maroc a abandonné l’option du référendum, Alger s’est accroché au principe de l’autodétermination, rendant impossible toute négociation de sortie de crise », note Khadija Mohsen-Finan, spécialiste du Maghreb et membre du comité de rédaction du magazine français en ligne Orient XXI. « En conséquence, le conflit du Sahara occidental s’est figé, ce qui est préjudiciable, d’une part, aux Sahraouis et, d’autre part, à l’ensemble du Maghreb, dans la mesure où cela empêche l’intégration de la région. L’Algérie perçoit désormais la coopération entre le Maroc et Israël comme une menace, ce qui accroît la tension et éloigne un peu plus la solution à la question du Sahara occidental », conclut-elle.

NdT
*Le Front Polisario fait  partie de l’Internationale socialiste en tant que membre consultatif.

** L’Institut Cervantes, qui dépend du ministère espagnol des Affaires étrangères, est dirigé par le poète grenadin Luis García Montero, militant historique d’Izquierda Unida (Gauche Unie), parti qui participe à la coalition gouvernementale de Pedro Sánchez à travers la plateforme Sumar de la vice-présidente du gouvernement Yolanda Díaz. En voyage au Maroc en mars dernier, il a déclaré : « Lors de ce voyage, la possibilité » d’ouvrir une annexe de Cervantes à El Aaiún n’a pas été envisagée.
L’Institut Cervantes compte actuellement six centres actifs au Maroc : Rabat, Casablanca, Tanger, Tétouan, Marrakech et Fès. Le projet d’en ouvrir un à El Ayoun avait suscité les critiques du Front Polisario et de l’eurodéputé Manu Pineda. Selon des sources espagnoles, 12 000 habitants d’El Ayoun parlent l’espagnol. D’autre part, une décision d’ouvrir une annexe de l’Institut à Tindouf en Algérie pour enseigner l’espagnol à des réfugiés sahraouis, prise en 2019, ne s’est jamais concrétisée. L’Institut est présent à Alger et Oran.
 

Pedro Sánchez devra faire encore un effort pour mériter une Koumiya


20/11/2024

RODOLFO WALSH
La Revolución palestina
Edición bilingüe/Édition bilingue


En 1974, Rodolfo Walsh, écrivain et journaliste révolutionnaire, militant des Montoneros argentins, est chargé par son organisation d’établir des relations avec le Fatah de Yasser Arafat, alors principal mouvement de résistance palestinien. De son voyage à Alger, Le Caire et Beyrouth, il rapporte un reportage publié par le quotidien Noticias.  50 ans plus tard, ce texte exemplaire, enfin disponible en français, est une lecture obligatoire pour tous les activistes, étudiants et chercheurs concernés par la cause des peuples, de l’Argentine sous « Mi Ley » à la Kanaky sous Macron.
Ce livre est publié à l’occasion de deux anniversaires :
Le 20 novembre en Argentine est la Journée de la Souveraineté nationale, commémorant la bataille de 1845, au cours de laquelle les combattants de la Confédération Argentine repoussèrent les envahisseurs franco-anglais qui entendaient coloniser le pays.
Le 29 novembre 1947, l’ONU adopta le Résolution 181, décrétant le partage de la Palestine entre les sionistes et les Palestiniens. Ce jour-là, les représentants de 33 pays déclenchèrent une catastrophe qui dure à ce jour.

En 1974, Rodolfo Walsh, escritor y periodista revolucionario, militante de los Montoneros argentinos, recibió de su organización el encargo de establecer relaciones con el Fatah de Yasser Arafat, entonces principal movimiento de resistencia palestino. De su viaje a Argel, El Cairo y Beirut, trajo un reportaje publicado por el diario Noticias. 50 años después, este texto ejemplar, por fin también disponible en francés, es una lectura imprescindible para todos los militantes, estudiantes e investigadores que se interesan por la causa de los pueblos, desde la Argentina bajo “Mi Ley” hasta Kanaky bajo Macron.
Publicamos este libro con ocasión de dos aniversarios:
El 20 de noviembre se celebra en Argentina el Día de la Soberanía Nacional, en conmemoración de la batalla de 1845 en la que los combatientes de la Confederación Argentina rechazaron a los invasores anglo-franceses que pretendían colonizar el país.
El 29 de noviembre de 1947, la ONU adoptó la Resolución 181, decretando la partición de Palestina entre sionistas y palestinos. Ese día, los representantes de 33 países desencadenaron una catástrofe que continúa hasta nuestros días.

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Índice
Nota del editor
Prólogo (Ángel Horacio Molina)
La Revolución palestina
Terror en Medio Oriente
La Embajada de Israel replica
Respuesta del autor a la embajada
Bio-bibliografía
Nota autobiográfica
Anexo Carta abierta de un escritor a la Junta Militar
Table des matières
Note de l’éditeur
Avant-propos (Ángel Horacio Molina
La Révolution palestinienne
Terrorisme au Moyen-Orient
L’ambassade d’Israël réplique
Réponse de l’auteur à l’ambassade
Biobibliographie
Notice autobiographique
Annexe Lettre ouverte d’un écrivain à la junte militaire
Nota del editor
En Argentina, bajo el gobierno del loco de la motosierra cuyo apellido podría leerse como «Mi Ley», uno se pregunta si Rodolfo Walsh es algo más que el nombre de una estación de la línea E del subte bonaerense para la generación más joven -los menores de 29 años-, la mayoría de los cuales votaron a un hombre que planea hundirlos aún más en el precariado y, si se insurgen, masacrarlos.
En la llamada América Latina del siglo XX, era un milagro que un revolucionario llegara vivo a los 50 años. Desde Emiliano Zapata hasta Ernesto Che Guevara, era habitual caer víctima de las balas antes de cumplir los 40.
Rodolfo acababa de cumplir 50 cuando, cerca de la estación Entre Ríos, cayó bajo las balas del capitán Astiz y sus gorilas. Corrió la misma suerte que su hija María Victoria, «Vicky», que había caído poco antes, a los 26 años. Pero a diferencia de muchas de las 30.000 personas forzosamente desaparecidas durante la dictadura militar, Rodolfo Walsh nos dejó una extraordinaria obra escrita, que desgraciadamente se ha traducido muy poco. Fue el inventor tanto del periodismo de investigación como del periodismo narrativo, en forma de «novelas de no ficción», nueve años antes que Truman Capote, generalmente presentado como su padre fundador por su libro A sangre fría. Pero Rodolfo no se limitó a escribir. Actuó, organizó y luchó, aunque lo único que tenía para defenderse de los esbirros que lo rodearon el 25 de marzo de 1977 era una ridícula pistolita que no le daba la medida. El día anterior acababa de empezar a difundir su 
Carta abierta de un escritor a la Junta Militar, con la que firmó su sentencia de muerte.
Rodolfo fue uno de los fundadores de la agencia de prensa cubana Prensa Latina. Fue uno de los pilares de Noticias, diario revolucionario que sólo duró el tiempo de un embarazo antes de ser prohibido por Isabelita por orden de la camarilla fascista reclamándose peronista que la rodeaba. Y en 1976 inventó ANCLA, la Agencia de Noticias Clandestina, que empezó a difundir información censurada sobre los crímenes de la dictadura.
Rodolfo, que murió como montonero, no siempre había sido peronista; incluso había sido furibundamente antiperonista y luego, en el curso de su labor investigadora, se había acercado a posiciones revolucionarias de izquierda, terminando con los Montoneros, esos extraños peronistas/marxistas/foquistas a los que se apresuraba a criticar por sus concepciones militarista-golpistas de la lucha, ya que aborrecía los métodos sumarios de ejecución de verdaderos o supuestos enemigos.
No he mencionado al Che al azar. Lo que ambos tenían en común era que eran argentinos por cuyas venas corría sangre irlandesa (véase más adelante la nota autobiográfica de Walsh). Los proletarios campesinos irlandeses que habían huido de la opresión de la pérfida Albión no habían encontrado un paraíso terrenal cuando desembarcaron en el Río de La Plata. La Plata no era para ellos. Tuvieron que laburar duro y dejar a su prole al cuidado de curas y monjas que sabían cómo adiestrar a esos zapallos, potencial carne de horca.
Al ir al encuentro de los palestinos, de Argel a Beirut, nuestro irlandés-argentino sabía que encontraría hermanos. De hecho, los Montoneros le habían pedido que estableciera contacto con Al Fatah. En un campo de refugiados, tuvo la impresión de volver a la Villa 31, en el conurbano bonaerense, donde trabajaba el padre Carlos Mugica, un luchador de la teología de la liberación que también fue asesinado y cuyo nombre lleva ahora la barriada.
Argentina e Israel no sólo tienen banderas similares. Sus historias de asentamientos son paralelas. Un chiste sudamericano dice: «El hombre desciende del mono, el argentino desciende del barco». Basta reemplazar argentino por israelí. Y bajo la ley de la motosierra, los argentinos corren serio peligro de sufrir un destino similar al de los palestinos. Las páginas de Rodolfo Walsh no han envejecido nada en cincuenta años. Tiempo para (re)leerlas. «El hombre del futuro es el que tendrá la memoria más larga» (Nietzsche)            

