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16/09/2023

AMIRA HASS
Pour Israël, les accords d'Oslo ont été un succès retentissant

Amira Hass,  Haaretz, 12/9/2023
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

La création d’enclaves palestiniennes est un compromis interne à Israël : faire disparaître les Palestiniens sans les expulser. Pendant ce temps, Israël engrange d’importants bénéfices, notamment en transformant la Cisjordanie et la bande de Gaza en laboratoire humain


Steve Bell, The Guardian

Dans les accords d’Oslo signés il y a 30 ans, Israël a accepté de réduire progressivement l’occupation, tandis que les Palestiniens ont été contraints de cesser instantanément toute résistance. Chaque partie a interprété cette réduction comme elle l’entendait.

Les représentants palestiniens ont compris ou espéré qu’en échange de la cession de 78 % de la Palestine historique avant la fin de 1999 (sans renoncer aux liens personnels, familiaux, culturels, émotionnels ou historiques de leur peuple), le contrôle militaire israélien sur les territoires occupés en 1967 prendrait fin et les Palestiniens y établiraient un État.

Les Israéliens ont conclu qu’ils avaient obtenu un sous-traitant pour procéder à des arrestations et traquer les opposants (sans que la Cour suprême d’Israël et le groupe de défense des droits B’Tselem s’en mêlent, comme l’a dit le Premier ministre de l’époque, Yitzhak Rabin). Les négociateurs israéliens ont veillé à ce que l’accord écrit détaille les étapes du processus sans mentionner d’objectifs concrets (un État, un territoire et des frontières fixes).

Israël étant la partie la plus forte, c’est son interprétation qui l’a emporté et qui a déterminé la nature et la morphologie éternelles du  “rétrécissement” : L’israélisation d’autant de territoires que possible et, à l’intérieur de ceux-ci, des poches d’autonomie palestinienne - qui sont séparées, affaiblies et contrôlées à distance, Israël étant en mesure de les couper les unes des autres. Les origines des accords d’Abraham de 2020 remontent à 1993.

Grâce à Oslo, Israël s’est déchargé de la responsabilité de l’occupant à l’égard de la population et de son bien-être. Et il a gardé la crème : le contrôle de la terre, de l’eau, des longueurs d’onde des téléphones portables, de l’espace maritime et aérien, de la liberté de mouvement, de l’économie et des frontières (à la fois extérieures et de chaque poche de territoire).

Israël tire d’énormes profits de ces leviers de contrôle, car il est à la tête d’un grand laboratoire humain où il développe et teste ses exportations les plus rentables : armes, munitions et technologies de contrôle et de surveillance. Les Palestiniens de ce laboratoire, privés d’autorité et dont les ressources s’amenuisent, se voient confier la responsabilité de gérer leurs problèmes et leurs affaires civiles.

Les Palestiniens restent une réserve de main-d’œuvre bon marché pour les Israéliens. Une grande partie des coûts de l’occupation est répercutée sur les Palestiniens sous la forme de biens et de services qu’ils sont obligés d’acheter mais qu’ils ne peuvent pas développer parce qu’Israël contrôle la majeure partie du territoire, des frontières et de l’économie en général.

 Saïd An-Nahry

Viennent ensuite les frais élevés sur les transactions financières (comme le transfert de l’argent des douanes au trésor palestinien), les prélèvements et les amendes dont les recettes vont à la police, aux ports, à l’administration civile et à l’armée israélienne, les frais au passage de la frontière avec la Jordanie, les frais de transaction et d’enregistrement immobilier dans la zone C de la Cisjordanie, le marché noir des permis de travail, la rétention de l’argent des douanes sous divers prétextes, l’emploi de vétérans du service de sécurité du Shin Bet et de l’armée comme consultants qui ouvrent des portes dans la bureaucratie de l’occupation, et les intérêts qui s’accumulent sur tous les retards de paiement. Ce n’est peut-être pas grand-chose par rapport au produit intérieur brut d’Israël, mais c’est une fortune pour les Palestiniens, surtout si l’on tient compte de leur PIB et de leurs salaires.

