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24/08/2025

Alors qu’Israël se prépare à déplacer un million de Gazaouis, un nouveau danger apparaît
Petite plongée dans la pensée profonde des stratèges génocidaires

Des sources militaires avertissent que l’évacuation des civils de la ville de Gaza pourrait piéger Israël dans un rôle de gouvernance militaire indésirable, tandis que le Hamas pourrait utiliser la population comme bouclier humain dans son dernier bastion.

Itay Ilnai, Israel Hayom, 21/8/2025

Traduit par Tlaxcala


Itay Ilnai (1981) est un journaliste israélien spécialisé dans les questions militaires et de renseignement qui écrit pour le quotidien gratuit de droite Israel Hayom, propriété des héritiers du milliardaire Sheldon Adelson.

 

La première fois, ça n’a pas fonctionné parfaitement.

Le 13 octobre 2023, une semaine seulement après l’attaque surprise du Hamas, l’armée israélienne a dispersé des tracts dans le nord de la bande de Gaza. « Habitants de Gaza, dirigez-vous vers le sud pour votre sécurité et celle de vos familles. Éloignez-vous des terroristes du Hamas qui vous utilisent comme boucliers humains », pouvait-on y lire. Le Hamas a tenté d’empêcher la population d’évacuer les zones déclarées par l’armée israélienne, notamment certaines parties de la ville de Gaza, mais en vain. Des centaines de milliers d’habitants paniqués ont rapidement rassemblé leurs affaires et ont fui vers une zone qui est depuis devenue synonyme d’espace humanitaire : al-Mawassi.


Des images de convois palestiniens marchant avec leurs biens le long de la côte et sur l’axe Salah al-Din ont été publiées dans le monde entier et ont fait la une des médias palestiniens sous le titre « deuxième Nakba », mais l’armée israélienne était satisfaite. Il semblait que l’opération d’évacuation de la population, première étape vers le début d’une manœuvre terrestre à grande échelle, avait été couronnée de succès.

Mais le Commandement Sud a agi trop précipitamment. « Nous avons fermé leur voie de sortie trop tôt », explique une source qui était alors impliquée dans la gestion des combats. « Les forces ont manœuvré de manière à empêcher un quart de million de personnes de se déplacer vers le sud, et celles-ci sont restées piégées. » En conséquence, des dizaines de milliers de Gazaouis piégés dans le nord de la bande de Gaza au cours des premiers mois de la guerre se sont déplacés « d’un côté à l’autre », selon les termes de cette source, à chaque fois que l’armée israélienne avançait vers une nouvelle ville ou un nouveau quartier. « C’était notre erreur », admet-il.

Depuis lors, des leçons ont été tirées et l’armée israélienne, en particulier le Commandement sud, est devenue plus efficace dans tout ce qui touche à la pratique officiellement définie comme « déplacement de la population civile à des fins de protection ». Au cours des mois suivants, des zones étendues et densément peuplées comme Rafah et Khan Younès ont été presque entièrement vidées de leurs habitants de manière délibérée, ce qui a permis aux divisions de l’armée israélienne de manœuvrer plus facilement tout en réduisant les risques pour les forces combattantes et les non-combattants. À l’inverse, cette pratique a soulevé des questions d’ordre moral et juridique.

À présent, avant la prise de contrôle (ou la conquête, selon les points de vue) attendue de la ville de Gaza, le Commandement Sud doit relever un nouveau défi. Dans les prochains jours, nous devrions assister au début de l’une des plus importantes opérations de déplacement de population depuis le début de la guerre, qui constituera une étape préliminaire à l’entrée des troupes à Gaza. Près d’un million de personnes devront évacuer la ville et se diriger vers le sud, au-delà du corridor de Netzarim, qui constituera la ligne de front au-delà de laquelle les combats se dérouleront.

L’entité responsable de cette opération d’évacuation complexe est l’« Unité de relocalisation de la population » du Commandement Sud, dont l’existence même est révélée ici pour la première fois. « Cette unité est devenue l’organisme national de référence pour tout ce qui touche au déplacement de populations », explique un officier de réserve haut gradé.

