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08/11/2021

ASSER KHATTAB
Robert Fisk, el hombre que murió dos veces


Asser Khattab, Raseef22.net, (original árabe, 2/11/2020, versión inglesa, 30/10/2021)
Traducido del inglés por Sinfo Fernández, Tlaxcala

 

Asser Khattab es un periodista sirio que cubrió la guerra civil siria durante seis años para el Financial Times, el Washington Post y otros medios de comunicación. Actualmente es el responsable de comunicación regional para Oriente Medio y el Norte de África de la Comisión Internacional de Juristas. Vive en Francia desde 2020. @KhattabAsser

No fue fácil que los romanos prestaran atención a Marco Antonio, a pesar del sentido discurso que pronunció, que se niega a abandonar la memoria de cualquiera que lea su adaptación en la obra Julio César de William Shakespeare. Aliado del renombrado líder, se presentó para dirigirse a una nación dividida tras el asesinato de César a manos de los senadores en el año 44 a.C. De los que apoyaban a Bruto, Casio y los suyos, que preferían preservar la democracia de la República frente a la obediencia ciega a este autoproclamado “dictador vitalicio”, no estuvo dispuesto a escuchar ninguna veneración y glorificación en su memoria.
Pero Antonio dejó claro pronto su propósito:

He venido a enterrar a César, no a alabarlo.

El mal que hacen los hombres les sobrevive;

El bien suele quedar sepultado con sus huesos;

Que así suceda con César.

 

Estas palabras me vinieron a la mente desde el momento en que leí la noticia de la muerte del periodista británico Robert Fisk en la noche del domingo. Fisk había fallecido a la edad de 74 años de un ataque al corazón en la víspera del 2 de noviembre de 2020. A los ojos de algunas de las personas que lo conocieron o de quienes siguieron su trabajo en todo el mundo, Robert Fisk era un periodista audaz, valiente, inteligente, ingenioso, perspicaz y que desafiaba a la autoridad, además de un escritor brillante. A los ojos de muchos otros, Robert Fisk nunca tuvo la audacia, el coraje o la credibilidad de la que tanto hablaba el otro bando, o bien la había perdido con el inicio de la Primavera Árabe de 2010, concretamente la revolución siria que estalló el 15 de marzo de 2011 y que, en palabras de muchos, fue “traicionada” por Fisk.

Fisk en Duma, 2018 

Hay otro grupo de personas que optó por permanecer en silencio a pesar de tener mucho que decir. Quizá la razón por la que se abstuvieron de hacerlo fue que consideraban válidos los puntos de vista de cada uno de los dos equipos anteriores, lo que hacía que hablar de Fisk en un momento como éste fuera tan peligroso como caminar por un campo de minas o tocar un interruptor eléctrico expuesto después de una noche de lluvia.

 

Para mí, Fisk era el hombre al que admiré durante mis años de estudiante universitario en el campo de los medios de comunicación, y cuyo nombre era mencionado por quienes me deseaban éxito profesional en el futuro: “¡Espero verte convertido en el próximo Robert Fisk!”... A menudo escuchaba estas palabras de los miembros de mi familia, que adoraban las agudas críticas de Fisk a la ocupación israelí y sus crímenes en Palestina. También las escuché en la escuela de mi profesor, que había huido con la comunidad armenia del centro de Turquía al norte de Siria tras el genocidio armenio que tuvo lugar hace más de cien años, elogiando a Robert Fisk y su papel al escribir sobre dicho genocidio.

 

Durante mis años de universidad, leía cuidadosamente todos los artículos famosos escritos por Fisk, copiando algunos de ellos en papel para mejorar mi escritura en inglés. Intentaba tener cuidado al leer o copiar artículos delicados, como aquel en el que hablaba de la masacre de Hama cometida por el anterior régimen de Asad (padre y tío Asad) en la década de 1980 y detallaba el bombardeo de mezquitas e instalaciones residenciales, además de otros en los que hablaba de la naturaleza dictatorial del régimen de Asad. Recuerdo un artículo que escribió en 2006 sobre el Ministerio de Información sirio, un artículo que compartí en secreto con algunos de mis compañeros de entonces para que vieran el caos y la corrupción de la institución a través de los ojos de un distinguido reportero extranjero. Cuando escribí sobre “El caos del Ministerio de Información sirio en tiempos de guerra” para Raseef22 y de nuevo mientras preparaba este artículo, busqué ese artículo muchas veces pero no fui capaz de encontrarlo.

 

Lo que Fisk escribió sobre el Líbano, sus políticos y la guerra civil de ese país se convirtió en la causa principal de mi gran interés por la política del país vecino que siempre he amado, disfrutado visitándolo y en el que más tarde busqué refugio.

