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21/12/2024

LUCA CELADA
Le plan de la Silicon Valley pour s’emparer de l’État
L'irrésistible (ou résistible ?) ascension des broligarques

USA : Une ploutocratie « armée » et extrémiste est sur le point de prendre le contrôle de la plus grande superpuissance du monde.

Luca Celada, il manifesto, 17/12/2024
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

Luca Celada est le correspondant à Los Angeles du quotidien italien il manifesto


Cette semaine, Jeff Bezos d’Amazon, Sam Altman d’Open AI et Mark Zuckerberg ont annoncé des dons d’un million de dollars chacun en guise de contribution à la cérémonie d’investiture de Donald Trump le 20 janvier prochain. Les magnats du numérique ont souvent été attaqués par Trump, qui, il y a encore quelques semaines affirmait que Zuckerberg, en particulier, devrait « aller en prison » pour avoir censuré des opinions de droite sur ses plateformes. Après sa victoire, il y a pratiquement eu une procession depuis la Silicon Valley pour faire acte de soumission. La semaine dernière, le patron de Meta s’était envolé vers Mar a Lago pour une rencontre avec Trump, Bezos a rendez-vous dans les prochains jours.

De nombreux autres ploutocrates sont une présence fixe dans la cour tournante qui virevolte depuis les élections de novembre autour du président de retour. Parmi les nombreux magnats qui ont généreusement contribué à sa réélection, beaucoup ont été ponctuellement récompensés par des nominations dans des ministères. Parmi eux, Charles Kushner, père de son gendre Jared, qu’il a gracié en 2020 [il avait été condamné pour malversations fiscales] , honoré par le poste d’ambassadeur en France.

(Une autre nomination « dynastique » est celle de la (peut-être ex)  fiancée du premier-né Donald Jr, Kimberley Guilfoyle, en tant que nouvelle ambassadrice en Grèce, tandis que sa belle-fille, Lara Trump, devrait passer du comité central du parti républicain au Sénat).

Parmi les ministres aux fortunes opulentes (plus d’un milliard de dollars), on trouve Linda McMahon à l’éducation publique, Scott Bessent au Trésor, Doug Burgum à l’intérieur, Howard Lutnick au commerce, Jared Isaacman à la tête de la NASA, et Steve Witkoff - partenaire en affaires de Trump dans une nouvelle société de crypto-monnaies, World Liberty Financial – comme envoyé spécial au Moyen-Orient 

En plus de créer un autre conflit d’intérêts flagrant pour le nouveau président, l’entrée de la famille dans la production de « Trump coin » est la dernière indication d’un partenariat croissant entre Trump et le nouveau capitalisme incubé dans la Silicon Valley. Les magnats siliconiens sont fantastiquement riches, et pour Trump, la richesse a toujours été un symbole ostentatoire de réussite. Selon un récent article du New York Times, il aime exhiber ses nouveaux associés politiques comme des trophées dans son palais kitsch. « J’ai amené deux des hommes les plus riches du monde », aurait-il récemment déclaré, selon le Times, en se présentant à une réunion des journalistes en compagnie d’Elon Musk et du PDG d’Oracle, Larry Ellison. « Vous, vous avez amené qui ? »

C’est Elon Musk qui incarne l’influence des accélérationnistes de la Silicon Valley dans la restauration de Trump : comme on le sait, il s’est vu confier, avec un autre milliardaire, Vivek Ramaswami, un poste central d’administrateur du « département de l’efficacité gouvernementale » (DOGE). Musk aurait cependant une plus grande liberté d’action, y compris sur la composition du cadre gouvernemental lui-même, sur lequel travailleraient, en Floride, de nombreux collaborateurs « prêtés » par ses entreprises.

Parmi les personnages clés figurerait Jared Birchall, directeur de Neuralink, l’entreprise en charge des implants neurologiques, mais aussi administrateur des finances personnelles du magnat et généralement son bras droit, en charge des affaires familiales, de la fondation, ainsi que des biens immobiliers, des déplacements et de la sécurité de Musk. À ces tâches s’ajoutent désormais les pourparlers avec d’éventuels représentants du département d’État. Le fait que Birchall n’ait aucune expérience en matière d’affaires internationales n’est manifestement pas considéré comme un problème dans une sélection qui, comme pour les autres départements, semblerait se concentrer principalement sur les affinités idéologiques et la loyauté des candidats à l’égard du président.

