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12/04/2025

PETER NEUMANN
“Regardez Buchenwald” : entretien avec Omri Boehm

Le philosophe Omri Boehm s’exprime ici pour la première fois sur le scandale de l’annulation de son discours sur Buchenwald à Weimar 

Entretien : Dr. Peter Neumann , ZEIT N° 15/2025, 9.4. 2025 

Traduit par Fausto GiudiceTlaxcala

Le philosophe germano-israélien Omri Boehm enseigne à la New School for Social Research à New York. Il a reçu le Prix du livre de Leipzig pour la compréhension européenne pour son livre Radical Universalism (2022).

Peter Neumann (Neubrandenburg, 1987) est un poète, philosophe et écrivain allemand, membre de la rédaction de l'hebdomadaire Die Zeit.






Omri Boehm, 46 ans, est lui-même un descendant de survivants de l’Holocauste.Photo LenaGiovanazzi/laif

DIE ZEIT : Monsieur Boehm, vous deviez parler au mémorial de Buchenwald. et vous avez été désinvité sous pression politique. Vous saviez que ce serait délicat ? 

Omri Boehm : J’étais conscient du risque que les acteurs politiques puissent déchaîner un scandale artificiel. En ces temps que l’on doit qualifier - au sens de Hannah Arendt - de “sombres”, il n’est guère possible de parler. Et parler de la mémoire, encore moins. 

ZEIT : Et pourtant, vous avez accepté l’invitation. 

Boehm : Oui. Les périodes sombres ne sont pas simplement mauvaises. Ce sont des temps où le discours public ne renforce plus la pensée et les lumières, mais les sape. Dans le climat qui s’est installé après le 7 octobre et  l’intervention militaire d’Israël à Gaza, cette obscurité menace d’ébranler l'engagement à se souvenir de l’Holocauste. 

ZEIT : Dans quelle mesure ? 

Boehm : La signification de la culture de la mémoire d’après-guerre est depuis longtemps remise en question au niveau international - et pas seulement par les radicaux ou les antisémites. Au vu des actions israéliennes à Gaza et de l’attitude ambivalente de l’Allemagne, beaucoup commencent à se demander rétrospectivement si cette culture du souvenir, telle qu’elle a été pensée dès le départ, n’est pas au fond un projet idéologique occidental. Et cela se produit à un moment de profond changement tectonique. L’Europe chancelle : les nationalistes gagnent en influence et se mettent en scène avec de plus en plus de succès comme les véritables gardiens de la mémoire. Aucun juif qui a les yeux ouverts ne peut être assez naïf pour ne pas s’en rendre compte. 

ZEIT : L’ambassadeur israélien en Allemagne voit les choses différemment. Il vous reproche de relativiser l’Holocauste “sous couvert de science”. 

Boehm : Certaines des autres accusations qu’il a formulées dans ce contexte prouvent suffisamment le sérieux de ses propos. 

ZEIT : Et pourtant, vous utilisez des termes qui en irritent plus d’un : vous qualifiez le mémorial de l’Holocauste Yad Vashem de “machine à laver” pour la politique d’extrême droite. N’est-il pas compréhensible que les représentants israéliens soient indignés ? 

Boehm : Honnêtement, je ne pense pas que mes termes irritent vraiment. Même mes critiques les plus manipulateurs n’ont pas réussi jusqu’à présent à déformer mes propos et à s’en sortir. Cette fois encore, ils n’y parviendront pas. Tous ceux qui se sont penchés sur mon travail le savent : en tant que petit-fils de survivants de l’Holocauste, j’écris pour défendre la mémoire. 

Jordan Bardella écoute un officier israélien lors d’une visite à un mémorial pour les victimes et les otages des attaques du Hamas de 2023, près du kibboutz Re'im dans le sud d’Israël, le mercredi 26 mars 2025.   PHOTO JACK GUEZ, ARCHIVES ASSOCIATED PRESS   

         


ZEIT : Vous n’avez pas seulement cité le terme “machine à laver”, vous l’avez utilisé. 

Boehm : C’est exact. Je faisais référence à un article qui argumentait que Yad Vashem pourrait devenir une machine à laver pour la politique historique de l’extrême droite - et je soulignais que ce processus était en cours depuis longtemps. Déjà à l’époque, des nationalistes populistes comme Viktor Orbán, Matteo Salvini et Sebastian Kurz - pour n’en citer que quelques-uns – avaient été officiellement invités au Mémorial. Celui-ci est dirigé par un homme qui était auparavant à la tête du mouvement des colons israéliens [Dani Dayan]. Depuis, d’autres choses se sont passées : le ministre israélien officiellement chargé de la lutte contre l’antisémitisme [Amichai Chikli] coopère désormais ouvertement avec des alliés européens comme Marine Le Pen et le parti d’extrême droite espagnol Vox. Il y a une certaine ironie dans le fait que ceux-là même qui représentent un gouvernement qui veut lutter contre l’antisémitisme avec Le Pen tentent de construire un scandale à partir du mot machine à laver. Mais au lieu de nous en indigner, nous devrions nous demander : que pouvons-nous faire pour lutter pour la mémoire ? Pour Yad Vashem ? 

ZEIT : Et quelle est votre réponse ? 

Boehm : J’ai accepté l’invitation à Buchenwald parce que la mémoire doit être protégée - pour formuler un contre-projet responsable au milieu de ce contexte politique difficilement supportable. Un projet issu de la tradition juive et de l’esprit des Lumières. Et j’ai amené mon fils de dix ans de New York pour lui parler de l’extermination de sa famille pendant l’Holocauste. Et mon père d’Israël, qui a perdu ses grands-parents à Theresienstadt et Auschwitz - et qui a grandi avec une mère qui a pu s’échapper in extremis en 1939. 

ZEIT : Le mémorial et son directeur Jens-Christian Wagner n’auraient-ils pas dû alors insister pour maintenir votre discours, même contre la pression d’Israël ? 

Boehm : Il y a pressions et pressions. Jens-Christian Wagner a fait ce qui était en son pouvoir. Je le respecte pour son travail et son intégrité et je me réjouis de poursuivre notre collaboration. 

ZEIT : Dans votre discours, publié en allemand par la Süddeutsche Zeitung [et en anglais par Haaretz, NdT], vous appelez à un changement dans la culture de la mémoire. Qu’est-ce qui doit changer selon vous ? 

Boehm : En fait, j’appelle à s’en tenir à ce qui était autrefois sa promesse centrale. La difficulté réside dans une tension fondamentale. Le droit international né après la guerre repose sur une promesse universaliste : que tous les êtres humains méritent la même protection - née de la reconnaissance historique que l’homme est capable de destruction radicale. Mais en même temps, il est aussi l’expression de la mémoire : l’Holocauste a joué un rôle central dans la prise de conscience par la communauté internationale de cette capacité de destruction. En ce sens, le droit international exprime, même si ce n’est qu’implicitement, un attachement particulier à l’histoire juive et donc à la souveraineté juive. Cette tension a conduit à ce que les institutions fondées sur l’universalisme échouent précisément à protéger les Palestiniens. C’est une mauvaise chose pour les Palestiniens, c’est le moins qu’on puisse dire. Mais au vu des destructions que nous observons aujourd’hui, cela fait aussi croire à beaucoup que le droit lui-même - en tant qu’expression de cette mémoire occidentale - n’est plus un droit, mais une idéologie. 

« Le droit international n’est pas une proposition. C’est du droit »

ZEIT : Vous parlez de la critique postcoloniale, c’est-à-dire de l’affirmation selon laquelle le souvenir de l’Holocauste est utilisé pour supprimer d’autres souvenirs. Par exemple celle de la Nakba, l’expulsion des Palestiniens lors de la création d’Israël ? 

