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15/12/2024

ZVI BAR’EL
La Syrie pourrait devenir un protectorat turc, ce qui limiterait la liberté d’action d’Israël

La Turquie, qui a un intérêt stratégique à faire de la Syrie un rempart contre les Kurdes, cherche à prendre la place de la Russie et de l’Iran, notamment en contrôlant l’espace aérien syrien.

Zvi Bar’el, Haaretz , 15/12/2024
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala 


Des membres de la communauté syrienne d’Istanbul célèbrent la chute du régime Assad, la semaine dernière. Photo Yasin Akgul/AFP
 

Un jour après qu’Israël a pris le contrôle du Mont Hermon syrien et des zones autour de Quneitra, le nouveau gouvernement syrien dirigé par Ahmed Hussein al-Chara (alias Abou Mohammed al-Joulani) a rapidement envoyé deux lettres au Conseil de sécurité et au secrétaire général de l’ONU, demandant à Israël de retirer ses forces du territoire syrien et de cesser ses attaques.

« La République arabe syrienne entame un nouveau chapitre de son histoire, son peuple aspirant à construire un État fondé sur la liberté, l’égalité, l’État de droit et la réalisation de ses espoirs de stabilité et de paix. Pourtant, en ce moment même, l’armée israélienne a envahi de nouvelles zones du territoire syrien dans les provinces de Jebel El Cheikh [nom arabe du Mont Hermon] et de Quneitra », peut-on lire dans la toute première lettre du gouvernement au Conseil de sécurité.

Lors de sa visite sur le plateau du Golan dimanche dernier, le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou n’a laissé aucune place au doute : « L’accord de 1974 qui établissait la séparation des forces entre Israël et la Syrie par le biais d’une zone tampon s’est effondré... Les soldats syriens ont abandonné leurs postes. Nous ne permettrons à aucune force hostile de s’établir le long de notre frontière ». Jeudi, Walla News a rapporté que Netanyahou avait informé le conseiller à la sécurité nationale des USA, Jake Sullivan, que les forces de défense israéliennes resteraient dans la zone tampon syrienne « jusqu’à ce qu’une force capable de faire respecter l’accord de séparation soit établie ».

Il s’agit du deuxième accord international régional violé par Israël, après sa prise de contrôle du corridor Philadelphie et le déploiement de forces à Gaza - des actions qui, selon l’Égypte, violent à la fois les accords de Camp David et l’accord de 2005 sur les déplacements et l’accès. Les situations sont toutefois différentes. Avec l’Égypte, Israël maintient des négociations en cours.
Par le passé, il a même permis aux forces égyptiennes de dépasser les limites de Camp David en renforçant leur présence militaire dans le Sinaï, y compris par l’utilisation de la puissance aérienne, pour combattre les organisations islamistes dans la péninsule. En revanche, Israël ne dialogue pas avec la Syrie et n’a pas l’intention de se retirer dans un avenir prévisible des territoires qu’il a récemment saisis.
La déclaration d’al-Chara, samedi, selon laquelle « dans l’état d’affaiblissement où se trouve la Syrie, elle n’a pas l’intention d’entrer dans une confrontation militaire... et nous n’avons aucun intérêt à entrer en conflit avec Israël » n’est pas de nature à rassurer Israël ou à modifier sa position concernant les territoires occupés.

Une course à la normalisation
Contrairement à la liberté d’action pratiquement illimitée d’Israël à Gaza - soutenue par la légitimation internationale et arabe pour agir avec force contre le Hamas, mais pas contre les civils -, sa position à l’égard de la Syrie est nettement différente. Bien qu’Al-Chara et son gouvernement n’aient pas été élus démocratiquement et qu’ils soient arrivés au pouvoir par la force militaire, craignant une guerre civile potentielle, ils ont déjà acquis une grande crédibilité arabe et internationale. Il continue à renforcer ce soutien par des déclarations diplomatiques stratégiques qui laissent entrevoir les politiques qu’il entend mener, et ces efforts portent déjà leurs fruits.

Après avoir reçu les félicitations de grands États arabes comme l’Égypte, l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis, des mesures concrètes ont été prises. La Turquie a rouvert son ambassade à Damas samedi, et le Qatar devrait faire de même dimanche. Les pays européens semblent également prêts à normaliser leurs relations avec la Syrie après une interruption de 13 ans, d’autant plus que certains d’entre eux avaient déjà envisagé de rétablir des liens avec le régime d’Assad.
Le soutien international croissant au nouveau gouvernement syrien pourrait bientôt se traduire par des pressions sur Israël pour qu’il se retire des territoires nouvellement occupés. Contrairement au Hamas, qui fait face à un large consensus international [disons : occidental, NdT] contre son rôle dans la future gouvernance de Gaza, le Ha’yat Tahrir al-Cham de Syrie est de plus en plus considéré comme une autorité légitime - bien qu’il soit toujours inscrit sur la liste des organisations terroristes et que son chef fasse l’objet d’une prime de 10 millions de dollars.
La Turquie, qui dispose de l’influence la plus importante, se positionne pour diriger les efforts visant à normaliser les relations internationales du nouveau régime syrien. Cette position s’explique par de multiples facteurs : Le soutien de longue date de la Turquie aux milices de Ha’yat Tahrir al-Cham, son contrôle sur l’Armée nationale syrienne (anciennement l’Armée syrienne libre) et sa maîtrise des postes-frontières cruciaux qui constituent la ligne de vie économique de la Syrie.
La Turquie entend désormais jouer le rôle de principal protecteur de la Syrie que tenaient auparavant l’Iran et la Russie. Cela va au-delà de simples relations de « bon voisinage » entre pays frontaliers. La Turquie a un intérêt stratégique primordial : transformer la Syrie en un rempart contre les forces kurdes, qu’elle combat depuis des décennies. Alors que la Turquie a condamné l’incursion d’Israël sur le territoire syrien, elle a elle-même occupé par la force certaines parties du nord-ouest de la Syrie. La semaine dernière, les milices qui lui sont alliées se sont emparées de la ville de Manbij à l’ouest de l’Euphrate, un bastion kurde, et la Turquie ne cache pas son intention d’étendre ses opérations à l’est de l’Euphrate.
La question kurde devrait dominer les prochaines discussions turco-syriennes, car sa résolution est cruciale pour la capacité d’Al-Chara à établir un État unifié. Un accord réussi permettrait d’éviter que les conflits internes ne dégénèrent en affrontements armés entre le régime et la minorité kurde, de faciliter le retrait des forces turques de Syrie et d’apaiser les tensions entre les autres minorités religieuses et ethniques du pays.

La situation des Kurdes
Le Conseil d’administration autonome kurde, qui gouverne les provinces kurdes du nord de la Syrie, supervise les Forces démocratiques syriennes (FDS) - un corps militaire composé de combattants kurdes et arabes que les USA ont établi comme une force efficace contre ISIS. La semaine dernière, le Conseil a annoncé que « les provinces du nord et de l’est de la Syrie sont une partie inséparable de la géographie syrienne » et a décidé de hisser le nouveau drapeau syrien des rebelles sur tous les bâtiments publics. Cela montre que les Kurdes ont l’intention de continuer à faire partie de la Syrie plutôt que d’établir une région indépendante, en acceptant l’autorité du nouveau gouvernement.