Un autre conseiller, cette fois pour sélectionner le personnel du renseignement, est Shaun Maguire, un physicien de Caltech devenu milliardaire en tant qu’associé de Sequoia, l’un des principaux fonds d’investissement de la Silicon Valley et (ça va sans dire) ami d’Elon Musk, avec qui il partage le culte, si à la mode dans la Valley, du génie indiscipliné et inadapté, peut-être même un peu misanthrope, mais toujours brillant.

En d’autres termes, de nombreuses décisions destinées à façonner le gouvernement Trump bis sont entre les mains d’une faction idéologique de « méritocrates » extrémistes, pour ne pas dire de théoriciens « darwinistes » du triomphe des meilleurs sur les médiocres. Un autre « conseiller » fixe à Palm Beach, par exemple, est Marc Andreesen, le fondateur milliardaire de Netscape et l’un des principaux idéologues de l’oligarchie néo-réactionnaire, fervent défenseur du libéralisme radical et d’une ingérence minimale de l’État dans les affaires des corporations.

Grâce à son alliance stratégique avec Trump, un partenariat qui n’a vraiment mûri que dans les dernières étapes de la campagne électorale, ce petit groupe d’entrepreneurs radicalisés par le succès des oligopoles de la Silicon Valley, a désormais la possibilité de transporter les philosophies du management (et de l’eugénisme) vers l’appareil d’État. Musk a, par exemple, exprimé à plusieurs reprises l’idée que l’immigration devrait être gérée comme une campagne de sélection d’« un club sportif », tenu de sélectionner les meilleurs joueurs et d’écarter les « losers » tant honnis, pour lui comme pour Trump.

02/12/2024

JUDY MALTZ
Comment la guerre d’Israël contre Gaza a poussé les Israéliens de la Silicon Valley à sortir de leur bulle

NdT : ci-dessous le compte rendu d’une plongée hallucinante dans la bulle du Silicone Wadi, dont, de toute évidence, nos braves expats israéliens ne sont vraiment pas sortis, contrairement à ce qui est affirmé.

Judy Maltz, depuis Palo Alto, pour Haaretz, 1/12/2024
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

Après le 7 octobre, la vague d'antisémitisme [sic] qui a déferlé sur l'une des régions les plus progressistes des USA a poussé les expatriés israéliens à s'engager dans un militantisme de terrain en réponse à la diabolisation d'Israël et des Juifs [elle veut dire : des sionistes]. Pourtant, certains envisagent de partir pour de bon


Une bulle éclate à Palo Alto.Photo d’Arseniy Gutov/ Shutterstock, photoshopée par Jacob Boomsma. et Masha Zur Glozman

PALO ALTO - Comme de nombreux Israéliens qui se sont installés dans la Silicon Valley au début du boom de la haute technologie, Hagit et Oded Shekel avaient prévu de ne rester que deux ans. Près de 25 ans et quatre enfants plus tard, ils sont toujours là.
Et comme beaucoup d'Israéliens qui considèrent cette partie de la Californie du Nord comme leur maison - ou du moins, comme leur maison loin de chez eux - les Shekel ont vécu, la plupart du temps, dans une bulle israélienne. Ils parlent hébreu à la maison, fréquentent principalement d'autres Israéliens, envoient leurs enfants au mouvement des scouts israéliens et s'assurent d'assister à tous les spectacles israéliens qui viennent en ville.
« Les médias israéliens nous informent toujours de ce qui se passe aux USA », explique Hagit.
Il n'est pas surprenant qu'ils ne se soient jamais intéressés à la politique locale. « Nous vivons à Sunnyvale depuis 14 ans et nous ne savions même pas où se trouvait le bâtiment du conseil municipal ni à quoi il ressemblait », admet-elle.
Tout a changé quelques semaines après le 7 octobre, lorsque les Shekel ont découvert que leur maire, ainsi que plusieurs membres du conseil municipal, avaient signé une déclaration condamnant Israël pour ses actions à Gaza. Munis de drapeaux israéliens, ils ont organisé une manifestation lors de la réunion suivante du conseil municipal et y ont associé leurs amis et voisins israéliens. À partir de ce moment-là, ils ont commencé à se présenter à chaque réunion du conseil municipal.
« Rien de tel ne s'était jamais produit auparavant », raconte Hagit.