Boehm : Oui. Mais soyons clairs, puisqu’il y a tant de manipulations en jeu : personne de sain d’esprit ne peut sérieusement croire que l’on puisse en déduire l’équivalence de la Nakba et de l’Holocauste. La tâche consiste à montrer que ce droit peut être pris au sérieux en tant que droit, malgré son contexte historique. Et si nous ne le faisons pas, nous ne rendrons pas justice à la mémoire de la Shoah. En d’autres termes, pour rendre justice à la mémoire des contextes historiques insupportables, nous devons respecter le fait que le droit s’applique indépendamment de ceux-ci. Pour les partisans d’un nouveau réalisme, il est commode de présenter cette tentative comme un “radicalisme moral”. 

ZEIT : Dans le débat sur le nettoyage ethnique et un éventuel génocide dans la guerre de Gaza, vous avez récemment mis en garde contre l’utilisation de catégories comme “génocide” ou “crimes contre l’humanité” comme armes idéologiques. 

Boehm : Je constate avec inquiétude que les deux camps placent souvent l’idéologique au-dessus du juridique. D’un côté, il y a des voix qui utilisent le terme de génocide pour diaboliser le sionisme en lui-même et délégitimer ainsi toute idée d’autodétermination juive. Ce sont précisément ceux qui, comme moi, aspirent à la paix dans une confédération, qui doivent s’opposer fermement à cela. 

ZEIT : Et l’autre partie ? 

Boehm : L’autre partie considère qu’un État de survivants de l’Holocauste est par définition immunisé contre de telles accusations. Ces deux attitudes ne sont pas seulement fausses, elles sont dangereuses. Car elles déshumanisent - chacune à sa manière. Présenter le sionisme en bloc comme génocidaire, c’est déshumaniser les Israéliens. Si l’on exonère d’emblée Israël de toute culpabilité, on prive les Palestiniens de la réalité juridique dans laquelle leur souffrance devient visible et justiciable. 

ZEIT : Vous insistez sur l’intégrité du droit, mais c’est justement ce droit qui s’érode de plus en plus. La Hongrie vient de se retirer de la Cour pénale internationale. Orbán reçoit Netanyahou alors qu’un mandat d’arrêt a été lancé contre ce dernier. 

Boehm : Le fait que les autocrates ignorent le droit n’est pas un argument contre le droit. C’est un argument pour le renforcer. 

ZEIT : Le chef de la CDU Friedrich Merz prévoit apparemment lui aussi d’inviter Netanyahou en Allemagne. 

Boehm : J’espère qu’il s’agit d’un dérapage. Et non pas l’influence des doctrines néoréalistes que nous observons désormais. 

ZEIT : Mais si Netanyahou venait effectivement, celle-ci devrait-elle l’arrêter ? 

Boehm : Le droit international n’est pas une proposition. C’est du droit. 

ZEIT : Et pourtant, ce droit ressemble aujourd’hui à un tigre édenté. 

Boehm : Je partage cette inquiétude, mais pas entièrement. Les dernières années n’ont pas seulement montré l’échec du droit, mais aussi sa force. C’est précisément pour cela que je dis : regardez Buchenwald. Le droit n’a pas de force propre. Il ne vit que grâce à ceux qui le défendent. Les poiliticien·nes, les États, les personnes - tous doivent comprendre qu’il est dans leur propre intérêt de renforcer le droit. Et c’est aussi la réponse au néoréalisme : l’ordre mondial libéral n’était pas un projet moral de naïfs. Il était le résultat d’un processus d’apprentissage pratique et douloureux, que beaucoup semblent maintenant oublier. 

ZEIT : De nombreux scientifiques usaméricains envisagent actuellement d’émigrer en Europe. 

Boehm : Et ce pour une raison simple : parce que l’Europe offre encore une alternative aux développements aux USA. Pour l’instant. Mais si l’Europe devient un simple reflet, elle perdra précisément ce rôle. 

ZEIT : Vous enseignez à New York. Pensez-vous vous-même à partir ? 

Boehm : Bien sûr. Nous ressentons la pression d’un gouvernement qui méprise de plus en plus l’État de droit. Cela est désormais directement visible dans les universités usaméricaines. Et nous voyons à quelle vitesse la situation peut se dégrader. Mais c’est justement pour cela qu’il est important de rester. Le point où il est trop tard n’est pas encore atteint. Ça vaut encore la peine de se battre pour ces valeurs. 


OMRI BOEHM
L’ambassade d’Israël a annulé mon discours à Buchenwald. En tant que petit-fils de survivants de l’Holocauste, voici ce que je voulais dire

“Plus jamais ça” peut se décliner de deux manières : « Plus jamais ça » tout court ou « Plus jamais ça pour nous, les Juifs », que ce soit pendant l’Holocauste ou le 7 octobre. Il est temps de laisser tomber cette distinction

Omri Boehm, Haaretz, 10/4/2025

Traduit par Fausto GiudiceTlaxcala

Le texte qui suit fait partie d’un discours que le philosophe israélien Omri Boehm était censé prononcer à Weimar, en Allemagne, à l’occasion de la commémoration officielle des 80 ans de la libération de Buchenwald.
Sous pression de l’ambassade d’Israël à Berlin, le Mémorial de Buchenwald a retiré son invitation de Boehm, invoquant la volonté d’éviter que les survivants de l’Holocauste ne soient entraînés par l’ambassade dans un débat politique.
L’intervention de Boehm, lui-même petit-fils de survivants de l’Holocauste, sera « reportée à une date ultérieure »*. Boehm lui-même a déclaré qu’il était important « de laisser la cérémonie se dérouler en accordant l’attention qu’elle mérite aux survivants et à l’importance du lieu ».-Haaretz

*C’est désormais une tradition allemande : les annulations sous pression israélienne sont qualifiées de « reports » (aux calendes grecques), comme ce fut le cas pour l’annulation de la remise du prix de littérature à l’écrivaine Adania Shibli à Francfort le 20 octobre 2023 [NdT]

