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07/03/2024

MICHAEL LESHER
Le côté obscur du Rabbi de Loubavitch

NdT
Originaire du village de Lioubavitchi, dans l’oblast de Smolensk, en Russie (aujourd’hui en Belarus), la secte des Loubavitch (appelée Habad, acronyme hébraïque désignant les trois facultés intellectuelles traditionnelles : ‘hokhmah – la sagesse, binah – la compréhension et daat – la connaissance) est une dynastie hassidique établie au XVIIIème siècle. Elle a commencé à acquérir une dimension mondiale à partir de l’installation du, sixième rebbe du mouvement, Yossef Yitzchok Schneersohn, à Brooklyn dans les années 1940. Son beau-fils Menachem Mendel Schneerson (1902-1994), considéré par ses adeptes comme « le Roi Messie », en a fait une multinationale florissante présente sur toute la planète, avec des milliers de centres, écoles, entreprises, boutiques, camps de vacances, centres aérés et sites ouèbe. Résolument modernistes et pragmatiques, les Loubavitch ne s’embarrassent pas des interdits promulgués par les autres sectes hassidiques et utilisent tous les moyens technologiques pour diffuser leur message et recruter des adeptes. Et surtout, à la différence d’autres sectes hassidiques comme les Neturei Karta, ils considèrent que l’État sioniste est parfaitement cacher. Très présents et actifs en Israël, ils y possèdent trois villes : Kfar ‘Habad (fondée en 1948), Na’halat Har ‘Habad (1969) et Kiryat ‘Habad (1979) et, comme ils le disent, « la relation spéciale entre ‘Habad et les Forces de Défense d’Israël est légendaire ». On assiste depuis plusieurs années à une mutation du sionisme : mouvement politique créé par des Juifs bourgeois de langue allemande entièrement laïques ou même athées, mis en pratique par des Juifs ashkénazes non-religieux de langue russe, polonaise et/ou yiddish, et généralement socialistes ou communistes (les fondateurs de l’État d’Israël), le sionisme est aujourd’hui majoritairement religieux. Incapable de se légitimer par des arguments rationnels, il s’est rabattu sur l’invocation d’une mission divine et messianique, en tripatouillant les textes fondateurs du judaïsme. Les Loubavitch ont joué un rôle décisif dans cette involution. D’où l’intérêt du texte ci-dessous, toujours actuel -FG

Le côté obscur du Rabbi de Loubavitch

Michael Lesher, Gilad Atzmon’s webpage, 15/4/2017
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

 L’article ci-dessous a été publié sur le blog du site du Time Of Israel le 14 avril 2017.  Il a rapidement été supprimé par ce média sioniste.  C’est la première fois que je publie un article de Michael Lesher qui est un juif orthodoxe ainsi qu’un courageux lanceur d’alerte. Dans cet article, Lesher examine le militarisme, le racisme et la sionisation qui sont devenus dominants au sein de l’orthodoxie juive contemporaine. À lire et à diffuser largement.-GA

Le 18 avril marque le 115e anniversaire de la naissance de Menachem Mendel Schneerson, le défunt Lubavitcher Rebbe. Schneerson, qui a pris la tête d’une secte hassidique en difficulté à Brooklyn en 1951, était à sa mort en 1994 sans doute « le Juif le plus influent depuis Maïmonide », et c’est sur cette influence que je souhaite écrire - en particulier parce que, au cours des quelque 20 années qui ont suivi sa mort, les souvenirs du charisme personnel du Rebbe ont largement éclipsé le compte rendu de son enseignement réel.

Ce dollar béni par le Rebbe est en vente pour 1800$ sur ebay. On gagne sa vie comme on peut !

Je note d’emblée que je n’ai ni les compétences ni le désir d’essayer d’analyser l’ensemble de la doctrine religieuse du Rebbe. De son rôle en tant que prêtre et chef de communauté, je n’ai pas grand-chose à dire, n’ayant jamais vécu dans une enclave à prédominance loubavitch. De plus, n’ayant pas eu de contact avec lui, je ne suis pas en mesure d’écrire sur ses qualités personnelles ; je suis prêt à admettre qu’elles étaient impressionnantes.

Je m’intéresse davantage au côté sombre de l’enseignement du Rabbi.

Car ce côté sombre – un fatras de messianisme apocalyptique et de racisme manifeste au cœur de l’enseignement du Rebbe - est probablement sa contribution durable au monde juif, dans lequel son prestige (en grande partie grâce aux hagiographies populaires de Joseph Telushkin et d’Adin Steinsaltz) continue d’augmenter alors même que les discussions sérieuses sur son héritage ont pratiquement disparu.

Pire encore, l’enseignement du Rebbe a de graves conséquences pratiques. Certains de ses sermons les plus véhéments ont été consacrés à la promotion du militarisme au Moyen-Orient. Alors que la violence d’Israël contre ses Untermenschen palestiniens s’intensifiait et que ses attaques contre les pays voisins atteignaient de nouveaux sommets de sauvagerie, le Rebbe rationalisait l’occupation et encourageait l’assaut militaire d’Israël contre le Liban en 1982, tout comme il allait encourager le carnage mené par les USAméricains en Irak neuf ans plus tard. Il est certain qu’un religieux musulman qui prêcherait des choses similaires serait frappé d’anathème dans tout le monde occidental. Pourquoi, dans ce cas, le Rebbe bénéficie-t-il d’un passe-droit pour son bellicisme en faveur de l’oppression de la Palestine - certainement la plus vilaine tache sur la tradition juive à l’époque moderne ?

La question ne peut être éludée. Le Rebbe n’a pas seulement toléré l’oppression israélienne. Il l’a encouragée.

