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16/10/2023

CORA GAMARNIK
Buenos Aires, 17 octobre 1945 : “Les pattes dans la fontaine”, une photo qui insiste pour être révélée

 Cora Gamarnik , Haroldo, la revista del Conti, 14/10/2021
Photos : avec l’autorisation de l’
Archivo General de la Nación
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

Cora Gamarnik (Buenos Aires, 1967) est une communicatrice sociale, docteur en sciences sociales, enseignante et chercheuse en photojournalisme argentine. Elle coordonne actuellement le domaine d'études sur la photographie à la faculté des sciences sociales de l'UBA. Auteure de El fotoperiodismo en Argentina. De Siete Días Ilustrados (1965) à l'agence SIGLA (1975) (Ediciones ArtexArte, Buenos Aires : 2020). @coragamarnik 

À partir de cette image emblématique de l'origine du péronisme, celle que nous appelons “les pattes dans la fontaine”, l'auteure analyse le processus historique et politique qui a commencé ce jour-là. Pourquoi cette photo a-t-elle occupé cette place ? Quelles significations ont fait l’objet de disputes autour de cette image ? Qu'y a-t-il en elle qui la rende spéciale ?

Juan Molina et son frère sont assis au bord de la fontaine de la Plaza de Mayo. Tous deux sont vêtus de manteaux sombres, ont les cheveux gominés, pantalons retroussés, pieds dans l'eau. Entre eux, on aperçoit le chapeau de l'un d'entre eux. Juan travaillait dans une usine de boissons gazeuses, mais il n'y est pas allé ce jour-là, son frère lui ayant dit qu’il “fallait aller sauver Perón”. Ils ont pris le train de Caseros à Palermo et de là, ils ont marché jusqu'à la Plaza de Mayo. Juan portait des chaussures orthopédiques, la marche depuis Palermo [6 km] fut épuisante. Il faisait très chaud ce 17 octobre 1945.

A côté d'eux, Armando Ponce, un jeune de 17 ans originaire de Santiago, a enlevé sa chemise et sa veste et s'est rafraîchi les pieds dans la fontaine. Armando était apprenti dans une atelier de confection et ce matin-là, le délégué l'a appelé à se rendre sur la place de Mai : « Perón est à Martín García et ils veulent le fusiller parce qu'il nous défend », leur a-t-il dit. Et ils y sont allés, pour trouver des milliers de personnes qui faisaient la même chose qu'eux. Ce n'est qu'à dix heures du soir, avant de rentrer chez lui, qu'Armando a pris son premier repas de la journée, une part de pizza à Chacarita. Ce jour-là, les travailleurs de tous les coins de la conurbation de Buenos Aires sont arrivés tant bien que mal sur la Plaza de Mayo. Pour beaucoup, c'était la première fois qu'ils venaient dans la capitale. Des milliers de personnes ont franchi le fleuve Riachuelo [affluent du Rio de la Plata] et l’avenue General Paz - frontières physiques mais aussi symboliques - parce qu'elles sentaient que ceux qui les défendaient étaient en danger.

À l'intérieur du bassin de la fontaine de la Plaza de Mayo se tiennent deux femmes et un homme. L'une d'elles, qui tourne le dos sur la photo, porte un tailleur à manches longues, une jupe et tient à la main une paire de chaussures à talons hauts. L'autre fille, très jeune, vêtue d'une robe et d'une veste, regarde vers l'arrière et porte un autre vêtement au bras, qui pourrait être un gilet. Elles ont mis des vêtements adaptés pour aller au centre-ville. D'autres ont improvisé des bandeaux et des mouchoirs en tissu pour éviter la transpiration. Des bérets, des chapeaux, des bretelles, des T-shirts, des vestes et des chemises. Jamais, comme sur cette photo, on n'a autant parlé de vêtements pour parler de politique. Il y a beaucoup plus de personnes sur la photo. Quelqu'un lit un journal, un garçon tient un mât avec le drapeau argentin. Il n'y a pas d'autre pancarte, pas d'autre drapeau. Dans la marge gauche de la photo, les protagonistes sont des enfants. Ils jouent autour du jet d’eau, l'un d'eux tient une espadrille cassée à la main, les autres sont pieds nus, en pantalons courts ou retroussés. Au loin, plusieurs d'entre eux ont réussi à escalader le monument à Belgrano. C’est sûr que de là-haut, on voit beaucoup mieux la scène.

