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14/07/2025

ANIL K SOOD
La détresse des paysans indiens est une réalité

Cette série en deux parties examine la réalité des conditions agricoles afin d’identifier une approche possible de la politique agricole, une approche qui pourrait contribuer à trouver une solution à long terme.

Anil K Sood, The New Indian Express, 21/2/2024
Traduit par
Fausto GiudiceTlaxcala  

Le professeur Anil K Sood est cofondateur et professeur de l’Institute for Advanced Studies in Complex Choices (IASCC) basé à Hyderabad. Biographie. @AnilKSood5

Nos agriculteurs en savent-ils plus sur leur situation économique que nos analystes politiques et nos intellectuels ? Ces derniers affirmeraient le contraire.

Prenons l’exemple de Bharat Ramaswami. Dans son rapport à la XVe Commission des finances, Ramaswami se réfère à un article de Chand, Saxena et Rana pour suggérer que l’agriculture est une activité rentable.

« Chand, Saxena et Rana (2015) montrent que le revenu agricole était supérieur de 70 % au coût de tous les intrants variables (y compris la main-d’œuvre salariée) en 2011/12. Bien que cette rentabilité ait été exceptionnelle en raison des prix agricoles inhabituellement élevés cette année-là, le taux de rentabilité se situait entre 40 et 50 % dans les années 1990 et au milieu des années 2000 », affirme-t-il.

Un autre discours populaire, soutenu par des analystes politiques influents et des personnalités des médias, suggère que les agriculteurs sont riches car ils achètent des voitures de luxe.

Cette série en deux parties tente d’aller au-delà de ces discours simplistes et examine la réalité des conditions agricoles afin d’identifier une approche possible de la politique agricole, une approche qui puisse contribuer à trouver une solution à long terme.

Commençons par une affirmation simple : l’agriculture n’est pas une activité rentable et ne peut enrichir les agriculteurs, compte tenu de notre politique de prix et du mécanisme de prix minimum de soutien (MSP) qui nous aide à mettre en œuvre cette politique.
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SUDHIR SURYAWANSHI
767 agriculteurs se sont suicidés en seulement trois mois dans l’État indien du Maharashtra

Les députés du Congrès ont accusé le gouvernement de l’État de ne pas avoir apporté immédiatement une aide financière aux agriculteurs, privant ainsi bon nombre d’entre eux de l’aide à laquelle ils avaient droit.

Sudhir Suryawanshi, The New Indian Express, 1/7/2025

Traduit par Fausto GiudiceTlaxcala

Sudhir Suryawanshi est un journaliste indien originaire du Maharashtra qui écrit sur la politique de cet État depuis quinze ans. Il a notamment travaillé pour DNA, Mumbai Mirror et Free Press Journal. Il est actuellement rédacteur en chef adjoint du New Indian Express. Il est l’auteur du livre Checkmate: How the BJP Won and Lost Maharashtra (Viking, 2020). @ss_suryawanshi

 MUMBAI - Le gouvernement du Maharashtra a révélé mardi, lors de l’assemblée législative de l’État, qu’entre janvier et mars 2025, 767 suicides d’agriculteurs avaient été signalés dans l’État, la majorité d’entre eux dans la région de Vidarbha.


Les députés du Congrès ont posé une question écrite au parti au pouvoir sur l’augmentation du nombre de suicides d’agriculteurs dans le Maharashtra, en particulier dans la région de Vidarbha, et ont demandé des détails sur la manière dont le gouvernement de l’État apporte son aide aux familles des agriculteurs décédés. Les députés du Congrès ont également demandé une augmentation de l’aide financière, qui s’élève actuellement à 1 lakh de roupies [=1000 €].

Dans une réponse écrite, Makrand Patil, ministre de la Réhabilitation et député du NCP [Parti du Congrès Nationaliste], a présenté la réponse écrite à l’Assemblée et a assuré que le gouvernement du Maharashtra apporterait toute l’aide possible aux agriculteurs.

Le gouvernement du Maharashtra accorde une aide financière de 1 lakh de roupies à la famille de l’agriculteur qui s’est suicidé.

Selon ce rapport, en trois mois, de janvier à mars 2025, 767 agriculteurs se sont suicidés, dont 376 étaient éligibles à une indemnisation du gouvernement, tandis que 200 n’ont pas reçu d’aide car ils ne répondaient pas aux critères fixés par le gouvernement.

Makrand Patil a en outre révélé que dans l’ouest du Vidarbha – Yawatmal, Amarawati, Akola, Buldhana et Wasim –, entre janvier et mars 2025, 257 agriculteurs se sont suicidés, parmi lesquels 76 familles ont reçu une aide financière du gouvernement de l’État, tandis que 74 demandes ont été rejetées.

Dans le district de Hingoli, dans le Marathwada, 24 suicides d’agriculteurs ont été signalés au cours des trois mois compris entre janvier et mars 2025.

Les députés du Congrès ont affirmé que le gouvernement de l’État n’avait pas accordé immédiatement l’aide financière aux agriculteurs et que de nombreux agriculteurs éligibles avaient même été privés de l’aide à laquelle ils avaient droit pour des raisons fallacieuses. En outre, le gouvernement de l’État a précisé qu’il n’y avait aucune proposition d’augmentation de l’aide financière aux familles des agriculteurs décédés.

Toutefois, le gouvernement de l’État a déclaré avoir pris diverses mesures pour mettre fin aux suicides des agriculteurs.

« Le gouvernement de l’État accorde une indemnisation aux agriculteurs dont les récoltes ont été endommagées par des pluies hors saison et des catastrophes naturelles. En outre, dans le cadre du programme PM Kisan Samman Nidhi [Fonds du Premier ministre d’allocation aux agriculteurs], le gouvernement central verse 6 000 roupies [= 71€], tandis que le gouvernement de l’État contribue également à hauteur de 6 000 roupies par an aux agriculteurs pauvres et dans le besoin », indique la note.

Celle-ci précise également que le gouvernement de l’État organise des séances de soutien psychologique pour les agriculteurs déprimés et en détresse, afin de les dissuader de se suicider, et qu’il augmente même le prix minimum de soutien des récoltes des agriculteurs.

