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28/02/2025

SERGIO RODRÍGUEZ GELFENSTEIN
De Bruxelles à Riyad en passant par Munich : huit jours qui ont ébranlé le monde (II)

 Sergio Rodríguez Gelfenstein, 27-2-2025
Traduit par Fausto GiudiceTlaxcala

La semaine dernière, nous avons fait une observation descriptive des développements internationaux ; l'analyse de ces développements est un peu plus complexe. Il me semble que les difficultés proviennent de l'idée qu'il est possible de comprendre la situation actuelle sur la base d'une vision dichotomique entre unipolarité et bipolarité et que les catégories d'analyse utilisées pendant la guerre froide sont toujours valables. Certains analystes parlent même de l'émergence d'une nouvelle bipolarité Chine-USA.


Il y a quelques jours, un ami toujours bien informé et soucieux de suivre les développements internationaux m'a écrit pour me dire : « Je ne comprends pas ce qui se passe. Je suis perdu. Peut-être que l'empire veut redessiner le monde. Tu avais écrit quelque chose il y a de nombreuses années sur les répartitions... »

Tout cela m'a motivé à écrire cet article qui, en raison de sa longueur, a dû être publié en deux parties, ce qui n'est pas forcément avantageux. En effet, en mars 2014, mon livre a été publié d'abord au Chili puis en Argentine par la maison d'édition Biblos. “La balanza de poder. Las razones del equilibrio del sistema internacional”  [« L'équilibre des pouvoirs. Les raisons de l'équilibre du système international »]. Quelques mois plus tard, l'édition anglaise de L’ordre du monde d’Henry Kissinger est sortie en septembre.

Cherchant à établir ce que serait le système international du futur, j'ai passé en revue dans mon livre les variantes existantes basées sur l'étude des causes des conflits et de la coopération entre les États pour les résoudre. J'ai ensuite expliqué les propositions de bipolarité, de multilatéralisme, de multipolarité et d'apolarité qui étaient sur la table. Personnellement, j'ai osé affirmer que les différentes conditions existantes laissaient présager qu'à moyen terme, un système international d'équilibre des pouvoirs serait mis en place.

La définition la plus claire de l'équilibre est apparue dans les études du politologue usaméricain Morton Kaplan qui, dans un article de 1966 intitulé « Some Obstacles in International Systems Research », a établi que les acteurs de l'équilibre devaient être au moins cinq, avoir un caractère exclusivement national et entrer dans la catégorie des « acteurs nationaux essentiels au fonctionnement du système ».

Il a ensuite établi 6 règles fondamentales qui caractérisent le système d'équilibre des pouvoirs. Il s'agit de négocier avant de combattre, de combattre avant de ne pas augmenter les capacités, de ne pas combattre avant d'éliminer un acteur clé, de s'opposer à toute coalition qui tente de dominer, de limiter les acteurs qui acceptent les principes organisationnels supranationaux et de permettre aux acteurs qui sont vaincus ou limités de réintégrer le système.

Il s'agit là d'un résumé très succinct de la proposition présentée par Kaplan. Dans mon livre, publié il y a seulement 11 ans, j'ai soutenu que, de mon point de vue, pour la Chine, la recherche de l'équilibre fait partie de sa politique permanente, tandis que pour les USA, une bête blessée et jouant des griffes, l'équilibre est un impératif de survie.

Mon point de vue était et reste que le monde évolue vers un équilibre des pouvoirs. La possibilité de détruire la planète pour imposer le capitalisme n'est pas viable. Les capitalistes sont immoraux, pas suicidaires. L'accumulation a une limite - actuellement imposée par les puissances de confrontation - qui indiquent en fait une faiblesse croissante et la perte de l'hégémonie impériale. Une rationalité du capital - si elle existe et est possible - établit comme plus viable un équilibre qui lui permet de préserver une part de pouvoir plutôt que de recourir à une confrontation nucléaire dans laquelle ils peuvent difficilement obtenir des gains.

Comme je l'ai déjà dit, quelques mois après la publication de mon livre, le groupe d'édition Penguin Random House a publié le livre de Kissinger sous le titre suggestif de « World Order: Reflections on the Character of Nations and the Course of History». D'un autre point de vue, même antagoniste au mien, Kissinger affirme que l'équilibre est la seule alternative pour que USA conservent leur puissance.

Peu avant la publication de son livre, à la fin du mois d'août 2014, Kissinger a publié dans The Wall Street Journal un article intitulé « On the Assembly of a New World Order ». Dans ce texte, il donne un aperçu de certains éléments qu'il développe beaucoup plus longuement dans son livre. Il considère comme positif le fait que la démocratie et la gouvernance participative soient passées du statut d'aspiration à celui de “réalité universelle”. Notez la référence de Kissinger à la "gouvernance participative".

Il note que la majeure partie du monde est composée de pays qui forment des États souverains indépendants, mais ajoute que l'Europe n'a pas les attributs pour créer un État, offrant un “vide d'autorité tentant”. Il semble ici vouloir actualiser les caractéristiques des États-nations essentiels mentionnés par Kaplan, qui sont orientés vers la configuration d'un équilibre entre la Chine, la Russie, les USA, l'Inde et un pays européen qui émergera en tant que leader dans le conflit actuel - l'Allemagne ? le Royaume-Uni ? la France ? Peu importe lequel, mais ce sera l'un d'entre eux.

Kissinger était d'avis que l'ordre international était confronté à un paradoxe, en ce sens que - selon lui - la prospérité dépendait du succès de la mondialisation, mais que le processus produisait un contrecoup politique qui visait à remettre en cause ses objectifs. Pour remédier à cette anomalie, il a proposé la création d'un « mécanisme efficace permettant aux grandes puissances de se consulter et éventuellement de coopérer sur les questions les plus importantes ».

Pour ce faire, les USA devraient accepter l'existence de deux niveaux apparemment contradictoires : les principes universels d'une part et les particularités locales et régionales d'autre part. En tout état de cause, Kissinger ne renonce pas à ses fondements idéologiques impérialistes en affirmant que tout doit être envisagé sous l'angle du caractère exceptionnel des USA.

Sur le plan intérieur, cela signifie que les citoyens usaméricains doivent comprendre qu'ils ne sont pas les seuls à vivre sur cette planète, qu'ils doivent renoncer à certains de leurs droits pour faire progresser la mondialisation et que même ces droits doivent continuer à être violés [comme c'est le cas aujourd'hui aux USA] pour faire de la place aux opinions d'autres pays.

Dès le début du livre, Kissinger affirme que les différentes traditions culturelles permettent d'établir le concept d'ordre comme base des relations internationales. Il semble ainsi contredire Huntington, qui pensait que l'avenir serait marqué par des conflits civilisationnels. Il estime au contraire que les conflits actuels trouvent leur origine dans l'identification d'idées concurrentes sur la forme du système international à un moment où l'enjeu est d'organiser l'ordre régional tout en veillant à ce que cet ordre soit compatible avec la paix et la stabilité dans le reste du monde.

Sans que cela semble sortir de sa plume, Kissinger estime qu'il y a un grand risque à ce que l'Occident tente de répandre son modèle de démocratie dans le monde, avertissant notamment que “l'idéalisme américain” sans une stratégie claire pour le mettre en pratique ne conduira pas à une amplification de la présence de la “démocratie libérale” dans le monde.

Les notions d'impérialisme et d'équilibre peuvent sembler antagonistes, mais elles ne le sont pas. Je tiens à le répéter, pour les USA, il s'agit d'une question de survie. Il peut être nécessaire d'étudier le livre de Kissinger pour comprendre la performance internationale de la nouvelle administration usaméricaine. On sait que durant la première administration Trump, bien après l'âge de 90 ans, Kissinger était un visiteur régulier de la Maison Blanche. Décédé en 2023 à l'âge de 100 ans, ses idées et son empreinte constituent la colonne vertébrale de l'action internationale des USA à ce stade.