Chuchotements à l’oreille

La pratique du déplacement de population a commencé lors de la première guerre du Liban (opération « Paix pour la Galilée » en 1982) et a été renforcée lors des deux opérations menées dans le sud du Liban dans les années 1990, « Reddition de comptes » et « Raisins de la colère ». Dans un article publié pendant l’opération «Raisins de la colère», un officier israélien avait déclaré qu’en seulement deux jours, environ 200 000 habitants avaient été évacués des villages chiites du sud du Liban, après que l’armée israélienne les eut contactés par le biais de stations de radio locales et de tracts largués depuis des avions. Par la suite, l’armée a adopté un discours plus agressif.

« Nous avons tiré des obus fumigènes dont le but était de marquer, de leur rappeler, de leur « chuchoter » à l’oreille », a expliqué l’officier. Dans un premier temps, les obus ont atterri à environ 100 mètres de la maison la plus éloignée de chaque village. Dans un deuxième temps, la distance a été réduite à seulement 20 mètres.

En 2003, les USAméricains ont également eu recours à la pratique du déplacement de population lors de l’invasion de l’Irak, notamment lorsqu’ils ont évacué environ 200 000 personnes de la ville de Falloujah. Selon les données de l’ONU, la plupart des habitants sont retournés chez eux après la fin des combats, mais des dizaines de milliers d’entre eux sont restés réfugiés, car ils n’avaient pas les moyens économiques de reconstruire leurs maisons détruites.

Mais avec tout le respect que nous devons à la Cisjordanie, au Liban et à l’Irak, Gaza est un tout autre opéra. « Il n’y a aucune comparaison possible », affirme une source militaire. « Au Liban et en Cisjordanie, les gens peuvent quitter la zone des combats et trouver une solution temporaire, par exemple chez des proches. À Gaza, des familles entières se déplacent avec des tentes. »

Le message, c’est l’explosion

L’entité responsable des opérations de déplacement à Gaza est, comme mentionné, l’« Unité de relocalisation de la population », qui opère au quartier général du Commandement sud et est dirigée par un officier de carrière (une unité similaire existe également au Commandement nord). Dans le passé, cet organisme opérait sous l’égide du « Complexe d’influence », mais après le développement du domaine ces dernières années, il est devenu un organisme indépendant. « Au fil du temps, la question du déplacement de population a fait l’objet d’une attention croissante et s’est institutionnalisée », explique une ancienne source de l’armée israélienne.

 
Udi Ben-Moha en 2010, alors qu’il était colonel commandant de la Brigade d’Hébron

Les origines remontent à 2013, lorsque le général de brigade Udi Ben-Moha a été nommé chef d’état-major du Commandement sud. Ben-Moha a commencé à affiner la doctrine du déplacement de population dans le cadre des plans opérationnels pour les futures manœuvres terrestres dans la bande de Gaza. « Il a pris cette pratique et l’a transformée en un art de la guerre », explique le général de brigade (Rés.) Erez Weiner, qui a servi pendant la guerre actuelle en tant que commandant de l’équipe de planification opérationnelle du Commandement sud.

Erez Weiner, un général de réserve qui a beaucoup de casseroles [lire ici]

Les méthodes développées dans cette unité ont d’abord été testées partiellement lors de l’opération « Bordure protectrice » en 2014, avant de devenir partie intégrante de la méthode de combat utilisée lors de l’opération « Gardien des murs » en 2021. Elles prévoyaient la division de la bande de Gaza en blocs, dont les limites étaient définies selon la logique des Gazaouis et non imposées de l’extérieur. « Ce n’est pas une division imaginée par un officier britannique », comme le dit Weiner. « Les contours des blocs correspondent aux quartiers, aux clans, aux ruelles. »

Ce sont des membres de l’unité 504 de la Direction du renseignement militaire, spécialisée dans l’interrogatoire des prisonniers et le recrutement d’agents, qui ont rédigé le contenu des tracts. Le personnel de cette unité était également chargé d’une autre opération de communication avec la population, qui comprenait l’envoi de milliers de SMS et d’appels téléphoniques personnalisés, dont le contenu était adapté à chaque destinataire.