Toutefois, les Kurdes, qui contrôlent la plupart des champs pétroliers et les principales régions agricoles de la Syrie, posent des conditions à cette acceptation. Un document circulant sur les médias sociaux jeudi, censé présenter des projets de demandes de négociation entre les forces kurdes et Hayat Tahrir al-Cham sous la supervision des USA, détaillait plusieurs points clés. Les Kurdes se retireraient de Deir ez-Zor, Raqqa et Tabqa en échange du retour des résidents kurdes à Afrin, Tel Abyad et Ras al-Ayn, occupés par les Turcs, ainsi que du retrait des Turcs de ces zones.
Parmi les autres revendications figurent la reconnaissance d’une gouvernance autonome kurde, une aide au retour des Kurdes déplacés dans les villes occupées par la Turquie, une représentation militaire kurde dans le gouvernement qui sera formé après mars 2025 (date limite fixée par Al-Chara pour le mandat du gouvernement temporaire), l’engagement de retirer toutes les forces turques et la reconnaissance du kurde en tant que deuxième langue officielle.
Bien que cette liste reste préliminaire et sujette à des négociations, elle illustre clairement l’ampleur des défis auxquels le gouvernement syrien est confronté s’il cherche une solution diplomatique plutôt que militaire. Al-Chara, pris entre les pressions turques et les exigences kurdes, doit naviguer prudemment sur ce terrain miné, en équilibrant les aspirations turques et les intérêts kurdes, tout en maintenant de bonnes relations avec la Turquie sans fragmenter l’État.
L’évolution des relations turco-syriennes pourrait avoir un impact significatif sur les opérations d’Israël en Syrie. Au-delà des efforts internationaux visant à retirer les forces de Tsahal de la zone tampon, la Turquie pourrait déterminer la liberté opérationnelle aérienne d’Israël en Syrie. Alors qu’Israël bénéficiait auparavant d’un accès presque illimité, coordonné avec le commandement russe, à la base aérienne de Khmeimim, les forces russes ont commencé à se retirer. La plupart des avions russes ont quitté la Syrie et Moscou négocie actuellement le maintien de sa présence navale dans le port de Tartous.
En l’absence des forces aériennes syriennes et russes, la Turquie pourrait devenir le contrôleur de facto de l’espace aérien syrien et, en partenariat avec le gouvernement syrien, mettre fin à la liberté opérationnelle d’Israël. Bien que le besoin d’Israël pour une telle liberté puisse diminuer de manière significative avec le départ de la plupart des forces iraniennes et l’intention d’al-Chara d’empêcher les activités du Hezbollah en Syrie, Israël reste sceptique quant à la capacité du nouveau gouvernement syrien à bloquer les transferts d’armes de la Syrie vers le Liban. Par conséquent, Israël devra probablement conclure des accords avec la Turquie - des accords qui pourraient avoir un coût politique dans d’autres régions, y compris à Gaza.

11/12/2024

العدالة الانتقالية وبناء السلطة القضائية المستقلة في سوريا
Transitional Justice and Building an Independent Judiciary in Syria
Justicia transicional y construcción de un poder judicial independiente en Siria
Justice transitionnelle et construction d'un système judiciaire indépendant en Syrie
Übergangsjustiz und Aufbau einer unabhängigen Justiz in Syrien
Giustizia di transizione e costruzione di un potere giudiziario indipendente in Siria

 

العدالة الانتقالية وبناء السلطة القضائية المستقلة في سوريا
مجموعة من أجل العدالة في سوريا

بدأت مع انقلاب 8 آذار/ مارس 1963 وإعلان حالة الطوارئ مرحلة اغتيال استقلال القضاء، وقد وقفت الرابطة السورية لحقوق الإنسان ونقابات المحامين في وجه القرارات الجائرة بحق القضاة والنقابات المهنية. مع اغتيال السلطة القضائية المستقلة استفردت الطغمة الأمنية بالسلطات التنفيذية والتشريعية والقضائية: قضاءُ تعليمات برسم الطاغية، مجلس شعب دون شعب منتخب، ووزراء يديرون أمور الدولة المخطوفة.
ستون عاما من الطغيان، ومن المقاومة المدنية... كلنا عانى من السجن والنفي والتنكيل، ولكن بقي الحلم ببناء دولة قانون أملنا في الخلاص وتخليص شعبنا من هذا الكابوس الذي عاش وأزمن وأجرم بحق أجيال.
لن يشوه ما فعله النظام المجرم وغيره، صفاء الرؤية عندنا، ونرفض منطق الثأر والقتل كذلك منطق القتل "المشروع" والقتل غير المشروع. إن مرجعيتنا في إقامة العدل تستند إلى المبادئ الإنسانية التي صدقت عليها الدول الإسلامية وغير الإسلامية والشرعة الدولية لحقوق الإنسان.
في العام/2004/ صدر تقرير الأمين العام للأمم المتحدة كوفي عنان- عن العدالة الانتقالية في مجتمعات الصراع. وقد عالج ثلاث قضايا رئيسية وهامة:
الأولى: تركيز الأمم المتحدة على مسألتي العدالة الانتقالية وسيادة القانون. في مجتمعات الصراع وما بعده.
الثانية: ايلاء "التقييمات والمشاركات والاحتياجات والأماني المحلية" الاهتمام المناسب وتقديم الدعم الأممي على هذا الأساس.
الثالثة: وجوب دعم الأمم المتحدة للدوائر المحلية المعنية بالإصلاح والمساعدة في بناء المؤسسات الوطنية لقطاع العدالة. اضافة الى ضرورة المساعدة على سد الفراغ في مجال سيادة القانون.
هذه المسائل الثلاثة نحن بأمس الحاجة لها في سوريا اليوم، لذا تم التواصل مع خمسين قاضيا ومحاميا وحقوقيا من مختلف المناطق السورية لتدريبهم بشكل مكثف على أساسيات العدالة الإنتقالية وفق تجارب الشعوب والسمات العيانية لكل بلد وفق التعريف الدولي للمصطلح «الآليات التى يجب أن يقوم بها المجتمع للتعامل مع تركة تجاوزات الماضى واسعة النطاق، بغية كفالة المساءلة وإقامة العدالة وتحقيق المصالحة». والتزامات سورية في العهد الخاص بالحقوق السياسية والمدنية المصدق عليه منذ 1968.
عدد من أهم الكفاءات الدولية التي عملت معنا في تدريب لتونس والسودان والمغرب جرى الاتصال معها لتكون في عداد المدربين ولبناء الهيئة العليا المستقلة للعدالة الانتقالية.
ستقوم هذه الهيئة بالتوثيق والرصد والملاحقة لكل الجرائم الجسيمة التي ارتكبت وترتكب بحق أبناء الشعب السوري في مختلف المناطق. ولن يفلت من العقاب أي شخص تلوثت يديه بدم السوريين.
إننا نتوجه إلى المجموعات المسلحة بالقول: لن يكون أحد منكم فوق القانون وخارج المحاسبة. كذلك لمن فر أو هرب من البلاد، العالم قرية صغيرة ولن يفلت من يرتكب جرائم جسيمة بحق أبناء سورية الحبيبة أو نهب أموال الناس من المحاسبة أينما كان.
إقامة العدالة هي ضمان بناء سوريا الحرة المستقلة الكريمة لكل أبنائها.
وقع على هذا المحضر: منظمات حقوقية ومدنية وشخصيات قانونية سورية من داخل وخارج البلاد.
ترسل أسماء من يُقسم على احترام هذا العهد إلى البريد الإلكتروني tribunalswatch@gmail.com
سيكون الإعلان عن أهم المبادرين والمبادرات في اليوم العالمي لحقوق الإنسان في
10/12/2024