En décembre 2022, quelques mois après le début de l'opération militaire russe en Ukraine, alors que Joe Biden est au pouvoir à Washington, Kissinger, dans un article intitulé. “Comment éviter une nouvelle guerre mondiale ?” , a estimé que la paix devait être recherchée avec un double objectif : confirmer la liberté de l'Ukraine et définir une nouvelle structure internationale dans laquelle la Russie devrait avoir sa place. L'ancien secrétaire d'État n'était pas non plus d'accord avec l'idée que la Russie était obligée de devenir un pays impuissant après le conflit en Ukraine, car il était impératif de reconnaître que la Russie « avait contribué de manière décisive à la recherche de l'équilibre mondial et de l'équilibre des pouvoirs pendant plus d'un demi-millénaire » et que « son rôle historique ne devait pas être dégradé ».

Les questions qui ont été mises au premier plan de la dynamique internationale actuelle, telles que les immigrés déportés des USA, le canal de Panama et le Groenland, ne sont que des écrans de fumée destinés à “distraire” le monde et à le faire réfléchir et débattre sur des questions qui ne sont pas prioritaires. Selon le sénateur usaméricain Bernie Sanders, le véritable objectif de Trump est de « démanteler illégalement et inconstitutionnellement les agences gouvernementales » afin que les milliardaires et les « classes dirigeantes [qui] ont toujours voulu et cru que [le pouvoir] leur revenait de droit, [obtiennent] plus de pouvoir, plus de contrôle, plus de richesse ». Pour ce faire, ils doivent dynamiter les institutions du pays et restructurer le système international selon les paramètres définis par Trump.

Certes, pour y parvenir, ils ont besoin que la Chine, et non la Russie, soit l'ennemi dans le nouveau système qu'ils entendent construire. Cependant, face à un approfondissement stratégique de la situation critique, la seule solution pour tenter d'éviter la catastrophe et de sauvegarder une certaine part de pouvoir est de se concentrer sur la recherche d'un équilibre, comme l'a souligné Kissinger.

Il y a presque deux ans, en mai 2023, Kathleen Hicks, la vice-secrétaire d'État à la défense des USA  l'a clairement indiqué. Lors d'une conférence à Washington, elle a déclaré que le Pentagone percevait la Chine comme le challenger militaire de son pays et « le seul concurrent stratégique ayant la volonté et, de plus en plus, la capacité de remodeler l'ordre international ». Elle a ajouté que la Chine constituait “un défi générationnel” qui, même s'il évoluera avec le temps, “n'ira nulle part”.

Rappelant l'empreinte de Kissinger au cours du XXe siècle, Hicks a évoqué l'expérience historique de la confrontation avec l'Union soviétique, un concurrent “lent et lourd”, alors qu'aujourd'hui, en matière de défense, les USA doivent “évoluer plus vite que les menaces”.

Hicks a déclaré que dans cette “nouvelle ère de compétition stratégique”, l'objectif des USA 3est de dissuader, car la compétition n'est pas synonyme de conflit"” Selon la sous-secrétaire, le Pentagone a réussi à faire en sorte que « les dirigeants chinois se réveillent chaque jour, considèrent les risques d'agression et concluent" : “Aujourd'hui n'est pas le jour” et qu’ils le pensent aujourd'hui et chaque jour entre aujourd'hui et 2027, aujourd'hui et 2035, aujourd'hui et 2049, et au-delà », soulignant curieusement les années phares pour lesquelles la RPC a entrepris d'atteindre des objectifs stratégiques.

À ce stade, Trump connaît les coûts liés au maintien de 800 bases militaires et de 1,32 million de militaires en dehors de son territoire, sans compter 11 groupes d'attaque de porte-avions dont 7 sont déployés et 4 en réparation, avec un fardeau économique très important conspirant avec l'objectif de faire de « l'Amérique à nouveau grande » une réalité. Pour cette raison, il a anticipé les circonstances et a exprimé le 20 février sa volonté de négocier avec la Russie et la Chine pour réduire le nombre d'ogives nucléaires, soulignant qu'il considère comme inacceptable l'utilisation d'armes atomiques et l'augmentation du nombre de puissances nucléaires. Pour paraphraser l'ancien président Bill Clinton, on pourrait dire “It's the economy, stupid”.

Il faut le dire clairement... et le répéter, le système international de l'après-guerre s'est effondré et est sur le point de céder la place à un nouveau système. Certes, l'OTAN existe encore formellement, mais la réalité est que, comme l'a certifié le président Macron en novembre 2019, elle est en « état de mort cérébrale ». Le Secrétariat général est un poste vide, créé uniquement pour faire croire aux Européens qu'ils peuvent décider de quelque chose. Le véritable pouvoir repose sur les épaules du commandant suprême des forces alliées en Europe, qui est toujours un général usaméricain. Il est déjà question que Trump ordonne le retrait de ses troupes déployées en Europe de l'Est, dans les pays qui faisaient partie de l'Union soviétique ou du Pacte de Varsovie. Cela reviendrait au statu quo de la fin de la guerre froide, lorsque l'Union soviétique a disparu et que l'Occident a pris des engagements envers la Russie qu'il n'a jamais tenus.

Aujourd'hui, alors que des délégations de haut niveau de la Russie et des USA se sont réunies à Riyad, la capitale de l'Arabie saoudite, « les eaux reviennent à la normale ». Marco Rubio sait que Sergueï Lavrov n'est pas le ministre des Affaires étrangères indigne et stupide du Panama et que Poutine n'est pas non plus le José Raúl Mulino qui fait des génuflexions. Il ne s'agit pas d'une question de taille et de puissance d'un pays par rapport à l'autre. Un dirigeant panaméen, le général Omar Torrijos, a forcé les USA à s'asseoir à la table du dialogue, a négocié d'égal à égal avec le seul pouvoir que lui conféraient la dignité et l'histoire du peuple panaméen héroïque, et a gagné : il les a obligés à restituer le canal.

À Riyad, Rubio a dû mesurer ses mots et même ses gestes. Il s'agissait d'un premier pas, qui avait plus à voir avec la politique bilatérale qu'avec une révision de l'agenda international, même si la question de l'Ukraine était sur la table. Mais le fait que les deux plus grandes puissances nucléaires de la planète se soient assises pour discuter et que certains de leurs principaux dirigeants se soient regardés dans les yeux, face à face, et aient éteint l'allumette qui, il y a quelques semaines à peine, menaçait d'allumer le feu de l'hécatombe nucléaire, est un signe de soulagement et une voie positive pour toute l'humanité éprise de paix et de vie.

Aujourd'hui, le doute, la confusion et l'incertitude règnent, et pour les Européens, la perplexité, mais nous devons nous y habituer : c'est la dynamique de Trump et il en sera ainsi pendant au moins les quatre prochaines années. En attendant, tout en reconnaissant et en applaudissant ce qui s'est passé à Riyad et les événements qui ont conduit à la possibilité d'une guerre nucléaire, nous devons toujours nous souvenir du Comandante Ernesto Che Guevara lorsque, le 30 novembre 1964, depuis Santiago de Cuba, il a recommandé que l'on ne fasse pas confiance à l'impérialisme “même un tout petit peu, pas du tout”.

 

 

21/02/2025

SERGIO RODRÍGUEZ GELFENSTEIN
De Bruxelles à Riyad en passant par Munich : huit jours qui ont ébranlé le monde (I)


Sergio Rodríguez Gelfenstein, 20-2-2025
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

Les développements internationaux ont pris un rythme extraordinairement rapide. J’ai consulté quelques collègues et nous avons conclu qu’il devenait difficile de suivre le mouvement des événements qui secouent, transforment et restructurent le système international à une vitesse inégalée au moins au cours des 80 dernières années. Ce qui est certain, c’est que le monde de l’après-guerre semble s’effondrer. Le consensus obtenu en 1945 à Yalta et à Potsdam vient de recevoir un coup fatal à Munich.


