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15/12/2024

ZVI BAR’EL
La Syrie pourrait devenir un protectorat turc, ce qui limiterait la liberté d’action d’Israël

La Turquie, qui a un intérêt stratégique à faire de la Syrie un rempart contre les Kurdes, cherche à prendre la place de la Russie et de l’Iran, notamment en contrôlant l’espace aérien syrien.

Zvi Bar’el, Haaretz , 15/12/2024
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala 


Des membres de la communauté syrienne d’Istanbul célèbrent la chute du régime Assad, la semaine dernière. Photo Yasin Akgul/AFP
 

Un jour après qu’Israël a pris le contrôle du Mont Hermon syrien et des zones autour de Quneitra, le nouveau gouvernement syrien dirigé par Ahmed Hussein al-Chara (alias Abou Mohammed al-Joulani) a rapidement envoyé deux lettres au Conseil de sécurité et au secrétaire général de l’ONU, demandant à Israël de retirer ses forces du territoire syrien et de cesser ses attaques.

« La République arabe syrienne entame un nouveau chapitre de son histoire, son peuple aspirant à construire un État fondé sur la liberté, l’égalité, l’État de droit et la réalisation de ses espoirs de stabilité et de paix. Pourtant, en ce moment même, l’armée israélienne a envahi de nouvelles zones du territoire syrien dans les provinces de Jebel El Cheikh [nom arabe du Mont Hermon] et de Quneitra », peut-on lire dans la toute première lettre du gouvernement au Conseil de sécurité.

Lors de sa visite sur le plateau du Golan dimanche dernier, le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou n’a laissé aucune place au doute : « L’accord de 1974 qui établissait la séparation des forces entre Israël et la Syrie par le biais d’une zone tampon s’est effondré... Les soldats syriens ont abandonné leurs postes. Nous ne permettrons à aucune force hostile de s’établir le long de notre frontière ». Jeudi, Walla News a rapporté que Netanyahou avait informé le conseiller à la sécurité nationale des USA, Jake Sullivan, que les forces de défense israéliennes resteraient dans la zone tampon syrienne « jusqu’à ce qu’une force capable de faire respecter l’accord de séparation soit établie ».

Il s’agit du deuxième accord international régional violé par Israël, après sa prise de contrôle du corridor Philadelphie et le déploiement de forces à Gaza - des actions qui, selon l’Égypte, violent à la fois les accords de Camp David et l’accord de 2005 sur les déplacements et l’accès. Les situations sont toutefois différentes. Avec l’Égypte, Israël maintient des négociations en cours.
Par le passé, il a même permis aux forces égyptiennes de dépasser les limites de Camp David en renforçant leur présence militaire dans le Sinaï, y compris par l’utilisation de la puissance aérienne, pour combattre les organisations islamistes dans la péninsule. En revanche, Israël ne dialogue pas avec la Syrie et n’a pas l’intention de se retirer dans un avenir prévisible des territoires qu’il a récemment saisis.
La déclaration d’al-Chara, samedi, selon laquelle « dans l’état d’affaiblissement où se trouve la Syrie, elle n’a pas l’intention d’entrer dans une confrontation militaire... et nous n’avons aucun intérêt à entrer en conflit avec Israël » n’est pas de nature à rassurer Israël ou à modifier sa position concernant les territoires occupés.

Une course à la normalisation
Contrairement à la liberté d’action pratiquement illimitée d’Israël à Gaza - soutenue par la légitimation internationale et arabe pour agir avec force contre le Hamas, mais pas contre les civils -, sa position à l’égard de la Syrie est nettement différente. Bien qu’Al-Chara et son gouvernement n’aient pas été élus démocratiquement et qu’ils soient arrivés au pouvoir par la force militaire, craignant une guerre civile potentielle, ils ont déjà acquis une grande crédibilité arabe et internationale. Il continue à renforcer ce soutien par des déclarations diplomatiques stratégiques qui laissent entrevoir les politiques qu’il entend mener, et ces efforts portent déjà leurs fruits.