En janvier 2024, l’armée israélienne a annoncé que pendant la guerre, plus de 7 millions de tracts avaient été distribués, plus de 13 millions de SMS envoyés et plus de 15 millions d’appels téléphoniques passés (la plupart avec des messages enregistrés). Les combattants de l’unité 504 ont même appelé les habitants à évacuer quelques instants avant l’entrée des forces de manœuvre, à l’aide de haut-parleurs placés sur des véhicules de l’armée israélienne qui circulaient dans les quartiers. Même dans ce cas, les messages étaient adaptés à chaque quartier, en fonction du clan qui y résidait.

Au cours de la phase suivante, les bombardements d’artillerie qui ont précédé l’entrée des troupes terrestres et qui visaient principalement à dissuader la population civile, ont transmis le message le plus clair possible : évacuez les lieux. « L’armée israélienne a utilisé à Gaza une puissance de feu sans précédent, en tout cas jamais utilisée contre une population civile », a déclaré un officier chargé de l’histoire. « C’est probablement le meilleur moyen de persuasion, plus efficace que n’importe quel tract. »

« Au final, les gens ne se précipitent pas pour abandonner leur foyer, donc le principal moyen de persuasion est la peur », explique un ancien haut gradé de l’armée israélienne spécialisé dans la guerre psychologique, une branche dont sont issues les méthodes opérationnelles de déplacement de population. « Lorsque les bombes tombent en masse, même les plus riches quittent leur maison. De plus, vous pouvez couper la radio, la télévision et enfin la lumière. Tous ces outils font partie de l’arsenal. »

Trouver un visage parmi un million de personnes

L’Unité de relocalisation de la population est chargée de recenser la population et de recueillir des renseignements à son sujet à l’avance, ainsi que de coordonner les opérations visant à la déplacer. À cette fin, elle met en relation un grand nombre d’éléments, notamment les services de renseignement, le coordinateur des activités gouvernementales dans les territoires, l’artillerie, l’armée de l’air, les forces terrestres, etc. Le personnel du parquet militaire joue un rôle central, car il veille à ce que les mesures prises sur le terrain soient conformes au droit international (nous y reviendrons) [sic].

L’unité utilise également des outils pour surveiller les mouvements de population, dès leur début. « Dans la guerre actuelle, l’unité était déjà préparée au niveau de la microgestion de l’opération », explique Weiner. « Quel est le processus de notification, qui informe, quand et comment, et comment suivre et vérifier qu’il y a bien une réponse de l’autre côté et que la population se déplace ? Car en fin de compte, il faut pouvoir indiquer quel pourcentage de résidents a quitté les lieux, afin que certaines zones puissent être ouvertes au feu. »

Quel est ce pourcentage ? Zéro ? « Je ne pense pas qu’il soit judicieux d’entrer dans ce détail, car cela donnerait des armes à l’ennemi. Mais la méthode consiste à activer des systèmes de surveillance, de contrôle et de suivi des mouvements de population, à établir une image de la situation, afin que l’unité chargée de la relocalisation de la population soit en mesure, à tout moment, de dire quel pourcentage de la population se trouve dans chaque zone. »

Les postes de contrôle, situés le long des voies d’évacuation, constituent un autre élément des opérations de déplacement de population. L’armée israélienne installe des moyens technologiques de reconnaissance faciale à ces postes de contrôle afin de repérer, parmi les civils – qui peuvent être plusieurs centaines de milliers par jour –, les terroristes déguisés en innocents, voire en otages.