Dans Eyes Upon the Land, un livre explicitement « basé sur les déclarations publiques et les écrits du Lubavitcher  Rebbe», le lecteur apprend que « chaque pouce de territoire en Israël », y compris « les terres prises lors de la Guerre des Six Jours », doit être tenu par l’utilisation de la force militaire juive, sans tenir compte du droit international ou des conséquences pour la population non-juive. Pourquoi ? Parce que « l’Arabe ordinaire de la rue » ne cherche rien de moins que « la domination arabe sur toute la terre de Palestine » et considère tous les Israéliens avec « une haine profonde ». Le Rebbe n’a jamais apporté la preuve qu’une armée palestinienne inexistante submergerait d’une manière ou d’une autre les forces militaires massives d’Israël - il n’y en a pas - mais la question plus sombre est de savoir pourquoi l’insistance du Rebbe sur la domination juive sur la même terre, et la haine profonde des Palestiniens et des autres Arabes qu’il encourageait (pendant le massacre par Israël de plus de 17 000 personnes au Liban en 1982, le Rebbe a critiqué à plusieurs reprises les Israéliens pour leur trop grande timidité) ne justifiait pas l’utilisation de la force par les Arabes contre leurs agresseurs juifs. La seule réponse possible est la réponse évidente : Les Juifs sont différents des non-Juifs par définition. Les objectifs juifs importaient au Rebbe. Les vies arabes ne comptaient pas.

Et l’occupation militaire de la Cisjordanie et de Gaza par Israël ? Au cours de la première Intifada, le Rebbe a prêché avec insistance contre le moindre assouplissement des conditions d’oppression qui avaient déclenché la révolte populaire désespérée (et non violente dans son écrasante majorité). « Les concessions convainquent les Arabes de la faiblesse d’Israël », affirmait-il. « Même le simple fait d’évoquer d’éventuelles concessions est préjudiciable car ça encourage l’activité terroriste ». Meir Kahane lui-même n’aurait pas pu le dire plus brutalement.


FALAFEL POUR LES SOLDATS

“Habad de Hébron a lancé un programme “Adoptez un soldat”. Les shluchim [missionnaires] Rabbi Danny Cohen et Rabbi Mordechai Hellinger achètent le repas auprès d'entreprises locales en difficulté, car le tourisme dans la ville sainte, où se trouve le Tombeau des Patriarches, a pratiquement disparu en raison de la pandémie, et le remettent aux troupes de Tsahal stationnées dans la région en guise de remerciement pour leur service.” 


Le lecteur ordinaire entend rarement parler de tout cela : une grande partie de ce qui passe pour des commentaires sur l’œuvre du Rebbe n’est que de la propagande. Dans Toward a Meaningful Life, un livre qui se veut une distillation des enseignements du Rebbe, Simon Jacobson affirme que « le Rabbi a enseigné - et incarné - un message nettement universel, appelant toute l’humanité à mener une vie productive et vertueuse, et appelant à l’unité entre tous les peuples ». En fait, Schneerson a fondé son enseignement sur le texte traditionnel hassidique connu sous le nom de Tanya, un ouvrage profondément raciste selon lequel seuls les Juifs sont dotés d’une âme pleinement humaine. Certes, Schneerson était loin d’être le seul prédicateur raciste au monde, mais il est difficile d’imaginer que des panégyriques comme ceux de Jacobson puissent circuler à propos, par exemple, de David Duke [suprémaciste blanc US, ancien Grand Sorcier du Ku Klux Klan, devenu trumpiste, NdT].

27/03/2023

AVI GARFINKEL
Pour comprendre la mentalité des colons juifs, il faut lire cet éloge funèbre prononcé par le rabbin Eliezer Melamed

Avi Garfinkel, Haaretz, 24/3/2023
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

L’éloge funèbre prononcé par le rabbin Eliezer Melamed lors des funérailles de deux victimes du terrorisme devrait être une lecture obligatoire pour quiconque souhaite se faire une idée de l’israélitude contemporaine, qui se confond avec la vision du monde des colons.

“À encadrer et accrocher”, a écrit le journaliste de télévision Amit Segal à la suite de la décision inhabituelle des rédacteurs de l’hebdomadaire hébraïque Makor Rishon de consacrer la couverture de leur magazine du 3 mars non pas à une photographie, mais à un texte : l’éloge funèbre prononcé par le rabbin Eliezer Melamed lors des funérailles de Hallel et Yagel Yaniv, les deux frères assassinés lors d’un attentat terroriste dans la ville de Huwara, en Cisjordanie, le 26 février dernier. Le directeur général de Makor Rishon, Doron Bainhorn, a fait remarquer que “l’éloge du rabbin devrait être étudié dans les écoles” - et il a raison.

C’est un texte exemplaire, non seulement parce qu’il est bien écrit et émouvant, mais aussi parce qu’il illustre parfaitement le mode de pensée des colons, qui est en train de devenir le mode de pensée général des Israéliens, et en tout cas celui du gouvernement. Quiconque veut comprendre l’israélitude - d’où elle vient et où elle va - devrait lire ce texte.

L’éloge funèbre en couverture du magazine Makor Rishon

Le rabbin Melamed a déclaré : « Tout juif tué simplement parce qu’il est juif est saint ». En d’autres termes, la seule raison des attaques terroristes est la haine insondable des Juifs, qui n’est pas liée aux actes des Juifs ou à leur comportement, ni au sentiment qu’ont les auteurs de ces attaques que les Juifs leur ont fait du tort. Dans le monde de Melamed, il n’y a pas de dépossession de la terre, pas d’expulsion, pas d’actes de violence contre des Palestiniens innocents, pas de dégâts matériels, pas d’humiliation. Les attaques palestiniennes ne peuvent pas être considérées comme une vengeance pour les actions des Juifs, de la même manière que les Juifs ont vengé le meurtre des frères Yaniv à Huwara [en commettant un pogrom, NdT].