Après avoir reçu les félicitations de grands États arabes comme l’Égypte, l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis, des mesures concrètes ont été prises. La Turquie a rouvert son ambassade à Damas samedi, et le Qatar devrait faire de même dimanche. Les pays européens semblent également prêts à normaliser leurs relations avec la Syrie après une interruption de 13 ans, d’autant plus que certains d’entre eux avaient déjà envisagé de rétablir des liens avec le régime d’Assad.
Le soutien international croissant au nouveau gouvernement syrien pourrait bientôt se traduire par des pressions sur Israël pour qu’il se retire des territoires nouvellement occupés. Contrairement au Hamas, qui fait face à un large consensus international [disons : occidental, NdT] contre son rôle dans la future gouvernance de Gaza, le Ha’yat Tahrir al-Cham de Syrie est de plus en plus considéré comme une autorité légitime - bien qu’il soit toujours inscrit sur la liste des organisations terroristes et que son chef fasse l’objet d’une prime de 10 millions de dollars.
La Turquie, qui dispose de l’influence la plus importante, se positionne pour diriger les efforts visant à normaliser les relations internationales du nouveau régime syrien. Cette position s’explique par de multiples facteurs : Le soutien de longue date de la Turquie aux milices de Ha’yat Tahrir al-Cham, son contrôle sur l’Armée nationale syrienne (anciennement l’Armée syrienne libre) et sa maîtrise des postes-frontières cruciaux qui constituent la ligne de vie économique de la Syrie.
La Turquie entend désormais jouer le rôle de principal protecteur de la Syrie que tenaient auparavant l’Iran et la Russie. Cela va au-delà de simples relations de « bon voisinage » entre pays frontaliers. La Turquie a un intérêt stratégique primordial : transformer la Syrie en un rempart contre les forces kurdes, qu’elle combat depuis des décennies. Alors que la Turquie a condamné l’incursion d’Israël sur le territoire syrien, elle a elle-même occupé par la force certaines parties du nord-ouest de la Syrie. La semaine dernière, les milices qui lui sont alliées se sont emparées de la ville de Manbij à l’ouest de l’Euphrate, un bastion kurde, et la Turquie ne cache pas son intention d’étendre ses opérations à l’est de l’Euphrate.
La question kurde devrait dominer les prochaines discussions turco-syriennes, car sa résolution est cruciale pour la capacité d’Al-Chara à établir un État unifié. Un accord réussi permettrait d’éviter que les conflits internes ne dégénèrent en affrontements armés entre le régime et la minorité kurde, de faciliter le retrait des forces turques de Syrie et d’apaiser les tensions entre les autres minorités religieuses et ethniques du pays.

La situation des Kurdes
Le Conseil d’administration autonome kurde, qui gouverne les provinces kurdes du nord de la Syrie, supervise les Forces démocratiques syriennes (FDS) - un corps militaire composé de combattants kurdes et arabes que les USA ont établi comme une force efficace contre ISIS. La semaine dernière, le Conseil a annoncé que « les provinces du nord et de l’est de la Syrie sont une partie inséparable de la géographie syrienne » et a décidé de hisser le nouveau drapeau syrien des rebelles sur tous les bâtiments publics. Cela montre que les Kurdes ont l’intention de continuer à faire partie de la Syrie plutôt que d’établir une région indépendante, en acceptant l’autorité du nouveau gouvernement.