Yosef Hayim Yerushalmi, le grand historien de la mémoire juive, a terminé son ouvrage, “Zakhor” (Souviens-toi), par une question : « Et si l’antonyme de l’oubli n’était pas le souvenir, mais la justice ? » Yerushalmi lui-même n’a jamais répondu à cette question, mais elle nous incite à réfléchir à l’importance et à l’autorité de la mémoire dans un contexte où il est difficile de la conserver intacte.
Selon Yerushalmi, la tradition juive fait une distinction entre l’histoire et la mémoire. Alors que l’histoire est écrite à la troisième personne et prétend être factuelle, la mémoire ne peut être racontée qu’à la première personne, au singulier ou au pluriel, nous appelant ainsi à l’action.
C’est là que réside la différence la plus profonde entre l’histoire et la mémoire : alors que l’histoire concerne véritablement le passé, la mémoire est axée sur l’avenir. Il est possible de se souvenir tout en oubliant, et le contraire de l’oubli n’est pas de connaître le passé, mais de rester engagé dans le devoir qu’il exige de nous.
Cela permet de résoudre une contradiction apparente au cœur de la vie culturelle juive. D’une part, le judaïsme est occupé par la mémoire. D’autre part, il s’agit d’une tradition prophétique, intéressée par l’avenir, axée sur un idéal utopique. La tension est artificielle : lorsque les prophètes nous enjoignent zakhor !, ils rappellent que rendre justice à l’avenir, c’est en fait rendre justice au passé.
Mais cette position ne peut être qu’un premier pas. Car l’idéal que les prophètes nous ont enseigné n’est pas tout à fait la justice. Hermann Cohen l’a exprimé avec force en expliquant que la paix, et non la justice, est pour les Juifs ce que l’harmonie était pour les Grecs : le parfait, ou l’ensemble. Shalem, le mot hébreu qui signifie entier, est à l’origine de shalom, la paix. Se pourrait-il que le contraire de l’oubli ne soit ni le souvenir ni la justice, mais la paix ? 
Cohen associe les prophètes bibliques à Kant, en particulier à l’idéal des Lumières qu’il a envisagé dans “La paix perpétuelle”. Contre la doctrine “réaliste” d’Héraclite, selon laquelle “Polemos [la guerre] est le père de toutes choses”, Kant et les prophètes bibliques proposent une alternative : non pas la prétendue réalité et nécessité de la guerre, mais l’idéal de la paix en tant qu’origine de la vie et du droit humains. Kant savait bien que notre réalité violente est loin d’être utopique. Mais c’est bien de cela qu’il s’agit : il observe qu’au milieu de réalités “barbares”, nous devons nous soumettre à des lois qui préservent la possibilité de la paix. Sinon, nous glisserions vers la destruction totale par des “guerres d’extermination”.
Lorsque nous nous souvenons aujourd’hui de l’horrible histoire de Buchenwald, que nous regardons les images insoutenables prises lors de la libération du camp, que nous fixons les yeux des survivants de l’Holocauste qui sont encore parmi nous, je ne peux m’empêcher de penser à cette mise en garde kantienne. Peut-on lutter contre l’oubli tout en restant fidèle à l’idéal de paix ?
Car il est clair qu’il existe d’autres traditions de mémoire ; l’une d’entre elles est devenue trop familière ces derniers temps : « Souvenez-vous [zakhor] de ce qui vous a été fait par Amalek », en référence à l’ennemi biblique des Hébreux, et « éradiquez sa semence ».
Ces deux traditions, celle de la recherche de la paix et celle de l’éradication d’Amalek, nous sont ouvertes. Laquelle choisirons-nous ? Et quelles en seront les conséquences ?
À l’époque de Kant, la “paix perpétuelle” semblait totalement utopique. Pourtant, ses principes sous-jacents ont été intégrés dans le droit international, en grande partie en réponse aux images et aux récits provenant des camps de concentration, comme Buchenwald. En effet, dans les photographies qui provenaient de Buchenwald, mais aussi d'Auschwitz, de Treblinka, de Bergen-Belsen et de tant d'autres lieux, l'humanité se regardait dans le miroir et découvrait qu'elle n'avait pas seulement été impliquée dans une guerre déchaînée et un génocide. L'antisémitisme fanatique qui avait conduit l'Allemagne nazie à tenter d'exterminer systématiquement les Juifs était aussi une attaque contre l'idée même de dignité humaine.
Pour la première fois, le devoir de protéger la dignité humaine a été inscrit dans les constitutions des États et les conventions internationales. À partir des horreurs vécues dans des lieux comme Buchenwald, ce qui avait été considéré comme une utopie s’est transformé en un processus réel : la tentative de protéger tous les êtres humains, non seulement en tant que citoyens, par leurs États, mais aussi contre leurs États, et surtout s’ils ne sont pas citoyens du tout. Par cette transformation, l’humanité a refusé que la guerre reste “le père de toutes choses” et qu’elle ne soit plus jamais inscrite dans l’existence humaine. C’était l’engagement le plus profond pour l’avenir à travers le devoir envers le passé, en dérivant les lois des idéaux de dignité et de paix.
On dit que le " plus jamais ça" a deux formulations : la première est “plus jamais ça” et la seconde, compte tenu de l’antisémitisme génocidaire qui a culminé dans la Solution finale, “plus jamais ça pour nous”. Le moment est venu de mettre de côté cette distinction. 
“Plus jamais ça” n’est valable que dans sa formulation universelle, entre autres parce que ce n’est que sous cette forme qu’il peut rendre justice à sa formulation particulière. Un monde dans lequel une répétition de Buchenwald est possible n’importe où est un monde dans lequel elle est possible partout, y compris contre les Juifs. Seule une communauté internationale qui s’engage à éradiquer la possibilité d’une violence illimitée par le biais de la loi est une communauté qui lutte pour garantir que les mêmes crimes ne se reproduiront pas.
Ces jours-ci, certains évoquent le massacre brutal du 7 octobre et disent : “Plus jamais ça !”, tandis que d’autres regardent la destruction systématique de Gaza, la famine, en disant la même chose. Si l’une ou l’autre de ces affirmations se veut une comparaison avec l’Holocauste, elles sont toutes deux trompeuses. Pourtant, les deux déclarations contiennent un noyau de vérité, exposant l’incapacité à empêcher la déshumanisation complète des sociétés. Pire : toutes deux révèlent une communauté internationale divisée par ses alliances, mais unie dans sa volonté de tolérer, et souvent de justifier, des crimes déshumanisants et de compromettre la possibilité de la paix.
Alors que nous célébrons la libération de Buchenwald, le monde entre dans une nouvelle ère. Les USA tournent le dos à leurs alliés libéraux européens, à l’État de droit et aux institutions internationales démocratiques.. Poutine mène une guerre d’agression contre l’Ukraine, et l’Union européenne devra apprendre à se protéger de manière indépendante. Pendant ce temps, les nationalpopulistes ethniques se développent, bénéficiant d’un réseau d’alliances aux USA et ailleurs.
Ces nationalistes ne sont pas les plus dangereux lorsqu’ils prétendent renier leurs origines fascistes et antisémites, mais lorsqu’ils prétendent être ceux qui combattent l’antisémitisme et rendent justice au passé.
Mettons en garde contre eux avec force, mais entretemps n’oublions pas de nous remettre en question nous-mêmes, de nous assurer que nous restons une véritable alternative. Une alternative qui s’appuie sur l’engagement en faveur de l’État de droit et du droit international. Celle qui comprend encore que, si nous ne restions pas fidèles à un idéal de dignité et de paix, leur remplacement par la doctrine de la guerre comme “père” de tout nous ferait rapidement passer du “plus jamais ça” au “ à nouveau ça”. Pour s’opposer à ce glissement, il faut connaître l’histoire de Buchenwald et s’en souvenir. Mais cela ne suffit pas. Nous devons également veiller à ne jamais oublier.

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08/04/2025

OMRI BOEHM
A Europa e suas vítimas: além do mito da soberania nacional
Um discurso para a Europa, Viena, 7 de maio de 2024

Omri Boehm é um filósofo de origem alemã judaica nascido em Israel e que vive em Nova York. Trabalha na prestigiosa New School of Social Research, que abrigou refugiados alemães antinazistas em sua “Universidade no Exílio”, incluindo Erich Fromm, Leo Strauss e Hannah Arendt. Especialista e discípulo do filósofo iluminista alemão Immanuel Kant, ele deveria fazer um discurso nas comemorações do 80º aniversário dos campos de concentração nazistas de Buchenwald e Mittelbau-Dora, em 6 de abril de 2025, em Weimar. Ele não pôde discursar porque a embaixada israelense em Berlim interveio para proibi-lo de falar, com o argumento de tirar o fôlego de que “ com seu discurso sobre valores universais, Boehm está diluindo a memória do Holocausto”. Os sionistas aparentemente ficaram traumatizados com o “discurso para a Europa” de Omri Boehm há 11 meses, em 7 de maio de 2024, em Viena. Aqui está esse discurso, traduzido por Tlaxcala, editado por Helga Heidrich

Este discurso foi apresentado pelo Instituto de Ciências Humanas (IWM), Viena, e pelas Wiener Festwochen (Semanas do Festival de Viena). Foi proferido na Praça dos Judeus em 7 de maio de 2024. 

