المقالات بلغتها الأصلية Originaux Originals Originales

Affichage des articles dont le libellé est Auschwitz. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est Auschwitz. Afficher tous les articles

27/01/2025

L'autre Grand absent d’Auschwitz

Il y a eu ce 27 janvier un autre grand absent que la Russie aux cérémonies de célébration du 80ème anniversaire de la libération du camp d’Auschwitz par l’Armée rouge. Ci-dessous le commentaire de Gideon Levy sur cette absence, publié le 23 décembre dernier


D’Auschwitz à Gaza, avec une escale à La Haye

Gideon LevyHaaretz , 23/12/2024
Traduit par Fausto GiudiceTlaxcala

Benjamin Netanyahou ne se rendra pas en Pologne le mois prochain pour la principale cérémonie marquant le 80e anniversaire de la libération du camp de la mort d’Auschwitz, car il craint d’être arrêté sur la base du mandat émis à son encontre par la Cour pénale internationale de La Haye.

Cette ironie amère et peu subtile de l’histoire fournit une confluence surréaliste qui était presque inimaginable jusqu’à présent : il suffit d’imaginer le premier ministre atterrissant à Cracovie, arrivant à l’entrée principale d’Auschwitz et étant arrêté par la police polonaise à l’entrée, sous le slogan « Arbeit macht frei » (« Le travail libère ») ; il suffit de considérer que de tous les personnages et pays, c’est le premier ministre d’Israël qui est empêché d’assister à la commémoration des membres de son peuple en raison de la menace du droit international qui plane au-dessus de sa tête. Le chancelier allemand, oui ; Netanyahou, non.

Il y a 80 ans, la libération d’Auschwitz aurait semblé être l’événement le plus insensé que l’on puisse imaginer. Ce n’est plus le cas aujourd’hui. Il y a 80 ans, les Juifs ont eu le choix entre deux héritages : « Plus jamais les Juifs ne seront confrontés à un danger similaire », ou « Plus jamais personne dans le monde ne sera confronté à un danger similaire ». Israël a clairement choisi la première option, avec un ajout fatal : Après Auschwitz, les Juifs sont autorisés à faire n’importe quoi.

Au cours de l’année écoulée, Israël a appliqué cette doctrine comme jamais auparavant. Un premier ministre qui a évité une cérémonie à Auschwitz en est peut-être l’illustration la plus flagrante. Le fait que, de tous les endroits du monde, Auschwitz soit le premier où Netanyahou craint de se rendre, relève du symbolisme et de la justice historique.

D’autres chefs d’État assisteront à la cérémonie, mais pas Netanyahou. Il est recherché par le tribunal - qui a été créé à la suite des événements d’Auschwitz - car il est soupçonné de crimes de guerre qui, à une vitesse alarmante, ressemblent de plus en plus aux crimes d’Auschwitz.

La distance entre Auschwitz et Gaza, avec une escale à La Haye, est encore énorme, mais on ne peut plus soutenir que la comparaison est absurde.

Après avoir lu le rapport cauchemardesque de Yaniv Kubovich sur ce qui se passe dans le couloir de la mort à Netzarim, on se rend compte que cette distance se réduit de jour en jour.

Il a toujours été tabou de comparer quoi que ce soit à l’Holocauste, et à juste titre. Il n’y a jamais rien eu de comparable. Les pires crimes de l’occupation [sionistes des territoires depuis 1967, NdT] pâlissent en comparaison des crimes d’Auschwitz.

De plus, cette comparaison a toujours laissé Israël blanc comme neige et ses accusateurs comme des antisémites : après tout, il n’y a pas de camps de la mort à Gaza, de sorte que chaque accusation peut être facilement réfutée. Il n’y a pas de camps de la mort, donc les FDI sont l’armée la plus morale au monde. Il n’y aura jamais de camps de la mort à Gaza, et pourtant les comparaisons commencent à se faire entendre sous les décombres et les charniers.

Lorsque les Palestiniens de Gaza savent que là où rôdent des meutes de chiens errants, il y a des cadavres humains mangés par les chiens, les souvenirs de l’Holocauste commencent à remonter à la surface.

Lorsque, dans la bande de Gaza occupée, il existe une ligne imaginaire de la mort et que quiconque la franchit est voué à la mort, même un enfant affamé ou handicapé, le souvenir de l’Holocauste commence à se faire entendre.

Et lorsque le nettoyage ethnique est mené dans le nord de Gaza, suivi de signes évidents de génocide dans toute la bande, la mémoire de l’Holocauste gronde déjà.