Selon le rabbin Melamed, ces actes sont motivés par un pur antisémitisme : les Juifs sont assassinés uniquement en raison de leur judéité. Cela n’explique évidemment pas pourquoi les Palestiniens n’ont pas coutume d’assassiner des Juifs dans d’autres endroits du monde. La division est simple et nette : les Juifs sont des victimes, les Palestiniens sont des délinquants.

Il convient de noter qu’aux yeux de Melamed, tout juif tué pour sa judéité est qualifié de saint, l’accent étant mis sur “tout”. En d’autres termes, même les meurtriers, les violeurs, les voleurs et autres pécheurs s’élèvent au niveau de la sainteté simplement en raison des circonstances de leur mort, et cela ne fait aucune différence si, dans leur vie, ils étaient des mécréants. Melamed étend la classification de la sainteté à l’ensemble de la population des colons : « Si c’est ce que l’on dit de chaque Juif, on devrait certainement le dire des colons qui vivent sur la ligne de front de la colonisation de la Judée-Samarie [Cisjordanie] ».

Et quelle est la signification de la sainteté, selon Melamed ? « Ils sont élevés et sanctifiés dans la sainteté de l’ensemble d’Israël, au point qu’aucun être vivant ne peut se tenir aussi haut en leur présence. » Ce qui revient à dire que la sainteté est la suprématie des saints sur ceux qui ne le sont pas, des colons sur ceux qui ne le sont pas.

Il s’agit d’un point critique à une époque où la suprématie juive en Israël est en train de se transformer en une suprématie des juifs religieux et des colons juifs sur les juifs laïques, et certainement sur ceux de gauche. Cela explique pourquoi les Hardalim (nationalistes ultra-orthodoxes) ne ressentent ni culpabilité ni honte lorsqu’ils exigent de l’État des ressources supplémentaires (telles qu’une allocation d’étude plus élevée), tout en insistant pour contribuer moins - par le biais de réductions de l’impôt foncier, d’avantages fiscaux, d’un service militaire abrégé pour les étudiants des hesder-yeshiva*, ou d’une exemption totale du service militaire et du travail pour les hommes haredi.

Du point de vue des Hardalim, il n’y a pas ici de remise en cause de l’égalité au sens large. L’égalité exige un traitement égal pour des égaux, mais selon eux, les étudiants de la Torah et les colons sont tout simplement plus égaux et méritent donc plus. C’est la raison sous-jacente de ce que de nombreuses personnes laïques considèrent comme de la cupidité, de la cochonceté, un manque de solidarité, un pillage des caisses publiques lors des délibérations budgétaires ou des discussions sur l’obligation de servir dans les forces de défense israéliennes et de participer au marché du travail. Selon ces juifs religieux, quiconque contribue davantage mérite davantage - un argument qui, soit dit en passant, est en contradiction avec la critique qu’ils adressent au personnel de haute technologie qui s’oppose au coup d’État, affirmant que « ce n’est pas parce que vous payez plus d’impôts que votre voix vaut davantage ».

Aussi infondé soit-il, il est nécessaire de comprendre que le sentiment de suprématie de ces Juifs religieux est authentique, même et surtout là où il atteint l’absurdité absolue. « Nous ne sommes pas revenus dans notre pays pour déposséder les Arabes de leurs maisons », explique le rabbin Melamed, « mais plutôt pour ajouter de la bonté et de la bénédiction au monde. Les Arabes pourraient également en bénéficier. »

Dans ce monde cul par-dessus tête, les Arabes vivant dans les territoires, qui n’ont même pas le statut de citoyens jouissant des mêmes droits, sont censés considérer la présence des colons parmi eux comme une bénédiction. Le rabbin Melamed, qui dirige la Yeshiva Har Bracha, ne précise pas quelle bénédiction les colons ont apportée à leurs voisins. Le droit des Arabes, comme celui de toute personne, de rejeter une bénédiction qui leur est offerte n’a pas sa place dans le monde de Melamed. Selon cette logique, la société laïque doit elle aussi accepter le fait que la communauté des apprenants s’occupe de la Torah comme une bénédiction qui la protège et qui protège son identité, et la financer, même si le public laïque pense, “à tort”, qu’il n’en a pas besoin.

Les gauchistes doivent faire avancer, et avec reconnaissance, les colonies auxquelles ils sont opposés, parce que les colons « continuent à coloniser notre terre sainte, et protègent le peuple et la terre avec leur propre corps ». Là encore, Melamed ne prend pas la peine d’expliquer comment des enfants, des personnes âgées et des femmes qui ne portent pas d’armes et s’installent au milieu d’une population arabe hostile défendent la terre. Ni comment un projet qui déchire le peuple le protège. C’est une évidence, un postulat de base qui ne sera pas examiné précisément parce qu’il est manifestement erroné.

Vers la fin de l’éloge, le rabbin Melamed a réitéré le cliché anachronique selon lequel les colons « continueront à construire la terre et à faire fleurir le désert », comme si la quasi-totalité des travaux de construction effectués dans le pays n’étaient pas réalisés par des travailleurs arabes et d’autres Gentils. Comme si la terre était un désert vide. Comme si l’essentiel de la construction et du travail de la terre effectué par les Juifs - la quasi-totalité, en fait - n’avait pas été réalisé il y a longtemps, par des pionniers laïques et socialistes qui s’étaient rebellés contre la loi juive.