Fausto Giudice, Túnez, noviembre de 2024


Note de l’éditeur    
Dans l’Argentine sous la coupe du fou furieux à la tronçonneuse dont on peut traduire le nom par « Ma Loi » (Mi Ley), on peut se demander si, pour les jeunes générations -les moins de 29 ans - qui ont en grande partie voté pour un homme planifiant de les enfoncer encore plus dans la précarité et, s’ils se révoltent, de les massacrer - Rodolfo Walsh est autre chose que le nom d’une station du métro de la ligne E de Buenos Aires.
Dans l’Amérique dite latine du XXe siècle, arriver à l’âge de 50 ans et être encore en vie, pour un révolutionnaire, tenait du miracle. D’Emiliano Zapata à Ernesto Che Guevara, il était d’usage de tomber sous les balles avant d’avoir atteint les 40 ans. Rodolfo venait d’avoir 50 ans lorsque, près de la station Entre Ríos, il est tombé sous les balles du capitaine Astiz et de ses sbires. Il a ainsi connu le même sort que sa fille María Victoria, « Vicky », tombée peu de temps auparavant à 26 ans. Mais à la différence d’une bonne partie des 30 000 disparus forcés de la dictature militaire, Rodolfo Walsh nous a laissé une œuvre écrite extraordinaire, qui n’a malheureusement été que trop peu traduite. Il été l’inventeur à la fois du journalisme d’investigation et du journalisme narratif, sous forme de « romans de non-fiction », neuf ans avant Truman Capote, généralement présenté comme son père fondateur pour son livre De sang froid. Mais Rodolfo n’a pas fait qu’écrire. Il a agi, organisé, combattu, même s’il n’avait pour se défendre contre les sbires qui l’ont encerclé le25 mars 1977 qu’un ridicule petit calibre qui ne faisait pas le poids. La veille, il venait de mettre en circulation sa fameuse 
Lettre ouverte d’un écrivain à la junte militaire, par laquelle il a signé son arrêt de mort.
Rodolfo fut l’un des fondateurs de l’agence de presse cubaine Prensa Latina. Il fut l’un des piliers de Noticias, un quotidien révolutionnaire qui ne dura que temps d’une grossesse avant d’être interdit par Isabelita sur les ordres de la camarilla fasciste se réclamant du péronisme qui l’entourait. Et il fut l’inventeur, en 1976, de l’ANCLA, l’Agencia de Noticias Clandestina (Agence de nouvelles clandestine), qui commença à diffuser des informations censurées sur les méfaits de la dictature.
Mort comme Montonero, Rodolfo n’avait pas été péroniste « depuis toujours », il avait même été furieusement antipéroniste puis avait, au fil de ses travaux d’enquête, évolué vers des positions révolutionnaires de gauche pour finir chez les Montoneros, ces drôles de péronistes/marxisants/guévaristes qu’il ne se fit pas faute de critiquer pour leurs conceptions militaro-putschistes de la lutte, lui qui avait en  horreur les méthodes expéditives consistant à abattre sommairement les ennemis ou supposés tels.
Je n’ai pas évoqué le Che au hasard. Tous deux avaient en commun d’être des Argentins dans les veines desquels coulait du sang irlandais (lisez en page 80 la notice autobiographique de Walsh). Les paysans prolétarisés irlandais qui avaient fui l’oppression de la perfide Albion n’avaient pas trouvé un paradis terrestre en débarquant sur le Rio de La Plata. La Plata (l’argent, le pèze), ça n’était pas pour eux. Il leur avait fallu turbiner et confier leur progéniture aux curés et aux bonnes sœurs qui savaient comment s’y prendre pour dresser ces sauvageons, gibiers de potence en puissance.
En allant à la rencontre des Palestiniens, d’Alger à Beyrouth, notre Irlando-Argentin savait retrouver des frères. Il avait en fait été chargé par les Montoneros d’établir un contact avec le Fatah. Dans un camp de réfugiés, il a l’impression de retrouver la Villa 31 de la banlieue de Buenos Aires, où travaillait le père Carlos Mugica, combattant de la théologie de libération, lui aussi assassiné et dont le bidonville porte aujourd’hui le nom.
L’Argentine et Israël n’ont pas seulement en commun d’avoir des drapeaux similaires. L’histoire de leur peuplement est parallèle. Une blague sud-américaine dit : « L’homme descend du singe, l’Argentin descend du bateau ». Il suffit de remplacer Argentin par Israélien. Et sous la loi de la tronçonneuse, les Argentins risquent sérieusement de connaître un destin similaire à celui des Palestiniens. Les pages de Rodolfo Walsh n’ont donc pas pris une ride en cinquante ans. Il est temps de les(re)lire.
« L'homme de l'avenir est celui qui aura la mémoire la plus longue » (Nietzsche)

Fausto Giudice, Tunis, novembre 2024






 

17/11/2024

GIORGIO GRIZIOTTI
Equalize the world (Égaliser le monde)


Giorgio Griziotti, Effimera, 16/11/2024
Traduit par Fausto Giudice,
Tlaxcala

L’autre jour, débarqué à l’aéroport d’Orly en provenance d’Italie, je marchais avec les autres passagers vers la sortie quand, à un certain moment, une file d’attente s’est formée devant un tunnel lumineux dont les portes ne laissent passer qu’une seule personne à la fois. Un système supplémentaire de contrôle et de détection automatique, comme si, au cours du voyage aérien, le passager, déjà contrôlé à l’embarquement, pouvait se procurer des armes, des drogues ou d’autres produits illicites. Cette énième nouveauté aéroportuaire anxiogène est l’une des nombreuses manifestations de l’obsession sécuritaire omniprésente dans le réel comme dans le virtuel, accompagnée d’une rhétorique qui alimente la perception d’un danger permanent comme la promotion d’une culture de la peur.

En réalité, le danger existe souvent parce que les partisans du discours sécuritaire et les agents du cyberespionnage sont dans le même camp et se nourrissent les uns des autres.

Equalize, la société italienne d’analyse de risques - lisez espionnage industriel et pas seulement, puisqu’elle compte parmi ses clients le Mossad et le Vatican - pour les entreprises, qui fait actuellement l’objet d’une enquête, est exemplaire en ce sens : son propriétaire, en plus d’être président de la Fondation de la Foire de Milan, nommé en 2022 par le leader de la Lega et président de la Chambre des députés Lorenzo Fontana, et conseiller de l’Université Bocconi, entretenait des liens étroits avec de hauts fonctionnaires, dont le président du Sénat et la ministre du Tourisme Daniela Santanchè, qui a fait l’objet de plus d’une enquête.