Oded et Hagit Shekel, fondateurs de la Jewish Bay Coalition. Photo Judy Maltz

Une bulle brisée
Plus d'un an après l'attaque meurtrière du Hamas contre Israël, les communautés juives du monde entier sont encore sous le choc. Mais pour les expatriés israéliens, le choc a été encore plus grand. Non seulement parce qu'ils sont plus susceptibles de connaître les victimes, mais aussi parce que, étant nés et ayant grandi dans un pays où les Juifs sont majoritaires, la plupart d'entre eux n'avaient jamais été confrontés à l'antisémitisme [resic] avant le 7 octobre.
On estime à 40 000 le nombre d'Israéliens vivant dans la Silicon Valley, les plus grandes concentrations se trouvant dans les villes de Sunnyvale, Mountain View, Palo Alto, Cupertino et Los Altos. Nombre d'entre eux, comme les Shekel, sont arrivés dans la région dans le cadre de missions de relocalisation à court terme et ont fini par y rester.
Parmi les communautés d'expatriés israéliens situées dans le monde entier, la Silicon Valley est peut-être la plus importante, la plus riche et la plus prospère. Les Israéliens sont devenus une telle force dans cette capitale mondiale de la haute technologie que les hébréophones l'ont surnommée « Silicon Wadi », en référence aux lits de rivières asséchées omniprésents en Israël [encore un mot arabe qu’ils ont volé].
La région de la baie de Californie, où se trouve la Silicon Valley, est également connue pour sa politique très progressiste, pratiquement synonyme aujourd'hui d'activisme pro-palestinien. Ce n'est d'ailleurs pas une coïncidence si les organisations antisionistes Jewish Voice for Peace et Students for Justice in Palestine, qui ont joué un rôle de premier plan dans les manifestations qui ont eu lieu sur les campus l'année dernière, ont fait leurs premiers pas dans cette région. Depuis le 7 octobre, un grand nombre de résolutions anti-israéliennes adoptées par les conseils municipaux dans tout le pays et un grand nombre de plaintes contre l'antisémitisme [reresic] dans le système scolaire public ont également vu le jour ici.
« En tant qu'Israéliens, nous connaissons bien le terrorisme, mais pas l'antisémitisme », note Guy Miasnik, un investisseur et entrepreneur en technologie qui siège également au conseil d'administration de la fédération juive locale. « Soudain, nous y sommes exposés dans les écoles de nos enfants, sur leurs campus et dans les conseils municipaux. Ainsi, pour la première fois dont je me souvienne, des Israéliens de la Silicon Valley participent activement à la vie politique locale.

Guy Miasnik : « En tant qu'Israéliens, nous connaissons bien le terrorisme, mais pas l'antisémitisme ». Photo Adva Ophir

Guy Miasnik, qui vit dans la région de la Baie depuis près de 25 ans, qualifie de « sans précédent » le niveau d'activisme local dont il a été témoin parmi les Israéliens de la région au cours de l'année écoulée.
« Ce sont des gens qui, avant le 7 octobre, n'avaient aucune idée de ce qu'était un district scolaire ou un conseil scolaire », explique-t-il. « Je veux dire que ces choses n'existent pas en Israël. Et soudain, ils se présentent aux réunions des conseils scolaires et des conseils municipaux et font beaucoup de bruit ».
Ronit Jacobs, qui dirige le département israélien du JCC (Centre communautaire juif) de Palo Alto, s'est installée à Mountain View avec son mari usaméricain et leurs trois enfants il y a 23 ans. Elle a participé à la création de l'école de langue hébraïque de l'après-midi au JCC, qui accueille aujourd'hui 650 élèves, principalement des enfants d'Israéliens, et qui a des antennes dans toute la région.

Ronit Jacobs : « Le 7 octobre, les Israéliens laïques ont soudain compris que nous étions juifs».

« Le 7 octobre, les Israéliens laïques d'ici ont soudain compris que nous étions juifs », dit-elle. Ce n'est pas comme grandir en Israël, où le judaïsme se transmet dans l'air et dans l'eau. En Israël, vous n'avez pas besoin de travailler pour être juif ».
Elle ajoute : « Le 7 octobre, nous avons compris, que nous soyons USAméricains ou Israéliens, que nous, les Juifs, sommes tous dans le même bateau. L'année dernière, nous avons vécu une grande prise de conscience ».
Une rencontre qui change la vie
Ella Segev, lycéenne de 16 ans, s'est installée à Palo Alto avec sa famille à l'âge de 9 ans. Quelques semaines après le 7 octobre, raconte-t-elle, une camarade de classe s'est approchée d'elle dans le couloir de l'école et, à son grand étonnement, lui a dit : « Fuck The Jews [ J'emmerde les Juifs] ».