Toutefois, les Kurdes, qui contrôlent la plupart des champs pétroliers et les principales régions agricoles de la Syrie, posent des conditions à cette acceptation. Un document circulant sur les médias sociaux jeudi, censé présenter des projets de demandes de négociation entre les forces kurdes et Hayat Tahrir al-Cham sous la supervision des USA, détaillait plusieurs points clés. Les Kurdes se retireraient de Deir ez-Zor, Raqqa et Tabqa en échange du retour des résidents kurdes à Afrin, Tel Abyad et Ras al-Ayn, occupés par les Turcs, ainsi que du retrait des Turcs de ces zones.
Parmi les autres revendications figurent la reconnaissance d’une gouvernance autonome kurde, une aide au retour des Kurdes déplacés dans les villes occupées par la Turquie, une représentation militaire kurde dans le gouvernement qui sera formé après mars 2025 (date limite fixée par Al-Chara pour le mandat du gouvernement temporaire), l’engagement de retirer toutes les forces turques et la reconnaissance du kurde en tant que deuxième langue officielle.
Bien que cette liste reste préliminaire et sujette à des négociations, elle illustre clairement l’ampleur des défis auxquels le gouvernement syrien est confronté s’il cherche une solution diplomatique plutôt que militaire. Al-Chara, pris entre les pressions turques et les exigences kurdes, doit naviguer prudemment sur ce terrain miné, en équilibrant les aspirations turques et les intérêts kurdes, tout en maintenant de bonnes relations avec la Turquie sans fragmenter l’État.
L’évolution des relations turco-syriennes pourrait avoir un impact significatif sur les opérations d’Israël en Syrie. Au-delà des efforts internationaux visant à retirer les forces de Tsahal de la zone tampon, la Turquie pourrait déterminer la liberté opérationnelle aérienne d’Israël en Syrie. Alors qu’Israël bénéficiait auparavant d’un accès presque illimité, coordonné avec le commandement russe, à la base aérienne de Khmeimim, les forces russes ont commencé à se retirer. La plupart des avions russes ont quitté la Syrie et Moscou négocie actuellement le maintien de sa présence navale dans le port de Tartous.
En l’absence des forces aériennes syriennes et russes, la Turquie pourrait devenir le contrôleur de facto de l’espace aérien syrien et, en partenariat avec le gouvernement syrien, mettre fin à la liberté opérationnelle d’Israël. Bien que le besoin d’Israël pour une telle liberté puisse diminuer de manière significative avec le départ de la plupart des forces iraniennes et l’intention d’al-Chara d’empêcher les activités du Hezbollah en Syrie, Israël reste sceptique quant à la capacité du nouveau gouvernement syrien à bloquer les transferts d’armes de la Syrie vers le Liban. Par conséquent, Israël devra probablement conclure des accords avec la Turquie - des accords qui pourraient avoir un coût politique dans d’autres régions, y compris à Gaza.

26/01/2023

ZVI BAR’EL
En ajoutant les Gardiens de la révolution islamique à la liste des terroristes, l’Europe pourrait en fait porter préjudice à Israël

Zvi Bar’el, Haaretz, 24/1/2023
Traduit par
Fausto Giudice, Tlaxcala

Tsahal et le Shin Bet pourraient se retrouver confrontés à de graves allégations si l’UE ajoute l’organisation iranienne à sa liste noire du terrorisme. L’atteinte aux droits humains et les ventes d’armes à des ennemis de l’UE sont susceptibles d’être incluses dans la définition élargie du terrorisme.

Le commandant des Gardiens de la révolution, Hossein Salami (au centre), en visite au Parlement de Téhéran, lundi. Photo : AFP

La résolution approuvée par le Parlement européen la semaine dernière, recommandant d’ajouter le Corps des gardiens de la révolution islamique d’Iran à la liste des groupes terroristes de l’Union européenne, a provoqué une tempête.

La résolution n’est pas contraignante et devra passer par un long processus juridique pour être mise en œuvre. Comme l’a déclaré le Haut représentant pour les Affaires étrangères de l’UE, Josep Borrell, après le vote, « C’est quelque chose qui ne peut être décidé sans un tribunal [de l’UE], une décision de justice d’abord. Vous ne pouvez pas dire : je vous considère comme un terroriste parce que je ne vous aime pas ».

Le ministre iranien des Affaires étrangères Hossein Amirabdollahian a rapporté que lors d’un appel téléphonique jeudi dernier avec Borrell, ce dernier lui a dit que la résolution ne serait jamais mise en application.

