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26/11/2025

L’impunité israélienne

Luis E. Sabini Fernández, 26/11/2025
Traduit par Tlaxcala

La violence

Dans ma vie personnelle, j’ai toujours été sceptique à l’égard des coups de main guérilleros auxquels j’ai assisté ou dont j’ai eu connaissance dans le Cône Sud (bien que certains aient été très sympathiques et que pratiquement tous aient impliqué un engagement personnel énorme, un « dévouement à la cause »), parce qu’ils me semblaient potentiellement autocratiques, facilitant avec trop de rapidité l’intronisation d’autres dirigeants, toujours au détriment du rôle de « gens comme nous ».

Telles sont mes expériences concernant la guérilla latino-américaine, engagée avec beaucoup de courage et d’abnégation, mais aussi d’aveuglement. C’est ainsi que j’ai souscrit au témoignage d’un ancien agent secret cubain, fils du célèbre guérillero argentin Ricardo Masetti, auquel Guevara avait confié la mission de créer un foyer révolutionnaire dans ses plans « continentaux » pour l’Amérique du Sud — mission qu’il put à peine mettre en œuvre¹.
Le fils, Jorge Masetti, Argentin mais élevé à Cuba, fut éduqué et formé comme agent révolutionnaire. Fidel voulait accomplir avec le fils ce qu’il n’avait pu obtenir du père. Et lorsqu’il fut totalement « au point », il renonça à cette voie en constatant la série d’échecs des guérillas latino-américaines (et la phase quasi inévitable suivante : la délinquance commune). Il commenta alors : « Quelle chance que nous n’ayons pas gagné».

Sous-sols de la Mort 3, acrylique sur toile, 2021

Palestine

Tout ce préambule pour reconnaître que la violence existant en Palestine est différente, radicalement différente. La violence venant d’en bas, celle des Palestiniens, n’est guère plus qu’une réponse à la machine israélienne, écrasante.

L’image de l’enfant ou des enfants lançant des pierres face à un tank est extraordinairement précise pour illustrer le rapport de forces. Une telle autodéfense, contre-attaque civile, désespérée, comme celle de la jeune fille brandissant une paire de ciseaux de couture dans la rue, parce qu’elle n’en pouvait plus, et qui fut abattue sans hésitation (et sans nécessité). Car Israël réprime ainsi : de manière brutale, annihilatrice, hors la loi mais avec un excès de technique².

Nous sommes face à un traitement particulier de l’ennemi. Netanyahou et d’autres dirigeants l’ont dit et répété : ils combattent des animaux, pas des humains — ou plutôt si, des humains, mais des Amalécites. Et leur dieu leur a donné la permission, il y a quelques millénaires, de les tuer (voir l’Exode dans la Bible).

C’est un permis de très longue durée. Et « parfaitement valide » au XXI siècle.

Mais qui a dit à Netanyahou que les Palestiniens étaient des Amalécites ?

                 

 Gaza Relief, acrylique et autres matériaux sur toile, 2015

Le comportement de la population israélienne est frappant. Voyons les colons en Cisjordanie. Jamais autorisés par l’ONU, mais s’installant de facto sur un territoire internationalement reconnu comme palestinien, avec l’assentiment non exprimé du gouvernement israélien. Il y a quelques années, ils étaient des dizaines de milliers et, en petits groupes, protégés par l’armée, ils approchaient les villages palestiniens et les lapidaient, endommageaient oliveraies et citronniers. À coups de haches ou de caillasses. Parfois il y avait des blessés. Aujourd’hui, les colons sont des centaines de milliers, toujours protégés par l’armée, et en bandes armées de dizaines ou de centaines, ils rasent des villages palestiniens, détruisant maisons, installations, cultures, véhicules et parfois les corps des Palestiniens qu’ils trouvent sur leur chemin. Cherchant à instaurer la terreur.

Dernièrement, l’armée a pris l’initiative : sous prétexte de chercher des « terroristes », elle a détruit des quartiers entiers de population palestinienne désarmée : maisons, vêtements, jardins, jouets, livres, ustensiles — tous les éléments matériels de la vie sociale. Les familles se retrouvent sans foyer, sans biens, souvent sans proches, assassinés dans une dose quotidienne d’horreur.

Il s'agit pratiquement de la politique de « terre brûlée » attribuée à certaines invasions telles que celle des Huns, « barbares » des IVe et Ve siècles de l'ère chrétienne.

Les militaires israéliens ont même établi des barèmes : pour éliminer un petit guérillero, ils s’autorisent jusqu’à 15 civils tués ; pour un chef guérillero, jusqu’à 100 victimes collatérales⁴.

Depuis des décennies, nous voyons les effets du plan Yinon, exposé au début des années 1980. Oded Yinon proposait de fragmenter les États voisins en unités politiques plus petites : le Liban en deux ou trois ; l’Égypte en cinq ou six ; l’Irak en trois ; le Soudan en deux… et ainsi de suite.

Israël, ouvertement ou sous couvert de structures comme Daesh, a vu ses objectifs se réaliser progressivement : Libye, Irak, Syrie, Soudan, Liban, Palestine ont été dévastés par sa politique d’usure, toujours soutenue matériellement par les USA, qui ont joué le rôle de remorque et d'approvisionneur de l’imparable machine israélienne.

Ce soutien inconditionnel des USA à la géopolitique israélienne s'explique de plusieurs façons ; il existe un certain parallélisme entre les développements historiques des USA et d'Israël, bien que dans des contextes historiques très différents. Une base religieuse relativement commune, car les protestants sont les chrétiens qui ont réévalué certains aspects de l'Ancien Testament, qui est le noyau idéologique de la religion juive. Et ce sont eux qui ont colonisé l'Amérique du Nord, exterminant la population autochtone. Bible en main.