« Rendre l’Europe à nouveau petite » - Tom Janssen, Pays-Bas

Jetons un bref coup d’œil sur les événements de ces derniers jours pour confirmer cette affirmation qui reflète l’empreinte que l’administration Trump impose au monde :

12 février. Le président usaméricain a indiqué avoir eu un appel téléphonique “long et très productif” avec son homologue russe Vladimir Poutine. Il a déclaré que Poutine souhaitait la fin de la guerre en Ukraine et qu’il pensait qu’un cessez-le-feu interviendrait “dans un avenir assez proche”. Il s’agit de la première conversation connue entre les deux présidents depuis l’entrée en fonction de Trump le mois dernier.

12 février. Lors de sa réunion à Bruxelles avec les membres de l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN), le secrétaire usaméricain à la Défense, Pete Hegseth, a déclaré “directement et sans ambiguïté” que Washington n’accorderait plus la priorité à la sécurité de l’Europe et que la guerre entre l’Ukraine et la Russie “doit cesser”, sa priorité étant de sécuriser les frontières des USA et d’éviter une guerre avec la Chine.

Hegseth a affirmé que les réalités stratégiques actuelles empêchent les USA de rester le principal garant de la sécurité en Europe. Ces mêmes réalités imposent, selon le chef du Pentagone, une réduction des forces usaméricaines dans la région. La priorité pour Washington est de faire face à la Chine, qu’il a qualifiée de “concurrent majeur” parce qu’elle a la capacité et l’intention de menacer la sécurité nationale et les intérêts fondamentaux des USA dans la région indopacifique. Hegseth a souligné que la dissuasion d’un conflit avec la Chine dans le Pacifique était la mission la plus importante de son ministère. Il a reconnu la rareté des ressources et la nécessité de prendre des décisions difficiles pour garantir que le processus n’échoue pas.

Le secrétaire à la Défense a exhorté les alliés européens de l’OTAN à jouer un rôle actif. Il leur a dit sans ambages : « La Maison Blanche ne tolérera plus une relation déséquilibrée qui favorise la dépendance. Au lieu de cela, les relations américano-européennes se concentreront sur l’autonomisation des pays européens afin qu’ils prennent la responsabilité de leur propre sécurité ».

14 février. Le vice-président usaméricain J.D. Vance a prononcé un discours lors de la 61e conférence de Munich sur la sécurité, le 14 février, surprenant à la fois les participants et les alliés européens de Washington. Dans son discours, le haut fonctionnaire usaméricain a déclaré : « La menace qui m’inquiète le plus pour l’Europe n’est ni la Russie, ni la Chine, ni aucun autre acteur extérieur. Ce qui m’inquiète, c’est la menace qui vient de l’intérieur, le recul de l’Europe par rapport à certaines de ses valeurs les plus fondamentales, des valeurs partagées avec les USA ». Ignorant la perplexité suscitée par ses propos, il a ajouté que « lorsque nous voyons des tribunaux européens annuler des élections, avec des hauts fonctionnaires menaçant d’en annuler d’autres, nous devons nous demander si nous nous imposons des normes suffisamment élevées ».

14 février. Le sénateur républicain du Texas, John Cornyn, a déclaré qu’il espérait que les Européens reconnaîtraient que leur privilège de profiter des USA avait pris fin, ajoutant : « Ils en ont bien profité, et cette époque est révolue ».

14 février. Keir Giles, chercheur principal au sein du groupe de réflexion Chatham House, basé à Londres, a déclaré à NBC News que l’Europe a ignoré des décennies de signes indiquant que la patience des USA s’était “épuisée” face à la dépendance de l’Europe à l’égard de la défense usaméricaine.

14 février. Patrick Wintour, rédacteur diplomatique du journal britannique The Guardian a noté que les remarques de M. Vance démontraient que « le différend préexistant entre l’Europe et les USA ne portait plus sur le partage des charges militaires ou la nature de la future menace de sécurité posée par la Russie, mais sur quelque chose de plus fondamental : le partenariat ».

16 février. Dans un article intitulé « Donald Trump’s assault on Europe », le journal en ligne londonien The Economist note que les dirigeants européens participant à la conférence de Munich ont été “stupéfaits” de voir l’administration Trump « saborder des décennies de diplomatie qui ont fait de l’OTAN l’alliance militaire la plus réussie de l’histoire moderne ».

18 février. Le Premier ministre hongrois déclare : « L’Union européenne (UE) a été “piégée dans la guerre” et apprendra les résultats des négociations sur l’Ukraine par la presse ».

18 février. Le Premier ministre polonais Donald Tusk a déclaré que le sommet d’urgence de l’UE à Paris n’avait pris aucune décision sur le conflit ukrainien. Les contradictions entre les dirigeants réunis ont empêché l’émergence d’une solution commune. Le site politico indique qu’à l’issue des trois heures et demie de réunion, leurs réactions ont été “décevantes”.

19 février. Une réunion à Riyad, capitale de l’Arabie saoudite, entre des délégations de haut niveau de la Russie et des USA s’est achevée avec succès après un dialogue fluide et sans heurts, selon le conseiller présidentiel du Kremlin, Yuri Ushakov, qui a participé à la réunion avec le ministre des Affaires étrangères, Sergeï Lavrov. Ushakov a souligné qu’au cours des discussions, toutes les questions ont été examinées sérieusement et en profondeur, et qu’un consensus a été atteint pour faire avancer les relations bilatérales.

19 février. Évoquant la réaction de l’Ukraine et de son dirigeant Volodymir Zelensky aux pourparlers entre les USA et la Russie à Riyad, en Arabie saoudite, le président Trump a déclaré : 3Pensez-y : un humoriste au succès modeste, Volodymir Zelensky, a convaincu les États-Unis d’Amérique de dépenser 350 milliards de dollars pour entrer dans une guerre ingagnable, qui n’aurait jamais dû commencer, mais une guerre que lui, sans les USA et Trump, ne sera jamais en mesure de résoudre. L’Amérique a dépensé 200 milliards de dollars de plus que l’Europe, et l’argent de l’Europe est garanti, alors que l’Amérique n’aura rien en retour. Pourquoi Joe Biden endormi n’a-t-il pas exigé l’égalité, puisque cette guerre est tellement plus importante pour l’Europe que pour nous ? Nous avons un grand et bel océan qui nous sépare. En outre, Zelensky admet que la moitié de l’argent que nous lui envoyons a disparu. Il refuse d’organiser des élections, sa cote de popularité est très basse et la seule chose pour laquelle il était doué, c’était de manipuler Biden “comme un violon”. Zelensky est un dictateur non élu qui doit agir vite sous peine de ne plus avoir de pays. Pendant ce temps, nous négocions avec succès la fin de la guerre avec la Russie, ce que tout le monde admet que seuls Trump et l’administration Trump peuvent faire. Biden n’a jamais essayé, l’Europe n’a pas réussi à apporter la paix et Zelensky veut probablement continuer à faire tourner le jackpot. J’aime l’Ukraine, mais Zelensky a fait un travail terrible, son pays est en lambeaux et des millions de personnes sont mortes inutilement. Et ainsi de suite... »

Pour paraphraser le titre du célèbre livre de John Reed, on pourrait parler des “huit jours qui ont ébranlé le monde”. Les Européens sont abasourdis et, comme l’a montré leur sommet de Paris, totalement désunis et sans réaction. Ils sont venus à Munich en s’attendant à ce que Vance parle des questions de sécurité et de défense pour le bloc européen, mais au lieu de cela, il a “attaqué violemment” les alliés de Washington en dénonçant “la désinformation, la mésinformation et les droits à la liberté d’expression”. Selon RT, « un haut fonctionnaire européen qui a parlé à Foreign Policy sous le couvert de l’anonymat, a déclaré que M. Vance « a fait en Allemagne quelque chose que les Allemands savent très bien faire : donner des leçons aux autres ».