Une autre source proche du travail de cette unité explique que le déplacement de la population se fait au détriment de l’effet de surprise. « Imaginez que lorsque vous ordonnez à la population d’évacuer, vous révélez à l’ennemi où vous comptez manœuvrer », dit-il. « Néanmoins, l’armée israélienne comprend l’importance de la question. L’objectif ici n’est pas de remplir une obligation et de dire aux habitants « nous vous avons prévenus, maintenant c’est votre problème », puis d’attaquer. Il y a vraiment une volonté de permettre à la population de partir. »

Le ministre de la Défense Israel Katz avec les hauts responsables de l’armée israélienne approuvant le plan pour Gaza. Photo Ariel Hermoni / Ministère de la Défense

Malgré cela, plusieurs incidents ont eu lieu au cours desquels des civils qui n’avaient pas évacué leurs maisons ont été blessés pendant les combats. L’incident le plus connu s’est produit à Khan Younès en mai dernier. Neuf des dix enfants du Dr Alaa al-Najjar, médecin à l’hôpital Nasser, ont été tués lors d’une frappe de l’armée israélienne dans une zone qui était censée être évacuée. Son mari et son fils de 11 ans ont été grièvement blessés.

Ce tragique incident a fait la une des journaux du monde entier. L’armée israélienne a alors affirmé que la frappe avait été menée depuis un avion contre une maison où se trouvaient des suspects opérant à proximité d’une force terrestre, et a promis d’enquêter sur cet incident.

Néanmoins, l’armée israélienne considère le déplacement de population comme l’un des succès de la guerre actuelle. « ça a très bien fonctionné tout au long de la guerre, malgré les prévisions contraires de sources diverses, allant de membres de l’état-major général à des sources internationales, en passant par des militaires usaméricains et toutes sortes d’anciens responsables », affirme Weiner. « Au début de la campagne, nous avons évacué environ un million de personnes du nord de la bande de Gaza et de la ville de Gaza vers le sud, en peu de temps. Ensuite, nous avons évacué 300 000 personnes de Khan Younès en très peu de temps, puis nous sommes arrivés à la question de Rafah. »

Des sources impliquées dans les opérations qui ont précédé l’entrée à Rafah définissent la question de l’évacuation de la population comme la principale « mine » contre l’administration usaméricaine, alors dirigée par Biden, qui s’opposait fermement à l’entrée israélienne dans la ville. « Ils nous ont dit que les habitants de Rafah avaient déjà été déracinés de leurs maisons, donc ils ne seraient pas évacués une nouvelle fois », explique Weiner. « Mais au sein du commandement, nous avons élaboré un plan qui prévoyait deux semaines de préparation et deux semaines supplémentaires pour l’évacuation complète. Rétrospectivement, ça a pris dix jours au total. » Pendant cette période, environ un million de personnes ont été évacuées de Rafah.

Ce qui nous ramène à la ville de Gaza. Après le retrait israélien du corridor de Netzarim au début de l’année, à la suite du deuxième échange d’otages, des centaines de milliers de Gazaouis qui avaient évacué la ville au début de la guerre ont pu y retourner. Au cours de l’opération « Les chars de Gédéon », qui a débuté en mai 2025, d’importants déplacements de population supplémentaires ont été effectués, dont une partie a également été évacuée vers la ville de Gaza. Aujourd’hui, avec la zone d’al-Mawassi et les camps centraux, la ville est devenue le lieu où se concentre la majeure partie de la population civile de la bande de Gaza.

Selon les données de l’ONU, environ 82 % des habitants de la bande de Gaza vivaient avant la guerre dans des zones définies par l’armée israélienne comme « zones d’évacuation ». L’aide apportée aux millions de personnes déplacées fait partie intégrante du principe de déplacement de population. Comme l’explique le Dr Ron Schleifer, maître de conférences à l’université d’Ariel, directeur du Centre de recherche sur la défense et la communication d’Ariel et expert en guerre psychologique, « personne n’aime quitter son foyer, il faut donc convaincre les gens que l’alternative au maintien sur place est pire que le départ vers l’inconnu ».

 

De la fumée s’élève après une explosion à Gaza, vue depuis le côté israélien de la frontière entre Israël et Gaza, le 22 juillet 2025 Photo Reuters/Amir Cohen

Une partie intégrante du déplacement de population consiste à tenir la promesse faite aux personnes évacuées qu’elles recevront un abri, de la nourriture et des services de santé. « Vous leur expliquez clairement qu’il existe un passage sûr par lequel ils peuvent se déplacer et qu’à leur arrivée, ils auront de quoi se nourrir et s’abriter. Vous utilisez à la fois la carotte et le bâton », explique un ancien haut responsable du domaine de la guerre psychologique au sein de l’armée israélienne.