Transitional Justice and Building an Independent Judiciary in Syria
Group for Justice in Syria, December 10, 2024, the International Human Rights Day
With the coup of March 8, 1963, and the declaration of a state of emergency, the phase of assassinating the independence of the judiciary began. The Syrian League for Human Rights and the lawyers' unions stood in the face of unjust decisions against judges and professional unions. With the assassination of the independent judiciary, the security junta monopolized the executive, legislative, and judicial powers: a judiciary at the tyrant’s behest, a people's assembly without elected people, and ministers who manage the affairs of the kidnapped state.
Sixty years of tyranny, of civil resistance... We all suffered from imprisonment, exile, and abuse, but the dream of building a state of law remained our hope for salvation and ridding our people of this nightmare that lived, lasted, and committed crimes against generations.
What the criminal regime and others did will not distort the clarity of our vision, and we reject the logic of revenge and killing as well as the logic of "legitimate" killing and illegal killing. Our reference in the administration of justice is based on humanitarian principles ratified by Muslim and non- Muslim countries and the International Bill of Human Rights.
In 2004, the United Nations Secretary-General Kofi Annan published a report entitled "Transitional Justice in Conflict Societies." It addressed three main and important issues:
First, the United Nations focuses on transitional justice and the rule of law in conflict societies and beyond.
Second, Give appropriate attention to "local assessments, participation, needs and aspirations" and provide international support based on this.
Third, the United Nations must support local reform services and help build national justice sector institutions. It also needs to help fill the vacuum in the field of the rule of law.
These three issues are urgently needed in Syria today, so we contacted fifty judges, lawyers, and human rights activists from various Syrian regions to intensively train them on the basics of transitional justice according to the experiences of people and the specific characteristics of each country according to the international definition of the term "mechanisms that society must undertake to deal with the legacy of large-scale past transgressions, to ensure accountability, establish justice and achieve reconciliation." Syria's obligations under the International Covenant on Civil and Political Rights, ratified in 1968.
Several of the most essential international competencies who worked with us in training Tunisia, Sudan, and Morocco were contacted to be among the trainers and build the Independent High Commission for Transitional Justice.
This body will document, monitor, and prosecute all grave crimes committed and are being committed against the Syrian people in various regions. No one whose hands are stained with Syrian blood will go unpunished.
We want to clarify to all armed groups that no one is above the law or can escape accountability. This also applies to those who have fled the country; the world is interconnected, and those who commit serious crimes against the people of Syria or steal from them will ultimately face justice, no matter where they are.
Establishing justice is essential for creating a free, independent, and dignified Syria for all its people.
This statement is supported by Syrian civil and human rights organizations and legal experts from within the country and abroad.
Please send the names of those who pledge to uphold this commitment to tribunalswatch@gmail.com so we can keep track of them.
We will announce the key initiators and initiatives on December 10, 2024, on International Human Rights Day.

Justicia transicional y construcción de un poder judicial independiente en Siria
Grupo por la Justicia en Siria, 10 de diciembre de 2024, Día Internacional de los Derechos Humanos
Con el golpe de Estado del 8 de marzo de 1963 y la declaración del estado de emergencia, comenzó la fase de asesinato de la independencia del poder judicial. La Liga Siria de Derechos Humanos y los sindicatos de abogados se opusieron a las decisiones injustas contra los jueces y los sindicatos profesionales. Con el asesinato del poder judicial independiente, la junta de seguridad monopolizó los poderes ejecutivo, legislativo y judicial: un poder judicial bajo los órdenes del tirano, una asamblea popular sin gente elegida y ministros que gestionan los asuntos del Estado secuestrado.
Sesenta años de tiranía, de resistencia civil... Todos sufrimos encarcelamiento, exilio y abusos, pero el sueño de construir un Estado de derecho siguió siendo nuestra esperanza de salvación y de librar a nuestro pueblo de esta pesadilla que vivió, duró y cometió crímenes contra generaciones.
Lo que hicieron el régimen criminal y otros no distorsionará la claridad de nuestra visión, y rechazamos la lógica de la venganza y la matanza, así como la lógica de la matanza «legítima» y la matanza ilegal. Nuestra referencia en la administración de justicia se basa en los principios humanitarios ratificados por los países musulmanes y no musulmanes y en la Carta Internacional de Derechos Humanos.
En 2004, el Secretario General de las Naciones Unidas, Kofi Annan, publicó un informe titulado «Justicia de transición en las sociedades en conflicto». En él se abordaban tres cuestiones principales e importantes:
Primero, las Naciones Unidas se centran en la justicia transicional y el Estado de derecho en las sociedades en conflicto y más allá.
Segundo, prestar la debida atención a «las evaluaciones, la participación, las necesidades y las aspiraciones locales» y proporcionar apoyo internacional en función de ello.
En tercer lugar, las Naciones Unidas deben apoyar los servicios locales de reforma y ayudar a crear instituciones nacionales del sector de la justicia. También deben ayudar a llenar el vacío existente en el ámbito del Estado de Derecho.
Estas tres cuestiones son urgentes en la Siria actual, por lo que nos pusimos en contacto con cincuenta jueces, abogados y activistas de derechos humanos de diversas regiones sirias para formarles intensivamente sobre los fundamentos de la justicia transicional de acuerdo con las experiencias de las personas y las características específicas de cada país según la definición internacional del término «mecanismos que la sociedad debe emprender para hacer frente al legado de transgresiones pasadas a gran escala, garantizar la rendición de cuentas, establecer la justicia y lograr la reconciliación.» Obligaciones de Siria en virtud del Pacto Internacional de Derechos Civiles y Políticos, ratificado en 1968.
Varias de las competencias internacionales más esenciales que trabajaron con nosotros en la formación de Túnez, Sudán y Marruecos fueron contactadas para formar parte de los formadores y construir la Alta Comisión Independiente para la Justicia Transicional.
Este organismo documentará, supervisará y perseguirá todos los graves crímenes cometidos y que se están cometiendo contra el pueblo sirio en diversas regiones. Nadie cuyas manos estén manchadas de sangre siria quedará impune.
Queremos aclarar a todos los grupos armados que nadie está por encima de la ley ni puede eludir la rendición de cuentas. Esto también se aplica a quienes han huido del país; el mundo está interconectado, y quienes cometan delitos graves contra el pueblo de Siria o le roben acabarán enfrentándose a la justicia, estén donde estén.
Establecer la justicia es esencial para crear una Siria libre, independiente y digna para todo su pueblo.
Esta declaración cuenta con el apoyo de organizaciones civiles y de derechos humanos sirias y de expertos jurídicos del país y del extranjero.
Por favor, envíen los nombres de quienes se comprometan a mantener este compromiso a tribunalswatch@gmail.com para que podamos seguirlos.
Anunciaremos los principales iniciadores e iniciativas el 10 de diciembre de 2024, en el Día Internacional de los Derechos Humanos.