La Russie n’a été ni surprise ni désarçonnée. Depuis 2014, avec patience et une vision à long terme, elle a élaboré un plan qu’elle applique à la lettre. Il y a quelques mois, le président Poutine a exposé sa conception de la paix et son idée d’un nouvel ordre international. Lors du forum « Interconnexion des temps et des civilisations, base de la paix et du développement » qui s’est tenu à Achgabat, capitale du Turkménistan, en octobre 2024, il a expliqué : « ...La paix mondiale ne peut être atteinte qu’en prenant en compte les intérêts de tous les peuples de la planète ». Dans le discours qu’il a prononcé à cette occasion, le président russe a fait savoir que son pays était convaincu que « la paix universelle et le développement global ne peuvent être assurés qu’en tenant compte des points de vue de chaque peuple, tout en respectant le droit de chaque État à son propre cours souverain, à sa propre vision du monde, à ses propres traditions et idées religieuses », notant que la majorité des États du monde prônaient « une répartition plus équitable des bénéfices ».

C’est sur cette base que les dirigeants russes et usaméricains ont pu se parler au téléphone la semaine dernière et convenir de mettre fin à une période “absolument anormale” des relations entre les deux pays, au cours de laquelle il n’y avait pas de contacts mutuels.

À SUIVRE

 

 

 


20/02/2025

SERGIO RODRÍGUEZ GELFENSTEIN
De Bruselas a Riad, pasando por Múnich: ocho días que estremecieron el mundo (I)

Sergio Rodríguez Gelfenstein, 20-2-2025

Los acontecimientos internacionales han tomado un ritmo extraordinariamente acelerado. He consultado con algunos colegas y hemos concluido que se está haciendo difícil seguir el movimiento de hechos que están conmoviendo, transformando y reestructurando el sistema internacional a una velocidad nunca vista por lo menos en los últimos 80 años. Lo cierto es que el mundo de la posguerra parece desmoronarse. El consenso logrado en 1945 en Yalta y Potsdam acaba de recibir un golpe mortal en Múnich.


“Haz Europa pequeña otra vez” - Tom Janssen, Países Bajos

Hagamos un somero recorrido de los acontecimientos de los últimos días para constatar esta aseveración que emana la impronta que la administración Trump le está imponiendo al mundo: 

12 de febrero. El presidente de Estados Unidos informó que había sostenido una “larga y muy productiva” llamada telefónica con su homólogo ruso Vladimir Putin. Dijo que este quiere que la guerra en Ucrania termine y que cree que habrá un alto el fuego “en un futuro no muy lejano”. La llamada fue la primera conversación conocida entre ambos presidentes desde que Trump asumió el cargo el mes pasado.  

12 de febrero. El secretario de Defensa de Estados Unidos Pete Hegseth, durante su reunión en Bruselas con los miembros de la Organización del Tratado del Atlántico Norte (OTAN), declaró “directamente y sin ambigüedades” que Washington ya no priorizará la seguridad de Europa, determinó que la guerra entre Ucrania y Rusia “debe terminar”, pues su prioridad se enfoca en asegurar las fronteras del país norteamericano y evitar la guerra con China.

Hegseth afirmó que las realidades estratégicas actuales impiden que Estados Unidos siga siendo el principal garante de la seguridad en Europa. Estas mismas realidades obligan –según el jefe del Pentágono-  a una reducción de las fuerzas estadounidenses en la región.  La prioridad para Washington es enfrentar a China, a la que definió como “ un competidor de gran envergadura” porque tiene la capacidad y la intención de amenazar la seguridad nacional de Estados Unidos y sus intereses principales en la región del Indo-Pacífico.   Hegseth subrayó que la disuasión de un conflicto con China en el Pacífico es la misión más importante de su despacho. Reconoció la escasez de recursos y la necesidad de tomar decisiones difíciles para garantizar que el proceso no fracase.

El secretario de Defensa instó a los aliados europeos, miembros de la OTAN, a asumir un liderazgo activo. Les dijo tajante que: “La Casa Blanca ya no tolerará una relación desequilibrada que fomente la dependencia. En su lugar, la relación entre Estados Unidos y Europa se centrará en capacitar a los países europeos para que asuman la responsabilidad de su propia seguridad”.

14 de febrero. El vicepresidente de Estados Unidos, J.D. Vance, pronunció un discurso durante la 61.ª Conferencia de Seguridad de Múnich, en Alemania, sorprendiendo tanto a los presentes como a los países europeos aliados de Washington. En la disertación, el alto cargo estadounidense afirmó que: “La amenaza que más me preocupa respecto a Europa no es Rusia, no es China, no es ningún otro actor externo. Lo que me preocupa es la amenaza desde dentro, el retroceso de Europa respecto a algunos de sus valores más fundamentales, valores compartidos con Estados Unidos”. Sin tomar en consideración la perplejidad que generaban sus palabras, agregó que “Cuando vemos a las cortes europeas cancelando elecciones, con altos funcionarios amenazando con cancelar otras, tenemos que preguntarnos si nos ceñimos a unos estándares debidamente altos”.   

30/01/2025

Una buena noticia para la humanidad

Sergio Rodríguez Gelfenstein, 30-1-2025

Estimados lectores, en esta ocasión voy a tratar de romper la dinámica tradicional. No voy a hablar de las calamidades a las que nos tiene sometido el imperialismo y el neoliberalismo. Tampoco haré mención de la maldición que encara el solo hecho de nombrar a los Trump, Netanyahu, Milei o Zelenski.

Voy a hablar de algo positivo que ilumina el futuro de la humanidad: en días recientes, diversas publicaciones científicas han dado cuenta de la posibilidad cierta de que en el año 2025… por fin y tras más de medio siglo de investigaciones aparezca la cura contra el cáncer.

El año pasado cerca de 10 millones de personas fallecieron en el planeta a causa de este flagelo. Se estima que en 2040 esa cifra supere los 15 millones de decesos. Esta terrible enfermedad afecta por igual a países con altos niveles de desarrollo  y a aquellos cuya población tiene niveles bajos en cuanto a la esperanza de vida al nacer, la educación, el acceso a la salud y los ingresos.

Un artículo de la revista londinense The Economist señala que están a punto de aparecer vacunas  de nueva generación que permitirán que el sistema inmunitario identifique los tumores y genere condiciones para evitar su propagación.

Las investigaciones actuales, que comienzan a mostrar positivos resultados, están orientadas a crear vacunas contra cánceres de piel, ovarios y cerebro. Los estudios partieron del descubrimiento del hecho de que las células cancerígenas contenían miles de mutaciones que las diferenciaban de sus vecinas sanas, haciendo que las primeras produjeran proteínas anormales, conocidas como neoantígenos, que “alarmaban” al sistema inmunológico. Estos neoantígenos son proteínas que se producen en las células cancerosas cuando se alteran los genes que las codifican.

Esto llevó a la conclusión de que era necesario introducir  estos neoantígenos en el cuerpo para que “entrenen” al sistema inmunológico con el objetivo de que después, este tenga capacidad de identificar el cáncer que los porte como cuerpo extraño. 

Las dificultades surgieron cuando los científicos debieron tomar muestras de un tumor, “secuenciar su genoma y encontrar todas sus mutaciones genéticas para que luego [fuera] posible determinar qué neoantígenos son capaces de provocar la respuesta inmunitaria más fuerte en el cuerpo”. Esto obligó a que las primeras vacunas tuvieran que ser específicas para cada paciente, “ya que el perfil de mutaciones es distinto en cada tumor e incluso con distintas células de un mismo tumor”.