Les pays occidentaux ont déchargé Israël de ses obligations financières en tant que puissance occupante et ont financé une grande partie des dépenses de gestion, d’entretien et de développement limité des enclaves palestiniennes. L’explication est que cela est nécessaire à l’établissement d’un État palestinien. Mais depuis des années, les pays occidentaux en ont assez de subventionner l’occupation et ses problèmes. Ils punissent donc les Palestiniens en faisant preuve d’avarice et les mettent en garde contre des catastrophes humanitaires, alors qu’ils signent de généreux accords économiques, scientifiques et militaires avec Israël.

03/09/2023

GIDEON LEVY
Israéliens et Palestiniens sont tombés dans le piège des accords d’Oslo

Gideon Levy, Haaretz, 3/9/2023
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

 Nous sommes tombés dans le piège des accords d’Oslo. C’était un piège au miel, sucré et porteur d’espoir. Comme il était agréable d’être pris dans sa toile pendant quelques années, avec toutes les conférences et les réunions. Mais Oslo n’a pas fait avancer la paix, il l’a seulement éloignée, au-delà de l’horizon, en consolidant l’occupation et en perpétuant les colonies.

Le ministre israélien des Affaires étrangères, Shimon Peres, signant les accords historiques d’Oslo entre Israël et l’OLP à la Maison Blanche, sous le regard (de gauche à droite) du Premier ministre Yitzhak Rabin, du président usaméricain Bill Clinton et du président de l’OLP Yasser Arafat, en 1993. Photo : J. David Ake / AFP

 C’est bien sûr la sagesse rétrospective et non, ce n’est pas à cause de l’assassinat de Rabin. L’histoire ne jugera pas favorablement les instigateurs israéliens d’Oslo. On ne peut pas leur pardonner d’avoir manqué une occasion, tout aussi funeste que les occasions manquées avant la guerre du Kippour (octobre 1973).

Une scène en particulier est restée gravée dans ma mémoire de ces jours grisants, et comme ils étaient gais. Un jour, alors que nous quittions la bande de Gaza par le poste frontière d’Erez, nous nous sommes retournés et avons fait un signe d’adieu à la bande : Au revoir Gaza, nous ne vous reverrons pas, pas sous une occupation. Yasser Arafat était déjà en poste à Gaza, en train de s’enrhumer dans son bureau spartiate sous le climatiseur Tadiran laissé par les Israéliens, et les espoirs se sont envolés.

Une tournée de journalistes, organisée quelques mois plus tard en l’honneur de l’inauguration d’un village de vacances dans le nord de la bande de Gaza, à laquelle participaient des célébrités israéliennes, n’a fait qu’accroître le sentiment de joie. Une délégation en Europe, composée de membres de la Knesset et d’un conseil législatif palestinien, dont Marwan Barghouti, n’a fait qu’intensifier l’illusion.

Nous pensions que l’occupation était sur le point de prendre fin, qu’un État palestinien était à portée de main et que nous pourrions passer des vacances au Club Med de Beit Lahiya ; nous pensions que Yitzhak Rabin et Shimon Peres voulaient la paix. Seule une poignée de gauchistes aigris pensait que nous ne devrions pas nous engager sur cette voie. Ils avaient raison et nous avions tort. Nous devons à nouveau nous excuser auprès de la gauche radicale, qui a tout vu avant tout le monde.

Le procès-verbal de la réunion du cabinet israélien qui a ratifié les accords il y a 30 ans, publié pour la première fois la semaine dernière, raconte toute l’histoire. Le ton querelleur, le pessimisme, le mépris, la répulsion presque physique à l’égard des Palestiniens et de leur chef, le sentiment qu’Israël “donnait” plus qu’il ne “recevait”, l’absence de toute volonté de forger une justice tardive, aucune prise de responsabilité pour les crimes de 1948, pas même pour ceux de 1967, le mépris total du droit international, l’absence d’un système de protection des droits humains ; l’attention compulsive portée à la sécurité, uniquement celle des Israéliens, évidemment, la référence à la “terreur” palestinienne exclusivement, et non aux actions d’Israël, et la peur sous-jacente des colons et de leurs hommes de main, qui n’étaient à l’époque que des enfants en comparaison des monstres qu’ils sont aujourd’hui : tous ces éléments n’apparaissent dans aucune des paroles prononcées par les lauréats du prix Nobel de la paix, Rabin et Peres. Ce n’est pas ainsi que l’on fait la paix. C’est ainsi que l’on tend un piège pour gagner du temps.