Equalize est donc une illustration contemporaine de la nouvelle dynamique de pouvoir entre contrôleurs et contrôlés à l’ère du « capitalisme de surveillance »[1]. Lorsque Zuboff a écrit ce livre il y a quelques années, elle espérait que le capitalisme pourrait être réformé. Aujourd’hui, un fait marquant semble définitivement démentir cette hypothèse : la montée en puissance d’Elon Musk.

Comme le racontent ceux qui ont pu faire des incursions dans le futur [2], l’arrivée fracassante de Musk dans les sphères de la gouvernance scelle lentanglement (intrication) entre l’État et les techno-tycoons ou techno-oligarques, comme on voudra les appeler. Depuis l’ère industrielle, le grand capital avait l’habitude d’acquérir et de contrôler les médias grand public de l’époque, mais nous assistons aujourd’hui à un saut quantique sans précédent. Les dix-sept milliards d’impressions générées par Musk avec ses seuls gazouillis pendant la campagne électorale exercent une influence biopolitique incomparable même à celle du précurseur Berlusconi avec ses médias électriques à la Mc Luhan. C’est précisément la possession d’énormes quantités de données qui permet aux plateformes du neurocapitalisme, largement autonomes dans la définition de leurs propres règles de fonctionnement, d’exercer une influence significative sur les récits, les perceptions, les émotions et les décisions. Ce pouvoir façonne activement les élections, les marchés et même les relations personnelles, redéfinissant leur dynamique et orientant leur développement de manière profonde et omniprésente.

Pour en revenir à Equalize, il n’est pas surprenant que, dans ce contexte mondial, les acteurs intermédiaires émergent également comme de nouveaux centres de pouvoir privé. Grâce à l’intelligence artificielle, à l’exploration de données et au piratage, ils parviennent à transformer l’information en un instrument de coercition et de contrôle.
Dans ce cas précis, l’ambition d’Equalize était de devenir une sorte de « Google du renseignement ». Pour ce faire, elle avait développé une plateforme appelée Beyond, qui permettait d’obtenir des rapports sophistiqués simplement en introduisant une requête sur une personne ou une entreprise. Ces rapports proposent des analyses détaillées et suggèrent, le cas échéant, des réflexions ou des enquêtes plus approfondies.

Jusqu’à présent, Beyond pouvait sembler similaire à d’autres plateformes légales. Cependant, sa nature profondément illicite, telle qu’elle a été découverte par les enquêteurs, réside dans l’obtention illégale d’informations à partir de bases de données protégées et confidentielles grâce à l’utilisation d’un logiciel malveillant de type RAT (Remote Access Trojan), qui permet d’obtenir un contrôle à distance complet du système cible.
Parmi les bases de données attaquées figurent celles de l’Agence des impôts [système Serpico qui mesure l’adéquation entre le niveau de vie des contribuables et leur déclaration, NdT] , de l’Istat (Institut national de statistiques), de l’INPS (Institut national de sécurité sociale), du Registre national d’état-civil (ANPR), du Système d’information monétaire (Siva) de l’Automobile Club d’Italie (ACI), mais surtout le SDI, le système d’investigation du ministère de l’Intérieur[3].
La relative facilité avec laquelle Equalize/Beyond a réussi à télécharger des données directement à partir des serveurs du ministère de l’Intérieur, grâce aussi à des complicités et à des infiltrations, montre que même les bases de données les plus sensibles gérées par les organes centraux de l’État, qui devraient être hyperprotégées, sont désormais vulnérables et se retrouvent sur le marché noir des données volées. C’est probablement aussi le résultat de la sous-traitance croissante de certains des nœuds les plus critiques du fonctionnement de l’État au secteur privé. Il s’agit d’une érosion non seulement des frontières entre le public et le privé, mais aussi de celles entre ceux qui contrôlent et ceux qui sont contrôlés.
Les utilisateurs, souvent sans en être conscients, contribuent volontairement à leur propre surveillance en utilisant des appareils connectés et des plateformes numériques. Cette « surveillance participative » génère une boucle de rétroaction continue, dans laquelle les données produites sont retraitées pour influencer les individus mêmes qui les ont générées. Un exemple de ce mécanisme peut également être trouvé dans le cas d’Equalize, où, comme l’a expliqué un responsable, des rapports détaillés sur les visites du site étaient collectés chaque jour, y compris des informations sur qui s’était connecté, d’où, avec quel appareil et quel navigateur. Ce processus a permis d’établir un profil approfondi des utilisateurs, en contrôlant non seulement qui accède à la plateforme, mais aussi ce qu’ils recherchent.
Equalize n’est probablement que le premier grand cas à émerger, tandis que d’autres en Italie, en Europe et ailleurs continuent d’opérer dans l’ombre. Ils sont les symptômes collatéraux et locaux de la vague de techno-solutionnisme fasciste qui porte le coup de grâce aux démocraties occidentales désormais irréformables, comme l’affirme Emanuele Braga dans un récent article d’Effimera où il dénonce la mauvaise foi (stupide) des politiciens et des intellectuels de la défunte gauche. Pour conclure, j’ai été frappé par la récente interview de David Colon dans le Manifesto sous le titre significatif « La nouvelle frontière des techno-oligarques ». Du haut de sa chaire de Science Po à Paris, Colon affirme que « les milliardaires de la technologie entendent détrôner la politique au profit de la technologie, de l’intelligence artificielle, c’est-à-dire des outils qui ont fait leur fortune ». Déblatérant, le jour même de l’élection de Trump, sur les « bonnes » démocraties occidentales à sauver parce qu’elles sont gravement menacées par les « mauvaises » autocraties du reste du monde, notre bon prof de « gauche » ne se rend même pas compte de l’ineptie de ses affirmations. Aucune technologie n’a pris ou ne prendra la place de la politique : Elon Musk & Co. sont déjà les nouveaux leaders politiques du capitalisme du XXIe siècle...

Post-scriptum
Comme nous le savons, le capitalisme de plateforme fonde sa rentabilité sur la transformation des données de la valeur d’usage en valeur d’échange (la soi-disant valeur de réseau). Le cas d’Equalize ne fait pas exception. La question démocratique n’a pas grand-chose à voir là-dedans. C’est du capitalisme, chéri·e ! La vente de données manipulées, gérées, sélectionnées et profilées par la plateforme Beyond est en fait l’activité principale de l’opération. D’après ce que nous avons pu lire des interceptions téléphoniques publiées dans certains journaux, une simple et unique demande d’information (qui ne nécessitait pas d’enquête spéciale ad hoc) avait un coût moyen d’environ 200 euros. Le coût d’obtention de ces informations était plus ou moins de 60 euros, avec une marge bénéficiaire certainement importante. Ce qu’il faut retenir, c’est que ces informations sont collectées en profilant les actes de la vie quotidienne de chacun d’entre nous, sans exception. En effet, les récentes technologies algorithmiques et de cloud computing permettent de cataloguer, sélectionner, manipuler et classer les données brutes résultant de l’utilisation d’apps sur les téléphones mobiles, les tablettes et les ordinateurs en données lisibles et vendables, en fonction des besoins du client et de l’entreprise. Ce n’est pas un hasard si l’on parle d’intelligence économique. Ce qui est relativement nouveau (du moins pour l’Italie), c’est la particularité des données traitées par la plateforme Equalize/Beyond : il s’agit en effet de données extrêmement sensibles, liées à la vie privée et à la sécurité, donc de données à très haute valeur ajoutée. Nous ne sommes plus seulement confrontés à la vie directement valorisée et au devenir du profit, mais au devenir « politique » du profit, avec toutes les implications que cela comporte (
Andrea Fumagalli).