Justice transitionnelle et construction d'un système judiciaire indépendant en Syrie
Groupe pour la justice en Syrie, 10 décembre 2024, Journée internationale des droits humains
Avec le coup d'État du 8 mars 1963 et la déclaration de l'état d'urgence, la phase d'assassinat de l'indépendance du pouvoir judiciaire a commencé. La Ligue syrienne des droits de l'homme et les syndicats d'avocats se sont opposés aux décisions injustes prises à l'encontre des juges et des syndicats professionnels. Avec l'assassinat de la justice indépendante, la junte sécuritaire a monopolisé les pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire : une justice aux ordres du tyran, une assemblée populaire sans élus de peuple et des ministres qui gèrent les affaires de l'Etat kidnappé.
Soixante ans de tyrannie, de résistance civile... Nous avons tous souffert de l'emprisonnement, de l'exil et des abus, mais le rêve de construire un État de droit est resté notre espoir de salut et de débarrasser notre peuple de ce cauchemar qui a vécu, duré et commis des crimes contre des générations.
Ce que le régime criminel et d'autres ont fait ne faussera pas la clarté de notre vision, et nous rejetons la logique de la vengeance et du meurtre, ainsi que la logique du meurtre « légitime » et du meurtre illégal. Notre référence en matière d'administration de la justice se fonde sur les principes humanitaires ratifiés par les pays musulmans et non musulmans et sur la Charte internationale des droits humains.
En 2004, le secrétaire général des Nations unies, Kofi Annan, a publié un rapport intitulé « La justice transitionnelle dans les sociétés en conflit ». Ce rapport aborde trois questions principales et importantes :
Premièrement, les Nations unies se concentrent sur la justice transitionnelle et l'État de droit dans les sociétés en conflit et au-delà.
Deuxièmement, accorder une attention appropriée aux « évaluations, à la participation, aux besoins et aux aspirations au niveau local » et fournir un soutien international sur cette base.
Troisièmement, les Nations unies doivent soutenir les services de réforme locaux et aider à mettre en place des institutions nationales dans le secteur de la justice. Elles doivent également contribuer à combler le vide dans le domaine de l'État de droit.
Nous avons donc contacté cinquante juges, avocats et militants des droits humains de différentes régions syriennes afin de les former de manière intensive aux bases de la justice transitionnelle en fonction des expériences des personnes et des caractéristiques spécifiques de chaque pays, conformément à la définition internationale du terme « mécanismes que la société doit entreprendre pour traiter l'héritage des transgressions passées à grande échelle, pour garantir la responsabilité, établir la justice et parvenir à la réconciliation ». Les obligations de la Syrie en vertu du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, ratifié en 1968.
Plusieurs des compétences internationales les plus essentielles qui ont travaillé avec nous pour former en Tunisie, au Soudan et au Maroc ont été contactées pour faire partie des formateurs et mettre en place la Haute Commission indépendante pour la justice transitionnelle.
Cet organe documentera, surveillera et poursuivra tous les crimes graves qui ont été commis et sont commis contre le peuple syrien dans diverses régions. Aucune personne dont les mains sont tachées de sang syrien ne restera impunie.
Nous voulons faire comprendre à tous les groupes armés que personne n'est au-dessus de la loi et ne peut échapper à ses responsabilités. Cela s'applique également à ceux qui ont fui le pays ; le monde est interconnecté, et ceux qui commettent des crimes graves contre le peuple syrien ou qui le volent finiront par être traduits en justice, où qu'ils se trouvent.
L'instauration de la justice est essentielle à la création d'une Syrie libre, indépendante et digne pour l'ensemble de son peuple.
Cette déclaration est soutenue par des organisations syriennes de défense des droits humains et civils, ainsi que par des experts juridiques syriens et étrangers.
Veuillez envoyer les noms de personnes qui s'engagent à respecter cet engagement à tribunalswatch@gmail.com afin que nous puissions assurer le suivi avec elles.
Nous annoncerons les principaux initiateurs et initiatives le 10 décembre 2024, à l'occasion de la Journée internationale des droits de l'homme. 

 
Übergangsjustiz und Aufbau einer unabhängigen Justiz in Syrien
Gruppe für Gerechtigkeit in Syrien, 10. Dezember 2024, Internationaler Tag der Menschenrechte
Mit dem Staatsstreich vom 8. März 1963 und der Ausrufung des Ausnahmezustands begann die Phase der Ermordung der Unabhängigkeit der Justiz. Die Syrische Liga für Menschenrechte und die Anwaltsverbände stellten sich ungerechten Entscheidungen gegen Richter und Berufsverbände entgegen. Mit der Ausschaltung der unabhängigen Justiz monopolisierte die Sicherheitsjunta die Exekutive, Legislative und Judikative: eine Justiz auf Geheiß des Tyrannen, eine Volksversammlung ohne ein gewähltes Volk und Minister, die die Angelegenheiten des entführten Staates verwalten.
Sechzig Jahre Tyrannei, ziviler Widerstand ... Wir alle litten unter Gefangenschaft, Exil und Misshandlung, aber der Traum vom Aufbau eines Rechtsstaats blieb unsere Hoffnung auf Erlösung und darauf, unser Volk von diesem Albtraum zu befreien, der über Generationen hinweg andauerte und Verbrechen beging.
Was das kriminelle Regime und andere getan haben, wird die Klarheit unserer Vision nicht trüben, und wir lehnen die Logik von Rache und Töten ebenso ab wie die Logik des „legitimen“ Tötens und des illegalen Tötens. Unsere Referenz in der Rechtspflege basiert auf humanitären Grundsätzen, die von muslimischen und nicht-muslimischen Ländern ratifiziert wurden, sowie auf der Internationalen Menschenrechtscharta.
Im Jahr 2004 veröffentlichte der Generalsekretär der Vereinten Nationen, Kofi Annan, einen Bericht mit dem Titel „Transitional Justice in Conflict Societies“. Darin wurden drei wichtige Hauptthemen behandelt:
Erstens konzentrieren sich die Vereinten Nationen auf Übergangsjustiz und Rechtsstaatlichkeit in Konfliktgesellschaften und darüber hinaus.
Zweitens: „Lokale Bewertungen, Beteiligung, Bedürfnisse und Bestrebungen“ angemessen berücksichtigen und darauf basierend internationale Unterstützung leisten.
Drittens müssen die Vereinten Nationen lokale Reformdienste unterstützen und beim Aufbau nationaler Institutionen des Justizsektors helfen. Sie müssen auch dazu beitragen, das Vakuum im Bereich der Rechtsstaatlichkeit zu füllen.
Diese drei Punkte sind in Syrien heute dringend erforderlich. Deshalb haben wir fünfzig Richter, Anwälte und Menschenrechtsaktivisten aus verschiedenen syrischen Regionen kontaktiert, um sie intensiv in den Grundlagen der Übergangsjustiz zu schulen, und zwar gemäß den Erfahrungen der Menschen und den spezifischen Merkmalen jedes Landes gemäß der internationalen Definition des Begriffs „Mechanismen, die die Gesellschaft ergreifen muss, um mit dem Erbe vergangener schwerwiegender Verstöße umzugehen, Rechenschaftspflicht zu gewährleisten, Gerechtigkeit herzustellen und Versöhnung zu erreichen“. Syriens Verpflichtungen gemäß dem Internationalen Pakt über bürgerliche und politische Rechte, der 1968 ratifiziert wurde.
Mehrere der wichtigsten internationalen Kompetenzträger, die mit uns bei der Schulung in Tunesien, Sudan und Marokko zusammengearbeitet haben, wurden kontaktiert, um zu den Ausbildern zu gehören und die Unabhängige Hohe Kommission für Übergangsjustiz aufzubauen.
Diese Einrichtung wird alle schweren Verbrechen, die gegen das syrische Volk in verschiedenen Regionen begangen wurden und werden, dokumentieren, überwachen und strafrechtlich verfolgen. Niemand, dessen Hände mit syrischem Blut befleckt sind, wird ungestraft davonkommen.
Wir möchten allen bewaffneten Gruppen klarmachen, dass niemand über dem Gesetz steht oder sich der Rechenschaftspflicht entziehen kann. Dies gilt auch für diejenigen, die aus dem Land geflohen sind. Die Welt ist vernetzt, und diejenigen, die schwere Verbrechen gegen das syrische Volk begehen oder es bestehlen, werden letztendlich vor Gericht gestellt, egal wo sie sich befinden.
Die Schaffung von Gerechtigkeit ist unerlässlich, um ein freies, unabhängiges und würdevolles Syrien für alle seine Menschen zu schaffen.
Diese Erklärung wird von syrischen Bürger- und Menschenrechtsorganisationen sowie Rechtsexperten aus dem In- und Ausland unterstützt.
Bitte senden Sie die Namen derjenigen, die sich zur Einhaltung dieser Verpflichtung verpflichten, an tribunalswatch@gmail.com, damit wir sie im Auge behalten können.
Wir werden die wichtigsten Initiatoren und Initiativen am 10. Dezember 2024, dem Internationalen Tag der Menschenrechte, bekannt geben.