Estas investigaciones que se han venido realizando en paralelo en centros de investigación y laboratorios de varios países, han mostrado avances significativos en algunos de ellos. Por ejemplo, en 2024 el laboratorio alemán Merck y el estadounidense Moderna culminaron un estudio de tres años y 157 pacientes con melanoma (un tipo de cáncer de piel), en los que lograron reducir en un 49 % el riesgo de muerte o recaída al inocularlos con una vacuna terapéutica llamada ARNm-4157, “que se elabora de manera personalizada para cada paciente y que se administra en combinación con el fármaco de inmunoterapia Keytruda”. Este porcentaje de disminución surge de la comparación con aquellos pacientes a los que solo se les suministró el fármaco.

Otra investigación iniciada en Inglaterra en la Universidad de Oxford a fines del año pasado está orientada a crear una vacuna preventiva contra el cáncer de ovario, cuyo objetivo sea reconocer y atacar las células cancerosas en las primeras etapas. Así mismo, este centro de investigación está trabajando para elaborar una vacuna contra el cáncer de pulmón.

Por su parte, en la Universidad de Florida Estados Unidos, están estudiando la posibilidad de luchar contra  el glioblastoma, un tipo de cáncer cerebral para el que no existen tratamientos. Hasta ahora, las pruebas se han verificado en perros con tumores cerebrales  que  vivieron una media de 139 días después del tratamiento en comparación con los 30-60 días que vivían sin él. 

La que pareciera la investigación más avanzada es la que llevan adelante  la Universidad de Ciencia y Tecnología Sirius y el Centro Nacional de Investigación en Epidemiología y Microbiología Gamaleya de Moscú, Rusia junto con especialistas de los mayores centros oncológicos del país, quienes crearon una vacuna contra el cáncer que actualmente se está probando en animales.

En una entrevista para RT, Alexánder Guíntsburg, director del Centro Gamaleya explicó que su vacuna se basará en una plataforma de ARNm que entrenará al sistema inmunitario del cuerpo humano para atacar a las células malignas, con lo cual guarda cierta similitud con las anteriormente expuestas. Al aplicar la vacuna, “ en el organismo aparecerán células que reconocerán las proteínas extrañas, se adherirán al tumor y liberarán enzimas activas. Algunas de ellas horadarán las células afectadas, mientras que otras penetrarán por esa vía y destruirán las proteínas tumorales”. Guíntsburg detalló que  gracias a este mecanismo no se producirá inflamación y se destruirá tanto el tumor, como también las células que hacen metástasis. Esta vacuna también es personalizada para cada paciente sobre la base de la consideración de que no hay dos tumores iguales. Así mismo, será un instrumento terapéutico para aquellos pacientes que han sido sometidos a intervención quirúrgica para eliminar un tumor.

El tratamiento pasa por la recepción por parte del enfermo  de un ciclo de siete u ocho inyecciones con intervalos de varias semanas después de lo cual se comprobará si hay una respuesta inmunitaria a la vacuna para que el paciente comience a recibir  inyecciones periódicas, posiblemente de por vida para eliminar el riesgo de reaparición de la patología.

Los componentes de la vacuna están siendo probados durante aproximadamente 10 meses hasta concluir la fase experimental a fines de este año, cuando será posible su uso tras obtener la aprobación de las autoridades de salud rusas. Se espera que para el mes de septiembre de este año la vacuna comience a ser utilizada en seres humanos. Vale decir que los especialistas que han elaborado esta vacuna y que se encuentran trabajando en ella desde mediados de 2022, son los mismos que crearon la exitosa Sputnik V para combatir el covid-19.

Hasta el momento, según las pruebas realizadas  en animales inoculados con melanoma, al décimo quinto día del tratamiento el sistema inmunológico empieza a funcionar, disminuyendo ostensiblemente el tamaño del tumor al comparar animales vacunados y no vacunados. Guíntsburg aseguró que si todas las etapas se realizan tal como está previsto, la fabricación de la vacuna  demorará  entre seis y ocho semanas. El costo de la dosis será de alrededor de 3.000 dólares pero Andréi Kaprin, oncólogo jefe del Ministerio de Salud de Rusia aseguró que en su país será proporcionada gratuitamente a los enfermos.

Estableciendo una perspectiva de futuro, Guíntsburg ha asegurado que  "dentro de 10-15 años, la humanidad también extenderá, consecuentemente, la posibilidad de vivir sin estas enfermedades". Pero vale aclarar que esta vacuna no servirá para combatir todos los tipos de cáncer ya que no todos son susceptibles de inmunoterapia. Por ahora solo se desarrollarán -en primera instancia-  vacunas de ARNm personalizadas contra el cáncer de piel,  para después seguir con las de  riñón, pulmón ( el más frecuente en humanos), mama, algunas gastrointestinales y páncreas para las que se necesitan ensayos separados a fin de confirmar su eficacia.

En esa medida, los científicos rusos han asegurado que es poco probable que se pueda crear una vacuna preventiva universal contra esta dolencia ya que no es posible considerar el cáncer como una enfermedad única sino que cada una tiene “orígenes diferentes, en tejidos diferentes y con cursos diferentes”.

En cualquier caso, la noticia es muy importante porque de esta manera se podrá desafiar a uno de los peores flagelos que enfrenta la humanidad. Sin embargo, como se ha visto, es muy probable que si la vacuna es conseguida por los laboratorios occidentales (tal como ocurrió con la de Covid 19) primará el interés de lucro y de ganancia más que el de salvaguarda de la salud y la vida humana.

Por ello también, es esperanzador el anuncio del ministerio de salud de Rusia en el sentido de que la vacuna se proporcionará gratuitamente a todos los ciudadanos. Es de esperar que en un futuro no muy lejano, la misma sea recibida en todos los países del mundo. Con ello la ciencia rusa habrá hecho una nueva contribución en beneficio de los ciudadanos del planeta sin establecer diferencias entre su condición social, de raza o la pertenencia a uno u otro país.  

12/01/2025

SERGIO RODRÍGUEZ GELFENSTEIN
Deux ou trois remarques sur la Trumperie qui vient

Deux semaines avant l’intronisation de Donald Trump à la présidence des USA, je me risquerai à faire quelques observations sur les perspectives de la nouvelle administration, tout d’abord sur sa politique étrangère, surtout après ses déclarations arrogantes de confrontation avec le Mexique, le Panama, le Venezuela et le Danemark (pour le Groenland).


Le rêve trumpien d’acheter le Groenland, vu par la dessinatrice Mette Dreyer pour le journal danois Politiken


À cet égard, on peut conclure que l’impertinence est un trait de personnalité du nouveau dirigeant yankee, qu’il associe à une vision agressive de businessman pour atteindre ses objectifs. Avant de prendre ses fonctions pour sa première présidence, après avoir remporté les élections en 2016, et alors qu’il nommait les membres de l’administration, son meilleur ami Steven Witkoff lui avait recommandé de ne pas faire entrer John Bolton dans le cabinet. Il a répondu que c’était une recommandation tardive parce qu’il l’avait déjà fait.

Aujourd’hui, Trump estime qu’en construisant sa première administration, il a dû accepter de nombreuses impositions parce qu’il n’était pas un homme politique, qu’il n’avait pas d’expérience, qu’il ne contrôlait pas le parti républicain, ni ses sénateurs et ses représentants, ni les médias ou les réseaux sociaux.
Cette situation a aujourd’hui changé. Huit ans plus tard, Trump estime que si Bolton a fait beaucoup de mal à sa première administration, il l’a aussi aidé parce qu’étant détesté de tous, il a fait le sale boulot, après quoi il venait dialoguer sur une situation dans laquelle un espace avait été créé pour négocier et même pour céder, si bien qu’ il a souvent pu capitaliser sur le « règlement » des différends. C’était le vieux jeu du « bon flic/méchant flix » appliqué à la politique.