Le summum a été le soupir de soulagement poussé par Peres lors de cette session. Les Palestiniens avaient accepté que les colonies juives restent en place. Le père de l’entreprise de colonisation s’est vanté d’avoir même réussi à déjouer la demande de transformer les colonies en zone de libre-échange. C’est là le cœur du problème d’Oslo.

La question la plus importante n’a pas été discutée. Le plus grand crime a été ignoré. Les Palestiniens ont commis l’erreur de leur vie, les Israéliens agissant avec leur rapacité et leur machination habituelles. « Ce que nous craignions, c’était qu’ils soulèvent la question des colonies », a avoué Peres. “La question des colonies”, comme s’il s’agissait du bourdonnement d’une mouche gênante qu’il faut chasser de la pièce. Mais la mouche a disparu d’elle-même. Quelle chance ! Après tout, s’ils avaient commencé à nous harceler avec cette “question”, nous aurions dû au moins geler la construction des colonies, étape minimale pour tout gouvernement s’efforçant de faire la paix.

C’était le test décisif pour s’assurer des véritables intentions : si Rabin et Peres n’ont pas proposé de geler la construction des colonies, ils n’ont pas eu l’intention une seule minute de permettre la création d’un État palestinien. C’est aussi simple que cela.

Non, Rabin et Pérès ne cherchaient pas la justice ou la paix. Ils cherchaient le calme, ce qui a permis de tripler le nombre de colons et d’assurer la perpétuation de l’occupation. Pour cela, il n’y a pas de pardon. Aluf Benn, rédacteur en chef du Haaretz, regrette Rabin. J’ai du mal à me joindre à lui, malgré ma grande admiration pour l’homme et la nostalgie de cette époque, qui était effectivement meilleure. Mais il n’y avait pas de véritable lutte pour la paix et la justice à cette époque.


Martirena, Cuba

18/11/2022

AMIRA HASS
Mahmoud Abbas s'oppose à la réhabilitation de l'OLP et fait ainsi le jeu d'Israël

Amira Hass, Haaretz, 10/11/2022
Traduit par
Fausto Giudice, Tlaxcala

Mahmoud Abbas a créé un nouveau conseil pour renforcer son emprise sur le système judiciaire, et poursuit sa règne successoral oppressif tout en restant fidèle aux accords d'Oslo

Deux mesures distinctes et apparemment sans rapport prises récemment par l'[In]Autorité palestinienne et son chef, Mahmoud Abbas, sont révélatrices de la nature de plus en plus autoritaire et autocratique du régime dans les enclaves palestiniennes de Cisjordanie. L'une des mesures concerne le système judiciaire palestinien et l'autre l'Organisation de libération de la Palestine, et toutes deux montrent à quel point l'[I)AP reste fidèle au rôle qui lui a été essentiellement assigné par les accords d'Oslo : maintenir un statu quo fluide et dynamique au détriment des Palestiniens tout en servant les intérêts sécuritaires israéliens. 

La première mesure a été le décret présidentiel signé par Abbas et publié le vendredi 28 octobre, annonçant la création d'un « Conseil suprême des organes et agences judiciaires ». Ce conseil, dont l'objectif déclaré est de discuter des projets de loi relatifs au système judiciaire, de résoudre les problèmes administratifs connexes et de superviser le système judiciaire, sera dirigé par nul autre que le président de l'[I]AP, M. Abbas, qui est également président de l'OLP et du Fatah.

Les autres membres sont les présidents et les chefs de la Cour constitutionnelle, de la Cour suprême, de la Cour de cassation, de la haute cour pour les questions administratives, des tribunaux des forces de sécurité et du tribunal de la charia. Le ministre de la Justice, le procureur général et le conseiller juridique du président feront également partie du conseil. Il est prévu qu'il se réunisse une fois par mois.