Giustizia di transizione e costruzione di un potere giudiziario indipendente in Siria
Gruppo per la Giustizia in Siria, 10 dicembre 2024, Giornata internazionale dei diritti umani
Con il colpo di Stato dell'8 marzo 1963 e la dichiarazione dello stato di emergenza, è iniziata la fase di assassinio dell'indipendenza della magistratura. La Lega siriana per i diritti umani e i sindacati degli avvocati si sono opposti alle decisioni ingiuste contro i giudici e i sindacati professionali. Con l'assassinio della magistratura indipendente, la giunta di sicurezza ha monopolizzato i poteri esecutivo, legislativo e giudiziario: una magistratura agli ordini del tiranno, un'assemblea popolare senza un popolo eletto e ministri che gestiscono gli affari dello Stato sequestrato.
Sessant'anni di tirannia, di resistenza civile... Tutti noi abbiamo sofferto per la prigionia, l'esilio e gli abusi, ma il sogno di costruire uno Stato di diritto è rimasto la nostra speranza di salvezza e di liberare il nostro popolo da questo incubo che ha vissuto, è durato e ha commesso crimini contro le generazioni.
Ciò che il regime criminale e altri hanno fatto non distorcerà la chiarezza della nostra visione, e rifiutiamo la logica della vendetta e dell'uccisione, così come la logica dell'uccisione “legittima” e dell'uccisione illegale. Il nostro riferimento nell'amministrazione della giustizia si basa sui principi umanitari ratificati dai Paesi musulmani e non e sulla Carta internazionale dei diritti umani.
Nel 2004, il Segretario generale delle Nazioni Unite Kofi Annan ha pubblicato un rapporto intitolato “Transitional Justice in Conflict Societies”. Il rapporto affrontava tre questioni principali e importanti:
Primo, le Nazioni Unite si concentrano sulla giustizia di transizione e sullo Stato di diritto nelle società in conflitto e oltre.
Secondo, prestare adeguata attenzione alle “valutazioni, alla partecipazione, ai bisogni e alle aspirazioni locali” e fornire un sostegno internazionale basato su questo.
In terzo luogo, le Nazioni Unite devono sostenere i servizi locali di riforma e aiutare a costruire le istituzioni nazionali del settore giudiziario. Inoltre, devono contribuire a colmare il vuoto nel campo dello Stato di diritto.
Queste tre questioni sono urgentemente necessarie in Siria oggi, quindi abbiamo contattato cinquanta giudici, avvocati e attivisti per i diritti umani provenienti da varie regioni siriane per formarli in modo intensivo sulle basi della giustizia di transizione in base alle esperienze delle persone e alle caratteristiche specifiche di ogni Paese, secondo la definizione internazionale del termine “meccanismi che la società deve intraprendere per affrontare l'eredità di trasgressioni del passato su larga scala, per garantire la responsabilità, stabilire la giustizia e raggiungere la riconciliazione”. Gli obblighi della Siria ai sensi del Patto internazionale sui diritti civili e politici, ratificato nel 1968.
Alcune delle competenze internazionali più essenziali che hanno lavorato con noi nella formazione in Tunisia, Sudan e Marocco sono state contattate per essere tra i formatori e costruire l'Alta Commissione Indipendente per la Giustizia di Transizione.
Questo organismo documenterà, monitorerà e perseguirà tutti i gravi crimini commessi e che vengono commessi contro il popolo siriano in varie regioni. Nessuno che abbia le mani macchiate di sangue siriano resterà impunito.
Vogliamo chiarire a tutti i gruppi armati che nessuno è al di sopra della legge o può sfuggire alle responsabilità. Questo vale anche per coloro che sono fuggiti dal Paese; il mondo è interconnesso e coloro che commettono gravi crimini contro il popolo siriano o lo derubano alla fine dovranno affrontare la giustizia, indipendentemente da dove si trovino.
Stabilire la giustizia è essenziale per creare una Siria libera, indipendente e dignitosa per tutto il suo popolo.
Questa dichiarazione è sostenuta da organizzazioni siriane per i diritti civili e umani e da esperti legali del Paese e dell'estero.
Vi preghiamo di inviare i nomi di coloro che si impegnano a mantenere questo impegno a tribunalswatch@gmail.com, in modo che possiamo tenerne traccia.
Annunceremo i principali promotori e le iniziative il 10 dicembre 2024, in occasione della Giornata internazionale dei diritti umani.




09/12/2024

Syrie : comment les islamistes se sont emparés du pouvoir

 

Pierre Barbancey, L'Humanité, 8/12/2024

La capitale, Damas, est tombée dimanche 8 décembre sans coup férir et avec elle le régime baassiste mis en place par les Assad. Bachar a quitté le pays tandis que le chef djihadiste, Abou Mohammed Al Jolani, est entré triomphalement dans la grande mosquée des Omeyyades. Mais les différentes factions ne sont pas unies et les combats continuent notamment dans les zones kurdes.


Qui aurait pu penser qu’en seulement douze jours, le leader djihadiste Ahmed Al Sharaa, plus connu sous son nom de guerre de Abou Mohammed Al Jolani, à la tête de Hayat Tahrir al-Cham (HTS), allait entrer sous les acclamations de la foule dans la fameuse et si belle mosquée des Omeyyades, à Damas ?

À l’inverse, c’est en catimini, sans doute dans la nuit de samedi à dimanche, que Bachar Al Assad s’est enfui vers une destination inconnue. La Russie ? L’Iran ? Interrogé à ce sujet, Anwar Gargash, conseiller du président des Émirats arabes unis (EAU), n’a pas nié pas qu’Assad s’était réfugié dans son pays. Mais il n’a pas non plus confirmé, maniant juste l’humour, une fois n’est pas coutume. « Lorsque les gens demandent où va aller Bachar Al Assad, je réponds qu’en y regardant de plus près, il s’agit d’une note de bas de page de l’Histoire », a-t-il lâché.