Si les tentes viennent à manquer

Jusqu’à présent, Israël a insisté pour que la carotte – c’est-à-dire l’aide humanitaire à la bande de Gaza – soit fournie et gérée par l’ONU et des organisations internationales, telles que la fondation usaméricaine GHF, en partie pour des raisons juridiques. Mais les espaces humanitaires délimités par l’armée israélienne n’ont pas toujours fait leurs preuves. Les difficultés liées au transfert et à la distribution de l’aide ont entraîné le chaos et des plaintes pour famine à Gaza, auxquelles Israël a récemment eu du mal à faire face. De plus, l’armée israélienne a continué ses attaques à al-Mawassi, notamment lorsqu’elle a éliminé des hauts responsables du Hamas qui utilisaient cet espace pour se cacher, dont Mohammed Deif. Il en résulte que l’on craint désormais que les habitants de la ville de Gaza préfèrent rester chez eux, même au péril de leur vie, et ne fassent pas confiance à l’alternative que leur propose l’armée israélienne.

L’armée israélienne reconnaît que l’opération d’évacuation de Gaza nécessitera la mise en place de refuges humanitaires et de points supplémentaires pour la distribution de nourriture. Elle reconnaît également que le système humanitaire international à Gaza est épuisé, ce qui rend difficile la gestion de la situation à venir.

L’entité qui a déjà commencé à agir concernant « la carotte » pour les évacués de la ville de Gaza est le Coordinateur des activités gouvernementales dans les territoires. Ces derniers jours, elle s’efforce d’aider autant que possible les organisations internationales à préparer les infrastructures destinées à accueillir des centaines de milliers de nouveaux évacués. « On ne peut pas bouger avant de s’assurer que les infrastructures humanitaires – nourriture, eau, médicaments, assainissement – répondent aux exigences du droit international », explique une source bien informée sur le sujet.

Par exemple, dès la fin du mois de juillet, le coordinateur a approuvé, sur instruction du niveau politique, de faire avancer l’initiative émiratie visant à relier une conduite d’eau depuis l’usine de dessalement en Égypte jusqu’à al-Mawassi. Parallèlement, une ligne électrique a été raccordée depuis Israël à l’usine de dessalement située dans le sud de Gaza, ce qui permettra de multiplier par dix l’approvisionnement en eau potable dans le sud de la bande de Gaza. Cette semaine, Israël a même approuvé, pour la première fois depuis le cessez-le-feu de mars 2025, l’acheminement de tentes et de matériel d’hébergement dans la bande de Gaza. « On ne peut pas commencer à déplacer des populations et ensuite dire “oups, il n’y a pas assez de tentes” », explique cette source. « Israël prépare donc déjà les infrastructures nécessaires à l’évacuation. »

Récemment, l’ambassadeur usaméricain en Israël, Mike Huckabee, a également publié une déclaration indiquant l’intention d’étendre les activités de la fondation usaméricaine d’aide humanitaire GHF, qui gère actuellement quatre centres de distribution dans la bande de Gaza, et d’ajouter 12 centres supplémentaires. Derrière cette décision se cachent des discussions entre l’administration usaméricaine, l’ONU et Israël sur une éventuelle coopération entre l’ONU et la fondation usaméricaine afin d’intensifier l’effort humanitaire à Gaza.

La dernière forteresse

Les questions opérationnelles et humanitaires auxquelles sont actuellement confrontées les FDI s’accompagnent de questions juridiques et morales soulevées par le déplacement de populations. Le droit international reconnaît la nécessité d’évacuer les habitants d’une zone de guerre, mais stipule que cette évacuation peut être considérée comme légale à condition qu’elle soit temporaire.

Dès le début de la guerre, des accusations virulentes ont été formulées, selon lesquelles le déplacement de la population constituait une première étape visant à contraindre les habitants de Gaza à émigrer définitivement hors de leurs frontières. Au cours de l’opération « Les chars de Gédéon », trois combattants de réserve ont même déposé une requête auprès de la Haute Cour de justice, dans laquelle ils affirmaient que l’ordre d’opération violait le droit international car il imposait l’expulsion de la population.