Mais surtout, parce qu'à la fin de la Seconde Guerre mondiale, lorsque les USA rompent leurs liens avec la Société des Nations obsolète (disparue en 1946) et fondent « leur » ONU (octobre 1945), l'élite WASP, fondatrice des USA, avait déjà été partiellement remplacée par l'élite juive grâce à une série de stratagèmes : think tanks, l'intelligentsia juive a un poids de plus en plus important ; la Réserve fédérale (le capital financier juif devient majoritaire parmi les dix banques fondatrices, en 1913) ; Hollywood (six des sept grandes entreprises seront dans les années 30 détenues et dirigées par des Juifs, de sorte que de plus en plus les images des USA seront produites avec un regard juif ; et surtout grâce au financement coûteux du personnel politique usaméricain, pour lequel l'AIPAC est fondé en 1951.2 Sans ces subventions, l'insertion sociale de la plupart de ces législateurs serait très difficile.

C'est pourquoi l'une des images les plus simplistes et erronées de certains analystes de politique internationale a été, et est encore souvent, celle du « sous-marin de la flotte usaméricaine » pour parler d'Israël au Proche-Orient. L'image (tail wagging the dog), très connue dans la pensée critique usaméricaine, selon laquelle la queue fait remuer le chien, semble plus appropriée.

Deux événements récents, dans l'orbite de l'ONU, cet ancien instrument que les USA se sont arrogé à la fin de la Seconde Guerre mondiale pour ordonner et/ou administrer le monde, nous montrent à quel point Israël mène la danse, changeant même les modalités de domination.

     

Sans titre, 2020

Jusqu'à récemment, très récemment, le pouvoir avait l'habitude de cacher son visage, ou ses crocs, et de dissimuler ses actions sous le couvert de la « volonté de paix », de la « recherche d'objectifs démocratiques », de la « conciliation » et de l'« aplanissement des difficultés ». Après tout, le résultat de la Seconde Guerre mondiale, en 1945, a été la victoire contre toutes les formes de dictature (il restait là, « derrière le rideau », une dictature prétendument prolétarienne, et donc totalement différente de celles connues jusqu'alors ; il restait également celle de Franco en Espagne, mais cette dernière, comme tant d'autres en « Amérique latine », faisait partie de cette politique pragmatique yankee consistant à prendre soin du fils de pute s'il est « à nous »).

En d'autres termes, la défense de la démocratie avait ses difficultés, mais elle était encore invoquée.

1. La résolution du Conseil de sécurité du 11 novembre 2025

La résolution « sur le conflit à Gaza » exonère totalement Israël. Elle accepte tacitement la version israélienne d’un Israël « victime du terrorisme du Hamas », ignorant totalement les décennies de blocus, d’étouffement et d’abus qui ont façonné l’événement du 7 octobre 2023.

Israël ne subit ainsi aucune égratignure politique (ni économique) avec la résolution.

Ils n'auront même pas à rendre compte des meurtres collectifs et de leurs monstrueuses « équivalences » en vies humaines4, ni à indemniser les dommages brutaux causés à un territoire qui apparaît broyé et écrasé comme rarement auparavant. Ils n'auront pas non plus à faire face aux dépenses que nécessiteront la remise en état des sols, des logements, des réseaux de communication et d'assainissement, ni la reconstruction des hôpitaux, sans parler des milliers d'êtres humains brisés par le simple fait de vivre dans le cercle infernal conçu par Israël.

Le président des USA, qui aspire à maintenir l'hégémonie qui leur a été confiée en 1945, s'attribue désormais une présidence ou un gouvernement virtuel de la bande de Gaza, pour ─proclame-t-il─ sa reconstruction, toujours à la recherche de la prospérité (la seule chose positive dans cette démarche serait d'ôter à Israël son emprise sur ce territoire, mais je le mets au conditionnel, car ce n'est pas exactement Trump qui décide).

Le plan prévoit deux ans pour la reconstruction urbaine et immobilière. Compte tenu des dégâts visibles, de leur étendue et de leur ampleur, ce délai semble insuffisant.

Il comporte toutefois un aspect positif : l'idée de l'exil forcé des Gazaouis, tant promue par le gouvernement israélien, est abandonnée. Au contraire, du moins en paroles, la résolution déclare expressément la volonté de voir les habitants historiques rester dans la bande de Gaza.

Quoi qu'il en soit, le plan ne cache pas ses ambitions de business : attirer des capitaux importants pour créer des zones de confort, non pas pour les Gazaouis précisément, mais pour les milliardaires que Jared Kushner s'efforce tant d'attirer dans le futur complexe touristique de Gaza.

Nous ne pouvons oublier que des prospections ont confirmé la présence au moins de gaz en Méditerranée, à hauteur de la bande de Gaza. Et que la régence transnationale et impériale que Trump et Blair ─rien de moins─ cherchent à incarner a une préférence marquée pour leur propre prospérité.

L'ONU ne demande pas de comptes à Israël. Toujours absous de tout. Par droit de naissance, faut-il supposer. Mais en outre, dans les faits, l'ONU rétablit le colonialisme pur et dur : une puissance impériale, les USA, désigne Trump et Blair « roi et vice-roi » de ces domaines, afin de rétablir le cadre colonial. Seulement, il ne s'agit pas du colonialisme israélien, mais usaméricain.