Le 7 octobre 2023 apparaît de plus en plus comme un tournant fatidique pour Israël, bien plus qu’il n’y paraît actuellement, semblable seulement à sa calamité précédente, la guerre de 1967, qui n’a pas non plus été diagnostiquée à temps. Lors de la guerre des Six jours, Israël a perdu son humilité, et le 7 octobre, il a perdu son humanité. Dans les deux cas, les dommages sont irréversibles.

Entre-temps, nous devons considérer l’occasion historique et absorber sa signification : une cérémonie commémorant le 80e anniversaire de la libération d’Auschwitz, les dirigeants mondiaux marchent en silence, les derniers survivants vivants marchent à leurs côtés, et la place du premier ministre de l’État qui a surgi des cendres de l’Holocauste est vacante.

Elle est vacante parce que son État est devenu un paria et parce qu’il est recherché par le tribunal le plus respecté qui juge les criminels de guerre. Il convient de sortir un instant la tête du scandale Hanni Bleiweiss et de laffaire Feldstein: Netanyahou ne sera pas à Auschwitz, parce qu’il est recherché pour crimes de guerre.


L’artiste norvégien Rune Furelid a provoqué un scandale lorsqu’il a exposé cette œuvre à  Ålesund il y a quelques mois. La citation à côté de Bibi « Faites aux autres ce que les autres vous font » est un détournement d’une phrase de l’Évangile selon Mathieu, "tout ce que vous voudriez que les autres fassent pour vous, faites-le pour eux, vous aussi : voilà ce que disent la Loi et les Prophètes" (7:12 est devenu 7:10 en référence au 7 octobre)

31/10/2023

REINALDO SPITALETTA
Les sanglots d’un Palestinien
Impressions berlinoises

Reinaldo Spitaletta, Sombrero de mago, El Espectador, 30/10/2023
Traduit par Fausto GiudiceTlaxcala

Après avoir été émus par le Mémorial de l’Holocauste, qui laisse sans voix et avec beaucoup de questions et d’angoisse, nous y avons déposé une rose rouge, puis nous avons marché jusqu’au Mémorial des Rroms et Sintis d’Europe, situé au sud du bâtiment du Reichstag à Berlin. Ces deux mémoriaux commémorent le génocide nazi. Au bord du bassin du mémorial, où nous avons rencontré deux dames iraniennes, les eaux nous ont parlé avec des mots exacts et très douloureux. Un poème du Rrom italien Santino Spinelli, intitulé Auschwitz : « Visage affaissé / yeux éteints / lèvres froides / silence / cœur brisé / sans souffle / sans mots / pas de larmes ».

 

« Aucun pays ne pratique le nettoyage ethnique en toute impunité aussi bruyamment qu’Israël et aucun pays fait un silence aussi bruyant que l’Allemagne ».


Près du bâtiment du parlement allemand, en cours de rénovation, un homme en noir, portant un drapeau palestinien, tenait une harangue sur les difficultés de son peuple, la souffrance des enfants et des personnes âgées, les humiliations d’Israël contre une nation sans territoire, toujours accablée et prête à haïr l’ennemi. Il portait un keffieh blanc avec des arabesques noires et transmettait son désarroi en anglais à quelques spectateurs.

Ma compagne s’est approchée, a crié “Vive la Palestine !” et l’a serré dans ses bras. Ils se sont pris dans les bras. L’homme pleurait. Elle aussi. J’ai été la seule autre personne à me joindre à l’étreinte et j’ai crié “Vive la résistance palestinienne”. Les manifestations pro-palestiniennes avaient été interdites en Allemagne au début du mois d’octobre, au moment des attaques du Hamas contre Israël et de la réponse d’Israël. J’ai donc appris plus tard qu’à plusieurs endroits stratégiques de Berlin, il n’y avait qu’un seul Palestinien qui, comme l’homme dans l’étreinte, parlait de ses douleurs et de ses malheurs à ceux qui s’arrêtaient pour l’écouter.

Le poème tzigane et les larmes du Palestinien m’ont suivi pendant un bon moment. Je pensais à la façon dont la haine est alimentée dans le monde, à la tragédie des gens et à l’intervention silencieuse des politiciens. Je pensais aussi aux guerres et à leurs victimes, principalement des civils. Ma compagne a continué à pleurer et m’a parlé du regard du Palestinien, qui était très triste, et de la façon dont il a pleuré sur ses épaules, comme dans une sorte d’orphelinat infini.