Dominik Joswig

Ce récit reflète parfaitement la manière dont Trump entend agir en matière de politique étrangère. Au fond, son principal objectif est d’arrêter la Chine, et il y consacrera l’essentiel de son énergie. Par exemple, les pressions exercées sur le Panama ne visent pas à s’emparer du canal, mais à faire sortir la Chine de ce pays. Or, il a déjà mis la question sur la table des négociations et lorsqu’il demandera au gouvernement panaméen de prendre des mesures contre la Chine, il donnera l’impression de céder sur son objectif de s’emparer du canal. En d’autres termes, il « cédera » sur cet objectif en échange de l’expulsion par le Panama de la Chine de son territoire. De même pour le Groenland, il finira par contrôler le territoire sans avoir besoin de s’en emparer, ce qui sera également perçu comme une concession de sa part.


 

Compte tenu de toutes les nominations de fidèles de l’establishment par Trump (voir mon article précédent « Que fera Marco Rubio ? »[en espagnol]), je voudrais réitérer que la question la plus importante reste de savoir quel sera le rôle du département d’État dans l’exécution de la politique étrangère des USA.
La réponse est qu’il se concentrera sur l’exercice de pressions visant à retirer de l’espace à la Chine dans le monde, et en particulier en Amérique latine et dans les Caraïbes, où Rubio entretient des relations étroites avec des gouvernements, des partis et des dirigeants de droite et d’extrême droite, dont certains sont également considérés comme des amis de la Chine. Il s’agira donc également d’un scénario contesté, puisque - j’aimerais insister - la Chine sera la cible numéro un de la politique étrangère yankee, et pas précisément pour coopérer, mais plutôt pour entraver les liens bilatéraux et empêcher la Chine de contester l’hégémonie mondiale de Washington, même si celle-ci n’a pas l’intention de le faire.
Si tel est le cas, il convient de se demander pourquoi Trump a nommé Rubio secrétaire d’État, sachant qu’il ne lui fait pas confiance parce que c’est un « faucon » fidèle aux néoconservateurs. La réponse est que, bien que le prochain président - contrairement à sa première administration - contrôle désormais le parti républicain, certains sénateurs conservent leur autonomie et pourraient l’affronter, comme le montre le fait que Trump devra très probablement retirer la nomination de Pete Hegseth au poste de secrétaire à la Défense en raison de la résistance qu’il rencontre parmi les sénateurs de son propre parti. Trump a besoin d’eux, surtout pour garantir la nomination de certaines figures de son cabinet, notamment Tulsi Gabbard du parti démocrate, que ses anciens collègues ne veulent pas voir à ce poste parce qu’elle connaît trop de secrets internes.
D’autre part, il est certain que Trump reprendra la « guerre commerciale » contre la Chine en établissant de nouveaux droits de douane et en en augmentant d’autres afin que Beijing soit contraint de dévaluer sa monnaie, ce qui rendra ses exportations plus chères et affectera son commerce. Les économies latino-américaines qui importent beaucoup de Chine seront affectées par cette mesure.
De même, en tant qu’instrument d’analyse, il ne faut pas oublier que la personnalité de Trump se caractérise par des décisions inopportunes et la création d’incertitudes en tant qu’instruments de coercition. Cela conduit les gouvernements et les ministères des affaires étrangères à être limités dans leur capacité à prévoir les événements. Trump n’agit pas sur la base d’une idéologie définie. Il est uniquement motivé par la recherche du profit pour les USA, en particulier pour les entreprises et les riches.
L’establishment est son ennemi car il a opté pour l’économie spéculative et de services et Trump vise à revenir à une situation où les USA fondent leur économie sur la production. Cela explique certaines des nominations de Trump visant à affronter l’establishment, notamment Tulsi Gabbard au poste de directrice du renseignement national et Hash Patel au poste de directeur du FBI.
Trump entend prolonger son contrôle de l’État à l’avenir par l’intermédiaire du vice-président J.D. Vance, qui est son « dauphin ». Seul Vance a une idéologie bien définie et éloignée des canons traditionnels. L’émergence de Trump en politique et la recherche de l’extension de son influence dans le temps est l’expression des grandes contradictions dont souffre le système politique yankee, qui s’éloigne de la dichotomie traditionnelle démocrate-républicain ou gauche-droite.

« Rendons le Groenland vert à nouveau! » [Groenland signifie Terre verte en danois et un green est la partie de pelouse tondue autour de chaque trou au golf, dont Trump est un passionné]
 Morton Morland, Royaume-Uni

Il y a une crise d’identité dans les deux partis. Chez les démocrates, il existe un courant atlantiste néoconservateur qui s’oppose au vieux parti qui a créé l’État-providence, qui ne veut pas la guerre et qui croit en la nécessité d’augmenter les investissements sociaux, ce qui témoigne d’une débat non abouti. Cependant, ils ont écarté Bernie Sanders d’une manière mauvaise et illégale, montrant clairement que c’est l’aile droite de ce parti (qui est considérée comme « de gauche » aux USA) qui est aux commandes.
De son côté, le Parti républicain, vieille organisation conservatrice et réactionnaire, débat également entre le courant traditionaliste et le trumpisme anti-establishment qui propose une nouvelle façon de faire de la politique. Dans un premier temps, Trump envisage d’intervenir dans le Parti républicain pour que la nouvelle génération Vance le contrôle afin de « rendre à l’Amérique sa grandeur ». Si cela n’est pas possible, Trump cherchera probablement à créer sa propre organisation politique en s’inspirant des deux côtés du bipartisme traditionnel du pays.
Vance a une ligne de pensée cohérente sous-tendue par la suprématie blanche et la lutte contre l’establishment, qu’il considère comme rétrograde et immobilisant. Dans cette mesure, il se considère comme le promoteur d’une classe dirigeante liée à ces principes et comme un fervent défenseur de la religion traditionnelle. Il est intéressant de noter qu’il s’identifie fortement à la classe ouvrière usaméricaine, bien entendu pas en termes marxistes, mais dans le cadre de la conception capitaliste à l’ancienne. Il rejette les grandes entreprises et les monopoles, qu’il tient pour responsables de la destruction du capitalisme, car leur pratique conduit à la destruction de la base de l’économie capitaliste, à savoir la concurrence. Tout cela génère un océan de contradictions qui rend difficile la compréhension de ce qui se passe.
La vérité est que cette situation complexe a été évidente dans les résultats des élections, l’extrême droite dans son ensemble a couvert le spectre électoral en étant présente à la fois dans le camp démocrate et dans le camp républicain. Ainsi, même si Trump a représenté le parti républicain, le fait est qu’une troisième force est en train de naître. La nomination de Gabbard, démocrate de formation et de conviction, et de Robert Kennedy Jr, démocrate pur jus, au poste de secrétaire à la santé et aux services sociaux en sont peut-être les expressions les plus claires. Dans cette dimension, il faut aussi comprendre le soutien des Noirs et des Latinos à Trump, qui est ouvertement raciste et suprémaciste. Il est devenu clair que les discours traditionnels appartiennent au passé.
La seule chose qui compte aujourd’hui est l’économie et la résolution des problèmes économiques des majorités. La distinction traditionnelle dans la société usaméricaine entre ceux qui ont une formation universitaire et ceux qui n’en ont pas n’est plus valable. C’est précisément la ségrégation sur la base de tels critères qui a fait tomber dans l’escarcelle de Trump d’importants secteurs exclus de la société.
En résumé, Trump va essentiellement axer son gouvernement sur la résolution des problèmes de politique intérieure. Sur le plan extérieur, l’accent sera mis sur la Chine. Il essaiera de résoudre le problème de l’Ukraine parce qu’il ne veut pas continuer à saigner à blanc l’économie usaméricaine. La confrontation avec la Chine a une composante systémique à long terme et une composante conjoncturelle à court terme. C’est cette dernière qui sous-tend son soutien à Taïwan, mais pour les mêmes raisons que celles évoquées plus haut, il ne s’agit pas d’une ligne rouge pour Trump. Il continuera à la soutenir parce qu’il a besoin des usines de fabrication de puces de l’île. Lorsque les USA seront autosuffisants dans ce domaine [il n’est pas interdit de rêver, NdT], Taïwan cessera d’être un problème pour les USA. Trump n’est pas disposé à continuer à soutenir un dossier à forte intensité de ressources qui trouve son origine dans la guerre froide. Ce n’est pas à travers Taïwan que Trump structurera la confrontation stratégique avec la Chine.
Il convient de le répéter, la méthode de Trump consiste à lancer des questions qui ne sont pas à l’ordre du jour afin d’évaluer les réponses à ses déclarations. Ainsi, lorsque la question devient d’actualité, la mise en œuvre des mesures à prendre est déjà préparée et avancée. Ses principales questions de politique étrangère seront la Chine, les migrations et l’énergie, et ses actions s’articuleront autour d’elles.