Ella Segev : « Avant le 7 octobre, je n'étais qu'une jeune Israélienne ordinaire qui faisait la Pâque et jeûnait le Yom Kippour. Mais ce qui s'est passé ce jour-là a changé ma vie ». Photo Ido Segev

« J'ai été absolument choquée », se souvient-elle. « C'est à ce moment-là que j'ai décidé d'agir. J'ai donc commencé à me présenter aux réunions des conseils scolaires et des conseils municipaux pour tenter d'expliquer aux responsables politiques locaux ce que vivaient les étudiants juifs et israéliens comme moi ». Elle a fini par obtenir un entretien privé avec le maire.
« Je n'avais jamais été une activiste auparavant », dit Segev. « Avant le 7 octobre, je n'étais qu'une jeune Israélienne moyenne qui faisait la Pâque et jeûnait le jour de Yom Kippour. Mais ce qui s’est passé ce jour-là a changé ma vie ».
Jusqu’à l’année dernière, note Jacobs, elle n’avait jamais rencontré d’Israéliens qui envisageaient de cacher leur identité.
« La plupart d'entre nous sont fiers de ce qu'ils sont et n'ont jamais eu l'impression d'avoir à en avoir honte », explique-t-elle. « Nous n'hésitions pas à nous promener avec des t-shirts portant des inscriptions en hébreu. Mais soudain, j'ai commencé à recevoir des appels d'amis israéliens qui me demandaient si je pensais qu'ils devaient enlever leurs mezouzahs ou s'ils devaient arrêter de parler hébreu à l'extérieur. Cela m'a fait prendre conscience de l'impact considérable que le 7 octobre avait sur nous, Israéliens ».

Délier les cordons de la bourse
En période de crise pour Israël, les Juifs usaméricains ont généralement réagi en ouvrant leur porte-monnaie. Pour les Israéliens, cependant, même ceux qui sont basés aux USA, la charité et la philanthropie ne sont pas une seconde nature.
« Donner de l'argent ne fait pas partie de l'ADN israélien », fait remarquer Oded Hermoni, un investisseur en capital-risque qui s'est installé dans la Silicon Valley il y a 13 ans. « Pour les Israéliens, il a toujours été question de donner son sang ».

Oded Hermoni : « Donner de l'argent ne fait pas partie de l'ADN israélien.