Le 17 octobre 1945 a été cristallisé dans la photographie qu’on appelle “les pattes dans la fontaine”. Elle montre une scène à la fontaine qui n'existe plus et a pour toile de fond la Casa Rosada [le palais présidentiel]. Elle a été prise vers cinq heures de l'après-midi par un photographe anonyme. Le décor est la Plaza de Mayo, entourée des bâtiments emblématiques du pouvoir politique, religieux et économique de l'Argentine. Un espace presque sacré à l'usage exclusif de l'élite dans les années 1940.

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CORA GAMARNIK
17 de octubre de 1945: “Las patas en la fuente”, una foto que insiste en ser revelada

 Cora Gamarnik , Haroldo, la revista del Conti, 14/10/2021
Fotos
Archivo General de la Nación (gentileza)

Cora Gamarnik (Buenos Aires, 1967) es Comunicadora social, Doctora en Ciencias Sociales, Docente e investigadora del fotoperiodismo. Actualmente coordina del área de Estudios sobre Fotografía de la Facultad de Ciencias Sociales, UBA. Autora de El fotoperiodismo en Argentina. De Siete Días Ilustrados (1965) a la agencia SIGLA (1975) (Ediciones ArtexArte, Buenos Aires: 2020). @coragamarnik 

A partir de esta imagen ícono del origen del peronismo, aquella que llamamos “las patas en la fuente”, la autora analiza el proceso histórico y político que se inició aquel día. ¿Por qué esta foto ocupó ese lugar? ¿Qué sentidos se disputaron alrededor de esta imagen? ¿Qué hay en ella que la vuelve especial?

Juan Molina y su hermano están sentados al borde de la fuente en Plaza de Mayo. Ambos con saco oscuro, gomina, pantalones arremangados, pies en el agua. En el medio de los dos, se ve el sombrero de uno de ellos. Juan trabajaba en una fábrica de gaseosas, pero ese día no fue, su hermano le dijo que “había que ir a rescatar a Perón”. Se tomaron el tren en Caseros hasta Palermo y desde ahí caminaron hasta Plaza de Mayo. Juan usaba calzado ortopédico, la caminata desde Palermo fue agotadora. Hacía demasiado calor ese 17 de octubre de 1945.

Al lado de ellos está Armando Ponce, santiagueño de 17 años, se sacó la camisa y el saco y se refrescó los pies en la fuente. Armando era cadete en una sastrería, esa mañana el delegado lo convocó a ir a la plaza: “Perón está en Martín García y lo quieren fusilar porque nos defiende”, les dijo. Y allá fueron, se encontraron con miles haciendo lo mismo que ellos. Armando recién a las diez de la noche, antes de volver a su casa, comió su primera comida del día, una porción de pizza en Chacarita. Trabajadores desde todos los puntos cardinales del conurbano bonaerense llegaron como pudieron ese día a la Plaza de Mayo. Para muchos era la primera vez que iban a la Capital. Miles de personas atravesaron el Riachuelo y la General Paz –fronteras físicas pero también simbólicas– porque sentían que quien los defendía estaba en peligro.

Dentro de la fuente de agua en la Plaza de Mayo hay dos mujeres y un hombre de pie, una de ellas, de espaldas en la foto, lleva un traje de saco con mangas largas, pollera y sostiene unos zapatos de taco alto en la mano. La otra muchacha, muy jovencita, de vestido y saco, mira hacia atrás, lleva en el brazo otra prenda que podría ser una chaquetilla. Se pusieron ropa adecuada para ir al centro. Otros improvisaron vinchas de tela y pañuelos para atajar el sudor. Boinas, sombreros, tiradores, camisetas, sacos, camisas. Nunca como con esta foto se habló tanto de ropa para hablar de política. Hay mucha más gente en la fotografía. Alguien lee un diario, un muchacho sostiene un mástil con la bandera argentina. No se ve ningún otro cartel, ninguna otra bandera. En el margen izquierdo de la foto los protagonistas son chicos. Juegan en el bebedero, uno tiene una alpargata rota en la mano, el resto está en patas, pantalones cortos o arremangados. A lo lejos varios lograron treparse al monumento a Belgrano. Seguro se ve mucho mejor la escena desde ahí arriba.

El 17 de octubre de 1945 quedó cristalizado en la fotografía que llamamos “las patas en la fuente”. Muestra una escena en la fuente que ya no está y tiene la Casa Rosada como telón de fondo. Es de autoría anónima, quedó conservada en el Archivo General de la Nación y fue tomada alrededor de las cinco de la tarde. El escenario, la Plaza de Mayo, rodeada de los edificios emblemáticos del poder político, religioso y económico en la Argentina. Una zona casi sagrada y de uso exclusivo para la élite de los años 40.

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