L’écrivain israélien David Grossman a déclaré que les Palestiniens et les Israéliens sont les enfants du conflit « qui nous a légué tous les handicaps de la haine et de la violence ». Dans son livre La mort comme mode de vie, une sélection d’articles sur le conflit israélo-palestinien, dans lequel il tente de trouver une sorte d’équilibre instable entre les deux peuples, il constate que les Palestiniens ont été les laissés-pour-compte de l’histoire. « Ils ont vécu déchirés entre des souvenirs légendaires démesurés et l’aspiration à un avenir héroïque ». Et que Palestiniens et Israéliens ont tenté de s’éliminer les uns les autres.

Un autre écrivain, José Saramago, a déclaré en 2002 que la Palestine était comme Auschwitz, soulevant une tempête inhabituelle en Israël (où ses livres sont très lus), et a ajouté qu’il ne s’agissait pas d’un conflit entre les deux entités. « Nous pourrions parler de conflit s’il s’agissait de deux pays, avec une frontière et deux États dotés chacun d’une armée ». Et dans la même interview à la BBC à Londres, il a averti qu’“un sentiment d’impunité caractérise désormais le peuple israélien et son armée. Ils sont devenus des rentiers de l’holocauste. Avec tout le respect dû aux personnes tuées, torturées et gazées”.

Que n’avait-il pas dit !

« Auschwitz est pour les Juifs une blessure qui ne guérira probablement jamais. Mais c’est aussi une blessure qu’ils ne veulent pas voir guérie, qu’ils grattent constamment pour qu’elle continue à saigner, comme s’ils voulaient nous en rendre responsables », a-t-il noté dans une interview parue dans le livre Palestina Existe. Furieux, les Israéliens ont boycotté l’écrivain, qui avait complété son propos par ces mots : « Au lieu d’apprendre des victimes, ils se sont inscrits à l’école des bourreaux. Hier, ils faisaient l’objet de ségrégation ? Aujourd’hui, ils font de la ségrégation. Ils ont été torturés ? Aujourd’hui, ils torturent ».

Contre les Palestiniens, de la part d’Israël, il n’y a pas seulement du mépris, mais de la haine. Et les deux peuples s’excluent l’un l’autre, ils font partie des réseaux du pouvoir mondial qui, surtout, font d’Israël le porte-drapeau des politiques impérialistes au Moyen-Orient. À ce stade, il convient de rappeler un passage du poème de Mahmoud Darwich intitulé Sur cette terre :

Sur cette terre, il y a ce qui mérite vie :
sur cette terre, se tient la maîtresse de la terre, mère des préludes et des épilogues.
On l’appelait Palestine.
On l’appelle désormais Palestine.
Ma Dame, je mérite la vie, car tu es ma Dame.
(1986, trad. Elias Sanbar)

Nous avons continué à marcher dans Berlin et nous avons tous les deux ressenti une sorte de vide, une sorte de nausée, une sorte de douleur contenue, ce qu’on nomme impuissance individuelle. Je n’arrêtais pas d’entendre la voix de l’homme en noir, ainsi que celle des femmes iraniennes qui nous ont dit qu’elles étaient des exilées. Les images monumentales de l’holocauste et les eaux du bassin des tziganes m’ont à nouveau secoué : il y avait un cœur brisé, sans mots, mais, dans ce cas, il y avait des larmes.

 

 

REINALDO SPITALETTA
El llanto de un palestino
Impresiones berlineses

Reinaldo Spitaletta, Sombrero de mago, El Espectador, 30/10/2023

 Nos habíamos conmovido con el Memorial del Holocausto, que te deja mudo y con muchas preguntas y congojas, depositamos allí una rosa roja, y luego caminamos hacia el Memorial de los Roms y Sintis [“Gitanos”] de Europa, situado al sur del edificio del Reichstag, en Berlín. Ambos recuerdan el genocidio nazi. En el estanque redondo de este último, donde nos topamos con dos señoras iraníes, las aguas nos hablaron con palabras exactas y muy dolorosas. Un poema del Rom italiano Santino Spinelli, titulado Auschwitz: “Cara hundida / ojos apagados / labios fríos / silencio / un corazón roto / sin aliento / sin palabras / no hay lágrimas”.