Cela a également changé après le 7 octobre. Oded Hermoni est le cofondateur de J-Ventures, un fonds d'investissement dans les hautes technologies, surnommé le « kibboutz capitaliste », géré par un groupe de Juifs usaméricains et d'Israéliens.
Après l'attaque du Hamas, J-Ventures a créé un fonds d'urgence pour aider les victimes. « Nous avons recueilli autant d'argent auprès des Israéliens que des Juifs usaméricains, ce qui m'a surpris car je n'avais jamais vu d'Israéliens donner autant d'argent auparavant ».
Hermoni est probablement le rare exemple d'un Israélien basé dans la Silicon Valley qui, dès son arrivée dans le pays, a commencé à se lier d'amitié avec des Juifs usaméricains de la région.
C'est le choc du 7 octobre qui a incité Hagit et Oded Shekel - qui jusqu'alors s'étaient rarement mêlés à des juifs usaméricains - à rechercher leur compagnie. « Nous avons réalisé que nous étions tous dans le même bateau et qu'en unissant nos forces, nous pourrions changer les choses », explique Hagit.
Les Shekel sont les fondateurs de la Jewish Bay Coalition, une association locale d'Israéliens et de Juifs usaméricains qui s'est engagée à lutter contre les initiatives anti-israéliennes et antisémites [rereresic] dans les conseils locaux et les écoles publiques. Comme le veut la tradition israélienne, elle utilise des groupes WhatsApp pour mobiliser ses membres. Selon Hagit, des milliers d'Israéliens et de Juifs usaméricains ont rejoint ces groupes WhatsApp au cours de l'année écoulée.
« Il s'agissait d'un partenariat inédit entre des Juifs locaux et des Israéliens, les Israéliens montrant la voie », note Miasik, qui a contribué à obtenir un financement pour la coalition auprès de la fédération juive locale.
Avant les élections du 5 novembre, les bénévoles de la coalition ont interrogé les candidats aux élections locales dans la région de la baie afin de connaître leur position sur les questions qui préoccupent les Juifs et les Israéliens. Ils ont ensuite publié un « Guide de l'électeur » contenant des recommandations à l'intention des candidats en lice dans 200 scrutins à travers la région.
« Certains nouveaux membres de l'assemblée de l'État m'ont appelé pour me dire qu'ils avaient été élus grâce à nos recommandations », explique Oded Shekel.
Mais si le 7 octobre et ses conséquences ont créé de nouveaux liens entre les Israéliens et les USAméricains d'origine juive vivant dans la région de la baie, ils ont également mis en évidence une fracture croissante au sein de la communauté hébréophone.
Au cours des neuf mois qui ont précédé l'attaque du Hamas, de nombreux expatriés israéliens, répartis dans le monde entier, ont organisé des manifestations hebdomadaires de solidarité avec les Israéliens du pays qui protestaient contre le coup d'État judiciaire du gouvernement. Ces expatriés israéliens faisaient partie d'un réseau mondial, connu sous le nom d'UnXeptable, dont le siège se trouve dans la Bay Area.
Quelques semaines avant le 7 octobre, alors que Benjamin Netanyahou était en visite dans la Silicon Valley, des milliers d'entre eux sont venus protester contre le premier ministre israélien. Mais depuis, regrette Offir Gutelzon, l'entrepreneur israélien de haute technologie qui a fondé UnXeptable, il est difficile de mobiliser les Israéliens et de les amener à s'exprimer contre le gouvernement israélien.

Offir Gutelzon, fondateur d'UnXeptable. Il affirme qu'il est difficile de mobiliser les Israéliens depuis le 7 octobre.

« Le 7 octobre a fait à de nombreux Israéliens de la Baie ce qu'il a fait aux Israéliens d'Israël », explique Offir Gutelzon. « Il les a rendus très défensifs à l'égard d'Israël. Ici aussi, ils sont plus divisés que jamais, et ils sont nombreux à soutenir Donald Trump. »
Comme l'écrasante majorité des Israéliens, Hanoch Eiron, cadre marketing retraité de la Silicon Valley, a soutenu l'offensive israélienne à Gaza immédiatement après l'attaque du 7 octobre. « Mais lorsque des informations ont commencé à être diffusées sur les atrocités commises là-bas, ainsi qu'en Cisjordanie, cela a rendu les discussions avec d'autres Israéliens très difficiles pour moi. Nous n'étions plus sur la même longueur d'onde qu'un an auparavant. »
Au cours de l'année écoulée, explique Eiron, nombre de ses amitiés avec des Israéliens locaux ont été mises à rude épreuve. « Je pense que la démocratie et l'occupation sont incompatibles, mais je ne peux plus aborder ce sujet dans les conversations sans créer des tensions ».
Il a également découvert qu'il n'était pas d'accord avec de nombreux Israéliens locaux sur ce qui constitue l'antisémitisme. Selon lui, ses voisins israéliens ont tendance à « sur-réagir » aux critiques légitimes des actions d'Israël.

 
Hanoch Eiron : « Je pense que la démocratie et l'occupation sont incompatibles ». Photo Lee Abel