Le ministre iranien des Affaires étrangères, Hossein Amirabdollahian, s’adresse aux journalistes lors d’une conférence de presse conjointe avec son homologue libanais, Abdallah Bouhabib, à Beyrouth, au Liban, vendredi. Photo : Bilal Hussein/ AP

Pour les ministres des affaires étrangères de l’UE, il est beaucoup plus facile d’adopter un ensemble de sanctions supplémentaires contre l’Iran - ce qu’ils ont fait lundi - qui visent 37 personnalités gouvernementales connues pour avoir utilisé la force brutale contre des Iraniens participant aux manifestations qui ont suivi le meurtre de Mahsa Amini en septembre dernier. Des sanctions comme celles-ci ne nécessitent pas de grandes délibérations, elles sont faciles à mettre en œuvre et, surtout, elles ne perturbent pas le statu quo dans les relations entre l’Europe et l’Iran.

Ce ne sont pas les premières sanctions occidentales imposées en réponse à la répression des manifestations par Téhéran. Toutefois, la décision de l’Iran de mettre à mort au moins quatre des manifestants - en plus d’Alireza Akbari, qui avait été vice-ministre iranien de la Défense ainsi que citoyen britannique - a incité l’UE à intensifier ses actions contre le régime de Téhéran.

À la suite des actions iraniennes, l’opinion publique européenne est devenue encore plus hostile au régime. Mais les appels à ajouter le Corps des gardiens de la révolution à la liste des organisations terroristes de l’UE ont déjà suscité un débat, car le libellé de la résolution du Parlement européen justifie l’inscription des Gardiens de la révolution sur la liste en raison de leurs activités terroristes, de la répression des manifestants et de la fourniture de drones à la Russie.

La Grande-Bretagne, qui a imposé la semaine dernière ses propres sanctions à l’encontre de personnes et d’organisations iraniennes, a été avertie par un haut responsable des conséquences de la désignation des GRI comme organisation terroriste.

« Proscrire une entité étatique en vertu de la loi sur le terrorisme de 2000 s’écarterait de la politique britannique cohérente en vigueur depuis des décennies et remettrait en question la définition du terrorisme qui, jusqu’à présent, s’est avérée pratique et efficace », a déclaré Jonathan Hall, l’examinateur indépendant de la législation sur le terrorisme du gouvernement, dans un rapport obtenu par The Independent

« Si les forces de l’État sont capables d’être “impliquées dans le terrorisme”, la question de savoir comment la définition du terrorisme s’applique aux autres forces de l’État devra être abordée, au risque de bouleverser la signification établie du terrorisme dans le droit national », indique le rapport.

Israël devrait prêter une oreille attentive à l’avertissement de Hall, car une décision concernant les GRI pourrait avoir des répercussions sur les Forces de défense israéliennes et les services de renseignement israéliens. Ils pourraient eux aussi se retrouver accusés d’activités terroristes si la définition des GRI comme organisation terroriste est approuvée.

Défilé des Gardiens de la révolution à Téhéran. Photo : AP

Les pays de l’UE devront examiner les désignations comme terroristes à deux niveaux. Une première question est de savoir si un organe gouvernemental peut être désigné comme une organisation terroriste sans que cette désignation ne s’applique au gouvernement qui le gère. Une autre question est de savoir si la définition d’une organisation terroriste doit inclure les atteintes aux droits humains, la répression des manifestations et la vente d’armes à des ennemis de l’Europe. C’est ce dilemme qui pourrait créer un problème complexe pour Israël dans l’Union européenne.

Compte tenu des critiques sévères de l’Europe à l’égard de la politique israélienne dans les territoires, des violations des droits humains qui pourraient s’aggraver sous le nouveau gouvernement, des assassinats ciblés et des plans visant à réduire le pouvoir de la Cour suprême, il s’agit d’un débat important.

Jusqu’à présent, la Haute Cour de justice a servi de barrière défensive contre les interférences juridiques internationales. Comme l’ont suggéré le Parlement européen et de nombreux Britanniques, si la définition du terrorisme  est élargie, les parties intéressées dans l’UE et au Royaume-Uni seront en mesure de poursuivre les FDI, le Shin Bet et même des individus spécifiques.