Le plan Meta de Trump pour le Groenland
-Fais donc un fact-checking, pour voir si Trump est vraiment notre président
-Pas possible, Zuckerberg l’a supprimé
Dessin de Burkhard Fritsche, taz, Berlin



12/10/2024

SERGIO RODRÍGUEZ GELFENSTEIN
12 octobre : “Génocidaires et esclavagistes” ou “héros et saints”

 Sergio Rodríguez Gelfenstein, 12/10/2024

Original español
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala 

L’émotion nationale médiatisée en Espagne suite à l’annonce que la présidente du Mexique, Claudia Sheinbaum, n’a pas invité le roi bourbonien à son investiture amène à se poser la question de savoir si - comme le dit une affiche largement diffusée ces jours-ci dans les rues d’Espagne - les conquistadors étaient des « génocidaires et esclavagistes » ou « des héros et saints ». Cette question nous oblige à étudier et à apprendre les causes et les conséquences du colonialisme et à tirer des conclusions sur un pays qui célèbre comme fête nationale la date du début d’un génocide.


Campagne d’affiches de l'Association catholique des propagandistes (sic) pour ce qu’elle continue d’appeler le « Jour de l’Hispanité » (12 octobre)

Il faut savoir que rien qu’au cours du premier siècle de la colonisation, les Espagnols ont provoqué la mort de 56 millions d’habitants de l’Abya Yala, nom utilisé par les peuples originels pour désigner le territoire de Notre Amérique. Il est également important de savoir qu’au cours de la même période, la monarchie bourbonique a volé jusqu’à 9 550 tonnes d’or et d’argent dans la région, avec lesquelles elle a financé sa propre opulence et celle des autres maisons royales d’Europe.

Lorsque le 25 mars 2019, le président Andrés Manuel López Obrador a écrit au roi Felipe VI d’Espagne et au pape François pour leur demander de présenter des excuses aux peuples originels du Mexique pour les abus commis lors de la conquête du pays il y a 500 ans, c’est à cela qu’il faisait référence. Le président mexicain de l’époque leur a demandé « d’examiner les doléances et de demander pardon aux peuples originels pour les violations de ce que l’on appelle aujourd’hui les droits humains ». Il ajoutait : « Il y eut des tueries, des assujettissements. La soi-disant conquête s’est faite par l’épée et par la croix ».

Au vu de ces chiffres, il n’y a pas lieu d’être choqué par cette demande, ni de la considérer comme un affront national (bien que l’Espagne ne soit pas une nation, mais une somme de nations, sous domination castillane). La famille des Bourbons n’est pas originaire de l’Espagne actuelle, mais vient de France et a été imposée dans la péninsule par des mariages arrangés pour conquérir et conserver le pouvoir.

La Pinta, la Niña et la Santa María, les 3 caravelles de Christophe Colomb, par le dessinateur Eneko

Dans une lettre au président mexicain publiée le 26 septembre 2021 à l’occasion de l’anniversaire de l’indépendance du Mexique, le pape François a présenté ses excuses pour les « péchés » de l’Église catholique dans ce pays. La plus haute autorité de l’Église catholique a déclaré : « Mes prédécesseurs et moi-même avons demandé pardon pour les péchés personnels et sociaux, pour toutes les actions ou omissions qui n’ont pas contribué à l’évangélisation ».

López Obrador a déclaré que tout le monde devait demander pardon à l’occasion du 500e anniversaire de la chute de Tenochtitlán, la capitale aztèque, après deux mois et demi de siège qui ont conduit à sa prise par le cruel conquistador et aventurier Hernán Cortés, originaire d’Estrémadure, ce qui a signifié l’effondrement définitif de l’empire mexicain. Ce faisant, il a voulu faire de 2021 une année de réconciliation nationale et internationale. Avec une conviction totale, il a déclaré qu’il était « temps de dire que nous allons nous réconcilier, mais demandons d’abord pardon ». Il a donné l’exemple en disant qu’il le ferait aussi « parce qu’après la colonie, il y a eu beaucoup de répression des peuples originels », faisant référence au châtiment subi par les peuples maya et yaqui pendant le gouvernement du président Porfirio Díaz (1872-1910).

Il est intéressant de noter que dans cette demande de pardon et cette recherche de réconciliation, López Obrador a inclus la communauté chinoise qui a également été réprimée pendant la révolution mexicaine, en particulier dans les États du nord du pays.

Mais le gouvernement espagnol et sa monarchie corrompue ont refusé de prendre des mesures positives en vue d’une réconciliation totale. Au contraire, ils s’étonnent aujourd’hui qu’enfin, des dirigeants dignes n’invitent pas le représentant royal à accompagner un acte démocratique émanant de la souveraineté du peuple, chose qu’ils ne connaissent pas en Espagne puisqu’ils n’ont jamais élu leur chef d’État [sauf pendant la brève Première République de 1873-1874 et la Seconde de 1931-1939, NdT].

Au contraire, le gouvernement espagnol, essayant de cacher la honte émanant des malheurs et des infortunes du processus de conquête et de colonisation, a regretté que la lettre de López Obrador ait été rendue publique. On peut donc supposer que Lopez Obrador avait raison, mais qu’il n’aurait pas dû le faire savoir ouvertement « pour ne pas salir l’honneur de la monarchie ». Se sentant offensé, le gouvernement de Madrid a couronné sa déclaration ridicule en affirmant qu’il rejetait « avec la plus grande fermeté » le contenu de la lettre de López Obrador.

Trois ans plus tard, devant l’étonnement et la lamentation de l’élite espagnole face à la non-invitation du roi bourbonique au changement de gouvernement au Mexique, en toute transparence, la présidente Claudia Sheinbaum a déclaré que l’Espagne avait bien été invitée à la cérémonie du 1er  octobre, mais pas le roi Felipe car le monarque, avec un mépris total, a refusé de répondre à la demande de López Obrador d’une réconciliation définitive entre les deux peuples, ce qui, selon un communiqué publié par Sheinbaum, « aurait correspondu à la meilleure pratique diplomatique des relations bilatérales ». Fin de l’affaire

Sur un autre plan, il convient de se demander si, comme le prétend l’ultra-droite espagnole, les conquistadors, compte tenu des 56 millions de personnes tuées et des 9 550 tonnes d’or et d’argent volées, sont bien des « héros et des saints ». En ce sens, il convient de dire que les voyages de cette époque n’ont pas toujours été considérés comme des « découvertes » et qu’ils n’ont pas toujours nécessité la « croix et l’épée » pour imposer par la force des cultures et des religions étrangères.


Carte du monde attribuée à Zheng He

En 1403, près de 90 ans avant que Christophe Colomb ne « persuade » la reine de Castille Isabelle II de financer son entreprise d’exploration vers l’ouest, l’amiral chinois Zheng He a entamé le premier de ses sept voyages à travers la mer connue sous le nom d’« océan occidental ». Jusqu’en 1433, les voyages de Zheng He étaient essentiellement limités à l’océan Indien, couvrant jusqu’à 30 pays d’Asie et d’Afrique, atteignant la côte ouest de l’Inde et s’étendant plus tard au golfe Arabo-Persique et à la côte est de l’Afrique.

