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12/01/2025

SABRINA NELSON
La migration illégale comme monnaie d’échange : le jeu diplomatique du Maroc à Ceuta et Melilla

Sabrina Nelson , The McGill International Review, 9/1/2025
Original édité par Rafay Ahmed
Traduit par Tafsut Aït Baâmrane, Tlaxcala

Sabrina est une étudiante de quatrième année qui poursuit un diplôme en sciences politiques avec une mineure en développement international à l’Université McGill à Montréal (Québec). Elle s’intéresse aux droits humains, à la justice sociale, aux crises humanitaires et à la résolution des conflits. Elle est passionnée par les langues et en parle actuellement six.

Immigrants africains à la barrière frontalière entre l’Espagne et le Maroc par ¡¡¡¡ !!!, sous licence CC BY-NC-SA 2.0

Situées sur le continent africain et bordées par le Maroc, Ceuta et Melilla, les enclaves nord-africaines de l’Espagne, sont depuis longtemps des points chauds dans les relations hispano-marocaines, en raison de différends historiques profondément enracinés sur la souveraineté. Le Maroc considère Ceuta et Melilla comme des reliques coloniales espagnoles, affirmant ses liens historiques avec les enclaves à travers les conquêtes islamiques des VIIe et VIIIe siècles, lorsqu’elles ont été intégrées dans l’héritage culturel et historique de l’Afrique du Nord. Dans une lettre adressée à l’ONU en 2022, le Maroc a décrit les enclaves comme « une prison occupée par l’Espagne » et a nié avoir des frontières terrestres avec l’Espagne. L’Espagne, en revanche, affirme sa souveraineté de longue date, citant le contrôle de Melilla depuis 1497 et de Ceuta depuis l’existence de l’Union ibérique (1580-1640), la cession formelle de Ceuta au Portugal ayant eu lieu dans le cadre du traité de Lisbonne en 1668. L’Espagne règne désormais sur Ceuta et Melilla depuis des siècles et les deux enclaves sont actuellement reconnues internationalement comme des villes autonomes régies par le droit espagnol et le droit communautaire européen.

Au-delà du conflit de souveraineté, Ceuta et Melilla sont devenues des sources de tension récurrentes en raison du défi que représente l’immigration clandestine. La situation unique de Ceuta et Melilla sur le continent africain en fait des points d’entrée privilégiés pour les demandeurs d’asile et les migrants qui tentent d’atteindre l’Europe. Le Maroc a stratégiquement utilisé le défi de l’immigration clandestine comme un outil diplomatique, en contrôlant le flux de migrants pour faire pression sur l’Espagne afin qu’elle fasse des concessions politiques, en particulier en ce qui concerne le Sahara occidental. Ainsi, le Maroc a transformé les enclaves en puissantes monnaies d’échange géopolitiques, obligeant l’Espagne à naviguer dans un jeu d’équilibre complexe et délicat.

Carte de Ceuta et Melilla, par Anarkangel, sous licence CC BY-SA 3.0.

Le défi persistant de l’immigration clandestine

Alors que la migration illégale à Ceuta et Melilla a atteint un sommet en 2018 avec 6 800 entrées enregistrées, le problème reste d’actualité. En 2023, on estime à 1 243 le nombre d’entrées enregistrées, ce qui est considérable compte tenu de la taille des enclaves. Toutefois, ces chiffres ne tiennent compte que des migrants interceptés qui ont réussi à franchir la frontière ; l’ampleur réelle des tentatives de franchissement est bien plus importante. Par exemple, pour le seul mois d’août 2023, les autorités marocaines ont bloqué plus de 3 300 tentatives de passage vers Melilla et 11 300 vers Ceuta. La plupart des personnes qui tentent d’entrer dans les enclaves sont originaires du Maroc, d’Algérie, de Tunisie et d’Afrique subsaharienne. Leurs voyages sont principalement motivés par le désir d’une vie meilleure.

Les migrants interceptés à la frontière sont généralement renvoyés au Maroc ou dans leur pays d’origine, sauf s’ils demandent l’asile ou s’ils sont mineurs. Toutefois, la vérification de ces demandes est difficile en raison du manque de documents, et les autorités espagnoles, auxquelles les lois internationales et nationales interdisent d’expulser les mineurs non accompagnés, sont tenues de les prendre en charge. Les demandeurs d’asile sont temporairement détenus pendant que leurs demandes font l’objet d’une évaluation juridique.