« En outre, le gouvernement de l’État s’efforce de mettre en irrigation autant d’hectares de terres que possible et de mettre en place des programmes d’aide sociale pour les agriculteurs. »



Champs de désespoir : pourquoi les agriculteurs du Maharashtra paient le prix suprême

Sudhir Suryawanshi, The New Indian Express, 12/7/2025
Traduit par Fausto GiudiceTlaxcala

Entre le 1er janvier et le 31 mars de cette année, toutes les trois heures, un agriculteur du Maharashtra a mis fin à ses jours, avec 767 suicides enregistrés en seulement 90 jours, selon les données présentées à l’assemblée législative de l’État le 1er juillet. Ce taux alarmant, qui représente en moyenne huit décès par jour, n’est pas un cas isolé. L’année dernière, le gouvernement a admis devant l’assemblée que le taux de suicide chez les agriculteurs était similaire depuis 56 mois. Cela reflète une crise agraire qui s’aggrave et qui défie toute solution dans le Maharashtra, en particulier dans les régions de Vidarbha et Marathwada, depuis plus de deux décennies. Malgré les promesses politiques ambitieuses, notamment celle du BJP [le parti suprémaciste hindou au pouvoir fédéral, NdT] en 2014 d’éradiquer les suicides d’agriculteurs, la tendance persiste, alimentée par un mélange toxique de difficultés économiques, de défis environnementaux et d’échecs politiques.

Le cas de Kailash Arjun Nagare, lauréat du prix Young Farmer Award 2020, qui s’est donné la mort en mars 2025, invoquant l’inaction du gouvernement face aux demandes en matière d’irrigation, est un indicateur du désespoir croissant qui règne dans la communauté agricole. Pourquoi rien ne change-t-il alors que les suicides d’agriculteurs ne montrent aucun signe de ralentissement dans le Vidarbha et le Marathwada ?

Ampleur de la crise

Au cours des 24 dernières années, la division fiscale d’Amravati, dans le seul district de Vidarbha, a enregistré 21 219 suicides d’agriculteurs, dont 5 395 dans le district d’Amravati, 6 211 dans celui de Yavatmal, 4 442 dans celui de Buldhana, 3 123 dans celui d’Akola et 2 048 dans celui de Washim. En janvier de cette année, 80 suicides ont été signalés dans ces districts, Yavatmal enregistrant le nombre le plus élevé avec 34. Dans le district de Hingoli, dans le Marathwada, 24 suicides ont eu lieu au cours de la même période de trois mois.

Vidarbha est représentée par des poids lourds du BJP à l’Assemblée législative de l’État et au Parlement : le ministre en chef Devendra Fadnavis et le ministre de l’Union Nitin Gadkari. Ils ont obtenu des résultats remarquables dans divers domaines, mais n’ont malheureusement pas réussi à faire avancer le dossier de la crise agraire.

Les données historiques du Bureau national des statistiques criminelles (NCRB) et d’autres rapports font état de 37 142 suicides d’agriculteurs dans le Maharashtra entre 2015 et 2024 : 4 291 en 2015, 3 058 en 2016, 3 701 en 2017, 3 594 en 2018, 3 927 en 2019, 4 006 en 2020, 4 064 en 2021, 4 268 en 2022, 2 851 en 2023 et 2 635 en 2024.

Les données du NCRB pour 2022 montrent que 11 290 personnes dans le secteur agricole (5 207 agriculteurs/cultivateurs et 6 083 ouvriers agricoles) à travers le pays se sont suicidées, ce qui représente 6,6 % du total des suicides (170 924) en Inde. Les hommes ont été plus nombreux que les femmes à choisir cette solution extrême. Sur les 5 207 suicides d’agriculteurs/cultivateurs, 4 999 étaient des hommes et 208 des femmes. Et sur les 6 083 ouvriers agricoles qui se sont donné la mort, 5 472 étaient des hommes et 611 des femmes. Les États et les territoires de l’Union qui n’ont signalé aucun suicide dans le secteur agricole sont le Bengale occidental, le Bihar, l’Odisha, l’Uttarakhand, Goa, le Mizoram, le Tripura, Chandigarh, Delhi, Lakshadweep et Pondichéry.

Quant au Maharashtra, 2 708 agriculteurs/cultivateurs – 2 448 propriétaires fonciers et 260 cultivateurs de terres louées – se sont suicidés en 2022. Cela représente plus de 50 % du chiffre national de 5 207 dans la même catégorie. Et plus d’un quart du nombre total de suicides d’ouvriers agricoles (1 560) provenait du Maharashtra. Ces chiffres sont stupéfiants, quelle que soit la comparaison.

Comme l’a déclaré le leader du Congrès Rahul Gandhi en commentant l’article de ce journal : « Réfléchissez-y... en seulement trois mois, 767 agriculteurs se sont suicidés dans le Maharashtra. S’agit-il seulement d’une statistique ? Non. Ce sont 767 foyers détruits. 767 familles qui ne pourront jamais s’en remettre. »

Il a ensuite marqué des points politiques en affirmant que le gouvernement annulait facilement les prêts des riches mais pas ceux des pauvres, ce qui lui a valu une réplique cinglante du BJP, qui lui a rappelé les « péchés commis par le gouvernement NCP-Congrès pendant son mandat dans le Maharashtra ».

Au milieu de toutes ces querelles politiques, la question clé reste sans réponse : pourquoi la série de mesures sociales prises par les gouvernements central et régional, y compris l’octroi d’aides financières, n’ont-elles pas réussi à redonner aux agriculteurs la confiance nécessaire pour faire face aux aléas de la vie ?

Les causes profondes : un enchevêtrement complexe

La crise des suicides d’agriculteurs résulte d’une combinaison de difficultés économiques, de défis environnementaux et de pressions sociales, aggravées par des lacunes politiques.