Il serait bon que le ministre israélien des Affaires étrangères, Eli Cohen, qui avait initialement félicité le gouvernement britannique pour « son intention d’inscrire les Gardiens de la révolution sur la liste des organisations terroristes » et qui a été contraint de se rétracter après avoir appris qu’aucun changement n’était en vue, examine attentivement l’impact d’une telle décision pour Israël.

Outre le fait qu’ils sont aux prises avec des questions de droit et de principe, les pays européens craignent qu’une telle décision rende encore plus improbable la conclusion d’un accord. C’est particulièrement vrai pour l’Allemagne et la France, qui participent aux négociations sur le nucléaire iranien. Le ministre iranien des Affaires étrangères maintient que l’accord n’a pas encore expiré et que Washington prévoit de le renouveler.

En déplaçant le débat sur le statut des GRI devant les tribunaux, sans fixer de date d’audience ni de délai, l’UE s’offre une échappatoire facile. Maintenant, le groupe de travail de l’UE sur le terrorisme fera ses recommandations au Conseil européen (un forum des chefs d’État de l’Union), et ce n’est qu’alors qu’une décision finale sera prise.

La liste noire européenne du terrorisme a été créée après le 11 septembre. Elle comprend aujourd’hui 13 personnes et 21 organisations, mais la liste n’est pas figée et est mise à jour tous les six mois. Certaines organisations peuvent être retirées de la liste - tant de la version européenne que de la version usaméricaine - pour des raisons politiques, comme lorsque le président Joe Biden a retiré les rebelles yéménites de la liste usaméricaine pour permettre des négociations avec eux en vue d’un cessez-le-feu.

De même, il convient de se demander pourquoi les talibans ne figurent pas sur la liste usaméricaine malgré leur longue histoire d’actes de terreur contre les forces US en Afghanistan et leur répression brutale des droits humains. De plus, les USA ont négocié un accord avec les talibans pour se retirer de l’Afghanistan, qui comprenait une clause selon laquelle les forces usaméricaines ne seraient pas attaquées pendant leur retrait.

Washington entretient des liens étroits avec le gouvernement libanais et aide son armée, même si le Hezbollah, qui figure sur la liste usaméricaine des organisations terroristes, est représenté au sein du cabinet et participe activement aux activités gouvernementales.

L’inscription du Corps des gardiens de la révolution islamique sur la liste noire usaméricaine n’a pas empêché Washington de négocier avec Téhéran un nouvel accord nucléaire. Si un accord est finalement conclu, la désignation n’empêchera pas les USA de le signer.

Téhéran a également fermé les yeux sur la liste noire. Dans un premier temps, il a exigé le retrait des GRI de la liste noire comme condition à la poursuite des négociations sur le nucléaire. Selon les dirigeants iraniens, la levée des sanctions économiques sévères qui lui sont imposées est plus importante que le fait que les GRI figurent ou non sur la liste noire du terrorisme. En définitive, le débat sur le statut des Gardiens de la révolution pourrait contraindre les gouvernements à reconsidérer ces listes.

 

01/09/2021

ZVI BAR'EL
Une nouvelle série Netflix sur des lycéennes jordaniennes suscite la colère d’Arabes du monde entier

Zvi Bar'el, Haaretz, 23/8/2021
Traduit par
Fausto Giudice, Tlaxcala

La série à succès de Netflix « AlRawabi School for Girls » révèle à la fois la domination totale des hommes et l'hypocrisie des mères, plus préoccupées par les ragots que par les cicatrices émotionnelles de leurs filles.

 

Une scène de la mini-série Netflix de 2021 « AlRawabi School for Girls ». Photo : Netflix

Mariam ne savait pas qu'un piège lui avait été tendu. Elle a reçu un message WhatsApp de trois filles de sa classe l'"invitant" à se rendre à un endroit où était garé un vieux bus scolaire. Alors qu'elle cherchait ses camarades de classe, elles ont soudainement fait irruption derrière elle, l'ont poussée, l'ont battue et lui ont donné des coups de pied sur tout le corps et l'ont jetée sur un rocher dentelé qui se trouvait sur la route.