Des juristes palestiniens et des organisations de défense des droits humains ont annoncé leur opposition véhémente à ce nouveau conseil suprême, affirmant qu'il contredit le principe de séparation des pouvoirs - législatif, judiciaire et exécutif - et viole plusieurs sections de la loi fondamentale palestinienne ainsi que les conventions internationales dont l'[I]AP est signataire. Dans des interviews accordées aux médias, ces experts et organisations affirment qu'il s'agit de la dernière d'une série de décisions qui ont déplacé l'autorité législative vers le pouvoir exécutif et son chef, tout en portant atteinte à l'indépendance du système judiciaire et en le subordonnant à Abbas et à ses acolytes.

Peu après la victoire du Hamas aux élections palestiniennes de 2006, Abbas et le Fatah ont empêché le Conseil législatif palestinien de se réunir régulièrement et de faire son travail. Dans un premier temps, ils ont imputé cette situation aux arrestations par Israël de nombreux membres élus du Hamas, ainsi qu'à l'absence du quorum nécessaire à l'adoption de lois. Après la brève guerre civile qui a éclaté à Gaza en juin 2007 entre le Hamas et le Fatah, et avec la division de l'autonomie palestinienne entre les deux régions et les deux organisations, le parlement palestinien a officiellement cessé de fonctionner.

Néanmoins, les représentants du Hamas à Gaza ont continué et continuent à se réunir en tant que conseil législatif et à adopter des lois qui ne s'appliquent qu'à Gaza.

En Cisjordanie, en revanche, la “législation” se fait par le biais de décrets présidentiels. Au cours des 15 dernières années, Abbas a signé environ 350 décrets présidentiels - bien plus que les 80 textes de loi qui ont été débattus et adoptés par le premier conseil législatif au cours de sa décennie d'existence, de 1996 à 2006.

Abbas s'appuie sur une interprétation très large de l'article 43 de la loi fondamentale palestinienne modifiée de 2003, qui donne à un décret présidentiel le pouvoir de loi uniquement « en cas de nécessité qui ne peut être différée et lorsque le Conseil législatif n'est pas en session ».

Jusqu'en 2018, certains parlementaires de Cisjordanie ont continué à se réunir officieusement et ont tenté de participer aux discussions sur les “projets de loi” débattus par le gouvernement, et de représenter le public auprès des autorités. Mais cette année-là, sur instruction d'Abbas, la Cour constitutionnelle a jugé que le Conseil législatif devait être dissous, alors que la Loi fondamentale stipule que son mandat ne prend fin que lorsqu'une nouvelle élection est organisée. Selon la Loi fondamentale, en cas de décès du président de l'[I]AP, il doit être remplacé par le président du parlement. Ce poste était occupé par le représentant du Hamas, Aziz Dweik, d'Hébron. L'opinion générale était qu'en dissolvant le parlement, Abbas et ses alliés cherchaient à contrecarrer de manière préventive un tel scénario. Bien que la Cour constitutionnelle ait ordonné à l'époque la tenue d'une nouvelle élection dans les six mois, Abbas et les siens ont réussi à la repousser encore et encore.

02/08/2022

AMIRA HASS
L’administration « civile » des territoires occupés, avant-garde de l'humiliation des Palestiniens

Amira Hass, Haaretz,2/8/2022
Traduit par
Fausto Giudice, Tlaxcala

Peu après trois heures du matin, le téléphone sonne dans la salle de crise du bureau de liaison et de coordination de la sécurité palestinienne. L'officier de service endormi entend la voix de son homologue, un soldat endormi de l'administration civile israélienne, qui lui annonce que l'armée est sur le point d'effectuer un raid dans telle ou telle localité palestinienne. Cela signifie que tous les policiers palestiniens doivent se rendre immédiatement dans leurs bureaux. Dans l'argot interne de l'administration civile, cette tâche est appelée « replier les SHOPIM », SHOPIM étant l'acronyme hébreu de « policiers palestiniens ». L'avertissement téléphonique et le "repli" sont une routine que les deux parties s'assurent de respecter, car « personne ne veut qu'un côté tire sur l'autre », comme l'a dit un ancien soldat de l'unité à Haaretz.