 

07/11/2021

ASSER KHATTAB
Robert Fisk, l'homme qui est mort deux fois

Asser Khattab آسر خطاب, Raseef22 (original arabe, 2/11/2020, version anglaise, 30/10/2021)

Asser Khattab est un journaliste syrien qui a couvert la guerre civile syrienne pendant six ans pour le Financial Times, le Washington Post et d'autres médias. Il est actuellement chargé de la communication pour la région du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord à la Commission internationale des juristes. Il vit en France depuis 2020. @KhattabAsser

Il n'était pas facile pour les Romains de prêter attention à Marc-Antoine, malgré le discours sincère qu'il a prononcé et qui refuse de quitter la mémoire de quiconque lit son adaptation dans la pièce de William Shakespeare, Jules César. Allié du célèbre chef, il est venu s'adresser à une nation divisée à la suite de l'assassinat de César par des sénateurs en 44 avant J.-C.. De ceux qui soutenaient Brutus, Cassius et les leurs, qui préféraient préserver la démocratie de la République plutôt qu'une obéissance aveugle à ce "dictateur à vie" autoproclamé, il n'était pas prêt à entendre parler de vénération et de glorification à sa mémoire.

Mais Antoine a rapidement précisé son objectif :

Je viens pour inhumer César, non pour le louer.
Le mal que font les hommes vit après eux :
Le bien est souvent enterré avec leurs os.
Qu'il en soit ainsi de César.

Ces mots n'ont cessé de me venir à l'esprit à partir du moment où j'ai lu la nouvelle du décès du journaliste britannique Robert Fisk, un dimanche soir. Fisk était décédé à l'âge de 74 ans d'une crise cardiaque la veille du 2 novembre 2020. Aux yeux de certaines personnes qui l'ont connu ou de celles qui ont suivi son travail à travers le monde, Robert Fisk était un journaliste audacieux, courageux, intelligent, plein de ressources, perspicace et défiant l'autorité, ainsi qu'un brillant écrivain. Aux yeux de beaucoup d'autres, Robert Fisk n'a jamais eu l'audace, le courage ou la crédibilité dont l'autre camp parle si souvent, ou les a perdus avec le début du Printemps arabe de 2010 - plus précisément la révolution syrienne qui a éclaté le 15 mars 2011 et qui a été, selon les mots de beaucoup, "trahie" par Fisk.

Il y a un autre groupe de personnes qui a choisi de rester silencieux alors qu'il avait beaucoup à dire. La raison pour laquelle ils se sont abstenus est peut-être qu'ils ont vu la validité des points de vue de chacune des deux équipes précédentes, ce qui rendait le fait de parler de Fisk à un moment comme celui-ci aussi dangereux que de marcher dans un champ de mines ou de toucher un disjoncteur électrique dénudé après une nuit pluvieuse.

Pour moi, Fisk était l'homme que j'admirais pendant mes années d'études universitaires dans le domaine des médias, et dont le nom était évoqué par ceux qui me souhaitaient un succès professionnel dans le futur : "J'espère te voir devenir le prochain Robert Fisk !"... J'entendais souvent ces mots de la part des membres de ma famille qui aimaient les critiques acerbes de Fisk sur l'occupation israélienne et ses crimes en Palestine. Je les entendais également à l'école de la part de mon professeur, qui avait fui avec la communauté arménienne du centre de la Turquie vers le nord de la Syrie après le génocide arménien qui a eu lieu il y a plus de cent ans, faisant l'éloge de Robert Fisk et de son rôle dans l'écriture du génocide.

Pendant mes années d'université, je lisais attentivement tous les articles célèbres écrits par Fisk, en copiant certains d'entre eux sur papier afin d'améliorer mon écriture en anglais. J'essayais de faire attention lorsque je lisais ou copiais des articles sensibles, comme celui où il parlait du massacre de Hama commis par le précédent régime Assad (père et oncle Assad) dans les années 1980 et détaillait le bombardement de mosquées et d'installations résidentielles, en plus de ceux où il parlait de la nature dictatoriale du régime Assad. Je me souviens d'un article qu'il a écrit en 2006 sur le ministère syrien de l'information, un article que j'ai secrètement partagé avec certains de mes camarades de classe de l'époque pour qu'ils voient le chaos et la corruption de l'institution à travers les yeux d'un éminent reporter étranger. Lorsque j'ai écrit sur "Le chaos du ministère syrien de l'information en temps de guerre" pour Raseef22 et à nouveau lors de la préparation de cet article, j'ai cherché cet article à plusieurs reprises mais je n'ai pas pu le trouver.

 

Fisk à Homs en 2019