Comparée aux trois caravelles de Christophe Colomb, d’une longueur de 25 à 30 mètres et d’une largeur de 6,5 à 9 mètres, qui transportaient environ 25 marins chacune en 1492, la flotte de l’amiral Zheng comptait en 1405 « plus de 240 navires et plus de 27 000 soldats et membres d’équipage [et] était équipée d’une variété de professionnels, dont des bateliers, des marins, des soldats, des médecins, des cuisiniers, des interprètes, des diseurs de bonne aventure et même des coiffeurs », selon une étude du professeur Wan Ming, chercheur à l’Institut d’histoire ancienne de l’Académie chinoise des sciences sociales (CASS) et président de la Société chinoise pour l’histoire des relations sino-étrangères, qui estime que les voyages de Zheng He doivent être considérés comme les plus grands de son époque « en termes d’échelle, de nombre de navires et de marins, et de durée ».

Zheng He a organisé la flotte sur la base d’une conception nautique qui établissait l’existence de navires différenciés par leur mission. Ainsi, il existait des navires de commandement, des navires de guerre et des navires logistiques. Parmi ces derniers, il y avait ce que l’on appelait les « navires au trésor », qui servaient à transporter les marchandises destinées au commerce. Les navires au trésor étaient situés au centre de la flotte, et les navires de guerre autour d’eux. En fait, les voyages réussis de la flotte de Zheng He ont également démontré l’excellence de sa technologie nautique et de ses compétences en matière de navigation.

 

Les navires au trésor étaient les plus gros navires de la flotte de Zheng He. Ils sont notamment décrits dans le roman d'aventure de Luo Maodeng, Les voyages de l'eunuque aux trois trésors vers l'océan occidental (1597). L'auteur écrit que les navires avaient neuf mâts et mesuraient 140 mètres de long et 55 mètres de large, ce qui semble difficile à croire. Les chercheurs pensent que les navires avaient probablement cinq ou six mâts et mesuraient entre 75 et 90 mètres de long.

Bien que la flotte de Zheng He ait été équipée de moyens de combat, ceux-ci avaient un caractère défensif. L’arrivée de la flotte dans d’autres ports signifiait tout d’abord la recherche de relations amicales avec les habitants, puis l’ouverture de négociations commerciales par le biais d’échanges et de tributs. Ces derniers n’avaient pas la même signification qu’en Occident, mais constituaient une sorte de rituel au cours duquel les produits naturels du pays étaient présentés et une offrande emblématique était faite des objets à offrir à l’autre partie. Mais leur valeur était équilibrée Les Chinois considéraient cette pratique comme une expression de respect et de reconnaissance envers l’empereur et une manière d’exprimer leur gratitude pour sa protection. Un édit de l’empereur stipulait que l’échange devait être mutuellement bénéfique.

La mission confiée par l’empereur à Zheng He indiquait implicitement qu’en plus du commerce, il devait maintenir la paix sur les mers, assurer la sécurité maritime et arbitrer les conflits susceptibles d’être rencontrés au cours du voyage. Les dirigeants chinois de l’époque avaient tout intérêt à accroître leur prestige dans les régions qu’ils visitaient, mais il ne s’agissait pas d’occuper un territoire ou d’y exercer un contrôle politique. De même, il devait promouvoir la prospérité dans les lieux où il arrivait et l’interaction multiculturelle avec les peuples qu’il visitait. Il était courant pour Zheng He de ne pas visiter les centres de pouvoir, mais de se limiter aux villes portuaires où il pouvait commercer sans avoir à interagir avec l’establishment politique de ces pays.

Selon le professeur Wan, « les flottes de Zheng He étaient en fait une équipe officielle de commerce international à grande échelle qui menait des activités commerciales fréquentes dans les endroits qu’elle atteignait ». On peut ainsi expliquer pourquoi aucun des pays visités n’a fait l’objet de pillage ou d’occupation.

Le professeur Wan explique cela par le fait que la diplomatie de la dynastie Ming au pouvoir stipulait clairement qu’il ne fallait pas conquérir d’autres peuples mais partager avec eux afin d’établir un système international pacifique sans recourir à la force. En pratique, le commerce a permis d’établir un nouveau système émanant de l’ordre chinois et visant à « partager les bénéfices de la paix » sans menacer aucun pays. Savoir cela pourrait expliquer en partie le comportement international de la Chine aujourd’hui.

Si la plupart des chercheurs s’accordent à dire que les voyages de Zheng He l’ont mené à travers l’Asie orientale, centrale et occidentale et l’Afrique, l’écrivain britannique Gavin Menzies a écrit en 1421 un livre intitulé « 1421 The Year China Discovered the World » (fr. 1421, L’année où la Chine a découvert l'Amérique), dans lequel il affirme que les Chinois ont atteint l’Amérique au cours de cette année-là. Cet ouvrage a été rejeté par l’historiographie occidentale, mais cette opinion a été réfutée par l’éminent sinologue mexicain Enrique Dussel Peters, qui a déclaré : « ... d’après mes études historiques (dans lesquelles j’ai utilisé la carte de la quatrième péninsule d’Asie de 1487 de Henricus Martellus), ses arguments [ceux de Gavin Menzies] concernant sa thèse fondamentale sont irréfutables (il y a peut-être des détails à corriger, mais ils n’enlèvent rien à sa force). Cet ouvrage est incontournable ! »

Ce n’est pas le sujet de cet article, mais il est impératif d’établir qu’il existe une hypothèse selon laquelle les Chinois seraient arrivés en Amérique 71 ans avant Colomb. C’est un point qui devra être approfondi, mais dans d’autres parties du monde, les preuves sont claires : les Chinois sont arrivés au début du XVe siècle et aucun des territoires africains ou asiatiques visités par Zheng He ou d’autres navigateurs de ce pays ne parle chinois. De même, bien que Zheng He ait été musulman, ni sa religion ni la religion bouddhiste introduite en Chine 1 600 ans plus tôt n’ont été imposées aux pays qu’il a visités.

Il apparaît donc clairement qu’il était possible d’établir des liens commerciaux et des échanges culturels entre les peuples dans l’Antiquité. La Chine l’a fait, mais la civilisation européenne, intrinsèquement sauvage et violente, n’a pas pu le faire. Son ADN cruel a conduit l’humanité aux pires calamités de l’histoire : le racisme, le colonialisme, l’esclavage, le fascisme, le nazisme, le capitalisme, l’impérialisme, le sionisme et les deux guerres les plus brutales que la planète ait jamais connues. Il suffit de se rendre dans leurs musées pour voir avec quelle fierté ils exposent le produit de leurs méfaits.

Tous ces malheurs sont venus du sol européen La seule chose que le président López Obrador a demandée, c’est le pardon pour aller vers la nécessaire réconciliation. Mais pour l’Espagne ce n’est pas possible, comme je l’ai déjà dit, la violence et l’assujetissement sont dans son ADN. C’est ce qui explique son soutien actuel au gouvernement pro-nazi de l’Ukraine et les énormes ventes d’armes à Israël, alors qu’ils se torchent avec les droits humains des Palestiniens.

La guerre et les conflits sont le moteur de leur organisme. C’est pourquoi ils ne comprennent pas et ne comprendront pas qu’une majorité croissante de la planète les rejette et les répudie jusqu’à ce que, dans un avenir pas trop lointain, ils soient définitivement déposés sur le tas de fumier de l’histoire, un endroit où ils ont toujours été et d’où ils ne pourront jamais sortir.

Aujourd'hui c'est la FêtNat ! On doit cogner sur qui ?