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26/03/2024

FRANCESCA ALBANESE
Anatomie d'un génocide: rapport au Conseil des droits de l'homme de l'ONU

On trouvera ci-après, traduit par nos soins, le rapport présenté ce mardi  26 mars au Conseil des droits de l'homme de l'ONU, à Genève, par Francesca Albanese,  Rapporteuse spéciale sur la situation des droits de l’homme dans les territoires palestiniens occupés depuis 1967




21/07/2022

PIERO FASSINO
Sur la question israélo-palestinienne
Réponse à Francesca Albanese

Piero Fassino, il manifesto, 17/7/2022
Traduit par
Fausto Giudice, Tlaxcala

Une réponse du président de la Commission des Affaires étrangères du parlement italien à l’article de la Rapporteuse spéciale des Nations Unies

Le 13 juillet, il manifesto intitulait l'article de Francesca Albanese « Parler de la Palestine aujourd'hui est impossible, même au Parlement ». Au Parlement, en revanche, on en parle, à tel point que l'audition de l'avocate Albanese - rapporteur du Conseil des droits de l'homme des Nations unies dans les territoires palestiniens - sera suivie d'auditions des ambassadeurs de Palestine et d'Israël et des organisations de la société civile palestinienne et israélienne. Et à la fin, la Commission examinera les résolutions présentées par les différents groupes sur le conflit israélo-palestinien. Lors de son audition, l'avocate Albanese a fait un rapport large et détaillé, qui a été suivi d'un débat au cours duquel j'ai également exprimé mes considérations dans une confrontation où il est légitime d'exprimer des opinions différentes. Si la polémique que nous avons eue a suscité un malaise chez l'avocate Albanese, je le regrette car j'ai du respect et une pleine considération pour son rôle et son dévouement. De cette diversité d'opinions a cependant émergé une représentation de mes positions que je souhaite réfuter. Je m’occupe du Moyen-Orient depuis plus de 40 ans, cultivant au fil des ans des relations amicales et positives avec tous les principaux protagonistes - d'Arafat et Abou Mazen à Shimon Peres en passant par Yossi Beilin - poursuivant toujours un objectif : une solution de paix et coexistence avec un État palestinien indépendant aux côtés d'un État sûr d'Israël reconnu par ses voisins, comme convenu à Oslo et Washington entre Rabin et Arafat.

C'est pourquoi je n'ai jamais manqué de dénoncer l'illégitimité des actes posés par les autorités israéliennes, tels que les implantations de colons en Cisjordanie, le projet d'annexion de la vallée du Jourdain, la violation des droits des citoyens palestiniens à Jérusalem-Est, la négation de la double identité de Jérusalem et les mesures restrictives imposées à la population palestinienne.

Mais précisément parce que je me bats pour une paix juste, je ne partage pas un portrait diabolisant d'Israël. C'est une chose de critiquer et de s'opposer à ceux qui, en Israël, empêchent toute solution de paix. C'est tout autre chose de combattre Israël en tant que tel. Herzog, Lapid, Gantz, Peretz ne peuvent être associés à Nethanyahou, tant ils sont sur des fronts politiques opposés. La majorité actuelle du gouvernement israélien comprend également la gauche, qui a toujours été en faveur de la solution 2 peuples/2 États. Et s'il y a un représentant d'un parti arabe dans la coalition gouvernementale actuelle, il est difficile d'accepter la définition d'Israël comme un État raciste.

Israël est une société complexe avec un melting-pot d'identités d'origine diverses. Un pays démocratique - il n'y en a pas beaucoup dans la région - qui fait l'expérience de la dialectique physiologique de la démocratie, avec une droite et une gauche, avec des fondamentalismes religieux et des secteurs laïques solides, avec des secteurs favorables à la naissance d'un État palestinien et d'autres méfiants ou opposés. Une société qui compte parmi ses intellectuels les plus prestigieux Amos Oz, Abraham Yeshoua [sic : c’est Yehoshua, NdT] et David Grossman, qui ont constamment prôné la paix et la coexistence entre Juifs et Palestiniens.