 

A Europa aprendeu a necessidade de proteger a dignidade humana como inviolável, refutando o mito da soberania nacional e da cidadania baseada em etnias. Mas também adota esses princípios como formas de emancipação para judeus e nações anteriormente colonizadas. Essa inconsistência coloca em risco tanto a Europa quanto suas vítimas do passado.

Quando fui convidado para fazer esse “Discurso para a Europa” na Judenplatz, tive prazer em aceitar por um motivo muito pessoal, ou seja, pela história de minha própria família. Meu filho e minha esposa tinham acabado de receber a cidadania austríaca, e a receberam porque a família de minha esposa havia escapado da Áustria, ou pelo menos alguns deles escaparam, inclusive a avó de minha esposa, Malita (Miriam) Schertzer. Ela foi expulsa de Viena para a Palestina em 1938, na mesma Aliyah da Juventude com a qual minha própria avó havia escapado da Alemanha.

Para nós, esse “Discurso à Europa” também foi planejado como uma visita particular à cidade de Miriam e à sua escola, o Brigittenauer Gymnasium, hoje Gymnasium am Augarten, onde há um memorial familiar em homenagem aos colegas judeus de Miriam que não escaparam e acabaram sendo deportados para Auschwitz. Os pais de Miriam também foram enviados de Viena para Dachau e Auschwitz, mas sobreviveram e acabaram se reunindo com a filha em Israel. Ainda me lembro de ter conhecido Miriam, tentando impressioná-la com meu alemão e com histórias sobre a Europa para a qual ela nunca voltou. Como ela era tímida, surpresa e feliz, aquela senhora idosa de um pequeno moshav em Israel, que havia começado sua vida como Malita em Viena.

Muito antes de começarem os rumores de uma controvérsia sobre essa palestra, eu sabia que estávamos vindo para cá não apenas com uma compreensão, mas com um conhecimento muito pessoal, por familiaridade, do significado desse lugar - e com um sentimento muito imediato de que memórias pessoais e insuportáveis têm um imenso significado público aqui. Sabemos tão bem quanto qualquer outra pessoa as raízes profundas que esse local, a Judenplatz, tem para esta cidade, para este continente. E também sabemos, como ninguém, que as raízes desse lugar chegam ao nosso próprio país, Israel. É também por isso que me recuso a desonrar esse lugar - não por qualquer coisa que eu diga ou poderia ter dito, e muito menos por reagir a tentativas de transformar uma discussão que deveria ser sobre substância, argumentos e discordância respeitosa em um escândalo artificial. [1]

 É muito significativo ter a estátua de Lessing aqui na Judenplatz diante de mim, olhando para mim, para todos nós e diretamente para o memorial do Holocausto atrás de mim. Lessing, amigo de Mendelssohn, foi o único a estabelecer a conexão essencial entre esclarecimento e amizade. Os amigos democratas-liberais da Judenplatz e os amigos da Europa discutem amigavelmente suas discordâncias, as dúvidas e preocupações que possam ter. A razão anda de mãos dadas com a amizade; o populismo e o nacionalismo - com lançar ovos e com gritos. Não se engane: os ovos servem para humilhar e, por essa razão, são perigosos. Escolher a primeira, a razão, em vez da segunda é deixar o clamor de lado, estender a mão àqueles que criticaram esse discurso e tentaram atrapalhar em vez de protestar contra ele, e seguir em frente.

'Você é mais do que seus mitos'

Quando, em 2019, Timothy Snyder inaugurou o “Discurso para a Europa” na Judenplatz, ele cunhou esta mensagem como seu lema. “Você é mais do que seus mitos”.

Quero unir-me a essa mensagem, mas perguntar novamente o que significa para a Europa ser mais do que seu mito?

Uma maneira de pensar sobre isso é dizer que a Europa deve confrontar o mito com a história. Essa foi a sugestão de Snyder; ele afirmou que, para que a Europa cumpra seu papel de símbolo de esperança - e ela é um símbolo de esperança -, os europeus devem escolher a história como o oposto do mito. Há duas maneiras de se lembrar, argumentou Snyder: uma é por meio dos mitos que “nos levam de volta à história de como sempre estivemos certos” - e é por isso que os mitos são sempre nacionais, para não dizer nacionalistas. Outra forma de lembrar é a história, que permite que você “pegue o que lembra, acrescente-o a outras perspectivas críticas e reconheça sua responsabilidade” como um império em ruínas.

Concordo com Snyder que a Europa deve ser mais do que seus mitos; concordo também que a história é importante, até mesmo necessária. Mas acrescento que isso não é suficiente. Para ser mais do que seus mitos, a Europa terá de insistir na realidade dos ideais. Pois, de fato, a história não é o oposto dos mitos. A razão é - se ela puder levar a sério a autoridade de seus próprios ideais. E a autoridade da história, também do tipo que nos faz reconhecer nossa responsabilidade pelo passado, às vezes pode servir para minar nossos ideais.

Eis outra maneira de colocar a questão: a história deve ser respeitada por causa de nosso compromisso com os ideais. Mas se os próprios ideais são respeitados por causa de nosso compromisso com a história, então esse compromisso ameaça transformar nossos ideais em mitos - mitos nacionais. Essa ameaça agora confronta a Europa. Ela confronta a política europeia e confronta a vida intelectual europeia, pois a direita populista está em ascensão, abusando da responsabilidade histórica. Esse desafio deve ser enfrentado agora. Não negando a autoridade da história, mas protegendo-a - protegendo-a ao insistir na realidade dos ideais.

É sobre isso que vou falar, mas terei de começar pelo início.

Quando os Estados Unidos romperam seus laços com a Europa e afirmaram sua independência da soberania europeia, fizeram isso invocando a autoridade da verdade, não da história: 'Consideramos estas verdades evidentes por si mesmas, que todos os homens são criados iguais, que foram dotados por seu criador de certos direitos inalienáveis, que entre eles estão a vida, a liberdade e a busca da felicidade'.

Podemos nos apoiar na autoridade dessas verdades evidentes, afirmadas pela Declaração de Independência Americana, hoje? Parece-me que muitas pessoas, desde os chamados críticos pós-coloniais até os teóricos liberais centristas, de fato tendem a rejeitar essa proposição.

Em um extremo do espectro, as pessoas reclamam que os pais fundadores eram, eles próprios, escravagistas. Que a afirmação “todos os homens são criados iguais” significa literalmente homens, e exclusivamente homens brancos. Ou seja, que o universalismo do Iluminismo expresso nessa famosa frase é, na melhor das hipóteses, uma máscara que permite que os homens europeus discriminem, ao mesmo tempo em que se congratulam por se apegarem aos ideais universalistas. Na pior das hipóteses, esses ideais são, de fato, a ideologia que leva os europeus a discriminar, exterminar e escravizar.

O argumento é o seguinte: a tradição cosmopolita, que faz do homem, ou da humanidade, a medida de todas as coisas - a origem do valor - é indistinguível da tradição que faz do homem “o mestre e possuidor da natureza”. E, sendo assim, a tradição cosmopolita, que começa com a teoria da dignidade da humanidade, acaba, na prática, como a história que transformou os europeus em colonizadores de continentes, abusadores da natureza (agora causando a morte da natureza) e proprietários de outros seres humanos como escravos. A Declaração de Independência não afirma uma verdade evidente, mas um mito, pois é a história que nos vende a ilusão nacional de que “sempre tivemos razão”.

Na outra ponta do espectro, entre os pensadores liberais do centro político, as pessoas muitas vezes fingem balançar a cabeça diante da negação do universalismo do Iluminismo europeu. Mas, na verdade, o pensamento liberal do pós-guerra consiste em uma negação muito semelhante. Quando John Rawls, o pai do liberalismo americano, diz que a justiça é “política, não metafísica”, ele quer dizer exatamente isso: verdades evidentes como as afirmadas na Declaração de Independência não podem ter autoridade nas sociedades democráticas modernas.