La tâche que se sont assigné les chefs colonisateurs est ardue : ils se proposent de « changer les mentalités et les récits palestiniens », afin de persuader, semble-t-il, ces sauvages « des avantages que peut apporter la paix » (sic !).

Si ces maîtres pédagogues ─Blair et Trump─ voulaient proclamer les vertus de la paix, ils devraient s'adresser de toute urgence à la formation politique sioniste, qui, depuis cent ans, a toujours suivi la voie de la violence, et non celle de la paix, la voie de la guerre et de la conquête, envahissant des terres occupées depuis des millénaires, sur la base de documents bibliques douteux. Confondant délibérément religion et légende avec l'histoire documentaire.

La résolution du 11 novembre 2025 a été adoptée par le Conseil de sécurité élargi de l'ONU, qui ne comprend plus seulement les cinq membres originaux (USA, Royaume-Uni, France, Russie, Chine), mais aussi les membres actuels : Argentine, Italie, Espagne, Mexique, Colombie, Pakistan, Corée du Sud, Turquie, Indonésie et Allemagne.

Seules deux abstentions (peu fondées) de la Russie et de la Chine. Aucune des 15 représentations nationales n'a demandé pourquoi Israël pouvait se permettre un comportement violent, raciste et génocidaire en toute impunité.

       

          Détenu, 2024

Les personnes lucides et courageuses, désignées ou fonctionnaires de l'ONU elle-même, au fil du temps, comme Francesca Albanese, Susan Akram ou Richard Falk avant elles, et même Folke Bernadotte au tout début de l'ONU, et tant d'autres, ne suffisent pas à contrebalancer le rôle impérial, puis néo-impérial, que l'ONU continue de jouer, malgré les restrictions et les coupes budgétaires.

2. Le vote du 21 novembre 2025 contre la torture

Le 21 novembre 2025, l'Assemblée générale des Nations unies a rendu un avis contre le recours à la torture. La plénière comptait 176 délégations nationales et la résolution a été approuvée à une écrasante majorité (il y a eu 4 abstentions, dont celles du Nicaragua et de la Russie, ce qui soulève de nombreuses questions), mais surtout, elle a suscité la vive opposition de trois représentations nationales : les USA, Israël et l'Argentine. Ces pays ont alors défendu précisément cela : le recours à la torture.

De sombres nuages planent sur notre présent : non seulement la torture est encore utilisée, mais certains la préconisent, à l'instar des dictatures telles que les célèbres dictatures « latino-américaines » de Trujillo ou Pinochet, ou celle du shah d'Iran et, surtout aujourd'hui, celles très perfectionnées d'Israël et de son système de domination très rationnel qui comprend tant de types de torture.

  

Sans date, dessin au fusain et au pastel

Notre trame culturelle est tellement bouleversée qu'une militaire israélienne, Yifat Tomer-Yerushalmi, procureure qui, après avoir ignoré tant d'abus et de tortures antérieurs, a récemment choisi de criminaliser cinq soldats de « l'armée la plus morale du monde » pour avoir introduit des tubes métalliques dans l'anus d'un prisonnier palestinien et (évidemment) lui avoir fait du mal. Les médias du monde entier parlent de l'arrestation de la procureure, mais pas de la santé (ou de la mort) du Palestinien ; la procureure a elle-même été emprisonnée.

Netanyahou a condamné la diffusion de la vidéo faite par Tomer parce que, bien sûr, « cela nuit à l'image ».

Ce qui compte pour Netanyahou, c’est « l’image » et pas la réalité (sérieusement endommagée).

Ce qui est arrivé à Tomer est un exemple clair du comportement adopté et défendu par les gouvernements des USA, d'Israël et d'Argentine.

De la honte, ne serait-ce que comme posture, nous sommes passés au « grand honneur ». Les « légitimes » torturent et non seulement ils ne se déshonorent pas, nous déshonorant tous, mais ils en sont même fiers.

Illustrations : œuvres du peintre palestinien Mohamed Saleh Khalil, Ramallah

Notes

¹ Il a écrit un livre : La fureur et le délire, Tusquets, Barcelone, 1999.

² Israël minimise la responsabilité individuelle en menant ses raids via drones et systèmes automatisés…

³ AIPAC (American Israel Public Affairs Committee – Comité Américain des affaires publiques d’Israël). On estime qu'aujourd'hui, les trois quarts des représentants et sénateurs du pouvoir législatif usaméricain reçoivent de généreux dons d'organisations telles que l'AIPAC. Autrement dit, les votes sont gagnés d'avance.

⁴ Les militaires israéliens ont établi des tableaux d’équivalence : pour localiser et éliminer un guérillero de peu d'importance, ils s'autorisent à tuer jusqu'à quinze civils désarmés, souvent étrangers à l'affaire ; s'il s'agit d'un chef guérillero ─tel qu'ils le définissent─, ils s'autorisent à tuer jusqu'à cent personnes étrangères à l'objectif lui-même.

 

La impunidad israelí

Luis E. Sabini Fernández, 26-11-2025

La violencia

En mi vida particular siempre fui escéptico de los golpes de mano guerrilleros que experimenté o de los que supe en el Cono Sur (aunque algunos simpatiquísimos y prácticamente todos con enorme apuesta personal, de “entrega a la causa”), porque me resultaban potencialmente autócratas, facilitando con demasiada velocidad el entronizamiento de otros dirigentes, siempre a costa del protagonismo de “la gente como uno”.