“No hay país que lleve a cabo impunemente una limpieza étnica tan ruidosamente como Israel y no hay país que silencie esto tan ruidosamente como Alemania”


Cerca al edificio del Parlamento alemán, en refacción, un hombre de negro, con una bandera de Palestina, arengaba sobre las penurias de su pueblo, el sufrimiento de los niños y los ancianos, las humillaciones de Israel contra una nación sin territorio y siempre agobiada y dispuesta a odiar al enemigo. Estaba tocado con una kafiyya blanca con arabescos negros y transmitía en inglés su desazón ante unos cuantos curiosos.

Mi compañera se acercó, gritó “¡Viva Palestina!” y lo abrazó. Se abrazaron. El hombre lloraba. Ella también. Fui el único, el otro, que se sumó al abrazo y solté un “¡Viva la resistencia palestina!”. Habían prohibido en Alemania, a principios de octubre, cuando los ataques de Hamás a Israel y la respuesta de este país, las manifestaciones en pro de Palestina. Por eso, en distintos lugares estratégicos de Berlín, según supe después, había solo un palestino que, como el hombre del abrazo, exponía sus dolores y desgracias a quienes se detenían a escucharlo.

El poema gitano y las lágrimas del palestino me siguieron un buen tramo. Iba pensando cómo se alimenta el odio en el mundo y en la tragedia de los pueblos y en la soslayada intervención de los políticos. Y en las guerras y sus víctimas, en su mayoría casi siempre civiles. Mi compañera seguía compungida y me hablaba de la mirada del palestino, que era muy triste y de cómo él lloró sobre sus hombros, con una suerte de infinita orfandad.

Decía el escritor israelí David Grossman que palestinos e israelíes son hijos del conflicto “que nos ha dejado en herencia todas las minusvalías del odio y de la violencia”. En su libro La muerte como forma de vida, una selección de artículos sobre la disputa entre Palestina e Israel, en el que intenta buscar una especie de equilibrio inestable entre ambos pueblos, anota que los palestinos han estado fuera de la historia. “Han vivido desgarrados entre unos desmesurados recuerdos legendarios y las ansias por un futuro heroico”. Y que tanto palestinos como israelíes han intentado eliminarse mutuamente.

Otro escritor, José Saramago, decía, en 2002, que Palestina es como Auschwitz, con lo que levantó una polvareda inusual en Israel (donde leían bastante sus libros), y agregaba que aquello entre esas dos entidades no era un conflicto. “Podríamos llamarlo un conflicto si se tratara de dos países, con una frontera y dos estados con un ejército cada uno”. Y en la misma entrevista, de la BBC, de Londres, advertía que “un sentimiento de impunidad caracteriza hoy al pueblo israelí y a su ejército. Se han convertido en rentistas del holocausto. Con todo el respeto por la gente asesinada, torturada y gaseada”.

¡Qué se ha dicho!, ahí fue Troya. “Auschwitz es para los judíos una herida que probablemente no cicatrizará jamás. Pero es también una herida que ellos no quieren ver cicatrizada, que constantemente arañan para que continúe sangrando, como si pretendieran hacernos responsables de ella”, anotó en una entrevista que apareció en el libro Palestina existe. Los israelíes estaban peliparados y boicotearon al escritor, que había rematado con esta tanda su señalamiento: “En lugar de aprender de las víctimas, se han inscrito en la escuela de los verdugos. ¿Que ayer fueron segregados? Ahora segregan. ¿Que fueron torturados? Ahora torturan”.

Contra los palestinos, de parte de Israel, no solo hay desprecio, sino odio. Y ambos pueblos se excluyen, son parte de las redes del poder mundial que, sobre todo, tienen a Israel como portaestandarte de las políticas imperialistas en el Medio Oriente. Y en este punto cabe memorar un trozo del poema Sobre esta tierra, de Mahmud Darwish: “Sobre esta tierra hay algo que merece vivir: / sobre esta tierra está la señora de la tierra, / la madre de los comienzos, la madre de los finales. Se llamaba Palestina. / Se sigue llamando Palestina. / Señora: yo merezco, porque tú eres mi dama, yo merezco vivir”.

Continuamos caminando por Berlín y ambos íbamos sintiendo una especie de vacío, de náusea, de dolor contenido, la denominada impotencia individual. Seguía escuchando la voz del hombre de negro, y también la de las señoras iraníes, que nos contaron que eran exiliadas. Me estremecí de nuevo con las imágenes monumentales del holocausto y con las aguas del estanque gitano: había un corazón roto, sin palabras, pero, en este caso, sí había lágrimas.