Difficultés économiques et endettement : le poids écrasant de la dette est le principal facteur, alimenté par la hausse des coûts des intrants et l’insuffisance des prix des récoltes. Vijay Jawandhia, leader paysan et expert, a déclaré à ce journal que le coût des intrants (semences, engrais, pesticides et diesel) a fortement augmenté, tandis que les récoltes sont vendues à un prix inférieur au prix minimum de soutien (MSP). Par exemple, en 2024, le soja s’est vendu entre 3 800 et 4 000 roupies le quintal, contre un MSP de 4 892 roupies, le coton entre 5 000 et 6 000 roupies, contre 7 550 roupies, et le tur dal [pois d’Angole] entre 6 000 et 6 500 roupies, contre 7 500 roupies. Un rapport estime que les producteurs de soja du Maharashtra ont perdu 85 milliards de roupies [=850 millions €] en 2024 en raison de ventes inférieures au MSP. La taxe sur les produits agricoles (GST) de 18 % érode encore davantage les marges. Rahul Gandhi a souligné dans une critique que, bien que les deux gouvernements accordent au total 12 000 roupies par an (6 000 roupies provenant du gouvernement central et 6 000 roupies provenant du gouvernement de l’État dans le cadre du PM Kisan Samman Nidhi) aux agriculteurs, les taxes sur les intrants agricoles absorbent plus que ces aides.

Défis environnementaux : Vidarbha et Marathwada, où le coton, le soja et les légumineuses dominent, ne disposent que d’un taux d’irrigation de 10 à 12 %, contre 60 % dans la ceinture sucrière de l’ouest du Maharashtra. Les agriculteurs dépendent de moussons irrégulières, aggravées par des phénomènes climatiques extrêmes tels que sécheresses, pluies hors saison et tempêtes de grêle. L’épuisement des nappes phréatiques oblige les agriculteurs à forer des puits jusqu’à 300 mètres de profondeur, ce qui fait grimper les coûts. En 2015, des réservoirs comme celui de Manjara n’avaient plus aucune réserve d’eau. Des pénuries similaires persistent ailleurs. Le suicide de Kailash Arjun Nagare en mars 2025, après une grève de la faim de 10 jours pour obtenir de l’eau d’irrigation provenant du réservoir de Khadakpurna, met en évidence le désespoir causé par la pénurie d’eau.

Baisse des rendements et volatilité des marchés : les rendements agricoles ont chuté, en particulier pour le coton. Sanjay Patil, un agriculteur de Dhule, a déclaré à ce journal que les rendements du coton sont passés de 10-12 quintaux par acre à 2-3 quintaux, les prix chutant de 10 000-12 000 roupies à 5 000-6 000 roupies par quintal.

Pressions sociales et psychologiques : L’augmentation des coûts de l’éducation, des soins de santé et des besoins quotidiens dépasse les revenus stagnants des agriculteurs, créant un écart flagrant entre les revenus et les dépenses. Jawandhia note que contrairement aux fonctionnaires, qui bénéficient d’indemnités de cherté liées à l’inflation et d’augmentations de salaire, les agriculteurs ne bénéficient d’aucune protection de ce type. Les difficultés financières, associées à un accès limité aux services de santé mentale, alimentent la dépression. Le suicide de Sachin et Jyoti Jadhav, un couple d’agriculteurs de Parbhani, en avril 2025, qui a laissé deux filles orphelines, montre qu’il est urgent de s’attaquer aux problèmes de santé mentale de toute urgence.

Réponse du gouvernement

Dans l’ordre constitutionnel, l’agriculture relève de la compétence des États, mais de nombreuses décisions importantes dans ce secteur sont prises par le gouvernement central, a déclaré Jawandhia. « J’ai soulevé cette question devant M. Swaminathan lorsqu’il était président de la Commission nationale des agriculteurs. Il a ri et a accepté de recommander au gouvernement central d’inscrire l’agriculture sur la liste des compétences concurrentes. Cependant, cette proposition n’a pas encore été acceptée au niveau politique », a-t-il ajouté.

Quoi qu’il en soit, les gouvernements ont une réponse toute faite aux questions troublantes sur les suicides d’agriculteurs. En voici un exemple tiré du Rajya Sabha [Conseil des États, chambre haute du parlement fédéral], en réponse à une question simple posée le 4 mai dernier : « L’agriculture étant une compétence des États, ce sont les gouvernements des États qui fournissent l’aide. Cependant, le gouvernement indien soutient les efforts des États par des mesures politiques appropriées, des allocations budgétaires et divers programmes. Les différents programmes du gouvernement indien visent à améliorer le bien-être des agriculteurs en augmentant la production, les revenus et le soutien au revenu des agriculteurs. Le gouvernement a considérablement augmenté les crédits budgétaires alloués au ministère de l’Agriculture et du Bien-être des agriculteurs (DA&FW), qui sont passés de 219,335 milliards de roupies en 2013-2014 à 1 225,287 milliards de roupies en 2024-2025. » Le ministre énumère ensuite 28 grands programmes visant à améliorer le revenu global des agriculteurs. De leur côté, les États publient des données sur l’aide accordée aux proches des victimes éligibles. Mais il est difficile de trouver des preuves empiriques que ces mesures ont inversé la tendance au suicide.

Mesures sociales et problèmes

Indemnisation : 1 lakh de roupies pour les familles des agriculteurs décédés, mais seuls 376 des 767 cas de suicide entre janvier et mars 2025 ont été approuvés, avec 295 lakhs de roupies demandés par huit districts et seulement 18 lakhs versés.

MSP : les achats limités effectués par 562 centres ne permettent pas d’empêcher les ventes en dessous du MSP.

Aide financière : une aide annuelle de 12 000 roupies (6 000 roupies provenant du gouvernement central et 6 000 roupies provenant du gouvernement de l’État dans le cadre du programme PM Kisan Samman Nidhi) compensée par la GST et la hausse des coûts des intrants

Accompagnement psychologique : les séances de soutien psychologique visent à dissuader les suicides, mais leur ampleur est insuffisante

Priorité à la canne à sucre : le vice-ministre en chef Ajit Pawar a proposé une loi pour protéger les producteurs de canne à sucre. Les producteurs de coton, majoritaires dans le Vidarbha, se sentent négligés en raison de l’influence politique des coopératives de canne à sucre. Jawandhia critique l’accent mis sur la canne à sucre, soulignant que les producteurs de coton sont traités comme des « orphelins » dans le Vidarbha.

Voix sur le terrain

Les agriculteurs et les militants soulignent la négligence systémique qui a conduit à la crise. Sanjay Patil est passé du coton aux vergers de citronniers en raison de pertes insurmontables. Ajit Nawale, de Kisan Sabha, a comparé les politiques indiennes aux subventions usaméricaines et européennes, accusant le gouvernement de favoriser les négociants. Il a déclaré que le gouvernement fédéral accordait 6 000 roupies aux agriculteurs pauvres et dans le besoin dans le cadre du programme Kisan Samman, mais que sous le couvert d’une taxe sur les produits chimiques, les engrais et les pesticides de 18 %, il soutirait aux agriculteurs plus d’argent que les subventions qu’il leur accordait. « J’appelle les agriculteurs à s’unir et à lutter contre le gouvernement et ses politiques », a-t-il suggéré.