NOTES

[1] Zuboff, Shoshana. L’Âge du capitalisme de surveillance, Zulma 2022
[2] Griziotti, Giorgio. Cronache del Boomernauta (Chroniques du Boomernaute) Éditions Mimesis, 2023 (à paraître en français en 2025)

[3] Le système d’information interforces, complexe et étendu, est divisé en 13 domaines d’application principaux dans lesquels circulent toutes sortes d’informations, des plaintes aux enquêtes, de la gestion des armes au contrôle des étrangers, du renseignement policier au suivi des appels d’offres pour les marchés publics.


GIDEON LEVY
Le nouvel idéal sioniste : une génération d’Israéliens sans honte pour la guerre de Gaza

Gideon Levy, Haaretz,  17/11/2024
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

Yair Weigler, éducateur et patron d’une organisation appelée « Teachers for Change » [Enseignants pour le changement], vient de rentrer d’un long séjour parmi les réservistes de l’armée israélienne.

« Nous étions des colons, des habitants de Tel-Aviv, des personnes évacuées du bloc Katif [de la bande de Gaza] en 2005 ; nous étions des frères d’armes, des personnes travaillant dans l’éducation et dans la haute technologie... une compagnie de tanks », a-t-il déclaré poétiquement, comme s’il était un jeune homme revenant d’un voyage à l’étranger après l’armée et chantant les louanges des endroits qu’il a visités. Oh, Shujaiyya, oh, quelle unité. Quelle armée, quel peuple !

Simon Nsaka (Stillmatic), Zambie

L’ancien Premier ministre Naftali Bennett s’est empressé de partager les paroles de l’éducateur : « Une génération de lions a vu le jour en Israël. Je n’ai aucun doute sur le fait que ces hommes, les combattants et les réservistes, retourneront à la vie civile en étant plus idéalistes, plus compatissants, et que ce sont eux qui reconstruiront ce pays pour les 50 prochaines années. Il y a de l’espoir ! »

Même si l’on ignore le pathos gnangnan du petit politicien à la calotte tricotée, on ne peut qu’être consterné par le chaos qui se déroule sous nos yeux ébahis et impuissants. Le jour est la nuit et la nuit est le jour. Le nettoyage ethnique et le meurtre de masse sont des idéaux, et les crimes de guerre créent des civils qui sont meilleurs et qui ont plus de valeurs. C’est le sens de l’espoir dans le schéma de Bennett.

On le lit avec incrédulité. C’est ce qu’un enseignant israélien a à dire sur son très problématique service de réserve, et c’est ainsi que réagit un leader de la droite modérée, une personne qui incarne l’espoir d’une alternative. En 2024, en Israël, non seulement il n’y a aucune trace de bilan concernant ce que son armée a fait à Gaza et au Liban - nous nous y sommes habitués - mais on élève maintenant les crimes et la brutalité au rang d’idéaux. Les cours d’éducation civique expliqueront désormais comment le massacre de dizaines de milliers de femmes et d’enfants est devenu une valeur. C’est ainsi que l’on détruit une bande de terre et que l’on fait des Israéliens de meilleurs citoyens. Le génocide comme atelier pédagogique.

Ceux qui s’attendaient à un sentiment de culpabilité, à une comptabilité ou à des points d’interrogation éthiques obtiennent exactement le contraire. Quiconque s’attendait à une génération traumatisée par ce qu’elle a fait, avec des cauchemars incessants et à des pleurs dans le sommeil à cause des atrocités, reçoit en retour une fierté nationale. L’idéal sioniste, c’est maintenant la guerre qui fait rage à Gaza. Un crime terrible qui reste à définir devant les tribunaux internationaux, une guerre qui horrifie le monde entier, à juste titre, un crime qui est maintenant transformé en valeur. Une génération de lions est née ici.

Une génération de lions qui ne regarde pas un instant son œuvre en face. Elle est trop lâche. On peut comprendre la répression et le déni - sans eux, une guerre comme celle-ci ne pourrait être menée, une guerre inutile et débridée. Mais Israël a poussé la chose à un niveau encore plus inconcevable.
Jamais une telle fierté n’a été exprimée ici pour des crimes de guerre aussi horribles. Des officiers se promènent parmi les ruines de Gaza devant les caméras de télévision, tels des paons gonflés. Il n’y a pas un seul correspondant pour sauver la dignité de sa profession en demandant quelle est la signification de toute cette destruction. Quel était son but, sa légalité, sa moralité ? De quel droit avons-nous pu perpétrer de telles destructions ? Des convois de personnes les plus misérables vont et viennent sur le sable, en béquilles, en fauteuils roulants, dans des chariots conduits par des ânes affamés, des personnes prêtes à réciter au correspondant de la télévision Ohad Hamo tout ce qu’il leur demande en échange d’une goutte d’eau - et c’est ce qu’on appelle un coup journalistique pour soutenir l’orgueil professionnel d’Hamo.

Il est douteux que la télévision russe ose diffuser un spectacle aussi honteux depuis l’Ukraine. Là-bas, la honte l’empêcherait peut-être. Ici, il n’y a aucun sentiment de honte. Ni Hamo, ni Canal 12, ni les médias, ni Weigler, ni Bennett.

Ce n’est pas seulement qu’Israël a perdu tout sens de la honte. Il est fier de ses exploits. Ce n’est pas que les Israéliens considèrent la guerre comme un mal nécessaire, nous condamnant ostensiblement à vivre avec elle. Aujourd’hui, c’est un modèle de valeurs - la guerre comme poème pédagogique. Les Israéliens ont fait du transfert de troupes dans le nord de la bande de Gaza et du massacre dans le sud un patrimoine national, avec les albums photos et les musées qui suivront bientôt. Il sera beaucoup plus difficile de s’en remettre.

Bennett promet que cette génération de lions, dépourvue de conscience ou de boussole, est celle qui construira le pays pour les 50 prochaines années à venir. Imaginez un peu. Ça promet.


16/11/2024

OFER ADERET
Un an après la guerre du Kippour, Yitzhak Rabin a déclaré qu'il n'y avait pas de solution militaire au conflit israélo-arabe

Ofer Aderet, Haaretz, 14/11/2024
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

À l'occasion du 29e anniversaire de l'assassinat de Rabin [4 novembre 1995, NdT], les archives de Tsahal ont publié les déclarations faites par l'ancien Premier ministre lors d'une réunion du Forum de l'état-major général en 1974. « S'il y a une chance de progresser, c'est uniquement par le biais de négociations », a-t-il déclaré, tout en mettant en garde contre la création d'un État palestinien . « Ce serait le détonateur immédiat de la prochaine guerre ».

 Yitzhak Rabin avec la Première ministre Golda Meir à Washington en 1973. Photo : Moshe Milner / GPO

Deux décennies avant de signer les accords d'Oslo avec les Palestiniens et un accord de paix avec la Jordanie, l'ancien Premier ministre Yitzhak Rabin pensait qu'il n'était pas possible de résoudre le conflit israélo-arabe par des moyens militaires, mais uniquement par des négociations. Cependant, Rabin s'est montré pessimiste quant à la réalisation de la paix au cours de ces années et a averti que la création d'un État palestinien en Cisjordanie mènerait à la guerre.
Rabin a fait cette déclaration il y a 50 ans, lors d'une réunion secrète du forum de l'état-major général des FDI, en septembre 1974, un an après la guerre du Kippour. La réunion portait sur les préparatifs de la prochaine guerre. Le procès-verbal et son enregistrement ont été publiés mercredi par les archives de Tsahal au ministère de la Défense, à l'occasion de la journée de commémoration du 29e anniversaire de l'assassinat de Rabin, qui est célébrée selon le calendrier hébraïque.