 

Migrants résidant dans le Centre de séjour temporaire de migrants (CETI) entrant dans la mairie de Ceuta, par Fotomovimiento, sous licence CC BY-NC-ND 2.0.

L’immigration clandestine, un embrouillamini de coopération et de conflit

Depuis les années 1990, alors que l’afflux de migrants augmentait, l’Espagne et le Maroc ont coopéré étroitement en matière de migration illégale et de contrôle des frontières, signant même un accord bilatéral en 1992 pour permettre à l’Espagne de demander la réadmission de migrants provenant du Maroc. Au fil du temps, l’Espagne s’est de plus en plus appuyée sur le Maroc pour gérer des portions importantes de sa frontière, une délégation soutenue par l’UE, qui a renforcé ses relations avec le Maroc en tant qu’allié essentiel dans la gestion de l’immigration clandestine. Cette collaboration comprend un soutien financier et politique, comme le programme d’aide de 148 millions d’euros en 2018 pour améliorer la gestion des frontières du Maroc, ainsi que des projets cofinancés par l’Espagne et l’UE pour renforcer les barrières frontalières autour des enclaves.

Si la dépendance de l’Espagne à l’égard du Maroc pour la gestion de ses frontières favorise la coopération, elle a également créé une dépendance stratégique que le Maroc a de plus en plus exploitée ces dernières années. Le Maroc a utilisé la gestion de l’immigration clandestine comme un outil pour exercer une pression politique et faire avancer ses revendications territoriales, notamment en ce qui concerne le Sahara occidental. Le Sahara occidental est un territoire contesté d’Afrique du Nord-Ouest revendiqué par le Maroc et par le peuple sahraoui, qui cherche à obtenir l’autodétermination par l’intermédiaire du Front Polisario.

L’exploitation par le Maroc de la dépendance stratégique de l’Espagne est devenue évidente en avril 2021 lorsque, en réponse à la décision de l’Espagne de fournir un traitement médical au chef du Front Polisario, Brahim Ghali - un acte que le Maroc considérait comme une atteinte à ses revendications de souveraineté - le Maroc a délibérément relâché ses contrôles frontaliers, permettant à environ 8 000 migrants d’entrer à Ceuta. La crise s’est aggravée, poussant l’Espagne à déployer son armée et déclenchant une impasse diplomatique majeure entre les deux pays. Le Parlement européen est intervenu, reconnaissant que le Maroc manipulait l’immigration clandestine comme un outil de pression géopolitique. L’assouplissement délibéré des contrôles frontaliers par le Maroc met en évidence l’équilibre délicat que doit trouver l’Espagne entre la coopération avec le Maroc en matière d’immigration clandestine et la lutte contre ses manipulations politiques.

La stratégie d’apaisement de l’Espagne

Au lieu d’adopter une position ferme contre l’utilisation par le Maroc de l’immigration clandestine comme monnaie d’échange géopolitique, l’Espagne a poursuivi une stratégie d’apaisement ces dernières années, en accordant des concessions au Maroc et en évitant les actions susceptibles de le provoquer. Cette approche est devenue particulièrement évidente en 2022, lorsque l’Espagne a approuvé le plan d’autonomie du Maroc pour le Sahara occidental, soutenant ainsi la souveraineté marocaine sur le territoire et abandonnant des décennies de neutralité.  


Pedro Sanchez rencontre le Premier ministre du Maroc, Saadeddine Othmani, dans le cadre de la Conférence intergouvernementale sur le Pacte mondial sur les migrations qui s’est tenue à Marrakech, en 2018. Photo de La Moncloa - Gobierno de España, sous licence CC BY-NC-ND 2.0.

La nouvelle stratégie d’apaisement de l’Espagne a été renforcée lors d’un sommet à Rabat en 2023. Le Premier ministre espagnol Pedro Sanchez a exprimé l’intention de l’Espagne de réinitialiser et de réparer les relations avec le Maroc, en s’engageant au « respect mutuel » et à éviter les actions qui pourraient offenser « l’autre partie » ou les « sphères de souveraineté respectives » de l’une ou l’autre nation.

Cette stratégie d’apaisement a influencé le comportement politique au niveau national, le Parti socialiste ouvrier de Sanchez restant silencieux ou votant contre les résolutions critiques à l’égard du Maroc. En février 2023, le parti de Sanchez a notamment voté [aux côtés des députés du Rassemblement National français, NdlT] contre une résolution du Parlement européen exhortant le Maroc à respecter les droits humains. En poursuivant son objectif d’apaisement par-dessus tout, l’Espagne a compromis son engagement en faveur des droits humains, exposant une contradiction entre son image de défenseure ces derniers et ses actions dans ce contexte.