En outre, une nation qui a longtemps été niée par ses voisins et qui n'a obtenu la reconnaissance de ses adversaires qu'avec la conférence de Madrid d'abord et les accords d'Oslo ensuite. Je ne crois vraiment pas que ce soit une lecture correcte et utile de faire porter toute la responsabilité à Israël - sans aucune distinction - comme s'il n'y avait pas dans le camp palestinien ceux qui - parlerons-nous du Hamas ou du FPLP ? - manifestent un rejet idéologique du droit à l'existence d'Israël.

Lorsque je dis que les institutions internationales doivent avoir un profil d’impartialité, je ne propose ni la neutralité ni l'agnosticisme politique. Au contraire, je plaide en faveur d'une "impartialité active" qui - en utilisant les instruments du droit et de la politique - promeut et encourage le dialogue, la reconnaissance mutuelle, le partage et le respect des accords, car cela me semble être la seule voie - que je sais malaisée et difficile - pour sortir d'une impasse qui se prolonge depuis des décennies avec des souffrances et des tragédies. Et il ne peut y avoir de paix que si elle est fondée sur la reconnaissance mutuelle de deux droits qui sont tous deux légitimes : parce que l'aspiration des Palestiniens à avoir une patrie indépendante est un droit légitime, et que la demande d'Israël de vivre en sécurité et d'être reconnu par ses voisins est un droit légitime. Privilégier l'un des deux droits et nier l'autre ne permet pas la paix. Simul stabunt et simul cadent [On tiendra ensemble ou bien on tombera ensemble.] Et pour cette solution, je continuerai, avec beaucoup d'autres, à me battre.

 

 

 Piero Fassino est l'un des fondateurs de "Sinistra per Israele" (Gauche pour Israël)

15/07/2022

FRANCESCA ALBANESE
Parler de la Palestine aujourd'hui est impossible, même au Parlement italien

 Francesca Albanese, il manifesto, 13/7/2022
Traduit par
Fausto Giudice, Tlaxcala

Francesca Albanese est une avocate internationale et chercheuse italienne spécialisée dans les droits humains et les réfugiés. Elle est, depuis mai 2022, rapporteuse spéciale de l’ONU sur la situation des droits de l’homme dans les territoires palestiniens occupés depuis 1967. @FranceskAlbs

Invitée par la Commission des Affaires étrangères du parlement italien, le 6 juillet dernier, pour parler de la situation des droits humains en Palestine, (vidéo) Francesca Albanese y a fait l’objet d’une attaque virulente de la part du « démocrate » (ex-communiste) Piero Fassino, président de la commission, qui l’a accusée d’ « unilatéralisme » propalestinien, déformant les propos qu’elle avait tenu dans une interview en juin dernier. Voici la réponse de Francesca Albanese. On peut lire la réponse de Fassino à cet article ici-FG

Moyen-Orient : après l'attaque de M. Fassino devant la commission des affaires étrangères de la Chambre des députés, la difficulté de parler de la question palestinienne, même selon les règles du droit, apparaît clairement : l'idée que le droit international est contraignant pour les ennemis et facultatif pour les alliés est une déclinaison dangereuse du concept d'autonomie de la politique, qu'en tant que juriste je ne peux m'empêcher de condamner...

La Palestine - c'est-à-dire ce qui est resté de la Palestine historique lors de la création de l'État d'Israël en 1948 -, comprenant la Cisjordanie, Jérusalem-Est et la bande de Gaza, est une terre qu'Israël occupe militairement depuis 1967.

Il convient de rappeler d'emblée que le droit international n'admet les occupations militaires que sous une forme limitée dans le temps, avec des contraintes précises pour protéger la population sous occupation et, surtout, sans jamais transférer la souveraineté à la puissance occupante.

L'État d'Israël viole systématiquement ces principes depuis 1967, par le biais du transfert continu de civils et de la construction de colonies en Palestine occupée. Au cours des dernières décennies, ces violations ont été condamnées à maintes reprises par les principales institutions internationales, et plus récemment par le Conseil de sécurité des Nations unies.