Quant à Jawandhia, il a déclaré : « Les cousins Thackeray se sont unis sur la question de la langue marathi et se sont opposés à l’imposition de l’hindi dans le Maharashtra, mais pourquoi aucun politicien ne se mobilise pour la cause des agriculteurs de l’État ? »

Aller de l’avant

Pour faire face à la crise des suicides dans le secteur agricole, des réformes structurelles sont nécessaires :

Régime du prix minimum de soutien (MSP) : selon Jawandia, l’application du MSP en tant que droit légal pourrait garantir des prix équitables. En outre, aucune récolte ne devrait être vendue en dessous du MSP.

Infrastructures d’irrigation : il est essentiel de développer l’irrigation dans le Vidarbha et le Marathwada, éventuellement grâce à des projets tels que le barrage de Khadakpurna. Le manque d’installations d’irrigation a coûté la vie à de nombreux agriculteurs, dont Nagare.

Soutien en santé mentale : le renforcement des services de conseil pourrait aider à soulager la détresse psychologique.

La lettre de suicide de Nagare exigeait des mesures ; les décès des Jadhav ont laissé leurs filles orphelines. Tant que les problèmes de dette, de pénurie d’eau et de volatilité des marchés ne seront pas résolus, les fermes du Maharashtra resteront un cimetière pour leurs agriculteurs.

Illustrations : Sourav Roy

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PARTHA CHATTERJEE
Parler de notre modernité en deux langues

Partha Chatterjee, Studies in Humanities and Social Sciences, Vol. II, No.2, 1996, pp. 153-169

Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

« La nôtre est la modernité des anciens colonisés. Le même processus historique qui nous a enseigné la valeur de la modernité a également fait de nous les victimes de la modernité. Notre attitude à l’égard de la modernité ne peut donc qu’être profondément ambiguë. Cela se reflète dans la manière dont nous avons décrit nos expériences de la modernité au cours du dernier siècle et demi […]. Mais cette ambiguïté ne provient pas d’une quelconque incertitude quant à savoir s’il faut être pour ou contre la modernité. L’incertitude vient plutôt du fait que nous savons que pour façonner les formes de notre propre modernité, nous devons parfois avoir le courage de rejeter les modernités établies par d’autres. À l’époque du nationalisme, il y a eu de nombreux efforts de ce type qui reflétaient à la fois le courage et l’inventivité. Tous n’ont bien sûr pas connu le même succès. Aujourd’hui, à l’ère de la mondialisation, le temps est peut-être venu de mobiliser à nouveau ce courage. Peut-être devons-nous réfléchir à “ces jours-là” et “ces jours-ci” de notre modernité. »

Partha Chatterjee (1947) est un théoricien politique, un anthropologue politique et un historien, professeur émérite d’anthropologie et d’études sur le Moyen-Orient, l’Asie du Sud et l’Afrique. Il est également dramaturge. Il est diplômé du Presidency College de Kolkata et a obtenu son doctorat à l’université de Rochester (État de New York, USA). Depuis 1997, il partage son temps entre l’université Columbia et le Centre d’études en sciences sociales de Kolkata, dont il a été le directeur de 1997 à 2007. Il est l’auteur de plus de trente livres et volumes édités en anglais et en bengali. Il est l’un des membres fondateurs du Subaltern Studies Collective. L’un de ses livres a été traduit en français : Politique des gouvernés (Amsterdam, 2009). Bibliographie




17/02/2025

SIDDHARTYA ROY
Le projet nationaliste hindou de Modi au Jammu-et-Cachemire est devenu un cauchemar pour les Hindous

Siddharthya Roy, Drop Site News, 16/2/2025 
Traduit par Fausto GiudiceTlaxcala

Siddharthya Roy est un journaliste indien indépendant qui se concentre sur les conflits politiques et les insurrections en Asie du Sud. Avec une formation d'ingénieur et des années passées à coder, il s'est tourné vers le journalisme professionnel en 2011. Après avoir obtenu une maîtrise en politique et affaires internationales à l'université de Columbia en 2018, il a obtenu la bourse du Pulitzer Center for Crisis Reporting pour ses reportages sur les groupes néo-djihadistes en Asie du Sud, enquêtant sur la traite des êtres humains et le trafic de drogue dans les camps rohingyas. Il a lancé le premier programme de journalisme de données et informatique en Inde au Symbiosis Institute Of Media and Communication. Il partage son temps entre le nomadisme numérique et le rêve de devenir un nomade analogique. Auteur de The Company of Violent Men: Stories from the Bloody Fault Lines of the Subcontinent, Ebury Press, 2024

Comme l'ont montré le président Donald Trump et le premier ministre indien Narendra Modi lors de leur rencontre à Washington cette semaine, les deux dirigeants ont beaucoup en commun : une préférence pour le nationalisme musclé et un désir de rendre leurs pays respectifs à nouveau “grands” en poussant vers le haut l'homme de la rue, du moins en théorie.

Mais on a peu évoqué la façon dont Modi et son parti, le Bharatiya Janata Party, s'efforcent de transformer l'Inde d'une république laïque en un État nationaliste hindou, et cela nulle part de manière plus frappante qu'au Jammu-et-Cachemire.

Avant la partition de 1947, le Cachemire était un royaume à majorité musulmane dirigé par un roi hindou qui cherchait à obtenir son indépendance à la fois de l'Inde et du Pakistan. Mais le Pakistan, revendiquant le Cachemire pour son identité musulmane, a lancé une offensive armée. En octobre 1947, le roi, incapable de résister, s'est tourné vers l'Inde pour obtenir de l'aide, ce qui a conduit à l'absorption du Cachemire en tant qu'État fédéral doté d'une autonomie exceptionnelle : sa propre constitution, son drapeau et des droits fonciers exclusifs pour les Cachemiris.