“A verdade sobre uma ordem metafísica e moral independente”, argumenta Rawls, não pode ‘fornecer a base para uma concepção política de justiça em uma sociedade democrática’. Essa é uma rejeição dramática da Declaração de Independência: suas verdades evidentes precisam ser tratadas como religião: toleradas, respeitadas como a fé privada das pessoas, mas não reconhecidas como o fundamento da lei. Portanto, não é apenas a esquerda pós-colonial ou identitária que rejeita o ideal universalista do Iluminismo europeu; de fato, há um amplo consenso sobre essa rejeição entre a esquerda e o centro liberal. O fato de ele ser rejeitado pela crescente direita populista identitária não requer muitos argumentos.

Fui deliberadamente às questões importadas da América de 1776 porque é mais fácil fingir que elas estão distantes. Mas agora eu gostaria de trazê-las de volta ao coração da realidade europeia contemporânea. Enquanto os americanos nunca deram às verdades evidentes afirmadas na Declaração de Independência qualquer significado legal - nunca as integraram à constituição - a Europa do pós-guerra deu esse passo, e o fez com esta declaração: “A dignidade humana é inviolável”.

Essa é, obviamente, a frase de abertura da Lei Básica (Grundgesetz, Constituição) da Alemanha, mas é mais do que isso. Exatamente a mesma frase é também o primeiro artigo da Carta dos Direitos Fundamentais da União Europeia. E o ideal da dignidade humana também é a âncora da Declaração Universal dos Direitos Humanos da ONU, o modelo para várias constituições europeias do pós-guerra. (Mas não a austríaca! Não para Hans Kelsen. Mas, se você me perguntar, nunca é tarde demais). A afirmação de que a dignidade humana é “inviolável”, como a origem do direito, postula um ideal de universalismo iluminista que, para nossos propósitos, é idêntico às verdades evidentes da Declaração de Independência. Ele afirma que a dignidade humana é inalienável e que a autoridade da lei é relativa a ela. Isso coloca a tradição universalista ou cosmopolita muito mais próxima de uma democracia radical e abolicionista do que é comumente reconhecido, mas deixarei esse fato de lado e, em vez disso, farei duas perguntas:

Primeiro, esse princípio, que expressa o ideal do universalismo iluminista, é de fato uma expressão do racismo e do colonialismo da Europa? Devemos defender e reencenar o ideal da dignidade humana como resposta aos crimes monumentais cometidos pela Europa no passado durante o período do Império - desde os crimes do Holocausto até os do colonialismo? Ou esse humanismo é, de fato, a causa desses crimes? A Grundgesetz alemã, assim como a Carta Europeia de Direitos Fundamentais e a Declaração Universal dos Direitos Humanos das Nações Unidas, deve ser “descolonizada”?

Em segundo lugar, se de fato defendemos o princípio, será que os pensadores liberais europeus o defendem genuinamente - e com genuinamente quero dizer: mesmo quando esse princípio desafia seus interesses, sua identidade, seus compromissos mais íntimos? Ou será que o desejo de fundamentar nosso compromisso com a dignidade humana na responsabilidade histórica também marca os limites desse ideal, ameaçando, assim, transformá-lo em um mito?

Quero tratar dessa questão com calma.

Consideremos esta frase outra vez: A dignidade humana é inviolável. À primeira vista, ela parece menos um mito do que uma falsidade direta. A dignidade humana é violável e está sendo violada neste exato momento. Mas se não for uma proposição falsa, o que pode fazer com que pareça uma é também o que a torna tão poética, até mesmo profética. Uma das grandes inovações dos profetas hebreus bíblicos foi estilística (parece que estou me desviando, mas não estou): eles costumavam declarar o contrafactual, até mesmo o impossível, como sendo realmente verdadeiro.

Essa inovação estilística tinha tudo a ver com sua descoberta humanística. Uma proposição que afirma descritivamente algo que, na melhor das hipóteses, parece prescritivo (“a dignidade humana é inviolável”), não como um imperativo, mas como uma verdade, é estritamente falsa ou está tentando descrever uma realidade superior. Quando se entende isso, entende-se algo muito profundo nos profetas hebreus, em Platão e em Kant, que dá à frase lacônica “A dignidade humana é inviolável” a estética do sublime. O ser que é capaz de fazer essa declaração - e experimentar o sentimento que seu gesto poético cria - tem dignidade e impõe respeito.

Você pode pensar que o que às vezes chamamos de realidade - aquela em que compramos leite no supermercado, em que famílias judias são massacradas e queimadas na fronteira de Gaza, em que toda uma população palestina está passando fome e sendo bombardeada - essa realidade torna esse ideal um mito e sua poética um kitsch populista. A decisão sobre qual é o ideal depende de nós.

Agora podemos nos perguntar: se o ideal da dignidade humana é válido, o que o torna válido? Não abordarei essa questão aqui, mas, em vez disso, perguntarei o que não pode torná-lo válido. Se a ideia de que a dignidade humana é inviolável está fundamentada na decisão dos europeus, alemães, italianos e austríacos de viver de acordo com esse princípio, então isso explica precisamente por que a dignidade humana é de fato violável. Uma reivindicação incondicional não pode depender da decisão de ninguém: é muito bom que, digamos, o povo alemão tenha decidido tratar a dignidade humana como inviolável, mas sabemos que eles também podem decidir o contrário.

Essa constatação nos leva a um ponto importante: o fato de que o princípio da dignidade humana inviolável não pode depender da soberania nacional, da decisão ou da vontade de um povo. Pelo contrário: a dignidade humana marca o limite da soberania nacional. Esse ponto é importante porque mostra a continuidade entre o discurso abstrato da dignidade e duas tendências européias muito concretas.

A primeira delas é que os Estados autolimitem sua soberania por meio de suas próprias prerrogativas - entrando em constelações federativas, por exemplo, ou submetendo-se ao direito internacional ou a tribunais internacionais e europeus. Em consonância com seu reconhecimento da dignidade humana, a Europa passou do direito nacional para o internacional e para o cosmopolita, ou seja, de uma forma de direito baseada na soberania nacional última dos Estados para uma forma de direito que a respeita e a questiona.

A segunda tendência é para o patriotismo constitucional, com o qual me refiro aqui a uma ideia muito ampla: o reconhecimento de que pertencer a uma nação soberana não requer nem o sangue certo nem a língua, a história ou a cultura certas: você pertence ao povo alemão, austríaco ou italiano em virtude de ter cidadania alemã, austríaca ou italiana.

Quando, em 2019, Timothy Snyder esteve aqui e conclamou a Europa a ser mais do que seus mitos, ele advertiu os europeus de que “seus pequenos e implausíveis mitos nacionais” permitiam que vocês “não vissem” o que era tão singular na Europa, ou seja, “que a União Europeia é a única resposta bem-sucedida à pergunta mais importante da história do mundo moderno”. Essa pergunta é: “O que fazer depois do império? O que fazer com o império?

Segundo Snyder, há duas respostas ruins: criar estados-nação ou ter mais império. A União Europeia é a única resposta nova, frutífera e produtiva para essa pergunta. Repito isso, porque respeitar a dignidade humana por meio do controle da soberania nacional e substituir a nação por um forte conceito de cidadania são os dois ingredientes essenciais e inovadores da resposta da Europa a essa questão monumental.