Tales mis vivencias respecto de la guerrilla latinoamericana, particularmente, dispuesta con mucho coraje y entrega, pero también ceguera. Así acordé con el testimonio de un exagente secreto cubano, hijo del famoso guerrillero argentino Ricardo Masetti, ungido por Guevara para crear un foco revolucionario en sus planes “continentales” para el sur americano, quien prácticamente apenas si pudo poner en pie dicho emprendimiento. El hijo, argentino pero criado en Cuba, Jorge Masetti, fue educado y capacitado como agente revolucionario. Fidel quería hacer con el hijo lo que no pudo con el padre. Y ya totalmente “a punto” renunció a ese camino, cuando vio la seguidilla de fracasos guerrilleros latinoamericanos (y una etapa subsiguiente, casi inevitable: delincuencia común y silvestre). Comentó entonces: “Qué suerte que no ganamos”.[1]


Sótanos de la Muerte 3, acrílico sobre lienzo, 2021

Palestina

Todo este preámbulo para reconocer que la violencia existente en Palestina es distinta, radicalmente distinta. La violencia de abajo, desde los palestinos, es apenas la respuesta, ante la maquinaria israelí que es apabullante.

La imagen del niño o los niños con piedras delante de un tanque es de una precisión extraordinaria para mostrar los quantum de cada lado. La autodefensa así, el contraataque civil, desesperado, como el de la jovencita amenazante que blandía en la calle una tijera de costura, porque no podía más y fue muerta a tiros sin mediaciones (y sin necesidad). Porque así reprime Israel, de un modo brutal, aniquilador, sin ley aunque con exceso de técnica.[2]

Estamos ante un tratamiento peculiar del enemigo. Lo ha dicho y reiterado Netanyahu y otros dirigentes: combaten a animales, no a humanos, o sí, son humanos, pero amalecitas. Y su dios les ha dado permiso, hace unos miles de años, para matarlos (véase Éxodo, de la Biblia).

Es un permiso de larga, larguísima duración. Porque según las “Escrituras” ese conflicto sobrevino en tiempos muy remotos. Y “goza” de excelente vigencia en pleno siglo 21.


Gaza Relief, acrílico y otros materiales sobre lienzo, 2015

¿Pero quién le dijo a Netanyahu que los palestinos son (los) amalecitas?

El comportamiento de la población israelí es llamativo. Veamos a los colonos en Cisjordania. Nunca autorizados por la ONU, pero asentándose de facto, en territorio internacionalmente reconocido como palestino, con la anuencia no expresa del gobierno israelí. Hace unos años, eran decenas de miles y en grupetes, amparados por el ejército ─israelí─ que acompañaba pasivamente las operaciones de hostigamiento, se acercaban a las aldeas palestinas y las apedreaban, dañaban los olivares, los limoneros. Hachas, cascotes, a veces producían heridas. Ahora, los colonos son cientos de miles ─siempre amparados por el ejército que acompaña a retaguardia─, se agrupan en bandas de decenas o centenares, armados ellos mismos, y arrasan una aldea palestina, dañando viviendas, instalaciones, cultivos, vehículos y a menudo los cuerpos de palestinos que encuentran a su paso. Tratando de generar terror.

Últimamente, el ejército tomó la iniciativa: so pretexto de buscar “terroristas” ha destruido barrios enteros, con población civil palestina, desarmada: destruye, en rigor, todos los elementos materiales de la vida social, viviendas, ropas, jardines, juguetes, libros, enseres. La gente queda con lo puesto y a menudo sin hogar. Luego, el ejército ha rematado sus operativos diezmando a los pobladores. Las familias, generalmente numerosas en Palestina, quedan así entrecortadas, rotos sus vínculos, en el mismo momento en que se han quedado sin vivienda, o sin muebles o sin sus medios de vida. Y a menudo sin familiares, asesinados en una infame dosis diaria, casi hasta ahora.

Es prácticamente la política de “tierra arrasada” que se atribuye a algunas invasiones como la de los hunos, “bárbaros” de los siglos 4 y 5 de la era cristiana.

Desde hace ya décadas, vamos viendo los efectos del Plan Yinon anunciado por Israel a principios de la década de los ’80. Oded Yinon, analista militar, diseñó un plan para descomponer a los estados circundantes a Israel en unidades políticas menores y así más manejables; entendía apropiado para los intereses israelíes, particionar al Líbano en dos o tres; a Egipto en cinco o seis; a Irak en otros tres y a Sudán en dos… y así sucesivamente.

Vemos que la acción israelí, abierta o mediante “coberturas” tipo DAESH, ha ido logrando escalonadamente, sus objetivos tanto en el Magreb norafricano como en Asia Occidental; Libia, Irak, Siria, Sudán, Líbano, Palestina han sido modificadas, deglutidas, despedazados por la política de agresión y desgaste israelí, siempre secundada, materialmente, por EE.UU. que ha funcionado como furgón de cola y abastecimiento de la maquinaria imparable israelí.

Ese apoyo incondicional de EE.UU. a la geopolítica israelí tiene varias explicaciones; hay un cierto paralelismo en los desarrollos históricos de EE.UU. e Israel, aunque en muy diferentes coyunturas históricas. Una base religiosa relativamente común, porque los protestantes son los cristianos que revalorizaron aspectos del Antiguo Testamento, que es el núcleo ideológico de la religión judía. Y son los colonizadores de América del Norte, exterminadores de la población autóctona. Con la Biblia en la mano.