Yitzhak Rabin avec Henry Kissinger en mars 1975.  Photo : GPO

« Dans le conflit israélo-arabe, je ne vois pas la possibilité de parvenir à une solution par des moyens militaires », a déclaré Rabin. « En d'autres termes, en supposant que nous puissions, par la guerre, parvenir à une situation dans laquelle nous pourrions imposer la paix, je ne vois pas cela comme quelque chose de réaliste. Cela ne veut pas dire que nous n'aurons pas de guerres. Mais je ne suggère pas de partir du principe que nous pourrions, par la guerre, imposer une solution diplomatique globale. S'il y a une chance - et je ne suis pas sûr qu'il y en ait une - de progresser vers une solution, ce n'est que par la négociation », a-t-il ajouté.
Cependant, Rabin a également déclaré que « les négociations doivent également être basées sur la puissance militaire, car sans cela, il n'y aura pas de négociations diplomatiques ». Il a déclaré qu'après la victoire d'Israël en 1967, lorsque le pays a occupé la Cisjordanie, la bande de Gaza, le plateau du Golan et le Sinaï, Israël a acquis de « meilleurs atouts défensifs ». Cependant, « je ne suis pas sûr que cela signifie que nous pouvons parvenir à la paix ».
Rabin n'était pas optimiste quant à la possibilité de parvenir à la paix à l'époque où ces propos ont été tenus. « Je ne crois pas que nous puissions actuellement parvenir à des négociations sur un accord de paix global. Tout d'abord, les Arabes n'en veulent pas ». Il a averti que la paix signifiait aussi un État palestinien en Cisjordanie, « et ce serait la mèche qui déclencherait la prochaine guerre ». Il a ajouté et mis en garde contre les solutions provisoires, telles que « la recherche de quelque chose qui n'est pas exactement la paix, quel que soit le nom qu'on lui donne. Quand on regarde la réalité arabe avec les yeux ouverts, il n'est pas évident que ce soit la meilleure solution ». Il a conclu cette partie de sa déclaration de manière pessimiste : « Je n'ai pas besoin de parler de cette question, car nous connaissons les faits. Personne n'est prêt à nous parler de paix ». 


Les archives de Tsahal ont également publié un clip vidéo d'un service commémoratif organisé en 1988 pour le corps blindé, au cours duquel Rabin, qui était alors ministre de la Défense, s'est adressé aux familles endeuillées. Dans le corps blindé, on dit que « l'homme est l'acier ». Je pense le contraire. L'acier est froid, sans vie et sans âme. Il est dur, lourd et passe par-dessus les choses. L'homme n'était pas et n'est pas de l'acier. Il est de chair et de sang, il rit et pleure, il rêve et part à la guerre ; il voyage, il vit sa vie et, si nécessaire, il est prêt à la sacrifier ». En ce qui concerne les morts du corps d'armée, Rabin a déclaré : « Ils étaient des gens comme nous, qui n'étaient pas faits d'acier ; leurs cœurs battaient comme les nôtres et ils voyaient les mêmes choses que nous, entendaient les mêmes sons. Ils voulaient continuer à vivre. Mais lorsqu'ils ont été appelés, ils se sont présentés ».
Il a terminé son intervention en évoquant la force qui unit les familles endeuillées. « Qu'est-ce qui nous amène ici, si ce n'est le désir de se souvenir et de rappeler ? C'est notre désir d'être ensemble... de puiser la force en nous-mêmes, dans la grande famille qui n'a pas de secteurs ni de classes, pas de fêtes, de rivalités ou de disputes, sans que personne ne vienne la perturber », a-t-il déclaré. [Amen, NdT]

DAVID ROSENBERG
Les compagnies aériennes israéliennes doivent faire face seules à l'impact de la guerre sur les vols de et vers Israël

Les compagnies aériennes étrangères fuient Israël et le gouvernement ne fait rien. C'est pourquoi le secteur technologique organise lui-même ses déplacements.

David Rosenberg, Haaretz, 14/11/2024
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

Dans les jours et les semaines qui ont suivi le 7 octobre, un gouvernement inefficace et incompétent n'est pas venu en aide aux civils confrontés à la mort et à la destruction causées par le Hamas. En témoignage de la résilience de la société israélienne, des volontaires et le secteur privé ont comblé le vide. Aujourd'hui, une dynamique similaire se produit, cette fois dans le domaine de l'aviation.

