La Jornada 28/1/2025
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala
Au moins
depuis l’année dernière, un groupe d’hommes qui ont en commun d’être accusés de
violence domestique et sexiste par leurs ex-partenaires, d’être riches et d’avoir
de grandes relations dans la magistrature, la politique et les médias, s’est
organisé pour se présenter comme des victimes d’« extorsion » de la part des
femmes qui ont dénoncé leurs abus et de l’avocate qui s’est occupée de leurs
affaires, Ana Katiria Suárez.
Leurs
actions ont porté leurs fruits si rapidement qu’elles ont déjà permis d’incarcérer
temporairement María Fernanda Turrent, épouse d’Édgar González Peredo [patron
du groupe d’entreprises Belgravia,
NdT], et d’obliger Suárez à quitter le pays. La rapidité avec laquelle les demandes
reconventionnelles ont prospéré contraste avec la lenteur exaspérante avec
laquelle les procureurs et les tribunaux traitent les plaintes contre les
agresseurs, même lorsque - comme dans le cas de la plainte de Turrent - il
existe des preuves accablantes et incontestables de la terreur physique,
psychologique et économique que ces hommes ont fait subir à leurs compagnes et
à leurs enfants.
La figure de
González Peredo est notoire : en plus de ses propres affaires, son père gère
les affaires de l’un des groupes de médias les plus puissants du pays et a
engagé pour le défendre le cabinet d’avocats de José Luis Nassar Daw, fils de Miguel Nassar Haro,
criminel emblématique de la guerre sale [guerre contre-insurrectionnelle
dans les années 1970, NdT].
Bien que ce
type de réseau de trafic d’influence ait toujours existé, il est inquiétant que
ses membres se sentent protégés par la justice au point d’apparaître au grand
jour et de prendre la tête d’un « mouvement » de « parents » dans lequel ils ne
rougissent pas de rejoindre celui qui s’est avoué violeur, tortionnaire et
assassin de sa propre fille de sept ans.
En ce sens,
il est encourageant, mais insuffisant, que le bureau du procureur général de la
ville de Mexico ait ordonné la révocation de Miguel Angel Barrera Sanchez,
procureur chargé d’enquêter sur les crimes commis contre les enfants et les
adolescents, ainsi que la révision de la procédure engagée contre Maria
Fernanda Turrent et sa non-inculpation.
La
révélation des irrégularités commises par ce fonctionnaire devrait être le
début d’un nettoyage exhaustif des agents du ministère public, qui ont à
maintes reprises protégé des violeurs, parfois avec des résultats mortels
lorsqu’ils passent des coups au féminicide. Le même nettoyage doit avoir lieu
dans le système judiciaire, dont les sentences aberrantes ont libéré ou donné
des peines dérisoires à des hommes violents avérés.
Plus
largement, cette sorte de cartel de machos est un avertissement sur le chemin
qu’il reste à parcourir pour éradiquer deux des plus grands fléaux sociaux : la
misogynie qui imprègne tous les domaines de la vie sociale et la corruption qui
permet au pouvoir économique de se transformer en pouvoir politique. Elle
rappelle également que ces maux se renforcent mutuellement, car le trafic d’influence
facilite l’impunité des agresseurs et entrave la lutte des femmes pour un monde
sans violence fondée sur le genre.