Cette paix fragile s'est effondrée. Le militantisme soutenu par le Pakistan et les répressions brutales de l'armée indienne ont transformé le Cachemire en une zone de conflit fortement militarisée. Dans ce chaos, les deux parties ont joué à des jeux démographiques dangereux. Dans les années 1990, les militants islamistes ont violemment expulsé les Pandits du Cachemire, la communauté hindoue indigène de la région, afin d'affirmer la domination musulmane. Parallèlement, les nationalistes hindous considèrent la majorité musulmane du Cachemire comme une cicatrice dans leur vision d'une Inde à dominante hindoue.

En août 2019, Modi a supprimé l'autonomie du Cachemire et dissous son assemblée législative, une décision qui répondait à un objectif nationaliste hindou, mais qui a créé une série de nouveaux défis sécuritaires que l'État indien n'est pas en mesure de relever.

Comme le rapporte Siddharthya Roy ci-dessous, l'abrogation de l'autonomie par la force des armes a rendu le gouvernement aveugle aux réalités du terrain, lui a coupé les yeux et les oreilles, et a attisé la confusion et les tensions entre l'armée, la police, les bureaucrates et les politiciens. Et, pour la première fois depuis les années 1990, elle a placé les civils hindous directement dans la ligne de mire des militants soutenus par le Pakistan.-  La rédaction de Drop Site News

Un soldat paramilitaire indien monte la garde sous le regard d'un garçon du Cachemire pendant que les électeurs attendent de voter lors des élections dans le district de Kupwara au nord du Cachemire. Photo Faisal Bashir/SOPA Images/LightRocket via Getty Images

Dans la soirée du 29 mai 2024, Kupwara, un district niché dans les vallées accidentées du Jammu-et-Cachemire, est devenu le théâtre d'une confrontation violente, dramatique et embarrassante. Tout a commencé par un raid de la police du Jammu-et-Cachemire sur un trafic de stupéfiants présumé. Les officiers ont agi rapidement, sur la base de renseignements glanés dans des communications interceptées qui, selon eux, les conduiraient à un personnage clé lié à la fois au trafic de drogue et au militantisme transfrontalier. Pour les officiers, il s'agissait d'une opération classique, dont ils ne pensaient pas qu'elle déboucherait sur une confrontation armée. Mais lorsqu'ils sont arrivés à la maison du suspect, ils ont fait une découverte stupéfiante : Il s'agissait d'un soldat de l'armée territoriale, une composante de réserve de l'armée indienne chargée de soutenir la sécurité intérieure.

La situation s'est rapidement aggravée. Vers 21 h 40, 30 à 40 soldats armés de l'armée territoriale, dirigés par trois lieutenants-colonels, ont pris d'assaut le poste de police de Kupwara après avoir appris le raid. Les soldats ont agressé les policiers à coups de crosse et à coups de poing, laissant quatre policiers hospitalisés, selon des témoins oculaires et les caméras de vidéosurveillance. Au milieu du chaos, les soldats se seraient emparés des téléphones portables des blessés et auraient enlevé l'agent principal. L'incident a bouleversé ce qui, jusqu'alors, avait été une longue histoire de coordination entre la police locale et les autorités fédérales.

Le lendemain, la police de l'État de Jammu-et-Cachemire a engagé des poursuites pénales à l'encontre de 16 membres de l'armée. Mais les autorités militaires ont semblé indifférentes, qualifiant l'épisode de “malentendu mineur” résolu pacifiquement, malgré les preuves vidéo et les témoignages montrant le contraire. Un porte-parole de la défense basé à Srinagar est allé plus loin en qualifiant les rapports sur l'altercation de “mal fondés et incorrects”. Dans la majeure partie de l'Inde, un épisode aussi choquant donnerait lieu à des poursuites judiciaires rapides - dans le cas présent, aucune mesure de ce type n'a été prise. Mais le Cachemire, ligne de fracture dans le conflit intense qui oppose depuis des décennies l'Inde et le Pakistan, a toujours été un cas unique.

En août 2019, Narendra Modi, le Premier ministre indien, a privé le Jammu-et-Cachemire de son statut spécial, en le divisant en deux territoires sous le contrôle direct de New Delhi et en dissolvant l’assemblée parlementaire de l'État. Ce faisant, il a mis à bas un compromis vieux de sept décennies visant à sauvegarder l'identité unique de la seule région à majorité musulmane de l'Inde. Pour mener à bien sa prise de pouvoir, Modi a révoqué deux dispositions constitutionnelles : l'article 370, qui accordait au Jammu-et-Cachemire le droit à sa propre constitution ainsi qu'un contrôle important sur les questions internes, et l'article 35A, qui donnait à la législature de l'État le pouvoir d'empêcher les non-résidents de s'y installer ou d'y acquérir des terres. Les représentants du gouvernement indien ont fait des gestes pour restaurer le statut d'État du Jammu-et-Cachemire en s'engageant à organiser des élections au niveau de l'État.

Les critiques ont considéré que ces mesures prises par Modi s'inscrivaient dans le cadre d'un effort concerté visant à ouvrir la voie à des changements démographiques et à poursuivre la mission du BJP, qui consiste à transformer l'Inde d'une nation laïque en un État nationaliste hindou. La suppression des protections contre la propriété foncière des non-Kashmiris a suscité des craintes de colonialisme, déclenchant une résistance locale et une condamnation internationale, en particulier de la part du Pakistan et des organisations de défense des droits humains, qui ont qualifié l'abrogation des articles 370 et 35A d'érosion de l'autonomie historique et de l'identité culturelle du Cachemire.

Pour Modi et le BJP, le statut unique du Jammu-et-Cachemire a longtemps été un obstacle à leur vision d'une nation unifiée. « Les articles 370 et 35A n'ont apporté que séparatisme, népotisme et corruption au peuple du Jammu-et-Cachemire », a déclaré Modi dans un discours national le 8 août 2019. Le Pakistan, rival historique de l'Inde, a utilisé l'article 370 « comme un outil pour répandre le terrorisme » qui a fait 42 000 victimes depuis le début de l'insurrection en 1989, a-t-il ajouté. » Je suis convaincu que les habitants du Jammu-et-Cachemire vaincront le séparatisme avec une nouvelle énergie et un nouvel espoir ».