Les organisations humanitaires s'accordent à dire que cette occupation est illégitime et illégale, car elle est menée par un usage interdit de la force armée et dans le but d'annexer le territoire palestinien à l'État d'Israël et de déplacer les Palestiniens qui y vivent. Face à cette réalité largement documentée, il est nécessaire que la politique se conforme aux préceptes du droit international, en sanctionnant Israël et en soutenant les Palestiniens dans le processus d'autodétermination qui leur est assigné non pas par telle ou telle faction politique, mais par les principes les plus fondamentaux de la communauté internationale.

C'est dans cet esprit que j'ai assumé, il y a deux mois, le rôle de rapporteuse spéciale des Nations unies sur les droits de l'homme dans le territoire palestinien occupé, qui m'a été confié par le Conseil des droits de l'homme des Nations unies. Avec le défi et l'honneur supplémentaires d'être la première femme à occuper ce poste délicat, j'ai assumé cette responsabilité en étant pleinement consciente des difficultés que j'allais rencontrer.

La première difficulté est qu'au cours des 30 dernières années, les droits du peuple palestinien ont cessé de faire la une des journaux, bien que la Palestine reste le théâtre d'un affrontement acharné entre la justice et la prévarication, le droit et l'abus, la légalité et, hélas, la realpolitik inspirée uniquement par les rapports de force. Deux mois après le début du mandat, j'ai évoqué l'impossibilité de discuter de la Palestine en suivant une approche strictement juridique.

Face à quiconque oppose à la logique des rapports de force une éthique guidée par la force du droit, un rideau d'hostilité et souvent de violence verbale tombe au nom de la défense idéologique de la politique de l'État d'Israël.

J'en veux pour preuve mon audition, le 6 juillet, devant la Commission des affaires étrangères de la Chambre des députés, qui m'avait invité à rendre compte de la situation couverte par mon mandat. Après mon intervention, dont il avait manifestement écouté peu et compris encore moins, le président de la Commission, Piero Fassino, au lieu de modérer le débat afin d'acquérir des éléments utiles pour les délibérations parlementaires, s'est lancé dans un j'accuse contre moi aussi inopportun qu'injustifié.

L'accusation portait sur mon prétendu manque d’ « imparttialité », manifestement pour ne pas avoir mis sur un pied d'égalité l'occupant et l'occupé, le colonisateur et le colonisé, dans mon discours sur les abus continus des forces israéliennes contre les Palestiniens. Le respect de toute critique fait partie intégrante de mon interprétation du mandat qui m'a été confié. Cependant, j'ai le devoir premier, précisément sur la base de ce mandat, de dénoncer les violations du droit international.

Bien que je me sois limitée à cette tâche consciencieuse lors de l'audience, M. Fassino, manifestement irrité par l'exercice de mes fonctions institutionnelles, est allé jusqu'à m'attribuer des phrases contenant des formes de légitimation de la violence que je n'ai jamais prononcées et qu'aucun intervieweur n'a jamais transcrites. La revue Altraeconomia l'a rapidement démontré en rapportant mes déclarations originales condamnant la spirale de violence perpétuée par l'occupation, habilement décontextualisées par M. Fassino.

En critiquant ma focalisation excessive « sur la donnée juridique », M. Fassino a également minimisé le rôle central du droit international dans la résolution des conflits, qui fait pourtant partie intégrante de l'ordre républicain.

L'idée que le droit international est contraignant pour les ennemis et facultatif pour les alliés est une déclinaison dangereuse du concept d'autonomie de la politique, qu'en tant que juriste je ne peux m'empêcher de condamner.

Comme le rappelle Edward Said, une lutte pour les droits se gagne « avec les armes de la critique et l'engagement de la conscience ». Et c'est ce que je continuerai à promouvoir dans l'exécution de mon mandat, un débat sain, pluraliste et informé sur la question israélo-palestinienne, à partir - quelles que soient les lectures historiques et politiques du « conflit » et de ses racines - de la force régulatrice du droit international, seule boussole possible dans les ténèbres fomentées par plus d'un siècle de realpolitik.