Le titre de l’éloge funèbre de Melamed, “Mourir et conquérir la montagne”, est une paraphrase de l’hymne du mouvement Betar de Ze’ev Jabotinsky, “Mourir ou conquérir la montagne”. Le laïc Jabotinsky reconnaissait au moins la possibilité d’une perte et d’un échec, qui peuvent à leur tour aboutir à un désastre, comme cela s’est produit pendant la période de la révolte contre les Romains : « Mourir ou conquérir la montagne - Yodfat, Massada, Betar** ». Mais dans le texte de Rabbi Melamed, le mot “ou” est remplacé par “et”. Selon Melamed, « si nous devons vivre, nous vivrons ; et si nous devons mourir, nous mourrons, et après nous, nos amis continueront à conquérir la montagne ».

Même si nous mourons, comme les Juifs de Massada en 73 ou 74 de l’ère chrétienne, la montagne sera conquise. Ce sera un succès. Et pourquoi tout cela ? Parce que le véritable succès ne se mesure pas dans ce monde, mais dans l’autre : « Tous les saints Juifs semblent morts, mais dans le monde de la vérité, ils sont bien vivants... En mourant pour la sanctification d’Hachem [Dieu], ils se sont connectés à la source de la vie ». Ce qui est important, c’est le monde de la vérité, et non le monde du mensonge, c’est-à-dire la réalité dans laquelle nous vivons et dont tant de colons sont déconnectés de manière inquiétante.Haut du formulaire

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Ce dont nous avons besoin, ce n’est pas de conquérir la montagne, mais d’en descendre, et vite.

NdT

*Hesder (hébreu : הסדר "arrangement") est un programme de yeshiva israélien qui combine des études talmudiques avancées avec le service militaire dans les forces de défense israéliennes, généralement dans un cadre sioniste religieux. Ce programme permet aux hommes juifs orthodoxes de servir dans l’armée israélienne tout en continuant à étudier la Torah. Le service Hesder dure généralement cinq ans au total, au cours desquels les participants sont officiellement des soldats des FDI. Au cours de ces cinq années, 16 mois sont consacrés au service militaire proprement dit, comprenant à la fois l’entraînement et le service actif. Dans certaines Yeshivas de Hesder, le service dure six ans, dont 24 mois de service militaire. Presque tous les étudiants des Yeshivas Hesder servent dans l’armée en tant que soldats de combat. Les appelés laïques sont astreints à un service actif minimum de 32 mois pour les hommes et 24 pour les femmes.

**Yodfat : village juif assiégé puis détruit par l’armée romaine en 67 ap. J.-C..

Massada : forteresse zélote assiégée par l’armée romaine en 72-74, dont les survivants se suicidèrent plutôt que de se rendre. De nos jours, c’est sur cet éperon rocheux que les officiers israéliens de l’armée blindée viennent prêter serment ou que les pilotes de chasse de Tsahal se voient solennellement remettre leur insigne et qu’a lieu la prestation de serment de diverses troupes de Tsahal, dont les parachutistes. C’est là qu’ils répètent, avec leur promotion, les vers du poème épique composé par Yitzhak Lamdan), Massada, publié en 1927, si cher aux pionniers du sionisme : « Non, la chaîne n’est pas rompue sur le sommet inspiré. Plus jamais Massada ne tombera. »

Betar : nom d’une ancienne cité-forteresse de Judée, située au sud-ouest de Jérusalem, et connue comme le dernier lieu de résistance juive à l’Empire romain en 135 ap. J.-C., dont le chef était Shimon Bar-Kokhba, considéré par ses partisans comme le Messie.

 

 

12/12/2022

DANIEL LANDES
L’échec moral profond de “Sionisme religieux”

Daniel Landes, Haaretz, 11/12/2022
Traduit par
Fausto Giudice, Tlaxcala

Le rabbin Daniel Landes, né à Chicago, a dirigé de 1995 à 2016 l’Institut Pardes pour l’éducation juive ; il est le fondateur et directeur de l’organisation religieuse YASHRUT, qui construit un discours civil à travers une théologie de l’intégrité, de la justice et de la tolérance. YASHRUT comprend une initiative de semikhah (ordination de rabbins) ainsi que des programmes pour les dirigeants rabbiniques.

Les trois figures clés du parti sioniste religieux d’extrême droite, qui siégeront bientôt au gouvernement de Netanyahou, ne sont pas seulement un mélange délétère de fondamentalisme, de loi de la populace et de machisme messianique. Ils sont, ainsi que la communauté qui les a propulsés au pouvoir, une tache sur notre foi juive.

Des colons israéliens se battent avec des Palestiniens à Hébron le mois dernier : un sionisme religieux avili se dirige vers une sainteté sans retenue et un Dieu sans pitié ni justice. Photo : MUSSA ISSA QAWASMA/ REUTERS

Je suis un sioniste religieux convalescent. Je ne peux pas appartenir à une idéologie qui, dans son hyper-nationalisme, s’apparente aux politiques sauvages et dictatoriales de Viktor Orbán en Hongrie, et dans son fondamentalisme religieux haineux, au racisme virulent et au messianisme farfelu de Louis Farrakhan. Les sionistes religieux s’emparent de la Torah et la présentent à travers un triste miroir de maison de fous, avec des abcès théologiques et des distorsions éthiques qui nous effraient à juste titre.

Le sionisme religieux contemporain rejette la sagesse du judaïsme rabbinique. Confronté à une crise de vie ou de mort il y a 2 000 ans, le judaïsme rabbinique n’est pas devenu asinien, stupide et mesquin comme le sionisme religieux d’aujourd’hui ; il est plutôt devenu sérieux, intelligent et chaleureux.