Les remarques de Sanchez soulignent les efforts de l’Espagne pour se positionner comme un partenaire mature et coopératif, prêt à faire des concessions sur les exigences politiques du Maroc en échange de la coopération de ce dernier sur des questions telles que la gestion de l’immigration clandestine, tout en plaidant subtilement pour une responsabilité réciproque de la part du Maroc.

En toute justice pour le Maroc, la stratégie d’apaisement de l’Espagne ne repose pas uniquement sur l’utilisation par le Maroc de la gestion de l’immigration clandestine comme monnaie d’échange. Elle reflète également l’alignement du Maroc sur les ambitions énergétiques de l’Espagne. Dans le contexte de la guerre entre la Russie et l’Ukraine, les pays européens sont à la recherche de sources d’énergie alternatives, et le potentiel d’énergie renouvelable du Maroc ainsi que sa position stratégique en font un partenaire clé. L’Espagne, qui aspire à devenir une plaque tournante de l’énergie en Europe, a renforcé ses liens énergétiques avec le Maroc, continuant à rechercher l’apaisement non seulement pour faire face à l’immigration clandestine, mais aussi pour soutenir sa stratégie énergétique plus large. [en 2030, 50% de l’énergie éolienne produite par le Maroc devrait provenir du Sahara occidental occupé, NdlT]

L’utilisation par le Maroc de l’immigration clandestine comme monnaie d’échange s’est avérée efficace, en particulier dans le contexte actuel de l’UE, où la montée des mouvements d’extrême droite et le soutien croissant aux partis politiques d’extrême droite ont entraîné une évolution vers des politiques d’immigration clandestine plus dures et plus sécuritaires parmi les États membres. Dans ce contexte, le Maroc peut tirer parti de son contrôle sur les flux migratoires illégaux dans les enclaves espagnoles pour exercer une plus grande influence sur l’Espagne et d’autres États de l’UE - en l’utilisant finalement comme un outil pour faire avancer ses intérêts politiques et territoriaux.



21/09/2022

FARAH STOCKMAN
Le “déferlement de migrants” sur Martha's Vineyard met en lumière une vérité : le système d'immigration usaméricain est obsolète

Farah Stockman, The New York Times, 16/9/2022
Traduit par
Fausto Giudice, Tlaxcala

Farah Stockman (1974) a rejoint le comité de rédaction du New York Times en 2020 après avoir couvert la politique, les mouvements sociaux et les questions “raciales” pour le desk national. Elle avait auparavant passé 16 ans au Boston Globe, dont près de la moitié en tant que journaliste de politique étrangère à Washington. Elle a effectué des reportages en Afghanistan, au Pakistan, en Iran, au Sud-Soudan, au Rwanda et à Guantánamo Bay. Elle a également été chroniqueuse et membre du comité de rédaction du Globe, remportant un prix Pulitzer pour ses commentaires en 2016. Elle est l'auteure de American Made : What Happens to People When Work Disappears,
sur les ouvriers de l'usine de roulements à billes Rexnord à Indianapolis et les raisons de leur vote pour Trump, suite aux menaces de fermeture et de délocalisation à Monterey au Mexique, qui ont été effectivement mises à exécution. @fstockman

Depuis avril, le gouverneur Greg Abbott du Texas a fait transporter en bus plus de 7 900 migrants de l'État vers Washington, D.C. En août, il a commencé à envoyer des migrants à New York. Maintenant, le gouverneur de la Floride, Ron DeSantis, s'y met aussi, en envoyant deux cargaisons de migrants à Martha's Vineyard*, dans le Massachusetts. À en croire Mister Abbott, il veut ainsi  percer à jour le bluff des maires des États bleus (démocrates) qui prétendent accueillir à bras ouverts les immigrants sans papiers. Cela fait également partie d'un plan républicain pas si secret que ça, visant à attiser la colère du populo contre les démocrates avant les élections de mi-mandat.