La fin du statut spécial du Jammu-et-Cachemire a créé un dangereux vide de normes constitutionnelles. La dissolution de l'assemblée de l'État et l'imposition du pouvoir central ont fortement réduit la capacité des représentants élus locaux à répondre aux griefs ou à demander des comptes aux forces de sécurité. La neutralisation des institutions locales a, en fait, transféré une plus grande autorité au gouvernement central indien. Et comme l'abrogation a coupé des sources locales fiables de renseignements sur les activités des milices et les menaces émergentes, New Delhi s'est effectivement aveuglé sur les développements sur le terrain.

Pour compenser, le personnel de sécurité indien a commencé à inonder le Jammu-et-Cachemire à partir du 5 août 2019. Leur présence accrue dans la région a toutefois eu pour effet d'augmenter la probabilité d'affrontements entre les civils et les forces armées. Grâce à l'affaiblissement de l'autorité locale, de multiples forces de sécurité opèrent désormais sous des autorités concurrentes et sous une surveillance minimale. L'ensemble de ces facteurs a créé un environnement instable et confus qui, paradoxalement, est devenu de plus en plus dangereux pour les Hindous de la région.

Depuis 2023 et jusqu'à la fin de l'année dernière, une série d'incidents choquants, dont la mêlée de Kupwara, ont révélé les conséquences inattendues du pari du BJP au Jammu-et-Cachemire : Au lieu de stabiliser la région, il semble avoir semé les graines d'une agitation plus importante.

Un État sécuritaire

La menace de violences communautaires entre Hindous et Musulmans a toujours plané sur le Jammu-et-Cachemire. Dirigé par un maharaja hindou, ce territoire à majorité musulmane a cherché à obtenir son indépendance et a reçu le soutien d'une milice pakistanaise qui l'a envahi en octobre 1947. Le soulèvement qui s'ensuivit obligea le maharaja à demander le soutien militaire de New Delhi, ce qui conduisit à l'adhésion du Jammu-et-Cachemire à l'Inde et, deux ans plus tard, à l'adoption de l'article 370.

Pendant des décennies, l'article 370 a contribué à maintenir un équilibre précaire entre l'autonomie du Jammu-et-Cachemire, la souveraineté de l'Inde et les liens de la région avec le Pakistan. Mais au fil des décennies, le militantisme soutenu par le Pakistan a progressivement transformé le Jammu-et-Cachemire d'un État ordinaire de l'Union indienne en un État de sécurité, où la responsabilité démocratique et les droits civils ont été relégués au second plan.

La tension a atteint son paroxysme à la suite des élections législatives contestées de 1987, lorsque les jeunes Cachemiris qui avaient participé au processus démocratique ont constaté que leurs votes étaient devenus pratiquement sans valeur en raison des fraudes généralisées orchestrées par le parti du Congrès, qui contrôlait alors le gouvernement central. Nombre de ces jeunes désabusés ont traversé la frontière pour se rendre au Cachemire sous administration pakistanaise, avant de revenir plus tard en tant que militants aguerris.

En 1989, l'agitation s'est transformée en une violente insurrection alimentée par des sentiments séparatistes et le soutien du Pakistan, ce qui a eu pour effet de militariser davantage la région et d'accentuer les divisions. L'insurrection des années 1990 qui a suivi a marqué l'ère la plus sanglante du Cachemire, marquée par des assassinats ciblés d'Hindous cachemiris, qui ont conduit à leur exode massif, et par le meurtre de centaines de musulmans lors d'opérations contre-insurrectionnelles.

Pendant un certain temps, les groupes anti-indiens, qu'il s'agisse d'organisations armées comme Lashkar-e Taiba, le plus grand groupe militant du Cachemire, ou d'organisations non armées comme la Hurriyat Conference, ont trouvé une place dans la politique cachemirie, tant qu'ils adhéraient à une règle non écrite : une règle qui excluait de la liste des cibles toute personne n'appartenant pas aux forces armées, au gouvernement et aux forces de l'ordre. Mais les événements de ces deux dernières années semblent indiquer que ce n'est plus le cas.

MURTAZA HUSSAIN
Alors que Modi se rend à Washington, des USAméricains sikhs affirment que la surveillance et les menaces se poursuivent

La campagne transnationale présumée d’assassinats et d’intimidation visant les dissidents sikhs est loin d’être finie

Murtaza Hussain, Drop Site News, 14/2/2025
Traduit par Fausto GiudiceTlaxcala

Murtaza Hussain est un journaliste d’origine pakistanaise qui a grandi à Toronto et vit aujourd’hui à New York. Après avoir travaillé au site ouèbe The Intercept, il contribue au nouveau site créé par Jeremy Scahill et Ryan Grim, Drop Site News. @MazMHussain

 


Dans l’après-midi du 22 décembre 2024, un véhicule blanc s’est arrêté devant les portes de la maison de l’activiste politique Pritpal Singh à Fremont, en Californie. Les images de sécurité fournies à Drop Site montrent un homme se garant devant la propriété, située dans un cul de sac tranquille de la banlieue, sortant de son véhicule, prenant plusieurs photos de la maison de Singh et des environs, avant de s’éloigner après avoir été remarqué par des voisins sortant de chez eux.

M. Singh est un organisateur usaméricain d’origine sikh qui avait déjà précédemment été averti par le FBI que sa vie était en danger. Ces avertissements ont été émis après une série d’assassinats et de tentatives d’assassinat d’autres militants sikhs en Amérique du Nord en 2023, qui, selon les USA et le Canada, auraient été orchestrés par des agents des services de renseignement indiens et dirigés par de hauts responsables du gouvernement Modi.

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Alors que le président Donald Trump fait la cour au premier ministre indien Narendra Modi à Washington cette semaine, des agents des forces de l’ordre enquêtent pour savoir si des personnes travaillant pour le gouvernement indien continuent de cibler les USAméricains sikhs dans le cadre d’une série de fusillades, de menaces et d’incidents d’intimidation non élucidés dans plusieurs pays.


Le président Donald Trump et le premier ministre indien Narendra Modi tiennent une conférence de presse conjointe à la Maison Blanche le 13 février 2025 / Andrew Harnik / Getty Images

Ces incidents feraient partie d’une campagne mondiale orchestrée par le gouvernement indien pour cibler les dissidents à l’étranger, notamment aux USA, au Royaume-Uni et au Canada. L’Inde est actuellement dirigée par un gouvernement nationaliste religieux qui a adopté une ligne dure à l’égard du séparatisme et des mouvements politiques basés sur les minorités dans le pays.