Pero sobre todo, porque al fin de la 2GM, cuando EE.UU. corta vínculos con la obsoleta Sociedad de Naciones (fenecida por extinción en 1946)  y funda “su” ONU (octubre 1945), la élite WASP, fundadora de EE.UU., ya había sido parcialmente sustituida por la élite judía a través de una serie de artilugios: think tanks, la intelectualidad judía tiene cada vez mayor peso; la Reserva Federal (el capital financiero judío pasa a ser mayoritario entre los diez bancos fundadores, en 1913); Hollywood (de siete grandes empresas, seis serán en los ’30 de propiedad y dirección judía, así cada vez más las imágenes de EE.UU., serán producidas con ojos judíos; y sobre todo mediante la financiación dispendiosa al personal político estadounidense, para lo cual en 1954 se funda AIPAC.[3] Sin tales subsidios se le convertiría muy trabajosa la inserción social a la mayoría de tales legisladores.

Por eso una de las imágenes más simplonas y equivocadas de ciertos analistas de política internacional ha sido, y frecuentemente, invocar al ‘submarino de la Armada de EE.UU.’ para hablar de Israel en el Cercano Oriente. Más acertada parece la imagen (tail wagging the dog), muy conocida dentro del pensamiento crítico estadounidense, de que la cola mueve al perro.

Dos hechos recientes, en la órbita de la ONU, el viejo instrumento que EE.UU. se arrogó al final de la 2GM para ordenar y/o administrar el mundo, nos muestra hasta qué punto Israel lleva la voz cantante, cambiando incluso las modalidades de dominio.


Sin título, 2020

Hasta hace poco, muy poco, el poder solía ocultar sus rostros, o fauces, y solía encubrir sus acciones mediante “voluntad de paz”, “búsqueda de fines democráticos”, “conciliación”, allanamiento de dificultades”. Al fin y al cabo, el resultado de la 2GM, en 1945, fue la victoria contra todo tipo de dictaduras (quedaba allí, “tras la cortina”, una diz que proletaria, y por lo mismo totalmente distinta a las conocidas hasta entonces; también quedaba la de Franco en España, pero esta última ─como tantas otras de América “Latina”─  formaba parte de aquella política pragmática yanqui de cuidar al hijo de puta si es “nuestro”).

Es decir, la defensa de lo democrático tenía su dificultad, pero se invocaba.

1. El 11 de noviembre de 2025 el Consejo de Seguridad de la ONU ha tomado una resolución “sobre el conflicto en Gaza” que exonera de todo cargo a Israel. Aceptando tácitamente el papel de víctima del “terrorismo de Hamás” que Israel se ha autoasignado, eludiendo todo el infame tratamiento, extorsivo, constrictivo, abusivo que Israel aplicara por décadas a la Franja de Gaza ─y que están en la base del comportamiento de Hamás del 7 oct. 2023. Israel no sufre así ni un rasguño político (ni económico) con la resolución.

Ni siquiera tendrán que dar cuenta de los asesinatos colectivos y sus monstruosas “equivalencias” en vidas humanas,[4] ni indemnizar por el brutal daño ocasionado a un territorio que parece triturado y machacado como pocas veces se ha visto. Ni afrontar los gastos que demandarán la recuperación de suelo, viviendas, redes de comunicación y sanitarias, ni por el restablecimiento de hospitales, sin mencionar los miles de seres humanos destrozados por el solo hecho de vivir en el círculo del infierno diseñado por Israel.

El presidente de EE.UU. con aspiraciones a mantener la hegemonía que recayó en 1945 sobre elos, se atribuye ahora una virtual presidencia o gobernación de la Franja de Gaza, para ─proclama─ su reconstrucción, buscando siempre, la prosperidad (lo único bueno en este proceder sería quitarle a Israel las tenazas sobre ese territorio, pero lo pongo en condicional, porque no es precisamente Trump quien decide).

El Plan estima dos años para la recuperación urbanística y edilicia. Dado el daño a la vista, su extensión y alcance, parece exiguo el plazo.

Algún aspecto positivo tiene: se abandona la idea del exilio forzoso de los gazatíes, tan promovida por el gobierno israelí. Al contrario, al menos en la letra, la resolución declara voluntad expresa de que permanezcan sus habitantes históricos en la Franja.

De todos modos, el plan no esconde sus búsquedas de negocios: traer muchos capitales para crear zonas de confort, no para los gazatíes precisamente, sino para los milmillonarios que Jared Kushner tanto se afanara por atraer al futuro resort de Gaza.

No podemos olvidar que prospecciones han verificado la presencia de al menos gas en el Mediterráneo a la altura de la Franja de Gaza. Y que la regencia transnacional e imperial que procuran encarnar Trump y Blair ─nada menos─ tienen marcada preferencia por la prosperidad… propia.

ONU no le exige cuentas a Israel. Siempre absuelto de todo. Por derecho de nacimiento, tenemos que suponer. Pero además, de hecho, ONU restablece el colonialismo puro y duro: un poder imperial, ─EE.UU.─ designa “rey y virrey” de esos dominios, Trump y Blair, para restablecer el ámbito colonial.  Solo que no es el colonialismo israelí, sino el estadounidense.

La tarea que se asignan los jefes colonizadores es ardua: se proponen “cambiar las mentalidades y los relatos palestinos”, para persuadir, por lo visto, a estos salvajes “de los beneficios que puede reportar la paz.” (¡sic!)

Si estos maestros pedagogos ─Blair y Trump─ quisieran proclamar las virtudes de la paz, tendrían que dirigirse con urgencia a la formación política sionista, que ha hecho a lo largo de cien años siempre un camino de violencia, no de paz, un camino de guerra y conquista, invadiendo tierras ya ocupadas milenariamente, mediante dudosa documentación bíblica. Confundiendo deliberadamente religión y leyenda con historia documental.