Des immigrés se rassemblent le 14 septembre avec leurs affaires devant l'église épiscopale St Andrews à Edgartown, sur Martha's Vineyard. Photo Ray Ewing / Vineyard Gazette via AP

 Politicaillerie mise à part, une chose est claire : notre système d'immigration est depuis longtemps surchargé et obsolète, et la procédure d'asile est une grande partie de ce qui ne fonctionne pas. Le nombre de nouvelles demandes d'asile déposées devant les tribunaux usaméricains de l'immigration a explosé, passant de 32 895 pour toute l'année 2010 à 156 374 en 2022 - à quatre mois de la fin de l’année. Cela s'explique en partie par le fait que les conflits et le Covid ont créé une migration massive à travers le monde. Les tribunaux de l'immigration n'ont pas été en mesure de faire face à l'afflux de nouveaux arrivants. En 2010, il y avait un arriéré d'environ 100 000 dossiers d'asile en cours de traitement. Aujourd'hui, ce chiffre est passé à plus de 660 000. Si l'on inclut d'autres types d'affaires, comme les ordres d'expulsion, les dossiers en souffrance dans les tribunaux de l'immigration ont atteint plus de 1,8 million.

Ces chiffres reflètent un récent pic de migration. Au cours des deux dernières années, environ un million de personnes ont été autorisées à entrer dans le pays pour attendre une audience devant un tribunal de l'immigration, selon un rapport récent de ma collègue du Times, Eileen Sullivan. Chaque personne a eu un an pour déposer une demande d'asile. Ce n'est pas seulement un phénomène de l'ère Biden : un nombre similaire a été admis par l'administration Trump pendant une période de 24 mois en 2018 et 2019, lors de la dernière grande poussée migratoire.

Combinés, ces chiffres ont brisé le système. Bien que les audiences de demande d'asile soient censées se tenir dans les 45 jours suivant le dépôt d'une demande, le temps d'attente actuel pour une audience de demande d'asile est en moyenne de près de quatre ans et demi, selon les données des chercheurs compilées au centre TRAC de l'université de Syracuse. Plus la résolution d'un cas est longue, plus il peut être difficile de renvoyer les personnes dont la demande d'asile a été rejetée, comme cela s'est produit dans plus de la moitié des cas d'asile l'année dernière. Selon les prévisions, plus de 745 000 procédures d'expulsion seront engagées en 2022, soit plus du double de toutes les autres années, à l'exception de 2019. Les longs retards dans la résolution des dossiers d'asile sont devenus une crise grave et auto-entretenue : ces délais incitent les gens à déposer des demandes d'asile infondées, sachant que cela leur fera gagner des années, même s'ils sont finalement expulsés.

 

DeSantis déporte des dizaines d'immigrants
"Bienvenue à Marth's Vineyard ! Quoi que vous aimiez faire -pêcher, vous balader, faire du shopping, vous réunir, créer, manger, vous relaxer -, vous pouvez vous y livrer sans contraintes"

Dessin de Randall Enos

Le problème vient en partie du fait que l'asile est l'une des rares voies légales que les personnes économiquement désespérées peuvent utiliser pour obtenir la permission de vivre et de travailler aux USA. En vertu de la législation usaméricaine et des conventions des Nations unies établies au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, les personnes qui expriment une « crainte fondée d'être persécutées pour des raisons de race, de religion, de nationalité, d'appartenance à un groupe social particulier ou d'opinions politiques » sont autorisées à attendre que leur dossier d'asile soit jugé aux USA, où elles peuvent demander l'autorisation de travailler 150 jours après avoir déposé leur demande d'asile. Les documents d'autorisation de travail doivent être renouvelés tous les deux ans, ce qui crée une autre montagne de paperasse que la bureaucratie doit gérer.

Les demandeurs d'asile dont le dossier est authentique sont parmi les plus lésés par les fausses demandes, qui augmentent considérablement le temps qu'ils doivent attendre pour obtenir une protection juridique.

L'administration Trump a essayé un certain nombre de méthodes pour décourager les gens de déposer de nouvelles demandes d'asile, notamment en obligeant certaines personnes à rester au Mexique pendant qu'elles demandent l'asile aux USA. Néanmoins, les demandes d'asile ont en fait fortement augmenté sous le président Donald Trump, en partie en raison d'une poussée migratoire, mais aussi comme moyen de défense contre ses efforts accrus pour expulser les gens.