Mariam (Andria Tayeh) a été assommée, le sang coulant de sa tête. Heureusement, une autre camarade de classe a vu l'incident ; elle a appelé une ambulance et a sauvé la vie de Mariam. Cette scène impressionnante est le point culminant du premier épisode de la nouvelle série Netflix "AlRawabi School for Girls", qui a connu un grand succès en Jordanie et dans la plupart des pays arabes.

Il faut dire que la série n'est pas un chef-d'œuvre. La mise en scène de la cinéaste jordanienne Tima Shomali, qui a créé la série avec Shirin Kamal, a besoin d'être peaufinée. Les erreurs de scénario sont évidentes et parfois ridicules, le jeu des actrices trahit leur manque d'expérience, et la série dans son ensemble est moins que la somme de ses parties.

Mais ceci n’est pas une critique de film. L'essentiel est que la série, qui parvient à maintenir la tension, tend un miroir à la société arabe, à la Jordanie en particulier.

 

25/07/2021

ZVI BAR'EL
Israël était-il au courant des cibles de surveillance des clients de NSO ?

 A-t-il approuvé, ou était-il censé approuver, la vente du logiciel à chacun des clients de NSO ? A-t-il initié la mise sur écoute des cibles par le biais de NSO et de ses clients ?

Zvi Bar’el צבי בראל , Haaretz, 23/7/2021

Traduit par Fausto Giudice

Zvi Bar'el est l'analyste des affaires du Moyen-Orient pour le quotidien israélien Haaretz. Il est chroniqueur et membre du comité éditorial. Auparavant, il a été directeur de la rédaction du journal, correspondant à Washington et a également couvert les Territoires occupés.
Bar'el travaille pour Haaretz depuis 1982 et a beaucoup écrit sur le monde arabe et islamique. En 2009, il a reçu le prix Sokolov pour l'ensemble de son œuvre dans le domaine du journalisme écrit.
Bar'el est titulaire d'un doctorat en histoire du Moyen-Orient. Il enseigne au Sapir Academic College et est chercheur à l'Institut Truman de l'Université hébraïque de Jérusalem, ainsi qu'au Centre d'études iraniennes.

Les termes "Israël" et "NSO" ont donné 9 680 000 occurrences sur Google jeudi. C'est un bon résultat pour le logiciel espion Pegasus créé par la  Startup Nation. Il confère également à Israël le statut douteux d'une nation qui aide les dictateurs à persécuter les militants des droits humains, les journalistes et les États amis. Les écoutes furtives sont le pain et le beurre des services de renseignement. Les ambassades ont constamment mis sur écoute des cibles, même celles d'États amis. Les régimes qui surveillent et bloquent les comptes Facebook ou Twitter sont devenus presque "acceptables" et cela suscite rarement un intérêt excessif.

 


Pegasus
عماد حجاج Emad Hajjaj

Par exemple, nous avons déjà oublié l'écoute furtive par la NSA usaméricaine du téléphone de la chancelière allemande Angela Merkel, qui a ébranlé les relations germano-usaméricaines, ou la mise sur écoute par les USAméricains de l'appartement d'Ehud Barak.

La masse d'informations recueillies par les sociétés d'information par le biais des médias sociaux sur des millions de personnes, et la perte de vie privée qui en résulte, conduisent à de nouvelles législations et poussent à développer des moyens technologiques avancés pour protéger l'information. Mais cette fois, il semble que le bruit et la fureur proviennent de l'ampleur de l'opération : quelque 50 000 numéros de téléphone, les cibles marquées pour la surveillance, y compris des chefs d'État, des politiciens de haut rang, des hommes d'affaires, ainsi que des journalistes et des militants sociaux, et les objectifs de l'espionnage.