Le judaïsme rabbinique a dû trouver comment survivre afin de s’épanouir, et survivre signifiait déclarer nos valeurs fondamentales en tant que Juifs. En relatant un vote secret du Sanhédrin dans la clandestinité [Traité Sanhédrin 74a], les dirigeants juifs de l’époque ont établi une nouvelle règle extrêmement importante - en changeant la lecture d’une lettre de la Bible. C’est une leçon pour les fondamentalistes juifs d’aujourd’hui.

Le verset (Lev. 18:5) conclut une liste de formes de commandements divins (mitzvot), se terminant par l’injonction que ceux-ci sont « ce qu’une personne doit faire et vivre par eux ». L’implication de la conjonction vav dans va’chai (“et vivre”) est que l’on ne vit que par l’observance des mitzvot, et que l’on doit choisir de les observer, même si cela exige une mort de martyr.

Dans une lecture révolutionnaire, les rabbins ont changé le vav pour signifier "mais", donnant ainsi au verset le sens de "mais vis par elles" (et non pas meurs par elles). Par cette élévation d’un nouveau principe, les rabbins ont décrété que l’on doit plutôt transgresser la grande majorité des commandements de la Torah (610 sur 613) si l’observance signifie la mort.

Selon les termes du Dr Maïmonide, il s’agit d’une amputation radicale qui vise à sauver le corps - en référence à la vie d’un individu, au corps politique et au corps des lois juives. En effet, cela a conduit à la conscience juive ultérieure et capitale que le but des commandements est de nous conduire à la Vie elle-même.

La Torah n’est pas le pacte de suicide que les sionistes religieux d’aujourd’hui envisagent, qu’il s’agisse du parti d’extrême droite portant ce nom qui est sur le point de siéger au gouvernement de Netanyahou ou de la communauté qui les y a propulsés.

Leur interprétation de la Torah met en avant la promesse de s’emparer du Mont du Temple et la menace d’expulser des millions d’Arabes israéliens et palestiniens, en s’engageant à ce que ceux qui restent vivent dans des conditions misérables et serviles. Il s’agit moins d’une politique que d’une incitation à l’action collective de la populace. Devons-nous tous devenir des colons, sans même prendre la peine de porter des masques, descendant matraquer les familles de fermiers palestiniens ?

Pour les théocrates juifs d’extrême droite d’aujourd’hui, comme Itamar Ben-Gvir du sionisme religieux, leur messianisme triomphaliste ne s’embarrasse pas de la peur de l’apocalypse. Photo : Oded Balilty /AP

Bien sûr, leur messianisme triomphaliste ne s’embarrasse pas de la crainte d’une apocalypse ; le salut de leur dieu se manifeste par la création de nouveaux faits sur le terrain. Même le grand rabbin Akiva, l’avocat rabbinique du messie raté du deuxième siècle, Bar Kokhba, verrait la bêtise que cela implique.

Selon les normes talmudiques, les sionistes religieux font encore bien pire sur le plan théologique. L’ancien Sanhédrin soutenait qu’il y avait trois exceptions au principe primordial du choix de la vie : l’idolâtrie, le viol et le meurtre. Ces absolus représentent la rupture des alliances avec Dieu, avec sa propre décence intérieure, avec l’autre et avec la société humaine.

La violation de tous ces absolus et de toutes ces alliances a trouvé de nouvelles manifestations chez les théocrates juifs d’extrême droite d’aujourd’hui.

Premièrement : l’idolâtrie. Le sionisme religieux est obsédé par la kedushah (“sainteté”) et ne comprend pas que la seule véritable kedushah réside en Dieu. Toutes les autres saintetés ne sont que des dérivés, comme le grand Meshekh Chokhmah (Rabbi Meir Simcha de Dvinsk, 1843-1926) l’a soigneusement souligné.

Faire en sorte que la sainteté du Temple rivalise avec Dieu ou que la sainteté de la Terre et la sainteté du Peuple semblent faire partie de Dieu lui-même, n’est pas seulement une erreur, mais une idolâtrie. Et c’est vers cela que se dirige le sionisme religieux, vers une sainteté sans retenue et un Dieu sans miséricorde ni justice.

Des visiteurs juifs religieux, surveillés par les forces de sécurité israéliennes, gesticulent en visitant le Mont du Temple et la mosquée Al-Aqsa dans la vieille ville de Jérusalem cette année. Photo : AMMAR AWAD/ REUTERS

Deuxièmement : les agressions sexuelles. Le défilé des “saints” rabbins religieux sionistes intoxiqués par Dieu et accusés d’abus, leurs étudiants confiants qui ferment leurs oreilles en signe de déni, tous affirmant qu’il existe une conspiration contre eux, s’est effectivement normalisé. Le mélange nocif de piété, de pouvoir et de sainteté de ces hommes (qui prouvent leur machisme mishnaïque en menaçant la communauté LGBTQ) est une tache sur notre foi.

Enfin, le meurtre, notre aversion pour les effusions de sang. Lorsqu’on a demandé au grand commentateur du deuxième siècle, Rabbah, si l’on pouvait causer la mort d’un autre pour sauver sa propre vie, il a répondu : « Plutôt être tué que de tuer. Qui dit que votre sang est plus doux ? Peut-être que son sang est plus doux ». Ce principe n’est pas basé sur un verset biblique mais s’appelle sevarah - logique morale.

Bien sûr, nous devons nous défendre, car après tout qui dit que la vie d’un agresseur est plus douce que la nôtre. Mais donner l’autorité de l’application de la loi à ceux qui menacent facilement les autres, qui ne maintiennent la sécurité que pour une partie de la population d’Israël, qui nient manifestement l’humanité de tant d’autres, c’est tolérer et promouvoir les effusions de sang. En outre, dire à des millions de personnes qui s’identifient comme juives dans la diaspora et en Israël d’aller se faire voir ailleurs est, non seulement sur le plan de la sécurité, tout simplement stupide, mais aussi moralement répréhensible.