Le projet sioniste n'est pas terminé
Pour de nombreux Israéliens qui se sont installés ici au cours des dernières décennies, la survie de leur patrie a toujours été considérée comme acquise. À bien des égards, le 7 octobre et ses conséquences ont fait voler en éclats cette hypothèse.
« La plupart d'entre nous ont grandi dans un monde où Israël était un pays fort et stable, et malgré tout l'amour que nous portions à ce pays et notre attachement à son peuple, nous ne pensions pas devoir continuer à investir dans le projet sioniste », explique Mme Miasik. « Ce que le 7 octobre nous a appris, c'est que le projet sioniste n'est pas terminé et qu'il y a encore beaucoup de travail à faire ».
Les événements de l'année dernière ont également amené de nombreux Israéliens à s'interroger sur leur avenir.
« D'un côté, il y a ceux qui veulent retourner en Israël parce que c'est là que se trouvent leur famille et leurs amis, et qui se sentent même coupables d'être si loin à un moment pareil », explique Miasik. « D'un autre côté, je parle aussi à des Israéliens qui sont absolument désespérés par ce qui se passe dans le pays et qui pensent qu'ils n'ont pas d'endroit où retourner ».
Oded Shekel ne connaît pas beaucoup d'Israéliens de la Silicon Valley qui envisagent de rentrer chez eux, mais il en connaît un certain nombre qui envisagent de s'installer dans d'autres régions des USA.
« La Californie est devenue trop progressiste pour eux », explique-t-il. « Les Israéliens que je connais et qui ont des enfants au collège ici dans la baie me disent qu'il est hors de question qu'ils les envoient au lycée ici.
« Je ne me souviens pas avoir entendu parler d'une telle situation auparavant », ajoute-t-il. « Je veux dire qu'il y a certainement des Israéliens qui sont partis parce que la vie est trop chère ici, mais parce que leurs enfants ont des difficultés à l'école vu qu'ils sont juifs ? » [donc, juif = israélien, sioniste = juif. Mon pauvre Oded, t’es vraiment pas sorti de ta bulle, NdT écœuré]


13/03/2023

SAGI COHEN/CORIN DEGANI
Un week-end noir pour la haute technologie israélienne après l'effondrement de la SVB

Sagi Cohen & Corin Degani, Haaretz, 12/3/2023
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

 Un certain nombre d'entreprises israéliennes de haute technologie se sont précipitées pour retirer leur argent de la Silicon Valley Bank en faillite, mais tout le monde n'y est pas parvenu

 

Les entreprises high-tech et les startups israéliennes ont vécu un week-end d'angoisse et de panique après la chute de la Silicon Valley Bank. Plusieurs entreprises israéliennes se sont précipitées pour retirer leur argent de la SVB et le transférer dans d'autres banques aux USA et en Israël. Selon LeumiTech [branche du groupe Leumi, spécialisée dans les services bancaires aux entreprises de haute technologie, NdT], ses équipes ont aidé ses clients à transférer environ 1 milliard de dollars en Israël.

Les professionnels du secteur ont déclaré à la fin de la semaine que bon nombre d'entreprises israéliennes avaient pu retirer leur argent à temps, mais que ce n'était manifestement pas le cas pour tout le monde. En fait, la situation réelle dans le secteur de la haute technologie du pays n'est pas claire, car les entreprises dont les dépôts sont maintenant bloqués chercheront à le cacher, craignant que toute rumeur ne fasse fuir les clients, les fournisseurs et les employés.

Une personnalité du secteur a déclaré qu'une startup avait des dizaines de millions de dollars de dépôts à la SVB, soit environ 90 % de son argent. « Ils ont quelques millions de dollars en Israël », a-t-il déclaré. « Dans ces conditions, il faut être prêt à licencier toute l'entreprise en quelques mois. Il y a aussi des entreprises qui ont 100 % de leurs dépôts à la SVB ».

« Je n'ai jamais connu une telle situation », a déclaré le PDG d'une start-up israélienne qui possède environ 1 million de dollars à la SVB, ce qui représente une part faible mais significative de son capital. Jeudi après-midi, il a remarqué une chute brutale des actions de la banque. Quelques heures plus tard, il a commencé à recevoir des messages WhatsApp et des appels téléphoniques de l'un des membres du conseil d'administration, qui lui demandait de retirer l'argent immédiatement.

« J'ai dit [aux employés] de tout laisser tomber et de sortir l'argent. L'ordre a été donné à 20 heures, puis nous avons commencé à devenir fous parce que l'ordre n'était pas passé. Les heures ont passé, les nouvelles se sont accumulées ». L'entrepreneur milliardaire et investisseur en capital-risque Peter Thiel a dit de sortir l'argent, a-t-il ajouté.

« Soudain », poursuit le PDG, la banque a été prise d'assaut. « C'est quelque chose que vous lisez dans les livres, mais non seulement c'est quelque chose que je n'ai jamais vécu, mais je n'ai jamais pensé dans un million d'années que c'était possible avec SVB, une banque avec une forte réputation et une marque, considérée comme la banque numéro un pour les startups. Sur quoi pouvez-vous compter ? De l'argent à la banque. Et soudain, même ce que vous pensez être le fondement le plus élémentaire de votre travail est ébranlé ».