Singh, qui milite pour les droits des Sikhs et l’indépendance politique, a reçu plusieurs notifications du FBI concernant des menaces de mort. Le FBI et d’autres agences de renseignement usaméricaines appliquent une politique connue sous le nom de « devoir d’avertissement », qui les oblige à fournir des informations sur une menace imminente pour la vie d’un individu. À peu près à la même époque, M. Singh a fait état de plusieurs cas où des personnes se sont rendues à son domicile.

« Nous avons cinq cas de surveillance suspecte à mon domicile, dont trois au cours des dernières semaines. D’après ce que nous avons appris grâce à l’alerte du FBI, nous pensons que cette surveillance est liée au gang de Modi », a déclaré M. Singh. « Il est stupéfiant d’apprendre du FBI que l’on est la cible d’un gouvernement étranger alors que l’on pensait être en sécurité chez soi en tant que citoyen usaméricain ».

Les militants sikhs en Occident affirment depuis des années qu’ils sont la cible d’attaques de la part du gouvernement indien, y compris de meurtres présumés. Les militants visés sont pour la plupart des partisans de la création d’un État sikh séparatiste en Inde, une cause qui a déclenché une insurrection militante à l’intérieur de l’Inde dans les années 1980, mais qui est restée largement en sommeil depuis, vivant principalement comme un thème d’activisme politique de la diaspora.


Une liste de 43 “gangsters anti-indiens” recherchés, publiée par la National Investigation Agency (NIA), le FBI indien en septembre 2023. Les personnes assassinées au Canada figuraient sur cette liste

L’année dernière, le gouvernement canadien a publié une série de déclarations publiques sans précédent, accusant l’Inde d’avoir mené pendant des années une campagne de meurtres, d’incendies criminels, d’extorsions, de violations de domicile et de harcèlement politique à l’encontre des militants sikhs dans ce pays. Selon le gouvernement canadien, cette campagne comprenait les meurtres d’au moins deux hommes, Hardeep Singh Nijjar et Sukhdool Singh Gill, tous deux tués par balles lors d’assassinats perpétrés par des gangs qui, selon le Canada, auraient été dirigés par de hauts responsables du gouvernement indien.

Three men are pictured in mugshots in this composite photo.

Karan Brar, Kamalpreet Singh and Karanpreet Singh, les 3 suspects dans le meurtre de Hardeep Singh Nijjar

Cette campagne de violence s’est étendue au territoire usaméricain, selon un acte d’accusation usaméricain.



Gurpatwant Singh Pannun


Nikhil Gupta

En 2024, le ministère usaméricain de la justice a inculpé Vikash Yadav, un agent de renseignement indien accusé d’avoir orchestré un projet d’assassinat visant un citoyen usaméricain à New York la même année. Selon le ministère de la justice, le complot visant à tuer Gurpatwant Singh Pannun, conseiller général de l’organisation séparatiste sikh Sikhs For Justice, n’a été déjoué que lorsque le tueur à gages chargé de l’exécuter s’est avéré être un agent infiltré de la DEA. Un autre homme, Nikhil Gupta, attend actuellement d’être jugé aux USA pour son implication dans cette tentative d’assassinat ratée. L’acte d’accusation contre Gupta laisse entendre que de nombreux autres assassinats ont pu être planifiés après celui de Pannun, Gupta ayant déclaré à l’agent infiltré : “Nous avons tellement de cibles”.

14/06/2024

SUPRIYO CHATTERJEE
Après les élections indiennes, l'autoroute de Modi débouche dans un cul-de-sac

Supriyo Chatterjee, 14-6-2024
Traduit par Tlaxcala

Les résultats des récentes élections parlementaires indiennes ont été bénis par un dieu avare et malveillant : les nationalistes hindous gouverneront, mais de justesse ; l'opposition, découragée, peut à nouveau se battre, mais elle doit se préparer intelligemment ; les minorités recroquevillées sont soulagées, mais seulement pour l'instant, et les institutions de l'État se demandent si elles peuvent se tenir debout cette fois-ci ou si elles doivent continuer à ramper.

 

Oups ! Vous êtes biologique !

Après une décennie au pouvoir, le Premier ministre Narendra Modi avait une présence dominante, mais son Bharatiya Janata Party (Parti du peuple indien, le BJP) a perdu sa majorité et un cinquième de ses sièges cette fois-ci, malgré l'injection d'argent, la saisie des fonds du principal parti d'opposition, le Congrès, et le bannissement de ce dernier et d'autres rivaux de la télévision et de la majeure partie de la presse écrite. Il devra compter sur ses alliés régionaux pour continuer à gouverner, mais ils savent que Modi a l'habitude de les utiliser et de les détruire. Le BJP a subi des revers importants dans ses bastions du nord et de l'ouest de l'Inde, qui comptent certains des États les plus grands et les plus peuplés, perdant même à Ayodhya, la ville où une mosquée historique a été détruite et où un temple a été construit sur ses ruines afin de faire de la région le Vatican de l'hindouisme. Le parti au pouvoir a gagné dans l'est et le sud du pays, où sa présence est incertaine, mais ses défaites ont été plus décourageantes que ses victoires contre les partis régionaux.

28/11/2023

SAMAN MUDUNKOTUWAGE
Le Sri Lanka, une proie pour tous les requins

 Saman Mudunkotuwage, 25/11/2023
L’auteur est un exilé srilankais vivant en France

Le conflit entre les puissances internationales et régionales dans l’océan Indien s'intensifie depuis le Sommet du G20 qui s’est tenu en septembre dernier, organisé par le Premier ministre indien Narendra Modi.

Deux mois après cette réunion, où le grand absent était la Chine, l’ United States International Development Finance Corporation (DFC) , une agence du gouvernement fédéral américain, a injecté 550 millions de dollars au profit du Groupe ADANI, une société multinationale indienne qui a déjà investi 700 millions de dollars dans le développement d’une partie du port de Colombo, en dépit de l'opposition et des protestations des syndicats et des dockers.

De ce fait, les médias occidentaux posent la question de savoir si les Américains et les Indiens n’auraient pas passé un accord pour s’opposer l'expansion chinoise dans l'île de Ceylan, au vu de sa situation stratégique dans l’océan Indien.


