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28/10/2022

SUPRIYO CHATTERJEE
Un curry korma pour la Britannia blanche : Rishi Sunak Premier ministre

Supriyo Chatterjee, Tlaxcala, 28/10/2022
Traduit par
Fausto Giudice, Tlaxcala

Près de deux siècles après que Thomas Babington Macaulay,
peut-être l'idéologue le plus éloquent de l'empire britannique, eut rédigé sa vision de la création d' « une classe qui puisse être l'interprète entre nous et les millions de personnes que nous gouvernons ; une classe de personnes, indiennes par le sang et la couleur, mais anglaises par le goût, les opinions, la morale et l'intellect », l'un de ses produits gouverne maintenant la Grande-Bretagne. Ce n'est pas sans importance, mais ce n'est pas non plus une revanche des indigènes périphériques sur la métropole. Il s'agit plutôt d'un triomphe des intérêts de classe sur la couleur de peau de tous les côtés.

Rishi Sunak (ou Rashid Sanook, comme l’a appelé le comique en chef Joe Biden) est jeune, riche, très riche, soigné comme le sont les hommes de sa classe, et un enfant de l'Empire qui ne s'en cache pas. Ses grands-parents ont migré du Pendjab vers l'Afrique et ses parents se sont installés en Grande-Bretagne. En Afrique, les Indiens étaient des travailleurs qualifiés et des commis et servaient de contremaîtres pour superviser la main-d'œuvre africaine. Ils jouaient le rôle d'intermédiaires coloniaux que Macaulay leur avait assigné, cette fois sur un continent étranger.

Les Africains détestaient largement ces colons indiens. La plupart d'entre eux, en tant qu'orientalistes de couleur, suivirent leurs maîtres coloniaux en Grande-Bretagne, préférant affronter le racisme des Britanniques blancs plutôt que de rester dans l'Afrique indépendante ou de retourner en Inde. Le contingent afro-indien, comme la Brigade chinoise de Hong Kong, est férocement fidèle à la Grande-Bretagne et croit en l'idée de son empire civilisé.

Le jeune Sunak, né en Grande-Bretagne, a bénéficié d'une éducation privée privilégiée, a travaillé dans le secteur financier, notamment chez Goldman Sachs, comme le font les yuppies indiens de caste supérieure qui réussissent, car cela n'implique pas de travail manuel, et a épousé la fille d'un milliardaire indien. La plupart des richesses de la famille Sunak proviennent du côté de sa femme, mais elle a maintenant le droit de vivre à Downing Street, un privilège que l'argent peut acheter s'il est investi intelligemment.

En tant qu'enfant fidèle de l'empire, le foyer politique de Sunak est le parti conservateur, qui croit en la devise de Mme Thatcher, à savoir que la cupidité est une bonne chose. Il est le membre du Parlement le plus riche, deux fois plus riche que le roi Charles, et on murmure qu'il a mis de l'argent de côté sur des comptes bancaires offshore. On a découvert que sa femme évitait les impôts en Grande-Bretagne et il a été condamné à une amende pour avoir violé les normes covidiennes. Bref, ses références pour le parti de la loi et de l'ordre sont incontestablement impeccables.

Sunak est un Premier ministre accidentel. Il est au parlement depuis seulement sept ans. En tant que Chancelier pendant le confinement covidien, sa gestion de l'économie se situait entre la médiocrité et le désastre. Il a eu de la chance que Boris Johnson et Liz Truss aient trébuché dans leurs fonctions.  Le parti travailliste d'opposition a purgé son aile socialiste et s'est refondu en équipe B de l'establishment. Le Brexit a radicalisé la base conservatrice, si bien que Sunak a dû être nommé plutôt qu'élu par les membres du parti, qui auraient à nouveau voté Boris.

Les adversaires de Sunak se sont retirés de la course sans dire pourquoi ni qui les avait persuadés de le faire et les hommes de l'ombre ont adoubé Sunak comme leur homme. La version britannique de l'État profond a vu en lui une paire de mains sûres, leur meilleur pari dans un champ médiocre. Sunak n'est pas le premier chef de gouvernement d'origine indienne en Europe : l'Irlande et le Portugal en ont déjà eu. Sa position de Premier ministre britannique de couleur est néanmoins une nouveauté. Macaulay était peut-être un visionnaire, mais il est difficile de croire que même lui aurait prédit que la classe dirigeante britannique aurait un jour besoin d'un “indigène assimilé” pour garder la population blanche sous contrôle. Pire, la menace d'Enoch Powell de rivières de sang a été réduite à un torrent écumant de curry insipide.

SUPRIYO CHATTERJEE
Rishi Sunak PM: Karma curry for white Britannia

Supriyo Chatterjee, Tlaxcala, 28/10/2022

Almost two centuries after Thomas Babington Macaulay, perhaps the most eloquent ideologue of the British empire, drafted his vision of crafting “a class who may be interpreters between us and the millions whom we govern; a class of persons, Indian in blood and colour, but English in taste, in opinions, in morals, and in intellect”, one of his products now governs Britain. This is not without significance, but neither is it a revenge of the peripheral natives on the metropolis. More a triumph of class interests over skin colour on all sides.

Rishi Sunak (or Rashid Sanook, as comedy gold Joe Biden called him) is young, rich, very rich, well-groomed as men of his class are,  and an unapologetic child of the Empire. His grandparents migrated to Africa from Punjab and his parents moved to Britain. In Africa, the Indians were skilled workers and clerks and supervised African labour. They played the part of colonial intermediaries that Macaulay had set out for them, this time in an alien continent.

The Africans largely detested these settler-colonial Indians. Most of them, as Orientalists of colour, followed their colonial masters back to Britain, preferring to face the racism of the white Britons to staying in independent Africa or returning to India. The African Indian contingent, like the Hong Kong Chinese brigade, is ferociously loyal to Britain and believes in the idea of its civilised empire .

Young Sunak, born in Britain, had privileged private education, worked for the financial sector, including at Goldman Sachs, as successful higher-caste Indian yuppies do since it does not involve manual labout and married the daughter of an Indian billionaire. Most of the Sunak family wealth comes from his wife's side, but now she gets to live in Downing Street, a privilege money can buy if cleverly invested.

As a loyal child of the empire, Sunak's political home is the Conservative Party where they believe in Thatcher's motto of greed is good. He is the richest member of Parliament, twice as rich as King Charles, and there are whispers that he has put away money in offshore bank accounts. His wife was found to be avoiding taxes in Britain and he was fined for violating Covid norms. In short, there can be no questions of his impeccable credentials for the party of law and order.

Sunak is an accidental Prime Minister. He has been in parliament for only seven years. As Chancellor during the Covid lockdown, his handling of the economy was somewhere between poor and disastrous. He was lucky that Boris Johnson and Liz Truss both stumbled in their jobs.  The opposition Labour Party has purged its Socialist wing and recast itself as an establishment B team. Brexit has radicalised the Conservative rank and file, so Sunak had to be appointed rather than elected by party members, who had have voted Boris in again.

Sunak's opponents withdrew from the race without saying why or who had persuaded them to and the men in the shadows annointed Sunak as their man. The British version of the deep state saw in him a safe pair of hands, their best bet in a mediocre field. Sunak is not the first ethnic Indian head of government in Europe: Ireland and Portugal have had them before. His position as a British Prime Minister of colour is nevertheless a novelty. Macaulay might have been a visionary, but it is difficult to believe that even he would have predicted that the British ruling class would one day need a “learned native” to keep the white population in check. Worse, Enoch Powell's threat of  rivers of blood has been reduced to a foaming torrent of tasteless curry.