Au cours d'une longue guerre qui ne semble pas près de s'achever, le gouvernement n'a pratiquement rien fait pour remédier au fait que la plupart des compagnies aériennes étrangères ont suspendu leurs vols et que les tarifs des vols disponibles sont montés en flèche. Plus d'un an après le début de la guerre, ce sont les entreprises qui interviennent. On ne sait pas encore dans quelle mesure elles pourront faire la différence à elles seules.
À la date du 13 novembre, 46 compagnies aériennes étrangères avaient suspendu leurs liaisons avec Israël, certaines affirmant qu'elles n'avaient pas l'intention de les rétablir avant un an. Vingt d'entre elles, dont les trois compagnies israéliennes, continuent de voler, mais ce chiffre est trompeur. Parmi les compagnies aériennes qui ne volent pas, on trouve tous les grands transporteurs usaméricains et européens, y compris les compagnies à bas prix. À quelques exceptions près, celles qui volent sont minuscules, comme Air Seychelles.
Le tourisme est en baisse à cause de la guerre : le nombre d'arrivées au cours des dix premiers mois de l'année a diminué de près de 75 % par rapport à la même période en 2023. Mais le nombre d'Israéliens prenant des vols internationaux n'a diminué que de 29 % - et le nombre de vols disponibles pour eux s'est réduit dans des proportions bien plus importantes.
Le déséquilibre entre l'offre et la demande a eu des conséquences évidentes. Une enquête menée par TheMarker a révélé qu'au mois d'août, le prix d'un billet d'avion pour New York sur El Al Airlines s'élevait à 2 950 € (pour un siège haut de gamme, car il n'y avait plus de billets ordinaires en classe touriste). Le même mois, un vol aller-retour pour Londres coûtait 1 100 € et pour Paris, 1 030 €.
Il s'agissait là de prix de pointe - le mois d'août est un mois de grand voyage et un grand nombre de grandes compagnies aériennes venaient de suspendre leurs services. Mais voyager hors saison est également coûteux.
L'enjeu n'est pas seulement que les grands-parents usaméricains ne puissent pas rendre visite à leurs petits-enfants israéliens ou que le coût des vacances en Europe soit devenu prohibitif. La crise de l'aviation a imposé un coût énorme à l'économie.
L'industrie du tourisme elle-même ne s'était pas encore complètement remise de la pandémie de grippe aviaire lorsque la guerre a frappé. Marquée par un effondrement de près de cinq ans, l'industrie ne se rétablira pas rapidement ni facilement après la fin des hostilités. Faire des affaires, en particulier avec l'industrie technologique israélienne hautement mondialisée, est devenu beaucoup plus compliqué si le personnel ne peut pas voler à l'étranger et si les clients et les investisseurs ne peuvent pas venir facilement en Israël. Moins de marchandises peuvent être acheminées en Israël par voie aérienne et, lorsqu'elles le sont, le coût est plus élevé, ce qui exacerbe l'effet des attaques des Houthis sur les marchandises transportées par voie maritime.
Force majeure ou rester chez soi
Dans ces conditions, on pourrait penser que la ministre des Transports s'est attelée à la tâche pour résoudre le problème. S'il n'était pas évident au début de la guerre que les combats dureraient longtemps et qu'Israël serait privé de liaisons aériennes pendant une période prolongée, ça l'était certainement il y a six mois ou plus. En tout état de cause, compte tenu de l'histoire d'Israël en matière de guerres répétées, un plan pour une telle éventualité aurait dû être mis en place dès le 7 octobre.
Mais Miri Regev semble consacrer la majeure partie de son temps à la politique de parti, aux voyages à l'étranger et à l'orchestration de cérémonies d'État plutôt qu'aux transports. La seule chose qu'elle ait faite en ce qui concerne la crise de l'aviation est de s'attribuer le mérite d'une décision de l'Agence de sécurité aérienne de l'Union européenne d'assouplir sa recommandation aux compagnies aériennes, passant de « ne pas opérer » du tout en Israël à « un processus de contrôle rigoureux et une évaluation des risques » avant qu'elles effectuent des vols.
En fait, ce changement n'a eu aucun impact puisque les compagnies aériennes ont décidé d'elles-mêmes de suspendre leurs vols.
Le ministre de l'Économie et de l'Industrie, Nir Barkat, a eu le mérite d'inciter El Al à proposer des tarifs fixes pour quatre destinations qui peuvent être utilisées par les voyageurs pour effectuer des correspondances. Mais comme El Al est de toute façon en concurrence sur ces itinéraires, cette mesure n'a qu'un effet limité. L'Autorité de la concurrence a également le mérite d' avoir enquêté sur les prix élevés des billets d'avion d'El Al.
En ce qui concerne la loi dite Tibi, qui oblige les compagnies aériennes à dédommager les clients jusqu'à concurrence de 1 500 shekels (380 €) en cas d'annulation ou de retard d'un vol, le gouvernement n'a pratiquement rien fait. En mai dernier, il a réduit les pénalités prévues par la loi, mais seulement pour les premières semaines de la guerre - la mesure d'urgence a expiré il y a un an.
Le fait que la loi n'ait pas été appliquée a posé un réel problème : les retards et les annulations de vols en temps de guerre ont exposé les compagnies aériennes à des poursuites judiciaires pour exiger des compensations, même lorsqu'elles peuvent invoquer un cas de force majeure. La semaine dernière, un groupe de transporteurs étrangers a prévenu qu'il ne reviendrait pas en Israël de sitôt si la loi n'était pas modifiée.
Face à l'inaction du gouvernement, le secteur privé propose ses propres solutions.
La première vient des deux plus petits rivaux d'El Al. Israir annonce qu'à partir du 17 novembre, elle assurera 4 à 5 vols hebdomadaires vers l'aéroport londonien de Luton et elle annonce qu’elle ajoutera d'autres destinations. Arkia étend son service vers Vienne et Rome à des heures programmées pour permettre aux voyageurs d'effectuer des vols de correspondance vers l'Amérique du Sud. Elle a intensifié ses vols vers Paris et a ajouté Milan et Budapest à son programme.
Les deux compagnies souhaitent concurrencer El Al sur la liaison clé de New York, qui est aujourd'hui un monopole d'El Al. Mais elles ne prendront le risque que si le gouvernement les aide, notamment en modifiant la loi Tibi.
Entre-temps, la nouvelle compagnie Air Haifa a commencé à proposer des vols vers Chypre le mois dernier (au départ de Tel Aviv, Haïfa étant trop dangereuse) et, à sa manière, atténue la pénurie d'offre. Elle a récemment annoncé qu'elle ajouterait un troisième avion à sa flotte le mois prochain, plus tôt que prévu.
Mais l'effort le plus créatif pour résoudre le problème vient de l'industrie de la haute technologie elle-même. Meta High-Tech, un groupe industriel, cherche à louer des avions et des équipages pour assurer la liaison Tel Aviv-New York trois fois par semaine en janvier, février et mars. « Nous avons décidé de ne pas attendre les solutions du ministère des Transports et de les concevoir nous-mêmes », explique l'organisation.
L'objectif est de permettre aux entreprises de faire venir et repartir leur personnel d'Israël par avion (elles devront commander à l'avance des blocs de billets pour couvrir les frais de location). Mais les billets seront également vendus au grand public à des prix que Meta High-Tech estime raisonnables.
Le secteur privé vient tardivement à la rescousse, non seulement parce que le gouvernement ne le fait pas, mais aussi parce qu'il se rend compte que le marché israélien de l'aviation ne reviendra pas à l'époque d'avant le 7 octobre.
Même lorsque la guerre sera terminée, les compagnies aériennes étrangères ne se hâteront pas de revenir de sitôt. Le tourisme en Israël mettra du temps à se remettre du choc d'un conflit long et destructeur. Une pénurie mondiale d'avions et de personnel signifie que les compagnies aériennes étrangères n'auront pas nécessairement les ressources nécessaires pour revenir sur le marché israélien.
En bref, la guerre offre aux petites compagnies aériennes israéliennes la possibilité de s'emparer définitivement de parts de marché. Mais cela suppose qu'il y ait un marché à conquérir. Beaucoup dépendra de l'économie israélienne d'après-guerre et de l'environnement sécuritaire. Hélas, cela dépend uniquement d'un gouvernement dont l'incompétence a été démontrée et dont l'agenda est douteux.


13/11/2024

AMOS HAREL
La bande à Bibi est prête à réécrire la réalité pour l’exonérer de toute responsabilité dans la déculottée du 7 octobre

Amos Harel, Haaretz, 12/11/2024
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

La vaste campagne de propagande menée par le bureau du Premier ministre vise à convaincre l’opinion publique israélienne que l’establishment de la défense est le seul responsable de l’échec, et à empêcher la création d’une commission d’enquête publique. Une seule chose fait obstacle à cette ligne de défense : les faits.