Ce n’est sans doute pas la préoccupation la plus importante en Syrie. La première expression de joie qui a prévalu a consisté à s’attaquer aux symboles du pouvoir. Les affiches à l’effigie de Bachar Al Assad ont été déchirées, les statues le représentant ainsi que celles de son père ont été déboulonnées. Jusqu’au drapeau national réduit en charpie et remplacé par un autre.

Des gages de bonne conduite

Les deux étoiles centrales vertes ont été remplacées par trois rouges et la bande rouge supérieure a laissé la place à une étoffe verte ! Mais l’euphorie pourrait bien laisser la place à la désillusion. Si, en Syrie comme ailleurs, tout le monde se réjouit de la chute des Assad, les forces qui ont pris leur place ne sont peut-être pas porteuses d’un avenir très réjouissant.

Depuis le début de l’offensive, Al Jolani fait preuve d’une rare intelligence politique. L’homme, né en 1984 à Deraa, au sud du pays, où ont démarré les premières manifestations en 2011, était pourtant plus préoccupé par le djihad que par les revendications sociales.

Parti en Irak en 2003, il côtoie très vite les leaders irakiens et jordaniens d’al-Qaida, puis les fondateurs de l’« État islamique » en Irak, qui va devenir l’« État islamique » en Irak et au Levant (EIIL) – Daech – après son expansion en Syrie. Al Jolani va fonder le front al Nosra à son retour au pays en 2011 après les premiers rassemblements contre le gouvernement. Il prêtera d’abord allégeance à l’organisation de Ben Laden avant de faire, officiellement, cavalier seul, développant un djihad national (qu’il n’a pas abandonné) en fondant Hayat Tahrir al-Cham.

Regroupé à Idleb, au nord, avec toutes les factions islamistes qui ont perdu du terrain après 2015 et l’arrivée de l’armée russe, il s’impose comme leader et compose avec la Turquie dont les 10 000 hommes postés dans cette province sont les garants d’un cessez-le-feu avec le pouvoir central. L’occasion d’un rapprochement et de la mise en place d’une aide logistique et matérielle de la part d’Ankara.

Mais, depuis le 27 novembre, il donne des gages de bonne conduite. Des signaux certainement destinés aux pays occidentaux. « La victoire que nous avons remportée est une victoire pour tous les Syriens. Bachar Al Assad a propagé le sectarisme et aujourd’hui notre pays appartient à nous tous ! » a-t-il affirmé dimanche. Quelques jours auparavant, il assurait que toutes les communautés avaient leur place en Syrie et appelait au retour de tous les réfugiés.

L’offensive qui a démarré le 27 novembre à Idleb, au nord du pays, et qui s’est terminée dimanche 8 décembre, dans la capitale, après avoir traversé Alep, Hama et Homs, est surtout révélatrice de l’inanité du pouvoir. Celui-ci tenait encore grâce à quelques poches où vivaient les populations alaouites – dont fait partie le clan Assad – et, pour les zones mixtes, grâce à une bourgeoisie sunnite prête à toutes les compromissions pourvu que son statut de classe soit préservé.

Mais, dans l’ensemble, c’est toute une population laborieuse, paysans et travailleurs, qui a fêté la chute d’un régime honni parce qu’incapable de comprendre et encore moins de répondre aux souffrances d’un peuple et de lui ouvrir un avenir autre que celui de l’allégeance ou de la prison.

Les franges les plus progressistes éradiquées

La répression menée par le régime autoritaire contre toute forme d’opposition a surtout éradiqué les franges les plus progressistes, qui ont perdu toute capacité d’organisation et d’expression. Ce qui n’est pas le cas des mouvements islamistes. Eux aussi traqués et emprisonnés, ils ont su garder, à travers les mosquées, un canal politique pour leurs messages d’autant plus difficile à maîtriser qu’ils étaient diffusés publiquement, au grand dam des moukhabarat, les agents des services de renseignements.

C’est ce qui s’est passé en Syrie où les difficultés économiques grandissantes dans les années 2000, l’abandon de l’ouverture politique et d’expression (le fameux « printemps de Damas ») remplacée par une répression féroce, et la mainmise du parti Baas (nationaliste arabe laïc) sur les institutions publiques, se sont traduites par une colère qui a explosé en 2011. Les seules forces organisées – bien que réprimées – se trouvaient être les organisations islamistes, notamment les Frères musulmans.

À l’extérieur, les pays européens, les États-Unis et les pays du Golfe mettaient sur pied une opposition dirigée par des intellectuels laïcs en exil, masquant un projet islamiste pourtant déjà présent. Le mouvement populaire, parti de Deraa, axé d’abord sur des revendications sociales, s’est vite tourné contre le pouvoir central, préférant les balles au dialogue. Dans cet espace se sont infiltrés des groupes armés, en place dès 2011 mais particulièrement actifs à partir de 2012, notamment avec l’arrivée d’al-Qaida puis de Daech.

De nombreuses questions demeurent et la situation est loin d’être claire. Les images sur les réseaux sociaux – comme celles de Jolani entrant dans la mosquée des Omeyyades – ne sauraient faire oublier que les combats se poursuivent dans le pays et sur plusieurs fronts. Le HTS a décidé de se concentrer sur les villes de Lattaquié et de Tartous, sur la côte méditerranéenne.

Les forces venues du Sud, plus hétéroclites et moins disciplinées que les djihadistes, sont d’abord entrées à Damas. Certaines unités ont alors décidé de se diriger vers Deir ez-Zor, en prenant au passage un village détenu par Daech, toujours en embuscade dans la vallée de l’Euphrate, très actif ces derniers mois, et dont on ne sait pas encore comment il va se comporter vis-à-vis des autres groupes.

Le rôle de Tel-Aviv

Mais, pour l’Armée nationale syrienne (ANS), composée de factions islamistes et créée par la Turquie, l’objectif numéro un est les zones kurdes. D’importants combats avaient lieu ce 8 décembre à Manbij, dans le gouvernorat d’Alep, au sud de Kobané, opposant l’ANS aux Forces démocratiques syriennes (FDS) dominées par les groupes de combattants kurdes YPG et YPJ.

Le but de l’ANS réside dans la destruction de l’Administration autonome du nord-est syrien (Aanes) en s’appuyant sur les communautés arabes. Celles-ci ont, jusque-là, accepté les autorités kurdes par rejet du pouvoir central. Elles pourraient bien se retourner contre les Kurdes à la faveur de l’arrivée des islamistes de l’ANS.

L’enjeu syrien n’est pas que national. Avec la disparition du pouvoir baasiste, les cartes sont redistribuées. Personne n’ignore plus le rôle de Tel-Aviv, qui, en bombardant les positions du Hezbollah en Syrie, a facilité la progression de HTS. Israël a d’ailleurs pris, dimanche, le contrôle du versant syrien du mont Hermon sur le plateau du Golan, selon Haaretz. Et les Kurdes ont coupé les voies d’approvisionnement du Hezbollah par l’Iran.

La Russie et l’Iran, principaux alliés de Bachar Al Assad, n’ont pas pu (certains disent pas voulu) le sauver, se bornant à protéger son départ de Syrie. Les discussions entamées au Qatar avec la Turquie n’ont rien donné. Recep Tayyip Erdogan savait qu’il n’avait rien besoin de concéder.