Namal Amarasinghe

Au lendemain de cet investissement, la Banque mondiale a également accordé à ce pays un crédit de 150 millions de dollars, au prétexte de sauver l’épargne et la stabilité financière du pays.

Ce conflit d'intérêt entre les impérialistes et les puissances régionales concernant Ceylan et sa situation stratégique n'est pas une nouveauté :

- Le 25 mars 1802, le traité d'Amiens, signé entre le Royaume-Uni d’une part et la France napoléonienne, l’Espagne et la République Batave (ex-Provinces-unies, futurs Pays-Bas) d’autre part, aurait dû confier l'île à la France. Mais les Britanniques ont finalement gardé cette clef de l’accès à l’océan Indien.

- La République batave, installée en maître à Colombo, a refusé de remettre le pays aux Britanniques, en dépit de la lettre envoyée par son chancelier en exil à Londres après la guerre de l'ensemble de monarchies européennes contre la France révolutionnaire. En attaquent les possessions hollandaises avec le soutien de l'armée cinghalaise, les Britanniques ont donc pris le contrôle de ces territoires et ports maritimes.

Cela démontre parfaitement l'intérêt militaire que représente Ceylan (devenu Sri Lanka), avec ses rades naturelles similaires à celles de la presqu'île de Crimée ou de Djibouti, aux yeux des pays impérialistes. Aujourd’hui, ce pays est partagé entre les pays impérialistes et la Chine.

Lors de la visite-éclair du président français en juillet dernier, certains médias et experts de cette région ont également évoqué cette question. La DFC a indiqué que son prêt de 550 millions de dollars ne modifiait pas la dette de 55 milliards de dollars due par le Sri Lanka à divers bailleurs de fonds, mais que « ce prêt améliorerait la situation de nos alliés dans la région ».

Tiens donc ! Cette phrase nous rappelle l’histoire d'un autre carnage et de la déclaration cynique de la secrétaire d'État américaine, Condoleeza Rice, après le tsunami de 2004 : « Le tsunami représente pour nous une opportunité merveilleuse ». A chaque fois que ce peuple lutte pour sa survie, son malheur représenterait une merveilleuse opportunité d'améliorer la situation des impérialistes ? Rien que ça !

Tous les experts économiques, sans exception, indiquent que l'économie du Sri Lanka s’est effondrée en raison de son rapprochement avec les valeurs néo-libérales propagées par les néoclassiques de l'école des Chicago Boys. L'ouverture à l'importation massive, la réduction de ses exportations de 80%, et le blocage de toutes les interventions de l’État dans le domaine économique sont des facteurs majeurs du désastre politique et social dans ce pays.

Force est de constater que l'économie sri-lankaise est fondée sur trois secteurs prépondérants, à savoir le textile, le tourisme et les fonds des diasporas. Dès lors que ces trois secteurs entrent en crise, le Sri Lanka est à chaque fois confronté à des difficultés sans précédent. Après l'épidémie de coronavirus en 2020, 25% de la population du pays souffrent d’extrême pauvreté, selon un rapport du 23 septembre 2023. La dette extérieure atteint 55 milliards de dollars.

Aragalaya/The Struggle [La lutte], le raz-de-marée de révolte qui a déferlé sur le Sri Lanka de mars à juillet 2022, a conduit à la fuite du président Gotabaya Rajapaksa et à la démission de tous les membres de sa famille installés à des postes-clé, mais son remplacement par Ranil Wickremesinghe n’a rien changé.

Le peuple et la jeunesse se sont révoltés contre le régime en 2022, mais avant qu’ils aient pu atteindre leurs objectifs, la situation prérévolutionnaire a été confisquée par le système en place avec l'aide du FMI et autres bailleurs du fonds. Le 20 octobre 2023, le FMI a bloqué l’octroi d’un prêt de 333 millions de dollars, en accusant le pouvoir de Colombo de n’avoir pas assez collaboré avec le programme d'austérité proposé par cet organisme. La classe ouvrière s’oppose à tous les programmes de privatisation des ressources naturelles du pays, telles que l'eau, les terres, les assurances, la distribution d'énergie, les compagnies aériennes ou le patrimoine culturel, etc. Voilà la vraie raison du retard dans ce versement. Quant au régime en place, il a reporté toutes les élections municipales et provinciales sous prétexte d’un manque d'argent. Le Président par intérim a déclaré à l'Assemblée nationale que la montée du communisme est à l'origine de ce report. Ils veulent retarder ces élections pour gagner du temps, croyant que les impérialistes finiront par se porter à leur chevet ou que la crise mondiale va se terminer.

La question de l’octroi de ces 555 millions de dollars est une démonstration parfaite de la façon dont l’impérialisme intervient pour sauver ce système pourri, contre l'instauration d'un pouvoir soutenu par le peuple sur la base de la démocratie directe, exigée par les luttes et l'occupation par la jeunesse du Parc Galle Face Green à Colombo en 2022. Face à l’endettement du pays d’une part et aux exigences de la jeunesse et du peuple d’autre part, la classe capitaliste sri-lankaise s'apprête à accepter n'importe quelles concessions suggérées par les impérialistes et les puissances régionales pour sauvegarder son système corrompu.

La guerre d'Ukraine-Russie et d'Israël-Palestine va provoquer une nouvelle montée des taux d'intérêts et l'inflation mondiale va à nouveau toucher de plein fouet les trois ressources économiques du Sri Lanka - textile, tourisme et transferts de fonds des membres de la diaspora qui travaillent majoritairement dans les pays du Golfe et au Machreq. La crise qui se développe au Bangladesh est un bon exemple pour comprendre le désarroi de la classe ouvrière du textile dans la région et le reste du monde. De ce fait, l'injection de dollars par les impérialismes et leurs institutions financières en contrepartie d’occupations militaires et d’acquisitions économiques ne calmeront pas la résistance de la classe ouvrière et du peuple qui se battent pour leur propre émancipation.

Aragalaye Smarakaya’, le Monument à la Lutte, connu sous le nom The Slipper (la tong), une œuvre de l’artiste Salinda Roshan installée sur l’emplacement du Gotagogama, le Village Gotabaya Dégage !, est fortement symbolique : elle montre une tong écrasant un bidon de gaz lacrymogène.