L’armée israélienne a toujours affirmé que le déplacement de la population était temporaire et ne visait pas à encourager l’émigration, l’exil ou l’expulsion. Selon les données du coordinateur, depuis le début de la guerre, seuls environ 38 000 Palestiniens ont quitté Gaza pour un pays tiers, tous titulaires d’une double nationalité, ayant obtenu un permis de séjour dans un autre pays ou ayant reçu l’autorisation d’évacuer pour raisons médicales. Des sources officielles ont admis cette semaine que, jusqu’à présent, les tentatives visant à trouver un pays tiers susceptible d’accueillir les réfugiés palestiniens ont échoué.

Quoi qu’il en soit, à mesure que la guerre progresse, la marge de manœuvre juridique dont dispose l’armée israélienne en matière de déplacement de population devient de plus en plus étroite. Selon plusieurs sources que nous avons consultées, l’évacuation de la ville de Gaza et sa prise de contrôle par l’armée pourraient finalement faire basculer la situation.

Selon le Dr Schleifer, après l’évacuation de la ville de Gaza, « nous devons garantir une distribution alimentaire juste et équitable, dans la mesure du possible, sans profiteurs ni implication du Hamas ». Selon lui, l’expérience passée prouve que tout cela ne peut être réalisé par des acteurs internationaux. « Nous devrons installer des camps de tentes et prendre soin de la population civile, mettre en place un système éducatif, etc., et nous organiser dans tous les domaines nécessaires au maintien de la société. Pour ce faire, l’État d’Israël doit rétablir une branche militaire qui a été étranglée et abandonnée : le gouvernement militaire. »

Mais l’objectif du gouvernement israélien, du moins officiellement, est qu’il n’y ait pas de gouvernement militaire. « Nous aboutirons à un gouvernement militaire, que nous le voulions ou non. Nous nous racontons toutes sortes d’histoires, mais il est clair que nous devrons contrôler Gaza, ou superviser d’une manière ou d’une autre ce qui se passe dans la bande de Gaza. À mon avis, il n’y a pas d’autre solution. »

L’armée israélienne peut mater le Hamas à Gaza [resic]. Selon plusieurs anciennes sources de l’armée israélienne qui se sont penchées sur la question, déplacer un nombre aussi important de civils vers une zone aussi restreinte – environ 25 % de la superficie totale de la bande de Gaza – obligera l’armée israélienne à fournir elle-même aux personnes évacuées des solutions en matière de logement, d’alimentation et de santé, et la contraindra pratiquement à instaurer un gouvernement militaire à Gaza, ce que les hauts responsables de l’armée israélienne ont évité jusqu’à présent. « L’armée israélienne est en quelque sorte poussée à agir, et c’est pourquoi elle s’y oppose tant », explique l’un d’entre eux. « Les implications d’une telle décision sont énormes et pourraient entraîner des sanctions internationales, voire un mouvement de refus. Au-delà de cela, il existe un scénario dans lequel le Hamas prendrait en otage la population de la ville de Gaza [reresic] et, contrairement au passé, l’évacuation se ferait très lentement, ce qui affaiblirait la dynamique israélienne. Jusqu’à présent, le Hamas n’a pas réussi à empêcher le déplacement de la population, mais la ville de Gaza est le dernier bastion dont il dispose, et la plupart de ses forces y sont concentrées. Il n’abandonnera pas facilement. »

Selon Weiner, ces inquiétudes sont exagérées. « Pour convaincre les habitants de Gaza d’évacuer, deux choses doivent se produire », dit-il. « La première est de garantir que l’aide humanitaire n’entre pas dans la ville de Gaza, mais uniquement dans les zones d’évacuation. La seconde est de cesser de parler d’un accord partiel. Nous devons affirmer haut et fort que nous n’avons pas l’intention d’arrêter l’opération à Gaza, donc vous feriez mieux de partir, car les bombardements et les bulldozers arriveront bientôt. »

 

JR Mora, janvier 2024

 

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