Essa resposta substituiu o apego hobbesiano-schmitteano a um Leviatã soberano como resposta à “guerra de todos contra todos” e afirmou que a dignidade, e não o medo, deve ser o fundamento da política humana. Para proteger a dignidade por meio do Estado de Direito, a soberania precisa ser questionada, criticada e até mesmo desconstruída - e não afirmada por meio de Leviatãs nacionais soberanos. Quando Hobbes falou do Leviatã, aquele símbolo de um poderoso monstro mítico, ele sabia por quê: porque a soberania exige a idolatria do mito. A herança mais importante do pensamento judaico neste continente, o monoteísmo ético, sempre esteve ligado à crítica do mito e de sua idolatria: vale a pena lembrar essa tradição que vivia na Europa antes da guerra, antes do desmoronamento de seu império, e que trabalhou contra o mito da soberania em Hermann Cohen, Ernst Cassirer, Martin Buber e Hannah Arendt.

Mas observe: enquanto aqui se encontra a expressão essencial da resposta bem-sucedida da Europa ao seu passado - a “questão mais importante do mundo moderno” -, ou seja, a substituição dos Leviatãs míticos nacionais, os pensadores europeus, na verdade, adotaram exatamente o oposto desses princípios na medida em que a Europa estava olhando para fora: para as vítimas de seu império.

Se o império europeu em ruínas acabou aprendendo a questionar a soberania, a ideia também era que, para as nações colonizadas, a soberania era o veículo da libertação. Da mesma forma, após o Holocausto e o extermínio sistemático dos judeus europeus, a ideia era que os judeus precisavam se defender e restaurar sua dignidade, como nação, por meio da soberania nacional - por meio da criação de um Estado judeu.

E devemos ser claros: nesse momento da história, eles não estavam errados.

Quando aplicada às vítimas da Europa, a resposta da Europa pode parecer a bagagem intelectual do império ou os restos de uma ideologia colonialista que pede para continuar se impondo mesmo após o fim do império. A resposta bem-sucedida da Europa ao passado do império se aplica às vítimas do passado do império?

E aqui está outra pergunta: a resposta da Europa ao seu passado pode sobreviver se contradizermos essa resposta no que diz respeito às suas vítimas? Se reconhecermos que os outros têm o direito de violar a dignidade humana, também reconheceremos nosso dever de respeitar o direito deles de fazer isso. A dignidade humana é, então, importante para nós, mas não inviolável. Esse é o ponto crucial; uma vez que você reconhece isso, externamente, você também reconhece algo internamente - você simplesmente não pode reivindicar a dignidade humana como inviolável dentro do continente também. Para oferecer uma variação do argumento de Snyder: essa é a pergunta mais importante sobre a resposta dada à pergunta mais importante da história moderna.

Para os pensadores pós-coloniais, limitar as nações libertadas por meio da ideia cosmopolita de humanidade parece uma forma de neocolonialismo: impor as respostas da Europa às suas vítimas, impedindo sua emancipação. Quando se trata do Holocausto, a objeção é exatamente a mesma. Experimente sugerir que uma constituição israelense deveria começar não com a soberania do povo judeu, mas com um compromisso com a dignidade humana: você será acusado de antissemitismo por sugerir o uso de ideais cosmopolitas europeus para questionar a soberania judaica e o estado democrático e judeu - convidando a acusações de antissemitismo.

Para um lado, portanto, a política universalista parece racismo ou colonialismo; para o outro, parece antissemitismo. E como todos os lados aqui veem a soberania como a condição de soma zero de sua própria existência, essas doutrinas agora não estão apenas em conflito, mas em rota de colisão: não é porque os lados são tão diferentes um do outro que a situação é tão violenta e o debate tão acalorado, mas porque são tão semelhantes.

Para muitos da esquerda, certamente da esquerda pós-colonial, o povo palestino é a personificação definitiva da luta contra o colonialismo europeu. Quem quer que questione seu direito à resistência armada, por exemplo, ao condenar o ataque do Hamas a civis, “relativiza” ou “contextualiza” o colonialismo. Que direito os europeus têm, segundo o argumento, de criticar o uso da força por aqueles que não são protegidos por lei?

Por outro lado, na Alemanha, mas não apenas na Alemanha, vemos a mesma ideia, embora oposta: que os judeus, representados pelo Estado de Israel, personificam o sofrimento humano e o direito à autodefesa. Quem quer que exija que o país assine uma constituição liberal-democrática neutra - afirmando um Estado para todos os cidadãos - e seja responsável perante a lei internacional, de fato relativiza o direito dos judeus à autodefesa. Enquanto a resposta da Europa ao seu império em ruínas foi desconstruir a soberania afirmando a dignidade como seu limite, a resposta de suas vítimas foi afirmar a soberania nacional como inviolável. Cada lado finge encarnar algo definitivo, absoluto, que relativiza a dignidade humana daqueles que pertencem ao outro grupo.

Isso ficou claro nas respostas dos círculos intelectuais de esquerda ao massacre sistemático e sádico de famílias inteiras, estupros e queimadas pelo Hamas. Não há como ignorar isso: a tendência nos campi universitários variava da alegria com esse ato à tolerância - ou, pelo menos, à insistência de que os palestinos tinham o direito de “resistência armada” em relação a seus “colonizadores”. Se você argumentasse que isso estava, na melhor das hipóteses, desculpando o antissemitismo genocida e, na pior, apoiando-o, a resposta comum era que o Hamas não é uma organização antissemita, porque o ataque tinha como alvo os israelenses, e não os judeus como tais. Mas a carta do Hamas de 1988 afirma claramente: “O Dia do Juízo não acontecerá até que os muçulmanos matem os judeus, e quando o judeu se esconder atrás de pedras e árvores, as pedras e árvores dirão: 'Ó muçulmanos, há um judeu atrás de mim, venham e matem-no'.

Costumava haver uma tendência a ignorar essa cláusula ou afirmar que o Hamas havia desistido dela. Mas é muito plausível que essa frase exata sobre o Dia do Juízo Final estivesse presente na mente daqueles que realizaram o massacre. Em 7 de outubro, muitos deles pareciam ter pensado exatamente isso: que o Dia do Juízo Final havia chegado. A tolerância a isso é generalizada, e é importante dizer que essa tolerância decorre exatamente da ideia da soberania do colonizado. As mesmas pessoas - estudantes, professores - que desculparam o massacre agora cantam “do rio ao mar, a Palestina será livre”. Não se engane: eles não querem dizer “democrática para todos”, mas “livre dos judeus” - ou, para ser mais preciso, eles suspendem o julgamento para evitar a suposição supostamente neocolonialista de que têm o direito de decidir pelos palestinos.

A soberania nacional é tratada como o veículo inviolável da libertação. Como disse Yanis Varoufakis: “Perguntaram-me se eu condenava o Hamas e eu disse que não. Mas eu condeno toda violência contra civis. Também não condeno os colonos israelenses. Também não condeno Benjamin Netanyahu. Eu condeno a nós, europeus”. Se você me perguntar, essa não é uma maneira de assumir a responsabilidade histórica como europeu, mas de se esconder atrás dela e ridicularizá-la.

O outro extremo do espectro opera exatamente com a mesma lógica. Isso é mais visível na falsa tendência de um certo centro liberal europeu de tratar o Holocausto como um significante “universal”. Como disse um autor, a comemoração do Holocausto tornou-se uma memória “universal” ou “cosmopolita”. Nessa visão, o evento é um símbolo, não de um horror específico do passado, mas de qualquer violação sistemática dos direitos humanos. Da mesma forma, o Holocausto não é mais propriedade exclusiva dos grupos nacionais diretamente envolvidos no evento histórico - judeus, por um lado, alemães e europeus de forma mais ampla, por outro; em vez disso, a comemoração do Holocausto desempenha um papel crucial no reforço do direito internacional e dos direitos humanos, tornando-se “um símbolo potencial de solidariedade global”.