L'épidémie mondiale de Covid-19 a présenté une nouvelle opportunité de réduire les demandes d'asile. Le Titre 42 [du Code des USA], la politique de santé publique liée à la pandémie que l'administration Trump a instituée en mars 2020, a permis aux responsables usaméricains d'expulser rapidement les migrants à la frontière sans leur accorder la possibilité de déposer une demande d'asile. Beaucoup sont repoussés au Mexique, ce qui les expose à davantage de danger. L'administration Biden a annoncé qu'elle rouvrirait le traitement des demandes d'asile à la frontière et chercherait à mettre fin à l'utilisation du Titre 42, mais plus de 20 procureurs généraux républicains ont intenté une action en justice pour maintenir le Titre 42 en place, alors même que certains d'entre eux s'opposaient à d'autres efforts de prévention du Covid et insistaient sur le fait que la pandémie était exagérée. Jusqu'à présent, les efforts de l'administration pour modifier cette politique ont été bloqués par un juge fédéral.

Le Titre 42 finira par être levé ; à ce moment-là, le pays s'appuiera sur le Titre 8 [du Code des USA], l'autorité prépandémique en vertu de laquelle les agents usaméricains peuvent rapidement expulser ou mettre à l'amende les personnes prises en flagrant délit d'entrée illégale aux USA, à moins qu'elles ne soient jugées éligibles pour demander l'asile. Cela est juste ; un système bien géré doit être habilité à rejeter et à expulser rapidement les personnes dont la demande est infondée, tout en mettant en relation les personnes dont le cas est authentique avec des réseaux de soutien social. À cet égard, l'administration Biden n'a pas reçu le crédit qu'elle mérite pour un changement de règle important, bien que sous-estimé, qui pourrait remanier le système. Cet été, des agents d'asile formés ont statué sur certaines demandes d'asile dans une poignée de centres de détention de l'ICE (Police de l’immigration et des Frontières) au Texas, soulageant ainsi les tribunaux de l'immigration. Les demandeurs d'asile dont la demande est rejetée peuvent toujours faire appel auprès d'un juge. L'espoir est que les décisions rapides concernant les nouveaux cas empêcheront l'arriéré de s'accroître et décourageront les demandes fausses ou sans fondement.

La nouvelle règle n'est pas le tapis de bienvenue que de nombreux militants des droits des immigrants attendaient de l'administration Biden après quatre années de présidence Trump. Elle n'est pas non plus le traitement de tolérance zéro que de nombreux républicains considèrent comme le seul moyen de dissuader les migrants de s'amasser à la frontière. Mais il s'agit d'une politique saine fondée sur des recommandations et des recherches approfondies menées par des groupes respectés, notamment le Migration Policy Institute, un organisme non partisan. À une époque où presque tout ce que fait un président en matière d'immigration lui attire des poursuites judiciaires, elle a été soigneusement rédigée pour être le plus à l'abri possible des litiges. Combiné aux efforts bipartites visant à augmenter la capacité de traitement des non-citoyens à la frontière dans des centres d'accueil regroupant tous les départements et agences concernés sous un même toit, il pourrait finalement transformer un système défaillant en un système beaucoup plus efficace, moderne et équitable.

À une époque où les USAméricains sont déjà en désaccord entre eux sur ce que nous pourrions appeler les valeurs fondamentales - les croyances culturelles qui soudent notre pays - il est raisonnable de s'inquiéter de savoir si l'ajout de nouveaux arrivants au mélange compliquera la tâche de forger un avenir commun. Pourtant, il s'agit également d'une question qui touche au cœur de notre identité et qui nous permet de savoir si nous continuerons à être un endroit où les masses fatiguées, pauvres et entassées du monde peuvent obtenir une seconde chance. Pour être fidèles à notre identité de pays pluraliste, nous avons besoin d'un système d'asile qui garantisse que les personnes qui remplissent les conditions requises pour bénéficier d'une protection puissent l'obtenir - tout en réduisant au minimum les abus du système par ceux qui essaient simplement de passer la ligne.

NdT

Martha's Vineyard (« Le Vignoble de Martha ») est une île de l'État du Massachusetts, à 6 km de Cape Cod, au sud de Boston et à l’est de Newport. L'île est surtout connue comme résidence d'été de la jet set et des présidents  usaméricains, une mode lancée par Ulysses Grant en 1874 et suivie entre autres par Kennedy, Clinton et Obama, qui a été critiqué pour cela pendant la récession de 2007 à 2012. En 2019, les Obama y ont acheté un sam'suffit de 640 mètres carrés sur un terrain de 12 ha pour la modique somme de 11,75 millions de $. De quoi loger plusieurs centaines de migrants...

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