Nous, les sionistes religieux, qui nous opposons au (parti) Sionisme religieux dans son incarnation actuelle, avilie et extrémiste, le faisons parce que nous croyons en Dieu comme au vrai Saint. Les valeurs humaines du judaïsme rabbinique rejettent le messianisme dévoyé et toxique, mais célèbrent la véritable logique morale qui ordonne : « Et vivez par eux ».

08/12/2022

GIDEON LEVY
Che Lapid et Benny Guevara

Gideon Levy, Haaretz, 8/12/2022
Traduit par
Fausto Giudice, Tlaxcala

Un Israël, complaisant, rassasié, vantard et satisfait de lui-même, appelle à descendre dans la rue. Les places de la ville tremblent d'impatience, les rues s'embellissent : La grande manifestation est en route. Benny Gantz menace de « faire trembler le pays », comme il a un jour menacé le Liban, Yair Lapid menace Benjamin Netanyahou : « Vous n'avez encore rien vu, nous ne faisons que commencer » (Haaretz, 5 décembre). Si c'est ainsi que Lapid commence, la fin est claire : Ho, Che Lapid et Benny Guevara.

Benny Gantz et Yair Lapid à la Knesset, 2019. Photo : RONEN ZVULUN / REUTERS

C'est bien que la société civile s'éveille à l'action. Il est clair qu'il n'y a rien de plus légitime. Même les accusations de la droite selon lesquelles une rébellion est en train de s'organiser sont un non-sens : organiser une rébellion civique est permis, parfois même obligatoire. C'est ainsi que cela se passe dans une démocratie, et dans une dictature aussi : les gens essaient de se rebeller contre ce qui est inacceptable et exaspérant. Un appel aux chefs des autorités locales pour qu'ils ne coopèrent pas avec le gouvernement central est exactement ce qu'il faut faire quand on a le sentiment que le pays est mené vers le bord d'un abîme.

Il n'y a qu'un seul petit problème avec cet esprit combatif qui s'est emparé du camp qui a perdu les élections : comme toujours, il choisit les sujets de la contestation uniquement dans ses zones de confort. Il n'y a jamais de sujets controversés au sein même du camp, et ils ne nécessitent jamais de courage. Avi Maoz en est un excellent exemple. Qui est en faveur de Maoz ? De tous les problèmes qui nous attendent, le camp a choisi le vice-ministre désigné comme sa prochaine poupée vaudou. Bien sûr, c'est un béotien, un fondamentaliste et un raciste, mais est-il la plus grande menace du nouveau gouvernement ?

En Israël, la protestation est une denrée rare, et lorsqu'elle éclate, elle se concentre toujours sur les problèmes qui menacent personnellement les manifestants - le prix du fromage blanc ou des appartements - jamais sur les menaces qui pèsent sur les autres, sur ceux qui sont plus faibles qu'eux.

Les  douces âmes de nos enfants qui étudient dans un système scolaire libéral et de grande qualité seront lésées par le transfert du département de l'enseignement et des partenariats externes à Maoz. Mais le système scolaire aurait dû faire descendre les gens dans la rue bien avant Maoz : c’est un système qui crée des niveaux intolérables d'ignorance. Récemment encore, Israël a été classé à la 74e place dans une enquête mondiale sur les compétences en anglais - bien plus bas que l'Albanie, l'Iran, le Vietnam et le Liban. Quelle honte. Mais c’est Maoz le problème.

On a plus qu'assez écrit sur l'ultranationalisme et le lavage de cerveau dans le système scolaire, et personne n'est descendu dans la rue à cause d'eux. Maintenant, Maoz va tout détruire. Les protestations du camp portent toujours sur ce qu'il n'a pas créé, même si ses années au pouvoir ont donné lieu à tant de problèmes dignes de protestation.

Bezalel Smotrich sera à la tête de l'administration civile - la fin du monde. Une administration civile éclairée et libérale deviendra maintenant myope et raciste. Quelle blague. Il aurait dû y avoir une rébellion contre l'Administration civile d'avant Smotrich, une administration d'occupation brutale et oppressive, qui aurait dû être boycottée.

Mais maintenant ils arrivent parce que le racisme s'appelle Smotrich. Quand il s'appelait Gantz, tout allait bien. Depuis 20 ans, un sous-chef israélien dans un restaurant branché de Tel Aviv ne peut pas rencontrer sa mère, qui vit à une heure et demie de route de chez lui, uniquement parce qu'elle vit à Gaza - bien avant Smotrich - et personne n'a protesté.

Une véritable protestation vient de la base, et se caractérise par la colère ; elle ne naît pas dans les bureaux des politiciens. La frustration de Lapid et Gantz face à leur défaite aux élections n'est pas une raison suffisante pour lancer une protestation. Le pays ne tremblera pas parce qu'une majorité de la nation voulait Netanyahou, et ceux qui ne le voulaient pas sont trop gâtés et rassasiés pour être furieux.

Le pays ne tremblera pas parce qu'il aurait dû trembler il y a longtemps, depuis qu'il a établi son régime d'apartheid. Il n'a jamais tremblé parce que ce régime n'a pas eu le moindre effet sur un Israélien imbu de lui-même, à qui l'on a dit à l'école qu'il vivait dans la seule démocratie du Moyen-Orient, et qui le croit encore aujourd'hui. Si nous ne nous révoltons pas contre ces choses, nous ferions bien de ne pas nous révolter contre Maoz, même s'il est homophobe - pour des raisons d'hypocrisie.