La carrière politique de Bibi, par Manny Francisco, Philippines

Les enquêtes menées par le service de sécurité Shin Bet et la police israélienne, qui menacent d’impliquer plusieurs personnes au sein du cabinet du Premier ministre, tournent autour d’une seule question principale : les efforts déployés par les membres du cercle rapproché de Benjamin Netanyahu pour le dédouaner de toute responsabilité dans les échecs qui ont conduit au massacre du 7 octobre de l’année dernière et, plus tard, des accusations selon lesquelles il aurait délibérément fait échouer un accord pour la libération d’autres otages.
La vaste campagne d’influence menée par le cabinet du Premier ministre depuis le début de la guerre avec le Hamas dans la bande de Gaza vise à persuader le public israélien et à empêcher la création d’une commission d’enquête nationale sur l’événement. Une partie de l’affaire a fait l’objet d’une enquête criminelle et ravive des tensions de longue date entre Netanyahou, d’une part, et les forces de l’ordre et les hauts gradés de la défense, d’autre part.
Ronen Bergman a rapporté dans Yedioth Aharonot lundi que l’enquête se concentre sur ce que le cabinet du Premier ministre savait de l’opération carte SIM avant le déclenchement de la guerre. Comme cela a été rapporté, le Shin Bet a surveillé des centaines de cartes SIM installées dans les téléphones portables des membres du Hamas à Gaza. Ces cartes devaient permettre aux militants de diffuser des vidéos de l’attaque directement dans la bande de Gaza et de communiquer avec leurs membres après leur passage en Israël. L’activation des cartes SIM était connue en Israël pour signaler une attaque imminente du Hamas - et le Shin Bet savait qu’elles étaient utilisées dans les heures précédant l’aube du 7 octobre. Ce fait, ainsi que les changements de localisation des responsables et des principaux activistes du Hamas, ont été la principale raison des consultations menées par le chef d’état-major des FDI, Herzl Halevi, et le chef du Shin Bet, Ronen Bar, dans les heures qui ont précédé l’attaque.
La ligne de défense publique de Netanyahou est la suivante : « Personne ne m’a prévenu ». Selon sa version des faits, le Shin Bet et Tsahal ne l’ont pas informé avant qu’un barrage massif de roquettes ne s’abatte sur Israël à 6h29 le 7 octobre, et il n’est donc pas responsable de la débâcle. Ses partisans et leurs porte-parole sur les réseaux sociaux et dans les médias ont formulé des allégations plus graves : les renseignements ont été intentionnellement cachés au premier ministre. Ils laissent entendre que cela est lié aux tensions entre Netanyahou et l’establishment de la défense au sujet de la réforme judiciaire et de la menace de milliers de réservistes de ne pas se présenter à leur poste en signe de protestation.
Le mois dernier, Omri Maniv de Channel 12 News a rapporté que le Shin Bet avait effectivement publié une mise à jour concernant l’activation des cartes SIM à 2h58 du matin, par le biais d’un réseau informatique qui fournit des informations simultanément au Conseil de sécurité nationale (qui rend compte directement au Premier ministre) et à la police israélienne. L’avertissement était accompagné d’une déclaration indiquant qu’il pouvait s’agir d’une préparation à une attaque du Hamas.
Plus tard, Bar a décidé d’envoyer deux équipes d’intervention rapide (« Tequila ») dans la zone frontalière de Gaza, mais bien que les évaluations aient continué à parler d’une présence du Hamas le long de la frontière, elles ne prévoyaient pas une attaque simultanée sur des dizaines de sites. Une autre alerte concernant les cartes SIM et d’autres développements inquiétants a été transmise au secrétaire militaire de Netanyahou, le général de division Avi Gil, par le Shin Bet quelques minutes avant le début de l’attaque. Gil en a discuté par téléphone avec Netanyahou au milieu de la première série de tirs de roquettes ; ils ont eu une seconde conversation environ 11 minutes plus tard.
Au cours des trois heures et demie qui ont précédé le début de l’attaque, le bureau du Premier ministre a été tenu informé par deux canaux différents : le Conseil de sécurité nationale et son secrétaire militaire. On ne sait toujours pas exactement quand Gil a été mis au courant et si les informations lui ont été communiquées en temps utile par l’intermédiaire de son conseiller en renseignement, le colonel S.
Netanyahou a affirmé à plusieurs reprises qu’il n’avait entendu parler pour la première fois des événements de cette nuit-là que lors de la conversation qui s’est déroulée à 6h29. Son bureau a même cherché à nier qu’il était au courant du suivi des cartes SIM, et a été contraint de se rétracter lorsqu’il est apparu clairement que cette affirmation était sans fondement.
Quoi qu’il en soit, l’enquête semble montrer que le Shin Bet a tenté d’informer l’équipe de. Netanyahou sur les deux canaux dans les heures qui ont précédé le massacre. Cela contredit la ligne de défense de Netanyahou, qui affirme que l’information lui a été cachée. On peut donc soupçonner que ce n’est pas l’imaginaire « État profond », les FDI et le Shin Bet qui lui ont délibérément refusé l’information ; ce sont plutôt des problèmes dans sa propre cour - son secrétaire militaire et le Conseil de sécurité nationale - qui ont empêché sa transmission rapide.
Si tout ce qui s’est passé cette nuit-là est une absence de rapport, ce n’est pas criminel en soi. Mais cela met en évidence des problèmes opérationnels au sein du cabinet du Premier ministre et sape les efforts déployés pour transférer la responsabilité au Shin Bet. Cela explique probablement les tensions croissantes entre Netanyahou et Bar. Pour Netanyahou, Bar et ses collaborateurs sont les premiers responsables de l’échec, mais au lieu de tomber à bras raccourcis sur le Premier ministre, ils sont engagés dans les enquêtes en cours sur son bureau (les partisans de Netanyahou laissent même entendre qu’ils extorquent des aveux contre lui à ceux qui font l’objet de l’enquête).
Le Shin Bet mène une autre enquête sur l’affaire du vol d’informations sensibles des services de renseignement militaire, qui ont ensuite été divulguées aux médias étrangers. L’enquête a conduit à l’arrestation par le Shin Bet d’Eli Feldstein, l’un des porte-parole du premier ministre, un fait que le cabinet du premier ministre a également tenté de nier dans un premier temps. En outre, quatre autres officiers du renseignement militaire et du Shin Bet ont également été arrêtés. D’autres membres du cabinet du premier ministre et des personnalités qui lui sont proches pourraient être convoqués pour être interrogés.
Le Premier ministre et son entourage sont confrontés à un mouvement de tenaille mené par le Shin Bet. Ceci explique probablement les menaces de limogeage de Bar qui ont émergé la semaine dernière. Le chef du Shin Bet est aussi celui qui a parlé le plus fort dans les discussions internes sur la nécessité de parvenir rapidement à un accord sur les otages avec le Hamas. Bar a récemment répété aux ministres qu’un accord était à portée de main, ce que nie Netanyahou.
Lundi, un autre haut fonctionnaire de la défense a démissionné : Le bureau du nouveau ministre de la défense, Israel Katz, a annoncé que le général de division (à la retraite) Eyal Zamir, directeur général du ministère et nommé par Yoav Gallant, avait demandé à démissionner. Jusqu’à récemment, le nom de Zamir avait été cité comme l’un des principaux candidats à la succession de Halevi en tant que chef d’état-major.
Fermeture pour travaux
Entre-temps, plusieurs personnes impliquées dans l’affaire des procès-verbaux falsifiés ont fait des déclarations. La tentative présumée de modifier les heures officielles des entretiens que Netanyahou a eus avec Gil et d’autres personnes, dans les premières heures qui ont suivi l’attentat du 7 octobre, constitue une infraction pénale évidente.
On soupçonne des personnes de l’entourage du premier ministre d’avoir tenté de modifier les documents pour « améliorer » sa ligne de défense vis-à-vis du 7 octobre et pour en faire porter la responsabilité à l’establishment de la défense.
Entre-temps, un différend est apparu entre le bureau du procureur de l’État et la police au sujet de l’enquête. Le premier a l’impression que la police, qui est contrôlée par le ministre de la sécurité nationale Itamar Ben-Gvir, est influencée par son désir de minimiser les allégations faisant l’objet de l’enquête et de s’assurer qu’elle ne mette pas en danger le premier ministre.
Netanyahou a pris la peine de publier lundi une vidéo dans laquelle il affirme que son bureau « fait l’objet d’attaques sauvages et incontrôlées, alors que le gouvernement et le cabinet que je dirige s’efforcent constamment de repousser nos ennemis qui cherchent à nous détruire ». En plus d’envoyer un message aux autorités chargées de l’enquête, il semble qu’il tente de faire savoir à son peuple qu’il continue à le soutenir et qu’il ne le renoncera pas. Dans le même temps, quelqu’un s’est assuré de divulguer aux médias que Feldstein coopère effectivement avec les enquêteurs, bien qu’il n’ait pas signé d’accord pour livrer les preuves de l’État.
Les personnes qui se sont entretenues avec Netanyahou lundi ont indiqué qu’il était très inquiet au sujet de l’enquête. Lors d’une réunion avec le cabinet de sécurité, il a attaqué la procureure générale Gali Baharav-Miara en réponse aux informations de presse selon lesquelles elle avait l’intention de soutenir le licenciement de Ben-Gvir et a averti que ce serait « un court chemin vers une crise constitutionnelle ».
Netanyahou utilise son implication dans la guerre comme excuse pour une nouvelle tentative, attendue de longue date, de retarder son témoignage dans son procès pénal. Celui-ci était prévu pour le 2 décembre, mais il demande qu’il soit reporté de deux mois et demi.
Ses avocats avancent deux arguments principaux : la première est qu’il n’a pas eu le temps de préparer son témoignage en raison d’une « série d’événements extraordinaires », notamment l’escalade de la guerre à Gaza et au Liban. La seconde est qu’en témoignant dans le bâtiment non protégé du tribunal de district de Jérusalem, il risquerait d’être victime d’une tentative d’assassinat. Ils ont cité le drone du Hezbollah qui a frappé la résidence privée de Netanyahou à Césarée le mois dernier (la famille n’était pas à la maison), endommageant la fenêtre de la chambre du couple.
Il serait intéressant de savoir si une telle demande de sécurité pourrait être soulevée par un citoyen ordinaire cherchant à être exempté de comparaître devant un tribunal de Haïfa ou d’Acre (bien qu’il s’agisse ici d’un risque posé à Netanyahu personnellement).
Les avocats du premier ministre affirment notamment qu’il était occupé en août par des négociations sur les otages. Les cyniques diront qu’à l’époque, Netanyahou et ses collaborateurs étaient surtout préoccupés par l’échec d’un accord, comme l’a révélé la fuite dans le journal allemand Bild, qui est au centre de l’enquête Feldstein.
Quant à l’affirmation selon laquelle la guerre prend tout le temps de Netanyahou, cela ne l’a pas empêché, au cours des deux derniers mois, de trouver le temps d’évincer Gallant, de relancer la réforme judiciaire et de passer de nombreuses heures à trouver un moyen de donner une sanction légale à l’évitement de la conscription par les Haredim [juifs orthodoxes exemptés de service militaire, NdT], alors même que les réservistes s’effondrent sous l’effet de la tension due à des mois de service interminables.