09/06/2023

FAUSTO GIUDICE
Annecy : un amok “au nom de Jésus-Christ”

Fausto Giudice, Tlaxcala, 9/6/2023

Amok, ce mot venant du terme malais amuk signifiant “rage incontrôlable”, désigne des actes commis par des personnes -généralement des hommes - prises soudainement de folie meurtrière et se livrant à des attaques à l’arme blanche contre des individus pris au hasard d’une course finissant généralement par la mise à mort ou le suicide du meurtrier. Cette forme extrême de décompensation suicidaire, observée en Malaisie et dans d’autres pays, a fait l’objet d’innombrables études ethnologiques et psychiatriques, d’œuvres littéraires – de Rudyard Kipling à Romain Gary en passant par Stefan Zweig – et de films (au moins 9 depuis 1927).


Ce qui s’est passé au bord du lac d’Annecy le jeudi 8 juin 2023 est un cas typique d’amok : Abdelmasih Hannoun, un Syrien de 31 ans, a poignardé 4 petits enfants sous les yeux de leurs mères horrifiées puis deux personnes âgées. Un jeune homme de 24 ans, Henri, qui passait par là, a tenté de l’arrêter avec son sac à dos mais n’y est pas parvenu. Il n’en fallait pas plus pour que cet étudiant en marketing, qui est en train de faire un tour de France des cathédrales, devienne « le héros au sac à dos » des réseaux dits sociaux. La police, alertée, est intervenue, mettant fin à la course folle, sans tuer l’agresseur, mais en lui tirant dans les jambes.

« En l’état on n’a pas d’éléments qui pourraient nous laisser entendre qu’il y a une motivation terroriste », a déclaré la procureure d’Annecy Line Bonnet-Mathis au cours d’un point de presse sur place, 6 heures plus tard. L’agresseur n’étant sous l’effet ni d’alcool ni de stupéfiants, l’enquête s’oriente donc sur ses antécédents psychiatriques et son état psychologique. Les enquêteurs n’ayant sans doute lu ni Stefan Zweig ni Émile Durkheim, auront fort à faire pour expliquer l’amok.

Au fil des heures, des détails ont émergé sur Abdelmasih Hannoun [traduction littérale : Esclave miséricordieux du Messie] : réfugié en Suède où il s’est marié avec une femme de nationalité suédoise de Trollhättan connue en Turquie, ce chrétien syriaque (“assyrien”) originaire de Hassaké, dans le nord-est de la Syrie, a passé une dizaine d’années en Suède avant de divorcer et de quitter le pays. Il a déposé des demandes d’asile en France, en Italie et en Suisse avant de voir sa première demande d’asile en Suède finalement acceptée le 26 avril 2023, ce qui a entraîné le rejet de sa demande en France, notifié le 4 juin. Ayant obtenu un titre de séjour permanent en Suède en 2013, il avait fait une demande de naturalisation suédoise à partir de 2017, qui a été rejetée trois fois, bien qu’il ait un enfant, aujourd’hui âgé de 3 ans, et qu’il étudie pour devenir infirmier.

Lors de son amok, ce serviteur du messie a crié deux fois : « In the name of Jesus Christ ». Il arborait une croix et avait sur lui, à part son couteau, un livre de prières. Les policiers ne lui donc pas tiré dans la tête, ce qui aurait très certainement été le cas s’il avait crié « Allahou Akhbar ». Ce qui aurait évité à Monsieur Darmanin de se casser la tête sur les “coïncidences troublantes” et calmé “l’effroi qui submerge notre pays” (Aurore Bergé, cheffe du groupe de députés macroniens Renaissance, qui a profité de l’amok savoyard pour dénoncer la “bataille de chiffoniers“ à l’Assemblée nationale autour de la réforme des retraites).

On pourrait donc ajouter cette définition au Dictionnaire des idées reçues :

« Amok : forme de terrorisme quand l’auteur est musulman, acte simplement effrayant et troublant quand l’auteur est chrétien, même s’il est arabe et barbu ».


 

10/10/2022

BARAN QAMISLO
"Femme, Vie, Liberté" : le slogan qui fait vaciller les régimes

Baran Qamişlo , DinamoPress.it, 7/10/2022
Traduit par
Fausto Giudice, Tlaxcala

La révolte au Rojhelat, la résistance civile au Kurdistan du Nord et en Turquie, la résistance dans les montagnes, la révolution du Rojava sont interconnectées, et sont une source d’inspiration pour révoltes qui ont éclaté en Iran. Malheureusement, même la répression, toujours plus violente et préventive, a les mêmes connotations.


Le slogan kurde Jin, Jîyan, Azadî, né au Rojava, s’est répandu dans tout l’Iran dans sa version persane, Zan, Zendegi, Azadi (les langues kurdes et le persan appartiennent au même groupe de langues dites indo-iraniennes). Ci-dessus une fresque murale de Btoy, sur la Schwendergasse à Vienne (Autriche). Ci-dessous une variante iranienne émanant d’un groupe d’artistes anonymes


La mort de Masha/Jina Amini, une Kurde de 22 ans, tombée dans le coma après avoir été tabassée par la police des mœurs iranienne une fois interpellée parce qu'elle avait été surprise dans une rue de Téhéran « portant mal son hijab », a déclenché une série de protestations qui ont entraîné une révolte impliquant toutes les grandes villes iraniennes et de l'est du Kurdistan.

La vague de protestations a ouvert la boîte de Pandore, mettant en lumière une à une toutes les questions non résolues de l'État iranien.

Si le thème le plus évident sur les places ces jours-ci est la répression sociale et politique à laquelle sont soumises surtout les femmes, la rue a exprimé un ras-le-bol généralisé à l'égard de la République islamique et de ses dirigeants : un fait emblématique de cela a été l’incendie par les manifestants du monument à la mémoire de  Qasem Soleimani à Kerman, sa ville natale.

Soleimani a été général des Niru-ye Qods, communément appelées « Forces Quds », la branche des Gardiens de la Révolution (IRGC) qui s'occupe du soutien militaire et politique aux groupes pro-iraniens en dehors des frontières nationales. « Le commandant de l'ombre », comme il a été défini par la presse, est considéré comme l'esprit derrière les vingt dernières années d'influence politique dans la région et le stratège derrière les victoires militaires iraniennes en Irak, à travers les milices chiites rassemblées dans les Hachd al-Chaabi (Forces de mobilisation populaire), et en Syrie aux côtés de Bachar Al Assad,  jusqu'à son assassinat en janvier 2020 par un drone usaméricain à l'aéroport de Bagdad.

Dans ce contexte, l'un des thèmes en suspens depuis longtemps qui mettent maintenant le feu aux poudres, en particulier dans le nord-est, est la répression de l'identité kurde. Comme c'est la coutume pour les Kurdes dans les quatre parties occupées du Kurdistan, la jeune femme tuée avait deux prénoms : Masha sur les documents délivrés par les autorités et Jina, le nom sous lequel elle est connue à Saqqez, la ville où elle vivait, prénom que les parents n'ont pas été autorisés à enregistrer officiellement parce que kurde.

Saqqez fait partie de la région historiquement identifiée comme Rojhelat (du kurmanji « Est », littéralement « Soleil levant »), où vivent environ 10 millions de Kurdes. Dans sa capitale historique, la ville de Mahabad, a été fondée en 1946 sous la direction de Qazi Muhammed, la première république kurde indépendante, bien que de courte durée, appelée « République du Kurdistan ».