 

 

06/11/2022

GIDEON LEVY
L'armée de Ben-Gvir en Cisjordanie

 Gideon Levy, Haaretz, 6/11/2022
Traduit par
Fausto Giudice, Tlaxcala

Deux soldats sur 10 ont voté pour Sionisme religieux, la liste qui comprend le parti Otzma Yehudit d'Itamar Ben-Gvir. Deux soldats sur 10 sont kahanistes. Deux soldats sur 10 sont en faveur du transfert, de l'annexion, de la mort aux terroristes, de la mort aux Arabes.

Soldats du bataillon haredi Netzah Yehuda priant dans une synagogue près de Jénine, en Cisjordanie, en 2014.Photo : Gil Cohen-Magen

Deux soldats sur 10 pensent qu'ils appartiennent à une nation supérieure et que les Palestiniens n'ont aucun droit ici. Ils pensent également que tout est permis aux soldats ; qu'ils sont toujours autorisés à tirer pour tuer, que les Arabes ne comprennent que la force et l'humiliation, qu'ils ne sont pas des êtres humains. Deux soldats sur dix sont kahanistes, mais parmi les soldats servant en Cisjordanie, ce nombre est beaucoup plus élevé.

Dans la brigade Kfir, et en particulier dans son bataillon Netzah Yehuda (“Éternité de Juda”), il y a certainement plus de kahanistes que dans la police aux frontières, l'unité 8200 du renseignement militaire ou le 140e     escadron (“Aigle doré”) de l'armée de l'air israélienne. Il n'est pas déraisonnable de penser qu'environ la moitié des soldats servant dans l'occupation ont voté pour Otzma Yehudit en votant pour Sionisme religieux. Pour eux, la décision n'est pas seulement théorique. Non seulement ils croient en Ben-Gvir, mais ils pratiquent ce qu'il prêche. C'est ce qui rend leur choix si horrible.

Des soldats israéliens arrêtent violemment un manifestant palestinien, dans le camp de réfugiés de Jalazoun, près de la ville de Ramallah en Cisjordanie, en 2015. Photo : Mohamad Torokman / REUTERS

L'avantage, cependant, du succès électoral de Ben-Gvir est qu'il fait remonter la vérité à la surface. Fini le temps des histoires de soldats tourmentés par leurs actes. Tout ce que nous avons toujours soupçonné sur le comportement brutal, parfois barbare, des soldats des FDI et des membres de la police aux frontières et de la police israélienne a été confirmé par le décompte des voix. Les électeurs de Ben-Gvir dans les FDI constituent l'une de ses plus grandes sources de soutien.

Quiconque voit le comportement des soldats dans les territoires ne peut qu'être surpris qu'Otzma Yehudit n'ait pas recueilli 100 % de leurs votes. Ben-Gvir les exhorte à être des stormtroopers [membres des Sturmtruppen, les troupes d’assaut allemande, NdT] et ils l'en remercient dans les urnes. Ils n'ont pas besoin d'entraînement, ils ne voient rien de mal à être des stormtroopers, surtout lorsque les réactions de leurs commandants à leurs actes vont de l'indifférence à l'encouragement. Ne vous y trompez pas : Les soldats du rang ne sont pas les seuls à avoir voté pour Ben-Gvir, certains de leurs commandants l'ont fait aussi. La tentative de prétendre que les soldats ont voté contre leurs commandants (Yoav Limor, Israel Hayom, 4 novembre) est un autre effort désespéré pour embellir et de tailler un uniforme d’apparat au magnifique haut commandement éclairé.

Prenez, par exemple, le commandant de la brigade régionale Menashe, le colonel Arik Moyal, un colon de Tapuah, qui a appelé à foutre son poing dans la gueule des “voyous” du camp de réfugiés de Jénine : pour quel parti a-t-il voté ? Et l'ancien commandant de la brigade régionale de Samarie, le colonel Roi Zweig, qui a déclaré aux étudiants de la Yeshiva Alon Moreh que le mouvement de colonisation et l'armée sont “une seule et même chose” ? Peu importe la façon dont ils ont voté, l'esprit est celui de Ben-Gvir ; l'heure, comme le disait son slogan de campagne, est l'heure de Ben-Gvir, parmi toutes les unités de Tsahal dans les territoires.

L'ancien soldat israélien Elor Azaria accueilli chez lui après avoir purgé neuf mois de prison militaire pour avoir tué un Palestinien blessé et invalide, en 2018.Photo : Ilan Assayag.

Les soldats qui assistent passivement aux pogroms et qui aident même les auteurs de ces actes sont la preuve de l'esprit de Tsahal. Le fait que le haut commandement accepte calmement les événements de ces derniers mois, y compris les meurtres de dizaines d'adolescents et de jeunes enfants, se contentant des mensonges et des dissimulations de l'unité du porte-parole de Tsahal, ne fait que prouver que Ben-Gvir est le véritable visage de Tsahal en Cisjordanie. Les élections l'ont confirmé.

Ces élections devraient mettre fin au mensonge selon lequel les FDI sont une armée morale. Les soldats et les commandants qui votent massivement pour un parti qui, en Europe, serait considéré comme néo-nazi, définissent l'image de l'armée. Depuis que les colons ont pris le contrôle des postes de commandement de l'armée, principalement en Cisjordanie, les FDI, qui ont toujours été politiques, sont devenues plus droitières que jamais.