À primeira vista, isso pode parecer uma tese amigável sobre a memória ou a história como um apelo a compromissos universais. Em uma inspeção mais minuciosa, deve ficar claro que ela deu ao universalismo um nome ruim, apresentando o universalismo ou a memória como um projeto colonial. A forma como o Holocausto é comemorado está a serviço de projetos nacionais específicos. Esse símbolo “universal”, portanto, exclui da “solidariedade global” aqueles para quem esse símbolo é tudo menos acessível. Como a comemoração do Holocausto tem sido interpretada como argumento para a soberania nacional dos judeus, ela não promove os direitos humanos internacionais, especialmente para aqueles cujos direitos humanos podem parecer um obstáculo.

Um dos exemplos mais significativos dessa tendência é a atitude do governo alemão em relação ao Tribunal Penal Internacional de Haia (ICC). A instituição do direito internacional e dos tribunais internacionais autorizados a julgar crimes de guerra desenvolveu-se no contexto imediato dos crimes nazistas. Esse é um forte motivo para que a Alemanha, assumindo sua responsabilidade histórica, seja um dos principais patrocinadores do TPI. No passado, o Ministério das Relações Exteriores da Alemanha fez de tudo para defender o TPI contra a interferência do governo Trump, declarando que “qualquer tentativa de minar a independência do tribunal não deve ser tolerada”.

Mas quando o promotor em Haia iniciou uma investigação inicial sobre crimes de guerra supostamente cometidos por Israel nos Territórios Ocupados, a Alemanha argumentou que o tribunal não tinha jurisdição. Israel, argumentou, não faz parte do Estatuto de Roma, que regulamenta o mandato do tribunal, e a Palestina não é reconhecida como um Estado. Quando os juízes do TPI rejeitaram essa opinião - e por um bom motivo: A Palestina, segundo eles, foi reconhecida como um “Estado Parceiro” do Estatuto de Roma, independentemente de ser ou não um Estado, o que significa que o tribunal tem jurisdição - um porta-voz do Ministério das Relações Exteriores da Alemanha declarou que “nossa posição nesse caso permanece inalterada. De acordo com nossa posição legal, o Tribunal Penal Internacional e seu Gabinete do Procurador não têm jurisdição”. O Ministro das Relações Exteriores da Alemanha repetiu a mesma declaração.

Para entender a gravidade dessas declarações, é necessário deixar de lado a questão da jurisdição do tribunal. Trata-se da autoridade do tribunal, que reconhecer significa considerar a decisão do tribunal como suficiente para mudar a posição legal da Alemanha - limitando assim sua soberania. A alegação do governo alemão de que a Corte não tinha jurisdição nos territórios palestinos, apesar da decisão dos juízes de que ela tem, negou não apenas a jurisdição da Corte. Ela também negou sua autonomia e autoridade.

Esse é um bom exemplo da poderosa influência da doutrina conhecida, embora não oficial, da Staatsräson (razão de Estado) - que só pode ser não oficial, pois, se não fosse, entraria em conflito com a constituição. É assim que parece quando o compromisso com a resposta da Europa ao seu passado, se fundamentado na história, encontra seu limite e se torna não apenas não universal, mas antiuniversal. Com seu discurso sobre a Staatsräson, a Alemanha afirma sua própria soberania para se opor à autonomia do tribunal, a fim de proteger a soberania judaica da autoridade do tribunal. Como a Alemanha é a principal patrocinadora da Corte, isso constitui uma séria ameaça a essa instituição.

Isso foi há quatro anos. Agora podemos ver os efeitos desse questionamento do poder da lei internacional. Será que o TPI tem autoridade no território, já que Gaza está arrasada e faminta, e os ministros israelenses falam em entrar em Rafah, já que “não faremos metade do trabalho, mas exigiremos aniquilação total”? Se quiserem saber, é uma pena que Varoufakis, como europeu, não condene tal declaração.

Esta, então, é a questão: A Europa deve pensar na resposta que deu à questão mais importante da história moderna apenas como sua própria resposta? Como uma resposta que pode ser boa aqui, mas que em outros lugares não é apenas errada, mas também ilegítima? Ou isso já é trair a resposta da Europa - escrevendo a primeira frase na história da decadência dessa resposta, também dentro da Europa, e entregando o argumento aos inimigos da Europa?

Considere a oposição a esse discurso, aqui na Judenplatz. É ilegítima a ideia de que salvar Israel e a Palestina de uma distopia ainda pior exige que imaginemos uma transição da região na direção de uma constelação europeia, seguindo os mesmos padrões daquela grande resposta europeia, com nações sub-soberanas se unindo a uma constituição comum (con)federativa para toda a região? Essa ideia federativa, que exige levar a sério a advertência de Immanuel Kant de que as negociações e os acordos de paz não devem se tornar mentiras - mentiras que levam a guerras de soma zero que minam a própria possibilidade de paz -, é ilegítima?

Se a resposta europeia for deslegitimada dessa forma, como isso se reflete na Europa? Como a permissão da lógica desumanizadora da guerra total em Israel e na Palestina afeta os próprios cidadãos judeus e muçulmanos da Europa? Será que isso não entrega o argumento à direita nacionalista populista, que está em ascensão ao nosso redor, afirmando a soberania nacional, questionando o direito internacional e reivindicando uma cidadania baseada na afiliação étnica?

Este, portanto, seria meu apelo à Europa: insista na realidade de seus ideais. Eles são ainda mais importantes devido à responsabilidade histórica, mas, em última análise, como ideais cosmopolitas, não podem ser entendidos como dependentes ou limitados pela responsabilidade histórica. Neste momento sombrio e difícil em que a política e o pensamento chegaram, devemos rejeitar a tendência de todos os lados de minar os ideais da Europa por meio de uma maneira muito irresponsável de entender a responsabilidade histórica. Essa é a única maneira de manter os compromissos históricos da Europa e de evitar que esses compromissos se tornem formas nacionais de pensamento mítico.

Notas

1 - A Israelitische Kultusgemeinde (Comunidade Judaica) de Viena fez campanha para que o discurso de Omri Boehm fosse cancelado. O ex-líder da Kultusgemeinde e presidente interino do Congresso Judaico Europeu, Ariel Muzicant, afirmou que, se fosse “30 anos mais jovem”, teria ido à palestra para “jogar ovos em Boehm”. Isso poderia ter sido interpretado como um convite para que outros agissem. Mesmo assim, a palestra foi realizada sob proteção policial e apesar da interrupção dos manifestantes - Ed.

2  - Nesse momento, um manifestante com cartaz de protesto gritou: “A Lei Básica de Israel tem o princípio da dignidade humana consagrado nela!” Fiquei muito feliz ao ouvir isso, principalmente porque provou que alguns dos manifestantes, ou pelo menos um, estavam ouvindo. Não pude interromper a palestra para responder. De fato, a Lei Básica de Israel prova o ponto, pois ela subordina explicitamente a dignidade humana à defesa do Estado - impedindo, assim, a interpretação da lei como exigindo que o Estado seja “o Estado de todos os seus cidadãos”. Pelas mesmas razões, a lei também se abstém de nomear a igualdade como necessária para a dignidade. Imagine uma constituição israelense que começasse com a dignidade humana, em vez de submetê-la à soberania judaica!


 Manifestantes contra o universalismo, considerado antissemita, na Praça dos Judeus, durante o discurso. Fotos Gabi Hift



06/04/2025

Pour revoir un seul et même ciel étoilé
Contre tous les tribalismes, Omri Boehm, un philosophe universaliste

Les seules étoiles qui brillent dans le ciel de Gaza sont fabriquées et servent à illuminer le génocide en cours. Omri Boehm, philosophe israélien et allemand enseignant à New York dans l’institution où travailla Hannah Arendt, œuvre à (r)apporter les Lumières dans cette terre sainte devenue terre maudite depuis trop longtemps.