 

11/11/2024

GIANFRANCO LACCONE
Valence : la fin de la société industrielle

Gianfranco Laccone, Climateaid, 8/11/2024
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

Parmi les nombreuses images de la situation tragique de Valence, l’une d’entre elles m’a frappé par sa valeur symbolique. Il s’agit d’un amoncellement de voitures entre les immeubles, dans une étroite rue en pente de la ville espagnole ; empilées au hasard, comme si elles avaient été entassées dans une grande casse automobile, précédées et entremêlées de poubelles, elles sont regardées avec incrédulité, étonnement et résignation par les personnes qui se trouvent à sa base. Mais il s’agissait en fait de voitures neuves, garées le long des rues de la ville et entraînées vers le bas par la furie de l’eau qui s’était abattue pendant quelques heures et qui, en une seule journée, avait dépassé la quantité d’eau qui, en règle générale, tombe en un an.

Je dis « en règle générale », mais la règle n’est plus respectée désormais, sauf, approximativement, dans la quantité totale de précipitations qui, dans la zone méditerranéenne, arrivent sous des formes différentes que par le passé : peu de neige (mais quand elle arrive, elle est abondante), beaucoup de fortes pluies (qui mouillent souvent les gens plus par le bas que sur la tête en raison de la force avec laquelle elles tombent), beaucoup de grêle et de nombreux phénomènes divers tels que des tornades, des ouragans, des éclairs en quantités jamais vues auparavant.
Les images sont frappantes parce qu’elles concernent la destruction des signes de « notre » civilisation occidentale: voitures, autoroutes, supermarchés avec garages souterrains, villes couvertes de béton et d’asphalte, systèmes d’alerte électronique, la structure de la gouvernance. Tout ce qui a explosé en Espagne n’était pas « arriéré » et un vestige d’un système économique industriel obsolète ; au contraire, c’était le fruit de ce que notre civilisation a de mieux à offrir, y compris le mécanisme de consommation des services liés à notre vie. Progressivement, nos villes (l’Espagne n’est pas différente de l’Italie ou de l’Allemagne) ont abandonné la construction de services sociaux (hôpitaux, écoles, administrations) pour devenir des centres de repos (immenses quartiers dortoirs) et de tourisme de consommation rapide. Ce ne sont plus les vacances de la bourgeoisie naissante du XVIIIe siècle que Goldoni décrivait dans sa Trilogie de la villégiature, mais les vacances au pas de course que l’on prend le week-end, en dormant dans les chambres d’hôtes qui ont remplacé les maisons des centres historiques en provoquant la « gentrification » (transformation des quartiers populaires des centres historiques en structures haut de gamme ou commerciales) ou encore dans les bus verts phosphorescents qui sillonnent l’Europe de long en large.

Pour en revenir à la catastrophe espagnole, conséquence évidente du changement climatique, elle n’est pas très différente des catastrophes italiennes de ces dernières années, si ce n’est par l’ampleur des dégâts et des morts. En outre, la faible ampleur des catastrophes italiennes étaient dues au hasard, à la nature pédoclimatique des localités touchées, à la structure hydrographique et à la répartition de la population, et non aux structures socio-économiques existantes. En effet, il y a le paradoxe que les forces politiques de gouvernement - centrales et locales - des deux États, inversement réparties, ont accumulé le même échec et montré la même incapacité à « prévoir » et à « gouverner » le désastre. S’il n’était pas tragiquement criminel Si l’attitude des fascistes espagnols cassant des voitures et en tabassant des dirigeants n’était pas tragiquement criminelle, elle serait risible : qu’ont fait leurs petits copains du gouvernement central en Italie ? Ont-ils été beaucoup plus capables ? Ont-ils changé les choses maintenant qu’ils gouvernent ce pays ? En réalité, l’idéologie industrialiste qui guide nos élites (qu’elles soient de gauche ou de droite) est la même et elle est en faillite.
L’industrie et ses institutions : les associations professionnelles, les syndicats, les coopératives, les structures - étatiques ou privées - qui guident l’éducation, la santé, les secours et les urgences, ont toutes échoué, et en substance ce n’ était pas leur faute. Il est désormais clair que la catastrophe de 2005 USA - les inondations en Louisiane causées par l’ouragan Katrina, avec 1 392 morts et 125 milliards de dollars de dégâts - malgré la responsabilité considérable de l’administration Bush, n’était que partiellement due à l’incapacité administrative et à l’idéologie économique particulière qui croyait au progrès illimité fourni par le marché. La réalité d’aujourd’hui confirme l’incapacité de toute idéologie (socialiste ou capitaliste) à avoir une relation positive avec l’environnement, puisqu’elles placent l’industrie et le marché (social ou du capital) au-dessus de la relation de coopération entre les êtres vivants, du respect de leurs différents besoins, de la prise en compte des temps et des modes de relation avec la Nature. Nous avons déjà écrit que les eaux ont leur propre chemin et que leur respect est un impératif, indépendant de notre époque et de nos structures sociales. 


Ce n’est pas un hasard si l’une des vidéos sur la catastrophe espagnole montre la petite ville d’Almonacid de la Cuba sauvée des eaux par un barrage construit en bordure de la localité pendant l’empire romain, il y a deux mille ans (et qui, heureusement, n’a pas été démoli au cours des siècles suivants).

De plus, les connaissances que nous acquérons ne nous ouvrent pas les yeux sur situation réelle. Le phénomène de la DANA (Depresión Aislada en Niveles Altos - dépression isolée à niveau élevé, ou gouttefroide), que j’avais déjà mentionné en parlant des inondations en Romagne dans un article précédent (ici) est bien connu, à tel point qu’il est expliqué avec des mots simples, accessibles même aux administrateurs, dans un spectacle amusant de Giobbe Covatta « 6 degrés » qui présente ironiquement l’effet de l’augmentation future de la température de notre planète. L’Agenda 2030 a été créé dans le but d’éviter ou au moins de réduire tout ce qui est en train de se produire.
Il n’y a pas de solutions alternatives, les politiques foncières doivent être modifiées et nous devons dire adieu au symbole du progrès : la voiture alimentée par des combustibles fossiles. Comment construire cet avenir ? Il y a une image qui, au milieu de la douleur, nous redonne de l’optimisme : face à la situation d’abandon que tant de vivants (hommes et animaux) ont vécue en Espagne, en Italie, au Maroc, au Bangladesh, face au pillage auquel certains ont été tentés de se livrer, il y a des milliers d’hommes (et d’animaux) qui ont travaillé en coopération ; équipés d’outils rudimentaires, ils ont œuvré pour sauver et reconstruire. Les anges de la boue que nous avons vus à Florence après les inondations de 1966 ont été vus en Romagne et à Valence, et opèrent dans un esprit de coopération dans toutes les autres parties du monde, ridiculisant les énormes progrès technologiques qui sont censés changer nos vies, mais qui en réalité ne les améliorent en rien.
Soixante ans plus tard, ce sont toujours les mains, la pelle et l’esprit de solidarité qui donnent de l’espoir au monde.