 

Les bureaux de l'administration civile, à El-Bireh, en Cisjordanie, en mars. L'organisation était censée avoir été démantelée, selon les accords d'Oslo. Photo : Amira Hass

Il se souvient que le délai donné aux Palestiniens pour "se replier" était d'environ une demi-heure. Une ancienne soldate de l'unité se souvient de 45 minutes. Un autre vétéran masculin se souvient que les Palestiniens ont obtempéré immédiatement ; elle, en revanche, se souvient qu'ils ont tergiversé. Ils se souviennent tous de l'interdiction de révéler la cible et l'objectif (arrestation, recensement, recherche d'armes, confiscation de fonds, démonstration de "gouvernabilité") du raid.

Ce sont trois des dizaines d'anciens soldats qui ont servi dans l'administration civile et qui ont témoigné sur l'unité pour l'ONG Briser le silence [Shovrim Shtika/Kasr as-Samtt/Breaking the Silence] dans sa nouvelle brochure, "Military Rule", publiée lundi. Cette organisation combative continue de déconstruire la domination militaire sur les Palestiniens, en exposant le mensonge de la "sécurité" et la fausseté de la "moralité".

Les soldats en service ne disaient pas à leurs collègues palestiniens qu'il y avait des "policiers qui se replient", mais plutôt qu'il y avait une "activité" en cours. Dans le jargon des forces de sécurité palestiniennes, la disparition de policiers palestiniens dans les rues en raison d'un raid israélien imminent est appelée "zéro-zéro". Une source de sécurité palestinienne n'était pas familière avec le terme "repli des SHOPIM" et a déclaré qu'il était humiliant. Mais la réalité - dans laquelle les policiers palestiniens se précipitent pour se cacher dans leurs bastions peu avant que les soldats israéliens ne fassent irruption dans une maison familiale, pointant leurs fusils sur les femmes et les enfants fraîchement réveillés - est encore plus humiliante. Il est mortellement humiliant d'interdire aux forces de sécurité palestiniennes de défendre leur peuple non seulement contre les soldats, mais aussi contre les civils israéliens qui les attaquent dans leurs champs et leurs vergers, à la maison et lorsqu'ils font paître leurs troupeaux. Le respect de cette interdiction par l'Autorité palestinienne est humiliant.

Et le contraire du repli est également humiliant : lorsque la partie palestinienne doit demander l'accord d'Israël pour que ses policiers aillent d'une ville donnée à un village voisin qui se trouve dans la zone B, ou parce que la route qui les relie traverse la zone C. « Ils ne font pas un pet sans notre feu vert. ... Même s'il n'y a pas de colons sur leur chemin, [même si] ils partent sans uniforme, sans arme, pour enquêter sur un accident de voiture, ils doivent quand même coordonner leur action avec la brigade », explique l'un des témoignages de la brochure.

Le facteur d'humiliation - un autre moyen d'expression du règne hostile d'une junte militaire - se lit aussi bien à l'intérieur qu'entre les lignes du livret : dans l'arabe approximatif parlé par les soldats aux guichets d'accueil des Palestiniens, dans le traitement méprisant même de ceux qui ont l'âge de leurs grands-pères et grands-mères, dans l'attribution de l'eau aux colons au détriment d'une communauté palestinienne, dans la révocation en bloc des permis de circulation. L'humiliation de l'autre est une partie inséparable de la violence bureaucratique - tueuse d'âme, de temps et d'espoir - que nous, Israéliens juifs, qui sommes les dépossesseurs d'un peuple de sa terre, avons transformée en une forme d'art. Nous utilisons le pouvoir des édits que nous avons composés, des lois, des procédures et des décisions rendues par des juges honorables pour abuser continuellement de l'autre peuple. L'administration civile n'a pas inventé le système, mais elle est le fer de lance et la lance de cette violence bureaucratique.