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01/10/2022

GIANSANDRO MERLI
Non Una Di Meno lance l’opposition féministe au gouvernement à venir en Italie

Giansandro Merli, il manifesto, 29/9/2022
Traduit par
Fausto Giudice, Tlaxcala

Des milliers de femmes dans les rues de Rome, Milan et de nombreuses autres villes pour défendre l'interruption volontaire de grossesse. « Nous craignons que de plus en plus d'obstacles soient placés devant les femmes qui souhaitent avorter. Par exemple avec une forte présence de “pro-vie” au sein des hôpitaux », explique Marta Autore, de NUDM [Non Una Di Meno, Pas Une De Moins, mouvement féministe transnational né en Argentine, qui a essaimé dans toute l’Amérique latine et en Europe du Sud, NdT]

« Ils demandent où sont les féministes. Nous voilà. Nous sommes là », crient-elles au micro. La place répond avec un rugissement : ce “Nous sommes furieuses” qui a appelé à la manifestation n'est pas seulement un slogan. Le cri part du centre géographique de la capitale, à quelques pas de la gare Termini, mais c'est le même qui gronde sur les 16 autres places qui ont vu des manifestations organisées par le mouvement Non Una di Meno (NUDM), de Vérone à Palerme.


Rome, manifestation de NUDM pour la défense de l'avortement libre et gratuit- Photo Cecilia Fabiano

La Journée internationale pour l'avortement libre, sûr et gratuit, qui a été pendant des années l'occasion pour les femmes de se mobiliser, a une signification plus importante trois jours après les élections politiques remportées par la droite. On ne connaît pas encore les noms de l'équipe gouvernementale ni les principaux dossiers sur lesquels elle voudra intervenir, mais il n’y a pas besoin d'un météorologue pour savoir de quel côté le vent souffle.

Giorgia Meloni a répété qu'elle ne modifiera pas le texte de la loi 194 mais qu'elle s'engagera à la mettre en œuvre intégralement en « garantissant les droits de celles qui ne veulent pas avorter ».

« En attendant, nous ne lui faisons pas confiance », di Marta Autore, de NUDM Rome, « et nous craignons que de nouveaux obstacles se dressent devant les femmes qui veulent avorter. Par exemple, avec une forte présence de “pro-vie” dans les hôpitaux, comme l'a proposé Fratelli d’Italia en Ligurie il y a quelques heures ».


En Italie, le problème n'est pas de garantir le droit de ne pas avorter, mais le contraire. En raison des limites de la loi 194 et parce qu'elle est largement ignorée par une objection de conscience répandue : la moyenne nationale est de 70 %, mais dans certains établissements, elle dépasse 80 % ou atteint le total des gynécologues, des anesthésistes et du personnel non médical. « Nous ne pouvons pas permettre que l'avortement soit réservé à celles qui ont les moyens économiques de se rendre dans des établissements publics éloignés ou de se réfugier dans des cliniques privées », disent-elles sur le podium.

Pendant ce temps, la place se remplit et déborde. Plusieurs milliers de personnes partent en procession. Il y a des femmes aux cheveux blancs et des filles aux cheveux teints en vert ou en rose. Des hommes avec des hauts et du rouge à lèvres. Des personnes ayant une identité fluide ou en transition. L'opposition au projet de société de la droite est politique, mais aussi anthropologique. Surtout chez les plus jeunes.

« Nous avons un peu peur du prochain gouvernement, mais nous avons foi dans la solidarité entre les personnes. Aujourd'hui, nous voulons envoyer un message pour défendre la liberté de décider de notre corps », déclarent Eva et Erica. Elles fréquentent le lycée classique Albertelli. Elles ont 16 et 17 ans. Ce n'est pas la première fois qu’elles descendent dans la rue avec NUDM.

Les voix de rappeuses et de trappeuses féministes, notamment d'Amérique latine, résonnent fort depuis le camion. « Soy como las otras / hartas de andar con miedo”, chante l'Argentine Sara Hebe. “Je suis comme les autres / fatiguée d'avoir peur» Notes et mots restituent une trame commune, symbolique mais aussi organisationnelle, que les mouvements transféministes ont tissée ces six dernières années d'un bout à l'autre du globe. Des pancartes écrites en anglais et en espagnol sont brandies au plafond : "Bans off my body", "Mind your uterus", "Ni Una Menos". Des phrases d'accroche qui font écho aux combats des femmes usaméricaines et latino-américaines. Sans place pour les nationalismes anciens ou nouveaux.

« Il y a un conflit mondial sur les droits des femmes et des personnes Lgbtqia+. D'une part, un mouvement réactionnaire qui unit la Cour suprême usaméricaine au gouvernement polonais, via les droites européennes. De l'autre, une vague transféministe qui, de l'Argentine au Mexique, en passant par le Chili et l'Italie, se bat pour changer radicalement la société », explique Autore.

Dans le cortège se trouvaient également des femmes de centre-gauche : Laura Boldrini (certaines manifestantes ont protesté contre sa présence), Monica Cirinnà, Marta Bonafoni. Et puis celles du Kurdistan turc et syrien et de l'Iran. Ces derniers jours, elles ont manifesté avec NUDM pour soutenir le soulèvement dans leur pays.

Des milliers de personnes manifestent également à Milan. « Nous voulons bien plus que la 194 : revenu universel d'autodétermination, éducation sexuelle dans les écoles, abolition de l'objection de conscience [anti-avortement] », affirment les militantes. Des manifestations ont également eu lieu à Turin, Bologne, Naples, Reggio Calabria et dans de nombreuses autres villes plus petites. L'opposition féministe est déjà en marche.


Turin

Milan