La resolución del 11 nov. 2025 correspondió al Consejo de Seguridad de ONU ampliado; no ya los 5 originarios (EE.UU. R.U., Francia, Rusia, China) sino además los actuales miembros: Argentina, Italia, España, México, Colombia, Pakistán, Corea del Sur, Turquía, Indonesia y Alemania.

Apenas dos abstenciones (con magra fundamentación) de Rusia y China. Nadie preguntó, ninguna de las 15 representaciones nacionales, por qué a Israel su comportamiento violento, racista y genocida, le sale gratis.


Detenido, 2024

Lúcidos, y valientes, designados o funcionarios de la mismísima ONU, a lo largo de tiempo, como Francesca Albanese, Susan Akram o Richard Falk en tiempos recientes e incluso Folke Bernadotte en los mismos inicios de la ONU, y tantos otros, no alcanzan para contrabalancear el papel imperial, luego neoimperial que, aun con retaceos y recortes, cumple, sigue cumpliendo la ONU.

2. El 21 de noviembre. de 2025, la Asamblea General de la ONU emitió un dictamen contra el uso de la tortura. El plenario contaba con 176 delegaciones nacionales y fue aprobado por abrumadora mayoría (hubo 4 abstenciones; todo un interrogante, entre ellos las de Nicaragua y Rusia), pero sobre todo, contó con la oposición encendida de tres representaciones nacionales: EE.UU., Israel y Argentina. Que defendieron, entonces, eso precisamente; el uso de la tortura.

Nubarrones oscuros campean en nuestro presente: ya no sólo se usa la tortura; hay quienes la postulan, al mejor estilo de dictaduras como las famosas “latinoamericanas” de Trujillo o Pinochet, o la del sha iraní y, sobre todo hoy día, como las muy perfeccionadas de Israel y su racionalísimo sistema de dominio que incluye tantos tipos de tortura.


Sin fecha, Dibujo al carboncillo y pastel

Si estará dada vuelta nuestra trama cultural que una militar israelí, Yifat Tomer-Yerushalmi, fiscal que, aun ignorando tantos atropellos y torturas anteriores, optó por criminalizar recientemente a cinco soldados del “ejército más moral del mundo” por haberle introducido caños metálicos en el ano a un preso palestino y (obviamente) dañarlo. La info-de-todo-el-mundo habla de la detención de la fiscal pero no de la salud (o la muerte) del palestino; la fiscal ha sido, ella misma, encarcelada.

Netanyahu condenó la difusión hecha por Tomer porque, claro, “daña la imagen”.

Daña la imagen que es lo que le importa a Netanyahu, no la realidad (seriamente dañada).

Lo acontecido con Tomer es un claro ejemplo del comportamiento emprendido y defendido por los gobiernos de EE.UU., Israel y Argentina.

De lo vergonzante, siquiera como pose, hemos ido al “a mucha honra”. Torturan los “legítimos” y no sólo no se deshonran, deshonrándonos a todos; ahora hasta se enorgullecen.

Ilustraciones: obras del pintor palestino Mohamed Saleh Jalil, Ramala

Notas


[1]  Escribió un libro, El furor y el delirio, Tusquets, Barcelona, 1999.

[2]  El ejército israelí elude responsabilidades personales mediante el ardid tecnológico de organizar los raids de todo tipo, con drones, aviones o mera artillería, a través de dispositivos tecnológicos. Quitar la decisión a humanos permite, además, incrementar la intensidad del daño mediante la velocidad que los dispositivos tecnológicos multiplican por encima de toda escala manual.  Doble ventaja: aumenta el daño y decrece la responsabilidad por sus consecuencias, porque, claro, a los asesinados los cosechó el dron, o el programa, no un yo.

[3]  AIPAC (American Israel Public Affairs Committee – Comité de Asuntos Públicos Estados Unidos – Israel). Se estima que hoy las tres cuartas partes de los representantes y senadores del Poder Legislativo de EE.UU. reciben suculentas donaciones de organizaciones como AIPAC. Como quien dice, las votaciones están ganadas de antemano.

[4]  Los militares israelíes han establecido tablas compensatorias de víctimas: para ubicar y ultimar a un guerrillero de poca monta, se permiten matar hasta quince pobladores desarmados a menudo ajenos; si se trata de un jefe guerrillero ─definido por ellos─ se permiten matar hasta cien ajenos al objetivo en sí.

03/11/2025

Simplemente no conviertan a la fiscal militar israelí dimisionaria en una mártir

ACTUALIZACIÓN

Yifat Tomer-Yerushalmi fue detenida en el marco de una investigación sobre la difusión de un video que muestra actos de violencia cometidos en 2024 contra presos palestinos por soldados israelíes en una prisión de alta seguridad, según informó el lunes el ministro de Seguridad Interior. Tras anunciar su dimisión el viernes, Tomer-Yerushalmi desapareció brevemente el domingo, lo que desató especulaciones en la prensa sobre un posible intento de suicidio. En un mensaje en Telegram, el ministro de Seguridad Nacional, Itamar Ben Gvir, anunció el lunes que «se ha acordado que, a la luz de los acontecimientos de la noche anterior, el servicio penitenciario actuará con mayor vigilancia para garantizar la seguridad de la reclusa en el centro de detención donde se encuentra bajo custodia».

¿Valió la pena, mayora general Tomer-Yerushalmi, servir con tanta servilidad al ejército criminal, con un final tan patético? 

Gideon Levy, Haaretz, 2-11-2025 

Traducido por Tlaxcala

Cuando la noche se vuelve día, una fiscal militar puede convertirse en mártir, alguien que luchó por la ley y los derechos humanos hasta ser quemada en la hoguera, víctima inocente de la malvada derecha. Cuando la noche se vuelve día, solo cuando la abogada general no incumple su deber y da un paso valiente por primera (y última) vez en su carrera, es destituida. 