Bien que les Kurdes du Rojhelat aient participé activement à la révolution contre la monarchie, mouvement populaire hétérogène à l'origine, ils furent exclus de l’« Assemblée des experts » chargée de rédiger la nouvelle constitution à la chute de la dynastie Palhavi.

Quand les partis kurdes ont dénoncé le fait, l’ayatollah Khomeiny a répondu en lançant une fatwa dans laquelle il a appelé au jihad contre les dissidents, accusés de vouloir « diviser les musulmans avec des demandes nationalistes ». C’est alors qu’a commencé une campagne de guérilla menée par les partis kurdes, qui a pris fin en 1989, lorsque le secrétaire du Parti démocratique du Kurdistan d’Iran (KDPI), Abdul Rahman Ghassemlou, a été assassiné par des agents iraniens munis de passeports diplomatiques, à Vienne où il devait entamer des négociations de paix avec Téhéran.

Au cours des 30 dernières années, la République islamique a opté pour une approche de la question kurde en quelque sorte opposée à celle de l'État turc et plus proche de l'approche du gouvernement syrien. Alors qu'en Turquie le mot Kurdistan est un tabou imprononçable en public, en Iran, il existe même une province appelée Kurdistan mais qui couvre environ un sixième du territoire habité par la population kurde et n’a aucun statut spécial ou d'autonomie de prévu.

18/09/2022

URI MISGAV
1982 : la folle tentative du Mossad de changer le visage du Liban
Les dessous du massacre de Sabra et Chatila : une version israélienne

Uri Misgav, Haaretz, 15/9/2022
Traduit par
Fausto Giudice, Tlaxcala




L'agent du Mossad qui dormait avec un pistolet. Des repas délirants avec Ariel Sharon à Beyrouth. L'orchestre qui jouait “Hava Nagila” pour les espions. À la recherche d’une Rolex dans les ruines.

 Quarante ans après l'assassinat de Bachir Gemayel et les massacres dans les camps de réfugiés de Sabra et Chatila, d'anciens responsables israéliens révèlent le château de cartes qu'Israël a construit au Liban et comment il s'est effondré.

 Sharon et Gemayel gauche, le secrétaire militaire de Sharon, Oded Shamir). Je ne serai pas votre "Armée du Liban Nord", dira Gemayel à Sharon, en colère. Photo : Collection Oded Shamir

Bachir Gemayel se réveille relativement tard le 14 septembre 1982. Il était resté debout jusqu'aux petites heures de la nuit pour rédiger et répéter son discours pour sa prestation de serment présidentielle, qui devait avoir lieu huit jours plus tard. Trois semaines plus tôt, il avait atteint - avec l'aide rapprochée d'Israël - un objectif qui avait été considéré jusqu’à récemment comme fantaisiste, en étant élu, à l'âge de 34 ans, président du Liban multinational et fragmenté.

Un programme chargé était prévu pour lui à Beyrouth ce jour-là, comprenant des entretiens téléphoniques avec les commandants de l'armée libanaise, une visite au couvent maronite où sa sœur bien-aimée, Arza, était nonne et, pour couronner le tout, un discours devant ses partisans au siège du parti Kataeb (Phalanges) dans le quartier d'Achrafieh.

Pendant sa course à la présidence, Gemayel avait pris l'habitude de se présenter à cette occasion politique tous les mardis à 15 heures et, après son élection, il avait décidé de poursuivre la tradition au moins une fois par mois. Naturellement, cela a permis à ses ennemis - à ce stade, avant tout les services de sécurité et de renseignement syriens - de le suivre plus facilement. En fait, après que Gemayel a été élu président, sa vigilance et sa sensibilité à l'égard de sa sécurité personnelle se sont relâchées. Il a commencé à laisser échapper ses gardes du corps de temps en temps et, ce matin-là, il s'est emporté contre un conseiller qui tentait de le mettre en garde à ce sujet. 

Jusque-là, il avait été prudent, et à juste titre. La culture politique au Liban était marquée par une folie meurtrière rampante, non seulement entre les différents groupes ethniques, mais aussi entre les familles et les factions d'un même groupe de population. La première fois que je suis venu à Beyrouth, raconte Avner Azoulay, nommé en 1981 chef du département en charge du Liban au sein de Tevel, la division des relations extérieures du Mossad, j'ai demandé à mon accompagnateur local : "Qu'est-ce qui est bon marché ici ?" Il m'a jeté un regard perçant et m'a répondu : "La vie humaine. C'est ce qui est le moins cher."

Tout au long de sa carrière politique, Gemayel a pris une part active à la violence et aux meurtres. Entre autres événements, dans le cadre des luttes sanglantes pour le contrôle de la communauté chrétienne, Antoine "Tony" Frangieh, le fils d'un ancien président libanais issu d'un hamoula (clan) concurrent, avait été assassiné sur ses ordres, ainsi que sa femme, son fils et d'autres membres de son entourage. Gemayel lui-même avait été la cible d'une tentative d'assassinat, à laquelle il n'avait échappé que parce qu'il avait eu le mal de mer sur un bateau lance-missiles où il tenait l'une de ses nombreuses réunions avec des responsables du gouvernement et des militaires israéliens. Comme il se sentait mal le lendemain matin, il n'a pas emmené sa fille Maya chez sa grand-mère comme prévu.

Ainsi, lorsque la bombe fixée à sa voiture a explosé, Gemayel n'a pas été blessé, mais Maya et le garde du corps personnel de son père, qui l'escortait, ont été tués. Après les funérailles, il a ordonné à ses aides furieux d'attendre le moment opportun pour se venger.

Azoulay, qui était en contact étroit avec Gemayel, l'a imploré après son élection, sur la directive de ses supérieurs, d'accepter l'aide d'une unité du service de sécurité du Shin Bet. "Il ne voulait pas en entendre parler", dit Azoulay. "Il m'a dit : 'Est-ce que cela vous semble raisonnable que le président élu d'un pays arabe se promène avec des gardes du corps israéliens ? Qu'est-ce que vous ne comprenez pas ? J'ai essayé de réfléchir à des idées alternatives. J'ai suggéré de choisir des gars aux cheveux blonds et aux yeux bleus et de dire qu'il s'agissait de techniciens venus d'Europe, pour que personne ne le sache. "En aucun cas", a-t-il dit. Cela n'aurait pas forcément aidé. Je crois que si nous lui avions adjoint des gardes du corps, ils auraient été assassinés en même temps que lui."

Le chef d'état-major Rafael Eitan avec Gemayel, de profil à gauche. Raful appelait le Libanais "mon frère". Crédit : Collection Avner Azoulay

Après le discours au siège du parti, Gemayel devait rencontrer les membres de la sous- commission des renseignements de la commission des Affaires étrangères et de la Défense de la Knesset, qui se trouvaient à Beyrouth pour se faire une idée de la situation. Le mois précédent, les forces de l'Organisation de libération de la Palestine, dirigée par Yasser Arafat, avaient quitté la ville en vertu d'un accord négocié par les USAméricains. Le soir, le président élu avait l'intention de dîner dans le luxueux restaurant Bustan, en compagnie de son ami Ehud Yaari, à l'époque analyste des affaires arabes à la télévision israélienne. Ce dîner n'a jamais eu lieu.