« Deux choses remplissent le cœur d’une admiration et d’une vénération toujours nouvelles et toujours croissantes à mesure que la réflexion s’y attache et s’y applique : le ciel étoilé au-dessus de moi et la loi morale en moi » : cette phrase d’Immanuel Kant est gravée sur son mémorial à Kaliningrad, l’ancienne Königsberg où le philosophe des Lumières vécut et mourut.

Omri Boehm nous dit qu’il existe une troisième voie entre le “populisme” [manière se voulant élégante de dire “fascisme”] et la “wokitude”. Contre tous les tribalismes, il prône le retour à un universalisme englobant toute l’espèce humaine.

Aux yeux de l’ambassade israélienne à Berlin, “sous couvert de science, Boehm tente de diluer la mémoire de l’Holocauste avec son discours sur les valeurs universelles, le privant ainsi de sa signification historique et morale”. Notre philosophe a donc été désinvité de la cérémonie de célébration du 80e anniversaire de la libération des camps de Buchenwald et Mittelbau-Dora où il devait faire un discours, ce dimanche 6 avril 2025 à Weimar. “ Grau, teurer Freund, ist alle Theorie, und grün des Lebens goldner Baum ”, dit Mephisto à Faust, dans l’œuvre du plus célèbre weimarien, Goethe : “Grise, mon ami, est toute théorie, Mais vert est l'arbre d'or de la vie”. Nous vous invitons à découvrir Omri Boehm. Puisse-t-il mettre un peu de gris dans votre verdeur, sans que ça tourne au vert de gris.

SOMMAIRE

  • Unis dans la dissension
    Festival de Vienne : protestations contre le “Discours à l’Europe ” d’Omri Boehm
    Gabi Hift, nachtkritik.de, 8/5/2024
  • L’Europe et ses victimes : au-delà du mythe de la souveraineté nationale
    Discours à l’Europe
    Omri Boehm, Vienne, 7/5/2024
  • “Nous devons protéger les Palestiniens au nom d’un avenir commun” : Omri Boehm, philosophe israélo-allemand
    Netta Ahituv, Haaretz, 14/12/2024


05/04/2025

OFER ADERET
La participation du philosophe israélo-allemand Omri Boehm à la commémoration de la libération du camp de concentration de Buchenwald annulée sous la pression d’Israël

Ofer Aderet, Haaretz, 4/4/2025
Traduit par Fausto GiudiceTlaxcala

Le mémorial de Buchenwald et Mittelbau-Dora avait invité Boehm pour ses réflexions éthiques sur les droits humains universels et les crimes nazis. L’ambassade d’Israël a déclaré que Boehm « dilue la mémoire de l’Holocauste avec son discours sur les valeurs universelles »

Le philosophe Omri Boehm, en 2022. Photo Emil Salman

Sous la pression du gouvernement israélien, un discours du philosophe israélo-allemand Omri Boehm lors de la célébration [prévue le dimanche 6 avril à Weimar] du 80e anniversaire de la libération du camp de concentration de Buchenwald en Allemagne a été annulé. 

Dans une déclaration publiée sur X, l’ambassade d’Israël en Allemagne a qualifié la décision d’inviter Boehm à l’événement d’« insulte flagrante » à la mémoire des victimes de l’Holocauste. Elle a justifié sa décision en invoquant sa comparaison de l’Holocauste avec la Nakba palestinienne et sa description de Yad Vashem comme « un instrument de manipulation politique ».

Boehm a confirmé à Haaretz que sa participation à la cérémonie avait été annulée. Il a déclaré que lui-même et le site commémoratif avaient tenté d’éviter un scandale et avaient l’intention de coopérer à l’avenir.

L’ambassade d’Israël a déclaré que « sous couvert de science, Boehm tente de diluer la mémoire de l’Holocauste avec son discours sur les valeurs universelles, le privant ainsi de sa signification historique et morale ». 

« L’histoire n’est pas un débat abstrait et l’Holocauste n’est pas un terrain de jeu intellectuel », a ajouté l’ambassade. 


Omri Boehm prononçant son “discours à l’Europe”, intitulé “Les ombres de l’histoire, les spectres du présent : la guerre au Moyen-Orient et le défi de l’Europe”  sur la Judenplatz de Vienne, le 7 mai dernier. Photo Wiener Festwochen GesmbH / APA-Fotoservice / Tanzer

Le mémorial de Buchenwald (Stiftung Gedenkstätten Buchenwald und Mittelbau-Dora) a déclaré dans un communiqué [lire ci-dessous] que Boehm - petit-fils d’une survivante de l’Holocauste - avait été invité à l’événement en raison de sa capacité à tenir « des réflexions éthiques et de valeur sur le lien entre l’histoire et la mémoire, en particulier en ce qui concerne la valeur des droits humains universels et leur importance par rapport aux crimes des nazis ».

Le directeur du mémorial de Buchenwald, Jens Christian Wagner, a déclaré aux médias que l’invitation de Boehm « a entraîné un conflit avec des représentants du gouvernement israélien, qui a également impliqué les survivants des camps. Afin de protéger les survivants et dans le but d’assurer un événement commémoratif pour le camp de concentration - où l’accent n’est pas mis sur un débat initié de l’extérieur, mais sur les survivants - nous avons décidé, après discussion avec Boehm, de reporter son discours à une date ultérieure.

Le gouvernement allemand a répondu vendredi que les anciens camps de concentration nazis sont libres de choisir qui ils invitent à leurs cérémonies.


Buchenwald


À propos du report du discours d’Omri Boehm à l’occasion du 80e anniversaire de la libération des camps de concentration de Buchenwald et de Mittelbau-Dora

Communiqué du Prof. Dr. Jens-Christian Wagner, directeur de la Fondation des mémoriaux de Buchenwald et de Mittelbau-Dora, 1/4/2025 

«Le professeur Omri Boehm est un philosophe germano-israélien de renommée internationale. Il est le petit-fils d’une survivante de l’Holocauste. Nous l’avons invité à prendre la parole lors du 80e anniversaire de la libération de Buchenwald et de Mittelbau-Dora, car nous attendions de lui qu’il nous fasse part de réflexions éthiques de haut niveau sur la relation entre l’histoire et la mémoire, en particulier sur la valeur des droits de l’homme universels et leur importance au regard des crimes nazis.

À notre grand regret, l’invitation d’Omri Boehm a provoqué un conflit avec des représentants du gouvernement israélien, dans lequel les survivants des camps ont malheureusement été entraînés. Cela risquait de peser sur le 80e anniversaire de la libération. Pire encore : les survivants, souvent blessés dans leur âme, risquaient d’être instrumentalisés et entraînés encore plus loin dans ce conflit.

Afin de protéger les survivants et dans le but d’assurer une cérémonie commémorative en souvenir des camps de concentration de Buchenwald et de Mittelbau-Dora, qui ne soit pas centrée sur un débat initié de l’extérieur, mais sur les survivants, nous avons décidé dans cette situation - après une conversation de confiance avec Omri Boehm - de reporter son discours à une date ultérieure.

« Comprendre l’histoire, apprendre pour l’avenir », telle est la devise de notre travail. Omri Boehm donne des impulsions importantes à cet égard grâce à ses travaux scientifiques de renommée internationale et récompensés à plusieurs reprises. En tant que lauréat du Prix du livre de Leipzig pour la compréhension européenne, Omri Boehm est un important bâtisseur de ponts au niveau international.

Lire La peinture à Dora, par François Le Lionnais, cofondateur de l’Oulipo avec Raymond Queneau, 1946. Ce texte sera lu à la cérémonie du 6 avril.

Écouter  “Porter un flambeau pour ne pas qu'on oublie” : un projet inédit pour commémorer les 80 ans de la libération du camp de Buchenwald