La Grala. de división Yifat Tomer-Yerushalmi en el cuartel general de las FDI en Tel Aviv, el mes pasado. Foto Itai Ron

El monstruo insaciable nunca se sacia. Usted puede defender el genocidio, Grala. Yifat Tomer-Yerushalmi; puede disimular todos los crímenes, ocultar todas las investigaciones y blanquear los delitos cometidos por los soldados israelíes, complaciendo así a sus superiores. Pero al primer tropiezo, el monstruo la hará responsable.
¿Valió la pena, Gral. Tomer-Yerushalmi, servir con tanta servilidad a un ejército criminal, para acabar de forma tan patética? ¿No habría sido más correcto cumplir su deber, hablar con valentía e integridad, y al menos ser depuesta con algo de dignidad? Como dice la vieja parábola judía: comió el pescado podrido y aun así fue expulsada de la ciudad. ¿Valió la pena?

Durante años, usted dictó sentencias en tribunales militares que nada tienen que ver con lo que le enseñaron en la universidad. Fue fiscal y jueza, enviando a miles de personas a prisión sin un juicio real. Impidió cualquier investigación sobre miles de crímenes cometidos por soldados contra palestinos en Cisjordania y en la Franja de Gaza.

Cada caso de un niño asesinado sin motivo o de un soldado abusivo recibió el respaldo legal suyo y del sistema que dirige. En ese sistema, nunca hay soldados culpables de crímenes, ni siquiera después de los horrores de Gaza.
Usted participó en el espectáculo más despreciable: el llamado sistema de justicia militar, donde basta con ser palestino para ser condenado; un tribunal de apartheid en el que los acusados no tienen derechos ni absoluciones, todo una farsa barata en un sistema judicial falso. Así ascendió en las filas, hasta convertirse en fiscal militar, todo con el propósito de blanquear los crímenes del ejército al que servía.

No existe institución judicial seria en el mundo que blanquee los crímenes del ejército israelí en Gaza y Cisjordania. Y usted, Gral. Tomer-Yerushalmi, lo hizo con entusiasmo. Fue la abogada del genocidio, y llegará el día en que eso se le reproche. Ahora el sistema le devuelve el golpe: fue despedida por las peores razones posibles.

Es difícil saber qué llevó a Tomer-Yerushalmi a desviarse de repente de su papel asignado y escandalizarse por un video en el que guardianes de prisión militares sádicos –no “soldados de combate”, como suelen llamarlos– maltratan brutalmente a un detenido palestino indefenso. Según la acusación, esos cinco guardias, escoria humana, apuñalaron a su víctima en el recto, desgarrándolo, además de romperle las costillas y perforarle un pulmón.

Era importante mostrar a los israelíes lo que hacen nuestros soldados, especialmente en el ambiente de “todo está permitido al ejército” que domina desde el 7 de octubre. De repente, la generala aportó un momento de verdad al debate. Comprendió que las posibilidades de condenar a los acusados, con el clima público actual, eran mínimas. Por eso publicó el video, el único acto por el cual merece una medalla.


Sde Teiman


Es un hecho rutinario en las prisiones militares, pero esta vez se escandalizó. ¿No ha oído hablar de los 80 detenidos muertos en prisión, algunos a manos de soldados israelíes? ¿Qué hizo respecto a esas muertes? ¿Qué hizo respecto al soldado que disparó y mató a un niño de 9 años en el pueblo cisjordano de al-Rihiya hace dos semanas? El portavoz del ejército dijo que “el caso fue remitido a la Oficina de la Abogada General Militar para su revisión”. La investigación terminará en unos años, ¿y qué le pasará a ese soldado? El hecho de que siga libre es la respuesta.

Cuando la noche se vuelve día, los cinco hombres acusados de abusos en el centro de detención de Sde Teiman se convirtieron en las víctimas. Sus indultos ya están en camino, y quien les clavó el cuchillo en el recto es la abogada general militar. El ministro de Defensa, Israel Katz, ya babea con ansias de venganza.
Cuánto le gusta destituir a oficiales de alto rango, cuán embriagante es la sensación de poder –y todos, incluido el comentarista moderado Nadav Eyal, consideran la filtración del video “escandalosa”. Este es el crimen y esta su autora. Pero no la conviertan en mártir.

Cuando la noche se vuelve día, los cinco hombres acusados de abusos en el centro de detención de Sde Teiman se convirtieron en las víctimas. Sus indultos ya están en camino.

Ne faites surtout pas de la procureure militaire israélienne démissionnaire une martyre

 ACTUALISATION
Yifat Tomer-Yerushalmi a été arrêtée dans le cadre d’une enquête concernant la diffusion d’une vidéo montrant des violences en 2024 contre des détenus palestiniens par des soldats israéliens dans une prison de haute sécurité, a fait savoir lundi le ministre de la sécurité intérieure. Après avoir annoncé sa démission vendredi, Mme Tomer-Yerushalmi avait brièvement disparu dimanche, déclenchant des spéculations dans la presse quant à une possible tentative de suicide. Dans un message sur Telegram, le ministre de la sécurité nationale, Itamar Ben Gvir, a annoncé lundi qu’il « a été convenu qu’à la lumière des événements de la nuit dernière le service pénitentiaire agirait avec une vigilance accrue pour assurer la sécurité de la détenue dans le centre de détention où elle a été placée en garde à vue ».