Le fait que ceux qui sont au sommet n'aient pas levé le petit doigt pendant toutes ces années - et encore moins après l'affaire Elor Azaria, le dernier soldat à être poursuivi dans les FDI pour homicide involontaire - ne les exonère pas de leur responsabilité dans ce glissement vers la droite. Lorsque les soldats ne sont pas poursuivis pour homicide, même lorsque les preuves le réclament à cor et à cri, et lorsque les règles d'engagement ne sont pas seulement assouplies mais en pratique complètement annulées - lorsque tuer est autorisé et même souhaitable – c’est l'esprit de Meir Kahane qui est encouragé. Le chef d'état-major Aviv Kochavi et le reste du haut commandement peuvent détourner le regard et réciter de nobles déclarations sur les principes, mais ils sont responsables de l'établissement d'une nouvelle armée dans les territoires, l'armée de Ben-Gvir, la plus dangereuse des armées.

 Itamar Ben-Gvir vu par Carlos Latuff: "Épuration ethnique maintenant: demandez-moi comment !"

 

 

27/10/2022

“Ras-le-bol des machines à laver ! Vivement qu’on en revienne à la polygamie !” : Meir Mazzouz, le rabbin tunisien de Bnei Brak, n’en rate pas une

 


Haaretz, 26/10/2022
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

NdT : Meir Mazzouz, illustre rejeton de Matsliah Mazzouz, le rabbin et posseq [docteur ès halakha-loi juive] de Djerba, assassiné en 1971 en Tunisie (son meurtrier était, selon les sources, un “nationaliste arabe” ou un “fanatique musulman” ou même un Palestinien), est le doyen de la yeshiva Kissé Rahamim à Bnei Brak, capitale du sionisme religieux, et pourrait fort bien se retrouver ministre en cas de victoire de Netanyahou aux prochaines élections, étant donné que l’ensemble des partis et groupes  dits orthodoxes se sont coalisés derrière Bibi et son Likoud. Ce partisan de la lapidation des gays et lesbiennes a trouvé l’explication au fait que selon lui, les pays arabes avaient été épargnés par le COVID-19 : ils ont interdit les gay prides ! En revanche, il a expliqué la propagation du virus en Iran par le fait que les Iraniens sont des “tordus” qui “haïssent Israël”. Cet allumé du bocal vient d’en remettre une couche.

“Aujourd'hui, nous avons quatre femmes à la maison. Nous avons une machine à laver, c’en est une. Nous avons une cuisinière à gaz, c’en est une autre. Nous avons un séchoir...” : le chef de la communauté juive tunisienne en Israël, le rabbin Meir Mazzouz, lors de son cours hebdomadaire de Torah diffusé en direct.

Un éminent dirigeant ultra-orthodoxe proche de nombreux députés du camp pro-Netanyahou a été filmé en train de comparer les femmes à des machines à laver et des cuisinières et de pleurer la fin de la polygamie sanctionnée par le rabbinat.

Dans une vidéo de l'une de ses conférences qui a été partagée en ligne, le rabbin Meir Mazzouz, chef de la communauté juive tunisienne en Israël et figure influente dans le monde de la politique nationaliste et ultra-orthodoxe, se plaint qu’« autrefois, la femme faisait tout, même la lessive. Pourquoi était-il permis, à l'époque [talmudique], à un homme de prendre jusqu'à quatre épouses ? Il était fou de chaque femme une semaine par mois ».

« Aujourd'hui, nous avons quatre épouses à la maison. Nous avons une machine à laver le linge, c'en est une. Nous avons une cuisinière à gaz, c’en est une autre. Nous avons un sèche-linge... Autrefois, une femme était un lave-linge, une cuisinière, une meunière, une couturière ».

Mazuz a fait les gros titres cet été lorsqu'il a qualifié les ministres Yair Lapid et Avigdor Liberman de “pires que des nazis”, exprimant l'espoir de leur mort en raison de leur soutien à des changements au statu quo religieux de longue date du pays.

« Il y a beaucoup de mauvaises personnes et nous attendons qu'elles disparaissent un jour du monde », a déclaré Mazzouz lors de sa conférence biblique hebdomadaire diffusée en direct.

« Les nazis aimaient leur peuple. [Lieberman et Lapid] détestent leur peuple. Ils veulent détruire les enfants et les personnes âgées » et fermer les écoles orthodoxes, a-t-il accusé.

Mazzouz est connu pour ses opinions controversées et ses critiques acerbes à l'égard des hommes politiques avec lesquels il est en désaccord. Il avait déjà traité l'ancien Premier ministre Naftali Bennett de "traître" et déclaré que voter pour le ministre des affaires étrangères Yair Lapid revenait à "faire de l'idolâtrie".

En novembre dernier, Mazzouz s'est emporté contre plusieurs groupes au sein du judaïsme, affirmant que les Juifs de l'ancienne Union soviétique et les Juifs réformés sont des non-croyants qui détruisent le judaïsme en Israël.

« Vous devez savoir que ce qui nous arrive n'est pas moins grave que ce qui s'est passé en Russie. Lieberman vient de Russie et en Russie il n'y a pas de religion, il n'y a pas de Dieu, rien, [ce sont] des hérétiques complets », a déclaré Mazzouz à l'époque, ajoutant que « les juifs réformés ont détruit le peuple d'Israël. »

En mars 2020, Mazzouz a affirmé qu'Israël souffrait de la pandémie de coronavirus parce qu'il avait autorisé les parades de gay pride, tandis qu'en 2016, il a prétendu que l'effondrement d'un parking en construction à Tel-Aviv, qui a fait six morts, était dû au manque de respect du shabbat. À l'époque, il était le chef spirituel du parti Yachad, fondé par l'ancien chef du parti ultra-orthodoxe Shas, Eli Yishai.

En 2014, Ynet a rapporté qu'il avait déclaré que les juifs séfarades n'avaient pas péri pendant l'Holocauste parce qu'ils étudiaient la Torah et que l'évasion fiscale des étudiants à plein temps de yeshiva pouvait être autorisée.