Cela valait-il la peine, générale Tomer-Yerushalmi, de servir avec tant de servilité une armée criminelle, pour finir de manière aussi pathétique ?

Gideon Levy, Haaretz, 2/11/2025

Traduit par Tlaxcala

Quand la nuit devient le jour, une procureure générale militaire peut devenir une martyre, quelqu’un qui a combattu pour le respect de la loi et des droits humains jusqu’à être brûlée sur le bûcher, victime innocente de la méchante droite. Quand la nuit devient le jour, ce n’est que lorsque la procureure générale ne manque pas à son devoir et ose, pour la première (et dernière) fois de sa carrière, faire preuve de courage, qu’elle est destituée.


La générale de division Yifat Tomer-Yerushalmi au quartier général de Tsahal à Tel-Aviv, le mois dernier. Photo Itai Ron

Le monstre insatiable ne peut jamais être rassasié. Vous pouvez défendre le génocide, Générale Yifat Tomer-Yerushalmi, vous pouvez dissimuler tous les crimes, enterrer toutes les enquêtes et blanchir les exactions commises par les soldats israéliens, satisfaisant ainsi vos supérieurs. Mais à la première erreur, le monstre vous tiendra pour responsable.
Cela valait-il la peine, Générale Tomer-Yerushalmi, de servir avec une telle servilité une armée criminelle, pour finir de façon aussi pathétique ? N’aurait-il pas été plus juste d’accomplir votre devoir, de parler avec audace et intégrité, au moins d’être déposée avec un peu de dignité ? Comme le dit la vieille parabole juive : vous avez mangé le poisson pourri et avez tout de même été expulsée de la ville. Cela en valait-il la peine ?

Pendant des années, vous avez rendu des jugements dans des tribunaux militaires qui n’ont rien à voir avec ce qu’on vous a enseigné à l’université. Vous étiez procureure et juge, jetant des milliers de personnes en prison sans véritable procès. Vous avez empêché toute enquête sur des milliers de crimes commis par des soldats contre des Palestiniens, en Cisjordanie et dans la bande de Gaza.

Chaque cas d’enfant abattu sans raison, chaque soldat violent, a reçu une caution légale de votre part et de celle du système que vous dirigez. Dans ce système, il n’y a jamais de soldats coupables de crimes, pas même après les horreurs de Gaza.
Vous avez prêté la main au spectacle le plus méprisable : celui qu’on appelle le système de justice militaire, où il suffit d’être palestinien pour être condamné ; un tribunal d’apartheid où les accusés n’ont ni droits ni acquittements, une mise en scène bon marché d’une justice factice. C’est ainsi que vous avez gravi les échelons, jusqu’à devenir procureure générale militaire, tout cela pour blanchir les crimes de l’armée à laquelle vous apparteniez.

Aucune institution judiciaire sérieuse au monde ne blanchirait les crimes de l’armée israélienne à Gaza et en Cisjordanie. Et vous, Générale Tomer-Yerushalmi, vous l’avez fait avec joie. Vous étiez l’avocate du génocide, et le jour viendra où cela vous sera reproché. Maintenant, le système vous rend la pareille : vous avez été limogée pour les plus mauvaises raisons possibles.

Il est difficile de savoir ce qui a poussé Tomer-Yerushalmi à s’écarter soudainement de son rôle assigné et à être choquée par une vidéo où des gardiens de prison militaires sadiques – non pas des « soldats de combat », comme on les appelle habituellement – maltraitent brutalement un détenu palestinien sans défense. Selon l’acte d’accusation, ces cinq gardiens, véritables déchets humains, ont poignardé leur victime dans le rectum, le déchirant, tout en lui brisant les côtes et en perforant un poumon.

Il était important de montrer aux Israéliens ce que font nos soldats, surtout dans l’atmosphère du « tout est permis à Tsahal » qui domine depuis le 7 octobre. Soudain, la générale a offert un moment de vérité au débat. Elle a compris que les chances de condamner les accusés, dans l’ambiance publique actuelle, étaient infimes. C’est pourquoi elle a publié la vidéo, le seul acte pour lequel elle mérite une médaille.


Sde Teiman



C’est un événement courant dans les prisons militaires, mais cette fois, elle a été choquée. N’avez-vous pas entendu parler des 80 détenus morts en prison, certains sous les coups de soldats israéliens ? Qu’avez-vous fait face à ces morts ? Qu’avez-vous fait à propos du soldat qui a tiré et tué un garçon de 9 ans dans le village cisjordanien d’al-Rihiya il y a deux semaines ? Le porte-parole de l’armée a déclaré que « l’affaire a été transmise au bureau de la procureure générale militaire pour examen ». L’enquête se terminera dans quelques années, et que se passera-t-il pour ce soldat ? Le fait qu’il se promène encore libre est la réponse.

Quand la nuit devient le jour, les cinq hommes accusés de mauvais traitements au centre de détention de Sde Teiman deviennent les victimes. Leur grâce est déjà en route, et celle qui a enfoncé le couteau dans leur rectum, c’est la procureure générale militaire. Le ministre de la Défense, Israel Katz, salive déjà de désir de vengeance.
Comme il aime renvoyer des officiers supérieurs, comme le pouvoir l’enivre – et tous, y compris le commentateur modéré Nadav Eyal, jugent la fuite de la vidéo « scandaleuse ». Voici le crime et voici sa coupable. Mais surtout, ne la transformez pas en martyre.

Quand la nuit devient le jour, les cinq hommes accusés de mauvais traitements au centre de détention de Sde Teiman deviennent les victimes. Leur grâce est déjà en route.